Guide relatif à l'évaluation des personnes handicapées - Comment établir et mettre en place des mesures d'adaptation en matière d'évaluation - Cadre législatif

L'obligation d'instaurer des mesures d'adaptation à l'intention des personnes handicapées est un principe bien établi dans la loi et la jurisprudence canadienne. L'accent est mis sur l'obligation d'apporter des mesures d'adaptation pour les personnes handicapées, sans causer de contraintes excessives, afin de leur offrir des possibilités d'emploi égales.

Cette section présente les obligations de l'organisme en vertu des lois et des politiques connexes, compte tenu des notions clés suivantes : mérite, obligation de prendre des mesures d'adaptation, mesures raisonnables d'adaptation, exigences professionnelles justifiées et contraintes excessives. Les sections pertinentes des différentes lois et politiques par rapport aux mesures d'adaptation lors d'un processus de nomination sont discutées.

Loi canadienne sur les droits de la personne (modifiée en 1998)

Les articles 2, 3 et les paragraphes 15 (1) (a) et 15 (2) de la Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP) ont des répercussions sur les mesures d'adaptation pour les personnes handicapées durant le processus de nomination.

L'article 2 énonce l'objet de la Loi et met l'accent sur l'obligation de prendre des mesures d'adaptation. Pour sa part, l'article 3 énumère les motifs de distinction illicites, et la déficience en fait partie.

Le paragraphe 15 (1) (a) spécifie qu'une pratique qui découle d'une exigences professionnelles justifiées ne constitue pas un acte discriminatoire. Le paragraphe 15 (2) établie que pour qu'une pratique soit considérée comme une exigence professionnelle justifiée, l'employeur doit démontrer que les mesures destinées à répondre aux besoins d'une personne ou d'une catégorie de personnes visées constitueraient une contrainte excessive en matière de coûts, de santé et de sécurité.

Loi sur l'équité en matière d'emploi (1995)

Les articles 2, 5 et 6 de la Loi sur l'équité en matière d'emploi (LEE) ont des répercussions sur les mesures d'adaptation pour les personnes handicapées durant le processus de nomination.

L'article 2 énonce l'objet de la Loi et identifie les personnes handicapées comme un des quatre groupes visés par l'équité en matière d'emploi. L'article 2 énonce également que « l'équité en matière d'emploi requiert, outre un traitement identique des personnes, des mesures spéciales et des aménagements adaptés aux différences ».

L'article 5 exige que les employeurs identifient et éliminent les obstacles à l'emploi des membres des quatre groupes désignés, qu'ils instaurent des règles et des usages positifs et qu'ils prennent des « mesures raisonnables d'adaptation », ce qui permettra d'assurer que la représentation des quatre groupes désignés dans la main-d'oeuvre de l'organisme est, à tout le moins, proportionnelle à la disponibilité sur le marché du travail.

L'article 6 détermine un certain nombre de limites à l'obligation de l'employeur d'instaurer l'équité en matière d'emploi. Deux de ces limites sont particulièrement pertinentes aux mesures d'adaptation en matière d'évaluation dans les processus de nomination de la fonction publique :

  • les employeurs n'ont aucune obligation de prendre des mesures qui entraîneraient des contraintes excessives;
  • les employeurs n'ont aucune obligation d'embaucher ou de promouvoir des personnes sans égard au mérite.

Par conséquent, le ou la gestionnaire d'un processus de nomination doit respecter le mérite, être prêt à évaluer le postulant ou la postulante équitablement et prendre des mesures raisonnables d'adaptation.

Loi sur l'emploi dans la fonction publique (2003)

Les articles 11 et 15 de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique (LEFP) donnent à la Commission de la fonction publique (CFP) le pouvoir de nommer, ou d'assurer la nomination, de personnes appartenant ou non à celle-ci (alinéa 11 a)) et de déléguer n'importe quel pouvoir ou fonction en lien avec la nomination aux administrateurs généraux et aux administratrices générales (paragraphe 15 (1)) qui, à leur tour, sont encouragé à sous-déléguer leur pouvoirs par écrit.

La LEFP identifie le mérite et l'impartialité comme les valeurs fondamentales de la dotation au sein de la fonction publique. L'article 30 définit les nominations fondées sur le mérite de la façon suivante :

« 30. (1) Les nominations - internes ou externes - à la fonction publique faites par la Commission sont fondées sur le mérite et sont indépendantes de toute influence politique.

(2) Une nomination est fondée sur le mérite lorsque les conditions suivantes sont réunies :

  1. selon la Commission, la personne à nommer possède les qualifications essentielles - notamment, la compétence dans les langues officielles - établies par l'administrateur général pour le travail à accomplir
  2. la Commission prend en compte :
    1. toute qualification supplémentaire que l'administrateur général considère comme un atout pour le travail à accomplir ou pour l'administration, pour le présent ou l'avenir,
    2. toute exigence opérationnelle actuelle ou future de l'administration précisée par l'administrateur général, et
    3. tout besoin actuel ou futur de l'administration précisé par l'administrateur général. »

Ainsi, les nominations doivent être fondées sur le mérite et les postulants et les postulantes doivent être soumis à une évaluation afin de démontrer qu'ils répondent aux qualifications requises pour le poste; ces qualifications ont été déterminées par l'administrateur général ou l'administratrice générale ou ses délégataires, avant de procéder à l'évaluation. Dans le contexte de l'évaluation des personnes handicapées, le mérite est atteint en prenant des mesures d'adaptation quand un handicap empêche une personne de démontrer, pleinement, ses qualifications.

Lignes directrices en matière de nomination (2005)

Dans le but d'assurer une délégation appropriée de ses pouvoirs, la Commission de la fonction publique (CFP) a créé un Cadre de nomination qui a pour objectif de guider ses délégataires dans l'élaboration de leurs propres systèmes de dotation. Et ce, tout en respectant les valeurs fondamentales qui sont le mérite et l'impartialité ainsi que les valeurs directrices en matière de nomination, c'est-à-dire, l'accessibilité, la justice, la représentativité et la transparence. Le Cadre de nomination est divisé en trois composantes : Lignes directrices en matière de nomination; Délégation et Responsabilisation.

Les lignes directrices en matière de nomination comprennent des exigences visant à assurer que le processus de nomination est inclusif, respectueux des différences et exempt de discrimination pour des motifs de distinction illicite énoncés dans la Loi canadienne sur les droits de la personne (LCDP). Plus particulièrement, on retrouve ces exigences dans les lignes directrices suivantes: Annonces dans le processus de nomination, Équité en matière d'emploi dans le processus de nomination et Évaluation.

Pour leur part, les lignes directrices sur les Annonces dans le processus de nomination exigent que « tout document soit diffusé, sur demande, dans un format accessible aux fins de communication avec les personnes handicapées ». Cette exigence assure aux personnes qui requièrent un autre format d'avoir eux aussi accès à tous les documents diffusés.

Tant les Lignes directrices sur l'Équité en matière d'emploi dans le processus de nominationque celles sur l'Évaluation exigent que les administrateurs généraux et les administratrices générales ainsi que les personnes responsables de l'évaluation :

« utilisent des outils et des processus d'évaluation qui sont élaborés et mis en application façon impartiale et qui n'entraînent pas d'obstacles systémiques. »

Cette exigence fait référence à l'utilisation d'outils et de procédures d'évaluation qui doivent traiter les personnes de façon non discriminatoire et équitable, contribuant ainsi à un processus d'évaluation inclusif. Cela ne veut pas dire nécessairement de traiter toutes les personnes de la même façon. En effet, des mesures d'adaptation en matière d'évaluation peuvent être requises par certaines personnes handicapées afin qu'elles puissent être évaluées sur le même pied d'égalité que les autres postulants et postulantes. Les outils et les processus d'évaluation ne doivent pas restreindre ou exclure des membres d'un groupe désigné et ne doivent faire aucune discrimination fondée sur des motifs de distinction illicites. Ainsi, tout effort devrait être fait pour utiliser des outils et des processus d'évaluation qui sont inclusifs dans leur conception et leur mise en oeuvre. Toutefois, ceci n'est pas toujours possible et dans de telles circonstances, des mesures d'adaptation en matière d'évaluation peuvent être requises par certaines personnes. Des conseils sur « comment penser inclusion lors de la conception » se retrouvent à l'appendice 1.

De plus, les lignes directrices sur l'Équité en matière d'emploi dans le processus de nomination exigent ce qui suit :

« Les administrateurs généraux et les administratrices générales doivent :

  • prendre des mesures d'adaptation, lorsque ces mesures n'imposent pas une contrainte excessive, à toutes les étapes du processus de nomination, afin de corriger les désavantages découlant de motifs de distinction illicites. »

Cette exigence fait référence à l'obligation d'un organisme de prendre des mesures pour éliminer les désavantages subis par les fonctionnaires ou par les personnes qui postulent à des postes au sein de la fonction publique. L'accent est particulièrement mis sur les désavantages découlant d'une règle, d'une pratique ou d'un obstacle physique qui a, ou qui peut avoir un effet défavorable sur une personne ou sur un groupe aux termes de la LCDP ou sur un groupe désigné aux termes de la LEE. Ces lignes directrices nécessitent que les employeurs élaborent des systèmes, des processus et des pratiques d'embauche qui sont inclusifs et qui n'entraînent pas d'obstacles systémiques à l'emploiToutefois, dans des situations où les obstacles ne peuvent être éliminés, des mesures d'adaptation doivent être prises dans les cas où des désavantages découlent de motifs de distinction illicites. Pour plus d'information sur l'inclusion lors de la conception, se référer à la « Série d'orientation - Intégration de l'équité en matière d'emploi au processus de nomination », section 3.2.

Les Lignes directrices en matière d'Évaluation exigent également que :

« Les administrateurs généraux et les administratrices générales doivent :

  • fournir des renseignements en temps opportun aux personnes à évaluer au sujet des méthodes d'évaluation qui seront utilisées, de leur droit de recevoir des mesures d'adaptation et de la façon d'exercer ce droit. »

Cette exigence permet aux postulants et aux postulantes de déterminer s'ils ont besoin, selon la nature et la portée de leurs limitations fonctionnelles, de mesures d'adaptation pour une méthode d'évaluation précise.

De plus, toujoursdans les Lignes directrices en matière d'évaluation, les administrateurs généraux et les administratrices générales doivent : 

  • s'assurer que les personnes responsables de l'évaluation
    • « se conforment aux consignes établies dans le document intitulé Les tests dans l'administration publique fédérale publiés par la CFP, lorsqu'elles élaborent et utilisent les tests normalisés. »

Le document intitulé « Les tests dans l'administration publique fédérale » décrit les normes professionnelles en matière d'élaboration et d'utilisation des outils d'évaluation dans les processus de nomination. Parmi ces normes, on retrouve six normes visant à assurer l'équité pour tous les postulants et toutes les postulantes dans la prestation de mesures d'adaptation en matière d'évaluation (norme 3.7 et normes 6.1 à 6.5). Ces normes reflètent les quatre principes clés qui sont à la base de l'établissement des mesures d'adaptation et dont il est question dans la section intitulée Principes des mesures d'adaptation en matière d'évaluation.

Politique sur l'obligation de prendre des mesures d'adaptation pour les personnes handicapées dans la fonction publique fédérale (2002)

Cette politique conjointe du Conseil du Trésor et de la Commission de la fonction publique touche les mesures d'adaptation en milieu de travail et lors de processus de nomination. En ce qui a trait aux mesures d'adaptation en milieu de travail, la politique s'applique à toutes les organisations énumérées à la partie 1 de l'annexe 1 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique. En ce qui a trait aux mesures d'adaptation à prendre durant le processus de nomination, la politique s'applique à toutes les organisations pour lesquelles la Commission de la fonction publique à le pouvoir exclusif de procéder aux nominations.

L'objectif de cette politique est de garantir la pleine participation des personnes handicapées à la fonction publique fédérale, tant à titre de postulantes à des processus de nomination qu'à titre d'employées. La mise en oeuvre de cette politique implique :

  • cerner et éliminer les obstacles à l'emploi, au perfectionnement professionnel et à la promotion des personnes handicapées, à moins que les mesures à prendre n'imposent une contrainte excessive;
  • concevoir tous les systèmes, les procédés et les installations de sorte qu'ils soient accessibles et en intégrant des mesures d'adaptation dans les normes, les systèmes, les procédés et les installations du milieu de travail;
  • fournir des mesures d'adaptation lorsque les obstacles à l'emploi ne peuvent être éliminés. Ces mesures doivent être prises si elles n'imposent pas une contrainte excessive, compte tenu des questions de santé, de sécurité et de coût. Les mesures d'adaptation doivent par ailleurs être définies en fonction des circonstances propres à chaque cas et respecter le droit à la protection des renseignements personnels et à la confidentialité d'une personne.

Le lecteur est invité à consulter la politique en question pour une description des exigences spécifiques qui découlent de sa mise en application.

Loi sur la protection des renseignements personnels (1985)

La Loi sur la protection des renseignements personnels a pour objet de « compléter la législation canadienne en matière de protection des renseignements personnels relevant des institutions fédérales et de droit d'accès des individus aux renseignements personnels qui les concernent » (article 2). La Loi précise la nature des renseignements personnels qui peuvent être recueillis par les organismes gouvernementaux. Elle précise également pourquoi et comment les renseignements personnels peuvent être recueillis et de quelle façon ils peuvent être utilisés. Les exigences portant sur la conservation et la destruction de renseignements personnels y sont également décrites. Finalement, la Loi se penche sur des questions concernant la divulgation des renseignements personnels.

Lors de la cueillette de renseignements personnels à des fins d'établissement de mesures d'adaptation en matière d'évaluation, il faut porter une attention particulière aux articles 4 et 7 ainsi qu'au paragraphe 8 (2) de la Loi sur la protection des renseignements personnels. L'article 4 de cette Loi indique qu'aucun renseignement personnel ne doit être recueilli par une institution gouvernementale à moins qu'ils ne soient en lien direct avec ses programmes ou ses activités. Par conséquent, lors de l'établissement de mesures d'adaptation en matière d'évaluation pour les personnes handicapées, les renseignements fournis par le postulant ou la postulante ou tout professionnel ou toute professionnelle doivent être en lien direct avec l'établissement de mesures d'adaptation en matière d'évaluation.

L'article 7 et le paragraphe 8 (2) de la Loi indiquent que les renseignements personnels ne doivent pas, sans le consentement de la personne à qui ils appartiennent, être utilisés par l'organisme sauf aux fins auxquelles ils ont été obtenus, dans le cas présent pour établir des mesures d'adaptation en matière d'évaluation, et quand ils sont assujettis à une autre loi du Parlement, comme dans le cas d'une plainte, à des fins d'utilisation dans une instance judiciaire par le procureur général.

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