Prévalence et coûts financiers des maladies cognitives au Canada : un rapport de la Société Alzheimer du Canada (2016) - PSPMC: Volume 36-10, octobre 2016
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Promotion de la santé et prévention des maladies chroniques au Canada
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Volume 36 · numéro 10 · octobre 2016
Note de synthèse
Prévalence et coûts financiers des maladies cognitives au Canada : un rapport de la Société Alzheimer du Canada (2016)Note de bas de page 1
Société Alzheimer du Canada
https://doi.org/10.24095/hpcdp.36.10.04f
Contexte
Les estimations de la prévalence des maladies cognitives dans les études populationnelles varient en raison de différences dans la définition même des maladies cognitives, dans les méthodologies et sources de données et dans les types de coûts inclus. Une approche commune est nécessaire pour dissiper toute confusion et pour améliorer la confiance du public et des intervenants à l'égard de ces estimations.
Depuis 1994, cinq études majeures ont dégagé des estimations largement différentes concernant la prévalence et les coûts financiers des maladies cognitives au Canada :
- Étude sur la santé et le vieillissement au Canada, 1994Note de bas de page 2
- Société Alzheimer du Canada. Raz-de-marée : Impact de la maladie d'Alzheimer et des affections connexes au Canada, 2010Note de bas de page 3
- Commission de la santé mentale du Canada. La nécessité d'investir dans la santé mentale au Canada, 2011Note de bas de page 4
- Le fardeau économique de la maladie au Canada, 2014Note de bas de page 5
- Étude nationale de la santé des populations relative aux maladies neurologiques, 2014Note de bas de page 6
Sur la base de ces études, la prévalence des maladies cognitives a été estimée en 2011 selon une fourchette comprise entre 340 170 (estimation basse) et 747 000 (estimation haute). La principale raison de cette différence est l'inclusion ou non du « déficit cognitif léger » (DCL) dans les projections. Les coûts financiers estimés des troubles cognitifs variaient également, dans une fourchette comprise entre 910 millions de dollars et 33 milliards de dollars. Cette différence s'explique majoritairement par (1) le manque de méthodes communes pour estimer les coûts financiers, (2) l'absence d'estimations de la prévalence aux différents stades de la maladie (léger, modéré et avancé), ce qui a un impact direct sur le montant dépensé, et (3) l'absence d'outils pour mesurer plus précisément les coûts directs, indirects et intangibles.
Étant donné le nombre croissant d'enjeux liés aux troubles cognitifs au Canada comme dans le reste du monde, harmoniser ces estimations divergentes est essentiel pour générer les informations fiables pour le public, afin d'orienter l'action publique et l'élaboration de services.
Méthodologie
En mai 2015, après l'examen de ces études et de diverses autres, la Société Alzheimer du Canada a réuni un groupe composé d'épidémiologistes canadiens et étrangers, d'économistes de la santé, d'analystes des politiques ainsi que de représentants des Sociétés Alzheimer provinciales afin d'obtenir leur avis sur la manière d'estimer au mieux la prévalence et les coûts financiers actuels et à venir des maladies cognitives au Canada. Le rapport Prévalence et coûts financiers des maladies cognitives au Canada (2016)Note de bas de page 1 est le fruit de cette collaboration.
Résultats du panel
Estimations concernant la prévalence
Les membres du groupe d'experts étaient tous d'accord sur le fait que l'Étude sur la santé et le vieillissement au Canada (1994)Note de bas de page 2 demeure la source de données populationnelles la meilleure et la plus fiable pour élaborer des estimations et des projections.
Les données contenues dans cette étude sont dérivées d'entrevues et de questionnaires menés auprès de 9 008 personnes âgées d'au moins 65 ans vivant dans la collectivité et de 1 255 personnes vivant dans des établissements de soins de longue durée. Des examens cliniques, neurologiques et neuropsychologiques ont été ensuite réalisés auprès de 2 914 personnes affichant des résultats cognitifs faibles et auprès d'un échantillon aléatoire de personnes présentant des résultats normaux à cette étude.
Une équipe constituée d'un médecin, d'une infirmière et d'un neuropsychologue a ensuite évalué si on devait classer ces personnes comme étant atteintes d'une maladie cognitive « probable » ou « certaine » et de quel type elles étaient atteintes. Cette méthode est conforme à la manière dont un diagnostic est actuellement posé dans un environnement clinique - en utilisant diverses sources de données et les avis de plusieurs professionnels de la santé. Les autopsies - qui constituent pourtant le moyen le plus précis de diagnostiquer un trouble cognitif - sont rarement pratiquées.
Les estimations de la prévalence tirées des données administratives relatives à la santé ne se fondent pas sur une évaluation clinique standardisée, comme c'est le cas pour l'Étude sur la santé et le vieillissement au Canada ou pour les autopsies.
Sur base des projections utilisant les données de l'Étude sur la santé et le vieillissement au Canada (1994)Note de bas de page 2, on estime que 564 000 Canadiens sont atteints en 2016 de maladies cognitives. D'ici 2031, on s'attend à ce que ce chiffre passe à 937 000, soit une augmentation de 66 %. Plus de 65 % des Canadiens actuellement atteints de maladies cognitives sont des femmes.
Estimations des coûts financiers
En estimant les coûts actuels et à venir des maladies cognitives, trois facteurs clés doivent être pris en considération :
- la perspective, qui se focalise sur l'entité qui assume les coûts (par exemple le système public de santé uniquement ou la société dans son ensemble) et inclut les personnes atteintes de troubles cognitifs, leurs aidants ou employeurs,
- la portée, qui s'intéresse à la nature des coûts inclus, par exemple les coûts directs et indirects, informels et intangibles, et
- l'évaluation, qui porte sur la méthode d'attribution d'un coût à une maladie cognitive qui n'existerait pas autrement.
Puisque l'impact financier des maladies cognitives va bien au-delà du système des soins de santé et qu'il a des répercussions énormes, non seulement sur les personnes atteintes mais aussi sur les familles, les aidants et les employeurs, le groupe d'experts a recommandé l'adoption d'une perspective sociétale pour estimer les conséquences économiques de ces maladies. Il a aussi recommandé que sa portée intègre les coûts directs et indirects ainsi que les coûts informels et intangibles. Il a en outre préconisé que l'on compare ces coûts pour les populations atteintes de ces maladies et pour celles qui ne le sont pas.
Le panel d'experts a conclu que l'Étude nationale de la santé des populations relative aux maladies neurologiques (2014)Note de bas de page 6 respectait ces exigences et offrait la meilleure base de projection des coûts financiers associés aux maladies cognitives. Selon cette étude, les coûts totaux du système de soins de santé au Canada et ceux à la charge des aidants se chiffraient à 10,4 milliards de dollars en 2016. On s'attend d'ici 2031 à une augmentation qui porterait ce total à 16,6 milliards de dollars.
De manière générale, on estime que les coûts pour les personnes atteintes sont 5 fois et demie plus importants que ceux pour les personnes qui ne sont pas atteintes par ces maladies. Ce sont les soins à domicile et les soins de longue durée qui contribuent le plus largement aux coûts directs. En 2011, les proches aidants ont fourni 19,2 millions d'heures de soins non rémunérées. On s'attend à un doublement de ce chiffre d'ici 2031.
Applicabilité
La maladie est en croissance du fait d'une population canadienne vieillissante, qu'il n'existe toujours pas de remède, et les traitements pharmacologiques actuels ne sont utiles que pour une certaine période de la progression de la maladie pour certains patients. Les données probantes provenant des pays économiquement développés montrent que la prévalence des maladies cognitives est en baisse sans doute en raison de l'augmentation de la scolarité, d'une meilleure sensibilisation à la santé et, dans certains cas, d'un meilleur contrôle des facteurs de risque associés aux maladies vasculaires. Il est donc particulièrement important de disposer de données précises et fiables sur les troubles cognitifs.
Ces données pour la santé publique doivent offrir :
- une meilleure sensibilisation du public et une compréhension approfondie de l'impact social et personnel des maladies cognitives sur les Canadiens atteints de la maladie et leurs aidants,
- une documentation sur les coûts financiers relatifs aux soins et à la perte de revenus et de productivité,
- des points de référence pour mesurer et évaluer les progrès à venir,
- de l'information liée à la planification des services et au développement des politiques, par exemple une stratégie nationale sur les troubles cognitifs, les politiques de ressources humaines au travail, les projections gouvernementales et les budgets.
L'Agence de la santé publique du Canada a élaboré, en collaboration avec les ministères de la Santé provinciaux et territoriaux, une première définition nationale de cas qui sera utilisée sur une base permanente pour rendre compte de l'épidémiologie de la maladie d'Alzheimer et des autres formes de maladies cognitives (prévalence, incidence et mortalité toutes causes confondues) chez les Canadiens de 65 ans et plus. Les données seront ventilées par sexe, tranche d'âge, année financière et province ou territoire. La première diffusion annuelle de ces données est prévue pour 2017-2018.
Conclusion
Le rapport Prévalence et coûts financiers des maladies cognitives au Canada (2016)Note de bas de page 1 offre une information utile et davantage fiable sur la prévalence des maladies cognitives et sur son impact économique sur la société canadienne. Cela contribue à ce que les Sociétés Alzheimer au Canada ainsi que les organismes poursuivant les mêmes objectifs puissent préparer des campagnes de sensibilisation ou d'autres initiatives publiques, créer de nouveaux programmes et services et élaborer les politiques et la planification des services.
Références
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