Avis de mise en œuvre de l’accès à l’information et de la protection des renseignements personnels 2024 01 : Protéger la vie privée et la sécurité des fonctionnaires
1. Date d’entrée en vigueur
Le présent Avis de mise en œuvre entre en vigueur le 13 novembre 2024.
2. Pouvoirs et autorisations
Le présent Avis de mise en œuvre est publié en application de l’alinéa 70(1)c) de la Loi sur l’accès à l’information (LAI) et de l’alinéa 71(1)d) de la Loi sur la protection des renseignements personnels (LPRP).
3. Objectif
Le présent Avis de mise en œuvre a pour but de guider les bureaux de l’accès à l’information et de la protection des renseignements personnels (AIPRP) des institutions dans la gestion et le traitement des demandes d’accès à l’information et de renseignements personnels de nature sensible lorsque les renseignements demandés amènent un fonctionnaire à craindre pour sa sécurité en raison de ce qu’il est et non en raison du type de travail qu’il accomplit. Les demandes visent des renseignements susceptibles de porter atteinte à la vie personnelle des cadres ou des employés de l’institution fédérale. Le présent avis contient également des conseils sur les situations dans lesquelles un fonctionnaire estime que s’il accuse réception des renseignements ou s’il les communique, ceux-ci pourraient être utilisés pour menacer sa vie, son intégrité corporelle, et sa santé et sa sécurité psychologiques.
4. Contexte
4.1 Préoccupations soulevées par les employés
Les employés de la fonction publique qui sont membres de groupes en quête d’équité (en d’autres termes, ceux qui font face à la discrimination au sens de la Loi canadienne sur les droits de la personne) ont fait part de leurs préoccupations quant au fait que des personnes pourraient soumettre des demandes d’AIPRP dans le but précis de les harceler. Ces demandes ont amené ces employés à craindre pour leur sécurité et leur bien-être.
D’autres demandes d’AIPRP ont été présentées par des personnes qui prétendent rechercher des documents gouvernementaux, mais l’intention apparente de ces personnes était d’intimider un employé avec lequel ils entretenaient une relation personnelle malsaine.
Enfin, dans certains cas, sans que le demandeur le sache, les documents visés contiennent des renseignements qui pourraient poser des problèmes de sécurité pour les employés s’ils étaient communiqués. Par exemple, un employé qui fait l’objet d’une ordonnance restrictive à l’encontre d’une personne peut ne pas souhaiter que son lieu de travail soit communiqué.
4.2 Objet de la Loi sur l’accès à l’information
Objet de la LAI tel qu’il est énoncé à l’article 2 de la LAI
[...] d’accroître la responsabilité et la transparence des institutions de l’État afin de favoriser une société ouverte et démocratique et de permettre le débat public sur la conduite de ces institutions.
À cet égard, le paragraphe 2(2) de la LAI permet de présenter des demandes en vertu de la partie 1 de la LAI. Il s’agit d’une disposition quasi constitutionnelle qui favorise la responsabilité et la transparence. Toutefois, dans certaines circonstances, d’autres intérêts ont priorité sur ce droit d’accès, dont la protection des renseignements personnels. Le ministère de la Justice note que « la protection de la confidentialité des renseignements personnels constitue l’une des plus importantes exceptions au droit d’accès »Note de bas de page 1.
Afin d’établir un juste équilibre entre la protection des renseignements personnels et les obligations de transparence dans le cadre des demandes d’AIPRP, des exceptions à la définition de « renseignements personnels » ont été prévues pour les cadres et les employés des institutions fédérales. Ces exceptions tiennent compte du fait qu’il existe certains renseignements, à l’exception d’autres éléments à prendre en considération, que le public a le droit de connaître. Toutefois, les fonctionnaires ne renoncent pas à tous leurs droits à la vie privée malgré leur choix d’employeur, comme ce qui a été envisagé dans l’affaire Canada (Commissaire à l’information) c. Canada (Commissaire de la Gendarmerie royale du Canada), 2003 CSC 8 (au paragraphe 8).
En pratique, les documents contiennent souvent à la fois des renseignements personnels et des renseignements personnels qui sont visés par les exceptions prévues par la LPRP. Les institutions voudront peut-être faire valoir plus fermement la décision rendue dans l’affaire Terry c. Canada (Ministre de la Défense nationale), [1994] T-845-94Note de bas de page 2, dans laquelle la Cour s’est appuyée sur la règle d’interprétation connue comme étant expressio unius est exclusio alterius, ce qui signifie « la mention de l’un implique l’exclusion de l’autre ». Selon cette règle, pour être visés par l’exception prévue, les renseignements demandés doivent en faire partie intégrante. Lorsque l’essentiel du document est davantage axé sur la personne plutôt que sur les caractéristiques générales associées à son poste ou à ses fonctions, il existe une plus grande probabilité qu’il s’agisse de renseignements personnels non visés par l’exception, et il est moins probable que le prélèvement de parties du document soit possible, car il y a un plus grand risque de repersonnalisationNote de bas de page 3.
Dans l’exercice de leur pouvoir discrétionnaire de ne pas communiquer les renseignements, les institutions peuvent tenir compte du fait que la demande a un objet contraire au paragraphe 2(2) de la LAI. C’est notamment le cas lorsque les demandes visent à obtenir des renseignements sur des fonctionnaires qui sont liés aux motifs de discrimination interdits ou qui visent à les harceler.
4.3 Besoins des employés
En tant qu’employeur, la fonction publique fédérale est tenue, en vertu de l’article 124 et du paragraphe 125(1) du Code canadien du travail, de veiller à ce que la santé et la sécurité au travail de chaque employé soient protégées, notamment en prenant les mesures nécessaires pour prévenir les accidents, les cas de harcèlement et de violence et les blessures et maladies physiques ou psychologiques. Les fonctionnaires doivent pouvoir effectuer leur travail, y compris répondre aux demandes d’AIPRP, sans craindre pour leur bien-être, leur sécurité et que leurs renseignements personnels soient compromis. Ils doivent également pouvoir faire part à leur employeur, ou à des personnes de confiance, de leurs besoins sur le lieu de travail. Ils doivent pouvoir exprimer leurs sentiments et leurs préoccupations, et avoir la certitude que leurs renseignements sont protégés contre toute communication. Dans certains cas, un employé peut être amené à communiquer des renseignements personnels à son employeur dans le cadre de son travail. Enfin, il existe des dispositions relatives à l’utilisation personnelle acceptable des réseaux et appareils électroniques sur son propre temps (par exemple, pendant les pauses et le dîner), à condition que cette utilisation n’interfère pas avec les responsabilités officielles ou la conduite des activités professionnelles normales.
5. Conseils
5.1 Éléments à prendre en considération
Au moment de traiter les demandes d’AIPRP qui amènent un fonctionnaire à craindre pour sa sécurité en raison de ce qu’il est et non en raison de son travail, il convient de tenir compte des éléments suivants :
- la notion des renseignements relevant d’une institution fédérale;
- la disposition s’appliquant à l’autorisation de ne pas donner suite à la demande (article 6.1 de la LAI);
- la dispense de divulgation de l’existence du document dont la communication n’est pas obligatoire [paragraphe 10(2) de la LAI, paragraphe 16(2) de la LPRP];
- les exceptions prévues aux articles 17 et 19 de la LAI et aux articles 25 et 26 de la LPRP;
- les consultations internes.
5.1.1 La notion des renseignements relevant d’une institution fédérale
Selon le paragraphe 4(1) de la LAI et l’alinéa 12(1)b) de la LPRP, le droit d’accès à l’information prévu par ces lois ne s’applique qu’aux documents relevant des institutions fédérales. Une première étape importante en ce qui concerne le critère de cette notion consiste à déterminer si le contenu des documents se rapporte à une question institutionnelle, en d’autres termes, s’il est en lien avec le mandat, les obligations, les activités et les fonctions de l’institution. Les lois n’ont pas pour objet de prendre en compte les documents relatifs à des questions non institutionnelles qui se trouvent en possession des institutions fédérales. Par exemple, elles n’ont pas pour objet de prendre en compte les documents relatifs au cas d’un employé qui ne se sent pas en sécurité chez lui et qui utilise donc son compte de courriel professionnel pour demander de l’aide ou des conseils juridiques. Parmi d’autres exemples figure l’utilisation à d’autres fins que pour le travail des appareils fournis par le gouvernement, qui est autorisée conformément à l’annexe A de la Directive sur les services et le numérique. En raison de ces cas d’utilisation autorisés, de l’information sans rapport avec le travail se trouve sur des serveurs au travail. C’est ce qui s’est passé dans l’affaire Ville d’Ottawa c. Ontario, 2010 ONSC 6835 (en anglais seulement).
Bien que la jurisprudence indique que les courriels de nature personnelle des employés du gouvernement ne relèvent généralement pas d’une institution, si les renseignements qu’ils contiennent ont été utilisés à des fins liées au mandat de l’institution (par exemple, ce qui pourrait être considéré comme des activités de ressources humaines), la conclusion sur s’ils relèvent de l’institution pourrait être différente. Il peut en être ainsi si les courriels demandés se rapportent à une enquête menée sur d’éventuelles utilisations abusives des ressources électroniques du gouvernement ou à un conflit d’intérêts, ou à des questions liées à l’emploi, comme le sentiment de sécurité sur le lieu de travail.
Les institutions qui reçoivent des demandes d’accès à l’information sont tenues d’effectuer des recherches raisonnables pour trouver les documents pertinents parmi ceux qu’elles détiennent. Si la question est de savoir si certains documents relèvent d’une institution, les personnes investies du pouvoir délégué de l’institution en vertu de la LAI et de la LPRP doivent examiner les documents et déterminer s’ils relèvent de l’institution. La responsabilité de cette détermination incombe uniquement aux personnes investies du pouvoir délégué de l’institution, qui doivent obtenir les documents. Cette responsabilité n’incombe pas au bureau de première responsabilité (BPR) de l’institution ni à quiconque d’autre.
Selon la nature et la sensibilité des documents, les bureaux de l’AIPRP peuvent mettre en place des procédures pour l’examen des documents, sans toutefois conserver des copies de ces documents dans leur dépôt. Ces procédures sont semblables à celles mises en place pour les documents d’un cabinet de ministre. Elles permettent de veiller à ce que le bureau de l’AIPRP ne détienne pas de documents qu’il n’a pas le droit d’avoir en sa possession ou dont il n’a pas la garde, s’il est établi que les documents ne relèvent pas de l’institution. Les employés peuvent conserver des objets personnels sur leur lieu de travail sans que ceux-ci soient considérés comme étant sous la garde de l’employeur et détenus par celui-ci en ce qui concerne les demandes d’AIPRP, et une confirmation visuelle par le bureau de l’AIPRP peut suffire. Ces objets seront consignés dans le dossier de traitement. Pour obtenir d’autres instructions sur la détermination des documents relevant d’une institution, veuillez- vous reporter au Manuel de l’accès à l’information, au Manuel des demandes de renseignements personnels et au guide Interprétation : documents relevant d’une institution du Commissariat à l’information du Canada.
5.1.2 La disposition s’appliquant à l’autorisation de ne pas donner suite à la demande (article 6.1 de la Loi sur l’accès à l’information)
L’article 6.1 de la LAI prévoit que le responsable d’une institution fédérale peut ne pas donner suite à une demande d’accès à l’information, avec l’autorisation écrite de la Commissaire à l’information, s’il estime que la demande :
- est vexatoire;
- entachée de mauvaise foi;
- constitue autrement un abus du droit de faire une demande de communication.
L’obtention d’une telle autorisation peut avoir pour effet d’éliminer le droit d’accès explicite d’un demandeur lié à la demande en question. Compte tenu de l’importance du droit d’accès, les demandes d’autorisation de ne pas donner suite à une demande d’accès à l’information doivent être étayées par des motifs clairs et convaincants qui sont suffisamment détaillés.
En outre, les institutions ne peuvent demander à la Commissaire à l’information l’autorisation de ne pas donner suite à une demande d’accès à l’information qu’après avoir fait tous les efforts raisonnables pour aider le demandeur, comme l’exige le paragraphe 4(2.1) (obligation de prêter assistance).
Les concepts de conduite vexatoire, de mauvaise foi et d’abus sont examinés tour à tour dans la décision 2020 CI 17, l’ordonnance M-850 (Commissaire à l’information et à la protection de la vie privée de l’Ontario) (en anglais seulement) et l’ordonnance MO-4257 (en anglais seulement).
Par vexatoire, on entend généralement l’intention de contrarier, de harceler, d’embarrasser ou de causer un malaise. Toutefois, dans le contexte d’une demande de refus de donner suite à une demande d’accès, la conduite vexatoire doit être plus qu’une question de contrariété ou de désagrément.
La mauvaise foi est généralement considérée comme le contraire de la bonne foi. La « mauvaise foi » sous-entend généralement une intention d’induire quelqu’un en erreur ou de tromper autrui, non pas en raison d’une erreur honnête quant à ses droits, mais en raison d’un motif intéressé ou malveillant.
Par abus, on entend généralement un usage excessif ou inapproprié.
Chaque demande présentée au Commissariat à l’information visant un refus de donner suite à une demande d’accès à l’information est examinée au cas par cas et évaluée objectivement. Les éléments de preuve présentés au Commissariat à l’information peuvent comprendre un historique documenté de demandes redondantes, des communications entre le bureau de l’AIPRP et le demandeur (y compris si ces communications comprennent un langage abusif), et des déclarations publiques faites par le demandeur au sujet de sa demande d’accès à l’information.
Pour obtenir d’autres informations, voir le document d’orientation publié par le Commissariat intitulé Processus : demander l’autorisation de la Commissaire à l’information pour ne pas donner suite à une demande d’accès en vertu de l’article 6.1.
Il n’existe pas de disposition équivalente à l’article 6.1 de la LAI dans la LPRP.
5.1.3 La dispense de divulgation de l’existence d’un document dont la communication n’est pas obligatoire [paragraphe 10(2) de la LAI, paragraphe 16(2) de la LPRP]
Le paragraphe 10(2) de la LAI et le paragraphe 16(2) de la LPRP n’obligent pas une institution à faire état de l’existence d’un document ou de renseignements personnels. Dans certaines situations, les institutions peuvent choisir de « ni confirmer ni nier » l’existence d’un document ou de renseignements personnels en invoquant les paragraphes 10(2) ou 16(2).
Dans certains cas, la communication des documents ou des renseignements demandés pourrait nuire à la sécurité d’une personne ou porter atteinte à son droit à la vie privée, sans toutefois y avoir une preuve évidente que la demande est vexatoire, de mauvaise foi ou abusive. La demande semble plutôt viser des documents directement liés à de l’information gouvernementale qui devrait être accessible au public, sous réserve d’exceptions limitées et spécifiques au droit d’accès. Par exemple, la demande vise à obtenir des mentions du demandeur lors de rendez-vous dans le cadre du Programme d’aide aux employés. Compte tenu de la nature et du contenu des documents visés, cela pourrait, par exemple, mettre en danger la sécurité de l’employé. Il s’agit d’un cas dans lequel le texte de la demande est rédigé de telle manière qu’en reconnaissant l’existence ou la non-existence d’un document, il pourrait à lui seul communiquer des renseignements à un demandeur.
Lorsqu’elle invoque ces paragraphes, l’institution doit indiquer la disposition (exception ou exclusion) sur laquelle il serait raisonnablement possible de s’attendre à ce que le refus d’accès au document ou aux renseignements personnels soit fondé, si elle existe.
5.1.4 Exception : renseignements personnels
L’article 19 de la LAI protège les renseignements personnels et l’article 26 de la LPRP, les renseignements personnels concernant une autre individu.
Selon l’article 3 de la LPRP, renseignements personnels s’entend de « renseignements, quels que soient leur forme et leur support, concernant un individu identifiable ». Il s’agit par exemple de renseignements relatifs aux revenus, à l’ADN, à l’orientation sexuelle ou à l’orientation politique d’une personne identifiable. Toutefois, l’alinéa 3j) de la LPRP prévoit une exception importante à la définition des renseignements personnels lors de l’application des deux exceptions en question. En vertu de l’alinéa 3j), les renseignements personnels ne comprennent pas les renseignements concernant :
j) un cadre ou employé, actuel ou ancien, d’une institution fédérale et portant sur son poste ou ses fonctions, notamment :
- (i) le fait même qu’il est ou a été employé par l’institution,
- (ii) son titre et les adresse et numéro de téléphone de son lieu de travail,
- (iii) la classification, l’éventail des salaires et les attributions de son poste,
- (iv) son nom lorsque celui-ci figure sur un document qu’il a établi au cours de son emploi,
- (v) les idées et opinions personnelles qu’il a exprimées au cours de son emploi; […].
Les employés du gouvernement doivent donc comprendre que ce qu’ils communiquent dans le cadre de leur emploi peut être visé par l’exception à la définition de renseignements personnels et pourrait donc être communiqué dans le cadre d’une demande d’AIPRP. Un exemple d’exception au titre de l’alinéa 3j) est le bloc-signature d’un fonctionnaire, qui (en fonction de ce qu’il choisit d’insérer dans sa communication) indique souvent comment le fonctionnaire souhaite qu’on s’adresse à lui sur le lieu de travail, notamment les certifications professionnelles, les titres honorifiques et les pronoms personnels.
Le nom d’une personne figurant sur un document et les opinions ou points de vue personnels exprimés dans le cadre de l’emploi sont généralement visés par les exceptions énoncées aux sous-alinéas 3j)(iv) et (v) de la définition de « renseignements personnels ». Toutefois, il subsiste une attente raisonnable en matière de protection de renseignements personnels pour les employés ou les cadres d’une institution fédérale en ce qui concerne les documents qui sont uniquement de nature personnelle ou liés au rendementNote de bas de page 4. Si l’objet d’une demande d’accès à l’information vise à vérifier l’identité sexuelle d’une personne ou son rendement au travail, ou si les documents visés contiennent des renseignements de nature privée, mais sont encore indirectement liés à des questions institutionnelles, comme les sentiments à l’égard du travail, les bureaux de l’AIPRP devraient envisager d’appliquer le paragraphe 19(1).
Les exceptions à la définition de renseignements personnels doivent être interprétées de façon restrictive. Les exceptions prévues aux alinéas j), j.1), k) et l) tiennent compte du fait qu’il existe certains renseignements sur les employés du gouvernement, les personnes qui fournissent des services en vertu d’un contrat conclu avec une institution fédérale et les avantages discrétionnaires que le public a le droit de connaître, sauf pour d’autres éléments à prendre en considération. Elles ne sont pas destinées à donner un aperçu des éléments qui sont, de par leur nature, personnels qu’un fonctionnaire a pu écrire dans sa correspondance.
5.1.5 Exception : sécurité des individus
Selon l’article 17 de la LAI et l’article 25 de la LPRP, le responsable d’une institution fédérale peut refuser de communiquer tout document contenant des renseignements dont la divulgation risquerait vraisemblablement de nuire à la sécurité des individus.
L’éventail des intérêts individuels liés à la sécurité susceptible d’être compromis est relativement large puisqu’il englobe la vie, l’intégrité corporelle et la santé psychologique d’une personne.
Comme l’indiquent plus en détail le Manuel de l’accès à l’information et le Manuel des demandes de renseignements personnels, le type de renseignements protégés par cette exception peut comprendre non seulement le nom de la personne, mais aussi tout identifiant ou autre type de renseignements susceptible, s’il était communiqué, en lui-même ou par un « effet de mosaïque », de nuire à la sécurité de la personne. Il peut s’agir de renseignements qui révèlent directement ou indirectement l’identité, l’adresse du domicile ou tout autre identifiant de cette personne.
Pour un employé d’une institution fédérale, l’exception peut s’appliquer à des renseignements qui ne sont pas normalement protégés, tels que le nom de l’employeur de la personne, son lieu de travail, l’adresse de son lieu de travail ou le titre de son poste. L’exception peut également s’appliquer à des renseignements accessibles au public qui peuvent être mis en correspondance avec d’autres données pour révéler des renseignements susceptibles de nuire à la sécurité d’une personne.
Lorsqu’elle fait valoir l’applicabilité de ces exceptions, l’institution doit être en mesure de démontrer qu’il existe des motifs raisonnables de croire que la communication des renseignements mettrait en péril la sécurité d’une personne.
Le critère subjectif peut être satisfait moyennant quelques éléments probants au minimum démontrant que la probabilité est considérablement plus grande que de simples spéculations, mais quelque peu inférieure à « plus probable qu’improbable » et que la sécurité des personnes est ou sera menacée si les renseignements étaient communiqués. Ces éléments peuvent se fonder sur des incidents au cours desquels un comportement agressif visait une personne ou plusieurs personnes en particulier, la nature de l’emploi d’une personne, ou l’information concernant des menaces réelles.
5.1.6 Consultations internes
Pendant le traitement d’une demande, un BPR peut fournir des documents en réponse à une demande de nature administrative ou courante, par exemple les registres d’accès. Même si le BPR n’est pas au courant que les employés concernés par la demande ont des préoccupations quant à leur sécurité, il peut tout de même s’appuyer sur des conseils donnés précédemment pour des demandes similaires ou sur la jurisprudence pour recommander la communication des documents.
Ces scénarios sont surtout susceptibles de se produire lorsque les demandes contiennent des renseignements personnels qui sont visés par l’exception de la définition pour les fonctionnaires. Par exemple, dans l’affaire Dagg c. Canada (Ministre des Finances), [1997] 2 RCS 403, le demandeur souhaitait obtenir des renseignements sur les feuilles de présence indiquant le nombre d’heures passées sur le lieu de travail afin d’informer le syndicat dans le cadre des négociations collectives. La Cour a déterminé que les renseignements étaient visés par l’exception de la définition des renseignements personnels et qu’ils devaient être communiqués au demandeur. Dans ce cas, les renseignements demandés avaient pour but d’aider les employés à prendre position sur leur rémunération. Certaines institutions peuvent invoquer l’affaire Dagg c. Canada (Ministre des Finances), [1997] 2 RCS 403 pour justifier la communication de documents courants tels que les feuilles de présence, en particulier lorsque rien n’indique que les renseignements peuvent être utilisés pour identifier ou prendre pour cible un employé en particulier. Toutefois, quelle que soit la jurisprudence antérieure sur l’interprétation et l’application de l’article 19 de la LAI (ou de l’article 26 de la LPRP) ou de l’article 17 de la LAI (ou de l’article 25 de la LPRP), l’application des exceptions doit toujours être examinée au cas par cas pour chaque nouvelle demande.
Les bureaux de l’AIPRP peuvent communiquer avec les responsables de la sécurité de leur institution pour déterminer s’il existe des préoccupations imminentes au sein de l’institution, sur la base du besoin de savoir. Par exemple, le personnel de sécurité peut être au courant d’ordonnances restrictives concernant un employé qui pourraient être pertinentes pour une demande d’accès à l’information. Si la sécurité d’un employé fait l’objet de préoccupations constantes, le personnel de sécurité peut dresser une liste de noms de personnes en vue d’une diffusion restreinte au sein du bureau de l’AIPRP. Si les renseignements demandés concernent un employé figurant sur la liste, le bureau de l’AIPRP peut consulter le personnel de sécurité et recommander toute exception pertinente.
5.2 Communication avec les employés et les bureaux de première responsabilité
Si, à un moment quelconque pendant le traitement d’une demande en vertu de la LAI ou de la LPRP, un employé ou un BPR fait part de préoccupations concernant sa sécurité et son bien-être, ou la sécurité et le bien-être d’autres personnes en lien avec une demande de documents pertinents ou la communication de ceux-ci, il faut traiter ces préoccupations avec sérieux et compassion. Les conseils présentés aux paragraphes suivants ont pour but d’aider les analystes de l’AIPRP à répondre à ces préoccupations.
5.2.1 Faire preuve de transparence et d’ouverture pendant le traitement des demandes
Pour rassurer les employés sur le fait que des mesures seront prises pour assurer leur sécurité et leur bien-être, tout en respectant les obligations légales prévues par les lois, les analystes de l’AIPRP peuvent :
- communiquer les mesures qui seront prises pour examiner les documents pertinents;
- établir une compréhension claire de la notion des renseignements relevant d’une institution fédérale et de la manière dont elle est liée aux demandes;
- fournir des informations sur la manière d’appliquer les exceptions aux documents et les exceptions qui peuvent s’appliquer (en indiquant que la décision de communiquer certains renseignements reste à la discrétion du responsable de l’institution ou de son délégué et dépendra également du contexte des documents examinés);
- collaborer avec le personnel de la sécurité et des ressources humaines de l’institution pour soutenir la personne, en tenant compte des responsabilités du gouvernement en tant qu’employeur en matière de prévention et de protection contre le harcèlement et la violence sur le lieu de travail;
- assurer le suivi auprès de la personne pour savoir ce qui a été communiqué.
Les bureaux de l’AIPRP peuvent tirer parti des mesures de soutien institutionnelles pour protéger et rassurer les employés qui craignent pour leur sécurité.
5.2.2 Déterminer si les documents ou la demande s’alignent sur l’objet ou le champ d’application des lois
Notion des renseignements relevant d’une institution fédérale
Dans les situations où les employés ont trouvé des documents en leur possession qui, selon eux, ne sont pas liés à des questions institutionnelles, mais qui font partie de la portée du texte de la demande, les bureaux de l’AIPRP peuvent guider ces employés dans leurs procédures internes en matière des renseignements relevant d’une institution. Il est important de rappeler aux employés que ces types de discussions peuvent être documentés dans les dossiers de traitement afin de satisfaire aux exigences des politiques et des directives. Cette information peut être communiquée par la suite au Commissariat à l’information ou au Commissariat à la protection de la vie privée en cas de plainte déposée en vertu de la loi concernée.
Décider de ne pas donner suite à une demande en vertu de la Loi sur l’accès à l’information
Si un employé craint pour sa sécurité et son bien-être et que l’institution a des éléments probants indiquant qu’une demande d’accès à l’information est vexatoire, est faite de mauvaise foi ou constitue autrement un abus du droit de demander l’accès à des documents, le responsable de l’institution peut envisager la possibilité de demander à la Commissaire à l’information l’autorisation écrite de ne pas donner suite à la demande.
Les bureaux de l’AIPRP doivent s’assurer que les employés concernés connaissent les étapes à suivre pour demander à la Commissaire à l’information l’autorisation de ne pas donner suite à la demande. Tout d’abord, les institutions ne doivent ménager aucun effort raisonnable pour aider le demandeur, conformément au paragraphe 4(2.1) de la LAI, avant de demander à la Commissaire à l’information l’autorisation de ne pas donner suite à la demande. Lorsque l’institution fédérale demande l’approbation de la Commissaire, elle doit aviser par écrit le demandeur que le traitement de la demande a été suspendu. Enfin, elle doit fournir au demandeur les résultats de la décision de la Commissaire à l’information.
Indiquer si un document existe n’est pas obligatoire
Les bureaux de l’AIPRP peuvent expliquer aux employés la possibilité de ne pas confirmer ni nier l’existence de documents dans certaines circonstances, en fonction du libellé de la demande. Un bon exemple serait si la simple confirmation de l’existence de documents en réponse à une demande révèle en soi des renseignements qui pourraient faire l’objet d’une exception en vertu d’une disposition de la LAI ou de la LPRP.
5.2.3 Formation sur l’accès à l’information et la protection des renseignements personnels et son lien avec les pratiques exemplaires en matière de gestion de l’information
Le paragraphe 4.1.2 de la Directive sur les demandes d’accès à l’information et de la Directive sur les demandes de renseignements personnels et de correction des renseignements personnels exige que les employés des institutions fédérales et les fonctionnaires qui ont une responsabilité fonctionnelle ou déléguée dans l’application des dites lois reçoivent une formation conformément à l’annexe B : Procédures obligatoires pour la formation en matière d’accès à l’information de la LAI et à l’annexe B : Procédures obligatoires pour la formation en matière de protection des renseignements personnels de la LPRP. Lors de la formation sur l’AIPRP, les institutions peuvent rappeler aux employés le lien qui existe entre leur droit à la vie privée et les obligations de transparence prévues par les lois, en particulier en ce qui concerne les exceptions à la définition des renseignements personnels énoncées à l’alinéa 3j) de la LPRP. Il est primordial d’adopter de bonnes pratiques en matière de gestion de l’information et des principes rigoureux de protection des renseignements personnels pour s’assurer que les renseignements relatifs aux employés sont correctement protégés. Lorsque des renseignements personnels sont mêlés à des renseignements de documents ayant une valeur opérationnelle, il est plus probable qu’ils soient pertinents dans le cadre d’une demande d’AIPRP. Cette situation est particulièrement fréquente lorsqu’il est question de courriels, mais le Commissariat à l’information propose deux pratiques exemplaires en la matière :
- ne pas mélanger les messages personnels (non liés au travail) et les messages opérationnels : afin d’éviter que des messages personnels soient inclus dans une demande d’accès à l’information, évitez de les mélanger avec des messages à valeur opérationnelle;
- aborder uniquement un sujet dans une chaîne de messages : résistez à la tentation de demander à un collègue des nouvelles d’un autre projet ou dossier dans une chaîne de courriel déjà commencée.
Toutefois, si les documents contiennent ce genre de scénarios, il faut rappeler au BPR et aux employés que, dans la mesure du possible, le bureau de l’AIPRP travaillera avec eux pour s’assurer que leurs vie privée est toujours protégé.
6. Application
Le présent Avis de mise en œuvre s’applique aux institutions fédérales au sens de l’article 3 de la LAI et de la LPRP, notamment les sociétés d’État mères et leurs filiales en propriété exclusive. Il ne s’applique pas à la Banque du Canada.
7. Documents de référence
7.1 Lois et code
7.2 Instruments de politique du Conseil du Trésor connexes
7.3 Documents d’orientation connexes
8. Demandes de renseignement
Les membres du public peuvent communiquer avec le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada - Demandes de renseignements du public pour obtenir des renseignements sur le présent Avis de mise en œuvre.
Les employés des institutions fédérales peuvent contacter leur coordonnateur de l’accès à l’information et de la protection des renseignements personnels (AIPRP) pour obtenir des renseignements sur le présent Avis de mise en œuvre.
Les coordinateurs de l’AIPRP peuvent envoyer un courriel à l’adresse ippd-dpiprp@tbs-sct.gc.ca pour obtenir des renseignements au sujet du présent Avis de mise en œuvre.
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