Étiquetez-les! Faciliter la tâche des consommateurs qui souhaitent magasiner pour des services de télécommunications
Discours
Notes d’allocution de Brad Callaghan, sous-commissaire délégué à la Direction de la politique, de la planification et de la promotion; et Jonathan Fonberg, scientifique principal en sciences comportementales, Unité des perspectives comportementales
Déclaration d’ouverture à l’audience du CRTC concernant l’Avis de consultation CRTC 2024-318
Le 13 juin 2025
Gatineau (Québec)
(Le discours prononcé fait foi)
Bonjour, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Commissaires, ainsi que les membres du personnel du Conseil. Merci de nous offrir l’occasion de comparaître aujourd’hui sur le territoire non cédé de la Nation algonquine anishinabeg, au nord du Kichi Zibi.
Je m’appelle Brad Callaghan et je suis sous-commissaire délégué à la Direction de la politique, de la planification et de la promotion du Bureau de la concurrence du Canada.
Permettez-moi de présenter les membres de notre groupe. À ma droite :
- Ben Klass, agent du droit de la concurrence, Direction de la politique, de la planification et de la promotion;
- Derek Leschinsky, avocat principal, Services juridiques du Bureau de la concurrence.
À ma gauche :
- Jonathan Fonberg, scientifique principal en sciences comportementales, Unité des perspectives comportementales;
- Émilie-Ève Gravel, chef de l’Unité des perspectives comportementales du Bureau.
Le Bureau de la concurrence est un organisme indépendant d’application de la loi qui protège la concurrence et en fait la promotion au bénéfice des consommateurs et des entreprises canadiennes. Nous sommes une organisation axée sur les données probantes : nous sommes guidés par l’intérêt public, et non par des intérêts commerciaux, tout comme le CRTC.
Nous espérons que notre participation à la présente consultation contribuera à l’adoption de mesures servant l’intérêt public en favorisant la concurrence.
Les services de télécommunications, tels que l’accès à Internet résidentiel et la connectivité mobile, sont devenus essentiels à la vie contemporaine. Depuis la pandémie, les Canadiens et Canadiennes d’un océan à l’autre dépendent plus que jamais de ces services que ce soit pour rester en contact avec leur famille et leur communauté, pour apprendre, travailler, se divertir ou faire des affaires.
Des politiques favorisant une concurrence dynamique sur le marché permettent à la majorité de la population d’accéder à une gamme de services novateurs, adaptés à leurs besoins, et offerts à des prix concurrentiels.
De plus, vos codes concernant la téléphonie sans fil, l’accès à Internet et les services de télévision ont contribué à renforcer la transparence et à outiller les consommateurs afin qu’ils puissent faire des choix éclairés entre les services et les fournisseurs, selon leurs propres critères.
Malgré ces progrès positifs, certains signaux indiquent que des efforts restent à faire et la concurrence demeure un levier essentiel pour atteindre vos objectifs de politiques publiques.
À l’heure où la technologie, les marchés et les modes de communication évoluent rapidement, nous considérons cette consultation comme une occasion de consolider les acquis et de maintenir cet élan.
Dans notre intervention, nous avons formulé plusieurs recommandations qui, espérons-le, contribueront à renforcer la dynamique concurrentielle et à accroître le choix des consommateurs sur les marchés des télécommunications au Canada.
Nos recommandations s’appuient sur le principe général selon lequel une information claire et l’absence d’obstacles au changement pour les consommateurs sont des conditions essentielles à la concurrence. Lorsque l’un ou l’autre de ces éléments fait défaut, cela ouvre la porte à l’exercice d’un pouvoir de marché, avec des effets potentiellement négatifs pour les consommateurs et pour l’économie dans son ensemble.
Pour formuler nos recommandations, nous avons procédé à une recherche documentaire approfondie, mené des consultations auprès des parties prenantes, y compris auprès d’autres autorités de réglementation nationales et internationales et sollicité l’expertise de nos spécialistes en sciences comportementales, présents aujourd’hui. Cet ensemble d’approches nous a permis d’intégrer à nos recommandations des pratiques exemplaires, fondées sur des données probantes, afin d’habiliter les consommateurs.
Permettez-moi maintenant de présenter brièvement nos recommandations et d’expliquer pourquoi, selon nous, leur adoption serait bénéfique.
Premièrement, nous appuyons l’adoption d’un format type « tableau de renseignements normalisés », inspiré de l’étiquette nutritionnelle, afin de fournir une information claire et comparable aux clients.
Quatre participants sur cinq à la recherche sur l’opinion publique du CRTC estiment que « des renseignements normalisés présentés dans un format reconnaissable, comme une étiquette nutritionnelle pour les services Internet résidentiels », seraient bénéfiques.
Nous partageons cet avis : l’expérience dans le secteur de l’alimentation montre que les étiquettes constituent un outil efficace et adaptable pour transmettre des renseignements complexes, mais essentiels, sur les biens et services.
D’un point de vue concurrentiel, permettre aux consommateurs de comparer plus facilement les services et les fournisseurs leur donne le pouvoir de choisir en fonction de leurs besoins particuliers. Lorsque les consommateurs disposent des bons renseignements et peuvent plus facilement changer de fournisseur, les entreprises doivent redoubler d’efforts pour répondre à leurs attentes.
La Federal Communications Commission des États-Unis (FCC) a déjà effectué un travail rigoureux pour adapter l’étiquette nutritionnelle aux services Internet à large bande fixes et mobiles. Selon nous, le résultat de leur processus réglementaire constitue une excellente base dont le CRTC pourra s’inspirer dans l’élaboration d’une version « faite pour le Canada » de l’étiquette.
Qu’entendons-nous par une étiquette « faite pour le Canada »?
Dans l’ensemble, son format devrait ressembler à celui de la FCC : les renseignements sur le prix, la performance et d’autres caractéristiques essentielles du service seraient présentés dans un format déjà familier aux consommateurs canadiens, avec cependant quelques différences clés.
À notre avis, le prix mensuel affiché sur l’étiquette canadienne devrait représenter un prix « tout compris », incluant tous les frais fixes et obligatoires, contrairement à l’approche de la FCC qui affiche un prix de base auquel s’ajoutent des frais additionnels. Cela s’explique par le fait que la Loi sur la concurrence interdit « l’indication de prix partiel » : il ne faudrait pas permettre aux fournisseurs d’afficher un prix irréaliste, auquel s’ajoutent par la suite des frais fixes ou obligatoires, qui augmentent le prix réel payé par les consommateurs.
L’adoption d’une approche « tout compris » garantirait la conformité de l’étiquette avec les dispositions de la Loi sur la concurrence relatives à « l’indication de prix partiel ».
De même, toutes les publicités et informations contenues dans les politiques et avis doivent être cohérentes avec les renseignements figurant sur l’étiquette. Dans la mesure où l’étiquette fait référence à des avertissements ou à des notes légales, ceux-ci ne doivent pas être utilisés pour restreindre, contredire ou neutraliser les messages publicitaires, ni pour justifier des pratiques de représentation trompeuse ou déloyale.
Dans l’ensemble, cette approche permet de rendre l’information simple, pertinente et facilite la comparaison équitable entre services.
Deuxièmement, nous considérons que le recours à l’étiquette serait aussi avantageux pour les utilisateurs de services sans fil et pour la concurrence au sein de ce secteur.
Tout comme l’accès à Internet résidentiel, les services de téléphonie mobile sont essentiels pour presque tout le monde au Canada. Les données de la Commission des plaintes relatives aux services de télécom-télévision (CPRST) et du CRTC indiquent d’ailleurs que les Canadiens et Canadiennes rencontrent fréquemment des difficultés avec ces deux types de services.
Au Canada, chaque opérateur de réseau mobile propose également l’accès à Internet résidentiel, ce qui signifie que l’élaboration d’étiquettes couvrant ces services relève déjà du présent processus.
De notre point de vue, élargir l’application de l’étiquette aux services mobiles générerait des avantages importants à coût marginal, tout en harmonisant l’information destinée aux consommateurs et en évitant le dédoublement des démarches réglementaires à l’avenir.
Troisièmement, nous croyons que l’étiquette serait particulièrement bénéfique pour les consommateurs qui magasinent activement, ou pour ceux dont le contrat arrive à échéance.
Monsieur Fonberg, docteur en psychologie, expliquera comment nous pouvons nous assurer que les étiquettes soient aussi utiles que possible pour les consommateurs.
[Jonathan Fonberg, scientifique principal en sciences comportementales]
Merci.
Les consommateurs sont moins susceptibles de consulter l’information si l’effort requis pour la trouver et la comprendre est trop élevé.
Cela signifie que les obstacles à l’accès à l’information pertinente sur les forfaits large bande et les alternatives disponibles peuvent ainsi décourager leur mobilité.
Nos recommandations s’appuient sur de principes clés et des pratiques exemplaires issus des sciences comportementales.
Elles visent à habiliter les consommateurs en réduisant l’effort nécessaire pour cerner et comprendre les renseignements importants, ce qui diminue ainsi les obstacles à l’exercice de leur mobilité.
À cette fin, ces recommandations concernent tant le format de l’étiquette que son accessibilité.
Premièrement, l’étiquette doit être conçue de façon à permettre aux consommateurs de saisir rapidement les informations clés : elle doit être facilement accessible et compréhensible.
Cela vise à diminuer le fardeau pour les clients qui tentent d’analyser et de comparer des forfaits complexes.
Mais au-delà du contenu de l’étiquette, le moment et l’endroit où elle est disponible sont tout aussi importants.
Nous recommandons que l’étiquette soit accessible partout où des renseignements sur des forfaits particuliers sont affichés, ainsi que dans les avis transmis aux clients dont le contrat arrive à échéance.
Cela réduira le besoin de chercher dans les petits caractères pour trouver l’information essentielle, rendant le processus plus commode et augmentant la probabilité d’engagement.
Ces recommandations feront en sorte que les clients puissent facilement accéder à l’étiquette, au moment où ils en auront le plus besoin, ce qui maximisera ses avantages.
[Brad Callaghan, sous-commissaire délégué]
Merci, Monsieur Fonberg.
Le CRTC a pris d’importantes mesures ces dernières années pour renforcer le pouvoir d’agir des consommateurs dans leurs relations avec les fournisseurs de services. L’obligation de transférabilité des numéros, à la limitation de la durée des contrats et le déverrouillage des appareils sont quelques exemples d’actions qui ont contribué à stimuler la concurrence au bénéfice des consommateurs et de l’économie.
Le Bureau de la concurrence se réjouit que le CRTC poursuive sur cette lancée. Une étiquette nutritionnelle pour les services Internet met les consommateurs au cœur du processus de changement de fournisseur, tout en renforçant la concurrence dans le secteur des télécommunications. Munis d’une information claire et standardisée pour comparer leurs options, les consommateurs pourront profiter pleinement des avantages d’un marché concurrentiel et les entreprises devront redoubler d’efforts pour les conquérir et les fidéliser.
Nous remercions le Conseil de nous avoir permis de participer à ces audiences et nous nous tenons à votre disposition pour répondre à toutes vos questions.