Mise à jour de l'évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada

Mars 2023

Table des matières

Sommaire

Plan Prospectif

Introduction

Chapitre 1 : Atténuation des risques

Chapitre 2 : Aperçu de la méthode d'évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada

Chapitre 3 : Évaluation des menaces liées au recyclage des produits de la criminalité

Chapitre 4 : Évaluation des menaces liées au financement des activités terroristes

Chapitre 5 : Évaluation des vulnérabilités inhérentes au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes

Chapitre 6 : Résultats de l'évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes

Évolution du contexte du risque au Canada

Prochaines étapes

Annexe : Principales conséquences associées au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes

Glossaire

Liste des principaux acronymes et abréviations

Sommaire

Le Canada est doté d'un régime de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes (LRPC-FAT) rigoureux et exhaustif qui favorise l'intégrité du système financier et la sécurité des Canadiens. Ce régime soutient la lutte contre le crime organisé transnational et constitue un aspect clé de la Stratégie antiterroriste du Canada.

Le gouvernement du Canada a effectué pour la première fois une évaluation pour recenser les risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme au Canada en 2015 lorsqu'il a publié l'Évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au CanadaNote de bas de page 1 (rapport de 2015). Depuis 2015, le gouvernement surveille et évalue continuellement les nouveaux risques, et il a élaboré une analyse interne pour s'assurer que sa compréhension de ceux-ci est toujours récente et à jour. Parallèlement, divers partenaires et organismes gouvernementaux, comme le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE), ont également publié des rapports de renseignements stratégiques afin de sensibiliser les entités déclarantes et le public aux nouvelles tendances en matière de risques. Ce rapport consolide les travaux menés avant la publication du rapport de 2015 et entre 2015 et 2020 pour fournir une mise à jour systématique et complète de tous les domaines évalués en 2015 selon une approche et une méthodologie similaires. De plus, il étend l'évaluation du Canada à de nouveaux domaines non évalués en 2015.

Il est important de noter que ce rapport donne un aperçu des risques du recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme avant l'application de toute mesure d'atténuation. Ces mesures, d'ordre législatif ainsi que réglementaire et opérationnel, préviennent, détectent et perturbent le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme. Les secteurs confrontés à des risques inhérents plus élevés de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme évalués dans ce rapport ont généralement également mis en place de solides mesures d'atténuation pour limiter ces risques. Le rapport présente des vulnérabilités et des risques dans une perspective générale, tel que pour des secteurs ou des produits dans leur ensemble. Ce rapport est un outil d'aide à l'évaluation des risques de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme, et les mises à jour effectuées depuis 2015 reconnaissent que le gouvernement doit être vigilant afin d'éviter que des préjugés systémiques et inconscients n'influencent la manière dont il est appliqué.

Le Régime canadien de lutte contre le RPC/FAT fournit une approche coordonnée pour atténuer les risques inhérents décelés dans cette évaluation et pour combattre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme plus généralement. Le régime de LRPC-FAT est opéré par 13 partenaires du régime fédéral, qui ont tous contribué à l'élaboration du rapport, lequel a été coordonné par le ministère des Finances Canada (le Ministère). Les risques inhérents recensés sont traités par un régime solide qui met l'accent sur la coordination des politiques, tant à l'échelle nationale qu'internationale; la prévention et la détection du recyclage des produits de la criminalité et du financement du terrorisme au Canada; les activités de perturbation, y compris les enquêtes et les poursuites ainsi que la saisie des avoirs illicites; et la mise en œuvre de mesures visant à améliorer continuellement le Régime de lutte contre le RPC/FAT.

Ce rapport fournit des informations essentielles sur les risques au public et, en particulier, à plus de 24 000 entités réglementées partout au paysNote de bas de page 2 qui ont des obligations de déclaration en vertu de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes (LRPCFAT), dont la compréhension des risques fondamentaux et inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme s'avère primordiale à l'application des mesures préventives et des contrôles requis pour atténuer efficacement ces risques. En continuité avec ce qui a été réalisé dans la  foulée du Rapport de 2015, le gouvernement du Canada encourage ces entités à se servir des constatations figurant dans le présent rapport pour continuer à orienter les efforts qu'elles déploieront afin d'évaluer et d'atténuer les risques. Avoir une compréhension étendue du contexte de risque au Canada et des propriétés intrinsèques qui exposent les produits et les secteurs aux risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme au Canada s'avère important afin de pouvoir appliquer des mesures pour les atténuer efficacement.

Ce rapport mis à jour répond également aux normes mondiales de lutte contre le RPC/FAT du Groupe d'action financière (GAFI) appelant tous les membres à évaluer en permanence les risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme. Le présent rapport sera étudié dans le contexte de la prochaine évaluation mutuelle du Canada par le GAFI, où l'on évaluera le pays par rapport à ces normes mondiales.

L'évaluation des risques inhérents consiste en un examen des menaces du recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme et des vulnérabilités inhérentes au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme au Canada dans son ensemble (par exemple, économie, géographie, démographie) et des principaux secteurs économiques et produits financiers du pays, tout en tenant compte des conséquences du recyclage des produits de la criminalité et du financement du terrorisme. Les risques inhérents globaux au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme ont été évalués en faisant correspondre les menaces avec les secteurs et produits intrinsèquement vulnérables par le biais des méthodes et des techniques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme utilisées par les blanchisseurs d'argent, les financiers du terrorisme et leurs facilitateurs, pour exploiter ces secteurs et produits. En établissant une relation entre les menaces et les vulnérabilités, une série de scénarios de risques inhérents ont été construits, permettant de définir les secteurs et les produits les plus exposés aux risques de recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme.

Dans le cadre de l'évaluation des menaces de recyclage des produits de la criminalité, on a examiné les 23 activités criminelles au Canada étant le plus susceptible d'être associées à la création de produits de la criminalité pouvant être recyclés. Cette évaluation a aussi examiné la menace de recyclage des produits de la criminalité émanant du recyclage des produits de la criminalité par des tiers, ce qui comprend le recours à des mules, à des prête-noms et à des blanchisseurs d'argent professionnels. La menace de recyclage des produits de la criminalité a été jugée très élevée pour le trafic de drogues illicites, certains types de fraudes, les paris illégaux, la corruption, la collusion et les pots-de-vin, ainsi que le recyclage des produits de la criminalité par des tiers. Les groupes criminels organisés (GCO) transnationaux et les blanchisseurs d'argent professionnels sont les principales menaces en lien avec le RPC dans le contexte canadien. Bon nombre de ces menaces sont semblables à celles auxquelles font face de nombreux autres pays.

La menace de financement du terrorisme a été évaluée pour les groupes et les acteurs énumérés par les Nations Unies et le Canada qui préoccupent le plus ce dernier. L'évaluation indique que des réseaux évoluant au Canada sont soupçonnés d'amasser des fonds et de les transmettre à divers groupes terroristes. Toutefois, en se fondant en partie sur les points forts existants du régime, la menace de financement des activités terroristes n'est pas aussi prononcée au Canada qu'elle l'est dans d'autres régions du monde, où l'on retrouve des régimes de lutte contre le financement des activités terroristes plus faibles et où les groupes terroristes se sont implantés, tant sur le plan des opérations, que de celui du financement de leurs activités.

Les vulnérabilités inhérentes au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme sont présentées pour 33 secteurs économiques et produits financiers. L'évaluation indique que de nombreux secteurs et produits sont très vulnérables au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme. Parmi les secteurs évalués, les banques nationales, les sociétés (notamment les sociétés privées), certains types d'entreprises de services monétaires et les fiducies express ont été cotées comme étant les plus vulnérables ou ont reçu une cote très élevée. De plus, 17 secteurs et produits ont obtenu une cote de vulnérabilité élevée, neuf secteurs une cote de vulnérabilité moyenne et un secteur une cote de vulnérabilité faible. Bon nombre des secteurs et des produits sont largement accessibles aux particuliers au Canada et à l'étranger et sont associés à des opérations à volume, vitesse et fréquence élevés. Beaucoup mènent un volume important d'activités transactionnelles avec des clients à haut risque et sont exposés à des juridictions à haut risque qui ont des régimes de lutte contre le RPC/FAT faibles et des menaces importantes de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme. On trouve aussi, dans de nombreux secteurs, des possibilités d'effectuer des opérations avec divers degrés d'anonymat et de structurer les opérations de façon complexe.

En reliant les menaces aux secteurs et aux produits à vulnérabilité inhérente, l'évaluation a révélé que divers secteurs et produits sont exposés à des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité très élevés concernant des acteurs de menace (par exemple, des GCO et des blanchisseurs d'argent tiers) recyclant les produits générés par dix groupes d'activités criminelles à but lucratif. L'évaluation a par ailleurs cerné quatre scénarios présentant un risque inhérent très élevé de financement du terrorisme concernant six secteurs déterminés très vulnérables, conjointement avec un groupe présentant une menace élevée de financement du terrorisme.

Cette mise à jour de l'évaluation des risques du Canada souligne l'importance de maintenir en permanence une compréhension commune des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme au Canada. Les menaces criminelles peuvent évoluer au fil du temps alors que les criminels cherchent continuellement de nouvelles méthodes et techniques pour masquer la source des fonds illicites, par exemple en tirant parti de l'innovation technologique. En outre, il est essentiel de garder à l'esprit que de nombreuses vulnérabilités, menaces et méthodes de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme peuvent rester identiques ou constantes au fil du temps. En tant que tel, ce rapport fournit un aperçu complet des menaces, vulnérabilités et risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme, qui perdurent depuis le rapport de 2015, ainsi que des nouvelles tendances décelées dans l'évolution de l'univers du risque.

D'après les nouvelles informations de la mise à jour de cette évaluation, les niveaux de menace pour l'évasion fiscale, les jeux d'argent illégaux et le trafic d'espèces sauvages ont augmenté depuis le rapport de 2015, tandis qu'ils ont diminué pour la contrebande et le trafic illégaux du tabac. Cela reflétait souvent des changements dans la sophistication et la capacité moyennes des auteurs de la menace impliqués. Par exemple, les préoccupations concernant l'évasion fiscale ont augmenté à la suite des tendances croissantes autour de l'utilisation de structures et de comptes d'entreprise extraterritoriaux complexes et de la mise à profit de l'expertise de facilitateurs tels que des avocats, des comptables et des conseillers financiers.

Cette mise à jour de l'évaluation des risques au Canada élargit par ailleurs la portée des risques évalués en 2015. De nouvelles typologies de menaces et de vulnérabilités ont notamment émergé du commerce du fentanyl, de nouveaux types de fraudes par marketing de masse en ligne, de fraudes sur les marchés des capitaux et de schémas d'extorsion. Les vulnérabilités croissantes du marché immobilier, en raison notamment des augmentations rapides des prix dans certaines régions du Canada et des développements technologiques constants autour des actifs virtuels, constituent d'autres tendances notables.

Enfin, la pandémie de la COVID-19 a contribué à démontrer la capacité d'adaptation du secteur financier canadien, alors que de plus en plus de consommateurs adoptent les canaux numériques ainsi que de nouveaux services et produits financiers rendus possibles par les technologies émergentes. La pandémie a également montré que les acteurs criminels s'adaptent au contexte actuel en tirant parti des stratagèmes en ligne et de la fraude liée à la COVID pour générer des fonds. Le passage à des plateformes numériques et à des produits financiers peut aussi offrir de nouvelles possibilités de transferts de fonds aux criminels et aux organisations terroristes. En outre, les fermetures de frontières ont perturbé les techniques traditionnelles des passeurs de fonds et affecté les méthodologies de fraude basées sur le commerce, tandis que les confinements régionaux d'entreprises non essentielles telles que les casinos ont engendré une augmentation des jeux de hasard clandestins illégaux et des activités de recyclage des produits de la criminalité connexes.

Les nouvelles expériences découlant de pandémie de la COVID-19 soulignent qu'il est important que les autorités nationales et le secteur privé suivent et comprennent continuellement les risques en évolution. L'évaluation mise à jour a contribué, et continuera de contribuer, à améliorer le régime canadien de LRPC-FAT, venant ainsi renforcer davantage l'approche exhaustive que le pays adopte déjà vis-à-vis l'atténuation et le contrôle des risques à l'échelle nationale, y compris avec le secteur privé et les partenaires internationaux. Elle se veut aussi un complément des divers renseignements et documents publiés par le gouvernement depuis 2015 au sujet des nouveaux risques et des nouvelles typologies observés dans certains secteurs ou enjeux particuliers au fur et à mesure que ces éléments émergeaient.

Plan prospectif :

Il est important de noter que la mise à jour de l'Évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada, sauf indication contraire, reflète une analyse disponible en décembre 2020. Certaines mises à jour ciblées ont été apportées au rapport pour communiquer les premiers résultats concernant les risques nouveaux et émergents, tels que l'extrémisme violent à motivation idéologique.

Les risques émergents tels que l'utilisation de plateformes de sociofinancement, de fournisseurs de services de paiement et de cryptomonnaie, ainsi que le risque que des acteurs tentent d'échapper aux sanctions, par exemple, en relation avec l'agression sans précédent de la Russie contre l'Ukraine continueront d'être surveillés. Les futures mises à jour sur ces risques seront incluses dans les mises à jour ultérieures de ce rapport.

Introduction

Le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme compromettent l'intégrité du système financier international et constituent une menace pour la sûreté et la sécurité mondiales. Le blanchiment d'argent est le processus qu'emploient des criminels pour dissimuler ou masquer l'origine de produits de la criminalité en donnant l'apparence que ceux-ci proviennent de sources légitimes. Le recyclage des produits de la criminalité bénéficie fréquemment les criminels internationaux et les groupes criminels organisés nationaux et internationaux les plus prospères et rentables. Le financement des activités terroristes, en revanche, consiste en la collecte et l'acheminement de fonds provenant de sources légitimes ou illégitimes aux fins d'activités terroristes. Il permet de soutenir et de maintenir les activités de terroristes nationaux et internationaux qui peuvent donner lieu à des attaques terroristes au Canada ou à l'étranger, causant des pertes de vies humaines et de la destruction.

Le gouvernement du Canada s'est engagé à lutter contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme, tout en respectant la répartition des pouvoirs constitutionnels, la Charte des droits et libertés et le droit à la vie privée des Canadiens. Pour ce faire, le gouvernement du Canada a mis en place un Régime de lutte contre le RPC/FAT solide et complet. Le régime est opéré par 13 ministères et organismes fédéraux, dont chacun est responsable de certains éléments du régime selon son mandat et son expertise. Le régime est coordonné par le Ministère. Les organismes d'application de la loi provinciaux et municipaux et le secteur financier provincial, ainsi que d'autres organismes de réglementation, participent également à la lutte contre ces activités illicites. Au sein du secteur privé, plus de 24 000 institutions financières, entreprises et professions non financières canadiennesNote de bas de page 3 ont des obligations de déclaration en vertu de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes (LRPCFAT), connues sous le nom d'entités déclarantes qui jouent un rôle essentiel de première ligne dans les efforts de prévention et de détection du recyclage des produits de la criminalité et du financement du terrorisme.

La compréhension des partenaires du Régime des risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme joue un rôle clé dans la capacité du gouvernement à lutter efficacement contre ces activités illicites. Cette compréhension contribue à soutenir le processus d'élaboration de politiques de façon à aborder efficacement les vulnérabilités et les autres lacunes éventuelles du régime. Elle contribue à orienter les décisions opérationnelles concernant l'établissement des priorités et l'affectation des ressources afin de lutter contre les menaces et de se concentrer sur celles qui ont les plus grandes conséquences économiques, sociales et politiques. Elle joue aussi un rôle central quant à la façon dont le secteur privé, surtout les entités déclarantes, applique leur approche fondée sur les risques et atténue leurs risques. Dans l'ensemble, la compréhension des risques par les partenaires du régime les aide à se concentrer sur une atténuation adéquate des risques les plus préoccupants au Canada.

Compte tenu du rôle central que la compréhension des risques joue au sein du régime, le gouvernement du Canada s'est appuyé sur les pratiques existantes afin de mettre à jour le rapport Évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada de 2015 (le Rapport de 2015)Note de bas de page 4. Cette mise à jour consiste à bonifier l'évaluation des principaux risques  publiée en 2015. Ce rapport présente les résultats de l'évaluation mise à jour des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme au Canada. Il s'agit là des risques fondamentaux pour le Canada, que le régime de LRPC-FAT cherche à contrôler et à atténuer.

Le présent rapport examine précisément ces risques par rapport aux principaux secteurs économiques et produits financiers du Canada, et il évalue la mesure dans laquelle certaines caractéristiques clés rendent le Canada susceptible d'être exploité par des individus mal intentionnés afin de recycler des fonds et de financer des activités terroristes. Elle vise à sensibiliser le public au contexte de risque du Canada et aux propriétés intrinsèques qui exposent ces secteurs et produits aux risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme au Canada. La vaste majorité des entreprises, des professions et des secteurs évalués dans ce rapport respectent le droit canadien et contribuent à la prospérité sociale et économique du pays; seulement une très petite sous-ensemble d'acteurs est complice à des activités illégales comme le blanchiment d'argent.

Néanmoins, il est essentiel de bien comprendre ces risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme pour pouvoir définir et appliquer des mesures permettant de les atténuer efficacement. À cet égard, le gouvernement s'attend à ce que ce rapport mis à jour soit utilisé par les institutions financières et autres entités déclarantes pour comprendre comment et où elles peuvent être les plus vulnérables et exposées aux risques de recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme inhérents. Le rapport présente des vulnérabilités et des risques dans une perspective générale, tel que pour des secteurs ou des produits dans leur ensemble. Dans les faits, les risques et les pratiques d'atténuation des risques peuvent varier et donc, en pratique, ils doivent être considérés au cas par cas. Le rapport complète d'autres analyses entreprises par les partenaires du Régime et contribuera à établir des priorités et à évaluer l'efficacité des mesures pour lutter contre les risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme.

Le premier chapitre décrit le Régime canadien de lutte contre le RPC/FAT et l'approche globale adoptée pour atténuer les risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme qui font l'objet de cette évaluation. Le deuxième chapitre fournit une description générale de la méthodologie utilisée pour évaluer les risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme au Canada, tandis que les trois chapitres suivants présentent les résultats de l'évaluation mise à jour des menaces de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme ainsi que des vulnérabilités inhérentes au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme. Ces composantes du risque sont ensuite combinées dans le dernier chapitre pour fournir une évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme au Canada, y compris l'établissement d'un certain nombre de scénarios de risques inhérents et d'exemples de cas.

À moins de référence particulière, le contenu du rapport reflète les renseignements qui étaient accessibles jusqu'au 31 décembre 2020, et il exclut certains renseignements et certaines analyses pour des raisons de sécurité nationale.

Chapitre 1 : Atténuation des risques

Le Canada dispose d'un Régime de lutte contre le RPC/FAT complet, qui fournit une approche coordonnée pour atténuer les risques inhérents au blanchiment d'argent et de financement du terrorisme recensés dans cette évaluation et pour combattre le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme plus largement. Ce chapitre passera brièvement en revue le cadre qui existe au Canada pour prévenir, détecter et perturber le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme. En outre, le régime complète le travail des organismes d'application de la loi et des organismes de renseignement qui se livrent à la lutte contre le crime organisé national et transnational ainsi que le terrorisme, notamment dans le cadre de la Stratégie antiterroriste du CanadaNote de bas de page 5.

Le régime de LRPC-FAT est opéré par 13 partenaires du régime fédéraux, dont 9 reçoivent des fonds réservés à cette fin qui totalisent près de 70 millions de dollars par année, provenant de l'initiative horizontale de financement de la LRPC-FATNote de bas de page 6. Les neuf partenaires financés sont l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), l'Agence du revenu du Canada (ARC), le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), le ministère des Finances du Canada, le ministère de la Justice du Canada, le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE), le Service des poursuites pénales du Canada (SPPC), Services publics et Approvisionnement Canada (SPAC) et la Gendarmerie royale du Canada (GRC). Les quatre autres partenaires du régime sont Affaires mondiales Canada (AMC), Innovation, Sciences et Développement économique Canada (ISDE), le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF) et Sécurité publique Canada. Bien qu'ils ne reçoivent pas de fonds dédiés venant de l'initiative horizontale de financement de la LRPC-FAT, ces quatre partenaires apportent d'importantes contributions au régime.

Le régime de LRPC/FAT s'appuie sur trois piliers indépendants : (i) la politique et la coordination; (ii) la prévention et la détection; (iii) l'interruption.

(i) Politique et coordination

Le premier pilier comprend le cadre stratégique et législatif du régime ainsi que sa coordination nationale et internationale, que dirige le Ministère. La Loi est la mesure législative qui établit le cadre canadien de LRPC/FAT, conjointement avec d'autres textes législatifs importants, dont le Code criminel.

La Loi exige des institutions financières visées par règlement, ainsi que certaines entreprises et professions non financièresNote de bas de page 7, que l'on appelle des entités déclarantes, qu'elles identifient leurs clients, qu'elles tiennent des dossiers et qu'elles administrent un programme interne de conformité en matière de RPC-FAT. La Loi crée un système obligatoire de déclaration des opérations financières douteuses, des mouvements transfrontaliers d'espèces considérables et de certaines opérations visées par règlement. Il crée également des obligations pour les entités déclarantes de déceler les risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme et de mettre en place des mesures pour atténuer ces risques, notamment par un suivi continu des transactions et de meilleures mesures de diligence raisonnable.

La Loi établit également un régime d'échange de renseignements où, selon certaines conditions visées par règlement conformes au respect  de la vie privée des particuliers, les renseignements présentés par les entités déclarantes sont analysés par le CANAFE et les résultats sont diffusés aux partenaires. Les informations diffusées en vertu de la LRPCFAT peuvent aider les partenaires nationaux et internationaux dans l'enquête et la poursuite d'infractions liées au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme, ou éduquer le public y compris les entités déclarantes sur les enjeux liés au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme, grâce à l'établissement de rapports sur les tendances et les typologies. En plus de la Loi, d'autres dispositions législatives contribuent également au régime exhaustif de LRPC-FAT. Par exemple, la Loi de l'impôt sur le revenu crée des obligations entourant l'enregistrement des fiducies auprès de l'Agence du revenu du Canada alors que la Loi canadienne sur les sociétés par actions établit les exigences en matière de transparence de la propriété effective pour les entreprises constituées en société sous le régime fédéral.

Compte tenu du nombre de participants au Régime et de la complexité des enjeux liés au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme, la coordination efficace à l'échelle du régime des questions stratégiques, politiques et opérationnelles s'avère importante. Tous les partenaires fédéraux partagent la responsabilité des résultats du régime, qui est régi par divers comités interministériels avec la participation de hauts fonctionnaires de chaque organisation. Ces comités travaillent ensemble pour maintenir un régime efficace en mettant l'accent sur les politiques et les opérations.

Il y a aussi une collaboration et des discussions fréquentes entre les secteurs public et privé. Par exemple, le comité consultatif sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes (CCRPCFAT) est un forum de discussion public-privé chargé de soutenir les enjeux émergents et la politique globale en matière de LRPC-FATNote de bas de page 8. Les représentants du secteur privé sont invités à donner leur point de vue et leurs conseils sur le régime canadien de LRPC-FAT, dont l'efficacité et l'efficience du régime, et à soutenir les travaux internationaux. Le CCRPCFAT permet en outre au gouvernement de fournir au secteur privé une rétroaction utile au sujet des tendances et des efforts globaux de LBC/LFAT. Ce comité profite à tous les participants en favorisant une communication et des résultats plus efficaces pour l'ensemble du régime.

De plus, étant donné la dimension internationale de nombreuses formes graves de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme, la coopération internationale du Canada constitue également un élément clé. Cette pratique essentielle du Régime et, pour de nombreux partenaires, est menée de manière routinière, en particulier pour soutenir les enquêtes et les poursuites en matière de recyclage des produits de la criminalité et financement du terrorisme. Cela comprend les échanges de renseignements entre le CANAFE et d'autres unités du renseignement financier de pays partenairesNote de bas de page 9, et l'entraide juridique officielle dirigée par le ministère de la Justice du Canada.

Le Canada reconnaît que la protection de l'intégrité du système financier international contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme nécessite de jouer un rôle international fort pour accroître largement la capacité juridique, institutionnelle et opérationnelle à l'échelle mondiale. Le Canada contribue à faire progresser les initiatives de LRPC/FAT internationales grâce au rôle de leadership que le pays joue au sein du GAFI, du Groupe des Sept, du Groupe des Vingt et des unités de renseignement financier du groupe Egmont, ainsi que du volet de travail anti-financement de la Coalition mondiale contre le DaechNote de bas de page 10.

Le Canada est membre fondateur du GAFI et participe activement aux travaux de ce dernier. Le GAFI élabore des normes internationales en matière de LRPC/FAT et surveille l'efficacité de leur mise en œuvre parmi les 39 pays membres du GAFI et les plus de 200 pays membres du réseau mondial du GAFI, à l'aide d'examens par les pairs et de rapports publics. Le GAFI dirige également les efforts internationaux liés à l'élaboration de politiques, à l'analyse des risques tout en recensant et signalant les nouvelles tendances et méthodes de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme. Ce travail permet de s'assurer que les pays disposent des outils appropriés pour faire face aux risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme. Le Canada offre par ailleurs son expertise et du financement dans le but de renforcer les capacités de LRPC-FAT dans les pays dotés d'un régime plus faible, y compris par l'intermédiaire du Programme visant à renforcer les capacités de lutte contre la criminalité et du Programme d'aide au renforcement des capacités anti-terroristes, qui sont dirigés par AMC.

(ii)Prévention et détection

Le deuxième pilier met en place des mesures vigoureuses destinées à empêcher que des personnes placent des produits illicites ou des fonds liés au terrorisme dans le système financier, ainsi qu'en instituant des mesures de vigueur correspondante pour déceler le placement et le mouvement de tels fonds. Au cœur de cette approche de prévention et de détection, on trouve les entités déclarantes, qui sont au centre du système financier et mettent en œuvre les mesures de prévention et de détection prévues dans la Loi. On trouve également les organismes de réglementation, le CANAFE et le BISF, principalement, qui les supervise. Le CANAFE est le principal organisme qui effectue des évaluations de LRPC-FAT auprès des institutions financières sous réglementation fédérale afin de promouvoir la conformité avec la Loi et ses règlements connexes, tandis que le BSIF se concentre sur les répercussions prudentielles de la conformité en matière de RPC-FAT par les institutions financières sous réglementation fédérale, dans le cadre de son évaluation continue de leurs cadres de gestion de la conformité réglementaire.

Une plus grande transparence des sociétés et des fiducies contribue également à prévenir et à détecter le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme. Cela est favorisé par l'obligation pour les institutions financières, les entreprises de services monétaires, les courtiers d'assurance-vie et les courtiers en valeurs mobilières d'identifier les véritables propriétaires des sociétés et des fiducies avec lesquelles ils font affaireNote de bas de page 11. Les lois provinciales et fédérales sur les sociétés, les registres et les règlements sur les valeurs mobilières contribuent également à prévenir et à détecter le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme au Canada. Dans le cadre du budget de 2022, le gouvernement s'est engagé à mettre en place un registre public des propriétaires effectifs des entreprises constituées en vertu d'une loi fédérale d'ici 2023.

Le CANAFE est également l'unité du renseignement financier du Canada. Il agit de façon autonome  et est indépendant des services de police, des organismes d'application de la loi et des autres entités auxquelles il est autorisé à communiquer des renseignements financiers. Le graphique ci-dessous indique le nombre annuel de cas que le CANAFE communique aux partenaires, de 2015-2016 à 2019-2020. Par exemple, en 2019-2020, le CANAFE a effectué 2 057 communications aux partenaires du régime. De ce nombre, 1 582 étaient associées au blanchiment d'argent, tandis que 296 visaient des cas de financement des activités terroristes et d'autres menaces à la sécurité du Canada. On dénombrait 179 communications qui portaient sur les trois secteurs.

Graphique 1
Cas communiqués par le CANAFE de 2015-2016 à 2019-2020Footnote 12
Graphique 1: Cas communiqués par le CANAFE de 2015-2016 à 2019-2020
Version texte
Année Nombre de communications
2015-2016 1 655
2016-2017 2 015
2017-2018 2 466
2018-2019 2 276
2019-2020 2 057

(iii) Enquête et interruption

Le dernier pilier se rapporte aux activités d'enquête sur le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes ainsi qu'à leur interruption. Les partenaires du régime, tels que le SCRS, l'ASFC et la GRC, soutenus par les activités de renseignement, de communication et d'analyse du CANAFE, entreprennent des enquêtes financières relativement au recyclage des produits de la criminalité, au financement des activités terroristes et à d'autres crimes à but lucratif. L'ARC joue elle aussi un rôle important pour ce qui est, quant à elle, d'enquêter sur l'évasion fiscale et les cas connexes de recyclage des produits de la criminalité, ainsi que pour déceler les organismes de bienfaisance qui présentent un risque et d'intervenir pour les empêcher qu'on n'en abuse pour financer des activités terroristes. L'ASFC administre le programme Déclaration des mouvements transfrontaliers en espèces et transmet au CANAFE des renseignements tirés des rapports et des saisies.

En fin de compte, le SPPC poursuit les auteurs de crimes financiers avec toute la rigueur de la loi. La restriction et la confiscation des produits de la criminalité constituent aussi une mesure coercitive importante du régime. SPAC gère tous les biens saisis et restreints dans le cas des poursuites au criminel intentées par le gouvernement du Canada.

Le régime est par ailleurs assorti d'un processus robuste d'inscription liée au terrorisme qui permet de geler les actifs des terroristes, conformément au Code criminel et au Règlement d'application des résolutions des Nations Unies sur la lutte contre le terrorisme, que dirigent Sécurité publique Canada et AMC, respectivement. Le Canada compte 113 listes liées au terrorisme dans le cadre des deux processus.

Surveillance et améliorations

Le régime canadien de LRPC/FAT est examiné régulièrement par divers organismes afin de veiller à ce qu'il fonctionne efficacement, conformément à son mandat législatif, tout en respectant la répartition constitutionnelle des pouvoirs, la Charte des droits et libertés et le droit à la vie privée des Canadiens.

Tous les cinq ans, le Parlement du Canada doit entreprendre un examen complet de la Loi et, indirectement, du régime. En plus de l'examen parlementaire, il existe d'autres rapports périodiques sur le rendementNote de bas de page 13, examens et vérifications, dont une vérification obligatoire de la protection des renseignements personnels au CANAFE par le Commissariat à la protection de la vie privée, tous les deux ans. À l'échelle internationale, le GAFI évalue le régime du Canada par rapport à ses normes mondiales en matière de LRPC-FAT, et le régime est soumis au processus de suivi du GAFI.

Depuis la publication du Rapport de 2015, le gouvernement a apporté d'importantes modifications à ses lois et règlements. Notamment, en juillet 2019, le gouvernement a parachevé les modifications réglementaires visant à réglementer les entreprises de services monétaires qui font le commerce de la monnaie virtuelle, ainsi qu'à inclure les entreprises étrangères de services monétaires (EESM) dans le régime canadien de lutte contre le RPC-FAT, à mettre à jour les exigences en matière de déclaration du devoir de vigilance à l'égard de la clientèle et de la propriété effective, à moderniser les mesures d'identification des clients, à mettre à jour les annexes du Règlement et à clarifier un certain nombre d'exigences existantesNote de bas de page 14. En juin 2020, d'autres modifications réglementaires ont été mises au point afin d'appliquer des exigences plus strictes de devoir de vigilance à l'égard de la clientèle ainsi que des exigences de déclaration de la propriété effective à certaines entreprises et professions, de modifier la définition de la relation d'affaires pour le secteur immobilier, d'harmoniser les mesures liées au devoir de vigilance à l'égard de la clientèle pour les casinos avec les normes internationales, d'harmoniser les obligations en matière de tenue des documents relatifs à la monnaie virtuelle avec les normes internationales et de clarifier le programme de déclaration des mouvements transfrontaliers en espècesNote de bas de page 15.

Dans le budget de 2019, le gouvernement avait annoncé un investissement de plus de 220 millions de dollars à compter de 2019-2020 pour moderniser le régime canadien de LRPC-FAT en renforçant les opérations policières fédérales et son infrastructure technologique, en augmentant la capacité opérationnelle du CANAFE, en renforçant les ressources de données disponibles, en lançant un projet pilote visant à améliorer l'échange d'information, l'expertise et la coordination des enquêtes et des poursuites en matière de crimes financiers en ce qui concerne le recyclage des produits de la criminalité de nature commercialeNote de bas de page 16 (RPCNC), en accroissant la mise en conformité  avec les lois fiscales et la prévention de la criminalité financière dans le secteur immobilierNote de bas de page 17. Le Gouvernement a également apporté des modifications au Code criminel afin d'ajouter une autre exigence reliée au critère d'insouciance à l'infraction relative au recyclage des produits de la criminalitéNote de bas de page 18.

En 2020, le gouvernement a annoncé un financement supplémentaire de près de 700 millions de dollars pour lutter contre la criminalité financière. Environ 70 millions de dollars de ce financement seraient affectés directement au renforcement du cadre canadien de LRPC-FAT et à l'amélioration de l'efficacité avec laquelle le CANAFE cerne et contre les menaces en évolutionNote de bas de page 19. Des fonds de 606 millions de dollars serviront à financer de nouvelles initiatives et à élargir les programmes existants pour concentrer ses recherches sur les personnes qui évitent les taxes et les impôts en dissimulant leurs revenus et leurs biens à l'étranger, améliorer la fonction d'audit pour les déclarations de revenus à risque élevé, y compris celles des particuliers fortunés, et renforcer la capacité de l'ARC à lutter contre les crimes fiscaux, comme le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, en mettant à niveau ses outils et en favorisant la coopération internationaleNote de bas de page 20.

Le Canada demeure déterminé et engagé, tant à l'interne pays qu'à l'étranger, dans la lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme. Les risques sont présents et évoluent. Fort de son régime solide, le Canada reste déterminé à prendre les mesures appropriées pour atténuer les risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme mentionnés dans cette évaluation et à continuer d'évaluer l'évolution des risques de manière continue.

Mise en œuvre

Le gouvernement du Canada s'attend à ce que ce rapport soit utilisé par les institutions financières et d'autres entités déclarantes pour contribuer à leur compréhension sur la manière et l'endroit où elles peuvent être les plus vulnérables et exposées aux risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme. CANAFE continuera d'inclure des informations pertinentes liées aux risques inhérents dans ses documents d'orientation pour aider les institutions financières et autres entités déclarantes à intégrer ces informations dans leur propre méthodologie et processus d'évaluation des risques afin de mettre en œuvre efficacement des contrôles pour atténuer les risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme. Les précieuses leçons tirées de cet exercice seront également utilisées pour aider à établir des priorités pour l'élaboration de politiques et les efforts opérationnels de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme.

Chapitre 2 : Aperçu de la méthode d'évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada

Aperçu

En 2015, le gouvernement du Canada a élaboré un modèle d'évaluation pour repérer et comprendre les risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme au Canada, et leur importance relative, grâce à une analyse rigoureuse et systématique de données qualitatives et quantitatives et d'avis d'experts sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme. Cette mise à jour utilise la même méthodologie et continue de fournir les bases d'une réflexion critique et systématique sur les risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme, de manière continue, ainsi que de promouvoir une poursuite d'une compréhension commune desdits risques et de leur évolution.

Portée de la méthode

La méthodologie continue d'évaluer les risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme, des risques fondamentaux au Canada qui font l'objet d'une vaste gamme de contrôles de la part des gouvernementaux et du secteur privé ainsi que de mesures pour les atténuer efficacement. Comprendre le contexte de risque du Canada et les propriétés intrinsèques qui exposent les secteurs et les produits aux risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme au Canada s'avère important pour être en mesure de définir et d'appliquer des mesures pour les atténuer efficacement.

Le fondement de l'évaluation des risques est que le risque est une fonction de trois composantes : les menaces, les vulnérabilités inhérentes et les conséquences. En outre, le risque est considéré comme une fonction de la probabilité que des menaces exploitent des vulnérabilités inhérentes afin de recycler des produits de la criminalité ou financer le terrorisme, ainsi que les conséquences associées à une telle éventualité.

Principales définitions

Menaces de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme : personne ou groupe qui a l'intention de recycler des produits de la criminalité ou de financer le terrorisme, ou qui peut servir de facilitateur, à cette fin.

Vulnérabilités inhérentes au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme : les propriétés d'un secteur, d'un produit ou d'un service, d'une voie de distribution, d'une clientèle ou d'une institution, d'un système, d'un système, d'une structure ou d'une administration que des auteurs de menace peuvent exploiter dans le but de recycler des produits de la criminalité ou de financer le terrorisme.

Conséquences du recyclage des produits de la criminalité et du financement du terrorisme : le préjudice causé à une société, à une économie et à un gouvernement par le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme, y compris la facilitation d'activités criminelles et terroristes.

Probabilité de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme : la probabilité que des menaces de RPC-FAT exploitent les vulnérabilités inhérentes.

La menace de recyclage des produits de la criminalité a été évaluée de façon distincte de celle du financement des activités terroristes. Malgré un certain chevauchement, la nature de ces activités criminelles est différente, justifiant des évaluations distinctes. En revanche, l'évaluation des vulnérabilités liées au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme n'a pas nécessité une telle séparation, puisque les menaces de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme cherchent à exploiter le même ensemble d'aspects vulnérables et de caractéristiques des produits et des services offerts par les secteurs pour recycler les produits de la criminalité ou financer le terrorisme.  

Dans un premier temps, les principales composantes des menaces et des vulnérabilités inhérentes au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme ont été recensées et classées. Avec ces catégories, des critères ont été élaborés pour évaluer l'étendue des menaces de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme et les vulnérabilités inhérentes au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme. Ces notations ont ensuite été utilisées pour évaluer la probabilité de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme, ce qui impliquait de faire correspondre les menaces aux vulnérabilités inhérentes, tout en tenant compte des conséquences du recyclage des produits de la criminalité et du terrorisme. Ce travail a ensuite abouti à l'évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme. Les principaux types de conséquences économiques, sociales et politiques du recyclage des produits de la criminalité et du financement du terrorisme sont recensés dans l'annexe.

Évaluation des menaces de RPC-FAT et des vulnérabilités inhérentes au RPC-FAT

Des experts du Régime canadien de lutte contre le RPC/FAT, soutenus par une série d'ateliers, ont évalué les menaces et les vulnérabilités inhérentes au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme des secteurs et des produits à l'aide des critères de notation établis dans la méthodologie. De plus, les experts ont tiré parti d'un large répertoire de renseignements, de données et d'analyses du régime pour mettre à jour et coter chaque menace et chaque vulnérabilité. Les experts ont attribué une cote faible, moyenne, élevée ou très élevée à l'aide des critères de cotation définis en vue d'évaluer la gamme de menaces et de vulnérabilités inhérentes. Un total des cotes individuelles a ensuite été fait pour en arriver à une cote globale.

La menace de recyclage des produits de la criminalité au Canada a été évaluée pour 23 activités criminelles qui sont le plus souvent associées à la création de produits de la criminalité au Canada, auxquelles la menace de recyclage de produits de la criminalité par des tiers a aussi été ajoutée. La menace de recyclage des produits de la criminalité a été cotée pour chaque activité criminelle par rapport à quatre critères de cotation, à savoir l'ampleur des connaissances, de l'expertise et du niveau de sophistication général des auteurs de menace pour recycler des produits de la criminalité; l'ampleur de leurs ressources, réseaux et capacité générales pour ces activités, l'ampleur des secteurs utilisés et la complexité pour le recyclage; et la magnitude des produits de la criminalité qui sont générés chaque année à partir de l'activité criminelle. Les résultats de la cotation des menaces de recyclage des produits de la criminalité sont présentés dans le chapitre 3.

Les risques de recyclage des produits de la criminalité auxquels le Canada est confronté sont de nature mondiale. Les blanchisseurs d'argent professionnels liés au Canada et les groupes criminels organisés (GCO) transnationaux recyclent les produits de la criminalité en utilisant des réseaux mondiaux complexes qui impliquent plusieurs juridictions à toutes les étapes du cycle de blanchiment d'argent. Ces juridictions varient considérablement et changent en fonction de nombreux facteurs, notamment le GCO impliqué, l'infraction principale dont proviennent les produits de la criminalité et toute juridiction intermédiaire où le système commercial ou financier peut être exploité à des fins de blanchiment d'argent.

Le Groupe d'action financière (GAFI) tient à jour une liste des juridictions mondiales présentant des risques plus élevés en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorismeNote de bas de page 21. Pour tous les pays considérés à haut risque, le GAFI appelle l'ensemble des membres et exhorte toutes les juridictions à appliquer une diligence raisonnable renforcée et, dans les cas les plus graves, les pays sont appelés à appliquer des contre-mesures pour protéger le système financier international des risques de recyclage des produits de la criminalité, de financement du terrorisme et de financement de la prolifération émanant de la juridiction.

La menace de financement du terrorisme au Canada a été évaluée pour les groupes terroristes ainsi que pour les combattants terroristes étrangers qui, sur la base des renseignements financiers et autres disponibles, sont considérés soit comme représentant le plus grand risque de se livrer à des activités de financement du terrorisme, soit comme présentant des risques émergents de financement du terrorisme. Les combattants terroristes étrangers sont définis comme étant les personnes qui se déplacent à l'étranger pour appuyer des groupes terroristes et lutter à leurs côtés. La menace de financement des activités terroristes de ces groupes a été évaluée en fonction de six critères de cotation, à savoir l'ampleur des connaissances, de l'expertise et du niveau de sophistication général des auteurs de menace pour financer les activités terroristes; l'ampleur du réseau des auteurs de menace et la capacité globale de mener des opérations de financement des activités terroristes; l'ampleur et la portée mondiale des opérations de financement des activités terroristes des auteurs; la valeur annuelle estimée des activités de financement des auteurs au Canada; l'ampleur de la diversification des méthodes qu'emploient les auteurs pour recueillir, rassembler, transférer et utiliser les fonds; et la mesure dans laquelle les fonds peuvent être utilisés contre les intérêts canadiens au pays et sur la scène internationale. Les résultats de la cotation des menaces de financement des activités terroristes de la criminalité sont présentés dans le chapitre 4.

L'évaluation a tenu compte des caractéristiques inhérentes du Canada que peuvent exploiter les individus mal intentionnés à des fins illicites (p. ex., la géographie, l'économie, la démographie). Ainsi, les vulnérabilités inhérentes au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme ont été évaluées pour 33 produits et secteurs économiques. Les secteurs ont été évalués par rapport à cinq critères de cotation, à savoir les caractéristiques inhérentes des secteurs évalués (taille, complexité, accessibilité et intégration); la nature et le nombre de produits et de services vulnérables; le type de relation transactionnelle avec les clients; la portée géographique (proportion des activités en lien avec des administrations ou lieux à risque élevé ); et le degré d'anonymat et de complexité que présentent les modes de prestation de services. Les caractéristiques inhérentes au Canada et les résultats de l'évaluation des vulnérabilités des secteurs et des produits sont présentés dans le chapitre 5.

Évaluation des risques inhérents au RPC-FAT

Les risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme ont été évalués en fonction de la probabilité qu'ils se produisent tout en tenant compte des conséquences de tels événements. La probabilité de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme a été évaluée en faisant correspondre les menaces de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme avec les secteurs et produits intrinsèquement vulnérables via les méthodes et techniques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme utilisées par les auteurs de la menace pour exploiter lesdits secteurs et produits. Des scénarios de risque inhérents au recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme, émanant de ces jugements, ont été utilisés pour reporter les résultats des risques inhérents par secteurs, produits, services dans un nombre de représentations schématiques, qui permettent de comparer les différents niveaux d'exposition de divers secteurs et produits aux risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme au CanadaNote de bas de page 22. Les résultats sont présentés dans le chapitre 6.

Cadre d'évaluation et d'atténuation des risques

L'évaluation des risques inhérents et sa méthodologie doivent être considérées comme un élément central d'un cadre plus large pour soutenir un processus continu d'identification, d'évaluation et d'atténuation des risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme au Canada. Ce cadre est résumé ci-dessous dans le graphique 2.

Graphique 2
Cadre canadien d'évaluation des risques de RPCFAT
Graphique 2: Cadre canadien d'évaluation des risques de RPCFAT
Version texte

Boite 1 (hachurée) : Processus continu pour mettre à jour l'évaluation nationale du risque

Boite 2: Sources de renseignements internes et externes

Boite 3: Menaces, vulnérabilités, renseignements sur les conséquences, renseignement et données

Boite 4: Évaluation en vue de cerner, d'évaluer et de comprendre les risques inhérents

Boite 5: Éclaire la politique du gouvernement et les opérations visant à atténuer les risques

Boite 6: Évaluation alimente les évaluations du risque dans le secteur privé, de même que l'atténuation du risque et les contrôles

Chapitre 3 : Évaluation des menaces liées au recyclage des produits de la criminalité

Aperçu

L'évaluation de la menace de recyclage des produits de la criminalité indique qu'il y a une large gamme de crimes à but lucratif commis par divers individus mal intentionnés au Canada. Chaque année, ces activités criminelles génèrent des milliards de dollars en produits de la criminalité qui pourraient être recyclés.

Les auteurs de menace qui commettent des crimes à but lucratif au Canada vont de simples personnes aux tendances criminelles, dont  des malfaiteurs peu sophistiqués et les membres de gangs de rue, aux professionnels criminalisésNote de bas de page 23 et aux GCONote de bas de page 24. Un GCO peut être défini comme un groupe structuré de trois personnes ou plus agissant de concert dans le but de commettre des activités criminelles, afin d'obtenir, directement ou indirectement, un avantage financier ou autre avantage matériel. En 2020, le Service de renseignements criminels du Canada a évalué 506 GCO et croit qu'il pourrait y en avoir plus de 2 000 qui sont en activité au Canada. La plupart des GCO basés au Canada ne sont pas considérés comme des GCO transnationaux, même si plusieurs ont des liens et des associations internationales. Bien que certains de ces GCO nationaux présentent d'importantes menaces de recyclage des produits de la criminalité, les GCO transnationaux ayant une présence au Canada ou des liens avec le Canada sont généralement les plus menaçants tant en ce qui concerne la production du plus gros volume de produits de la criminalité que  de l'intensité des efforts déployés pour le recyclage des produits de la criminalitéNote de bas de page 25. Les GCO transnationaux les plus puissants du Canada, qui consistent en factions ayant des liens avec l'Italie, l'Europe de l'Est, l'Amérique latine et l'Asie, de même que certains groupes de gangs de motards criminels, participent à plusieurs sources de crimes à but lucratif et possèdent les infrastructures et les réseaux nécessaires afin de recycler de fortes sommes de produits de la criminalité de façon continue et à travers de multiples secteurs, et ce, au moyen d'un ensemble varié de méthodes destinées à éviter la détection et les perturbations. Ces GCO disposent de réseaux solides et de relations stratégiques avec d'autres organisations criminelles tant au pays qu'à l'échelle internationale (par exemple, les cartels transnationaux de la drogue).

Les GCO transnationaux semblent se fier fréquemment aux blanchisseurs d'argent professionnels pour établir et administrer des stratagèmes visant à recycler les produits de leurs activités criminelles. Les opérations de recyclage des produits de la criminalité sophistiquées et à grande échelle ont rarement lieu au Canada sans le recours à des blanchisseurs d'argent professionnels. Le lien entre les GCO transnationaux et les blanchisseurs d'argent professionnels pose une importante menace de recyclage des produits de la criminalité au Canada. En plus des blanchisseurs d'argent professionnels, des facilitateurs, volontaires ou non, semblent continuer de jouer un rôle clé soutenant la perpétration de crimes à but lucratif et le recyclage des produits de la criminalité. La corruption de personnes et l'infiltration d'institutions privées et publiques sont également des sources de préoccupations notables, puisqu'elles permettent un contexte hautement favorable  au blanchiment d'argent et d'autres activités criminelles.

La perpétration de crimes à but lucratif de grande échelle présente souvent une dimension internationale considérable, et elle a tendance à être soutenue par des réseaux de distribution transnationaux. Ces réseaux présentent un degré de sophistication élevé et une grande capacité à déplacer des biens illicites en les faisant entrer au Canada (destination), en les faisant sortir du Canada (source) ou en les faisant transiter par le Canada (transit). Cela comprend des biens volés, des produits contrefaits, des drogues illicites, des animaux sauvages et des personnes. À cette chaîne d'approvisionnement illicite mondial et sophistiquée sont juxtaposés un flux de fonds illicites et un réseau destinés à recycler ceux-ci. Certains acteurs de menace semblent posséder le niveau de sophistication et les capacités nécessaires afin d'exploiter les systèmes commerciaux et financiers internationaux de façon à faire clandestinement le trafic transnational de biens illicites et recycler des produits de la criminalité. Parmi ces capacités, on trouve la présence de complices criminels occupant des postes officiels aux points d'entrée, ou le contrôle d'employés par le biais de méthodes telles que les pots-de-vin, le chantage et l'extorsion. L'objectif étant  de pouvoir compter sur des initiés afin de faciliter le mouvement de biens illicites et de produits de la criminalité en direction et en provenance du Canada. Ces menaces semblent aussi capables d'exploiter les faiblesses de pays étrangers en matière de RPC-FAT ou  certaines situations d'agitation ou de conflits à l'étranger, afin de faciliter le recyclage de produits de la criminalité et d'autres activités criminelles.

Analyse des résultats de l'évaluation de la menace de recyclage des produits de la criminalité

Des experts ont évalué la menace de recyclage des produits de la criminalité pour 23 crimes à but lucratif ainsi que pour  le blanchiment d'argent par des tiers à l'aide des critères suivants :

  1. Sophistication : Mesure dans laquelle les auteurs de la menace possèdent les connaissances, les habiletés et l'expertise requises pour recycler les produits de la criminalité et éviter d'être détectés par les autorités.
  2. Capacité : Mesure dans laquelle les auteurs de la menace disposent des ressources et du réseau requis pour recycler des produits de la criminalité (p. ex., accès à des facilitateurs et liens avec le crime organisé).
  3. Portée : mesure dans laquelle les auteurs de la menace utilisent les institutions financières et les autres secteurs pour recycler les produits.
  4. Produits de la criminalité : Ampleur de la valeur monétaire estimée des produits de la criminalité générés annuellement par l'activité criminelle à but lucratif.

Tel qu'il est présenté dans le tableau 1, huit crimes à but lucratif et la menace de recyclage des produits de la criminalité par des tiers ont été cotés comme représentant une menace de recyclage de produits de la criminalité très élevée, dix ont reçu une cote élevée, cinq ont reçu une cote moyenne et aucun n'a reçu de cote faible.

Tableau 1 : Résultats globaux des cotes de menace de recyclage des produits de la criminalité  

Cote de menace très élevée
  • Fraude sur les marchés de capitaux
  • Fraude commerciale
  • Corruption, collusion et pots-de-vin
  • Paris illégaux
  • Trafic de drogues illicites
  • Fraude par marketing de masse
  • Fraude hypothécaire
  • Recyclage de produits de la criminalité par des tiers
Cote de menace élevée
  • Faux-monnayage
  • Contrefaçon et piratage
  • Passage de clandestins
  • Traite de personnes
  • Fraude d'identité
  • Fraude par cartes de paiement
  • Criminalité liée à la pollution
  • Vol et vol qualifié
  • Évasion fiscale et fraude fiscale
  • Contrebande et trafic du tabac
Cote de menace moyenne
  • Extorsion
  • Contrebande et trafic d'armes à feu
  • Pêche illégale
  • Prêt usuraire
  • Criminalité liée aux espèces sauvages

Menace très élevée de recyclage des produits de la criminalité

Menace de RPC découlant de la fraude sur les marchés de capitaux : Au Canada, on constate qu'il existe toujours de la fraude relative aux valeurs mobilières, y compris de la fausse représentation en matière de placements ainsi que d'autres formes d'inconduite liée à la fraude sur les marchés de capitaux, dont les fuites d'information découlant de délits d'initié et la manipulation des marchés. Lorsque ce type de fraude survient, elle met souvent en cause des sommes importantes et un nombre important d'investisseurs. Même si moins de Canadiens reçoivent des offres de fraude en matière d'investissement (18 % en 2017, ce qui est moins que le pourcentage de 22 % observé en 2016 et moins que le pourcentage de 27 % observé en 2012), un tout aussi grand nombre de Canadiens sont victimes de fraude en matière d'investissement : le niveau de victimisation due à la fraude demeure stable à 4 %Note de bas de page 26. Bien qu'il semble difficile d'établir précisément le montant réel des pertes déclarées, la fraude sur les marchés de capitaux constitue une source importante de produits de la criminalité. Au Canada, la plupart des fraudes de grande envergure relatives aux valeurs mobilières ont été perpétrées par des professionnels criminalisés, qui ont (ou sont censés avoir) un titre professionnel et une expertise financière.

Pour perpétrer une fraude sur des marchés financiers, notamment les stratagèmes nationaux et internationaux de plus grande taille et plus élaborés (comme les stratagèmes à la Ponzi) nécessitent beaucoup de connaissances et d'expertise, ainsi que, souvent, un accès à un réseau de facilitateurs qui contribuent volontairement ou non  à orchestrer et perpétrer la fraude. Parallèlement à ces stratagèmes frauduleux complexes, on trouve des stratagèmes sophistiqués de blanchiment conçus pour intégrer les produits liés à ce type de fraude et à les légitimer. Dans ce contexte, les stratagèmes de recyclage des produits de la criminalité impliquent un éventail de secteurs et de méthodes, y compris des sociétés fictives ou de façade, des transferts électroniques de fonds, le fractionnement des dépôts ou le schtroumpfageNote de bas de page 27 et des prête-noms. Cependant, une tendance émergente observée est la présence émergente de fraudeurs sur Internet impliqués dans la fraude de valeurs mobilières. Ces fraudeurs utilisent Internet et d'autres technologies de pointe (ainsi que l'intérêt du public à l'égard des technologies émergentes, comme la chaîne de blocs) pour commettre des fraudes sur les marchés de capitaux.

Menace de recyclage des produits de la criminalité découlant de la fraude commerciale : La fraude commerciale est singulière en ce sens qu'elle constitue une infraction désignée pour le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes ainsi qu'un mécanisme de recyclage des produits de la criminalité en soi. Les GCO transnationaux et les acteurs et réseaux terroristes qui ont recours à la fraude commerciale aux fins de blanchiment d'argent sont très perfectionnés et compétents, ayant les connaissances, l'expertise et les relations internationales nécessaires afin de manipuler plusieurs chaînes commerciales, processus douaniers et mécanismes de financement. Ceux-ci sont souvent en activité sous le couvert de sociétés de façade ou légitimes. Ce phénomène est généralement appelé le recyclage de produits de la criminalité de nature commerciale (RPCNC).

On observe toujours un degré élevé de sophistication et de capacité en ce qui concerne la fraude commerciale et le recyclage des produits de la criminalité. Les auteurs de menaces de ce domaine semblent utiliser plusieurs secteurs pour recycler les produits, autant au Canada qu'à l'échelle internationale. Ceux-ci sont soupçonnés d'avoir recours à des sociétés fictives et de façade, qu'elles soient nationales ou étrangères, de mélanger des fonds illicites à travers des entreprises légitimes (qu'elles nécessitent ou non de fortes liquidités) et de faire appel à des blanchisseurs d'argent tiers, y compris des blanchisseurs d'argent professionnels. Il a aussi été observé que les organisations criminelles manipulent des documents de douane et d'expédition et se livrent à des activités commerciales internationales frauduleuses avec des importateurs et des exportateurs étrangers de connivence. Le commerce de produits faussement décrits permet de faire circuler les opérations financières illicites vers l'administration choisie sous la forme d'un paiement pour les produits en question. L'importateur ou l'exportateur paie des montants gonflés afin de faire circuler les produits illicites. En outre, il a été observé que les stratagèmes de RPCNC révèlent une préférence pour les marchandises qui sont sujettes à la détérioration (ce qui augmente l'incitation des autorités douanières à réduire au minimum l'examen des marchandises) ou difficiles à examiner physiquement, ou encore celles dont le prix unitaire moyen peut être difficile à établir en raison de valeurs variables, ce qui rend la fausse description plus difficile à détecter. De récents rapports d'organismes d'application de la loi font état d'une observation accrue de l'utilisation de techniques de fraude douanière pour le RPCNC à destination et en provenance du Canada, ce qui pourrait avoir été exacerbé dans le contexte de la pandémie de la COVID-19.

Menace de recyclage des produits de la criminalité découlant de la corruption, de la collusion et des pots de vin : La corruption et les pots de vie au Canada se présentent sous de nombreuses formes, allant d'activités de petite échelle avec paiement de pot-de-vin afin d'obtenir un avantage à des stratagèmes à grande échelle visant à obtenir illégalement des marchés publics lucratifs. Des marchés publics peuvent également être obtenus illégalement par des stratagèmes de collusion qui n'impliquent pas le paiement d'un pot-de-vin. Bien que ces stratagèmes ne génèrent pas de produits de la criminalité sous la forme d'un paiement de pot-de-vin, ils peuvent tout de même générer des fonds illicites, notamment par l'imposition de coûts d'approvisionnement public gonflés. Le contrôle direct d'entreprises légitimes par les GCO ou le recours à des menaces et à l'intimidation pour contraindre d'autres entrepreneurs sont habituellement utilisés pour mener ces activités criminelles.

La menace de recyclage des produits de la criminalité découlant de la corruption, de la collusion et des pots-de-vin a une cote très élevée, ce qui s'explique principalement par la taille du secteur de l'approvisionnement public et par les possibilités que cela présente pour obtenir illégalement des contrats de grande valeur. En plus des activités de corruption exercées au pays, certaines sociétés canadiennes ont aussi pris part au paiement de pots-de-vin à des représentants étrangers en vue de promouvoir leurs intérêts commerciaux. Les GCO qui sont capables d'infiltrer le processus d'approvisionnement public et l'économie légitime possèdent la sophistication et la capacité nécessaires pour recycler de fortes sommes de fonds illicites à l'aide de diverses méthodes et techniques de recyclage des produits de la criminalité, y compris les banques, les entreprises de services monétaires (ESM), les biens de luxe, les placements et les sociétés de façade. Des cas ont particulièrement illustré comment des réseaux et différents niveaux de sociétés prête-nom ont été utilisés pour le paiement de pots-de-vin et la corruption de fonctionnaires étrangers. Il est également possible que  des avocats, des comptables, des blanchisseurs d'argent professionnels et  des fonctionnaires soient utilisés afin de faciliter le recyclage de produits liés à la corruption.

Menace de RPC découlant des paris illégaux : La cote de cette menace est augmentée à un niveau très élevé pour refléter l'observation par les organismes d'application de la loi d'un accroissement des capacités de blanchiment, de la portée des secteurs utilisés pour celui-ci et du volume des produits de la criminalité associés à ces activités. Au Canada, les paris illégaux continuent d'englober les paris privés et les maisons de jeu privées, les machines de jeux vidéo et de loterie non réglementées, ainsi que les paris en ligne non réglementésNote de bas de page 28. Le crime organisé est le principal fournisseur de services et d'opportunités de paris illégaux au Canada, bien que l'on trouve des exploitants de plus petite échelle. Le marché des paris illégaux semble être de petite taille quant aux nombres d'auteurs de menaces en cause, mais celui-ci est soupçonné d'être hautement lucratif pour les acteurs impliqués. Dans le cas des activités traditionnelles de prise de paris clandestins, des stratagèmes pyramidaux sont utilisés afin de protéger les membres qui se situent aux échelons supérieurs de la pyramide. Les preneurs de paris n'acceptent que l'argent liquide, compte tenu de l'anonymat qu'elle leur procure.

Les GCO continuent également d'exploiter des sites de paris illégaux sur les territoires où les paris en ligne sont légaux ou les administrations où l'application de la loi fait défaut. Les GCO qui évoluent dans cette sphère demeurent des acteurs sophistiqués capables d'avoir recours à divers secteurs et à diverses méthodes pour recycler les produits de la criminalité. Les principales formes de produits des paris illégaux sont l'argent comptant et, possiblement, les biens de grande valeur (dans les cas où les joueurs pourraient ne plus avoir d'argent pour payer). Les paris illégaux peuvent aussi être en soi une technique de blanchiment d'argent par l'intermédiaire de prêts de produits de la criminalité aux joueurs. Les forces de l'ordre signalent que les fermetures de casinos physiques en raison de la pandémie de COVID-19 ont entraîné une augmentation des jeux illicites souterrains et des activités de recyclage des produits de la criminalité connexes.

Selon la GRC, le jeu illégal constitue une source clé de revenus pour les réseaux du crime organisé, le Service canadien de renseignements criminels signalant que ces produits sont utilisés pour financer d'autres activités criminelles, notamment le trafic de drogue et le blanchiment d'argent. Les OCG peuvent en outre collaborer pour partager certains frais généraux liés à la création et à l'entretien de sites Web de jeux d'argent en ligne illégaux, héberger des serveurs de jeux d'argent à terre ou au large et fournir un capital de démarrage initialNote de bas de page 29.

Menace de RPC découlant du trafic de drogues illicites : Le marché des drogues illicites est toujours le plus grand marché criminel au Canada. Le cannabis (après la légalisation), la cocaïne, les méthamphétamines et l'héroïne représentent chacune une part importante de ce marché, le fentanyl et ses analogues étant de plus en plus présents. Bien que de nombreux acteurs de la menace se livrent au trafic de drogue, les GCO transnationaux restent les auteurs les plus menaçants et les plus puissants, faisant preuve de niveaux très élevés de sophistication, de capacité et de portée dans leurs activités de recyclage des produits de la criminalité. Ces groupes sont souvent liés à d'autres GCO et à plusieurs réseaux organisés à l'échelle nationale et internationale afin de recycler les produits de la criminalité liés à la drogue. Les GCO continuent d'avoir accès à des blanchisseurs d'argent professionnels, des facilitateurs (tels que des mules financières et des mandataires) et ont souvent le contrôle d'un certain nombre d'entreprises (écran et/ou légitimes) dans le cadre de leurs opérations de recyclage des produits de la criminalité. Les GCO emploient un grand nombre de méthodes de recyclage des produits de la criminalité, y compris le recours à plusieurs secteurs, le mélange de fonds illicites avec des entreprises légitimes, des sociétés de façade et fictives nationales et étrangères, la contrebande en vrac d'argent, le RPCNC et les cartes prépayées. Malgré la prévalence des opérations en espèces pour blanchir les produits de la drogue, l'utilisation de monnaies virtuelles pour se procurer des drogues par l'intermédiaire du Web caché est de plus en plus courante. Avec les récentes fermetures frontalières attribuables à la pandémie de COVID-19, les techniques traditionnelles de blanchiment d'argent par passeur de fonds ont été perturbéesNote de bas de page 30. Il n'est pas encore clair si les GCO rechercheront des méthodes alternatives permanentes telles que les virements électroniques ou reviendront aux techniques traditionnelles une fois les frontières rouvertes.

Menace de RPC découlant de la fraude par marketing de masse (FMM) : La FMM demeure très présente au Canada, et les escroqueries qui y sont associées augmentent en fréquence et en sophistication au fil du temps. Toronto, Montréal, Vancouver, Calgary et Edmonton continuent d'être considérés comme les principales bases d'exploitation des stratagèmes de FMM, bien que somme toute, relativement peu de GCO canadiens aient été observés comme étant impliqués dans des stratagèmes récents compte tenu que cette menace comporte une composante étrangère très forte. Les types de stratagèmes de FMM courants au Canada comprennent les fraudes en ligne, les fraudes d'extorsion, et l'hameçonnage et les fraudes de services. La fraude fiscale au nom de l'ARC est un exemple d'escroquerie par extorsion. Les fraudeurs qui prétendent être l'ARC appellent des clients et leur affirment que ces derniers doivent de l'argent à partir d'une déclaration de revenus antérieure. On déclare aux clients qu'ils devront payer des frais supplémentaires et s'exposent à une peine d'emprisonnement ou à l'expulsion s'ils ne paient pas la somme – par virement bancaire, carte de crédit prépayée, carte-cadeau ou bitcoin. La fraude au nom de l'ARC à elle seule a entraîné des pertes déclarées de plus de 17,2 millions de dollars au Canada entre 2014 et 2019.Une autre tendance à la hausse est celle des escroqueries liées à la continuité, où un essai ou un produit « gratuit » est offert en ligne; la victime doit couvrir les frais d'expédition par carte de crédit et se fait ensuite facturer des frais mensuels cachés. Au cours des deux dernières années, une augmentation de 859 % des escroqueries liées à la continuité a été notée. Les fraudeurs qui se font passer pour des banques ou des fournisseurs de cartes de crédit pour obtenir des informations financières ou des transferts d'argent à l'étranger via les ESM constituent une autre tendance émergente.

Bien que certains GCO établis au Canada soient impliqués dans cette activité, les acteurs étrangers, qui font parfois appel à des associés canadiens pour l'acheminement des paiements, constituent la principale menace. Ces acteurs emploient une gamme de méthodes et de techniques de recyclage des produits de la criminalité, y compris le schtroumpfage, la structuration, le recours à des prête-noms et des mules, les sociétés fictives, les ESM, les systèmes bancaires informels et les sociétés de façade. Bien que les pertes déclarées aient été en moyenne d'environ 74 millions de dollars par année de 2014 à 2017Note de bas de page 31, les pertes réelles sont considérées comme étant nettement supérieures et de l'ordre de plusieurs centaines de millions de dollars par année, compte tenu que la FMM est habituellement sous-rapportée par les victimes. La pandémie de la COVID-19 a entraîné une augmentation observée des stratagèmes de fraude en ligne et des fraudes liées à la pandémie, faisant usage notamment de cartes prépayées et de monnaies virtuelles.

Menace de RPC découlant de la fraude hypothécaire : On soupçonne que la fraude hypothécaire a augmenté depuis la première publication de ce rapport en 2015. Celle-ci continue de se produire partout au Canada, bien qu'elle soit plus répandue dans les grandes régions urbaines du Québec, de l'Ontario, de l'Alberta et de la Colombie-Britannique, en particulier dans les régions du Grand Vancouver et de Toronto. Certaines formes de fraude hypothécaire sont entreprises par des personnes qui déclarent de faux renseignements personnels, comme leur revenu, pour avoir droit à un prêt qu'elles n'obtiendraient pas autrement. Cela est souvent qualifié de fraude pour le logement, car l'emprunteur essaie d'avoir accès à la propriété et n'a pas l'intention de faire défaut sur le prêt. Toutefois, d'autres types de fraude hypothécaire sont également entrepris par des GCO dans le but de faciliter une autre activité criminelle (par exemple, la production et la distribution de drogues illicites, le blanchiment d'argent) ou pour en tirer directement des bénéfices en fraudant un prêteur. L'escalade rapide des prix du logement dans certaines régions du Canada au cours des dernières années a offert de nouvelles possibilités lucratives de fraude hypothécaire (par exemple, en facilitant les stratagèmes de surévaluation), ce qui a pu accroître considérablement l'attrait de ce type de fraude pour les GCO. Les GCO qui emploient des stratagèmes de fraude hypothécaire sont sophistiqués tant en ce qui a trait à la fraude qu'aux activités de recyclage des produits de la criminalité qui y sont associées. Pour orchestrer la fraude, ces groupes recherchent souvent l'assistance de professionnels, participant consciemment ou inconsciemment, du secteur de l'immobilier, dont des agents, des courtiers, des évaluateurs et des avocats. Il arrive souvent aussi que les GCO fassent appel à des prête-noms et déclarent de faux renseignements pour masquer l'identité réelle de l'emprunteur. Ainsi, des anomalies pouvant sembler en surface être une fraude pour le logement peuvent en fait mettre en cause des activités criminelles encore plus nuisibles perpétrées par des GCO faisant  appel à un prête-nom afin de masquer la personne réellement impliquée dans la transaction. Pour blanchir les produits de la fraude hypothécaire, des blanchisseurs d'argent professionnels peuvent mettre à contribution des professionnels de l'immobilier, y compris des avocats spécialisés en immobilier, qui présentent des tendances criminelles. Les GCO qui participent à la fraude hypothécaire semblent aussi recycler des fonds par l'entremise de banques, d'ESM, d'entreprises légitimes et de comptes de fiducie. Les victimes de la fraude hypothécaire, parmi lesquelles on peut trouver des propriétaires et des prêteurs hypothécaires du Canada, peuvent subir de lourdes pertes financières suite à ce type de fraude.

Menace de RPC découlant du blanchiment d'argent par des tiers : Les opérations de recyclage des produits de la criminalité sophistiquées et menées à grande échelle au Canada, notamment celles reliées aux GCO transnationaux, impliquent souvent des blanchisseurs d'argent tiers, à savoir des blanchisseurs d'argent professionnels, des prête-noms et des mulesNote de bas de page 32. Parmi ces trois groupes, les blanchisseurs d'argent professionnels posent la plus grande menace, tant au niveau du total des sommes impliquées que de la sophistication employée dans le recyclage de produits de la criminalité générés au pays et à l'étranger par l'entremise du Canada (et de ses institutions financières). Les blanchisseurs d'argent professionnels se spécialisent dans le blanchiment d'argent, offrent généralement leurs services aux criminels moyennant des frais, et ne sont habituellement pas associés directement à l'activité criminelle sous-jacente. Ces personnes ont pour activité le recyclage de grandes sommes d'argent, et, en raison de la nature même de leurs activités, elles possèdent le niveau de sophistication  et la capacité nécessaires pour soutenir des opérations de recyclage des produits de la criminalité complexes, durables et à long terme. En tant que groupe, ils utilisent de nombreuses méthodes et techniques différentes, impliquant souvent l'utilisation de plusieurs entreprises fictives, d'ESM non réglementées et de mandataires pour effectuer plusieurs niveaux de transactions afin de brouiller la piste et d'empêcher la capacité de lier les fonds à ses origines criminelles. Les blanchisseurs d'argent professionnels sont les plus préoccupants, puisqu'ils sont souvent les maîtres d'œuvre de stratagèmes de recyclage des produits de la criminalité à grande échelle et que les plus puissants GCO transnationaux du Canada font appel à eux. Les prête-noms et les mules présentent une moins grande menace, laquelle demeure tout de même importante puisqu'ils peuvent s'avérer essentiels à l'exécution ou à la facilitation de stratagèmes de recyclage des produits de la criminalité, de grande ou de petite envergure.

Menaces élevées de recyclage des produits de la criminalité

Menace de RPC découlant de la contrefaçon et du piratage : Cette menace est rétrogradée au niveau élevé compte tenu du renseignement plus récent sur la prévalence relative connue de ces activités dans l'environnement canadien. La prévalence générale des produits contrefaits et piratés au Canada persiste toujours. La Chine est la principale source de produits contrefaits importés au Canada, avec Toronto, Montréal et Vancouver fournissant les principaux points d'entrée. Les GCO étrangers et, possiblement, nationaux semblent avoir établi des liens avec des canaux de distribution illicite mondiaux afin d'exploiter ces derniers, leur permettant ainsi d'introduire de plus en plus de produits contrefaits au Canada. D'après le renseignement disponible, les acteurs en cause sont sophistiqués et compétents en ce qui a trait au  recyclage  des produits générés par les biens contrefaits. Ces capacités continuent d'être essentielles à la viabilité des opérations, vu le grand nombre de participants dans l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement mondiale.

Menace de RPC découlant de la contrefaçon de monnaie : La production à grande échelle de monnaie contrefaite canadienne continue d'être principalement entreprise par les GCO établis dans les grandes villes du Canada qui ciblent la nouvelle série de billets de banque en polymère. Il s'agit d'un crime générant  des produits de la criminalité, mais les GCO doivent également blanchir la monnaie contrefaite. En 2019, la valeur des billets contrefaits passés avoisinait 1,6 million de dollars, une valeur relativement constante entre 2015 et 2020. Les GCO continuent de s'adonner à la contrefaçon de la monnaie parallèlement  à d'autres activités criminelles à but lucratif. Les GCO qui produisent et distribuent des monnaies contrefaites de qualité élevée sont soupçonnés de présenter un niveau élevé de sophistication et une forte capacité pour ce qui est de recycler les produits de la contrefaçon de la monnaie. Les GCO possèdent le réseau et l'infrastructure nécessaires pour recycler avec succès, dans un certain nombre de secteurs, des produits, surtout en espèces, qui découlent non seulement de la contrefaçon de la monnaie, mais aussi des autres activités criminelles de ces groupes.

Menace de RPC découlant du passage de clandestins : Le Canada est la cible de réseaux de passage de clandestins mondiaux qui sont de plus en plus sophistiqués.Le passage de clandestins continue d'être principalement le fait  d'un petit nombre de GCO qui sont bien établis et ont ayant acquis la sophistication et la capacité nécessaires pour assurer le passage à des fins lucratives de clandestins par-delà de multiples frontières. Une telle activité nécessite un degré élevé d'organisation, de planification et de liens internationaux. Les GCO qui évoluent dans cette sphère continuent d'être très sophistiqués et compétents pour ce qui est de recycler les produits de la criminalité découlant du passage de clandestins. Un examen de cas récents présumés de recyclage des produits de la criminalité en grande partie liés au passage de clandestins renforce l'idée que les GCO peuvent avoir recours à divers secteurs et à diverses méthodes afin de recycler les produits de la criminalité, y compris des sociétés de façade, des entreprises légitimes, des banques, des ESM et des casinos. Les changements technologiques, comme l'utilisation de cryptomonnaies, la demande de main-d'œuvre bon marché et la facilité de circulation de l'argent, peuvent faciliter les services de passage de clandestins.

Menace de RPC découlant de la traite de personnes : Le Canada continue d'être un pays source, de transit et de destination pour la traite de personnes. Les services de police au Canada ont signalé 1 708 incidents de traite des personnes entre 2009 et 2020. Entre 2008-2009 et 2017-2018, il y a eu 582 cas réglés devant les tribunaux de juridiction criminelle pour adultes qui comportaient au moins une accusation de traite de personnes. La traite nationale de personnes aux fins d'exploitation sexuelle représente la forme de traite de personnes la plus courante au CanadaNote de bas de page 33. Le commerce sexuel est en grande partie perpétré par des individus aux tendances criminelles qui font du recrutement et de la traite au pays et, dans une moindre mesure, par des GCO. Certains GCO  limitent leurs activités de recrutement et de traite au niveau domestique, tandis que d'autres le font tant au pays qu'à l'étranger. De façon générale, les individus aux tendances criminelles ne sont pas soupçonnés de posséder des niveaux élevés de sophistication ou de capacité sur le plan du recyclage des produits de la traite de personnes. On évalue plutôt que la plupart des activités de ces individus sont centrées sur le recyclage de produits en espèces afin d'en faire un usage personnel immédiat, tirant parti d'un réseau très restreint, voire inexistant, et ayant recours à un nombre limité de secteurs et de méthodes. Les GCO impliqués dans la traite de personnes et qui en génèrent d'importantes sommes sont soupçonnés d'utiliser des infrastructures de recyclage des produits de la criminalité déjà établis. Certains GCO, bien qu'ils soient moins sophistiqués au chapitre du blanchiment d'argent, possèdent néanmoins une plus grande capacité compte tenu de leur accès à des sites pouvant faciliter le blanchiment d'argent (par exemple, des bars de danseuses et des salons de massage) ainsi qu'à des victimes pouvant servir de prête-noms ou mules pour des dépôts et des virements télégraphiques.

Menace de RPC découlant du vol d'identité et de la fraude (« crimes liés à l'identité ») : Les crimes liés à l'identité continuent d'être répandus au Canada et d'être préoccupants, étant donné que les identités volées servent souvent à soutenir l'exécution d'autres activités criminelles. En 2018, les services de police à travers le  Canada ont signalé 19 584 incidents de vol d'identité et de fraude, ce qui représente une augmentation de 37 % par rapport à 2015. Ces activités peuvent être menées par des criminels agissant seuls, des GCO établis à l'étranger et des GCO canadiens. Les GCO qui commettent des crimes liés à l'identité sont bien établis et résilients et disposent de réseaux nationaux et internationaux bien développés. Ils sont aussi associés au trafic de stupéfiants, au passage de clandestins et à la contrefaçon de monnaie. On soupçonne que ces GCO ont recours à plusieurs méthodes et secteurs pour recycler des fonds. Les crimes liés à l'identité peuvent soutenir le blanchiment d'argent en soi, en permettant à certaines personnes de disposer de fausses pièces d'identité de façon à contourner les mesures de vigilance en place à l'égard de la clientèle. En 2017, les Canadiens ont signalé plus de 11 millions de dollars en pertes attribuables aux crimes liés à l'identitéNote de bas de page 34. Le vol d'identité facilite également l'exécution d'autres activités criminelles générant  d'importantes sommes de produits de la criminalité.

Menace de RPC découlant de la fraude par carte de paiement : Entre 2014 et 2019, les pertes déclarées découlant de fraudes liées aux paiements par carte de crédit ont augmenté considérablement, tandis que la fraude liée au paiement par carte de débit a diminué au cours de la même période (en grande partie en raison des progrès technologiques). La fraude par carte de paiement continue d'être un marché rentable, comme en témoigne le fait qu'en 2013, les Canadiens avaient déclaré près de 500 millions de dollars par année en pertes découlant de la fraude par carte de paiement, et qu'en 2016, ce montant est passé à 700 millions de dollars par annéeNote de bas de page 35. La fraude de type « par absence de carte »Note de bas de page 36 génère les valeurs de pertes la plus élevée parmi toutes les catégories de fraude liée aux cartes de crédit au Canada, suivie de la contrefaçon de cartes de créditNote de bas de page 37. À l'instar d'autres fraudes, les GCO sont fortement impliqués : 24 GCO nationaux étaient impliqués dans la fraude par carte de paiement en 2017, et il est fort possible  que plusieurs autres exerçant leurs activités principalement à l'étranger le soient également. La participation des criminels organisés à ce type de fraude peut englober les vols de cartes, les demandes de cartes frauduleuses, les faux dépôts, la dissimulation et la fraude de paiement à distance. La plupart des GCO de cette sphère sont sophistiqués et possèdent des connaissances technologiques spécialisées leur permettant de commettre la fraude par carte de paiement. Cela se reflète également dans le degré élevé de sophistication et de capacité permettant de blanchir les produits générés. Plusieurs secteurs sont soupçonnés d'être utilisés dans le but de recycler des produits liés aux cartes de paiement, y compris les institutions financières, les ESM et les casinos, ainsi que plusieurs méthodes, dont le fractionnement des dépôts bancaires, le schtroumpfage, les sociétés de façade et le recours à des prête-noms et à des mules.

Menace de RPC découlant de crimes liés à la pollution : Au Canada, les crimes relatifs à la pollution continuent de se présenter sous diverses formes et des GCO et des entreprises sont en cause. Parmi celles-ci, le fait  que des GCO ont infiltré le secteur de la gestion des déchets est particulièrement préoccupant, puisque la possession de sociétés de gestion des déchets peut s'avérer un moyen efficace de générer des bénéfices illicites en déversant illégalement des déchets ainsi que pour recycler les profits émanant d'autres activités criminelles. Les GCO peuvent aussi participer au commerce de déchets électroniques et à l'importation de produits contrefaits qui ne respectent pas les normes environnementales du Canada (p. ex., les moteurs contrefaits). En dernier lieu, certaines sociétés privées et publiques peuvent employer des pratiques trompeuses pour miner les droits d'émissions et peuvent déverser illégalement des déchets ou faire appel à des tiers pour ce faire. Les GCO continuent de faire preuve d'un haut degré de sophistication dans la nature de leurs activités et de leurs opérations. La sophistication, la capacité et la portée observées sont élevées pour ce qui est de l'aptitude à recycler les produits de crimes liés à la pollution.

Menace de RPC découlant du vol et du vol qualifié : Le vol et le vol qualifié à petite échelle continuent d'être principalement perpétrés par des opportunistes et des individus au niveau de sophistication limité, tandis que le vol et le vol qualifié de grande échelle sont surtout associés aux GCO fortement actifs dans le vol de véhicules à moteur, d'équipement lourd et de cargaison. Il existe une tendance à la baisse à long terme du vol et du vol qualifié de véhicules déclarés par la police, mais la proportion croissante de véhicules non retrouvés  laisse croire que les véhicules sont volés par des GCO sophistiqués, qui en font ensuite le trafic pour les faire disparaître. Les acteurs les plus sophistiqués et les plus compétents ont toujours tendance à être ceux qui possèdent des réseaux de vol de voitures bien établis au Canada. Ces réseaux servent à approvisionner les marchés étrangers en véhicules canadiens volés. Les GCO qui possèdent des réseaux de vol de voitures établis au Canada sont également soupçonnés d'être hautement sophistiqués et compétents du point de vue du recyclage des produits de la criminalité.

À l'instar de l'évaluation précédente, les GCO semblent employer un éventail de fraudes commerciales et de techniques de recyclage des produits de la criminalité connexes afin de masquer l'origine illicite des automobiles, ainsi qu'une gamme de méthodes servant à rapporter les produits de la vente au Canada, y compris la contrebande en vrac d'argent comptant et les transferts électroniques de fonds (TEF). Les sociétés de façade, les sociétés fictives et les prête-noms peuvent servir à dissimuler le retour, au Canada, de fonds découlant des ventes illicites effectuées dans d'autres pays. Les GCO peuvent faire appel à des blanchisseurs d'argent professionnels pour orchestrer des stratagèmes de recyclage des produits de la criminalité, compte tenu des importants bénéfices que génèrent ces réseaux et des défis associés au recyclage de produits générés sur de multiples territoires.

Menace de RPC découlant de l'évasion fiscale : L'évasion fiscale est perpétrée sous un grand nombre de formes distinctes au Canada, ayant pour objectif ultime de sous-payer ou d'éviter le paiement d'impôts ou de taxes dus, ou de demander illicitement des remboursements ou des crédits. Bien qu'elle soit souvent perpétrée par des individus opportunistes à l'aide de techniques relativement peu sophistiquées pour présenter de manière inexacte leur situation fiscale, l'évasion fiscale à l'étranger présente une menace de plus en plus complexe, mondiale et agressive. Certains conseillers fiscaux– y compris certains comptables, avocats et conseillers financiers – prodiguent des conseils sur la façon de se soustraire à l'impôt ou d'obtenir des remboursements frauduleux à l'aide de diverses techniques. L'évasion fiscale est également perpétrée par des criminels professionnels, y compris des GCO, qui peuvent orchestrer des stratagèmes d'évasion fiscale (p. ex., la fraude liée au remboursement de droits ou d'impôts). Les techniques de blanchiment d'argent continuent de témoigner de la sophistication des techniques en cause dans les stratagèmes d'évasion fiscale, tandis que la mondialisation des opérations financières, la prévalence accrue des technologies et un meilleur accès aux facilitateurs augmentent leurs capacités et leur sophistication. Il existe actuellement une tendance liée à l'utilisation de structures et de comptes à l'étranger qui sont de plus en plus complexes pour transférer les bénéfices vers des pays à faible taux imposition et transférer les fonds vers des comptes qui ne sont pas déclarés aux autorités fiscales.

Menace de RPC découlant de la contrebande et du trafic du tabac : La plus grande partie  du tabac illicite que l'on retrouve au Canada continue de provenir  d'opérations de fabrication situées dans les réserves autochtones qui chevauchent le Québec, l'Ontario et l'État de New York. De plus, des produits de la criminalité sont également générés du commerce de cigarettes contrefaites provenant de l'étranger; de cigarettes produites légalement au Canada, aux États-Unis ou à l'étranger et vendues en franchise de taxe; et du tabac « à coupe fine » qui est importé illégalement, surtout par des fabricants situés au Canada. Les GCO et les individus aux tendances criminelles continuent d'exercer leurs activités dans le commerce illicite du tabac, qui demeurent rentables. Certains des GCO mis en cause dans le commerce illicite du tabac possèdent un niveau élevé de sophistication et de capacité en termes de recyclage des produits de la criminalité, tirant parti de leur expertise découlant de leur participation à d'autres activités criminelles, comme le trafic de stupéfiants. Ces GCO emploient divers secteurs et diverses méthodes (par exemple, mélange, fractionnement, schtroumpfage et raffinage) pour recycler la forte somme de produits en espèces qui sont générés par la contrebande et le trafic de tabac illicite. Les simples individus aux tendances criminelles présentent par contre probablement des niveaux beaucoup moins élevés de sophistication ou de capacité sur le plan du recyclage des produits de la criminalité. La cote de menace découlant de la contrebande et du trafic du tabac a été réduite par rapport au rapport précédent afin de mieux refléter les divers niveaux de sophistication et de compétence en matière de recyclage des produits de la criminalité démontrés par les acteurs criminels dans ce domaine.

Menaces moyennes de recyclage des produits de la criminalité

Menace de RPC découlant de l'extorsion : Les incidents d'extorsion signalés par la police ont augmenté de 44 % entre 2017 et 2018Note de bas de page 38, principalement en raison d'une augmentation importante de l'extorsion de nature cybernétiqueNote de bas de page 39 (par exemple, les rançongiciels). L'extorsion de nature cybernétique est en train de devenir la principale forme d'extorsion génératrice de produits et a touché des entreprises, des hôpitaux et des universités du Canada, principalement par des attaques au moyen de rançongiciels. Certains GCO continuent d'employer systématiquement des méthodes traditionnelles d'extorsion en conjonction avec d'autres crimes ou pour promouvoir ces crimes. Par exemple, en ayant recours à l'extorsion en tant qu'outil destiné à obtenir de l'argent et des biens en échange de la protection de certaines entreprises (c'est-à-dire, des manœuvres frauduleuses d'extorsion); à contrôler la distribution de drogues illicites; à forcer le remboursement de dettes liées aux paris illégaux; ou à avoir accès à des points d'entrée.

Les acteurs criminels impliqués dans l'extorsion incluent  des individus et des GCO. Ceux-ci font donc preuve d'une sophistication, d'une capacité et d'une portée pouvant varier en termes de blanchiment. Le fractionnement et le schtroumpfage, le mélange de fonds illicites et les activités de raffinage dans les casinos peuvent servir à recycler les produits de l'extorsion, surtout ceux en argent comptant. Les criminels qui se livrent à l'extorsion de nature cybernétique possèdent souvent une expertise technologique leur permettant de commettre leurs crimes et de dissimuler leur identité et leur emplacement physique. Les incidents d'extorsion de nature cybernétique génèrent principalement les produits de la criminalité sous forme de monnaie virtuelle, et ces fonds sont blanchis à travers ce même vecteur (par exemple, superposer les fonds à l'aide de multiples opérations virtuelles) afin de tirer parti de l'anonymat en ligne.

Menace découlant de la contrebande et du trafic d'armes à feu : Au Canada, le marché des armes à feu illicites continue d'être dominé par des GCO peu sophistiqués (principalement des gangs de rue en activité dans les métropoles). Très peu de GCO sophistiqués participent au trafic ou à la contrebande d'armes à feu dans le but de réaliser d'importants bénéfices. Ces activités sont habituellement plutôt reliées à d'autres formes de criminalité comme le trafic de drogues illicites. En effet, les GCO se servent principalement des armes à feu afin de consolider leur position sur d'autres marchés criminels, tels que le commerce de la drogue susmentionné. Bien que la majorité des armes à feu récupérées au Canada semblent provenir de l'intérieur des frontières, la majorité des armes de poing que l'on parvient à dépister sont introduites illégalement au Canada à partir de pays étrangers, surtout des États-Unis. Des GCO peuvent vendre des armes à feu illicites à d'autres GCO et à des individus aux tendances criminelles, mais il n'est toutefois pas clair  si ces GCO agissent à titre de plaque tournante pour l'approvisionnement en armes à feu illicites au Canada.

Dans certaines régions du pays, certains faits observés laissent à penser qu'il existe une tendance à la hausse concernant des citoyens détenteurs de permis achetant des armes à feu pour les revendre illégalement, étant donné la marge qui peut être obtenue des armes à feu vendues sur le marché noir. Cette tendance n'est toutefois pas considérée comme très répandue. Dans l'ensemble, ces GCO peuvent utiliser leurs infrastructures de recyclage des produits de la criminalité déjà existantes pour recycler les produits de leurs activités de trafic d'armes à feu. En règle générale, ces groupes chercheraient à exploiter un nombre relativement restreint de secteurs distincts à l'aide de diverses méthodes. Les trafiquants peu sophistiqués ou de moindre importance s'y adonneront de façon ponctuelle où ils transigeront soit en argent liquide, soit par l'intermédiaire de plateformes en ligne utilisant l'argent liquide ou la monnaie virtuelle.

Menace de RPC découlant de la pêche illégale : La pêche illégale désigne généralement la pêche par des navires nationaux ou étrangers qui n'en ont pas la permission ou qui entreprennent des activités de pêche qui contreviennent aux lois, aux règlements ou aux obligations internationales du pays. Elle peut également impliquer ou être connexe à d'autres activités illégales, souvent de nature transnationale et organisée, comme la fraude documentaire, le trafic de stupéfiants et le recyclage des produits de la criminalitéNote de bas de page 40. Les côtes canadiennes sont les plus vulnérables à cette activité, mais on sait que les marchandises récoltées illégalement peuvent circuler à l'échelle nationale. Les côtes sont sujettes à la présence de petites et moyennes entreprises, ainsi qu'à celle d'individus opportunistes et organisés qui commettent des fraudes en sous-déclarant ou en déclarant faussement les poissons pêchés légalement et illégalement. Bien que les principaux acteurs soient les pêcheurs, les acheteurs, les expéditeurs et les transformateurs qui tentent de contourner les exigences réglementaires et de déclaration des prises, on continue de croire que des GCO participent à ces activités. Dans ce dernier cas, leurs activités affichent une sophistication, une portée et une échelle plus notables. Toutefois, la capacité des GCO n'est pas perçue comme étant aussi évoluée que dans le cas des formes plus traditionnelles de crime organisé, comme le trafic de stupéfiants. Les méthodes utilisées pour générer des bénéfices sont les suivantes : soudoyer des fonctionnaires dans les ports; utiliser des secteurs d'activité intégrés verticalement; déclarer à tort des prises illégales comme étant légales lorsqu'elles sont vendues sur des marchés commerciaux; verser des pots-de-vin aux pêcheurs autochtones qui détiennent des permis autochtones spéciaux; et remplir plus qu'à la normale des emballages puis sous-déclarer les prises.

Menace de RPC découlant des prêts usuraires : Les usuriersNote de bas de page 41 semblent cibler des joueurs  nantis  pariant  des sommes importantes d'argent, des personnes à faible revenu, des joueurs compulsifs, des personnes en quête de drogues illicites et des entrepreneurs à court d'argent. Les GCO peuvent se servir des prêts usuraires pour obtenir le contrôle d'entreprises légitimes faisant face à des difficultés financières. Les GCO peuvent ensuite s'en servir comme façade afin de mélanger des produits de la criminalité avec des revenus légitimes ou pour mener d'autres types d'activités criminelles.

Au cours des dernières années, plusieurs exemples notables ont montré que les prêts usuraires en lien avec le marché du financement immobilier ont augmenté. Cette hausse est en partie attribuable à l'augmentation rapide des prix de l'immobilier dans certaines régions du Canada et aux difficultés qu'éprouvent certains emprunteurs à obtenir un prêt auprès des prêteurs traditionnels. Des exemples de situations peuvent inclure des prêteurs ciblant les nouveaux arrivants ou les touristes qui ont acheté une propriété au Canada, qu'ils utilisent comme levier pour emprunter de l'argent pour jouer ou pour rembourser d'autres dettes. Bon nombre de ces emprunteurs auraient déjà atteint leur limite d'emprunt auprès d'institutions financières canadiennes et, même lorsqu'ils possèdent un patrimoine ou des actifs financiers dans leur pays d'origine, pourraient ne pas être en mesure d'accéder à la richesse, ou la transférer, en raison d'obstacles propres à la juridiction, tels que l'existence de contrôles stricts sur les capitaux qui peuvent quitter la juridiction chaque année. Certains emprunteurs peuvent utiliser les gains en capital lors de la vente de la propriété pour couvrir des paiements d'intérêts extrêmement élevés, une décision risquée qui repose sur l'augmentation du coût de l'immobilier. Par ailleurs, si l'emprunteur quitte le Canada en raison d'une incapacité à rembourser un prêt, le prêteur privé peut profiter des avantages de ces gains en capital.

L'exécution d'activités de prêt usuraire nécessite des fonds de roulement, des aptitudes financières et la capacité d'assurer le recouvrement des créances. Le recouvrement des dettes peut comprendre la remise de sommes d'argent ou de biens. Puisqu'il s'agit d'un ensemble de compétences unique, les activités de prêt usuraire semblent être entreprises par un petit nombre de GCO parmi les plus sophistiqués au Canada, ainsi que par un faible nombre d'exploitants indépendants. Ces activités sont aussi entreprises par des prêteurs privés agissant comme blanchisseurs d'argent professionnel. Certains GCO et les exploitants indépendants qui réalisent ces activités continuent de présenter un niveau de sophistication relativement élevé et une capacité relativement grande à recycler les produits de prêts illicites. Cependant, d'autres activités d'usurpation individuelles/de petits groupes peuvent ne pas être aussi sophistiquées que les activités d'usurpation des GOO. Les usuriers continuent d'employer diverses méthodes de recyclage des produits de la criminalité pour blanchir leurs produits, notamment par l'entremise des casinos, des institutions financières, de l'immobilier et du secteur de la construction.

Menace de RPC découlant de la criminalité liée aux espèces sauvages : Le niveau de menace de cette activité est passé de faible à moyen. On constate l'existence d'un marché illicite de certaines espèces canadiennes, dont la défense de narval, la fourrure d'ours polaire, les œufs de faucon pèlerin et le ginseng sauvage. Les prix sur le marché noir de certaines espèces canadiennes sont élevés et ont considérablement augmenté entre 2015 et 2020.

Tel qu'il est mentionné dans le Rapport de 2015, les crimes liés aux espèces sauvages au Canada semblent généralement être perpétrés par des individus opportunistes aux tendances criminelles qui présentent un faible niveau de sophistication. Cependant, les réseaux criminels organisés semblent y participer de plus en plus, ce qui comprend dans certains cas des GCO  plus sophistiqués et qui sont impliqués dans d'autres activités illégales (par exemple, drogues, cigarettes). De même, une analyse et une surveillance actualisées ont révélé que les revenus générés par cette activité ont augmenté entre 2015 et 2020 et que la faune faisant l'objet d'un trafic illégal côtoie toujours plus des produits légaux de la flore et de la faune. De tels amalgames de marchandises légales et illicites deviennent de plus en plus fréquents, ce qui complique l'identification et l'interception des marchandises acquises illégalement. Compte tenu du volume élévé de ce commerce par la mer et par la poste, ainsi que de la corruption dans les pays de destination, les criminels sont en mesure d'employer différentes méthodes de recyclage des produits de la criminalité pouvant variées en fonction de la marchandise.

À titre d'exemple notable, quatre personnes ont franchi le seuil d'un groupe du crime organisé reconnu coupable d'avoir conspiré pendant de nombreuses années pour faire passer des défenses de narval de l'Arctique canadien par la frontière entre le Nouveau-Brunswick et le Maine aux États-UnisNote de bas de page 42. Les paiements versés à un fournisseur canadien ont été utilisés pour importer illégalement des défenses protégées pour les revendre aux États-Unis. Les fonds utilisés pour acheter les défenses de narval ont été blanchis en transportant, en transmettant ou en transférant des chèques et des mandats des États-Unis au Canada, dans l'intention que l'argent soit utilisé pour d'autres importations illégales de défenses de narval. Ce complot aurait permis de vendre jusqu'à deux millions de dollars de défenses de narval.

Chapitre 4 : Évaluation des menaces liées au financement des activités terroristes

Aperçu

Le terrorisme demeure une importante menace pour la sécurité nationale du CanadaNote de bas de page 43. La lutte contre le terrorisme, y compris son financement, au pays comme à l'étranger, constitue une priorité pour le gouvernement du Canada.

Cette évaluation des menaces liées au financement des activités terroristes est fondée sur les groupes de menace identifiés par le Conseil de sécurité des Nations Unies, ainsi que sur un examen attentif du renseignement et des données fournis par les organismes canadiens de sécurité et de renseignements. En aucun cas celle-ci doit être utilisée afin de justifier des comportements ou des mesures discriminatoires envers des collectivités particulières au Canada ou l'étranger. Les mesures prises par le gouvernement ou les entités du secteur privé pour atténuer les risques associés au financement des activités terroristes doivent être évaluées au cas par cas.

Le Canada a inscrit 77 entités terroristesNote de bas de page 44 en vertu du Code criminel et 36 entités terroristes en vertu du Règlement d'application des résolutions des Nations Unies sur la lutte contre le terrorisme. Les membres et les partisans ou sympathisants de certaines de ces entités inscrites peuvent être des citoyens canadiens ou avoir été présents au Canada à un moment donné. Les activités de ces entités ont souvent cherché à offrir un soutien financier ou matériel à des groupes terroristes basées à l'étranger. Bien que ces entités aient davantage mis l'accent sur le financement des activités terroristes que sur la perpétration d'attaques terroristes au pays, le Canada n'est pas à l'abri de telles attaques, et, au fil des années, quelques attaques ont eu lieu alors que d'autres ont été contrecarrées. Les intérêts canadiensNote de bas de page 45 ont également été touchés par des incidents liés au terrorisme qui se sont produits à l'étranger. Les récents attentats perpétrés au Canada par des extrémistes motivés par l'idéologie ont consisté en des tactiques peu sophistiquées, à fort impact, qui n'ont pas fait appel à un réseau de ressources plus large ou qui n'en ont pas eu besoin. Ces risques émergents sont détaillés séparément ci-dessous.

Ce ne sont pas toutes les 113 entités terroristes inscrites qui posent une menace de financement des activités terroristes au Canada, puisque ces entités ne disposent pas toutes de réseaux de financement ou de soutien au Canada. Par conséquent, une entité qui pose une menace terroriste pour le Canada ne pose pas forcément une menace de financement des activités terroristes pour le Canada, ou, si elle la pose, le degré de menace peut ne pas être identique. D'un côté, certains groupes terroristes et les personnes associées représentent une menace importante d'attaque terroriste pour le Canada au pays comme à l'étranger, tandis que la menace de financement des activités terroristes au Canada est faible. D'un autre côté, certaines entités représentent une menace de financement des activités terroristes très élevée ou élevée, mais une menace d'attaque terroriste faible pour le CanadaNote de bas de page 46. De même, bien que les entités canadiennes doivent demeurer au fait des risques lorsqu'elles exercent leurs activités à l'étranger ou qu'elles versent des fonds dans certaines régions géographiques du monde, cela ne signifie pas nécessairement que les groupes de menace en activité dans ces régions mènent des activités de financement du terrorisme au CanadaNote de bas de page 47.

De nombreuses méthodes de financement des activités terroristes ont été utilisées au Canada, consistant en un soutien financier et matériel au terrorisme, y compris le paiement des frais de déplacement et l'acquisition de biensNote de bas de page 48. Le transfert de fonds présumés à des fins terroristes vers des endroits internationaux a été effectué par un certain nombre de méthodes, y compris par l'intermédiaire d'ESM, de banques et d'organismes de bienfaisance enregistrés, ainsi que la contrebande en vrac d'argent comptant par‑delà les frontières. Dans certains cas, des biens de grande valeur, comme des appareils électroniques, sont apportés directement dans des administrations préoccupantes par des voyageurs individuels, qui les vendent ensuite pour financer le terrorisme à l'étranger.

Sur la base des rapports publics du gouvernement du Canada (par exemple, l'Évaluation du financement du terrorisme du CANAFE : 2018, et le Rapport public 2018 sur la menace terroriste au Canada de Sécurité publique Canada), d'autres juridictions internationales (par exemple, le National Terrorist Financing Risk Assessment 2022 du Département du Trésor des États-Unis en anglais seulement) et d'organisations intergouvernementales (comme les rapports du Groupe d'action financière), combinés à des informations protégées et à des analyses effectuées par des fonctionnaires du gouvernement du Canada sur la possibilité que des Canadiens envoient de l'argent ou des biens à l'étranger pour financer le terrorisme, les pays suivants ont été évalués comme étant les lieux les plus probables où ces fonds ou biens seraient reçus : Afghanistan, Égypte, Émirats arabes unis, Inde, Liban, Jordanie, Qatar, Pakistan, Territoires palestiniens, Somalie, Syrie, Turquie et Yémen.

Évaluation préliminaire de l'extrémisme violent à motivation idéologique (EVMI)

Sous-ensemble du terrorisme, l'extrémisme violent à motivation idéologique (EVMI) constitue une idéologie particulière qui peut conduire à des activités terroristes. Il s'agit d'un risque émergent que le gouvernement du Canada cherche à éliminer et, à ce titre, une discussion distincte sur le financement de l'EVMI se trouve dans cette section. L'EVMI est souvent motivée par une série de griefs et d'idées provenant de tout le spectre idéologique traditionnel, comme un récit qui décrit qui fait partie du groupe menacé, qui fait partie des groupes menaçants, les conditions plus larges qui sous-tendent la menace ainsi que la justification de l'utilisation de la violence contre la menace perçue. La vision du monde qui en résulte consiste en un récit personnalisé centré sur la volonté d'un extrémiste d'inciter, de permettre et/ou de mobiliser la violence. Les EVMI peuvent s'inspirer de diverses sources, notamment des livres, des images, des conférences, de la musique, des discussions en ligne, des vidéos, de précédentes attaques de l'EVMI, de la propagande, des théories du complot et des conversations.

Le gouvernement du Canada distingue quatre catégories différentes d'EVMI : la violence xénophobe, la violence contre les autorités, la violence fondée sur l'identité de genre et les autres violences fondées sur les griefsNote de bas de page 49. Les ressources du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) se sont tournées vers la menace de l'EVMI, pour contrer sa montée. Le directeur du SCRS a déclaré publiquement en 2022 qu'environ 50 % des ressources antiterroristes du Service sont désormais consacrées à enquêter sur l'EVMINote de bas de page 50.

Les extrémistes violents aux motivations idéologiques agissent souvent sans affiliation claire à un groupe organisé ni orientation extérieure, mais sont plutôt façonnés par la chambre d'écho de la haine en ligne qui normalise et prône la violenceNote de bas de page 51. Les groupes d'EVMI traditionnels avec un leadership plus structuré et des objectifs définis ont été largement - mais pas complètement - supplantés par des mouvements transnationaux vaguement en réseau avec des objectifs amorphes qui coexistent dans le milieu de l'EVMI.

Les attaques récentes au Canada consistaient en des tactiques peu sophistiquées à fort impact qui n'impliquaient pas ou ne nécessitaient pas un réseau de ressources plus large connu. CANAFE a observé un certain nombre de tendances chez les EVMI, à la fois ceux agissant seuls et dans le cadre d'un groupe plus large. Le comportement financier des acteurs isolés de l'EVMI s'apparente à celui des acteurs isolés d'autres types d'extrémisme violent. Les acteurs isolés ont principalement utilisé des fonds personnels, tels que ceux provenant d'un revenu d'emploi ou de membres de la famille, pour mener des attaques. Ils utilisaient couramment les transferts d'argent électroniques pour envoyer et recevoir des fonds, effectuaient des retraits en espèces ainsi que régulièrement des opérations de débit et de crédit pour envoyer des fonds. En outre, de nombreux acteurs isolés ont envoyé des transferts d'argent à des tiers inconnus. Des acteurs isolés ont également été observés utilisant leurs propres fonds pour acheter des armes, soit par l'intermédiaire de chaînes de magasins en ligne, soit en personneNote de bas de page 52.

Bien que certaines entités qui contribuent à propager des idéologies violentes soient connues pour avoir mené certaines formes de collecte de fonds, aucun lien clair ne prouve que ces fonds ont été utilisés pour mener des actions violentes au Canada. Un certain nombre de groupes qui relèvent de la définition de l'EVMI ont été ajoutés à la liste des entités terroristes au CanadaNote de bas de page 53, comme la Division Atomwaffen, la Base et les Proud Boys. Les informations sur ces organismes, mentionnées ci-dessous, seront complétées au fur et à mesure que la compréhension de ces organismes s'améliorera sur la liste de la sécurité publique des « entités actuellement répertoriées ».

D'après l'analyse des déclarations de transactions liées à l'EVMI, CANAFE note que les groupes d'EVMI organisés au Canada utilisent à la fois des comptes personnels et commerciaux pour mener leurs activités financières. Les transactions de comptes personnels et commerciaux ont montré des liens entre des entités inscrites au Canada et des entreprises accusées de certains crimes. Utilisant des comptes personnels, les groupes organisés s'appuyaient largement sur les transferts électroniques d'argent et les dépôts en espèces pour leurs activités de collecte de fonds. Ces transferts portaient généralement sur de petits montants. La majorité des fonds semble avoir été utilisée pour acheter des armes à feu et du matériel, ainsi que pour des dons et des frais d'adhésion. CANAFE a observé plusieurs paiements liés à l'EVMI vers des comptes personnels qui indiquaient une activité de sociofinancementNote de bas de page 54.

Enfin, CANAFE évalue que des particuliers au Canada peuvent financer des réseaux d'EVMI internationaux, sans nécessairement être eux-mêmes membres de groupes organisés. Ces personnes ont généralement utilisé des sociétés de traitement des paiements et des ESM pour effectuer des transferts de fonds internationaux. Alors que ces transactions avaient tendance à être de petits transferts récurrents vers plusieurs nœuds du même réseau international dans différents pays, elles totalisaient des montants importants. Le soutien financier aux entités d'EVMI a également pris la forme de dons ponctuels. Les fonds étaient généralement envoyés pour payer les frais d'adhésion, acheter des marchandises et du matériel, et pour octroyer des dons généraux aux groupes d'EVMI à l'échelle internationale. De plus, certains des bénéficiaires ont transmis les fonds à des recruteurs pour des milices d'extrême droite et d'autres groupes similairesNote de bas de page 55.

De plus amples renseignements sur l'EVMI et les risques de financement sont disponibles dans le bulletin spécial de CANAFE sur l'extrémisme violent à motivation idéologique : Un profil de financement des activités terroristes.

En se projetant vers l'avenir, leSCRS ne prévoit aucune baisse à court ou à moyen terme de l'activité d'EVMI au Canada. Cependant, tous les extrémistes ne sont pas prêts à se livrer à un acte de violence grave. Certains peuvent s'efforcer d'inspirer ou d'encourager (par le biais d'un éventail de discours comprenant des mots et de la propagande) ou de faciliter (par exemple en fournissant un soutien financier) d'autres à se livrer à des actes de violence grave. D'autres extrémistes peuvent tenter d'exploiter des événements publics (tels que des protestations ou des manifestations). Le SCRS note que si les anciens EVMI sont souvent autofinancés, nécessitant des ressources financières relativement limitées, leurs réseaux plus larges et leurs communautés en ligne peuvent profiter de partisans et de sympathisants partageant les mêmes idées.

Analyse des résultats de l'évaluation de la menace de financement des activités terroristes

Après un examen approfondi des informations accessibles au public et classifiées liées aux groupes terroristes ayant un lien avec le Canada, la menace de financement du terrorisme posée par les acteurs associés à 17 entités terroristes inscrites ainsi que les combattants étrangers a été évaluée (voir le tableau 2 ci-dessous). Après un examen approfondi des informations accessibles au public et classifiées liées aux groupes terroristes ayant des liens avec le Canada, la menace de financement du terrorisme posée par les acteurs associés à 17 entités terroristes inscrites ainsi que les combattants étrangers a été évaluée (voir le tableau 2 ci-dessous). Ces 18 profils ont été pris en compte soit en raison de renseignements suggérant que ces groupes ont reçu le plus grand montant de financement canadien provenant d'entités inscrites, soit en raison des risques émergents que ces entités posent, en particulier les EVMI.

Tableau 2: Groupes d'auteurs de menace de financement des activités terroristesFootnote 56

  • Al Chabaab
  • Noyau principal d'Al-Qaïda
  • Al-Qaïda dans la péninsule arabique
  • Al-Qaïda au Maghreb islamique
  • Aryan Strike Force (ASF)
  • The Base
  • Blood Honour (B&H)
  • Combat 18 (C18)
  • Combattants étrangers
  • Division Atomwaffen
  • État islamique en Irak et au Levant (EIIL)
  • Groupes extrémistes soutenant des moyens violents d'établir un État indépendant en Inde
  • Hamas
  • Hayat Tahrir Al-Sham
  • Hezbollah
  • Mouvement impérial russe
  • Proud Boys
  • Three Percenters

Les experts ont utilisé les six critères de notation suivants pour évaluer la menace de financement du terrorisme posée par les acteurs associés aux neuf groupes et combattants étrangers qui reçoivent le plus gros montant de fonds avec un lien canadien :

  1. Sophistication : ampleur des connaissances, de l'expertise et du niveau de sophistication général des auteurs de menace pour mener des opérations de financement des activités terroristes viables, à long terme et à grande échelle au Canada sans être détectés par les autorités 
  2. Capacité : Ampleur du réseau, des ressources et la capacité générale des acteurs mal intentionnés de mener des opérations de financement des activités terroristes au Canada.
  3. Portée du financement des activités terroristes : Mesure dans laquelle les auteurs de menace possèdent un réseau d'adeptes et de sympathisants au Canada et à l'échelle mondiale.
  4. Financement estimé : Valeur estimée de leurs activités de financement des activités terroristes au Canada.
  5. Diversification des méthodes : Diversité et complexité des méthodes de financement des activités terroristes liées à la collecte, au regroupement, au transfert et à l'utilisation de fonds au Canada.
  6. Utilisation soupçonnée des fonds : Mesure dans laquelle les fonds amassés au Canada ou à l'étranger par des acteurs terroristes sont présumés être utilisés à l'encontre des intérêts canadiens au Canada ou à l'étranger.

À l'aide de ces critères de cotation et des renseignements dont on dispose actuellement, les groupes terroristes énumérés au tableau 2 ont été évalués selon qu'ils posent une menace de financement des activités terroristes faible, moyenne ou élevée pour le Canada. D'autres renseignements sur certains de ces groupes et leurs réseaux de financement au Canada sont présentés ci-dessous.

Une évaluation préliminaire du financement lié aux auteurs menaçants extrémistes violents à motivation idéologique a également été menée. Compte tenu de la nature préliminaire des preuves et des informations sur l'existence d'activités de financement dans ce domaine et de l'hétérogénéité des groupes et des individus qu'il englobe, il a été décidé de ne pas fournir d'évaluation formelle de l'aspect financier de ces acteurs menaçants pour le moment. Il s'agit cependant d'une menace émergente que les experts continueront de surveiller. Le gouvernement du Canada continuera à développer des informations supplémentaires sur ces risques émergents importants et s'efforcera de fournir des détails supplémentaires sur les méthodes utilisées par les extrémistes pour financer leurs activités dans de futures publications.

De plus amples renseignements sur le financement du terrorisme et les sujets de préoccupation connexes sont disponibles dans l'Évaluation des risques de financement d'activités terroristes 2018 de CANAFE.

Impacts de la COVID-19

La fraude liée à la COVID et les escroqueries en ligne offrent de nouvelles opportunités aux organismes terroristes. Le passage aux plateformes numériques et aux produits financiers peut également créer de nouvelles opportunités aux organismes terroristes pour générer et déplacer des fonds.

Al Chabaab

Al Chabaab est un groupe islamiste d'activistes sunnites qui cherche à créer un état islamiste en Somalie, à chasser toutes les forces étrangères, à renverser le gouvernement fédéral somalien et à vider le pays de toute pratique qu'il considère comme contraire à l'Islam. Al-Qaïda l'a désigné comme son affiliée officielle en Somalie. Al Chabaab possède un réseau de financement mondial diversifié, quoique la plupart de ses fonds proviennent de la région qu'il contrôle. Malgré certaines pertes territoriales au cours des dernières années, il a maintenu des capacités de financement relativement sophistiquées et diversifiées et a fait preuve d'une résilience considérable. En Afrique de l'Est et en particulier en Somalie, il continue de générer des revenus à partir des zones qu'il contrôle, notamment par la taxation locale des entreprises, des infrastructures de transport et des produits de base, ainsi que par l'appropriation du bétail de la population locale. Ses techniques de financement comprennent des transferts de fonds internationaux, la sollicitation en ligne et le détournement de fonds de campagnes de bienfaisance.

Noyau d'Al-Qaïda et groupes affiliés

Les activités d'Al-Qaïda ne sont pas centralisées et consistent plutôt en un réseau d'affiliés comme Al-Qaïda dans la péninsule arabique (AQPA) et Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), qui reçoivent des instructions générales du noyau d'Al-Qaïda (Afghanistan). Malgré un certain déclin de la capacité du noyau d'Al-Qaïda, il présente toujours une importante menace. La plupart des réseaux de financement mondiaux du noyau d'Al Qaïda et des groupes affiliés sont actifs au Moyen‑Orient et en Afrique. Les méthodes de financement comprennent l'enlèvement en vue d'une rançon, la taxation des biens les zones géographiques qu'ils contrôlent, comme le pétrole et le gaz, et l'utilisation d'organismes de bienfaisance pour recevoir des dons. Les rapports de renseignement indiquent que les activités de collecte de fonds au Canada sont limitées et ne représentent pas une source conséquente de financement pour Al-Qaïda et les groupes affiliés en raison de méthodes simples et limitées de financement du terrorisme. Ces activités sont généralement menées par une poignée d'individus utilisant des méthodes simples et limitées de financement du terrorisme.

Aryan Strike Force (ASF)

Aryan Strike Force, également connue sous le nom d'ASF, a été fondée au Royaume-Uni entre 2006 et 2010. Ce groupe néo-nazi vise à mener des activités violentes pour renverser des gouvernements, déclencher une guerre raciale et éradiquer les minorités ethniques.

L'ASF se décrit comme un organisme nationaliste blanche visant à protéger l'honneur de ses femmes, de ses enfants et l'avenir de sa race et de sa nation, en utilisant la violence comme un outil nécessaire pour atteindre ses objectifs. L'ASF souscrit à la philosophie de la résistance décentralisée sans chef et a eu des chapitres au Royaume-Uni et aux États-Unis, ainsi que des contacts en Europe de l'Est, en Amérique du Sud, en Afrique du Sud et au Canada.

Des membres du groupe ont été reconnus coupables de crimes au Royaume-Uni et aux États-Unis liés à la production d'armes chimiques, à la préparation et à la possession de matériel utile pour commettre des actes de terrorisme, à la facilitation du transfert d'instructions de fabrication de bombes et à la tentative d'obtenir des armes à feu. L'ASF avait planifié un attentat suicide envers des contre-manifestants lors d'un rassemblement de suprémacistes blancs en novembre 2016 en Pennsylvanie.

Le groupe est associé à Combat 18, la branche armée de Blood & Honour. Ces deux entités inscrites au Canada ont commis des actes de violence, notamment des meurtres et des attentats à la bombe. L'ASF a été inscrite comme entité terroriste le 25 juin 2021.

Pour une discussion sur les risques de financement et les méthodologies d'ASF et d'autres organismes terroristes répertoriés par l'EVMI, veuillez consulter l'Évaluation préliminaire de l'extrémisme violent à motivation idéologique (EVMI) ci-dessus.

The Base

The Base, organisation néo-nazie fondée en 2018 principalement active aux États-Unis, promeut une rhétorique nihiliste et accélérée - une idéologie adoptée par les suprématistes blancs qui ont déterminé qu'un effondrement de la société est à la fois imminent et nécessaire. Le groupe préconise une action directe, en particulier sous forme de violence, pour créer le chaos, inciter à une guerre raciale et établir un ethno-État blanc. The Base a distribué à ses membres des manuels sur les attaques terroristes de loups solitaires, la fabrication de bombes, la contre-surveillance et la guérilla.

Des membres du groupe ont comploté pour commettre des attentats lors d'un rassemblement en janvier 2020 en Virginie, aux États-Unis. Le groupe a également organisé des camps d'entraînement à l'armement et aux tactiques militaires dans toute l'Amérique du Nord. Le réseau cherche spécifiquement à recruter des personnes ayant une expérience militaire afin qu'elles puissent tirer parti de leur formation. The Base a été répertoriée comme entité terroriste le 3 février 2021.

Pour une discussion sur les risques et les méthodologies de financement de The Base et d'autres organismes terroristes d'EVMI répertoriés, veuillez consulter l'Évaluation préliminaire de l'extrémisme violent à motivation idéologique (EVMI) ci-dessus.

Blood & Honour (B&H) et Combat 18 (C18)

Blood & Honor (B&H) est un réseau néo-nazi international dont l'idéologie émane de la doctrine national-socialiste de l'Allemagne nazie. B&H, fondé au Royaume-Uni en 1987, s'est développé au cours des années 1990, établissant des succursales dans toute l'Europe à la fin de la décennie. Des attaques B&H ont eu lieu en Amérique du Nord et dans plusieurs États membres de l'Union européenne. Combat 18 (C18), branche armée de B&H, a mené des actions violentes, notamment des meurtres et des attentats à la bombe.

En janvier 2012, quatre membres de B&H à Tampa, en Floride, ont été reconnus coupables du meurtre en 1998 de deux hommes sans abri qui ont été tués parce que le groupe les considérait comme « inférieurs ». En février 2012, des membres de B&H et de C18 ont incendié un bâtiment occupé principalement par des familles roms, y compris des enfants, à Aš, en République tchèque.

B&H et C18 ont été répertoriés comme entités terroristes le 21 juin 2019.

Pour une discussion sur les risques de financement et les méthodologies de B&H, de C18 et d'autres organismes terroristes EVMI répertoriés, veuillez consulter l'Évaluation préliminaire de l'extrémisme violent à motivation idéologique (EVMI) ci-dessus.

Combattants étrangers et voyageurs extrémistes

Au cours des dernières années, le Canada et d'autres pays ont accordé une plus grande attention aux personnes, appelées « combattants étrangers » ou « voyageurs extrémistes » (« Voyageurs extrémistes canadiens » ou VEC ci-après), qui se sont rendues dans d'autres pays pour participer à des activités liées au terrorisme. Comme il s'agit d'une tendance récente observée relativement à diverses organisations terroristes (par exemple, EIIL, Al Chabaab), cette tendance a été soulignée en 2015 comme étant un domaine qui mérite d'être évalué séparément. Au début de 2014, le gouvernement du Canada savait que plus de 130 personnes ayant des liens au Canada se trouvaient à l'étranger et étaient soupçonnées de participer à des activités terroristes, y compris la participation à l'entraînement, le financement, la promotion de points de vue radicaux et la planification d'actes terroristes violents. Des estimations plus récentes montrent que le nombre de VEC à l'étranger est resté stable, avec environ 190 individus ayant un lien au Canada, et près de 60 qui sont revenusNote de bas de page 57. Entre 2015 et 2020, le nombre de personnes voyageant à l'étranger depuis le Canada a cependant fortement diminué.

Malgré des événements tels que l'affaiblissement de l'EIIL, le Canada n'a pas connu d'afflux significatif de VEC retournant au pays, et il ne s'attend pas à en connaître. Divers facteurs peuvent expliquer pourquoi  il est possible que de nombreux VEC ne retournent pas au pays, comme l'absence de documents de voyage valides, la crainte potentielle d'une arrestation à leur retour, l'engagement continu envers leur organisation, le fait d'avoir été capturés, ou leur mortNote de bas de page 58. Les combattants étrangers qui sont retournés au Canada peuvent encourager et recruter des extrémistes violents potentiels au Canada, s'adonner à des activités de financement, voire planifier et exécuter des attaques terroristes au Canada. Il semble également que les VEC détenus à l'étranger puissent chercher à obtenir des fonds pour financer leur libération.

Division Atomwaffen

La Division Atomwaffen, également connue sous le nom de DAW, Ordre national-socialiste ou ONS, a été fondée aux États-Unis en 2013. Ce groupe terroriste néo-nazi international s'est depuis étendu au Royaume-Uni, au Canada, en Allemagne et ailleurs. Il appelle à des actes de violence contre les groupes raciaux, religieux et ethniques, et les informateurs, la police et les bureaucrates, pour provoquer l'effondrement de la société.

La DAW a organisé des camps d'entraînement, également connus sous le nom de camps de haine, où ses membres reçoivent des armes et une formation au combat au corps à corps. Ses membres ont commis des actes de violence lors de rassemblements publics, notamment le rassemblement Unite the Right d'août 2017 et les manifestations associées au rassemblement à Charlottesville, en Virginie.

En juillet 2019, le co-dirigeant de la DAW, un citoyen américain, a été banni du Canada par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié après être considéré comme membre d'un organisme qui s'est livrée ou se livrera à des activités terroristes. La DAW a été répertoriée comme entité terroriste le 3 février 2021.

Pour une discussion sur les risques de financement et les méthodologies de ce groupe et d'autres organismes terroristes répertoriés par l'EVMI, veuillez consulter l'Évaluation préliminaire de l'extrémisme violent à motivation idéologique (EVMI) ci-dessus.

État islamique en Irak et au Levant (EIIL)

L'État islamique en Irak et au Levant (EIIL), ou Daech, est un groupe djihadiste majoritairement sunnite qui cherche à établir un État islamique transnational fondé sur la charia. Bien qu'il ait été initialement connu sous le nom d'Al-Qaïda en Irak, l'organisation a vu ses liens avec l'organisation rompre par les dirigeants d'Al-Qaïda en 2014. Depuis lors, la situation financière de l'EIIL est en constante évolution. Ces dernières années ont été marquées par un déclin des territoires contrôlés par l'EIILNote de bas de page 59 et des sources générales de revenus du groupe; or celui-ci demeure une menace importante de financement des activités terroristes. Il est toujours en mesure, par exemple, de solliciter la sympathie de personnes à l'étranger qui peuvent tenter de fournir des fonds ou de mener des attaques en tant qu'acteurs solitaires. Néanmoins, la capacité de financement de groupe au Canada demeure faible et s'est habituellement concentrée sur l'offre d'un soutien financier aux voyageurs extrémistes (voir ci-dessous).

Hamas

Hamas, ou Harakat al-Muqawama al-Islamiyya (Mouvement de résistance islamique), est une organisation islamiste d'activistes sunnites issus de la filiale palestinienne des Frères musulmans à la fin de 1987. Le Hamas exerce principalement son influence dans la bande de Gaza et la Cisjordanie. Il gère un vaste réseau, situé surtout dans la bande de Gaza, de « Dawa », ou activités de ministère, qui comprennent des organismes de bienfaisance, des écoles, des cliniques, des camps pour les jeunes, des activités de financement et des activités politiques.

Aucun changement significatif n'a été observé concernant ce groupe entre 2015 et 2020. À l'échelle mondiale, le Hamas demeure un groupe complexe et hautement organisé qui est bien financé et qui emploie un certain nombre de stratégies de financement, quoique son réseau mondial de soutien soit largement établi à l'extérieur du Canada. Il existe de petits réseaux de financement du Hamas au Canada, mais ils semblent moins organisés que par le passé. Ils peuvent chercher à obtenir ou à fournir des fonds à des organisations caritatives étrangères ayant des liens directs ou indirects avec le Hamas.

Hezbollah

Le Hezbollah est une organisation terroriste populiste établie au Liban. Il cherche à représenter le peuple et l'islamisme chiites et est hautement discipliné et sophistiqué, possédant de vastes capacités paramilitaires, terroristes et de financement criminel, tout en recevant simultanément un soutien logistique, militaire et financier important de l'Iran. Le groupe est doté d'un réseau de soutien mondial qui couvre les Amériques, l'Europe, le Moyen-Orient et l'Afrique. Le Hezbollah possède un réseau de financement établi au Canada. Les méthodes de financement du groupe au Canada et à l'étranger sont bien diversifiées. Les méthodes de collecte de fonds du groupe au Canada et à l'étranger sont très diversifiées. Outre les fonds reçus de l'État iranien, des fonds peuvent être fournis par un réseau d'organismes caritatifs ou d'organisations à but non lucratif sensibles à sa causeNote de bas de page 60.

Groupes extrémistes appuyant le recours à des moyens violents pour établir un état indépendant en Inde

Les groupes extrémistes appuyant le recours à des moyens violents pour établir un état indépendant en Inde sont encore soupçonnés d'amasser des fonds dans un certain nombre de pays, y compris au Canada. Au Canada, deux organisations, Babbar Khalsa International et la Fédération internationale de la jeunesse Sikh, ont été identifiées comment étant liées à des activités terroristes et demeurent des entités terroristes inscrites en vertu du Code criminel. Il semble y avoir un réseau mondial, mais on ne connaît pas clairement sa force et les motivations relatives à son appui. Jadis, ces groupes semblaient posséder un vaste réseau de financement au Canada; toutefois, il semble maintenant avoir diminué et constituer de petits groupes.

Mouvement impérial russe

Le Mouvement impérial russe est également connu sous le nom de RIM, Russkoie Imperskoe Dvizhenie, Russkoe Imperskoye Dvizheniye, RID, Légion impériale, Légion impériale russe, RIL et Légion impériale de Saint-Pétersbourg. Ce groupe nationaliste basé en Russie cherche à créer un État monoethnique dirigé par une monarchie autocratique russe.

Le groupe, surtout connu pour avoir des membres et des sympathisants liés à des activités violentes à l'étranger, cherche à nouer des liens avec des organisations néonazies en Europe et aux États-Unis pour leur offrir une formation paramilitaire et des instructions de fabrication de bombes.

En 2015, le MIR a cofondé le Mouvement national conservateur mondial (MNCM), un mouvement transnational aligné idéologiquement contre les principes occidentaux de « libéralisme, multiculturalisme et tolérance » selon son propre manifeste. Les dirigeants du MIR souhaitaient que le MNCM facilite le partage des compétences tactiques entre les organisations homologues et promeuve leur propre programme de formation paramilitaire. En outre, le MIR a fait don d'argent à des groupes étrangers néonazis et suprémacistes blancs associés au MNCM et a dispensé une formation aux membres qui ont mené des complots à la bombe dans leur propre pays.

En 2016, le MIR a formé deux Suédois qui ont ensuite bombardé une librairie-café, un refuge pour réfugiés et un terrain de camping qui abritait des demandeurs d'asile. La faction paramilitaire du MIR a également été présente dans des conflits en Ukraine, en Syrie et en Libye. Le MIR a été répertorié comme une entité terroriste le 3 février 2021.

Pour une discussion sur les risques de financement et les méthodologies du MIR et d'autres organismes terroristes EVMI répertoriés, veuillez consulter l'Évaluation préliminaire de l'extrémisme violent à motivation idéologique (EVMI) ci-dessus.

Three Percenters

Les Three Percenters – également connus sous le nom de 3%ers, III%ers et Threepers – sont une entité décentralisée au sein du mouvement plus large des milices anti-gouvernementales aux États-Unis.

Le nom « Three Percenters » fait référence à une fausse croyance selon laquelle le nombre d'Américains qui ont combattu les Britanniques pendant la guerre d'indépendance ne représentait que 3 % de la population à l'époque. L'entité, présente aux États-Unis et au Canada, a été liée à des complots à la bombe visant des bâtiments du gouvernement fédéral américain et des communautés musulmanes.

 En novembre 2015, un Three Percenter a été arrêté et finalement reconnu coupable d'avoir tiré et blessé cinq hommes lors d'une manifestation Black Lives Matter à Minneapolis, Minnesota.

En 2020, deux des dirigeants du groupe ont échoué à kidnapper le gouverneur du Michigan. Le complot consistait à acquérir et à faire exploser des explosifs pour détourner l'attention de la police de l'enlèvement, ainsi que des exécutions publiques d'agents publics en les pendant à la télévision en direct. The Three Percenters a été répertorié comme une entité terroriste le 25 juin 2021

Pour une discussion sur les risques de financement et les méthodologies des Three Percenters et d'autres organismes terroristes EVMI répertoriés, veuillez consulter l'Évaluation préliminaire de l'extrémisme violent à motivation idéologique (EVMI) ci-dessus.

Proud Boys

L'organisme néo-fasciste The Proud Boys, créé en 2016, se livre à la violence politique. Les membres du groupe épousent des idéologies misogynes, islamophobes, antisémites, anti-immigrés et/ou suprémacistes blancs et s'associent à des groupes suprémacistes blancs.

The Proud Boys se compose de chapitres semi-autonomes situés aux États-Unis, au Canada et à l'étranger. Le groupe et ses membres ont ouvertement encouragé, planifié et mené des activités violentes contre ceux qu'ils perçoivent comme opposés à leur idéologie et à leurs convictions politiques. Il assiste régulièrement aux manifestations de Black Lives Matter (BLM) en tant que contre-manifestants, se livrant souvent à des violences ciblant les partisans de BLM.

Le 6 janvier 2021, les Proud Boys ont joué un rôle central dans l'attaque du Capitole américain. Les chefs du groupe ont planifié leur participation en fixant des objectifs, en donnant des instructions et en dirigeant les membres pendant l'attaque. Le chef des Proud Boys a été arrêté deux jours avant l'attaque dans le cadre d'un effort déclaré des forces de l'ordre américaines pour appréhender des personnes qui prévoyaient de se rendre dans la région de DC avec l'intention de provoquer des violences. Les Proud Boys ont été répertoriés comme une entité terroriste le 3 février 2021.

Pour une discussion sur les risques de financement et les méthodologies des Proud Boys et d'autres organismes terroristes IMVE répertoriés, veuillez consulter l'Évaluation préliminaire de l'extrémisme violent à motivation idéologique (EVMI) ci-dessus.

Chapitre 5 : Évaluation des vulnérabilités inhérentes au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes

Aperçu

Les caractéristiques géopolitiques, socioéconomiques et de gouvernance ainsi que le cadre juridique d'un pays constituent des composantes importantes de l'identité et du positionnement d'un pays à l'échelle mondiale. Sur la scène internationale, le Canada est reconnu comme un pays multiculturel et multiethnique doté d'une économie stable et d'institutions démocratiques fortes. Bien que ces caractéristiques du Canada soient positives, certaines d'entre elles peuvent faire l'objet d'une exploitation criminelle. Les criminels, dont les blanchisseurs d'argent et ceux qui financent le terrorisme, peuvent être attirés par le Canada en raison des vulnérabilités inhérentes associées à la situation géographique, à la démographie, à l'économie ouverte et stable, au système financier accessible, à la proximité avec les États-Unis et au système de commerce international bien développé qui caractérisent le Canada. Il est important de souligner que cette évaluation mise à jour, tout comme l'évaluation de 2015, examine les vulnérabilités inhérentes aux divers secteurs économiques et produits financiers et qu'elle ne tient pas compte des importantes mesures d'atténuation en place afin de s'attaquer à ces risques.

Tout en gardant à l'esprit les vulnérabilités contextuelles du Canada, les experts ont évalué les vulnérabilités inhérentes au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme de 33 secteurs économiques et produits financiers, à l'aide des 5 critères de notation suivants :

  1. Caractéristiques inhérentes : Ampleur de l'importance économique du secteur, complexité de sa structure opérationnelle, intégration avec d'autres secteurs et portée et accessibilité des opérations.
  2. Nature des produits et services : Nature et portée des produits et services vulnérables, de même que le volume, la rapidité et la fréquence des opérations des clients associés à ces produits et services.
  3. Nature des relations d'affaires : Proportion des activités de nature transactionnelle par rapport aux activités ayant cours sur une base récurrente, des relations d'affaires directes par rapport à celles qui sont indirectes et de l'exposition à des clients et à des entreprises à risque élevé.
  4. Portée géographique : Expositions aux administrations à risque élevé et à des espaces géographiques marqués par des caractéristiques préoccupantes.
  5. Nature du mode de prestation : Mesure dans laquelle l'offre de produits et services peut être effectuée dans l'anonymat (en personne, pas en personne, recours à des tiers) et sa complexité (par exemple, plusieurs intermédiaires et peu de contrôles immédiats).

L'évaluation indique qu'il existe un nombre important de secteurs économiques et de produits financiers intrinsèquement vulnérables au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme. Sur les 33 domaines notés, la vulnérabilité globale au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme a été jugée « très élevée » pour 5 secteurs et produits, « élevée » pour 18 secteurs et produits, « moyen » pour 9 secteurs et produits et « faible » pour 1 secteur (voir tableau 3). Les vulnérabilités et les risques inhérents font toutefois l'objet de mesures d'atténuation et de contrôle prévues  par le régime de LRPC-FAT, dont des mesures préventives et une supervision efficace.

Bien que les auteurs de l'évaluation des vulnérabilités aient examiné les secteurs et les produits individuellement, il est important de noter que les six banques d'importance systémique nationale (BISN) sont des conglomérats financiers qui dominent le secteur financier canadien et qui sont très actifs dans de nombreux secteurs d'activité, dont les services bancaires, l'assurance, les valeurs mobilières et les services fiduciaires. La vulnérabilité inhérente des BISN a été évaluée explicitement dans la catégorie des banques nationales et a reçu une cote très élevée, tandis que la présence des BISN dans d'autres secteurs a fait partie de l'évaluation de ces derniers. Compte tenu de la taille, de l'ampleur et de la portée des BISN, si ces dernières étaient évaluées ensemble, leur vulnérabilité inhérente serait naturellement très élevée.

La propriété effective, la fraude commerciale et le recyclage des produits de la criminalité de nature commerciale (RPCNC) demeurent des domaines prioritaires pour le gouvernement du Canada alors qu'il continue de renforcer les mesures de LRPC-FAT pour s'assurer que le régime canadien demeure réceptif et efficace pour ce qui est de s'attaquer adéquatement à ces risques. À ce titre, les sociétés, les partenariats, les prestataires de services aux entreprises, les fiducies expresses, les avocatsNote de bas de page 61, les organismes à but non lucratif et les entités liées aux secteurs du commerce et de l'import/export, bien qu'ils ne soient pas soumis aux obligations de déclaration en vertu de la LRPCFAT, ont été officiellement inclus dans cette évaluation puisqu'il a été jugé nécessaire d'évaluer leurs vulnérabilités au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme, compte tenu de leur importance et de leur utilisation généralisée au Canada. D'autres secteurs et produits qui ne sont pas actuellement couverts par la LRPCFAT continueront d'être évalués pour les risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme. Ces secteurs comprennent, sans toutefois s'y limiter, les services de traitement des paiements, les entreprises d'encaissement de chèques, les opérations de sociofinancement, les cartes prépayées à utilisation restreinteNote de bas de page 62, les sociétés d'affacturageNote de bas de page 63, les sociétés de financement et de crédit-bail, les rénovateurs résidentiels et les marchands de biens de grande valeur.

Tableau 3 : Résultats globaux des cotes de vulnérabilité inhérente au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristesNote de bas de page 64

Cote de vulnérabilité très élevée
  • ESM de versements parallèles
  • Sociétés*
  • Banques nationales
 
  • Fiducies expresses *
  • ESM de détail à multiples services
Cote de vulnérabilité élevée
  • Entreprises de véhicules blindés
  • Casinos traditionnels
  • Coopératives de crédit et caisses populaires
  • Négociants en métaux précieux et pierres précieuses
  • Succursales de banques étrangères
  • Filiales de banques étrangères
  • Entreprises d'importation et d'exportation
  • Professionnels juridiques
 
  • Sociétés d'assurance-vie
  • Sociétés de personnes*
  • Agents d'immeubles et promoteurs
  • ESM de détail à service unique
  • Courtiers en valeurs mobilières
  • Sociétés de fiducie et de prêt
  • Prêteurs hypothécaires non réglementés
  • Monnaies virtuelles
  • Organismes de bienfaisance enregistrés et organismes à but non lucratif
Cote de vulnérabilité moyenne
  • Comptables
  • Notaires de la Colombie-Britannique
  • Transitaires
  • Casinos provinciaux en ligne
  • Agents et courtiers indépendants d'assurance-vie
 
  • Fournisseurs de services aux entreprises
  • Cartes prépayées à utilisation libre
  • Courtage en douane
  • ESM de gros et d'entreprise
Cote de vulnérabilité faible
  • Entités et organismes intermédiaires d'assurance-vie **

 

* La vulnérabilité se rapporte à la capacité de ces entités de servir à dissimuler la propriété bénéficiaire, facilitant ainsi le camouflage et la conversion de produits illicite.
** Ces entités offrent un soutien administratif aux agents et aux courtiers d'assurance et rendent possibles la mise en commun des commissions et l'accès aux produits de sociétés d'assurance.

Vulnérabilités inhérentes du Canada

La présente section donne un aperçu des caractéristiques du Canada qui peuvent être vulnérables à une exploitation par des criminels.

Cadre juridique et de gouvernance

Le Canada est un état fédéral qui est gouverné par une constitution et doté d'un système démocratique qui assure une autonomie considérable à ses 13 provinces et territoires. Le gouvernement fédéral a compétence législative en matière de droit pénal et de procédure pénale, tandis que les provinces sont responsables d'administrer les tribunaux de juridiction criminelle, dont les tribunaux fédéraux constitués en vertu de l'article 96 de la Constitution. Le Canada est également gouverné par la common law, ou la règle du précédent, et par un système de droit civil dans la province de Québec.

Le Canada est une société démocratique libre et ouverte, et ses citoyens se voient garantir certains droits et certaines libertés en vertu de la loi canadienne. Pour protéger ces libertés, le Canada compte sur des institutions publiques fortes et un système de justice complet. Bien que ces lois et institutions jouent un rôle clé dans la lutte contre le crime, les libertés conférées aux Canadiens et les mesures de protection juridiques et procédurales qui sont en place pour protéger les accusés peuvent être exploitées par les criminels, y compris les blanchisseurs d'argent et ceux qui financent le terrorisme.

Géographie

Le Canada est le deuxième plus grand paysNote de bas de page 65 au monde, ayant une superficie de 9,9 millions de kilomètres carrés. Le Canada totalise plus de 200 000 km de côtes allant de l'océan Pacifique vers l'ouest, de l'océan Arctique vers le nord et de l'océan Atlantique vers l'est. Le Canada partage la plus longue frontière internationale au monde, qui s'étend sur plus de 8 800 km, avec les États-Unis, au sud et au nord-ouest (l'Alaska). Cette situation rend le Canada vulnérable aux activités criminelles qui prennent place à l'échelle du pays, ainsi que par-delà ses frontières par des moyens de transport terrestres, aériens et maritimes. Compte tenu de l'immensité du territoire canadien, il peut être difficile de détecter les activités criminelles.

Économie et système financier

À la fin de 2019, le Canada présentait la 16e plus importante économie dans le monde (selon un classement du produit intérieur [PIB] nominal, d'une valeur de 1 921 milliards de dollars internationaux actuels)Note de bas de page 66. Dans la même année, 70 % de l'économie était consacrée aux services, tandis que le secteur de la fabrication et le secteur primaire constituaient les 30 % restantsNote de bas de page 67. Tous les indicateurs économiques pertinents et la discussion ci-dessous remontent à la date de rédaction originale de ce rapport.

Le commerce international représente plus de 65 % du PIB du CanadaNote de bas de page 68. L'économie canadienne est étroitement liée à celle des États-Unis. En 2019, plus de 75 % des exportations du Canada étaient destinées aux États-Unis et passaient par ce pays, et plus de 51 % des importations du Canada venaient des États-UnisNote de bas de page 69. Les trois autres destinations principales recevant les exportations canadiennes sont l'Union européenne (UE), la Chine et le JaponNote de bas de page 70. L'UE, la Chine et le Mexique représentent les trois principales sources d'importations canadiennes après les États-UnisNote de bas de page 71.

Statistique Canada estime que l'activité économique souterraine pour 2018 (c'est-à-dire l'activité économique fondée sur le marché qui n'est pas mesurée en raison de sa nature cachée, illégale ou informelle) s'est chiffrée à 61,2 milliards de dollars au Canada, soit environ 2,7 % du PIBNote de bas de page 72. De 2014 à 2018, la part souterraine du PIB variait entre 2,7 % et 2,9 %Note de bas de page 73. Dans une étude publiée en juin 2017, l'écart fiscal associé à l'activité économique clandestine sur l'impôt sur le revenu des particuliers a permis d'estimer que le manque à gagner de l'ARC s'élevait à environ 6,5 milliards de dollars pour 2014. Cela représente environ 4,8 % des revenus de l'impôt sur le revenu des particuliers et 0,3 % du PIBNote de bas de page 74. Cependant, d'après une étude de 2014 de l'Organisme de coopération et de développement économiques (OCDE) qui offre une perspective internationale sur les ajustements relatifs de l'économie non observée (ENO) dans les pays, le Canada présente l'un des plus petits ajustements de l'ENO, en dessous d'un certain nombre d'économies de l'Union européenneNote de bas de page 75.

Le système financier du Canada est développé, sophistiqué et bien diversifié, en plus de jouer un rôle de premier plan dans l'économie canadienne. Il s'agit d'un des systèmes financiers les plus importants et les plus développés au monde. À la fin de l'année 2018, le total des actifs des institutions financières atteignait 10,2 billions de dollars américains, soit 626 % du PIBNote de bas de page 76.

Les banques et les autres institutions financières du Canada exploitent un vaste réseau de plus de 5 890 succursales et d'environ 18 640 guichets automatiques (GA)Note de bas de page 77. En 2017, environ 655 millions d'opérations ont été journalisées aux GA détenus par des banques, ce qui représente une baisse par rapport aux 842 millions d'opérations enregistrées en 2012Note de bas de page 78.

Les services bancaires numériques demeurent le principal moyen d'effectuer des opérations bancaires : 76 % des Canadiens effectuent la plupart de leurs opérations bancaires en ligne et sur mobileNote de bas de page 79. Les banques sont aussi exploitées par l'entremise d'agents ou de mandataires, surtout dans les régions éloignées. Le Canada bénéficie également d'un taux élevé d'inclusion financière : 99.7 % de la population âgée de plus de 15 ans a un compte dans une institution financière officielle et 98 % a effectué ou reçu des paiements numériques au cours de la dernière annéeNote de bas de page 80. Il est encore trop tôt pour déterminer comment la pandémie pourrait modifier le secteur financier national à long terme, mais l'adoption accrue des services financiers numériques a été observée et pourrait mener à un changement de comportement permanent vers la finance numérique, les technologies financières alternatives et les interactions n'étant pas en personne.

Bien que le secteur bancaire du Canada soit diversifié et comporte un grand nombre de fournisseurs de services, il présente un taux de concentration relativement élevé et détient plus de 41 % des actifs des institutions financièresNote de bas de page 81. Le secteur bancaire est dominé par six banques nationales qui, ensemble, détiennent 97 % des actifs bancairesNote de bas de page 82. Ces six banques sont les sociétés mères de grands conglomérats de groupes financiers et ont été désignées comme des banques d'importance systémique nationale par le BSIF, le superviseur prudentiel du Canada. Les six plus grandes banques et le principal groupe de coopératives de crédit du Québec – désigné comme une institution financière d'importance systémique nationale par la Province – représentent environ 90 % des actifs du secteur des dépôts, tandis que les trois plus grands assureurs-vie représentent environ 70 % du total des primes nettes. Ces institutions financières jouent un rôle important dans le système financier du CanadaNote de bas de page 83.

On compte plus de 24 000 entités déclarantes (par exemple, banques, casinos, ESM, courtiers en valeurs mobilières, agents immobiliers et promoteurs) assujetties à la Loi, offrant des produits et des services où les opérations financières peuvent être vulnérables aux activités illicitesNote de bas de page 84. Le tableau 4 donne une idée de la taille relative des divers secteurs et produits évaluésNote de bas de page 85.

L'économie ouverte et stable du Canada, le système financier accessible à la majorité des Canadiens et le niveau élevé de commerce mondial concernant le Canada sont autant de facteurs que peuvent exploiter les criminels, les blanchisseurs d'argent et ceux qui financent le terrorisme qui sont actifs au pays et sur la scène internationale. Ces derniers emploient un certain nombre de méthodes et de stratagèmes pour dissimuler leurs opérations financières illégales en vue de leur donner une apparence légitime de façon à éviter d'être détectés par les autorités.

Tableau 4
Statistiques sur les secteurs et produits évalués
Secteur ou produit Nombre d'entités connues Remarques
Banques d'importance systémique nationale 6 Les banques détiennent plus de 41 % des actifs des institutions financières; les six plus grandes banques nationales, les BISN, détiennent 97 % de ces actifsNote de bas de page 86.
Autres banques nationalesNote de bas de page 87 29
Filiales de banques étrangèresNote de bas de page 88 17
Succursales de banques étrangèresNote de bas de page 89 32
(28 entités offrant des services complets et
4 entités de prêt)
Sociétés d'assurance-vie 61 entités fédérales et
17 entités sous réglementation provincialeNote de bas de page 90
En excluant les fonds réservés, le secteur de l'assurance-vie et de l'assurance-maladie détenait 565 milliards de dollars d'actifs, dont 472 milliards de dollars détenus par des assureurs sous réglementation fédérale (à la fin de 2019). Trois sociétés détenaient 65 % de l'actif du fonds général total des assureurs-vieNote de bas de page 91.
Agents et courtiers indépendants d'assurance-vie 99 000 agentsNote de bas de page 92Note de bas de page 93
Sociétés de fiducie et de prêt 58 sociétés de fiducie et de prêt sous réglementation fédérale et 17 sociétés sous réglementation provincialeNote de bas de page 94 Les sociétés de fiducie et de prêt détiennent plus de 451 milliards de dollars en actif (en date du 31 janvier 2021). Les six plus grandes banques canadiennes détiennent 95 % de ces sociétés de fiducie et de prêtNote de bas de page 95.
Courtiers en valeurs mobilières 1 409Note de bas de page 96 À la fin de 2020, l'industrie des valeurs mobilières canadienne détient approximativement 3,4 billions de dollars en actifs de clients (de détail et institutionnels combinés)Note de bas de page 97. Chaque BISN exploite un négociant de valeurs mobilières en ligne et à service complet, représentant collectivement environ 75 % du volume de l'actif total du secteur. Ce secteur comprend aussi des conseillers financiers et en placement.
Coopératives de crédit et caisses populaires (CCCP) 233Note de bas de page 98 Les coopératives de crédit au Canada (excluant le Québec) ont déclaré des actifs de 265 milliards de dollars dans le secteur (novembre 2020). Le Groupe Desjardins détient 313 milliards de dollars en actifs (décembre 2019)Note de bas de page 99.
Entreprises de services monétaires 1 858 ESM inscritesNote de bas de page 100 Chaque année, le secteur des ESM gère des centaines de milliards de dollars en transactions. On estime que les ESM inscrites auprès du CANAFE gèrent environ 616 milliards de dollars par année.
Casinos sous réglementation provincialeNote de bas de page 101 17 entités déclarantesNote de bas de page 102 Le secteur canadien des casinos génère plus de 15 milliards de dollars en revenus par année.
Agents d'immeubles et promoteurs 80 970 courtages ou entreprisesNote de bas de page 103. Plus de 135 000 promoteurs, agents et agents commerciaux, y compris 6 500 spécialistes en biens immobiliers commerciauxNote de bas de page 104
Négociants de pierres et de métaux précieux 4 151Note de bas de page 105
Notaires de la Colombie-Britannique Plus de 190Note de bas de page 106
Comptables 35 256Note de bas de page 107
Entreprises de véhicules blindés 20-30
Professionnels juridiques Plus de 130 000 avocats, 37 000 parajuristes et 3 800 notaires du droit civilNote de bas de page 108
Fiducies expressNote de bas de page 109 Nombre estimé en millions
(plus de 450 000 fiducies enregistrées auprès de l'ARC)Note de bas de page 110.
Sociétés Plus de 2,6 millions de sociétés à but lucratif, y compris près de 4 000 sociétés cotées en bourseNote de bas de page 111
Prestataires de services aux sociétés 8Note de bas de page 112
Organismes à but non lucratif 162 000Note de bas de page 113, y compris 86 000 organismes de bienfaisance enregistrés auprès du gouvernement fédéralNote de bas de page 114
Cartes prépayées (à utilisation libre) 74 entreprisesNote de bas de page 115 L'accès prépayé, en tant que catégorie de paiement, représente une petite composante des paiements utilisés au Canada. Malgré le faible volume, les opérations prépayées étaient le type d'opération au point de vente (PDV) qui connaissait la deuxième croissance la plus rapide au Canada en 2019, ayant une valeur de 6 % d'une année à l'autre, totalisant environ 20 milliards de dollars. Cela ne représente toutefois que 1,5 % du volume des opérations au PDVNote de bas de page 116. Un montant total de 4,8 milliards de dollars a été chargé sur des cartes prépayées à utilisation libre en 2019Note de bas de page 117.
Courtiers en douane et transitaires Courtiers en douane : 298Transitaires : 1 747Note de bas de page 118
Devises virtuelles 142 entreprises se sont inscrites auprès du CANAFE pour des activités relatives à la monnaie virtuelle et 311 pour la monnaie virtuelle et d'autres activités d'ESMNote de bas de page 119 Plus de 8 300 monnaies virtuelles convertibles à l'échelle mondiale, représentant 1,5 billion de dollars américains en capitalisation boursière mondialeNote de bas de page 120
GA à étiquette blanche Plus de 51 000Note de bas de page 121

Données démographiques

Environ 87 % des 38 millions d'habitants du Canada vivent dans les quatre provinces les plus importantes du pays : l'Ontario (38 %), le Québec (23 %), la Colombie-Britannique (14 %) et l'Alberta (12 %)Note de bas de page 122. Les trois plus grandes villes canadiennes au chapitre de la population sont Toronto, Montréal et Vancouver. Les données du Recensement de 2016 mené par Statistique Canada indiquent qu'il y a environ 8,2 millions de Canadiens de première génération, ce qui comprend les personnes nées à l'étranger qui sont maintenant des immigrants ou qui l'étaient autrefois. Plus de 279 origines ethniques ont été déclarées par les répondants au Recensement de 2016.

Le Canada est un pays multiethnique et multiculturel. Cela a pour effet que la société canadienne est très riche et très diversifiée. Toutefois, cela peut aussi être source de vulnérabilité dans certaines circonstances ou situations que les criminels peuvent exploiter. Certaines diasporas ont été et sont encore, dans certains cas, exploitées aux fins de soutien à des activités criminelles ou terroristes. De nombreuses personnes ont immigré au Canada en raison de conflits et de mauvaises conditions de vie dans leur pays natal et s'inquiètent donc de la sécurité et du mieux-être des membres de leur famille qu'elles ont laissés derrière elles. Par conséquent, il arrive souvent que ces personnes envoient de l'argent et des biens dans leur pays natal pour donner un coup de main quand elles le peuvent et ce, par divers moyens ainsi que pour diverses raisons ou causes.

Tous les citoyens canadiens et les résidents permanents peuvent cependant être vulnérables lorsqu'ils veulent aider les gens dans le besoin dans des pays étrangers. Par exemple, ils peuvent être victimes d'extorsion alors que des parents ou des amis dans ces pays étrangers sont menacés. D'autres peuvent aussi être radicalisés au moyen de propagande (en ligne ou autre moyen) ou par des chefs charismatiques, et devenir partisans de causes ou d'idéologies de groupes extrémistes ou terroristes qui combattent dans des zones de conflit. Certaines personnes peuvent même adopter des idéologies de groupes extrémistes ou terroristes et souhaiter les appuyer financièrement ou matériellement, ou même se rendre à l'étranger pour devenir des combattants étrangers.

Analyse des résultats de l'évaluation des vulnérabilités inhérentes

Vulnérabilités au RPC­FAT des institutions de dépôts (élevées à très élevées) : Parmi les institutions de dépôts évaluées, les banques nationales sont toujours cotées comme les plus vulnérables (cote très élevée), principalement en raison de la taille des six banques d'importance systémique nationale (BISN)Note de bas de page 123 désignées. Le système financier canadien est stable et très concentré. Les BISN continuent d'être très importantes en ce qui a trait aux volumes des transactions, aux avoirs financiers et à la portée des opérations, aussi bien à l'échelle nationale qu'internationale. Sur une base consolidée, elles participent non seulement aux affaires bancaires, mais comptent aussi les sociétés de fiducie et de prêts, les sociétés d'assurance-vie et les courtiers en valeurs mobilières. Elles offrent un grand nombre de produits et services vulnérables à une vaste clientèle formée d'un grand nombre de clients et d'entreprises à risque élevé. Les services bancaires sont offerts en personne ou à distance et varient en ce qui concerne l'anonymat et la complexité. Il est aussi possible de faire appel à des tiers et à des intermédiaires (par exemple, des avocats et des comptables) pour effectuer des opérations bancaires.

La vulnérabilité des coopératives de crédit et des caisses populaires, des succursales de banques étrangères et des filiales, des sociétés de fiducie et de prêts reçoit toujours une cote élevée. Ces institutions demeurent importantes en ce qui a trait à leur taille et à leur portée, et sont accessibles à un éventail de clients. On estime que les succursales de banques étrangères sont moins accessibles aux clients au détail, puisqu'une plus grande proportion de leurs affaires sont axées sur les sociétés clientes (étant donné le seuil de dépôt minimum de 150 000 $). Toutes ces institutions offrent une panoplie de produits et de services vulnérables (par exemple, comptes chèques, virements télégraphiques) et entreprennent un mélange d'affaires transactionnelles, courantes et par des tiers. Ces produits et services vulnérables sont disponibles à un profil de client dont un grand nombre constituent des clients à risque élevé. Les filiales de banques étrangères ciblent souvent des communautés spécifiques de la diaspora au Canada ainsi que des individus étrangers, ce qui peut les rendre plus vulnérables aux personnes étrangères politiquement exposées (par exemple, chef d'État ou chef du gouvernement; membre du conseil exécutif du gouvernement ou membre d'une assemblée législative; sous-ministre ou rang équivalent) et des clients ayant des liens avec des juridictions à haut risque. Les coopératives de crédit et les caisses populaires opèrent dans des régions canadiennes plus éloignées qui, dans certains casNote de bas de page 124, peuvent être exposées à des activités de criminalité et de corruption élevées, ainsi qu'à des travailleurs de passage qui envoient des fonds dans leur pays d'origine, ce qui peut être représenter un risque élevé de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme.

Finalement, la majorité de ces institutions offrent des services au mode de prestations en personne et non en personne, en ligne ou au téléphone, qui se prêtent à différents degrés d'anonymat. Il y a toutefois des filiales étrangères qui offrent des services bancaires exclusivement dans un environnement à distance. Par contraste, les coopératives de crédit, en tant que secteur, tendent à être axées davantage sur des interactions en personne dans des succursales locales, ce qui rend la relation d'affaires moins anonyme.

Vulnérabilités au RPC-FAT du secteur des entreprises de services monétaires (moyennes à très élevées) : Comme dans le précédent rapport d'évaluation nationale des risques inhérents, bien que le secteur des ESM soit globalement vulnérable, le degré de vulnérabilité varie selon la taille et le modèle d'affaires des ESM du secteur. Parmi celles qui ont été évaluées, deux types d'ESM sont les plus vulnérables. Les premières comptent les ESM multiservices de vente au détail offrant des services complets et dont la présence au Canada est la plus dominante. Ces ESM du secteur du détail offrent plusieurs produits ou services et effectuent un grand nombre d'activités transactionnelles (c'est-à-dire virements télégraphiques, échange de monnaie et instruments monétaires) qui se sont révélés vulnérables au recyclage de produits de la criminalité et au financement d'activités terroristes. Ces produits et services sont largement accessibles et on évalue que les personnes politiquement exposées, la clientèle dans les entreprises ou professions vulnérables, et la clientèle dont les activités se déroulent dans des endroits préoccupants forment une grande partie du profil de la clientèle.

Le deuxième type d'ESM hautement vulnérable consiste en les entreprises qui utilisent des systèmes de remise de fonds parallèles, y compris des systèmes informels de transfert de valeur et des services en ligne dédiés aux échanges de devises virtuels et les transferts qui utilisent des plateformes exclusives pour permettre les connexions entre commerçants et consommateurs, ainsi que faciliter les solutions entre pairs. La remise de ces fonds se fait généralement en dehors du système bancaire conventionnel, bien qu'il puisse y avoir des connexions occasionnelles aux systèmes bancaires officiels. Ces ESM de remise de fonds parallèles sont vulnérables parce qu'elles peuvent permettre à des clients à risque élevé de virer des fonds vers des administrations à risque élevé au moyen de leurs réseaux informels. En outre, étant donné qu'elles sont habituellement de petites entreprises discrètes, elles peuvent être vulnérables à l'exploitation à des fins illicites. Certaines entreprises de technologie financière sont réglementées à titre d'ESM en vertu de la Loi pour les services qu'elles fournissent. On a observé une augmentation de l'adoption des services financiers numériques, qui a été accélérée par la pandémie de la COVID-19.

Vulnérabilités des sociétés (très élevées) et des fournisseurs de services aux sociétés (moyennes) au RPC-FAT : Bien qu'elles soient répandues et utilisées pour le commerce légitime, les sociétés conservent certaines caractéristiques inhérentes qui les rendent vulnérables à l'exploitation aux fins du recyclage des produits de la criminalité et du financement des activités terroristes. C'est à dire  qu'il est possible de structurer ces entités de manière à dissimuler le propriétaire effectif tout en s'en servant pour dissimuler et convertir des produits de la criminalité. Les sociétés privées continuent d'être les plus préoccupantes par rapport à d'autres formes d'entités juridiques, comme les sociétés cotées en bourse, les coopératives et les organismes sans but lucratif. Des sociétés continuent d'être utilisées dans le contexte international et canadien par des criminels sophistiqués afin de déplacer et dissimuler les produits de la criminalité, impliquant souvent des sociétés canadiennes et enregistrées à l'étranger, des intermédiaires professionnels, des institutions financières et des administrations réputées pour leur secret financier. Les sociétés enregistrées à l'étranger, en particulier celles qui proviennent de pays réputés pour leur secret financier, présentent un risque élevé par rapport aux sociétés constituées en personne morale au pays. Les fournisseurs de services aux sociétés (FSS) qui offrent des services de constitution en personne morale ou des professionnels du droit au pays et à l'étranger peuvent rendre relativement facile l'établissement accéléré de sociétés dans le cadre d'un stratagème illégal, bien que les entreprises canadiennes puissent néanmoins se constituer rapidement et à moindre coût sans les services d'un professionnel.

Vulnérabilités au RPC-FAT des fiducies expresses (très élevées) : La fiducie expresse est un arrangement juridique fréquemment utilisé au Canada qui a diverses fins, dont la gestion du patrimoine, la planification successorale et les placements. En 2017, on comptait plus de 450 000 fiducies enregistrées auprès de l'ARCNote de bas de page 125. On estime que les actifs détenus dans ces fiducies ainsi que le volume des opérations qu'elles génèrent sont très importants. La principale vulnérabilité de la fiducie expresse est qu'elle sépare le contrôle des actifs détenus de la propriété effective dans la fiducie, ce qui peut rendre difficile la détermination de l'identité des parties à la fiducie ou le gel et la saisie des actifs détenus par celle-ci. Les fiducies discrétionnaires courent le plus grand risque d'abus, car le syndic peut exercer son pouvoir discrétionnaire dans la gestion des actifs de la fiducie au nom du bénéficiaire. Cela rend les fiducies discrétionnaires plus souples en ce qui concerne la capacité d'effectuer des opérations financières propices au recyclage des produits de la criminalité, comme faciliter les opérations de redirections de fonds vers d'autres administrations, ce qui a été observé au Canada.

Les clients fortunés font souvent appel aux fiducies à diverses fins (c'est-à-dire, planification du patrimoine, de la succession et de l'impôt). Le profil des clients des fiducies expresses peut aussi inclure ceux qui accordent de l'importance à l'anonymat et à la protection des actifs que les fiducies peuvent offrir (par exemple, protection contre les litiges civils, actions réglementaires et pénales, procédures de divorce et de faillite). Les fiducies expresses ont une portée mondiale, ce qui peut exposer ces fiducies à des administrations à risque élevé. Les Canadiens peuvent établir des fiducies canadiennes au Canada ou à l'étranger; les fiduciaires nationaux et étrangers ainsi que les non-résidents peuvent faire de même au Canada. Les fiducies expresses canadiennes sont principalement établies par l'intermédiaire, ou avec l'aide, de sociétés de fiducie, d'avocats et de comptables. La prestation de services se fait souvent en personne, mais il est possible d'utiliser plusieurs intermédiaires dans les arrangements plus complexes.

Vulnérabilités au FAT des organismes de bienfaisance enregistrés et des organismes sans but lucratif (élevées) Note de bas de page 126 : Ce secteur est très vaste, comptant plus de 162 000 organismes en 2018, dont environ 86 000 étaient des organismes de bienfaisance enregistrés. Les organisations soulevant des préoccupations plus importantes sont celles qui participent à des activités de « service » (éducation, services sociaux, santé, développement et logement) et qui opèrent  à proximité d'une menace terroriste active. Cela englobe les organismes qui exercent leurs activités dans des administrations à risque élevé, dont les zones de conflit ayant une menace terroriste active, et ceux qui exercent leurs activités à l'interne, mais auprès d'une population qui est activement ciblée par un mouvement terroriste comme soutien et couvert. Certains organismes possèdent des caractéristiques qui les rendent vulnérables aux financiers terroristes, y compris les activités de financement et la distribution de fonds et de dons en nature, le fait de jouir de la confiance du public et le fait d'être caractérisé par un fort volume de transactions en espèces. Toutefois, le gouvernement reconnaît que de nombreux Canadiens entretiennent des liens avec des communautés du monde entier et que, même s'il existe des risques, ces relations ne constituent pas en soi une preuve de financement du terrorisme et de blanchiment d'argent.

De nombreuses opérations financières effectuées par ces organismes peuvent être effectuées par des modes de versement qui comportent un degré élevé d'anonymat (par exemple, les dons anonymes) et un certain degré de complexité, comme lorsque de multiples intermédiaires sont mis en cause. Dans certains cas, l'utilisation d'argent liquide, de transferts internationaux et de structures de gouvernance plus faibles peuvent rendre la source initiale des fonds difficile à déterminer. Il peut aussi être difficile de savoir comment les fonds ou les ressources seront utilisés après avoir été transférés à des organisations partenaires ou à des tiers, y compris des mandataires.

Vulnérabilités au RPC-FAT des sociétés de personnes (élevées) : Tout comme les sociétés, la principale vulnérabilité des sociétés de personnes est qu'elles peuvent être structurées de manière à dissimuler leurs véritables propriétaires, ce que les criminels peuvent exploiter pour cacher leurs produits illicites. Les sociétés de personnes peuvent être mises à contribution par les criminels pour combiner des fonds illicites avec des revenus commerciaux légitimes, et pour détenir et transférer des produits de la criminalité dans le cadre de stratagèmes de recyclage des produits de la criminalité. De nombreux types d'entreprises peuvent fonctionner sous forme de société de personnes, les rendant très souples et capables de s'intégrer à de multiples secteurs de l'économie, y compris les secteurs financier et juridique. Les sociétés de personnes peuvent être formées par d'autres entités juridiques, y compris des sociétés et d'autres sociétés de personnes, afin de rendre encore plus floue l'identité du ou des ultimes propriétaires effectifs. Il y a également risque d'exposition aux administrations à risque élevé, car les sociétés de personnes canadiennes peuvent être en activité à l'étranger et les sociétés de personnes étrangères peuvent s'enregistrer pour être en activité au Canada. Les sociétés de personnes enregistrées dans des pays réputés pour le secret financier peuvent poser un risque élevé.

La formation de sociétés de personnes peut se faire directement entre les associés concernés, mais elle peut aussi impliquer des intermédiaires, ce qui rendrait plus difficile la détermination de la propriété effective. Des ententes de société de personnes plus complexes peuvent comprendre le recours à des professionnels, comme des avocats ou des comptables, pour des services consultatifs, ce qui ouvre la possibilité que ces professionnels soient mis à contribution, volontairement ou non, dans la création d'une structure de propriété secrète à des fins illicites. Bien que les sociétés de personnes, les sociétés et les fiducies expresses puissent toutes servir à masquer la propriété effective, les données probantes laissent entendre que les sociétés de personnes sont utilisées beaucoup moins souvent aux fins du recyclage des produits de la criminalité que les sociétés et les fiducies expresses.

Vulnérabilités au RPC-FAT des casinos traditionnels (élevées) : Les casinos physiques continuent de représenter un niveau élevé de vulnérabilité inhérente au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme. Les casinos exercent beaucoup d'activités au Canada, dont la majorité est fortement transactionnelle et à fort volume de transactions en espèce. Les casinos offrent un nombre limité de produits et services vulnérables, mais le volume des opérations effectuées avec ces produits et services continue d'être considérable. De plus, les sections des casinos réservés aux personnalités très importantes (VIP) peuvent représenter une vulnérabilité notable. En effet, la clientèle dispose généralement de fonds importants et comprend des personnes politiquement exposées (PPE) ou d'autres personnes à risque élevé. Les relations d'affaires entre les casinos et la clientèle sont principalement transactionnelles, mais il y a des relations continues (environ 10 % de la clientèle entretient une relation continue avec un casino dit traditionnel). La clientèle des casinos comprend toujours des PPE, des non-résidents (par exemple, des touristes) et une clientèle d'entreprises et de professions vulnérables. Certains casinos offrent aux clients la possibilité de transférer des fonds par voie électronique, ce qui veut dire que les fonds pourraient être envoyés à des administrations à risque élevé. Les clients peuvent exercer des activités de jeu dans les casinos de manière plutôt anonyme, bien que les casinos soient surveillés et que certaines activités exigent une interaction en personne avec le personnel du casino.

Vulnérabilité des casinos en ligne réglementés par les provinces au RPC-FAT (moyenne) : Ce secteur comprend cinq casinos en ligne en Ontario, en Colombie-Britannique, au Québec, au Manitoba et en Alberta, ainsi que les loteries en ligne et les activités de paris sportifs de Parlay des provinces de l'Atlantique. Les casinos en ligne continuent d'offrir un nombre limité de produits et services vulnérables, ce qui constitue la majorité des opérations commerciales du secteur. Les casinos en ligne ont des relations transactionnelles et continues avec leurs clients. Le profil des clients des casinos en ligne comprend probablement les clients de professions et d'entreprises vulnérables. La portée géographique de ces casinos en ligne est très restreinte, puisque les services offerts se limitent aux utilisateurs de la province qui offre le service. Toutes les opérations sont effectuées en ligne et à distance et peuvent comprendre la participation d'intermédiaires. Les utilisateurs à distance doivent s'inscrire pour utiliser le site et doivent fournir un mode de paiement (p. ex., une carte de crédit ou de débit). Même si cela réduit l'anonymat du titulaire du compte, il demeure difficile d'établir qui contrôle le compte.

Vulnérabilités au RPC­FAT des secteurs juridiques (élevées) et des services comptablesNote de bas de page 127 (moyennes) : Les deux secteurs ont tous les deux un grand nombre de praticiens partout au Canada qui possèdent une connaissance spécialisée et une expertise qui peut être vulnérable à l'exploitation en connaissance de cause ou non, à des fins illicites. Dans le domaine juridique, cette expertise englobe l'établissement de comptes de fiducie, la formation de sociétés et de fiducies juridiques, et l'exécution de transactions financières, immobilières ou liées aux valeurs mobilières, alors que dans le domaine comptable, cette expertise englobe principalement les conseils financiers et fiscaux et peut inclure la prestation d'aide et de conseils concernant la formation de sociétés et de fiducies. Les deux professions offrent des services vulnérables à un éventail de particuliers et d'entreprises, et peuvent servir de tiers dans des transactions. Le profil du client observé dans le secteur juridique comprend une combinaison de PPE, de clients dans des entreprises et des professions vulnérables, et des clients dont les activités sont effectuées dans des lieux à plus haut risque. Le profil du client de comptables comprendrait les clients fortunés, les PPE et les entreprises vulnérables (par exemple, celles à volume élevé de transactions en espèce). On estime que les services comptables sont peu exposés aux administrations à risque élevé, étant donné que leur activité est concentrée à un niveau domestique. Les deux professions interagissent surtout directement et en personne avec leurs clients, ce qui minimalise l'anonymat. Par contraste aux services comptables, la prestation de services juridiques est protégée par le secret professionnel, ce qui rend la relation commerciale plus opaque à l'égard des autorités compétentes et des autres parties aux opérations financières.

Vulnérabilités au RPC-FAT du secteur de l'assurance-vie (faibles à élevées) : Le secteur de l'assurance-vie est très important au Canada et il génère un volume élevé de transactions liées aux polices. Les sociétés d'assurance-vie offrent divers produits et services vulnérables, y compris la gestion du patrimoine et la planification successorale. Les sociétés d'assurance-vie ont des relations directes et continues avec leurs clients. On soupçonne certaines interactions avec des PPV et d'autres clients à risque élevé. Dans ce secteur, il y a trois conglomérats qui représentent 70 % du total des primes nettes au Canada, mais exercent d'importantes activités à l'étranger. Le Canada ne représente qu'environ le tiers de l'ensemble de leurs activités, de sorte qu'ils peuvent faire affaire avec des clients et des administrations étrangères à risque élevé. Les sociétés d'assurance-vie se fient à des tiers et à des courtiers indépendants pour vendre leurs produits. Même si les transactions ont souvent lieu en personne, l'utilisation de mandataires indépendants (c'est-à-dire, l'utilisation d'un intermédiaire) ajoute à la complexité de la voie de livraison.

Vulnérabilités au RPC-FAT du secteur des valeurs mobilières (élevées) : Le secteur des valeurs mobilières est important au Canada, et il accepte des volumes de fonds importants aux fins de placement qui sont habituellement effectués sous forme de virement télégraphique à partir de comptes bancaires. L'industrie est composée d'entreprises intégrées (dans les six plus grandes banques), d'entreprises institutionnelles et de détaillants. Les six plus grandes banques du Canada constituent la majorité des courtiers en valeurs mobilières au Canada et effectuent 75 % des opérations par volume. Le secteur des valeurs mobilières offre une gamme de produits et de services qui sont vulnérables, y compris des comptes de courtage, divers produits d'investissement et des virements télégraphiques. Ces activités continuent de constituer une part importante des activités du secteur.

Les clients comprennent des particuliers, des personnes morales, des régimes de retraite et des comptes institutionnels nationaux et étrangers. Le secteur regroupe une combinaison de relations transactionnelles et de relations de comptes continues. Le profil des clients comprend les non-résidents, les clients fortunés et les PEP au Canada et à l'étranger, bien qu'une partie importante de la clientèle ne soit pas considérée comme des clients à risque élevé. Les opérations ne se limitent pas aux opérations intérieures; le secteur continue d'avoir une portée internationale et d'avoir des entreprises situées dans des administrations à risque élevé. La majorité des opérations mobilières sont moins anonymes, exigeant des interactions en personne. Cependant, les courtiers en ligne ont continué de croître depuis le Rapport de 2015, et ils offrent une occasion d'accroître l'anonymat dans ce domaine. La nature des modes de prestations de services peut être complexe, puisqu'elle peut comporter la représentation par des tiers, y compris des avocats.

Vulnérabilités au RPC-FAT du secteur de l'immobilier (élevés) : Les courtiers, les agents et les promoteurs immobiliers fournissent des produits et services vulnérables, ce qui comprend le lotissement de terrains, la construction de nouveaux immeubles et leur vente subséquente. Les opérations immobilières sont intégrées à une panoplie d'autres secteurs et l'achat et la vente de biens immobiliers comptent divers facilitateurs, y compris des avocats, des fournisseurs d'hypothèques, des assureurs et des estimateurs. La majorité des opérations immobilières sont généralement effectuées en personne et ne sont pas complexes. Toutefois, dans certains marchés, les opérations se font plus complexes en raison de l'utilisation des technologies (aux fins de l'identification et de la signature de documents électroniques) ainsi que de l'utilisation de tiers et de structures de propriété de société complexes pour effectuer des opérations.

Parmi les autres facteurs qui peuvent rendre les opérations immobilières plus complexes, mentionnons l'utilisation de sociétés fictives pour les biens achetés en tant qu'investissements, par opposition à la résidence, ainsi que l'utilisation de clauses de cession dans les contrats d'achat et de vente, qui permettent à un autre acheteur (le « cessionnaire ») de prendre en charge les droits et obligations de l'acheteur avant que l'acheteur initial prenne possession de la propriété. Les courtiers, les agents et les promoteurs immobiliers peuvent être exposés aux clients à risque élevé, y compris aux PPE, aux investisseurs étrangers (y compris ceux qui se trouvent dans des lieux préoccupants) et à des particuliers de professions et d'entreprises vulnérables. Le secteur est vulnérable au blanchiment des produits de la corruption étrangère.

Vulnérabilités au RPC-FAT des prêteurs hypothécaires non réglementés (élevées) : Bien que les institutions financières et de dépôts dont il a été question précédemment (par exemple, les banques et les coopératives de crédit) détiennent une part importante des prêts hypothécaires émis, d'autres types de prêteurs ont connu une croissance rapide au cours de la dernière décennie et détiennent maintenant des dizaines de milliards de dollars en actifs hypothécaires. Les entités qui ne sont pas réglementées aux fins de la LRPC-FAT comprennent les sociétés de prêt hypothécaire (SPH)Note de bas de page 128, les sociétés de placement hypothécaire, les fournisseurs d'hypothèques consortiales et d'autres prêteurs privés comme les sociétés privées, les particuliers et les fiducies de fonds commun de placement. Ces entités offrent généralement un type de produit vulnérable, à savoir les prêts hypothécaires (résidentiels et commerciaux) et d'autres produits de prêt fondés sur l'avoir propre foncier. Certains de ces prêteurs (par exemple, les sociétés d'investissement hypothécaire et les fournisseurs d'hypothèques consortiales) offrent également des possibilités d'investissement direct aux particuliers ou aux entreprises qui souhaitent investir des fonds pour financer les prêts.

Le secteur peut être complexe sur le plan des modalités de financement et de ses opérations commerciales. Les structures de propriété de certains types de prêteurs privés ou d'entités qui leur fournissent des capitaux peuvent également être très complexes et opaques. Le secteur est intégré à un certain nombre d'autres secteurs (secteur immobilier, secteur juridique, secteur financier et investisseurs privés ou institutionnels). Il est exposé aux clients à risque élevé, y compris aux PPE, aux investisseurs étrangers (y compris ceux qui se trouvent dans des lieux à risque élevé) et à des particuliers de professions et d'entreprises vulnérables. Certains prêteurs non réglementés et prêteurs privés font la promotion de leurs services auprès de personnes plus susceptibles de travailler dans des entreprises vulnérables (comme les entreprises à fort volume de transactions en espèce). De plus, certains segments du secteur, comme les prêts hypothécaires à risque privés, les fournisseurs d'hypothèques consortiales et d'autres prêteurs privés, sont plus susceptibles de traiter avec les sociétés comme clients emprunteurs et avec les personnes fortunées comme fournisseurs de capitaux que les prêteurs hypothécaires traditionnels. Bien que les opérations puissent être effectuées en personne, les opérations non en personne deviennent de plus en plus la norme.

Vulnérabilités au RPC­FAT des négociants de pierres et de métaux précieux (NPMP) (élevées) : Ils continuent d'y avoir un grand nombre de NPMP partout au Canada (environ 4 149), allant de grands négociants à de petits négociants. Ces détaillants sont facilement accessibles aux clients domestiques et, dans certains cas, aux clients internationaux (par exemple à travers la vente en ligne). Bon nombre de NMPPP mènent un volume élevé d'opérations en lien avec des produits de grande valeur, dont certains sont des produits de base qui sont vulnérables au blanchiment d'argent et au financement des activités terroristes. La vulnérabilité la plus élevée est accordée aux métaux précieux comme l'or, sous des formes qui dérivent en grande partie leur valeur du métal sous-jacent, comme des barres ou des lingots, et les diamants, qui sont davantage marchandisés que d'autres pierres précieuses. Les bijoux finis de grande valeur présentent également certaines vulnérabilités, y compris être achetés comme produits de luxe dans le cadre d'un style de vie criminel. Cependant, leur niveau de vulnérabilité est en général inférieur à celui des métaux et des pierres marchandisés, particulièrement lorsque de tels bijoux sont vendus au détail où une partie importante de leur valeur est perdue. Dans la partie inférieure du spectre de vulnérabilité se trouvent les produits de bijoux finis de faible valeur vendus au détail, lesquels ne constituent pas des mécanismes efficaces de transfert de valeur.

Les NPMP continuent d'avoir des relations principalement transactionnelles avec leurs clients, et il existe des occasions pour les clients d'effectuer des opérations au comptant avec un niveau d'anonymat élevé. On croit aussi que le profil de clients comprend toujours des clients à risque élevé, notamment ceux qui sont dans des entreprises ou des professions vulnérables. Il s'agit d'un secteur facilement accessible, autant au pays qu'à l'étranger, où des clients à risque élevé peuvent acheter des produits de grande valeur au comptant de manière relativement anonyme.

Vulnérabilités au RPC­FAT des monnaies virtuelles (élevées) : Le secteur des monnaies virtuelles est croissant en termes d'actifs et de volume de transactions, et il continue d'employer différents modèles d'entreprise et de prestation complexes, comportant un éventail de participants, dont certains évoluent rapidement. Le secteur s'intègre de plus en plus au secteur financier formel, y compris les banques, les fournisseurs de paiements et les bourses qui sont des ESM traditionnelles. Le secteur fournit plusieurs types de produits et services vulnérables, y compris des monnaies virtuelles, l'offre initiale de cryptomonnaies, ainsi que des services de mixageNote de bas de page 129. Les monnaies virtuelles convertibles, qui représentent un élément important du secteur, continuent d'être les plus vulnérables, principalement en raison de l'anonymat accru qu'elles peuvent procurer, ainsi que de la facilité d'accès et le haut degré de transférabilité. Les fournisseurs de devises virtuelles semblent avoir des relations principalement transactionnelles avec leurs clients, en plus de certaines relations continues.

Étant donné des cas récents, il semble que des éléments criminels soient attirés par le niveau d'anonymat qu'offrent les monnaies virtuelles convertibles et décentralisées. Notamment, il existe un potentiel d'accès à l'échelle mondiale, de transfert rapide par-delà des frontières et à l'extérieur des canaux traditionnellement réglementés ou des interactions entre pairs, contournant entièrement le système financier, tout en évitant, dans certains cas, les exigences appropriées sur les moyens de connaître ses clients. Les exigences réglementaires en matière d'actifs virtuels continuent de différer d'une administration internationale à l'autre, et sont récemment entrées en vigueur au Canada. Les monnaies virtuelles peuvent être échangées, achetées ou vendues en ligne, et certaines monnaies virtuelles peuvent permettre le financement anonyme (financement au comptant ou par cartes prépayées, ou par un tiers au moyen d'échangeurs virtuels qui n'identifient pas convenablement la source de financement). L'anonymat et la complexité peuvent poser d'importants défis aux organismes d'application de la loi pour ce qui est de déterminer le propriétaire effectif des monnaies virtuelles, d'autant que certaines monnaies virtuelles sont mises au point et utilisées dans le but d'accroître l'anonymat (par exemple, les jetons de vie privée).

Vulnérabilités au RPC-FAT des entreprises d'importation et d'exportation (élevées) : Les entreprises d'importation et d'exportation sont de complexité et d'envergure variées. Leur rôle de moteur du commerce international crée des occasions d'abuser des chaînes commerciales mondiales et des institutions financières par le recyclage des produits de la criminalité de nature commerciales, et de dissimuler ces activités en masquant les véritables parties aux opérations commerciales, ainsi que la source des fonds. Par exemple, les sociétés d'importation et d'exportation peuvent dissimuler les véritables parties à un régime de RPCNC à l'aide de l'opacité de la propriété effective. Une autre méthode clé consiste à échelonner les paiements pour les marchandises par l'entremise de tiers non liés, souvent basés dans d'autres pays sans lien apparent avec l'opération.

Les marchandises peuvent également être expédiées par des itinéraires alambiqués, traversant souvent des zones économiques spéciales (ZES) pour dissimuler à la fois l'origine et la destination des marchandises, ainsi que les contreparties au commerce. Il existe aujourd'hui près de 5 400 zones économiques spéciales (ZES), dont plus de 1 000 ont été créées entre 2014 et 2019. Au moins 500 zones supplémentaires (environ 10 % du total) ont été annoncées et devraient ouvrir dans les années à venirNote de bas de page 130. L'absence de règlements stricts et de transparence des ZES qui sont bénéfiques pour les entreprises légitimes les rend également très attrayantes pour les acteurs illicites, qui profitent de cette surveillance allégée pour recycler les produits de la criminalité et financer les activités terroristes.

Bien qu'il y ait des préoccupations quant à la vulnérabilité des entreprises légitimes d'importation et d'exportation (par l'achat et la vente de produits de la criminalité), il est également problématique que bon nombre de ces entreprises puissent être des entreprises de façade ou des sociétés fictives complices ou sous contrôle criminel, conçues pour offrir des services aux GCO et remplissant donc le rôle de blanchisseurs d'argent professionnels. Les pays où les taux de RPCNC sont élevés sont souvent situés dans des plaques tournantes dans des corridors commerciaux internationaux importants présentant une forte concentration d'entreprises d'importation et d'exportation (par exemple, Chine, Hong Kong, Émirats arabes unis)Note de bas de page 131.

Vulnérabilités au RPC-FAT des guichets automatiques (GA) indépendants (élevées) : Les GA à étiquette blanche (GAEB) n'appartiennent pas à des institutions financières visées par la Loi sur les banques et sont généralement exploités par des particuliers et des petites entreprises à l'extérieur de l'industrie des banques et des coopératives de crédit. Le modèle d'affaires du secteur est complexe (connecteurs de réseau, vendeurs de GA et propriétaires) et est intégré à d'autres secteurs comme les institutions financières, les fournisseurs de réseaux de paiement, les services de véhicules blindés et les entreprises de fabrication d'équipement. Ce secteur a une structure assez complexe, puisque de nombreux acteurs différents participent au modèle d'affaires. Cela permet l'infiltration criminelle alors que les organismes d'application de la loi ont des preuves indiquant que des groupes criminels organisés contrôlent certaines entreprises participant au marché des GAEB. Les GAEB ne peuvent être utilisés que pour les retraits d'argent, mais la plus grande vulnérabilité est qu'ils peuvent être détenus et exploités par des criminels qui peuvent les remplir avec des produits illicites. De plus, étant donné que les GAEB sont situés dans des endroits moins surveillés, les criminels peuvent être plus enclins à s'en servir pour retirer des fonds au moyen de cartes de paiement volées. Souvent présents dans les entreprises caractérisées par un nombre élevé de transactions en espèce, les petits commerces de détail, les stations d'essence, les bars et les restaurants; les GAEB peuvent être utilisés par les GCO au stade de placement du recyclage des produits de la criminalité.

Entreprises de véhicules blindés (élevé) : Les services des entreprises de véhicules blindés sont utilisés par les institutions financières, les entreprises et les particuliers pour transporter en toute sécurité des espèces, des instruments monétaires et des marchandises de valeur. Douze entreprises de services de véhicules blindés sont enregistrées au Canada. Elles comptent 2 239 employés et offrent leurs services à l'échelle nationale et mondiale (les grandes entités ont une grande portée mondiale). La structure du secteur n'est pas particulièrement complexe. L'ampleur de leurs opérations et le fort volume de transactions en espèce effectuées par leur clientèle leur permettent de jouer un rôle, sciemment ou non, pour obscurcir l'origine des fonds et assurer l'anonymat de leur clientèle. Les services de logistique et de gestion de trésorerie offerts par ces entreprises permettent aux entreprises de véhicules blindés de recueillir des fonds, de les regrouper dans un compte de société centralisé, puis de transférer les fonds par virement télégraphique dans des comptes clients ainsi que d'offrir l'entreposage sécuritaire à l'extérieur du secteur bancaire officiel. Cela rend extrêmement difficiles de réconcilier les fonds et d'établir leur origine. Ces lacunes rendent également les entreprises de véhicules blindés particulièrement attrayantes pour les GCO et les criminels qui contrôlent des entreprises à forte intensité de liquidités ou souhaitent y avoir recours comme moyen de recyclage des produits de la criminalité. Bien que les mouvements d'argent entre les institutions financières soient moins préoccupants, une partie importante du profil de la clientèle des entreprises de véhicules blindés comprend une combinaison de relations d'affaires transactionnelles et tierces. Les entreprises de ce secteur transportent les fonds d'entreprises à fort volume de transactions en espèces; remplissent et réapprovisionnent les GAEB; transportent des monnaies et des instruments monétaires pour le compte des négociants en métaux précieux et pierres précieuses (NMPPP) et d'ESM; et effectuent d'autres opérations avec un éventail de donneurs d'ordre et de destinations, comme des comptes d'institutions financières, des entreprises privées ou des adresses personnelles.

Vulnérabilités au RPC-FAT pour les cartes prépayées à utilisation libre (moyennes) : L'utilisation des cartes prépayées continue de croître rapidement dans l'économie canadienne, mais elle représente encore une petite fraction du total des opérations. Bien qu'il y ait eu une croissance observée de 7 % d'une année sur l'autre, les cartes prépayées ne représentent que 2 à 3 % de l'utilisation aux points de vente. Les produits à utilisation libre sont offerts partout au Canada et peuvent être chargés avec de l'argent comptant et servir comme mode de paiement presque partout où les cartes de crédit et de débit sont acceptées. Ces produits peuvent être utilisés pour retirer de l'argent et pour effectuer des transferts d'une personne à l'autre au Canada et à l'étranger. La relation d'affaires avec les clients est transactionnelle et les cartes sont émises à des particuliers physiquement présents au Canada. Étant donné la nature du produit, les clients peuvent être à risque élevé, y compris les personnes dans des professions vulnérables et des entreprises. Certaines cartes prépayées à utilisation libre peuvent être achetées et chargées de manière relativement anonyme, alors que d'autres sont rechargeables et ont des limites de chargement plus élevées qui exigent une preuve d'identité. Bien que ces cartes soient encore relativement portables par-delà des frontières, le contexte de la délivrance de ces cartes au Canada a évolué et l'anonymat est réduit, ce qui diminue le risque qu'elles posent.

Courtiers en douane et transitaires (moyen) : Il y a 1 747 transitaires et 298 courtiers en douane qui sont en activité au Canada. Les transitaires ne transportent pas directement les marchandises; ils offrent une expertise dans la navigation de la composante logistique et la passation de marchés avec les transporteurs en vue d'expédier des marchandises de l'autre côté de la frontière par divers modes de transport (par exemple, transport maritime, ferroviaire, aérien). Les courtiers en douane sont des fournisseurs de services autorisés qui obtiennent, préparent et soumettent des renseignements et des documents sur l'importation et l'exportation de marchandises commerciales à des services douaniers comme l'ASFC afin d'accélérer le processus de dédouanement. La portée des services et des activités offerts par les transitaires est beaucoup plus étendue que ce que les courtiers en douane offrent. En effet, les transitaires facilitent la circulation des marchandises des deux côtés de la frontière. Dans l'ensemble, les deux entités peuvent agir comme facilitateurs du RPCNC, car elles peuvent tirer parti de leurs connaissances de la logistique commerciale pour contrôler et diriger des opérations de RPCNC, tout en dissimulant leur rôle aux organismes d'application de la loi en état des facilitateurs plutôt que les parties à l'origine des opérations commerciales suspectes.

Chapitre 6 : Résultats de l'évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes

Il a constaté que tous les secteurs économiquesNote de bas de page 132 et les produits financiers évalués pourraient être exposés aux risques inhérents de recyclage des produits de la criminalité alors qu'un nombre plus restreint s'est révélé exposé aux risques inhérents de financement des activités terroristes. Ce chapitre présente les résultats de l'évaluation des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme par secteur et par produit, sous forme de graphiques de scénarios pour permettre des comparaisons entre le niveau (c'est-à-dire notation très élevée, élevée, moyenne ou faible) des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité ou au financement du terrorisme pour chacun d'entre eux. Des listes des méthodes et techniques connexes de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme ou leurs indicateurs sous-jacents ainsi que des exemples de scénarios de risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorismeNote de bas de page 133 sont fournies pour démontrer davantage comment les auteurs de menace ont exploité ou pourraient exploiter des secteurs et des produits.

Ces indicateurs ne doivent pas être traités de façon isolée, puisqu'à eux seuls, ils ne prouvent pas nécessairement la présence de blanchiment d'argent ou d'une autre activité suspecte. Ils doivent être évalués par les entités déclarantes en combinaison avec ce qu'elles savent au sujet de leur client et d'autres facteurs entourant les opérations pour déterminer s'il y a des motifs raisonnables de soupçonner qu'une opération ou une tentative d'opération est associée à l'exécution ou à la tentative d'exécution d'une offense de blanchiment d'argent.

Risques inhérents de recyclage des produits de la criminalité

En faisant correspondre les menaces de recyclage des produits de la criminalité avec les secteurs ou produits vulnérables, l'évaluation a révélé que 19 secteurs et produitsNote de bas de page 134 sont exposés à des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité très élevés impliquant des auteurs menaçants (par exemple, des groupes criminels organisés et des tiers blanchisseurs d'argent) blanchissant les produits illicites générés par dix principaux typesNote de bas de page 135 de crimes à but lucratif.

Comme indiqué plus tôt dans le présent rapport, certains des GCO nationaux et des GCO transnationaux en activité au Canada qui présentent un haut niveau de sophistication posent la plus grande menace de recyclage des produits de la criminalité, et donc, le plus grand risque de recyclage des produits de la criminalité puisqu'ils sont impliqués dans plusieurs activités criminelles (listées au tableau 5 ci-dessous) générant de fortes sommes de produits de la criminalité. La majorité de ces groupes utilisent des blanchisseurs d'argent professionnels dans un effort d'éviter la détection par les autorités, puisque ces blanchisseurs d'argent ne participent généralement pas aux infractions sous-jacentes réelles et possèdent l'expertise nécessaire pour élaborer des stratagèmes qui utilisent plusieurs méthodes et techniques de recyclage des produits de la criminalité touchant souvent différents secteurs, produits et services.

La contrebande en vrac d'espèces ou l'utilisation de passeurs de fonds au Canada ou par-delà la frontière, est une méthode de recyclage des produits de la criminalité qui est souvent utilisée, y compris par les blanchisseurs d'argent professionnels, comme première étape dans le processus de recyclage des produits de la criminalité qui n'implique pas forcément  de secteur, de produit ou de service. Le BA par voies commerciales représente une autre technique utilisée par les blanchisseurs d'argent professionnels et les groupes criminels organisés (GCO) qui pose de nombreux défis de détection et d'enquête, impliquant souvent de nombreux acteurs et secteurs, y compris différents types de sociétés, d'institutions financières de dépôt, d'ESM et de courtiers généralement situés dans diverses juridictions.

Les figures 1 à 9 offrent une représentation graphique de tous les scénarios de risques inhérents liés au recyclage des produits de la criminalité comportant l'exploitation, par les acteurs de la menace de recyclage des produits de la criminalité, de divers secteurs et produits et services. Le tableau 5 quant à lui, dresse la liste des infractions criminelles qui génèrent des produits de la criminalité pouvant être recyclés. Les numéros 1 à 10 à l'axe X (c'est-à-dire, l'axe horizontal) des figures 1 à 9 renvoient au tableau 5. Pour faciliter la visualisation des niveaux de risque, le tableau 5 combine les menaces de recyclage des produits de la criminalité avec des cotes de menace équivalentes. Par extension, les points de données situés sur l'axe des X peuvent également comprendre plus d'une menace de recyclage des produits de la criminalité. Par exemple, les prêts usuraires et l'extorsion présentent le même niveau de menace et sont inclus au numéro 4 des figures 1 à 9 ci-dessous.

Tableau 5
Types de risques liés au RPC (de faible à très élevée) utilisés dans les figures 1 à 9
Numéro surl'axe X (horizontal) Types de risques liés au RPC
1 Pêche illégale
2 Contrebande et trafic d'armes à feu
3 Criminalité liée aux espèces sauvages
4 Extorsion; prêts usuraires
5 Traite de personnes; faux-monnayage
6 Criminalité liée à la pollution; contrebande et trafic de tabac; évasion fiscale/fraude
7 Vol; fraude d'identité; paris illégaux; contrefaçon et piratage
8 Passage de clandestins; fraude par cartes de paiement
9 Fraude par marketing de masse; fraude hypothécaire; fraude sur les marchés financiers; paris illégaux
10 Trafic de drogues illicites; corruption; fraude commerciale; blanchiment d'argent par des tiers

La cote de risques totaux inhérents au recyclage des produits de la criminalité pour chaque secteur ou produit s'est faite assignée une valeur numérique normalisée de 0 à 1, représentée sur l'axe Y (c'est-à-dire, l'axe vertical). Les résultats des graphiques sont fondés sur le code de couleur et les valeurs numériques qui suiventNote de bas de page 136.

Code de couleur de la cote
Chart #: Chart Title
Version texte
Code de couleur de la cote Valeur normalisée de la cote de risque
Très élevé >0,875
Élevé 0,626-0,875
Moyen 0,375-0,625
Faible <0,375

Certains secteurs ont la même valeur de cote de risque de recyclage des produits de la criminalité, et donc partagent la même série de points dans les graphiques (par exemple, les filiales de banques étrangères et les courtiers en valeurs mobilières à la figure 1); par conséquent, ils sont combinés dans la légendeNote de bas de page 137.

Figure 1a
Risques inhérents liés au RPC dans les institutions financières acceptant des dépôts et les courtiers en valeurs mobilières par type de risques liés au RPC
Figure 1a : Risques inhérents liés au RPC dans les institutions financières acceptant des  dépôts et les courtiers en valeurs mobilières par type de risques liés au RPC
Version texte
Menaces liées au RPC Banques nationales Succursales de banques étrangères; Courtiers en valeurs mobilières Filiales de banques étrangères
1 Élevé Élevé Moyen
2 Élevé Élevé Moyen
3 Élevé Élevé Élevé
4 Élevé Élevé Élevé
5 Élevé Élevé Élevé
6 Élevé Élevé Élevé
7 Élevé Élevé Élevé
8 Très élevé Élevé Élevé
9 Très élevé Très élevé Élevé
10 Très élevé Très élevé Élevé
Figure 1b
Risques inhérents liés au RPC dans les institutions financières acceptant des dépôts qui ne sont pas des banques par type de risques liés au RPC
Figure 1b : Risques inhérents liés au RPC dans les institutions financières acceptant des  dépôts qui ne sont pas des banques par type de risques liés au RPC
Version texte
Menaces liées au RPC Sociétés de fiducie et de prêt Coopératives de crédit et caisses populaires
1 Moyen Moyen
2 Élevé Moyen
3 Élevé Élevé
4 Élevé Élevé
5 Élevé Élevé
6 Élevé Élevé
7 Élevé Élevé
8 Élevé Élevé
9 Élevé Élevé
10 Très élevé Élevé

Institution financière acceptant des dépôts

Comme l'illustrent les figures 1a et 1b, la majorité des scénarios de risques liés au recyclage des produits de la criminalité comportant le secteur bancaire, les courtiers en valeurs mobilières, les sociétés de fiducie et de prêt, les coopératives de crédit et les caisses populaires obtiennent une cote plus élevée, certaines ayant un niveau moyen ou très élevé.

Les institutions financières de dépôts sont bien reconnues comme servant aux stades de placement et d'empilement du blanchiment d'argent, par exemple, par l'utilisation de comptes de dépôt personnels et d'entreprise, les virements télégraphiques nationaux et les transferts électroniques de fonds internationaux, et les échanges de devises et les instruments monétaires comme les traites bancaires, les mandats et les chèques (c'est-à-dire, personnels et voyageurs) De plus, les réseaux professionnels de recyclage des produits de la criminalité ayant des liens avec le Canada s'appuient principalement sur le BA par voies commerciales et les systèmes criminels informels de transfert de valeur pour blanchir les produits des GCO transnationaux. Les SITV criminels et le RPCNC dépendent largement du système financier officiel, et particulièrement des produits et services offerts par le secteur bancaire.

Les méthodes et les techniques de recyclage des produits de la criminalité principalement utilisées pour exploiter ces produits et services comprennent les suivantes :

Scénario de risques inhérents liés au RPC type comportant des institutions financières acceptant des dépôts

Les membres d'un GCO impliqués dans le trafic de drogue, la contrefaçon, la contrebande de tabac et la traite des êtres humains génèrent, sur une base hebdomadaire, d'importantes sommes d'argent et reçoivent également des transferts électroniques de fonds internationaux pour certaines de leurs activités criminelles. Étant donné les sommes importantes de produits de la criminalité qu'ils génèrent, ils ont retenu les services d'un blanchisseur d'argent professionnel qui coordonne un bon nombre des activités de recyclage des produits de la criminalité avec l'aide de mules, de prête-nom et de schtroumpfs.

Des cueillettes d'argent sont organisées et exigent parfois un déplacement à l'étranger; par conséquent, les sommes illicites sont souvent introduites illégalement au Canada. Les mêmes personnes ou d'autres reçoivent les instructions de déposer les sommes en espèces, au cours d'un certain nombre de jours, au moyen de guichets automatiques (le jour ou la nuit), sous le seuil de déclaration de 10 000 $, dans divers comptes personnels et d'entreprise détenus dans plusieurs institutions financières de dépôts. D'autres personnes reçoivent ensuite comme directive d'acheter des traites bancaires ou d'émettre des chèques au nom des prête-noms désignés, qui les déposent ensuite dans d'autres comptes. Les fonds sont ensuite transférés à d'autres personnes ou entreprises au moyen de virements télégraphiques intérieurs ou de TEF internationaux, ces derniers dans les cas où les personnes ou entreprises situées dans les pays étrangers font partie des stratagèmes de recyclage des produits de la criminalité.

Suivant les directives du blanchisseur d'argent professionnel, certaines personnes sont aussi chargées d'effectuer des opérations de change et des activités de raffinage avant de déposer les sommes en espèces dans des comptes personnels ou d'entreprise, ou remettent simplement les sommes en espèces produites au blanchisseur d'argent professionnel ou à d'autres personnes désignées.

Les sociétés de fiducie et de prêt offrent d'autres services qui peuvent être utilisés principalement au stade d'empilement du blanchiment d'argent. Par exemple, les comptes de fiducie et de prêt peuvent servir à dissimuler les sources et les utilisations de fonds illicites, ainsi que l'identité des bénéficiaires effectifs et des propriétaires juridiques. Les criminels qui sont clients ou bénéficiaires de comptes veulent habituellement conserver leur anonymat afin de déplacer des fonds ou d'éviter d'être examiné. Par conséquent, ils peuvent rechercher un certain niveau d'anonymat, au moyen des comptes de fiducie d'un professionnel, en créant des sociétés de placement privées, des fiducies étrangères ou d'autres entités de placement qui dissimulent la propriété véritable ou l'intérêt effectif de la fiducie. Habituellement, lorsque les fiducies étrangères sont utilisées dans des stratagèmes de recyclage des produits de la criminalité, le mouvement en navette des fonds sera observé entre différents comptes au Canada et à l'étranger.

Courtiers en valeurs mobilières

Des produits et services offerts par le secteur des valeurs mobilières ont été utilisés principalement au stade d'empilement du blanchiment d'argent. Voici des méthodes et des techniques observées dans le secteur des valeurs mobilières :

Scénario de risques inhérents liés au RPC comportant la manipulation d'actions :

Dans une affaire de manipulation d'actions (c.-à-d., de fraude sur les marchés de capitaux) et suite à l'augmentation artificielle du prix des actions, les auteurs de la fraude utilisent des prête-noms pour déposer des certificats physiques de cette compagnie dans des comptes de courtage. On soupçonne que les certificats physiques ont été remis aux prête-noms dans le cadre d'une opération hors bourse. Les actions ont été vendues sur le marché libre peu après les dépôts. Les fonds ont été rapidement retirés des comptes de courtage et virés à l'étranger à des particuliers soupçonnés d'être responsables du stratagème de manipulation des actions.

Scénario de risques inhérents liés au RPC comportant des valeurs mobilières hors bourse :

Le sujet d'une enquête a acheté plus d'un million d'actions d'une société échangée hors bourse dans une transaction hors bourse pour moins du tiers du prix courant. Une compagnie de placement a vendu les actions par l'intermédiaire d'une entreprise intégrée (c'est-à-dire, une institution financière majeure) au nom du sujet de l'enquête. On soupçonne que les conditions de la vente de ces actions avaient été préétablies par le sujet de l'enquête et l'acheteur, dans le but de transférer des produits de la criminalité. Les actions ont été vendues le lendemain au prix courant, ce qui a permis à l'acheteur des actions de recevoir un rendement de 300 % de son capital investi en une journée, et qui procurait une explication qui semblait légitime pour la source des produits de la criminalité.

Figure 2
Risques inhérents liés au RPC dans le secteur de l'assurance-vie par type de risques liés au RPC
Risques inhérents liés au RPC dans le secteur de l'assurance-vie par type de  risques liés au RPC
Version texte
Menaces liées au RPC Sociétés d'assurance-vie Agents et courtiers indépendants d'assurance vie Entités et organismes intermédiaires d'assurance vie
1 Moyen Faible Moyen
2 Moyen Faible Moyen
3 Élevé Moyen Moyen
4 Élevé Moyen Moyen
5 Élevé Moyen Moyen
6 Élevé Moyen Élevé
7 Élevé Moyen Élevé
8 Élevé Moyen Élevé
9 Élevé Moyen Élevé
10 Élevé Moyen Élevé

Comme l'illustre la figure 2, les scénarios des risques liés au recyclage des produits de la criminalité touchant les sociétés d'assurance-vie et/ou les agents ou courtiers particuliers sont cotés de moyens à élevés. Étant donné que les entités et organismes intermédiaires d'assurance-vie procurent principalement un soutien administratif aux conseillers, offrent des occasions de regroupement, fournissent un accès à des produits de sociétés d'assurance, et ne traitent généralement pas directement avec les clients, ils sont exposés à des scénarios de risques inhérents faibles à moyens liés au blanchiment d'argent.

Les méthodes et les techniques de recyclage des produits de la criminalité qui suivent ont été relevées dans ce secteur, et comportent principalement des sociétés d'assurance-vie et/ou des agents ou courtiers particuliers.

Figure 3
Risques inhérents liés au RPC dans le secteur des entreprises de services monétaires par type de risques liés au RPC
Risques  inhérents liés au RPC dans le secteur des entreprises de services monétaires  par type de risques liés au RPC
Version texte
Menaces liées au RPC ESM de détail à multiples services ESM de remise de fonds parallèles ESM de détail à service unique ESM de gros et d'entreprise
1 Élevé Élevé Élevé Moyen
2 Élevé Élevé Élevé Moyen
3 Élevé Élevé Élevé Moyen
4 Élevé Élevé Élevé Moyen
5 Élevé Élevé Élevé Élevé
6 Élevé Élevé Élevé Élevé
7 Élevé Élevé Élevé Élevé
8 Très élevé Très élevé Élevé Élevé
9 Très élevé Très élevé Très élevé Élevé
10 Très élevé Très élevé Très élevé Élevé

Les scénarios de risques inhérents associés aux ESM de gros et d'entreprise entrent principalement dans l'intervalle moyen à élevé, puisqu'ils offrent un nombre de produits et de services plus limités, principalement des TEF et des traites bancaires, à un petit segment de clientèle (c'est-à-dire, les sociétés).

Les produits et services des ESM les plus souvent utilisés pour le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes sont des TEF internationaux, des opérations de change et des instruments négociables (p. ex., des mandats). Les SITV et les transferts de cryptomonnaies sont de plus en plus reconnus comme étant vulnérables à un usage abusif aux fins de recyclage des produits de la criminalité. Les opérations en espèce sont toujours très courantes dans ce secteur, et celui-ci peut donc être utilisé au stade de placement. D'autres produits et services comme les TEF, les mandats et les chèques de voyage peuvent aussi servir au stade de superposition du recyclage des produits de la criminalité, et peuvent avoir des origines suspectes dans les opérations bancaires clandestines et le blanchiment d'argent professionnel. Cinq principales méthodes et techniques de blanchiment d'argent sont pertinentes pour le secteur des ESM. Elles sont décrites plus en détail dans les scénarios de risques liés au recyclage des produits de la criminalité qui suivent :

Scénario de risques inhérents liés au RPC comportant des instruments monétaires et la structuration :

Dans un cas de trafic de stupéfiants soupçonné, une personne a effectué plusieurs dizaines d'achats de mandats, apparemment pour les fractionner sous les seuils de tenue de registre. Ces mandats étaient payables à une ESM, et ont été négociés dans différentes villes partout en Amérique du Nord.

Scénarios de risques inhérents liés au RPC comportant des instruments monétaires et une tentative de contourner les exigences d'identification du client :

Dans un cas, un particulier a acheté des dizaines de mandats évalués à des dizaines de milliers de dollars canadiens en moins d'un an. Chaque transaction était structurée sous les exigences de déclaration, et la majorité des fonds étaient envoyés à des personnes situées à l'étranger. La personne a fourni des renseignements inexacts sur son titre d'emploi et des renseignements trompeurs sur l'adresse, peut-être pour donner une légitimité apparente aux transactions qui ne concordaient pas à l'emploi et au revenu réels de la personne.

Figure 4
Risques inhérents liés au RPC dans le secteur des entreprises de services monétaires par type de risques liés au RPC
Risques  inhérents liés au RPC dans le secteur des entreprises de services monétaires  par type de risques liés au RPC
Version texte
Menaces liées au RPC Casinos traditionnels Casinos provinciaux en ligne
1 Moyen Moyen
2 Moyen Moyen
3 Élevé Moyen
4 Élevé Moyen
5 Élevé Élevé
6 Élevé Élevé
7 Élevé Élevé
8 Élevé Élevé
9 Élevé Élevé
10 Élevé Élevé

La figure 4 illustre les différents niveaux de scénarios de risque de recyclage des produits de la criminalité impliquant des casinos physiques et des casinos en ligne sous réglementation provinciale. Étant donné le nombre important de produits et de services offerts aux clients comme les achats au comptant de jetons, les appareils à sous acceptant des espèces, des opérations de change, les machines à remise de billets libre-service et ainsi de suite, les casinos traditionnels sont exposés à des scénarios de risques inhérents liés au recyclage des produits de la criminalité plus élevés que les casinos en ligne de réglementation provinciale.

Casinos traditionnels

Les étapes de recyclage des produits de la criminalité les plus souvent observées dans les casinos physiques sont le placement et la superposition. Les techniques les plus courantes de recyclage des produits de la criminalité sont la structuration et le schtroumpfage. Les méthodes et les techniques suivantes ont été utilisées dans les casinos traditionnels :

Scénario type du risque inhérent lié au RPC associé aux casinos traditionnels

Les membres d'un GCO impliqués dans de multiples activités criminelles telles que le trafic de drogue, le prêt usuraire et différents types de fraudes visitent régulièrement des casinos situés dans une province canadienne et mènent un certain nombre d'activités présumées de recyclage des produits de la criminalité, notamment :

  • échanges de petites coupures en coupures plus grandes au guichet de caisse, dans des montants inférieurs au seuil de déclaration;
  • achat de puces à l'aide de billets qui ont une odeur ou une apparence étrange (par exemple, enveloppé dans des élastiques, odeur de moisi, inhabituellement sale);
  • échanges d'un grand montant de petites coupures pour des billets de casinos et plus tard en grandes coupures;
  • échanges fréquents ou répétés au guichet de caisse de sommes importantes de devises étrangères (habituellement USD) contre des devises canadiennes, avec peu ou pas d'activité de jeu;
  • achats en espèces de jetons de casino dans des montants inférieurs au seuil de déclaration;
  • utilisation de plusieurs caissiers pour encaisser des jetons de casino dans des montants inférieurs au seuil de déclaration;
  • utilisation de mules pour acheter des chèques bancaires de comptes bancaires financés par un volume élevé de dépôts en espèce de diverses sources inconnues, payables à des tiers et des casinos (déposés dans des comptes de fonds de jeu des clients ou utilisés comme forme de participation au jeu);
  • passage d'espèces, de jetons ou autres instruments de valeur du casino entre des membres du GCO liés avant leur entrée au casino, sur le plancher du casino, à la table de jeu ou avant d'encaisser;
  • dépôts d'argent comptant, de chèque ou traite bancaire à un compte d'avance, suivi de l'achat de jetons de casino, puis la remise des jetons contre un chèque du casino, ou le retrait de la totalité ou d'une partie des fonds avec peu ou pas d'activités de jeu observée;
  • dépôts de petites coupures dans un compte de montant initial, suivis de retraits des fonds en coupures plus élevées;
  • dépôts en espèce par un tiers à un compte d'avance d'un client;
  • achats par carte de crédit de jetons de casinos avec peu ou pas de jeu, puis par l'encaisse au moyen d'un chèque du casino; alors que des fonds illicites ont servi à payer le solde de la carte de crédit;
  • achats de jetons de casino, à l'aide d'espèces illicites ou de traite bancaire, payables aux clients engagés dans peu ou pas de jeu, puis la remise des jetons en échange d'un chèque du casino.

Le « modèle de Vancouver »

Le « modèle de Vancouver » a été inventé à par le professeur John Langdale de l'Université MacQuarie et discuté dans le rapport de 2018 de Peter German « Dirty Money : An Independent Review of Money Laundering in Lower Mainland ».Note de bas de page 138Il s'agit d'une méthode de recyclage des produits de la criminalité impliquant de riches clients de casino cherchant à déplacer des actifs hors d'un pays pour éviter les contrôles gouvernementaux sur les devises, en particulier la limite de 50 000 dollars américains par an en Chine. Le modèle suit une structure typique de transfert d'actifs et de recyclage des produits de la criminalité. Le riche client du casino fournit des fonds à un banquier clandestin qui entretient des relations d'affaires avec des blanchisseurs d'argent professionnels en Colombie-Britannique. À son arrivée au Canada, le riche client du casino reçoit de l'argent de blanchisseurs d'argent professionnels canadiens provenant des produits de la criminalité. Une fois que l'argent est fourni, le banquier clandestin étranger libère les fonds dont il a la charge sur les comptes à l'étranger du blanchisseur d'argent professionnel canadien, ou les utilise pour effectuer un paiement sous forme de drogues ou de précurseurs à destination du Canada. Le riche client du casino utilise l'argent pour jouer dans des casinos de Colombie-Britannique et, lors de l'encaissement, reçoit un chèque de casino. Dans certains cas, les chèques de casino servent à acheter des biens immobiliers en C.-B.

Casinos en ligne de réglementation provinciale

Les casinos en ligne de réglementation provinciale peuvent servir principalement au stade de superposition du recyclage des produits de la criminalité et peuvent comporter des méthodes et des techniques décrites ci-dessous :

Figure 5a
Risques inhérents liés au RPC relativement à d'autres entreprises et professionnels non financiers par type de risques liés au RPC
Risques inhérents liés au RPC relativement à d'autres entreprises et  professionnels non financiers par type de risques liés au RPC<
Version texte
Menaces liées au RPC Professionnels juridiques Négociants en métaux précieux et pierres précieuses Comptables Notaires de la Colombie-Britannique
1 Élevé Moyen Moyen Moyen
2 Élevé Moyen Moyen Moyen
3 Élevé Élevé Moyen Moyen
4 Élevé Élevé Moyen Moyen
5 Élevé Élevé Élevé Moyen
6 Élevé Élevé Élevé Élevé
7 Élevé Élevé Élevé Élevé
8 Élevé Élevé Élevé Élevé
9 Très élevé Élevé Élevé Élevé
10 Très élevé Élevé Élevé Élevé
Figure 5b
Risques inhérents liés au RPC associés au secteur immobilier par type de risques liés au RPC
Risques inhérents liés au RPC  associés au secteur immobilier par type de risques liés au RPC
Version texte
Menaces liées au RPC Agents & courtiers immobiliers Prêteurs hypothécaires non réglementés
1 Moyen Moyen
2 Moyen Moyen
3 Élevé Moyen
4 Élevé Élevé
5 Élevé Élevé
6 Élevé Élevé
7 Élevé Élevé
8 Élevé Élevé
9 Élevé Élevé
10 Élevé Élevé

La majorité des entreprises et professionnels non financiers représentés dans les figures 5a et 5b sont exposés à des scénarios de risque élevé de recyclage des produits de la criminalité, bien que quelques-uns entrent dans la catégorie de risque moyen ou très élevé du modèle.

Professionnels du droit et notaires de Colombie-Britannique

Étant donné la nature des produits et services (par exemple, la formation et la gestion de sociétés et de fiducies, exécution d'opérations et d'achats de grande valeur) offerts par les professionnels juridiques à leurs clients, ils sont exposés à des scénarios de risques inhérents liés au recyclage des produits de la criminalité élevés à très élevés. Même si les notaires de la C.­B. offrent des services semblables, leurs activités sont principalement limitées à la Province; par conséquent, les possibilités de recyclage des produits de la criminalité sont plus restreintes et ils sont exposés à des risques plus faibles (c'est-à-dire, moyen à élevé).

Les professionnels juridiques et les notaires de la C.-B. peuvent servir d'intermédiaires afin de se distancer des activités criminelles et des produits générés par ces activités, et donc dissimuler la source et les véritables bénéficiaires effectifs de ces fonds, et ce, souvent au moyen de structures complexes de sociétés ou de fiducies, formées avec l'aide de professionnels juridiques. Cette assistance ajoute aussi un voile de légitimité au mouvement de fonds et à d'autres opérations commerciales. Il pourrait également être difficile de prendre des mesures d'application contre des professionnels juridiques complices, car il pourrait y avoir des allégations de secret professionnel liant l'avocat à son client.

Scénario de risque inhérent au RPC impliquant la profession juridique et les comptes en fiducie :

Tel que dans un scénario observé dans plusieurs cas, des professionnels juridiques et des comptes de fiducie pourraient être utilisés sciemment ou non pour blanchir des produits illicites. Des activités de recyclage des produits de la criminalité mettaient en cause le compte de fiducie d'un avocat présentant ces caractéristiques ont été observées :

  • recevoir des virements télégraphiques internationaux au profit de comptes de fiducie canadiens;
  • utiliser un compte de fiducie dans le cadre d'une fraude en matière de faillite;
  • faciliter l'achat ou le financement d'actifs, y compris les opérations immobilières, à l'aide des produits de la criminalité;
  • blanchir les produits de la criminalité au moyen de comptes de fiducie comme comptes de transit;
  • effectuer des virements télégraphiques internationaux de comptes de fiducie canadiens vers des comptes situés à l'étranger, comme les Îles Vierges britanniques, les Bahamas et le Panama.

Secteur immobilier

Les produits et services offerts par les agents immobiliers et les promoteurs offrent des possibilités aux criminels et aux blanchisseurs d'argent.

Voici des exemples de méthodes ou d'indicateurs connexes couramment employés par les criminels pour blanchir des fonds illicites à l'aide d'opérations immobilières :

D'autres méthodes et techniques de recyclage des produits de la criminalité qui permettent à de l'argent illicite d'entrer dans le système financier comprennent les achats en espèces ou des dépôts en espèces importants, et les paiements en espèces, particulièrement dans la construction, la rénovation et la mise à niveau des biens immobiliers. Les opérations immobilières comportent habituellement des avocats et leurs comptes de fiducie, et cette aide peut, sciemment ou non, procurer une légitimité et/ou obscurcir la source des fonds. Les fonds étrangers illicites peuvent également être utilisés pour acheter des propriétés immobilières canadiennes, notamment par le virement télégraphique direct des fonds dans un compte de fiducie d'avocatNote de bas de page 140. De plus, les représentants commerciaux de biens immobiliers, les courtiers en hypothèques et les évaluateurs immobiliers peuvent être complices du recyclage des produits de la criminalité par l'achat de biens immobiliers ou par la fraude hypothécaire.

Prêteurs hypothécaires non réglementés

Les vulnérabilités liées au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme du secteur sont fondamentalement doubles. Les prêteurs peuvent recevoir des emprunteurs des paiements qui sont des produits de la criminalité ou, dans certains cas, ils peuvent involontairement ou sciemment fournir un financement avec des fonds qui émanent de la criminalité. Par ailleurs, une combinaison des deux peut être utilisée par des criminels sophistiqués qui contrôlent directement les parties qui procèdent à l'opération afin d'obtenir des effets de superposition et des capacités composés.

Des hypothèques peuvent être obtenues pour éviter les soupçons associés au financement personnel important d'un achat ou pour limiter les capitaux propres d'un criminel dans un bien, ce qui peut réduire au minimum les pertes financières si le bien est confisqué par l'État. Les biens achetés à l'aide du produit de la criminalité ou dans le cadre d'un stratagème de blanchiment d'argent peuvent eux-mêmes être utilisés pour d'autres activités criminelles, comme la production et le trafic de stupéfiants (pour des opérations de croissance illégale et des sites de production de stupéfiants), ou encore pour l'exploitation sexuelle (maisons de débauche). De même, une hypothèque peut être obtenue pour commettre une fraude hypothécaire à but lucratif.

L'octroi de prêts immobiliers (souvent à des emprunteurs en situation financière précaire ou incapables d'obtenir un prêt auprès d'un autre prêteur) peut être un moyen lucratif de réinvestir les fonds générés par des activités illicites, les remboursements offrant une forme de revenu avec une apparence de légitimité. Cela est susceptible d'être entrepris en combinaison avec d'autres activités criminelles, comme les prêts usuraires. Un autre sujet de préoccupation important concerne les programmes de prêts hypothécaires impliquant différentes entités fictives et structures de prête-nom (souvent avec un élément transnational) contrôlées par les mêmes acteurs criminels, où l'objectif est de déplacer et de superposer des fonds pour en masquer les origines.

Les typologies observées en ce qui concerne les prêts hypothécaires sont les suivantes :

Négociants en pierres et métaux précieux

Les métaux précieux et les pierres précieuses sont des commodités utiles qui peuvent être facilement dissimulées, échangées et transportées. Les produits de la criminalité peuvent être placés, superposés et intégrés au système financier au moyen de l'achat et de la vente de métaux précieux et de pierres précieuses, particulièrement lorsqu'ils sont sous des formes plus marchandisées. Cependant, la personne qui achète des métaux précieux et des pierres précieuses pour les revendre au bout du compte reçoit de l'argent ou un autre instrument monétaire qui pourrait exiger d'autres transactions par l'entremise d'un autre secteur réglementé.

Cela étant dit, les métaux précieux et les pierres précieuses sont une forme de biens faciles à transporter, faciles à liquider et très concentrés au porteur. Ils servent de moyens d'échange internationaux et peuvent être convertis en espèces partout dans le monde. De plus, les métaux précieux, en particulier l'or, l'argent et le platine, ont un marché facilement et activement échangé, et peuvent être fondus en diverses formes, ce qui efface les marques de raffinerie et les rend pratiquement impossibles à retracer.

Les principales méthodes de recyclage des produits de la criminalité observées sont les suivantes :

Figure 6
Risques inhérents liés au RPC associés aux sociétés, aux sociétés de personnes, aux fiducies expresses et aux fournisseurs de services aux entreprises par type de risques liés au RPC
Risques  inhérents liés au RPC associés aux sociétés, aux sociétés de personnes, aux  fiducies expresses et aux fournisseurs de services aux entreprises par type de  risques liés au RPC
Version texte
Menaces liées au RPC Sociétés; Fiducies express Sociétés de personnes Fournisseurs de services aux entreprises
1 Élevé Moyen Moyen
2 Élevé Moyen Moyen
3 Élevé Élevé Moyen
4 Élevé Élevé Élevé
5 Élevé Élevé Élevé
6 Élevé Élevé Élevé
7 Élevé Élevé Élevé
8 Très élevé Élevé Élevé
9 Très élevé Élevé Élevé
10 Très élevé Élevé Élevé

Comme l'illustre la figure 6, la majorité des scénarios de recyclage des produits de la criminalité associés à des sociétés, des sociétés de personnes et des fiducies expresses reçoivent une cote moyenne à très élevée. Les sociétés, les sociétés de personnes et les fiducies expresses peuvent être liées à des activités de blanchiment d'argent en servant à dissimuler les bénéficiaires effectifs des fonds générés illégalement en utilisant des structures très complexes qui peuvent comporter plusieurs administrations et intermédiaires. Les sociétés privées continuent de figurer fréquemment dans les cas de blanchiment d'argent que le CANAFE communique aux organismes d'application de la loi.

Les GCO ont recours aux entreprises de nombreux secteurs économiques, y compris la construction, le transport, le financement et les prêts, l'immobilier, le commerce international et les entreprises à forte intensité de liquidités, pour faciliter le blanchiment d'argent à grande échelle. Les entreprises contrôlées par les GCO peuvent tenter de paraître légitimes en faisant des dépôts de salaires, en utilisant des plateformes de paiement en ligne, en effectuant des opérations internationales et en employant des avocats et des comptables.

Comme indiqué plus haut, l'établissement d'une société, d'une société de personnes ou d'une fiducie expresse au moyen d'un « point d'entrée » comme un cabinet d'avocats peut être un moyen efficace de dissimuler l'identité du bénéficiaire effectif. Les sociétés peuvent être établies rapidement et gérées par des fournisseurs de services aux entreprises (FSE) locaux. En outre, compte tenu de la difficulté de différencier les activités financières légitimes et illégitimes, les sociétés et les sociétés de personnes peuvent représenter des outils efficaces aux stades d'empilement ou de l'intégration du blanchiment d'argent. La constitution en personne morale sous le régime provincial, territorial ou fédéral peut se faire rapidement, simplement et à peu de frais par l'intermédiaire des sites Web des services gouvernementaux en ligne, et les services d'un professionnel (par exemple, avocat, notaire) ne sont donc pas nécessairement requis. Cependant, les professionnels juridiques peuvent toujours être consultés pour aider à établir des structures de société plus complexes.

Les principales méthodes de recyclage des produits de la criminalité observées sont les suivantes :

Figure 7
Risques inhérents liés au RPC associés aux produits portant une valeur monétaire par type de risques liés au RPC
Risques inhérents liés au RPC associés aux produits portant une valeur  monétaire par type de risques liés au RPC
Version texte
Menaces liées au RPC Monnaies virtuelles Cartes prépayées à utilisation libre 
1 Moyen Moyen
2 Élevé Moyen
3 Élevé Élevé
4 Élevé Élevé
5 Élevé Élevé
6 Élevé Élevé
7 Élevé Élevé
8 Élevé Élevé
9 Élevé Élevé
10 Très élevé Élevé

La figure 7 illustre le niveau de risques liés au recyclage des produits de la criminalité associés aux monnaies virtuelles et aux produits et services d'accès prépayé à utilisation libre. Les devises virtuelles, en particulier celles qui sont convertibles, sont principalement utilisées dans les scénarios de risques liés au recyclage des produits de la criminalité élevés à très élevés, et peuvent servir dans les trois stades du recyclage des produits de la criminalité. Les produits d'accès prépayés à utilisation libre sont aussi principalement utilisés dans les scénarios de risques liés au RPC élevés.

Devises virtuelles

Les opérations de change de devises virtuelles peuvent être contrôlées ou utilisées par les blanchisseurs d'argent en raison de leur nature fortement axée sur l'argent en espèces et l'anonymat relatif à ces services. Les criminels peuvent recycler leurs produits de la criminalité en achetant des devises virtuelles et en menant plusieurs activités de superposition subséquentes :

Certaines devises virtuelles, même si elles ne sont pas contrôlées criminellement, peuvent être adoptées par des réseaux criminels comme forme de paiement. Par exemple, AlphaBay et Hansa étaient deux des plus grands marchés du Web caché, permettant aux clients d'acheter une gamme de biens et services illicites avec des devises virtuelles. Ces marchés ont été fermés par les organismes d'application de la loi lors de l'opération Bayonet aux États-Unis, au Canada et en Thaïlande en juillet 2017. Avant d'être fermés, les deux sites avaient un total combiné de plus de 1 milliard de dollars américains en opérations illicites, avec des utilisateurs répartis dans le monde entier, y compris au Canada. Les deux marchés offraient des produits et des services tels que des drogues et des produits chimiques toxiques, des documents d'identification volés et frauduleux, des produits contrefaits, des logiciels malveillants et d'autres outils de piratage informatique, des armes à feu et des services frauduleux.

Les statistiques du Centre antifraude du Canada (CAFC) font état d'une multiplication par dix des plaintes liées à diverses fraudes concernant les devises virtuelles et les GA offrant des devises virtuelles au cours des quatre dernières années. Le nombre total de plaintes est passé de 305 en 2016 à 3 768 en 2019, ce qui comprend 1 359 cas qui ont donné lieu à la victimisation d'une personne (c'est-à-dire que le plaignant a été incité par escroquerie à envoyer des devises virtuelles à une entité néfaste). Les pertes totales découlant cette activité s'élèvent à des millions de dollars. Puisque dans ces cas, le mode de paiement est une devise virtuelle, il est très probable qu'une activité de blanchiment d'argent se produise aux stades du placement et d'empilement.

Produits d'accès prépayés

Parce qu'ils peuvent être chargés à répétition avec de l'argent comptant et être utilisés au même endroit que les cartes de crédit régulières, les produits d'accès prépayés à utilisation libre peuvent être utilisés pour recycler les produits de la criminalité, surtout lorsque la limite de chargement permise est élevée. Les principales méthodes de recyclage des produits de la criminalité sont illustrées dans les exemples ci-dessous.

Figure 8 : Risques inhérents liés au RPC associés aux services de véhicules blindés et aux GA à étiquette blanche par type de risques liés au RPC

Figure 8
Risques inhérents liés au RPC associés aux services de véhicules blindés et aux GA à étiquette blanche par type de risques liés au RP
Risques inhérents liés au RPC associés aux services  de véhicules blindés et aux GA à étiquette blanche par type de risques liés au  RP
Version texte
Menaces liées au RPC Entreprises de véhicules blindés GA à étiquette blanche 
1 Moyen Moyen
2 Moyen Moyen
3 Élevé Moyen
4 Élevé Élevé
5 Élevé Élevé
6 Élevé Élevé
7 Élevé Élevé
8 Élevé Élevé
9 Élevé Élevé
10 Élevé Élevé

GA à étiquette blanche

La figure 8 illustre les différents niveaux de scénarios de risque de recyclage des produits de la criminalité impliquant des guichets automatiques privés à étiquette blanche. Les guichets automatiques privés à étiquette blanche sont le plus souvent utilisés dans la phase de placement du blanchiment d'argent, et les techniques de recyclage des produits de la criminalité les plus courantes sont la structuration et le schtroumpfage. Les entreprises qui possèdent et chargent des guichets automatiques privés à étiquette blanche pour elles-mêmes ou pour d'autres entreprises légitimes peuvent être contrôlées par des criminels. Le chargement des guichets automatiques privés à étiquette blanche peut être effectué de manière anonyme et la surveillance de l'activité de chargement semble être limitée, voire inexistante. Les criminels peuvent offrir des services de GA dans différentes entreprises légitimes ou installer des GA dans leur propre entreprise. Les organismes d'application de la loi disposent de preuves indiquant que certains GCO contrôlent certaines entreprises en cause sur ce marché. De plus, étant donné que les GAEB sont situés dans des endroits moins surveillés qui offrent un plus grand anonymat, les criminels peuvent être plus enclins à s'en servir pour retirer des fonds au moyen de cartes de paiement volées. Voici des méthodes et techniques de recyclage des produits de la criminalité observées dans le secteur des valeurs mobilières :

L'évaluation du risque pour ce secteur est fondée sur un examen qualitatif des pratiques et des activités du secteur. Bien qu'aucun cas substantiel n'ait été identifié au Canada, il existe effectivement de tels cas aux États-Unis. Il est entendu que le secteur fournit des services aux entités qui sont considérées comme présentant un risque élevé dans le cadre du présent processus d'évaluation, et que ce secteur est à forte intensité de liquidités en plus d'être peu surveillé et peu transparent, ce qui accroît la vulnérabilité du secteur, malgré l'absence de données probantes au pays.

Figure 9
Risques inhérents liés au RPC associés au secteur des échanges commerciaux par type de risques liés au RPC
Risques inhérents liés au RPC associés au secteur des échanges commerciaux par  type de risques liés au RPC
Version texte
Menaces liées au RPC Entreprises d'importation et d'exportation Transitaires Courtage en douane
1 Moyen Moyen Moyen
2 Élevé Moyen Moyen
3 Élevé Moyen Moyen
4 Élevé Moyen Moyen
5 Élevé Élevé Moyen
6 Élevé Élevé Moyen
7 Élevé Élevé Moyen
8 Élevé Élevé Élevé
9 Élevé Élevé Élevé
10 Très élevé Élevé Élevé

Entreprises d'importation et d'exportation

Les sociétés d'importation et d'exportation peuvent employer des techniques de RPCNC en mettant particulièrement l'accent sur la falsification d'éléments du processus d'importation et d'exportation. Le RPCNC comprend la dissimulation et la légitimation des produits de la criminalité. Pour ce faire, les acteurs transfèrent la valeur des fonds à l'aide d'opérations transfrontalières d'importation et d'exportation, notamment par les méthodes suivantes :

Un exemple de cas concerne un exportateur qui se livre au RPCNC au Canada sous le couvert de l'exportation légitime de marchandises comme des produits de ferraille. Les comptes bancaires sont utilisés par plusieurs entreprises de façade et sociétés fictives pour transférer une valeur au Canada et à l'intérieur du pays. Les sociétés d'importation et d'exportation, les entreprises de façade et les expéditions fantômes ont servi à faciliter la phase de l'empilement du recyclage des produits de la criminalitéNote de bas de page 141.

Transitaires et courtiers en douanes

Bien qu'il y ait eu peu de cas avérés de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme impliquant des courtiers en douane et des transitaires au Canada, ces entités peuvent faciliter le BA par voies commerciales en agissant comme des intermédiaires « cachés » dans les chaînes commerciales internationales aux fins du BA par voies commerciales. Elles maintiennent un manque de visibilité du point de vue douanier, tout en étant en mesure de faciliter les déclarations douanières, ce qui rend le secteur propice aux abus de la part de ceux qui cherchent à blanchir des produits par de fausses descriptions de marchandises importées ou exportées.

Ces entités jouent un rôle logistique important pour de nombreux importateurs et exportateurs en gérant le mouvement de leurs marchandises de l'origine aux marchés de destination. L'importation et l'exportation ne sont souvent qu'un petit aspect des opérations plus importantes d'une entreprise canadienne, et les processus douaniers et d'expédition sont souvent extrêmement complexes. Les transitaires tirent parti de leurs connaissances et de leur expérience des processus douaniers internationaux, ainsi que des itinéraires de transport international complexes et des horaires des transporteurs de marchandises, pour amener les marchandises sur les marchés en temps opportun et de façon rentable. Cependant, cela signifie également que les transitaires peuvent utiliser leur connaissance des chaînes commerciales pour dissimuler des expéditions suspectes. Lorsqu'elles sont complices, les deux entités sont également en mesure de repérer les vulnérabilités des processus douaniers, reconnaissant que de nombreuses autorités douanières ne sont pas en mesure d'effectuer un examen à 100 % des marchandises entrantes et sortantes. Lorsqu'ils ne sont pas complices, ces entités peuvent être utilisées comme facilitateurs à leur insu afin de transporter des marchandises illicites ou de faciliter le transport de marchandises illicites, étant donné qu'ils ne gèrent pas directement l'expédition eux-mêmes et peuvent être induits en erreur quant à sa nature réelle.

Risques inhérents liés au financement des activités terroristes

Selon la nature et l'étendue des activités de financement des activités terroristes au Canada effectuées par des personnes associées à différents groupes terroristes listés au tableau 2 (chapitre 4), l'étendue de la collecte/acquisition de financement des activités terroristes (c'est-à-dire, les collectes de fonds) et des méthodes d'accumulation/transmission varient, et peuvent comporter un nombre limité ou élargi de secteurs et de produits et services. Dans cette section, les menaces de financement des activités terroristes ont été jumelées à des secteurs qui se sont révélés être intrinsèquement exposés au financement des activités terroristes. Par exemple, il peut s'agir de secteurs qui ont été utilisés dans le passé pour financer les activités terroristes au Canada ou en provenance du Canada.

L'évaluation des risques de financement des activités terroristes a mené à l'identification de quatre scénarios à risque liés au financement des activités terroristes très élevés qui impliquent un total de six secteurs différents (c'est-à-dire les sociétés, les organismes à but non lucratif et les œuvres caritatives, les banques nationales, les ESM nationales à service complet et les petites ESM de détail et les envois de fonds alternatifs, ainsi que les fiducies expresses) qui ont été évalués comme étant très fortement vulnérables au financement des activités terroristes et associés à un groupe d'acteurs à risque élevé lié au financement des activités terroristes.

Par contre, un total de 53 scénarios de risques élevés liés au financement des activités terroristes ont été cernés qui impliquent, à des degrés différents, les 21 secteurs et produits représentés aux figures 10 à 14 et qui ont été évalués comme ayant une vulnérabilité moyenne à très élevée au financement des activités terroristes. Dix groupes différents d'acteurs de risques liés au financement des activités terroristes ont obtenu une cote de faible, moyen et élevé et ont, ou pourraient exploiter certains ou tous les secteurs, comme on l'explique dans les pages suivantes.

La majorité des scénarios de risque de financement des activités terroristes inclus aux figures 10 à 14 ont été cotés plus faibles que pour le recyclage des produits de la criminalité, et à l'exception des scénarios de risque mentionnés plus haut ayant obtenu un cote élevée ou très élevée, la majorité ont reçu une cote moyenne.

Chaque numéro (c'est-à-dire, de 1 à 10) sur l'axe X (l'axe horizontal) des figures 10 à 14 représente un groupe des acteurs de risques liés au financement des activités terroristes associés aux différents groupes terroristes listés au tableau 2.

Figure 10a
Les risques inhérents liés au FAT associés aux institutions financières qui sont des banques et acceptent des dépôts par acteurs de risques liés au FAT
Les risques inhérents liés au  FAT associés aux institutions financières qui sont des banques et acceptent des  dépôts par acteurs de risques liés au FAT
Version texte
Menace liées au FAT Banques nationales Succursales de banques étrangères Filiales de banques étrangères
1 Moyen Moyen Moyen
2 Moyen Moyen Moyen
3 Moyen Moyen Moyen
4 Moyen Moyen Moyen
5 Moyen Moyen Moyen
6 Moyen Moyen Moyen
7 Élevé Élevé Moyen
8 Élevé Élevé Moyen
9 Élevé Élevé Élevé
10 Très élevé Élevé Élevé
Figure 10b
Les risques inhérents liés au FAT associés aux institutions financières qui ne sont pas des banques et acceptent des dépôts par acteurs de risques liés au FAT
Les risques inhérents liés au FAT associés aux institutions financières qui ne sont  pas des banques et acceptent des dépôts par acteurs de risques liés au FAT
Version texte
Menace liées au FAT Sociétés de fiducie et de prêt Coopératives de crédit et caisses populaires
1 Moyen Moyen
2 Moyen Moyen
3 Moyen Moyen
4 Moyen Moyen
5 Moyen Moyen
6 Moyen Moyen
7 Élevé Moyen
8 Élevé Moyen
9 Élevé Élevé
10 Élevé Élevé

Les institutions financières acceptant des dépôts comprises à la figure 10 sont principalement utilisées dans la transmission, et parfois dans l'accumulation de fonds soupçonnés d'être destinés ultimement à des groupes ou des particuliers terroristes, pour la majorité, actifs dans des pays étrangers. Comme dans le cas du recyclage des produits de la criminalité, mais à des buts différents, les scénarios de risques liés au financement des activités terroristes décrits ci-dessous comportent généralement l'utilisation de virements télégraphiques internes, de TEF internationaux et d'instruments monétaires comme les traites bancaires, les mandats et les chèques (c'est-à-dire personnels, voyageurs), les comptes personnels et commerciaux, les opérations de change, les comptes de fiducie ainsi que les services de prêt ou d'hypothèque et de carte de crédit. Ces opérations peuvent être effectuées par des particuliers ainsi que par des personnes morales ou dans le cadre d'arrangements comme un organisme sans but lucratif ou une société qui utilise des services bancaires dans une institution financière acceptant les dépôts.

Scénario de risques inhérents liés au FAT associés à des institutions financières de dépôts

La majorité des acteurs du financement du terrorisme associés aux groupes terroristes répertoriés dans le tableau 2 sont soupçonnés d'utiliser des TEF internationaux, comme méthode de transmission du financement du terrorismeNote de bas de page 142, pour envoyer des fonds à l'étranger et souvent dans des juridictions à haut risque. Les personnes associées à certains de ces groupes peuvent aussi utiliser des virements intérieurs pour déplacer les fonds au Canada et/ou accumuler les fonds collectés (par exemple, les sommes en espèces ou dons sur le WebNote de bas de page 143) dans un ou plusieurs comptes bancaires (personnels ou commerciaux) avant d'envoyer les fonds à l'étranger. Cela veut aussi dire que les dépôts en espèces, parfois effectués par des tiers ou des prête-noms, peuvent se produire lorsque des dons en espèce sont obtenus au moyen de sollicitation de porte-à-porte, d'activités de bienfaisance ou de boîtes de dons. Les retraits en espèces peuvent aussi avoir lieu lorsque, par exemple, ces individus ont besoin de fonds pour payer des billets d'avion et/ou des frais liés aux activités terroristes. D'autres méthodes de financement du terrorisme impliquent l'utilisation d'instruments monétaires et le mélange de fonds illicitesNote de bas de page 144 avec des revenus commerciaux légitimes au Canada.

D'autres scénarios de risque inhérent au financement du terrorisme peuvent impliquer l'utilisation de prêts frauduleux pour lever des fonds, tandis que les transferts d'argent par courriel peuvent être utilisés pour la transmission de fonds. La fraude par carte de crédit, y compris les stratagèmes de retraitNote de bas de page 145 et le copiage de cartes, a été utilisée par certains acteurs du financement du terrorisme. Il est également soupçonné que des comptes bancaires, et dans certains cas, des comptes de fiducies sont utilisés pour dissimuler la véritable source ou le véritable bénéficiaire effectif des fonds destinés à une activité terroriste. Enfin, certains scénarios de risque de financement du terrorisme peuvent impliquer des schémas basés sur le commerce ou l'utilisation d'entreprises comme façades et, par conséquent, impliqueraient le mouvement national ou international de fonds vers et depuis des comptes d'entreprises.

Figure 11
Risques inhérents liés au FAT dans le secteur des entreprises de services monétaires par acteurs de risques liés au FAT
Risques inhérents liés au FAT  dans le secteur des entreprises de services monétaires par acteurs de risques  liés au FAT
Version texte
Menace liées au FAT ESM de détail à multiples services ESM de détail à service unique ESM de remise de fonds parallèles ESM de gros et d'entreprise
1 Moyen Moyen Moyen Moyen
2 Moyen Moyen Moyen Moyen
3 Moyen Moyen Moyen Moyen
4 Moyen Moyen Moyen Moyen
5 Élevé Moyen Moyen Moyen
6 Élevé Moyen Moyen Moyen
7 Élevé Élevé Élevé Moyen
8 Élevé Élevé Élevé Moyen
9 Élevé Élevé Élevé Élevé
10 Très élevé Très élevé Élevé Élevé

À l'instar des institutions financières acceptant des dépôts, les produits et services offerts par les ESM, comme les opérations de change, les virements télégraphiques nationaux, les TEF internationaux et les mandats sont souvent utilisés dans les scénarios de risques liés au financement des activités terroristes (cotés de moyens à très élevés) comportant la majorité des acteurs de financement des activités terroristes énumérés au tableau 2. Même si tous les types d'ESM illustrés à la figure 10 peuvent être utilisés pour des activités de financement des activités terroristes, on soupçonne que ce sont les ESM nationales offrant des services complets, les petites ESM indépendantes et les petites ESM de détail qui sont les plus souvent utilisées. Cela s'explique par le fait que les ESM nationales offrant des services complets exercent leurs activités au niveau mondial et offrent des services de transfert d'argent à plusieurs pays étrangers, alors que les petites ESM de détail offrant des opérations de change, des virements télégraphiques nationaux et des services de TEF internationaux sont habituellement mandataires des ESM nationales offrant des services complets. Les opérateurs de petites ESM indépendantes peuvent transférer des fonds vers des juridictions étrangères à haut risque et éventuellement avoir des liens avec des opérateurs de transfert de valeur monétaire informels. Certaines administrations où des fonds sont envoyés ou certaines administrations d'où des fonds proviennent peuvent être considérées comme à risque élevé en raison de conflits en cours et/ou de la présence d'organisations terroristes ou d'autres facteurs.

Les acteurs du financement des activités terroristes qui utilisent des dons sur le Web par l'intermédiaire des médias sociaux ou des méthodes de financement de masse peuvent recevoir des paiements en ligne ou des transferts effectués par l'intermédiaire d'ESM axées sur Internet.

Figure 12
Risques inhérents liés au FAT associés aux fiducies expresses et aux entreprises et professionnels non financiers par des acteurs de risques liés au FAT
Risques inhérents liés au FAT  associés aux fiducies expresses et aux entreprises et professionnels non  financiers par des acteurs de risques liés au FAT
Version texte
Menace liées au FAT Sociétés; Fiducies express; organisme de bienfaisance enregistré
Professionnels juridiques Agents d'immeubles et promoteurs; Négociants en métaux précieux et pierres précieuses Comptables
1 Moyen Moyen Moyen Moyen
2 Moyen Moyen Moyen Moyen
3 Moyen Moyen Moyen Moyen
4 Moyen Moyen Moyen Moyen
5 Moyen Moyen Moyen Moyen
6 Moyen Moyen Moyen Moyen
7 Élevé Élevé Moyen Moyen
8 Élevé Élevé Moyen Moyen
9 Élevé Élevé Élevé Élevé
10 Très élevé Élevé Élevé Élevé

Comme l'illustre la figure 12, la majorité des scénarios de financement des activités terroristes associés à des sociétés, des fiducies expresses, des professions juridiques et des organismes à but non lucratif ont reçu une cote moyenne à très élevée. Les scénarios de risques liés au financement des activités terroristes associés aux comptables, aux agents immobiliers et promoteurs ainsi qu'aux négociants de pierres et de métaux précieux ont été cotés de moyens à élevés.

Sociétés

Tel qu'il a été indiqué précédemment, les sociétés, surtout les sociétés privées, présentent des vulnérabilités inhérentes qui les rend attrayantes pour un usage abusif visant à faciliter le recyclage des produits de la criminalité. Toutefois, ces caractéristiques peuvent également les rendre attrayantes dans les scénarios de risques liés au financement des activités terroristes comme façades pour transférer des fonds destinés à des groupes terroristes ou à des individus, ou pour mêler des fonds illicites à des revenus d'entreprise légitimes, ou encore, pour être utilisées dans des stratagèmes axés sur le commerce. De plus, dans le contexte général de l'approvisionnement terroriste, l'achat de marchandise est considéré comme une forme de financement d'activités terroristes et impliquerait différents types de sociétés. La majorité des acteurs liés au financement des activités terroristes associés aux groupes terroristes énumérés au tableau 2 utilise des entreprises dans des stratagèmes de financement des activités terroristes.

Fiducies expresses

La vulnérabilité inhérente des fiducies expresses permettant de dissimuler les renseignements sur la propriété effective peut les rendre attrayantes pour le financement des activités terroristes. Les fiducies expresses peuvent être utilisées pour faciliter les opérations à l'appui du financement du terrorisme, y compris les opérations directes du Canada à l'étranger, ou vice versa.

Professionnels juridiques et comptables

Des comptes de fiducie, en particulier ceux qui sont établis par des professionnels juridiques, ont été utilisés dans des scénarios de risques liés au financement des activités terroristes. Des circonstances existent également ou des individus fournissant des services comptables ont facilité des stratagèmes frauduleux générant des fonds pour appuyer des activités présumées être liées au terrorisme.

Organismes de bienfaisance enregistrés et organismes à but non lucratif

Une note interprétative de la recommandation 8 du GAFI stipule que :

« Certains OBNL peuvent être vulnérables à une exploitation à des fins de financement du terrorisme pour plusieurs raisons. Les OBNL jouissent en effet de la confiance du public, ont accès à des sources de financement considérables et sont souvent exposés à la circulation d'un grand volume de liquidités. En outre, certains OBNL ont une implantation internationale qui sert de cadre à des activités et à des opérations financières nationales et internationales, souvent à l'intérieur ou à proximité des zones les plus exposées aux activités terroristes. Dans certains cas, les organisations terroristes ont su tirer parti de ces caractéristiques pour infiltrer certains OBNL et exploiter leurs fonds et leurs opérations, pour dissimuler ou soutenir des activités terroristes. »Note de bas de page 146

Ainsi, dans le contexte du terrorisme et du financement d'activités terroristes au Canada, les organismes de bienfaisance enregistrés et les organismes à but non lucratif ayant un risque plus élevé lié au financement des activités terroristes sont ceux qui exercent leurs activités à proximité d'une menace terroriste active. Ceux qui exercent leurs activités à l'étranger sont les plus vulnérables, puisque les fonds ou les marchandises peuvent être utilisés de façon abusive au point de distribution par l'organisme de bienfaisance ou des organisations partenaires. Les organismes de bienfaisance peuvent aussi, involontairement, appuyer les organisations terroristes à l'étranger en payant des taxes et des péages pour être en activité dans certaines régions lorsque celles-ci sont contrôlées directement ou indirectement par des organisations terroristes. Les organismes qui sont en activité au pays, au sein d'une population qui est activement ciblée par les mouvements terroristes pour obtenir du soutien et une protection, sont également exposés à des risques de financement du terrorisme, car les ressources générées au Canada peuvent être transférées à l'échelle internationale pour soutenir le terrorisme. si l'organisation ne fait pas preuve d'une diligence raisonnable suffisante ou ne fournit pas une surveillance suffisante des donataires, ou n'exerce pas une direction et un contrôle sur l'utilisation finale de ses ressources.

Scénarios de risques inhérents liés au FAT associés aux organismes de bienfaisance et aux organismes à but non lucratif

Les méthodes de financement du terrorisme utilisées dans la majorité des scénarios de risque de financement du terrorisme impliquant des organismes de bienfaisance et des organismes sans but lucratif canadiens et étrangers (appelés collectivement organismes ci-dessous) peuvent être résumées comme suit :

  • Détournement de fonds : un organisme, ou un individu agissant au nom d'un organisme, détourne des fonds vers une entité terroriste connue ou présumée;
  • Infiltration par un acteur malveillant : des individus appartenant à une entité terroriste ou affiliés à une entité terroriste prennent le contrôle d'un organisme autrefois légitime (par exemple, son conseil d'administration, sa trésorerie) pour soutenir le terrorisme;
  • Affiliation à une entité terroriste : un organisme ou un individu agissant au nom d'un organisme maintient une affiliation opérationnelle avec un organisme terroriste ou un partisan du terrorisme, ce qui expose le secteur à un risque d'abus à des fins telles que le soutien logistique général à l'entité terroriste;
  • Abus de programmation : les programmes financés par des organismes et destinés à soutenir des objectifs humanitaires légitimes sont manipulés au point de livraison pour soutenir le terrorisme;
  • Soutien au recrutement : les programmes ou installations financés par l'organisme sont utilisés pour créer un environnement qui soutient et/ou promeut les activités liées au recrutement de terroristes;
  • Fausses représentations et organismes fictifs : sous le couvert d'une activité caritative, un organisme ou un individu collecte des fonds, promeut des causes et/ou mène d'autres activités en faveur du terrorisme.

La méthode de financement du terrorisme la plus couramment observée concerne l'utilisation abusive d'organismes pour soutenir le terrorisme par le détournement de fonds. Dans cette méthode, les fonds collectés par les organisations pour les programmes humanitaires (par exemple, les secours en cas de catastrophe, les secours humanitaires, les centres culturels, le soulagement de la pauvreté, l'avancement de l'éducation, l'avancement de la religion) sont détournés pour appuyer le terrorisme à un point du processus opérationnel de l'organisation. Essentiellement, le détournement de fonds se produit lorsque les fonds collectés à des fins de bienfaisance sont redirigés vers une entité terroriste.

La méthode du détournement de fonds peut être divisée en un nombre de cas où le détournement est effectué par des acteurs internes de l'organisation ainsi que par des acteurs externes à l'organisation. Les acteurs internes sont des personnes désignées de l'organisation, comme les dirigeants et le personnel. Les acteurs externes, cependant, sont simplement associés à l'organisation comme tiers, comme des collecteurs de fonds et des partenaires étrangers.

La majorité des acteurs liés au financement des activités terroristes associés aux groupes de terroristes énumérés au tableau 2 ont utilisé des organismes de bienfaisance enregistrés.

Négociants en métaux précieux et pierres précieuses

Les acteurs liés au financement des activités terroristes ont acheté des métaux précieux et des pierres précieuses pour transférer la valeur sans détection par les autorités. Une autre méthode pour éviter la détection consiste à utiliser des métaux précieux et des pierres précieuses comme entreprises de façade pour déplacer les fonds entre différentes administrations.

Figure 13
Risques inhérents liés au FAT associés aux Produits ayant une valeur monétaire par des acteurs des risques liés au FAT
Risques inhérents liés au FAT  associés aux Produits ayant une valeur monétaire par des acteurs des risques  liés au FAT
Version texte
Menace liées au FAT Monnaies virtuelles
Cartes prépayées à utilisation libre
1 Moyen Moyen
2 Moyen Moyen
3 Moyen Moyen
4 Moyen Moyen
5 Moyen Moyen
6 Moyen Moyen
7 Élevé Moyen
8 Élevé Moyen
9 Élevé Élevé
10 Élevé Élevé

Les scénarios de risques liés au financement des activités terroristes comportant des monnaies virtuelles et des produits d'accès prépayés ont été cotés comme allant de moyen à élevé, comme l'indique la figure 13. Il a été rapporté que certains acteurs liés au financement des activités terroristes utilisent des Bitcoins dans le cadre de leurs activités de financement des activités terroristes et peuvent utiliser d'autres monnaies virtuelles. Les monnaies virtuelles sont généralement utilisées dans le but d'améliorer l'anonymat lors du transfert de fonds, ce qui peut rendre les nouvelles monnaies privées attrayantes pour les acteurs du financement du terrorisme. Même si seulement quelques cas de financement des activités terroristes au Canada ont fait appel aux produits d'accès prépayé à utilisation libre, d'autres administrations ont aussi signalé une telle utilisation.

Figure 14
Les risques inhérents liés au FAT associés aux entités impliquées dans le commerce international par acteurs de risques liés au FAT
Les risques inhérents liés au FAT associés aux entités impliquées dans le commerce international par acteurs de risques liés au FAT
Version texte
Menace liées au FAT Entreprises d'importation et d'exportation Transitaires Courtage en douane
1 Moyen Moyen Faible
2 Moyen Moyen Faible
3 Moyen Moyen Faible
4 Moyen Moyen Faible
5 Moyen Moyen Faible
6 Moyen Moyen Faible
7 Élevé Moyen Moyen
8 Élevé Moyen Moyen
9 Élevé Élevé Moyen
10 Élevé Élevé Élevé

Les scénarios de risques liés au financement des activités terroristes impliquant les secteurs du commerce ont été cotés comme allant de faible à élevé. Les vulnérabilités relevées dans ce domaine sont généralement semblables à celles observées pour le recyclage des produits de la criminalité, avec les entreprises d'importation et d'exportation étant parmi les principales parties impliquées dans le transfert de fonds et de marchandises et les transitaires et courtiers en douane jouant le rôle de facilitateurs. Les entreprises d'importation et d'exportation peuvent être utilisées comme entités de façade pour transférer des fonds dans des secteurs à risque plus élevé où des organisations terroristes exercent leurs activités. Elles peuvent également servir à transporter des marchandises par-delà les frontières pour soutenir directement des activités terroristes ou utiliser les recettes générées par la vente de ces marchandises pour financer les organisations terroristes.

Évolution du contexte du risque au Canada

Depuis la réalisation de sa première Évaluation nationale des risques inhérents en 2015, le Canada a continué d'élargir et d'approfondir sa compréhension du paysage des risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme au Canada.

La présente mise à jour a évalué une nouvelle menace de recyclage des produits de la criminalité qui ne faisait pas partie du rapport de 2015 : la menace de la pêche illégale et non réglementée. Bien que cela ne représente pas un vecteur important du recyclage des produits de la criminalité au Canada, un certain niveau d'activités criminelles comportant un élément de sophistication, qui peut générer des produits qui doivent être blanchis a été relevé.

Certaines menaces évaluées dans le rapport 2015 ont également changé dans cette mise à jour, avec un certain impact sur les résultats des différents scénarios de risques. Alors que les niveaux de menace ont augmenté pour les paris illégaux, l'évasion fiscale et le trafic d'espèces sauvages, ils ont diminué pour la contrebande et le trafic de tabac illégal. Cela est généralement le reflet de l'évolution de la sophistication et de la capacité moyennes des acteurs de menaces en cause. Par exemple, les préoccupations concernant l'évasion fiscale ont augmenté à la suite de tendances croissantes autour de l'utilisation de structures et de comptes d'entreprise extra territoriaux complexes et de la mise à profit de l'expertise de facilitateurs tels que des comptables, des avocats et des conseillers financiers.

Dans de nombreux cas, les niveaux de menace sont demeurés constants, mais de nouvelles tendances ont été observées. Les acteurs criminels continuent de tirer parti des nouvelles technologies et de l'environnement en évolution comme la situation de la COVID-19 pour concevoir et perpétuer de nouveaux types de fraude. De nouvelles escroqueries sur Internet ont été observées, par exemple au sujet des premières émissions d'une cryptomonnaie ciblant les investisseurs ou les programmes de secours liés à la pandémie. De plus, l'utilisation de monnaies virtuelles et de cartes prépayées pour blanchir les produits de ces activités est de plus en plus courante. Le trafic de drogues illicites demeure l'une des principales et des plus grandes menaces de recyclage des produits de la criminalité au Canada. Au cours des dernières années, le marché du fentanyl est né et a grandi considérablement, une tendance étant l'utilisation croissante de monnaies virtuelles pour se procurer des drogues sur le Web caché.

Bien qu'ils ne soient pas des entités déclarantes dans le cadre du Régime de lutte contre le RPC/FAT, les sociétés, les sociétés de personnes, les fiducies expresses, les sociétés de véhicules blindés, les prêteurs hypothécaires non réglementés, les sociétés d'import/export, les transitaires et les courtiers en douane ont également été évalués dans le cadre de cette mise à jour des risques pour leurs vulnérabilités inhérentes au blanchiment d'argent et au financement du terrorisme.

La vulnérabilité commune des entreprises et des personnes morales (c'est-à-dire les fiducies) à cacher les renseignements sur la propriété effective demeure un élément important du paysage des risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme au Canada. Cette question souligne l'importance d'une plus grande transparence des bénéficiaires effectifs, une priorité clé pour améliorer le Régime de lutte contre le RPC/FAT.

Un autre élément important du paysage du risque est l'exposition du Canada au RPCNC, comme en témoignent l'évaluation des secteurs vulnérables impliqués dans le commerce international et les menaces posées par la fraude commerciale et les tiers blanchisseurs d'argent, dont les méthodes de blanchiment d'argent comprennent le recours au RPCNC.

Cette mise à jour illustre également les effets de la hausse rapide des prix du logement dans certaines régions du pays sur l'environnement de risque au Canada. L'escalade des prix du logement a rendu la fraude hypothécaire à but lucratif plus lucrative et a accru l'incitation à mener des activités criminelles et de recyclage des produits de la criminalité dans le secteur immobilier ainsi que l'attrait de telles activités. L'augmentation de l'activité économique dans le secteur de l'immobilier et la croissance rapide du prix des logements ont créé pour les criminels des occasions de blanchir des fonds, tant par l'achat de propriétés qu'en agissant comme prêteurs parallèles pour les emprunteurs ayant du mal à accéder au financement hypothécaire traditionnel et qui ne se doutent pas de la situation.

Enfin, la pandémie de COVID-19 a démontré la capacité d'adaptation du secteur financier canadien avec un plus grand nombre de consommateurs adoptant les canaux numériques ainsi que de nouveaux services et produits financiers rendus disponibles par les technologies émergentes. La pandémie a également montré que les individus mal intentionnés, aussi bien les criminels que les organisations terroristes, continuent de s'adapter à l'évolution des vulnérabilités. Il est donc important que les autorités nationales et le secteur privé comprennent les risques en constante évolution.

Prochaines étapes

Cette mise à jour de l'évaluation des risques favorise une meilleure compréhension commune des risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme au Canada. L'évaluation contribuera à poursuivre l'amélioration du régime canadien de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, venant ainsi renforcer davantage l'approche exhaustive que le pays adopte déjà vis-à-vis l'atténuation et le contrôle des risques à l'échelle nationale, y compris avec le secteur privé et les partenaires internationaux. Le gouvernement du Canada mettra à jour l'évaluation des risques inhérents et partagera publiquement les résultats révisés de façon continue.

Le gouvernement du Canada s'attend à ce que ce rapport soit également utilisé par les institutions financières et d'autres entités déclarantes pour contribuer à leur compréhension sur la manière et l'endroit où elles peuvent être les plus vulnérables et exposées aux risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme. CANAFE continuera d'inclure des informations pertinentes liées aux risques inhérents dans ses documents d'orientation pour aider les institutions financières et autres entités déclarantes à intégrer ces informations dans leur propre méthodologie et processus d'évaluation des risques afin de mettre en œuvre efficacement des contrôles pour atténuer les risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme. Les membres responsables de la surveillance du Régime utiliseront également les précieuses leçons tirées de cet exercice pour établir des priorités pour l'élaboration de politiques et les efforts opérationnels dans nos efforts continus pour lutter contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme.

Annexe : Principales conséquences associées au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes

Conséquences sociétales

Conséquences économiques

Conséquences politiques

Glossaire

Accès prépayé en boucle fermée : Accès prépayé aux fonds ou à la valeur des fonds qui peuvent être utilisés pour l'achat de marchandises et de services dans des opérations visant un marchand ou un lieu défini (ou un ensemble de lieux). La définition comprend les cartes-cadeaux qui donnent accès à un détaillant en particulier, à des détaillants affiliés ou à un magasin au détail à succursales, ou encore, à un endroit désigné comme un réseau de transport en commun.

Agents et courtiers d'assurance-vie indépendants : Personnes qui sont autorisées à vendre des produits d'assurance-vie. Certains agents et courtiers traitent directement avec certaines compagnies d'assurance, alors que d'autres travaillent par l'intermédiaire d'entités et d'agences pour avoir accès à des produits d'assurance.

Banques canadiennes : Banques canadiennes qui sont autorisées en vertu de la Loi sur les banques d'accepter des dépôts, qui peuvent être admissibles à l'assurance-dépôts par la Société d'assurance-dépôts du Canada.

Bénéficiaire effectif : Personne physique qui en dernier lieu possède ou contrôle une entreprise, un arrangement juridique et/ou la personne physique pour le compte de laquelle une opération est effectuée. Sont également comprises les personnes qui exercent en dernier lieu un contrôle effectif sur une personne morale ou une construction juridique.

Combattants étrangers : Individus qui se déplacent à l'étranger pour combattre et porter allégeance à un groupe terroriste. Ils évoluent dans des pays qui ne sont pas le leur et leur motivation principale est idéologique plutôt qu'une récompense matérielle.

Compagnies d'assurance-vie : Entités étrangères et nationales qui ont reçu l'autorisation d'exercer des activités d'assurance au Canada.

Conséquences du recyclage des produits de la criminalité et du financement du terrorisme  : Préjudice causé à une société, à une économie et à un gouvernement par le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, y compris la facilitation d'activités criminelles et terroristes.

Crime organisé transnational : Groupe criminel organisé qui exerce ses activités à l'échelle transnationale dans le but de tirer un avantage financier ou un autre avantage matériel exclusivement ou partiellement par des moyens illégaux, et ce, tout en protégeant ses activités par un modèle de corruption ou de violence, ou encore tout en protégeant ses activités illégales à l'aide d'une structure organisationnelle transnationale et de l'exploitation de mécanismes transnationaux de commerce ou de communication.

Entités et organismes intermédiaires d'assurance-vie : Entités qui offrent un soutien administratif aux conseillers en assurance et offrent des occasions de regroupement des commissions et d'accès à des produits de sociétés d'assurance.

ESM basées sur Internet : Entreprises qui offrent des services monétaires et des produits connexes en ligne, principalement des services de paiement et de transfert d'argent. Le nombre de ces entités est faible comparativement aux autres catégories d'ESM évaluées, mais ce segment est en plein essor dans le secteur des ESM.

ESM de gros et d'entreprise : ESM qui offrent des services bancaires et des produits connexes, surtout des transferts électroniques de fonds et des traites bancaires, principalement à des sociétés de gros.

ESM de transfert de fonds alternatifs : Entreprises de services monétaires qui comportent l'utilisation de services de versements parallèles qui ont lieu à l'extérieur du système bancaire conventionnel (bien qu'ils puissent être interconnectés avec lui). Il existe quatre sous-segments d'ESM de transfert de fonds alternatifs : échanges et transferts de monnaie virtuelle/chaîne de blocs, solutions mobiles d'égal à égal, portefeuille électronique de traitement des paiements tech, et les systèmes de transfert de valeur non traditionnels.

ESM nationales offrant des services complets : ESM les plus importantes et les plus sophistiquées ayant une présence nationale, et qui offrent un vaste éventail de produits et services de détail et de gros.

Fiducie expresse (montages juridiques) : Les arrangements juridiques font référence à une fiducie expresse lorsque le constituant place intentionnellement des avoirs sous le contrôle d'un fiduciaire au profit d'un bénéficiaire ou pour une fin particulière. Il existe deux types généraux de fiducies expresses : (1) les fiducies testamentaires qui sont créées le jour du décès du constituant, afin de transférer la succession du constituant aux bénéficiaires; et (2) les fiducies non testamentaires qui sont créées du vivant du constituant, où les avoirs de la fiducie sont répartis au cours de la vie de ce dernier. Dans le cadre du recyclage des produits de la criminalité et du financement du terrorisme, la fiducie expresse entre vifs est le montage le plus pertinent.

Filiales de banques étrangères : Institutions étrangères qui ont été autorisées en vertu de la Loi sur les banques à accepter des dépôts. Les filiales de banques étrangères sont contrôlées par des institutions étrangères admissibles.

Fractionnement : Action de déposer de l'argent ou d'acheter des instruments monétaires sous les seuils autorisés afin de contourner les exigences de déclaration des banques et des entreprises de services monétaires (ESM).

Groupe criminel organisé : Groupe structuré de trois personnes ou plus qui agissent de concert dans le but de commettre des activités criminelles afin d'obtenir, directement ou indirectement, un avantage financier ou autre avantage matériel.

Menaces derecyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme : Personne ou groupe de personnes qui a l'intention de recycler des produits de la criminalité ou de financer le terrorisme, ou qui peut servir de facilitateur à cette fin.

Mules : Personnes qui facilitent les stratagèmes de fraude et les stratagèmes monétaires, souvent à leur insu (p. ex., déplacer de l'argent par TEF internationaux au nom de criminels). Elles ont tendance à présenter de très faibles niveaux de sophistication et de capacité; de plus, elles reçoivent essentiellement la consigne d'entreprendre certaines actions dans le but de recycler les fonds.

Petites ESM de détail : ESM axées sur les opérations de détail et qui possèdent des systèmes informatiques autonomes et des points de vente dans la rue à l'échelle du Canada. Parmi celles-ci, un sous-groupe offre uniquement d'échanger des devises, habituellement de petite valeur, et se situe souvent dans les villes frontalières (p. ex., magasins hors taxes), tandis que l'autre sous-groupe offre d'échanger des devises, mais peut également offrir des mandats et des transferts électroniques de fonds, habituellement en tant qu'agent d'une ESM nationale offrant des services complets.

Petites ESM indépendantes : ESM qui mènent leurs activités par l'intermédiaire de réseaux informels, même si quelques-unes possèdent des ententes bancaires officielles pour effectuer des TEF. Il s'agit d'activités à petite échelle, surtout familiales, dont les capacités techniques ont tendance à comprendre des systèmes autonomes plus petits.

Prête-noms : Personnes ayant des liens avec des individus mal intentionnés auxquelles des criminels peuvent faire appel périodiquement afin qu'elles contribuent au blanchiment d'argent. Essentiellement, les prête-noms reçoivent les consignes des criminels quant à la façon de recycler les fonds. Les méthodes employées ont tendance à être assez rudimentaires et peuvent servir à recycler de petites quantités de produits de la criminalité.

Professionnels criminalisés (ou criminels en col blanc) : il s'agit de personnes qui détiennent ou prétendent détenir un titre et un titre professionnels dans un domaine traitant des questions financières et qui utilisent leurs connaissances et leur expertise professionnelles pour commettre ou faciliter sciemment une activité criminelle à but lucratif. Parmi les professionnels criminalisés, on trouve des avocats, des comptables, des notaires, des conseillers en placements et en finances, des courtiers en valeurs et des courtiers hypothécaires.

Risque inhérent de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme : Risques de RPC-FAT qui existent devant l'absence de contrôles pour atténuer ces risques.

Schtroumpfing : une technique de blanchiment d'argent impliquant l'utilisation de mandataires (c'est-à-dire plusieurs personnes) pour mener une activité de structuration parfois en même temps ou dans un laps de temps très court.

Structuration : le fait d'effectuer des dépôts en espèces et/ou d'acheter des instruments monétaires en dessous des seuils autorisés pour éviter les obligations de déclaration dans les banques et les ESM.

Société d'affacturage : L'affacturage est une forme de financement fondé sur des actifs au moyen duquel un crédit est accordé à une société emprunteuse sur la valeur de ses comptes créditeurs (ces derniers sont vendus au rabais en échange d'une avance). La société d'affacturage reçoit ensuite les sommes payables directement des clients de l'emprunteur (le débiteur). Les sociétés d'affacturage servent principalement à réunir des capitaux à court terme.

Succursales de banques étrangères : Institutions étrangères autorisées en vertu de la Loi sur les banques à établir des succursales pour exercer des activités bancaires au Canada.

Vulnérabilités inhérentes au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme : Propriétés d'un secteur, d'un produit ou d'un service, d'un canal de distribution, d'une clientèle, d'une institution, d'un système, d'une structure ou d'une administration que des individus mal intentionnés peuvent exploiter dans le but de recycler des produits de la criminalité ou de financer le terrorisme.

Liste des principaux acronymes et abréviations

AMC Affaires mondiales Canada
ARC Agence du revenu du Canada
BISN Banque d'importance systémique nationale
BSIF Bureau du surintendant des institutions financières
CANAFE Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada
CCRPCFAT Comité consultatif sur le recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes
ED Entité déclarante
EESM Entreprise étrangère de services monétaires
ESM Entreprise de services monétaires
EVMI Extrémistes violents aux motivations idéologiques
FMM Fraude par marketing de masse
FSE/FSF/FSFE Fournisseur de services aux entreprises / fournisseur de services aux fiducies / fournisseur de services aux fiducies et aux entreprises
GAFI Groupe d'action financière
GCO Groupe criminel organisé
GRC Gendarmerie royale du Canada
ISDE Innovation, Sciences et Développement économique Canada
Loi Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes
LRPC-FAT Lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes
NMPPP Négociants en métaux précieux et pierres précieuses
OBNL Organisme à but non lucratif
PC Produits de la criminalité
PIB Produit intérieur brut
PPE Personne politiquement exposée
RPC-FAT Recyclage des produits de la criminalité et financement des activités terroristes
RPCNC Recyclage des produits de la criminalité de nature commerciale
SCRS Service canadien du renseignement de sécurité
SITV Systèmes informels de transfert de valeurs
SPAC Services publics et Approvisionnement Canada
SPPC Service des poursuites pénales du Canada
TEF(R) Transfert électronique de fonds (Rapport)
Groupes terroristes
AC Al Chabaab
AQ Al-Qaïda
AQMI Al-Qaïda au Maghreb islamique
AQPA Al-Qaïda dans la péninsule arabique
EIIL État islamique en Iraq et au Levant (aussi appelé le Daech)
Hamas Harakat al-Muqawama al-Islamiyya
JN Jabhat Al-Nusra

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