Rapport du Groupe de travail canadien sur la douleur : juin 2019
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La douleur chronique au Canada : jeter les bases d'un programme d'action
Table des matières
- La douleur chronique au Canada : jeter les bases d'un programme d'action
- Section 1 : La nature de la douleur et ses répercussions sur les Canadiens
- La douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable propre à la personne
- La douleur chronique est une maladie à part entière
- Les facteurs biologiques, psychologiques et sociaux influencent notre expérience de la douleur
- Des millions de Canadiens vivent avec une douleur chronique modérée à forte
- Certaines populations sont plus touchées par le fardeau de la douleur
- La douleur affecte tous les aspects de la vie
- Il y a des coûts importants pour les familles, les collectivités et la société
- Données pour des mesures visant à améliorer la santé et le bien-être des Canadiens et de notre économie
- Section 2 : Approches actuelles en matière de diagnostic et de prise en charge de la douleur chronique au Canada
- Reconnaître que la douleur est réelle et multidimensionnelle contribuera à améliorer le diagnostic
- Le fait d'allier des thérapies physiques, psychologiques et pharmacologiques donne de meilleurs résultat
- Les opioïdes et le cannabis méritent une attention particulière dans le contexte canadien actuel
- Les cliniques multidisciplinaires et interdisciplinaires de traitement de la douleur constituent l'étalon-or
- Les services intégrés de gestion de la douleur préviennent la transition de la douleur aiguë à la douleur chronique
- Les modèles de soins qui intègrent les approches culturelles favorisent de meilleurs résultats
- Les Canadiens n'ont pas un accès adéquat aux services de traitement de la douleur et les temps d'attente sont longs
- Les voies de traitement de la douleur chronique sont complexes, fragmentées et difficiles à suivre
- Section 2 : Résumé
- Section 3 : Sensibilisation, éducation et formation spécialisée sur la douleur
- Il existe des lacunes importantes dans l'éducation sur la douleur destinée aux professionnels de la santé
- Des programmes d'études spécialisés sur la douleur sont nécessaires pour la formation préalable à l'autorisation d'exercer dans toutes les professions de la santé
- L'éducation et la formation en équipe permettent des soins multidisciplinaires et collaboratifs
- Possibilités de perfectionnement professionnel et de soutien clinique renforcent les compétences en matière de douleur
- Des plateformes interprofessionnelles et des communautés de pratique peuvent améliorer l'accès aux soins spécialisés
- Une sensibilisation et une éducation accrues du public au sujet de la douleur amélioreraient la prévention et les soins
- Les activités d'application des connaissances élaborées pour la douleur offrent des exemples de modèles novateurs pour traduire les résultats de recherche dans les milieux de pratique et accroître la sensibilisation à la douleur
- Section 3 : Résumé
- Section 4 : Recherche sur la douleur au Canada
- Section 5 : Action nationale et internationale contre la douleur
- Des travaux préparatoires sont en cours au Canada en vue d'une stratégie nationale de lutte contre la douleur
- Un leadership et une coordination à l'échelle nationale amplifieraient les efforts provinciaux et territoriaux
- Les stratégies de lutte contre la douleur existantes offrent des leçons à retenir
- Section 5 : Résumé
- Section 6: Conclusions et prochaines étapes
- Références
La douleur chronique au Canada : jeter les bases d'un programme d'action
Préambule
Le Groupe de travail canadien sur la douleur a été créé en mars 2019 pour aider le gouvernement du Canada à mieux comprendre les besoins des Canadiens qui vivent avec de la douleur et à y répondre. Jusqu'en décembre 2021, le Groupe de travail a pour mandat de fournir des conseils et de l'information afin d'orienter les décideurs du gouvernement vers une approche améliorée en matière de prévention et de gestion de la douleur chronique au pays. Les huit membres du Groupe de travail comprennent des personnes directement touchées par la douleur chronique, des chercheurs, des éducateurs et des professionnels de la santé ayant de l'expérience et de l'expertise dans la prévention et la gestion de la douleur chronique parmi les principaux groupes professionnels (c.-à-d. médecins, pharmaciens, psychologues et physiothérapeutes). Le Groupe de travail est également appuyé par un groupe consultatif qui fournira des données scientifiques à jour, de l'information et des conseils en fonction de ses vastes domaines d'expertise et d'expérience.
Au cours de la première phase de son mandat se terminant en juin 2019, le Groupe de travail a évalué la façon dont la douleur chronique est actuellement traitée au Canada. Pour éclairer son évaluation, il a consulté les membres du Comité consultatif lors d'un atelier de deux jours en mai. Le Groupe s'est aussi réuni avec des représentants de huit ministères et organismes fédéraux. Il a consulté des représentants des gouvernements provinciaux et territoriaux et des intervenants ciblés dans le domaine de la douleur en plus d'examiner des rapports et la littérature scientifique. Il a également invité douze personnes vivant avec de la douleur chronique à répondre par écrit à des questions sur leur expérience de la douleur et leurs espoirs à l'égard des activités du Groupe de travail canadien sur la douleur. Le présent rapport résume les conclusions tirées de cette évaluation rapide de l'état actuel de la douleur chronique au Canada et de certaines des réponses personnelles des personnes vivant avec de la douleur. Les activités entreprises pour éclairer le présent rapport ne marquent que le début de la participation des Canadiens à ce travail important.
Les citations dans ces cases tout au long du rapport sont des réponses de 12 Canadiens vivant avec une douleur chronique. On a demandé à ces personnes de partager leurs expériences de vie avec de la douleur et leurs espoirs à l'égard des activités du Groupe de travail canadien sur la douleur.
Cela ne marque que le début de l'engagement des personnes touchées par la douleur auprès du Groupe de travail.
Message des auteurs
La mise sur pied du Groupe de travail canadien sur la douleur marque un engagement officiel du gouvernement pied du Canada à mieux comprendre les besoins des personnes qui vivent avec une douleur chronique et à y répondre. Il s'agit d'une occasion de faire fond sur le travail formidable déjà en cours partout au pays - dans les groupes de soutien par les pairs, les cliniques, les laboratoires de recherche, les salles de classe et ailleurs. Nous le percevons comme une plateforme pour faire entendre la voix des personnes touchées par la douleur, pour inciter tous les ordres de gouvernement à agir et pour jeter les bases d'une stratégie nationale de lutte contre la douleur, qui se traduira par des avantages tangibles pour les Canadiens vivant avec de la douleur, leur famille et la société.
Un Canadien sur cinq souffre de douleur chronique. Lorsque la douleur persiste, elle peut toucher tous les aspects de la vie, y compris le travail, l'école, les loisirs, la famille et la participation à la vie communautaire. Vivre avec une douleur mal gérée peut entraîner de l'insomnie, du désespoir, de la dépression et de l'anxiété, en plus de réduire la qualité de vie et d'augmenter l'isolement. Pour certains Canadiens, une douleur mal gérée a mené à la pauvreté, à l'itinérance et même au suicide.
Le fardeau de la douleur chronique n'est pas partagé également entre les Canadiens. Il est plus courant chez les personnes âgées, les femmes, les peuples autochtonesNote de bas de page 1, les anciens combattants et les populations touchées par les inégalités sociales et la discrimination. Divers facteurs sociétaux, historiques et professionnels soutiennent ces tendances. Ces déterminants sociaux peuvent mener à une interaction complexe entre la douleur chronique, la maladie mentale et les troubles liés à la consommation de substances. Si l'on ajoute à cela la stigmatisation qui accompagne ces problèmes de santé, bon nombre de ces personnes présentent un risque élevé de vivre avec une douleur mal gérée.
L'anxiété et la peur liées à la prise d'opioïdes peuvent aussi avoir un impact négatif chez les personnes qui vivent avec de la douleur. Certains Canadiens ont été incapables d'avoir accès à des opioïdes pour soulager leur douleur et leur permettre ainsi de fonctionner. D'autres ont dû surmonter des obstacles indus pour obtenir ou remplir leurs ordonnances d'opioïdes, et certains ont vu leur dose d'opioïdes réduite abruptement ou interrompue. Cela a causé des douleurs et des souffrances inutiles et a amené certains Canadiens à se procurer des drogues illégales pour traiter leur douleur. Nous devons faire davantage pour trouver le juste équilibre - i.e., promouvoir des pratiques de prescription d'opioïdes qui établit un équilibre entre les risques et les avantages de ces médicaments en fonction des besoins individuels de chaque patient.
Les conséquences de la douleur vont au-delà des individus et touchent les familles, les collectivités et la société dans son ensemble. La douleur chronique coûte cher aux Canadiens; non seulement elle entraîne des coûts directs et indirects importants, mais les personnes vivant avec de la douleur ont souvent de la difficulté à se payer les traitements qui peuvent améliorer leur qualité de vie et leur capacité de participer pleinement à la société. La prise de mesures pour soulager la douleur améliorera la qualité de vie de sept millions de Canadiens et leur famille en plus et économiser de l'argent.
La douleur chronique n'a pas été reconnue et ses répercussions profondes n'ont pas été prises en compte pendant trop longtemps. Elle a été interprétée comme un symptôme d'une autre maladie, au lieu d'être reconnue comme une maladie à part entière. La situation est en train de changer alors qu'émerge un consensus mondial reconnaissant la douleur chronique comme une maladie légitime. Ce consensus incite divers pays dans le monde à agir.
Le présent rapport reflète l'état actuel du traitement de la douleur, de l'éducation et de la recherche au Canada. Il démontre que la douleur est une maladie stigmatisée et encore invalidée, que les professionnels de la santé n'ont toujours pas les connaissances et les compétences nécessaires pour traiter la douleur, que les services spécialisés de traitement de la douleur ne sont généralement pas accessibles et que les résultats de la recherche ne sont pas toujours utilisés pour améliorer les soins. Les efforts d'amélioration sont fragmentés et entravés par le manque de coordination et de financement. Nous espérons que le présent rapport provoquera un engagement à changer les façons de faire.
Il est possible de prendre appui sur des réussites locales. De nombreuses personnes vivant avec de la douleur, des professionnels de la santé, des chercheurs, des décideurs et des organisations non gouvernementales ont contribué à un mouvement pour contrer la douleur au Canada. Il existe déjà au pays des modèles cliniques innovateurs, des méthodes pédagogiques éprouvées, des programmes de soutien novateurs et des recherches de renommée mondiale. En fait, nous avons besoin d'une politique nationale, de coordination et de ressources pour amplifier, diffuser et accélérer ce travail et combler les lacunes de même que les inégalités actuelles.
La prochaine étape des travaux du Groupe de travail consistera à écouter les Canadiens vivant avec de la douleur et ceux qui s'en soucient. Il y aura de nombreuses occasions de mobilisation, y compris des consultations en personne et en ligne. Les commentaires et les points de vue partagés seront ensuite intégrés aux connaissances et aux pratiques exemplaires existantes, afin de mettre en place une approche améliorée et coordonnée pour mieux comprendre, prévenir et gérer la douleur au Canada.
Le Groupe de travail est reconnaissant envers les Canadiens vivant avec de la douleur qui ont partagé leurs histoires et leurs réflexions à l'égard de ce premier rapport - il s'agit de témoignages puissants qu'entraîne la façon dont nous abordons actuellement la douleur dans notre pays. Nous reconnaissons également les contributions essentielles des membres du Comité consultatif externe et la vaste expertise qu'ils ont offerte pour éclairer le présent rapport. Nous sommes impatients d'élargir ces discussions à mesure que nous entrons dans la prochaine phase de notre mandat.
Respectueusement soumis,
Groupe de travail canadien sur la douleur
Fiona Campbell, coprésidente
Maria Hudspith, coprésidente
Melissa Anderson
Manon Choinière
Hani El-Gabalawy
Jacques Laliberté
Jaris Swidrovich
Linda Wilhelm
Section 1 : La nature de la douleur et ses répercussions sur les Canadiens
La douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable propre à la personne
La douleur est une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable que nous rencontrons tous à un moment donné de notre vie. Elle est très personnelle et ne peut être pleinement évaluée que par la personne qui la ressent.
Les mécanismes biologiques de la douleur sont influencés par le système nerveux. Les neurones sensoriels ou les nocicepteurs du corps envoient des signaux au cerveau par le système nerveux périphérique et la moelle épinière. Si le cerveau interprète ces signaux comme dangereux, nous ressentons de la douleur pour nous avertir et nous protéger. Le système nerveux peut changer en réponse à divers facteurs, et ces changements peuvent nous rendre plus ou moins sensibles aux stimuli douloureux, ou même entraîner un état persistant de sensibilité accrue à la douleur. Nous pouvons utiliser cette plasticité de notre système nerveux pour gérer et diminuer l'expérience de la douleur. Trois principaux mécanismes biologiques sous-tendent la douleur :
- La douleur nociceptive découle de dommages aux tissus corporels et est la douleur typique que l'on ressent à la suite d'une blessure ou causée par de l'inflammation. Elle est habituellement décrite comme une douleur aiguë, lancinante ou pulsatile.
- La douleur neuropathique découle de dommages directs au système nerveux lui-même. Elle est généralement décrite comme une douleur brûlante ou fulgurante, et peut se traduire par un engourdissement ou un fourmillement cutané ou une sensibilité extrême, même à un toucher léger.
- La douleur nociplastique découle d'un changement dans le fonctionnement des nerfs sensibles à la douleur plutôt que d'un dommage direct au système nerveux. Les nerfs sensibles deviennent plus réactifs (sensibilisation). Elle est de nature semblable à la douleur neuropathique.
Sur le plan pragmatique, la douleur est définie non seulement par ces mécanismes, mais aussi par sa durée (aiguë, chronique). La douleur aiguë est généralement nociceptive, mais elle peut avoir une composante neuropathique, alors que la douleur chronique peut aussi être nociceptive, mais elle comporte habituellement une composante neuropathique ou nociplastique.
Ma douleur a eu un impact important sur ma vie. Elle a une incidence sur ma capacité de sortir du lit, de me préparer, d'aller à l'école, d'aller au travail, de faire de l'exercice et de passer du temps avec mes amis et mes proches. La douleur m'amène à faire des compromis sur tous les aspects de ma vie.
La douleur chronique est une maladie à part entière
Pour la plupart des gens, la douleur est temporaire et avertit que quelque chose ne va pas, que quelque chose a causé ou peut causer des dommages à une partie de notre corps. Il s'agit d'une douleur aiguë qui se résorbe habituellement au fur et à mesure de la guérison.
L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a récemment reconnu la douleur chronique comme une maladie à part entière, ce qui a entraîné la révision de la plus récente version (11e) de la Classification internationale des maladies (CIM-11). Cette distinction est importante, car elle valide l'expérience de millions de personnes dans le monde vivant avec de la douleur chronique. Selon la CIM-11, la douleur chronique peut aussi être classée comme douleur chronique primaire ou douleur chronique secondaire.
La douleur chronique primaire est une douleur dans une ou plusieurs régions anatomiques :
- qui persiste ou revient pendant plus de trois mois; et
- qui est associé à une détresse émotionnelle importante (p. ex., anxiété, colère, frustration ou humeur dépressive) ou à une incapacité fonctionnelle importante (interférence dans les activités de la vie quotidienne et dans la participation à des rôles sociaux); et
- dont les symptômes ne sont pas mieux pris en compte par un autre diagnostic (Nicholas et coll., 2019).
La douleur chronique primaire comprend les sous-diagnostics suivants : la douleur généralisée chronique, le syndrome douloureux régional complexe, la céphalée primaire chronique ou les douleurs orofaciales, la douleur viscérale chronique primaire et la douleur musculo-squelettique chronique primaire.
La douleur chronique secondaire est diagnostiquée lorsqu'elle se présente comme symptôme d'un autre problème de santé sous-jacent. Elle peut persister même après le traitement, auquel cas elle est également considérée comme une maladie à part entière. Parmi les exemples courants de douleur chronique secondaire, mentionnons la douleur chronique attribuable au cancer, la douleur post-chirurgicale ou post-traumatique chronique, la douleur neuropathique chronique, la céphalée chronique secondaire, la douleur viscérale chronique secondaire et la douleur musculo-squelettique chronique secondaire.
Le nouveau système de classification de la CIM-11 comprend également un code indiquant la gravité de la douleur, qui tient compte de l'intensité de la douleur, de la détresse émotionnelle et de l'interférence avec le fonctionnement.
Les facteurs biologiques, psychologiques, et sociaux influencent notre expérience de la douleur
Les facteurs biologiques, psychologiques, et sociaux propres à chaque personne interagissent avec le système nerveux et influencent le développement et l'expérience de la douleur. Ce constat est à la base du modèle biopsychosocial de la douleur (Gatchel et coll., 2007). Ce modèle s'éloigne du modèle biomédical traditionnel et élargit l'approche en matière de prévention, d'évaluation et de gestion de la douleur pour englober toute la personne et son expérience de la douleur. Les facteurs environnementaux, émotionnels et spirituels chevauchent certains éléments de ce modèle et l'élargissent davantage (Painaustralia, 2019; Institute of Medicine [IOM], 2011).
Voici quelques-uns des facteurs, à l'intérieur de chacune de ces dimensions, qui influencent l'expérience de la douleur, ainsi que quelques exemples concrets.
- « Biologique - l'étendue d'une maladie ou d'une blessure et le fait que la personne a d'autres maladies, est stressée ou a des gènes ou des facteurs prédisposants particuliers qui influent sur la tolérance à la douleur ou les seuils de perception » (IOM, 2011)
p. ex., les hormones sexuelles et de stress influent sur la sensibilité à la douleur. - « Psychologique - anxiété, peur, culpabilité, colère, dépression et le fait de penser que la douleur représente quelque chose de pire qu'elle ne l'est et que la personne est incapable de la gérer » (IOM, 2011)
p. ex., la distraction diminue l'intensité de la douleur tandis que le fait de se concentrer sur la douleur en augmente l'intensité. - « Social - la réaction des proches à la douleur - qu'il s'agisse de soutien, de critique, de comportement empathique ou de retrait - les exigences du milieu de travail, l'accès à des soins médicaux, la culture et les attitudes et croyances familiales » (IOM, 2011)
p. ex., les stratégies d'adaptation fondées sur la culture peuvent réduire l'intensité de la douleur et influer sur la perception de son incidence.
La douleur est complexe et multidimensionnelle. Il faut tenir compte des différentes dimensions de la douleur (biologique, psychologique et sociale) pour l'évaluer, la diagnostiquer et la traiter efficacement. Il est aussi utile de considérer ces dimensions lorsqu'il s'agit d'explorer les évolutions observées de la douleur au sein de la population canadienne.
Des millions de Canadiens vivent avec une douleur chronique modérée à forte
Selon plusieurs grandes enquêtes sur la population, on estime qu'un Canadien sur cinq souffre de douleur chronique (Schopflocher et coll., 2011; Reitsma et coll., 2011; Steingrimsdottir et coll., 2017). Les deux tiers des Canadiens qui vivent avec une douleur chronique la qualifient de modérée (52 %) à grave (14 %), et 50 % vivent avec une douleur chronique depuis plus de dix ans (Schopflocher et coll., 2011).
Certaines populations sont plus touchées par le fardeau de la douleur
À l'instar de nombreuses maladies chroniques, la douleur chronique n'est pas répartie également entre les Canadiens. Les facteurs biologiques, psychologiques, sociaux et autres qui influencent la façon dont nous ressentons la douleur influencent aussi qui développera une douleur chronique au départ. Souvent, la prévalence et la gravité de la maladie sont plus élevées dans les populations touchées par les inégalités sociales et la discrimination, y compris celles qui vivent dans la pauvreté, les peuples autochtones, certaines communautés ethniques et les femmes (Allan & Smylie, 2015; IOM, 2011).
Personnes âgées
La prévalence de la douleur chronique augmente constamment avec l'âge, ce qui en fait un trouble de santé majeur chez les personnes âgées. Environ un Canadien de 65 ans et plus sur trois vit avec une douleur chronique (Schopflocher et coll., 2011; Reitsma et coll., 2011). Étant donné le vieillissement de la population au Canada, nous pouvons nous attendre à ce qu'une proportion accrue de Canadiens vivent avec des douleurs chroniques au cours des prochaines années.
Enfants et adolescents
Contrairement à ce à quoi beaucoup s'attendent, la douleur chronique est également fréquente chez les enfants et les adolescents, avec des estimations de la prévalence allant de 11 % à 38 % (King et coll., 2011). Les symptômes courants chez les enfants comprennent des maux de tête récurrents, des douleurs abdominales, des maux de dos, et des douleurs musculosquelettiques et des douleurs multiples (Friedrichsdorf et coll., 2016; King et coll., 2011). La douleur dans ce groupe d'âge peut avoir une incidence sur le développement et peut entraîner plus de douleur chroniques, la consommation problématique de substances et des troubles psychologiques plus tard dans la vie (Groenewald et coll.,2019).
Femmes
Ma douleur a également eu un grand impact sur ma famille. Il est pénible de voir le stress que ma douleur a causé à ma famille. Les membres de ma famille me voient à mon pire et j'aimerais que mes parents et mes frères et sœurs n'aient pas à m'aider à me remettre des chirurgies ou à s'inquiéter de ma santé. Cela me crève le cœur de savoir que ma petite sœur a passé le plus clair de son enfance à jouer la "grande sœur" pour moi ou de penser que j'aie dû me retirer quand mon frère voulait se chamailler à cause de la douleur.
La douleur chronique est plus fréquente chez les femmes que chez les hommes de tous âges, et la prévalence la plus élevée de la douleur chronique est systématiquement observée parmi les femmes de 65 ans et plus (Schopflocher et coll., 2011; Reitsma et coll., 2011; King et coll., 2011). La fibromyalgie, le syndrome du côlon irritable, la polyarthrite rhumatoïde, la douleur pelvienne chronique et les migraines sont autant d'affections qui se présentent de façon disproportionnée chez les femmes (International Association for Study of Pain [IASP], 2018b; Bartley & Fillingim, 2013). La prévalence parmi les femmes peut aussi être influencée par le orientation sexuelle par exemple, les femmes lesbiennes et bisexuelles sont plus exposées à plusieurs maladies chroniques, dont l'arthrite, que les femmes hétérosexuelles (Fredrikson-Goldsen et coll., 2012).
Peuples autochtones
Les populations autochtones sont touchées de façon disproportionnée par la douleur chronique. Parmi les Canadiens âgés de moins de 65 ans sondés au cours du cycle 2000-2001 de l'Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes, les peuples autochtones affichaient la prévalence la plus élevée de douleur chronique au Canada (Meana et coll., 2004). Chez les adultes autochtones, le diabète (15,9 %), l'arthrite (18,3 %) et les maux de dos chroniques (12,4 %) sont des maladies chroniques couramment signalées (Le Centre de gouvernance de l'information des Premières Nations, 2018). Les peuples autochtones décrivent l'expérience de la douleur physique comme étant secondaire à la douleur émotionnelle. Cette dernière causée par le racisme, la colonisation, la mort prématurée de parents, la dépossession, le déplacement et la violence communautaire a de profondes répercussions sur la santé des peuples autochtones (Allan & Smiley, 2015).
Anciens combattants
Les anciens combattants signalent des maladies chroniques à un taux de deux à trois fois supérieur à celui de la population générale. La douleur chronique touche 41 % des 670 000 anciens combattants du Canada. Près des deux tiers (63 %) des anciens combattants vivant avec de la douleur chronique ont également reçu un diagnostic de problème de santé mentale, et bon nombre affirme que la douleur interfère avec leur travail, rend plus difficile de s'adapter à la vie civile, cause du stress et une diminution des activités. Les probabilités de limitations d'activités sont onze fois plus élevées chez les anciens combattants souffrant de douleur chronique que chez ceux sans douleur. En outre, 65 % des anciens combattants qui ont eu des idées suicidaires dans l'année précédente et 76 % de ceux qui ont fait des tentatives de suicide dans l'année précédente ont également déclaré souffrir de douleur chronique (Anciens Combattants Canada, 2019).
Personnes qui consomment des drogues
La prévalence de la douleur chronique chez les consommateurs de drogues est relativement bien documentée. Les estimations de la prévalence varient de 31 % à 55 % selon la population étudiée (Heimer et coll., 2015; Alford et coll., 2016; Voon et coll., 2015; Dunn et coll., 2015; Peles et coll., 2005). Cela entraîne souvent un défi cyclique : la douleur mal gérée peut mener à la consommation problématique de substances, ce qui peut entraîner une détérioration supplémentaire de la santé et davantage de douleur. Dans ces cas, l'accès à un éventail de traitements visant le contrôle de la douleur pourrait contribuer à réduire la douleur, en plus d'offrir une occasion de se concentrer ensuite sur le traitement des troubles liés à la consommation de substances; cependant l'éventail de traitements requis n'est souvent pas facilement accessible (Voon et coll., 2014; Voon et coll., 2015; Dassieu et coll., 2019).
La douleur affecte tous les aspects de la vie
Les répercussions importantes de la douleur sur les personnes et leur famille sont de mieux en mieux connues. On observe souvent chez les personnes vivant avec de la douleur :
- une diminution de la qualité de vie et de la santé générale;
- un déclin de la santé mentale et émotionnelle, y compris une augmentation de l'inquiétude, du stress, de l'anxiété, de la tristesse, de la dépression, de la colère et de la frustration;
- un risque accru de suicide;
- des problèmes liés à la fonction cognitive comme une diminution de la vitesse du traitement cognitif, l'attention sélective, problèmes de mémoire et de la fonction exécutive;
- une augmentation de la fatigue, de l'épuisement et des problèmes de sommeil;
- une diminution des activités de la vie quotidienne et du fonctionnement physique et social (p. ex., sommeil, vie familiale, participation aux loisirs et à la vie communautaire);
- l'absentéisme scolaire/professionnel et une diminution de la productivité;
- une augmentation de l'incapacité et de l'inactivité;
- une diminution des liens et des soutiens sociaux;
- une augmentation de l'utilisation des soins de santé.
(IOM et coll., 2011; Duenas et coll., 2016; Racine, 2018; Leadley et coll., 2012, 2014; Reid et coll., 2016)
L'ampleur et la gravité de ces répercussions sont généralement plus élevées dans les populations touchées par les inégalités structurelles, notamment chez les personnes qui vivent dans la pauvreté, les femmes, les peuples autochtones et certaines communautés ethniques (Allan & Smylie, 2015; IOM, 2011).
Il y a des coûts importants pour les familles, les collectivités, et la société
La douleur chronique entraîne des coûts humains et économiques pour les familles, les collectivités et la société. En plus des coûts directs en soins de santé, la douleur mine la capacité de participer pleinement aux relations et à la vie scolaire, professionnelle et communautaire.
Lorsque j'ai dû arrêter de travailler, les prestations d'invalidité de longue durée limitées que j'ai reçues au fil du temps ont eu une incidence négative sur la trajectoire du revenu de notre ménage. Cela a eu une incidence sur l'accès de nos enfants à l'éducation et à de nombreuses autres possibilités.
Bien que nous ne disposons pas de données aussi solides au Canada, nous savons qu'aux États-Unis, le coût annuel total de la douleur chronique, y compris les coûts directs des soins de santé et les coûts liés à la perte de productivité, a été estimé à 560 milliards de dollars (Gaskin et coll., 2012). Ce coût est supérieur au coût annuel total du cancer (243 milliards de dollars), des maladies cardiaques (309 milliards de dollars) ou du diabète (188 milliards de dollars) (Gaskin et coll., 2012). Si l'on applique ces estimations à la population canadienne, nous estimons que les coûts directs et indirects combinés de la douleur chronique au Canada s'élève approximativement à un total de 56 à 60 milliards de dollars par année (Wilson et coll., 2015). La douleur chronique est l'une des raisons les plus courantes pour demander des soins de santé au Canada et aux États-Unis (IOM, 2011; Finley et coll., 2018; Todd et coll., 2007).
Une étude récente portant sur le fardeau économique de la douleur chronique au Canada a estimé le coût direct annuel pondéré de la gestion de la douleur chronique au Canada à 7,2 milliards de dollars (Hogan et coll., 2016). Cette étude a examiné les coûts des soins de santé financés par le secteur public, de sorte que ce chiffre n'inclut pas les dépenses payées par le particulier ou les coûts indirects comme la perte de productivité. Une autre étude canadienne a examiné les coûts des soins de santé financés par le secteur public et par le secteur privé (assurance et frais payés au comptant), ainsi que la perte de productivité des travailleurs pour les personnes inscrites sur les listes d'attente des établissements multidisciplinaires de traitement de la douleur. Le fardeau économique médian était de 1 462 $ par mois, dont 95 % étaient assumés par la personne (Guerriere et coll., 2010).
Des recherches récentes de Painaustralia suggèrent que chaque dollar australien dépensé pour accroître l'éducation sur la douleur et améliorer l'accès aux soins multidisciplinaires pourrait se traduire respectivement par un retour de 4,6 et 4,9 dollars australiens (Painaustralia, 2019). Comme les coûts de la prestation des soins de santé continuent d'augmenter et de surcharger les budgets du gouvernement, l'obtention de données plus précises et plus complètes sur les coûts associés à la douleur chronique et à l'utilisation des soins de santé au Canada aiderait la planification des soins de santé et les décisions d'ordre politique.
Données pour des mesures visant à améliorer la santé et le bien-être des Canadiens et de notre économie
Les données indiquent que la douleur chronique est une maladie courante qui a une incidence importante sur la santé et le bien-être des Canadiens, ainsi que sur notre économie. Il est également clair que cette maladie a un impact plus important sur les sous-populations qui font régulièrement face à des défis sanitaires et sociaux plus importants. Ces données peuvent être utilisées pour éclairer les politiques, les programmes et les investissements visant à réduire les effets de la douleur chronique au Canada.
Il existe un mouvement international visant à colliger des données sur la douleur chronique, ce qui permettra au Canada de mieux éclairer les mesures et de mieux surveiller les résultats. Les nouveaux critères de diagnostic standard pour la douleur chronique inclus dans la version 11 de la Classification internationale des maladies augmenteront la comparabilité des données sur la douleur chronique. Cela aidera à établir des profils de santé aux échelles nationale, provinciale, territoriale et régionale et permettra aux intervenants de suivre l'évolution des tendances au fil du temps.
Des réseaux de recherche canadiens élaborent également des registres des personnes vivant avec de la douleur et des normes encadrant la collecte des renseignements clés auprès de tous les patients qui demandent des soins dans les hôpitaux et les cliniques participant à ces réseaux (p. ex., données démographiques, gravité et durée de la douleur, limitations fonctionnelles, incapacité). Ensemble, ces efforts permettront de mieux prendre des mesures fondées sur des données probantes contre la douleur chronique au Canada.
Section 2 : Approches actuelles en matière de diagnostic et de prise en charge de la douleur chronique au Canada
Deux idées fondamentales abordées dans la section précédente sont essentielles à l'efficacité du diagnostic et au traitement et à la prise en charge de la douleur chronique. Premièrement, la douleur chronique est une maladie à part entière, avec des facteurs aggravants au-delà de la blessure ou de la maladie à l'origine. Deuxièmement, la douleur chronique est influencée par une interaction complexe de facteurs biologiques, psychologiques, et sociaux propres à chaque personne. Les lacunes dans les soins pour douleur chronique au Canada reflètent souvent des lacunes dans les connaissances sur ces deux idées et ce, autant chez la population générale que chez les professionnels de la santé. L'incapacité d'aborder adéquatement les dimensions psychologiques et sociales de la douleur d'une manière intégrée avec les facteurs biologiques contribuent également à ces lacunes.
Reconnaître que la douleur est réelle et multidimensionnelle contribuera à améliorer le diagnostic
Souvent, les normes et les croyances de la société empêchent les individus et leurs soignants d'aborder la douleur comme problème de santé légitime. Les attitudes et les croyances qui positionnent la douleur comme un aspect normal de la vie ont contribué au sous-diagnostic et au sous traitement de la douleur. Les préjugés sexistes chez les personnes et les fournisseurs de soins de santé ont fait en sorte qu'un moins grand nombre d'hommes que de femmes cherchent à obtenir des soins de santé pour soulager la douleur et que les symptômes des femmes sont négligés (Samulowitz et coll., 2018; Bartley & Fillingim 2013). La discrimination empêche les Autochtones de recevoir l'aide dont ils ont besoin et la stigmatisation contribue à la perception selon laquelle les personnes atteintes de troubles liés à la consommation de substances cherchent seulement un traitement pour la douleur afin de pouvoir obtenir plus de drogues (Voon et coll.,2015; Dassieu et coll., 2019; Wylie & McConkey 2019). Ces problèmes entraînent des retards dans le diagnostic et le traitement.
J'ai été renvoyé d'une clinique externe à l'autre et je me suis retrouvé à l'urgence plusieurs fois par mois sans faire de progrès. Les fournisseurs de soins étaient très réticents à me traiter en raison du fait qu'il n'y avait pas de "preuve" (c.-à-d. résultat positif au tomodensitogramme/analyse sanguine anormale). On m'a invariablement demandé si j'inventais de la douleur pour recevoir de l'attention ou si la douleur était attribuable à un problème de santé mentale.
C'est au cours de l'entrevue d'admission et de l'anamnèse que le médecin a cessé d'écrire, a déposé son stylo, m'a regardé et m'a dit ces mots qui résonneront à jamais en moi, "ça va, nous vous croyons". Ces mots, cet acte de validation, ont été un point tournant pour moi.
La nature subjective de la douleur et les nombreux états qui peuvent entraîner une douleur chronique compliquent le processus d'évaluation et le diagnostic. Comme dans le cas d'autres maladies, les professionnels de la santé devraient i) dresser un historique complet de la douleur chronique et de ses répercussions, y compris la prise en compte de l'état fonctionnel et des déterminants sociaux de la santé, ii) effectuer un examen physique et iii) possiblement prévoir des tests spécifiques (Health Quality Ontario [HQO], 2018).
Trop souvent, l'historique de la douleur se réduit à quantifier le degré de douleur et à examiner les symptômes associés, sans mettre suffisamment l'accent sur l'anamnèse complète et la description de la douleur et de ses répercussions. Les pratiques exemplaires mettent l'accent sur la distinction entre l'intensité de la douleur (mesurée par des chiffres) et la souffrance (l'expérience subjective de la douleur et la capacité de fonctionner). Bien que l'intensité de la douleur puisse demeurer inchangée, la capacité d'une personne de fonctionner et d'intégrer/de réintégrer les activités quotidiennes dans sa vie peut changer (Ballantyne & Sullivan, 2015). Des cadres d'évaluation dynamiques et exhaustifs ont été proposés (Walton & Elliot, 2017; Wideman et coll., 2019a). Toutefois, l'état actuel de l'évaluation de la douleur chronique au Canada est encore largement axé sur l'intensité de la douleur et ne met pas beaucoup l'accent sur les impacts fonctionnels et émotionnels, la compréhension globale de l'expérience de la douleur et reconnaît les cas de douleur sans blessure ou maladie initiatrice ou sous-jacente (douleur chronique primaire).
Certains tests diagnostiques portant sur la structure du corps (p. ex., radiographies, tomodensitogrammes) peuvent poser problème. Ils n'aident pas nécessairement à cerner les causes significatives de la douleur, peuvent entraîner des procédures supplémentaires, lesquelles posent des risques en soi et peuvent compliquer le rétablissement. Bien qu'il soit important d'exclure les causes sous-jacentes traitables de la douleur chronique secondaire (p. ex., arthrite, tumeurs malignes, diabète) dans le cas de la douleur chronique primaire, des examens exhaustifs ne produiront pas de résultats satisfaisants. Les personnes qui ont une douleur chronique primaire ont souvent une compréhension insatisfaisante de leur diagnostic (p. ex., douleur inexpliquée sur le plan médical, douleur fonctionnelle) et perdent confiance envers le système. De plus, elles risquent ensuite se lancer dans un processus de recherche de tests médicaux supplémentaires, ce qui nuit à l'acceptation du diagnostic de douleur chronique et à la participation au traitement.
Le fait d'allier des thérapies physiques, psychologiques et pharmacologiques donne de meilleurs résultat
La douleur chronique est difficile à guérir; rien ne nous aide à connaître le taux global de guérison à la suite de ce diagnostic. Parfois, la douleur peut être traitée avec succès. Toutefois, le traitement n'est généralement que partiellement efficace et vise à optimiser la gestion de la douleur afin d'améliorer le fonctionnement et de réduire la souffrance.
Mon expérience de la douleur est en constante évolution. Au départ, il s'agissait d'une blessure nécessitant une gestion des symptômes aigus de douleurs musculo-squelettiques graves, ainsi que des maux de tête post-traumatiques graves et fréquents… tout mouvement devenait extrêmement douloureux, et même un léger toucher pouvait causer des nausées… avec le temps, et à mesure que la gestion de la douleur est devenue plus précise, la douleur extrême, bien qu'elle ne soit pas entièrement gérée, a diminué en fréquence… c'est à ce moment-là que j'ai pris conscience de la façon dont la douleur que je ressens interagit et exacerbe mes autres blessures et affections - plus particulièrement l'endurance cognitive liée au syndrome post commotionnel et aux traumatismes cérébraux, mes problèmes de traitement visuel et auditif et ma dépression majeure. Ils demeurent interreliés et ne peuvent être compris ou gérés en vase clos.
Le modèle biopsychosocial éclaire le traitement et la prise en charge efficaces de la douleur chronique. Le tableau 1 décrit une gamme d'interventions possibles. Cette liste n'est pas exhaustive, mais elle présente certaines des approches les plus étudiées en matière de traitement de la douleur. Certaines de ces interventions sont de nature plus passive (p. ex., médicaments, manipulations de la colonne vertébrale), tandis que d'autres sont plus actives (p. ex., exercice, thérapie cognitivo-comportementale, méditation basée sur la pleine conscience), ce qui oblige les praticiens et les personnes avec de la douleur à travailler activement pour changer les pratiques et les habitudes environnementales, sociales, comportementales, psychologiques ou liées à l'attitude. Toutes les interventions comportent à la fois des avantages et des risques, qui varieront en fonction de la personne. Ceux-ci doivent faire l'objet d'une discussion et d'un examen minutieux tout au long du processus de prise de décisions partagé par les personnes vivant avec de la douleur et leurs fournisseurs de soins de santé.
La disponibilité et la qualité des données probantes sur l'efficacité de toute thérapie individuelle pour traiter la douleur chronique sont limitées. Les études portent surtout sur les résultats à court terme et fournissent souvent des données contradictoires ou mitigées. Les études se limitent également à des types particuliers de douleur et comparent rarement des interventions individuelles entre elles ou des interventions combinées (Aldington & Eccleston, 2019; Canadian Agency for Drugs and Technologies in Health [CADTH], 2019a). L'examen de ces documents dépasse la portée du présent rapport; toutefois, un certain nombre d'initiatives sont en cours de préparation dans le but de diffuser les connaissances actuelles, et la prochaine phase du mandat du Groupe de travail comprendra un examen plus approfondi des pratiques exemplaires (CADTH, 2018a, 2018b, 2018c, 2019a, 2019b, 2019c; Waddell et coll., 2017b; Reddan & Wager, 2018). Il y a aussi des normes, des lignes directrices et des trousses d'outils qui visent intégrer les données probantes dans les pratiques cliniques pour diverses populations et différents types de douleur. Le tableau 2 présente une sélection de lignes directrices fondées sur des données probantes qui ont été identifiées par le Groupe de travail. Malgré la disponibilité sous de nombreuses formes, la sensibilisation et l'application uniforme de ces ressources pratiques peuvent être limitées (Peter & Watt-Watson, 2008; CADTH, 2018d).
Il ressort clairement des données probantes et des lignes directrices indiquées au tableau 2 que les traitements pharmacologiques sont plus efficaces lorsqu'ils sont utilisés dans le cadre d'un plan global et multidisciplinaire de gestion de la douleur qui intègre également des dimensions psychologiques, physiques et d'autogestion (Gatchel et coll., 2007; CADTH, 2018d, 2019c; National Academies of Sciences, Engineering, and Medicine [NASEM], 2019). Ainsi, International Association for the Study of Pain (IASP) reconnait les modèles de soins multimodaux intégrés comme le meilleur paradigme pour le traitement et la gestion de la douleur chronique. En fin de compte, les personnes qui vivent avec une douleur chronique doivent être habilitées à choisir et à mettre en œuvre des stratégies actives et passives fondées sur des données probantes et leurs besoins individuels pour mieux traiter ou gérer leur douleur.
Tableau 1 : Exemples d'interventions pour le traitement et la gestion de la douleur chronique
Interventions pharmacologiques
Médicaments/substances qui ont un effet physiologique lorsqu'elles sont introduites dans l'organisme.
Exemples :
- Anti-inflammatoires non stéroïdiens
- Acétaminophène
- Opioïdes
- Cannabinoïdes
- Antidépresseurs
- Anticonvulsivants
- Relaxants musculaires
Interventions psychologiques
Intervention qui vise à modifier les pensées, les émotions ou les comportements.
Exemples :
- Psychothérapie individuelle et de groupe
- Thérapie cognitivo-comportementale
- Traitement d'acceptation et d'engagement
- Séances d'éducation
- Méditation basée sur la pleine conscience
- Thérapie d'adaptation au problème pour la douleur (TAP)
- Groupes de soutien
Interventions physiques et de réadaptation
Processus visant à permettre à une personne d'atteindre ou de maintenir un fonctionnement physique optimal.
Exemples :
- Exercice, mouvement et activité physique
- Yoga
- Tai Chi
- Modification de l'activité
- Activités progressives - participation et exposition
- Imagerie motrice graduée
Instruments médicaux/interventions procédurales
Procédure ou procédure d'un instrument médical destiné à traiter ou à gérer la douleur.
Exemples :
- Stimulation cérébrale profonde
- Injection de stéroïdes
- Injections aux points de déclenchement
- Blocages nerveux
- Neurostimulation électrique transcutanée
- Traitement par ondes de choc
- Prolothérapie
- Stimulation de la moelle épinière
- Attelle dentaire
Thérapie administrée par le médecin/manuelle
Activités thérapeutiques administrées par un professionnel de la santé.
Exemples :
- Acupuncture
- Massothérapie
- Traitements ostéopathiques
- Manipulation de la colonne vertébrale
- Thérapies physiques
Interventions d'autogestion
Stratégies individuelles axées sur l'altération des facteurs cognitifs ou comportementaux ou sur la capacité d'adaptation d'une personne.
Exemples :
- Programmes d'acquisition d'aptitudes à la vie quotidienne et d'auto-efficacité
- Groupes de soutien
- Pratiques personnelles comme la méditation
- Pratiques alimentaires
- Exercices de relaxation et de respiration
- Éducation sur la neuroscience de la douleur
Tableau 2 : Guides de pratiques cliniques sur la douleur chronique
Lignes directrices propres à la population
- Guidance for Chronic Non-Cancer Pain Management (2019) - Service correctionnel Canada
- Pain Management (2018) & Guidelines for Pain Assessment and Management for Neonates (2017) - The Hospital for Sick Children (SickKids), 2017, 2018
- Chronic Pain Toolkit (2017) - Children's Healthcare Canada
- L'évaluation et la prise en charge de la douleur chez la personne âgée (2015) - Société québécoise de gériatrie – Lussier, 2015
Lignes directrices pour les opioïdes
- Guideline for opioid therapy and chronic non-cancer pain (2017) - Busse et coll., 2017
Lignes directrices pour les conditions douloureuses spécifiques
- 2012 Canadian Guidelines for the Diagnosis and Management of Fibromyalgia - Fitzcharles et coll., 2013
- Endometriosis: Diagnosis and Management (2010) - Société des obstétriciens et gynécologues du Canada – Leyland et coll., 2010
- Evidence-based guideline for neuropathic pain interventional treatments: Spinal cord stimulation, intravenous infusions, epidural injections and nerve blocks (2012) - Canadian Pain Society Neuropathic Special Interest Group – Mailis & Taenzer, 2012
- Guideline for Primary Care Management of Headache in Adults (2015) - Towards Optimized Practice; Institute of Health Economics Alberta Canada – Becker et coll ., 2015
- Guideline for the Evidence-Informed Primary Care Management of Low Back Pain (2017) - Toward Optimized Practice; Institute of Health Economics Alberta Canada
- Pharmacological management of chronic neuropathic pain - Revised consensus statement and guidelines from the Canadian Pain Society (2014) - Moulin et coll., 2014
- Diagnosis and management of low-back pain in primary care (2017) - Traeger et coll., 2017
- The treatment of neck pain-associated disorders and whiplash-associated disorders: a clinical practice guideline (2016) - Canadian Chiropractic Guideline Initiative - Bussières et coll ., 2016
- Ottawa Panel Clinical Practice Guidelines - Therapeutic Exercise and Manual Therapy in the Management of Osteoarthritis (Brosseau et coll ., 2005); Knee Osteoarthritis Part 1-3 (2017) (Brosseau et coll ., 2017a, 2017b, 2017c); Therapeutic Exercise in the Management of Hip Osteoarthritis (2016a); Structured Physical Activity in the Management of Juvenile Idiopathic Arthritis (2016) - Cavallo et coll ., 2017
- Spinal Manipulative Therapy and Other Conservative Treatments for Low Back Pain (2018) - Canadian Chiropractic Guideline Initiative - Bussières et coll ., 2018
- The CanPain SCI clinical practice guidelines for rehabilitation management of neuropathic pain after spinal cord: recommendations for treatment (2017) - Guy et coll., 2016
- Non-pharmacological management of persistent headaches associated with neck pain: A clinical practice guideline from the Ontario protocol for traffic injury management (OPTIMa) collaboration - Côté et coll., 2019
- Management of neck pain and associated disorders: A clinical practice guideline from the Ontario Protocol for Traffic Injury Management (OPTIMa) Collaboration - Côté et coll., 2016
Lignes directrices générales sur la douleur chronique
- Chronic Pain: Care for Adults, Adolescents, and Children (2018) - Health Quality Ontario
- Assessment and Management of Pain (Third Edition) (2013) - Association des infirmières et infirmiers autorisés de l'Ontario
- Management of Chronic Non-Cancer Pain Tool (2018) - Centre for Effective Practice (CEP), Collège des médecins de famille l'Ontario et Association des infirmières et infirmiers praticiens de l'Ontario
Les opioïdes et le cannabis méritent une attention particulière dans le contexte canadien actuel
Opioïdes
Lorsqu'ils sont prescrits et utilisés conformément aux directives d'un professionnel de la santé, les opioïdes jouent un rôle important dans la gestion de la douleur pour de nombreux Canadiens. Dans le contexte de douleurs aiguës sévères, comme après une chirurgie ou une blessure, ou dans les cas de douleurs graves liées au cancer ou de soins de fin de vie, les opioïdes sont des analgésiques couramment utilisés et efficaces. Les opioïdes ont également été largement employés pour la gestion de la douleur chronique non cancéreuse (Moulin et coll, 2014; National Opioid Use Guideline Group, 2010; Meldrum, 2016; Saïdi et coll., 2018).
De récentes augmentations spectaculaires du nombre de décès par surdose liés à des opioïdes en Amérique du Nord ont accru la sensibilisation aux risques associés à la consommation d'opioïdes à court et à long terme. L'offre d'opioïdes toxiques illicites est actuellement le principal facteur de l'augmentation des décès par surdose. Toutefois, la disponibilité accrue d'opioïdes d'ordonnance a également contribué aux hospitalisations et aux décès liés aux opioïdes depuis le début des années 2000 (Fischer et coll., 2006; Dhalla et coll., 2009; Gomes et coll., 2011; Chou et coll., 2014; Edlund et coll., 2014; Gladstone et coll., 2015; Gomes et coll., 2018a; Gomes et coll., 2018b; Sanger et coll., 2018; Ministry of Public Safety and Solicitor General, 2018; Fischer et coll., 2018).Les opioïdes ont été détournés vers le marché illégal en fournissant un approvisionnement pour usage non médical (Fischer et coll., 2006; Fischer & Rhem, 2009; Gladstone et coll., 2015; Santé Canada, 2017). De plus, une proportion de personnes à qui l'on a prescrit des opioïdes pour des douleurs aiguës et chroniques ont subi des préjudices importants, y compris le développement de troubles liés à l'utilisation d'opioïdes, des surdoses et des décès (Sanger et coll., 2018; Gomes et coll., 2011; Chou et coll., 2014; Gomes et coll., 2018a; Gomes et coll., 2018b). Bien que la relation entre la douleur, les opioïdes et les méfaits liés aux opioïdes au Canada nécessite des éclaircissements, les données probantes disponibles justifient la prise de mesures.
Les mesures visant à promouvoir une utilisation appropriée des opioïdes comprennent la mise en œuvre de programmes de surveillance des ordonnances, la sensibilisation des Canadiens aux risques liés aux opioïdes, la mise à jour des lignes directrices sur la pratique clinique fondée sur des données probantes pour ce qui est de la prescription des opioïdes (Busse et coll., 2017). Les lignes directrices mises à jour reflètent les données probantes indiquant que les opioïdes soulagent la douleur et améliorent le fonctionnement physique et la qualité de vie liée à la santé pour une minorité appréciable de personnes souffrant de douleur chronique et que les effets indésirables liés à l'utilisation à long terme d'opioïdes peuvent être importants (Busse et coll., 2018; et coll., Chou et coll., 2014; Filiatrault et coll., 2016; Mao, 2002; Colvin et coll., 2019). Ces lignes directrices ont eu des répercussions positives sur certaines personnes qui ont évité une exposition inutile à des opioïdes et aux risques qui y sont associés (p. ex., vomissements, constipation, changements hormonaux, hyperalgie, surdose). Toutefois, elles ont aussi eu des conséquences non souhaitées pour les personnes vivant avec de la douleur et les professionnels de la santé.
Certaines personnes qui pourraient bénéficier des opioïdes pour gérer la douleur font maintenant face à des obstacles importants pour obtenir une ordonnance. En outre, de nombreuses personnes qui consomment des opioïdes depuis plusieurs années ou qui les prennent à des doses plus élevées que ce qui est actuellement recommandé sont sevrées du médicament (Dowell et coll., 2019; Antoniou et coll., 2019; Dassieu et coll., 2019). Certaines de ces personnes ont vu leur qualité de vie et leur fonctionnement s'améliorer lorsque les doses ont été réduites graduellement avec leur consentement. D'autres affirment s'en être vu couper l'accès ou avoir été sevrés abruptement sans leur consentement, ce qui a entraîné des douleurs débilitantes, des symptômes de sevrage graves et un risque accru de surdose dans le cas des personnes qui se tournent vers des sources illicites pour gérer leur douleur (Voon et coll., 2015; Kahan et coll., 2018; Antoniou et coll., 2019; Dassieu et coll., 2019; Dowell et coll., 2019; Darnall et coll., 2019). Certaines personnes qui souffrent à la fois de troubles liés à la consommation de substances et de douleur chronique rapportent s'être vu refusé des opioïdes pour gérer leur douleur (Dassieu et coll., 2019; Voon et coll., 2015). En fin de compte, plusieurs personnes vivant avec de la douleur se sentent stigmatisées, scrutées à la loupe et, dans certains cas, rejetées par les professionnels de la santé professionnels (Antoniou et coll., 2019; Dassieu et coll., 2019; Sinha et coll., 2019).
Il faut promouvoir la prise de décision partagée entre les professionnels de la santé et les personnes vivant avec de la douleur. Les décisions de prescription doivent être fondées sur les besoins uniques de la personne, mais l'environnement actuel ne le permet pas. Les professionnels de la santé se sentent sous pression de réduire la prescription d'opioïdes et manquent souvent de temps et des connaissances nécessaires pour prodiguer des soin axés sur les besoins spécifiques des patients (Lynch & Katz, 2017; Dowell et coll., 2019). Il est urgent que les intervenants de tout le pays renforcent et soutiennent mieux la prescription d'opioïdes axée sur les besoins des patients, qui établit un équilibre entre les risques et les avantages de ces médicaments. De nombreux efforts sont déjà en cours – ils seront examinés et d'autres occasions seront cernées au cours de la prochaine étape de notre travail.
Cannabis
En 2018, on dénombrait environ 340 000 utilisateurs autorisés de cannabis à des fins médicales au Canada (Santé Canada, 2019) et les données probantes indiquent que la douleur est l'une des conditions les plus couramment déclarées pour ce genre d'utilisation (NASEM, 2017; Nicholas & MacLean, 2019). De plus, la légalisation du cannabis accroît son accès, le rendant disponible pour l'autogestion de la douleur chronique, sans qu'il soit nécessaire de tenir une conversation entre les patients et leurs professionnels de la santé pour éclairer la prise de décisions partagées. Les premières études populationnelles indiquent que de telles réformes juridiques ont entraîné une réduction de la douleur et une meilleure auto-évaluation de la santé chez les personnes âgées (Nicholas & MacLean, 2019) ainsi qu'une réduction des consultations dans les cliniques spécialisées pour traiter la douleur chronique (Delling et coll., 2019). Des études suggèrent aussi que certaines personnes pourraient réduire l'utilisation de certains analgésiques, comme les opioïdes, et les remplacer en faveur du cannabis (Bachhuber et coll., 2019; NASEM, 2017; Nicholas & MacLean, 2019). Toutefois, les données cliniques actuelles à l'appui de l'utilisation du cannabis pour soulager la douleur sont limitées.
Une revue des essais contrôlés randomisés et des études observationnelles indiquent que le cannabis peut réduire l'intensité de la douleur. Les données probantes sont plus éloquentes dans les cas de douleur neuropathique et plus modérées dans les cas de douleur musculo-squelettique, la fibromyalgie, les maux de tête, la douleur cancéreuse, la sclérose en plaques et l'arthrite (NASEM, 2017; Carr & Schatman, 2019; Whiting et coll., 2015; Stockings et coll., 2018). Toutefois, des effets secondaires importants et des préoccupations en matière de sécurité ont été signalés, et de nombreuses études n'ont pas démontré des améliorations pour la fonction physique et émotionnelle. Cela a amené certains chercheurs à conclure qu'il est peu probable que le cannabis soit efficace pour la douleur chronique (Stockings et coll., 2018; Carr & Schatman, 2019; Mucke et coll., 2018). En raison des répercussions possibles des changements de politique et du nombre limité d'études cliniques, il y a encore beaucoup d'inconnues au sujet de l'efficacité et de l'innocuité du cannabis pour la gestion de la douleur chronique. Plus précisément, il reste à régler des questions liées au choix du produit, au dosage, aux voies d'administration, aux interactions avec d'autres médicaments, substances et traitements, aux effets secondaires et aux complications potentielles à long terme (Carr & Schatman, 2019; NASEM, 2017).
Les cliniques multidisciplinaires et interdisciplinaires de traitement de la douleur constituent l'étalon-or
Des données probantes indiquent que les cliniques multidisciplinaires de traitement de la douleur sont efficaces sur les plans clinique et économique et constituent une partie importante du spectre des soins de la douleur (Tunks et coll., 2008; Gatchel & Howard, 2018). Le traitement peut comporter une approche multidisciplinaire selon laquelle les patients travaillent avec plusieurs professionnels de la santé séparément pour établir des plans de soins, ou peut inclure des services interdisciplinaires faisant appel à des équipes hautement intégrées qui travaillent ensemble pour établir un plan unique de gestion de la douleur axé sur le patient. La recherche démontre que ces modèles permettent souvent de réduire l'intensité de la douleur et l'interférence, et aussi la peur, le stress, la dépression et l'anxiété qui peuvent souvent accompagner la douleur chronique. Des cliniques multidisciplinaires ont également été associées à une diminution de l'utilisation des médicaments, de l'utilisation des soins de santé, des conséquences iatrogènes et des demandes de prestations d'invalidité, tout en augmentant l'activité, le fonctionnement, l'adaptation et l'auto-efficacité, ce qui peut par la suite se traduire par des économies de coûts pour le système de santé (Katz et coll., 2019; Campbell et coll., 2018; Chao et coll., 2019; CADTH, 2018d, 2019c; Waddell et coll., 2017b; Gatchel & Howard, 2018).
Les services intégrés de gestion de la douleur préviennent la transition de la douleur aiguë à la douleur chronique
Les services transitionnels de traitement de la douleur (STTD) visent à optimiser le traitement de la douleur aiguë importante et la consommation d'opioïdes afin de prévenir l'apparition de douleurs chroniques et de troubles liés à l'utilisation d'opioïdes. En règle générale, ces services sont fournis dans des contextes de soins tertiaires et prêtent une attention particulière à la prévention et au traitement de la douleur liée à une chirurgie importante. Les STTD comprennent des équipes d'infirmières en praticiennes, de médecins, de physiothérapeutes et de psychologues spécialisés dans la douleur. Les patients dont la douleur est susceptible de passer d'aiguë à chronique sont dépistés tôt et reçoivent une gamme de services pour réduire au minimum la probabilité de douleur chronique et pour faire en sorte que la transition de l'hôpital à la collectivité donne des résultats positifs (Katz et coll., 2015). Ces cliniques surveillent également de près la posologie des opioïdes et aident les patients à réduire leur consommation. La recherche a démontré que de tels services sont efficaces pour réduire la consommation d'opioïdes et la durée de l'utilisation, réduire l'intensité de la douleur et l'interférence et réduire l'anxiété chez les patients qui reçoivent ces services (Clarke et coll., 2018). Quelques cliniques offrent des services de transition dans les centres urbains de l'Ontario, de la Colombie-Britannique, du Québec et de l'Alberta.
Les modèles de soins qui intègrent les approches culturelles favorisent de meilleurs résultats
La douleur chronique est souvent conceptualisée par les peuples autochtones sur les plans intellectuel, spirituel, émotionnel et physique. De nombreuses études portant sur la pertinence des outils disponibles pour évaluer la douleur indiquent que les peuples autochtones préfèrent ne pas réduire leur expérience de la douleur à des évaluations numériques ou à d'autres échelles abstraites (Latimer et coll., 2018; Harman et coll., 2015). En outre, les établissements de soins de santé, dominés par le modèle biomédical, imposent des restrictions à l'accès des peuples autochtones aux rituels familiaux et traditionnels, considérés comme essentiels à la guérison. L'inclusion de pratiques de guérison traditionnelles dans un programme multidisciplinaire de traitement de la douleur serait bénéfique, et l'utilisation de la médecine traditionnelle ne devrait pas entrer en conflit avec les traitements conventionnels.
Les Canadiens n'ont pas un accès adéquat aux services de traitement de la douleur et les temps d'attente sont longs
Il est difficile d'être un étudiant indépendant à temps plein parce que je n'ai pas d'avantages sociaux me permettant de prendre des jours de maladie, comme employé à temps partiel. Par exemple, pendant mon rétablissement à la suite d'une chirurgie à la cheville, je ne pouvais pas travailler à cause de la douleur, mais je n'avais pas les avantages pour compenser le temps de travail perdu.
La thérapie cognitivo-comportementale m'a vraiment aidée à faire face à la douleur; j'ai droit à des séances privées en psychologie, mais je ne peux pas y aller aussi souvent que nécessaire en raison de la couverture. J'aimerais qu'on accorde plus d'importance à la psychologie pour le traitement de la douleur chronique.
En examinant l'état actuel de la situation, il est clair que de nombreux Canadiens n'ont pas accès à un ensemble de services adéquats ou appropriés de gestion de la douleur. Cela peut mener à un traitement inadéquat aux premières étapes d'un problème et exacerber celui-ci au fil du temps. Les personnes vivant avec de la douleur doivent également s'y retrouver dans un écheveau de systèmes multiples de remboursement des services, y compris le système public, l'assurance privée et les débours personnels, de sorte que l'accès peut dépendre largement du type d'assurance et de l'argent dont dispose une personne pour obtenir les services - une préoccupation pour celles qui ont un faible revenu ou qui n'ont pas d'assurance maladie privée. Il y a aussi souvent des transitions complexes et longues associées au passage d'un contexte de soins primaires à un contexte de soins plus spécialisés, au passage des soins pédiatriques spécialisés aux soins aux adultes, et aux services de traitements de la douleur et d'autres affections concomitantes qui peuvent aussi exiger des soins spécialisés.
Le projet STOP-PAIN est une initiative de recherche canadienne de longue date qui vise à évaluer le fardeau humain et économique de la douleur chronique partout au Canada, en particulier pour les personnes inscrites sur des listes d'attente de cliniques de traitement multidisciplinaire de la douleur (CTMD). Une recherche menée en 2005-2006 a révélé que le temps d'attente médian pour un premier rendez-vous à une CMTD était de six mois, ce qui signifie qu'au moins 50 % des patients attendent près de six mois et même jusqu'à plus de cinq ans pour avoir accès au traitement (Peng et coll., 2007). Les habitants des régions rurales, éloignées et du Nord ont un accès limité aux soins. Dans une récente mise à jour de ce travail, les chercheurs ont constaté peu de changements dans les temps d'attente, notant qu'en 2017-2018, le temps d'attente médian se situait toujours autour de 5,5 mois, certaines personnes attendant jusqu'à 4 ans pour avoir accès à des soins multidisciplinaires de la douleur. (Choinière et coll., 2019). Les chercheurs ont toutefois constaté un changement notable dans le nombre de CTDM pédiatriques au Canada, lequel a doublé pour passer de cinq en 2006 à neuf en 2018. La récente étude a également révélé que sur neuf provinces seulement ayant un CTMD, la moitié des provinces n'en ont qu'une pour trois cent mille habitants, dont la majorité se trouve en milieu urbain (91 %) (Choinière et coll., 2019).
Le projet a documenté les graves conséquences de ces difficultés d'accès, y compris les douleurs intenses continues, l'interférence dans la capacité d'exécuter les activités quotidiennes, la réduction de la qualité de vie et l'impact important du fonctionnement physique, psychologique et social (Choinière et coll., 2010). Il a également démontré le lourd fardeau économique auquel ces patients sont confrontés en raison des coûts de leurs soins (Guerriere et coll., 2010).
J'ai trouvé très difficile la transition de la clinique pédiatrique de la douleur à la clinique pour adultes. À la clinique pédiatrique, il y a une équipe multidisciplinaire, qui comprend un psychologue, un physiothérapeute, une infirmière et un spécialiste de la douleur. À la clinique de traitement pour adultes, il n'y a qu'un médecin qui est extraordinaire, mais qui est débordé; parfois, je ne peux obtenir un rendez-vous que tous les six mois. Elle m'a aiguillé vers un physiothérapeute, mais il y a moins de collaboration et de communication entre ces deux intervenants.
On en sait peu sur l'accès à d'autres types de services de traitement de la douleur au Canada (p. ex., au niveau des soins primaires ou secondaires). Une analyse récente des traitements non pharmacologiques de la douleur chronique, bien qu'il ne s'agisse que d'un instantané fondé sur des consultations limitées avec les intervenants, constitue la meilleure estimation disponible. Le rapport contient des annexes détaillées énumérant les services disponibles par secteur de compétenceNote de bas de page 2, et indique que la plupart des modalités de traitement sont payées par une assurance privée et les débours directs. L'assurance privée peut varier considérablement et est généralement insuffisante pour répondre aux besoins de gestion de la douleur chronique à long terme. Bien que certains services soient couverts par le système public s'ils sont fournis dans des cliniques internes et certaines cliniques externes, les listes d'attente sont longues (CADTH, 2018d). Les facteurs ayant une incidence sur la disponibilité et l'accès comprennent les suivants :
Facilitateurs
- Modèles de financement simples et partenariats public-privé;
- Temps de consultation accru avec les praticiens;
- Prestation à l'échelle de la collectivité locale;
- Technologie novatrice (p. ex., réalité virtuelle, vidéoconférence);
- Amélioration de l'éducation et de la formation interprofessionnelle.
Obstacles
- Manque de financement public et de remboursement;
- Distance par rapport aux centres urbains;
- Manque de services de transport publics et locaux;
- Temps d'attente importants dans de nombreuses juridictions administratives;
- Manque de coordination entre les fournisseurs;
- Manque de spécialistes;
- Obstacles linguistiques et culturels.
(CADTH, 2018d)
Les voies de traitement de la douleur chronique sont complexes, fragmentées et difficiles à suivre
À l'instar d'autres maladies chroniques (p. ex., diabète, maladie cardiovasculaire, etc.), le traitement de la douleur chronique se fait actuellement dans de nombreux contextes de soins différents. Voici une description sommaire du cheminement qu'une personne peut suivre depuis l'apparition des symptômes jusqu'à l'obtention des soins nécessaires pour l'aider à gérer sa douleur. Toutefois, ce processus n'est pas linéaire et peut exiger un va-et-vient entre les contextes de soins en fonction des symptômes et des circonstances de la vie. L'autogestion est essentielle à chaque étape et joue un rôle important dans le soulagement de la douleur. Elle peut commencer par des efforts informels, mais au fur et à mesure que la personne est exposée à de l'information, à des conseils médicaux et même à des programmes structurés d'autogestion qui la renseignent sur sa condition et renforcent sa capacité d'agir.
- L'apparition des symptômes : Les personnes vivant avec de la douleur essaient souvent de se débrouiller seules, en raison de la stigmatisation, du manque d'accès aux soins ou d'autres raisons (p. ex., normes sociales ou culturelles, pression familiale). Elles consultent des personnes ou Internet et d'autres ressources pour tenter de gérer la douleur en fonction des connaissances et de l'expérience des autres. La fiabilité de l'information obtenue peut être douteuse et entraîner de la frustration, voire des résultats néfastes. Certaines peuvent même utiliser des substances (sur ordonnance ou en vente libre) pour s'automédicamenter, ce qui accroît le risque leur nuire.
- Soins primaires et soins alternatifs complémentaires : Les personnes vivant avec de la douleur peuvent demander un traitement dans leur collectivité (p. ex., par des chiropraticiens, des naturopathes, des ostéopathes, des acupuncteurs, des massothérapeutes). Si la douleur persiste, s'aggrave ou commence à interférer avec le sommeil, l'humeur et le fonctionnement, elles peuvent alors demander des soins à des pharmaciens, à des physiothérapeutes, à des dentistes, à des médecins de famille, à des pédiatres ou à des infirmières praticiennes– un défi étant donné que plus de 15 % des Canadiens n'ont pas de fournisseur de soins de santé régulier (Statistique Canada, 2017).
- Soins secondaires ou spécialisés : Si la douleur persiste, les personnes vivant avec de la douleur sont souvent aiguillées vers un spécialiste pour le diagnostic et le traitement de maladies particulières (p. ex., rhumatologue pour l'arthrite, dentiste pour la douleur orofaciale, neurologue pour les maux de tête chroniques). Ces spécialistes aident à déterminer et à gérer les affections sous-jacentes « traitables » qui causent des douleurs chroniques secondaires, mais ils n'ont peut-être pas la capacité de gérer la douleur chronique primaire comme une maladie à part entière.
- Soins tertiaires faisant appel à des équipes multidisciplinaires et interprofessionnelles : Lorsque les professionnels des soins primaires ou secondaires sont incapables de traiter de façon satisfaisante la douleur chronique, ils peuvent aiguiller la personne vers des services spécialisés de traitement de la douleur chronique dans le secteur des soins tertiaires. Le traitement peut consister à travailler avec plusieurs professionnels de la santé pour établir des plans de soins ou à travailler avec des équipes hautement intégrées pour établir un plan de gestion de la douleur axé sur le patient. Ces services sont souvent inaccessibles à la plupart des gens en raison du manque de disponibilité ou des longs délais d'attente.
Je dois mon succès dans la gestion de ma douleur à mon réseau de soutien, qui comprend mes amis, ma famille et mon équipe médicale.
L'absence d'un parcours de soins clair exige souvent que les personnes vivant avec de la douleur déterminent elles-mêmes qui elles doivent consulter et dans quel ordre. Ce processus leur impose un fardeau et, en raison du manque de communication entre les praticiens, les oblige à répéter leur histoire à de nombreux professionnels de la santé, tout en suivant de multiples recommandations de traitement souvent contradictoires. Le diagnostic de douleur chronique et le début d'un traitement approprié peuvent donc prendre de nombreuses années. Les données probantes suggèrent qu'il y a beaucoup de possibilités de gains d'efficience grâce à une meilleure stratification des soins. Les modèles de soins de la douleur qui sont adaptés aux besoins des personnes et où la majeure partie des soins et de la prise en charge se fait par l'autogestion et les soins primaires communautaires sont plus efficaces et offrent la possibilité de réaliser des économies. Des services spécialisés et des soins plus intensifs peuvent alors être offerts pour les cas complexes.
Section 2 : Résumé
En examinant l'état actuel du traitement et de la gestion de la douleur chronique, il est clair que nous avons besoin d'une meilleure façon d'évaluer et de diagnostiquer la douleur chronique et ses répercussions. Bien que les données probantes indiquent que des avantages sont rattachés aux programmes qui intègrent des options de traitement pharmacologique, psychologique et physique, il persiste des lacunes liées à la personne et aux combinaisons de traitements qui procureraient des avantages optimaux pour différentes personnes et différents types de douleur. La recherche indique que les soins de la douleur doivent être adaptés à chaque personne et que la majorité des soins et de la gestion devraient idéalement passer par l'autogestion et les soins primaires, tout en offrant des services spécialisés dans les cas complexes. Il y a aussi clairement un problème d'accès limité et variable aux services de traitement de la douleur partout au Canada. Les données probantes indiquent qu'il faut accroître la disponibilité des soins de la douleur, qu'il s'agisse de soins communautaires axés sur le mieux-être pour les personnes qui ont une déficience fonctionnelle légère attribuable à la douleur, ou de soins spécialisés, multidisciplinaires et interprofessionnels pour les personnes qui éprouvent une douleur modérée à sévère ou une déficience fonctionnelle. De nombreux services ne font pas partie du système public de soins de santé et varient en fonction de la couverture d'assurance et de la géographie. Nous devons examiner comment relever ces défis et comment l'utilisation des progrès technologiques et de l'innovation pourrait aider à améliorer la portée et la couverture (p. ex., télésanté, plateformes en ligne, communautés de pratique). Les stratégies doivent également tenir compte des populations touchées et sous-traitées de façon disproportionnée.
Section 3 : Sensibilisation, éducation et formation spécialisée sur la douleur
Il existe des lacunes importantes dans l'éducation sur la douleur destinée aux professionnels de la santé
Il faut éduquer les professionnels de la santé sur la douleur pour améliorer et faciliter les pratiques de prévention et de traitement. Toutefois, l'état actuel de l'éducation sur la douleur au Canada demeure inadéquat dans toutes les disciplines, avec d'importantes lacunes de connaissances dans les contextes avant et après l'obtention du droit d'exercer (NASEM, 2019; Thompson et coll., 2018).
Des programmes d'études spécialisés sur la douleur sont nécessaires pour la formation préalable à l'autorisation d'exercer dans toutes les professions de la santé
Les programmes d'études préparatoires à l'autorisation d'exercer peuvent améliorer considérablement les connaissances et les croyances sur la douleur chez les étudiants en sciences de la santé (Watt-Watson et coll., 2009). Malgré leur valeur, il existe des lacunes importantes dans les programmes universitaires. Dans un examen de 10 universités canadiennes dans sept provinces, touchant les facultés de médecine, de soins infirmiers, de dentisterie, de pharmacie, de physiothérapie, d'ergothérapie et de médecine vétérinaire, 68 % des programmes n'étaient pas en mesure de préciser le temps réservé à l'enseignement sur la douleur, et il a été démontré que les étudiants en médecine vétérinaire recevaient de deux à cinq fois plus d'éducation sur la douleur que les étudiants en sciences de la santé (Watt-Watson et coll., 2009). De plus, le contenu éducatif n'intègre généralement pas les aspects biologiques aux facteurs psychosociaux qui contribuent à l'expérience de la douleur (Wideman et coll., 2019b).
Personne ne comprenait comment je pouvais avoir de la douleur sans blessure, y compris mon médecin de famille. Une fois que j'ai commencé à consulter des experts dans le domaine de la douleur chronique, je suis devenu mieux à même de me renseigner sur ma situation. On vit beaucoup moins de stress lorsqu'on comprend ce qui arrive à son corps et pourquoi. Je pense que l'éducation sur la douleur est essentielle.
Le Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada (CRMCC) a officiellement reconnu la médecine de la douleur comme une surspécialité en 2010 et a maintenant établi des normes de formation dans ce domaine (CRMCC, 2018). Actuellement, sept universités canadiennes se sont vues accréditer par le CRMCC un programme de résidence en médecine de la douleurNote de bas de page 3 de deux ans, le premier de ces programmes ayant été offert par l'Université Western en 2014 (Johnston, 2014). D'autres développements récents vont aussi améliorer la compréhension fondamentale de la douleur et de ses répercussions. En 2019, l'Association des 17 facultés de médecine du Canada a reçu du financement pour élaborer un programme d'études pour les futurs médecins sur le diagnostic, la prévention et le traitement de la douleur. De même, l'Association canadienne des écoles de sciences infirmières, l'Association des facultés de pharmacie du Canada et l'Association canadienne pour la formation en travail social ont récemment lancé un programme de formation interprofessionnelle de trois ans pour d'autres professionnels. L'Association internationale pour l'étude de la douleur a créé des programmes d'études multidimensionnels et largement disponibles pour les professionnels de la santé, qui sont subdivisés en programmes d'études de base et complémentaires spécifiques à certaines professions de la santé (IASP, 2018a). En dépit de ces développements, il reste un besoin évident de programmes d'études sur la douleur et de ressources plus standards et largement disponibles dans toutes les professions de la santé.
L'éducation et la formation en équipe permettent des soins multidisciplinaires collaboratifs
La gestion efficace de la douleur peut être complexe et implique souvent un éventail de modalités de traitement et d'approches qui dépassent l'expertise d'une profession en particulier. Toutefois, les étudiants de programmes des sciences de la santé ont peu d'expériences d'apprentissage en collaboration.
Il a été démontré que les approches d'éducation interprofessionnelle aident à équilibrer la socialisation au sein d'une même profession tout en apprenant à comprendre les forces des autres professions et à travailler avec elles. De plus, ceci aide à réduire le développement d'idées fausses et la stigmatisation (Peter et Watt-Watson, 2008; Watt-Watson et coll., 2009; NASEM, 2019).
Un sondage mené à la grandeur du Canada a révélé le besoin d'offrir plus de possibilités qui favorisent la collaboration interprofessionnelle, les soins multidisciplinaires et la formation en matière d'options non pharmacologiques (CADTH, 2018d). Plusieurs organisations ont élaboré des programmes de formation interprofessionnelle (IASP, 2018a) et il existe de nombreux excellents modèles qui favorisent la pratique en collaboration (NASEM, 2019). Par exemple, un modèle de formation au Québec fait appel à des physiothérapeutes pour former des médecins résidents (CADTH, 2018d). Il convient de souligner aussi le programme d'études Interfaculty Pain de l'Université de Toronto, un modèle de formation de trois jours reconnu mondialement avant l'obtention de l'autorisation d'exercerNote de bas de page 4. Le programme utilise une série de modalités d'enseignement qui se concentrent sur la recherche actuelle, la compréhension de la douleur et la pratique clinique. Il a été démontré que ce programme introduisait des changements positifs dans les connaissances et les croyances des étudiants. (Watt-Watson et coll., 2004; Hunter et coll., 2008; Watt-Watson et coll., 2017; Murphy et coll., 2018). Le programme étudie actuellement la meilleure façon de diffuser le modèle à d'autres établissements canadiens. D'autres modèles moins intensifs comprennent North American Pain School (Réseau québécois de la recherche sur la douleur)Note de bas de page 5 et le Connaught Summer Institute in Pain (Université de Toronto)Note de bas de page 6.
Possibilités de perfectionnement professionnel et de soutien clinique qui renforcent les compétences en matière de douleur
Le perfectionnement professionnel permet aux professionnels de la santé d'acquérir sur une base continue les compétences dont ils ont besoin pour dispenser des soins. Il s'agit souvent d'un apprentissage axé sur l'expérience et la pratique, sur les problèmes sous-jacents et les solutions, et plus susceptible d'être axé sur le patient, la collaboration et le travail en équipe. Divers modèles se sont avérés efficaces pour améliorer les connaissances et les attitudes dans différentes professions de la santé (Peter et Watt-Watson, 2008). L'apprentissage est amélioré lorsque les patients sont impliqués dans le développement, la prestation et les résultats et lorsque l'apprentissage est axé sur la pratique plutôt que sur la théorie (Thompson et coll., 2018). Le paysage actuel au Canada comporte de nombreux exemples de pratiques prometteuses, notamment les suivantes :
- Ateliers intensifs de plusieurs jours comprenant des séances interactives, des tables rondes et des exposés comme le programme de soutien à la pratique pour les omnipraticiens en Colombie-Britannique et des ateliers cliniques dirigés par Pain BCNote de bas de page 7;
- Modules de formation en ligne et ressources électroniques qui s'appuient sur les programmes d'études de base liés à la douleur, comme le programme en ligne sur la douleur pédiatrique de SickKidsNote de bas de page 8, le cours de base en ligne sur la douleur de Pain BC et le cadre d'application clinique du traitement de la douleur musculosquelettique (Curtin University, Australie)Note de bas de page 9;
- Certification spécialisée en douleur qui reconnaît le perfectionnement avancé des compétences, comme le Programme de spécialité clinique de l'Association canadienne de physiothérapieNote de bas de page 10 et le certificat d'études supérieures en gestion de la douleur de l'Université de l'AlbertaNote de bas de page 11;
- des programmes de mentorat qui jumellent les mentorés avec des professionnels de la douleur chevronnés, comme les programmes de mentorat sur la douleur de l'Association canadienne de physiothérapieNote de bas de page 12, le programme Medical Mentoring for Addictions and Pain Network et le programme Pharmacist Mentoring in Addictions and Pain ProgramNote de bas de page 13.
Des plateformes interprofessionnelles et des communautés de pratique peuvent améliorer l'accès aux soins spécialisés
Reconnaissant l'importance des approches multidisciplinaires et de la collaboration, particulièrement pour les professionnels de la santé dans les collectivités rurales, éloignées et nordiques, des plateformes numériques et en ligne novatrices ont été lancées pour relier différents types de d'intervenants ayant l'expertise nécessaire en matière de douleur. Ceci a amélioré l'accès aux soins spécialisés pour les patients souffrant de douleur chronique. Ces modèles ce sont appuyés sur des réussites initiales pour graduellement s'étendre à d'autres juridictions administratives au Canada.
Je sais que beaucoup de gens vivent avec des douleurs chroniques, mais trouver du soutien, qu'il soit physique, psychologique ou lié à la santé, demeure très difficile, et je ne comprends pas pourquoi il doit en être ainsi. Même si j'ai reçu des soins remarquables pour traiter ma douleur, j'ai toujours senti que je n'avais personne à qui parler, à part ma famille qui comprenait vraiment ce que je vivais. J'aurais pu avoir avantage à parler à d'autres personnes qui vivent avec des douleurs chroniques et qui auraient pu me donner des conseils utiles ou même juste me prêter une oreille attentive.
- Le projet ECHONote de bas de page 14 (Extension for Community Healthcare Outcomes) relie les professionnels de la santé des collectivités locales à des spécialistes de diverses professions et, dans certains cas, des représentants des patients, par vidéoconférence, pour donner de la formation et renforcer la capacité de prestation de soins spécialisés et complexes. Il y a plus de 15 projets ECHO en Ontario – trois sont axés sur la douleur, y compris la douleur chronique et la gestion des opioïdes (University Health Network), la douleur pédiatrique (SickKids), et la douleur chronique et la gérance des opioïdes dans le Nord (St. Joseph's Care Group). Bien que les projets canadiens ECHO aient commencé en Ontario, d'autres ont récemment vu le jour au Québec, en Saskatchewan et en Colombie-Britannique.
- Le service Champlain BASE™ eConsultNote de bas de page 15 améliore l'accès aux soins spécialisés pour les patients souffrant de douleur chronique en facilitant la communication électronique sécurisée entre les professionnels de la santé et les spécialistes de la gestion de la douleur. Les évaluations ont démontré que les participants qui utilisent eConsult ont des niveaux de satisfaction plus élevés, une plus grande collégialité, une confiance accrue et un meilleur suivi des patients (Liddy et coll., 2019). Les prochaines étapes comprennent l'élargissement du service à l'échelle de l'Ontario et la possibilité d'établir des liens avec d'autres provinces comme le Manitoba, le Québec, Terre-Neuve-et-Labrador et plusieurs organismes nationaux représentant les collectivités du Nord canadien.
- Le réseau Atlantics Mentorship Network - Pain and Addiction (AMN-P&A)Note de bas de page 16 est une communauté de pratique qui relie directement des mentorés à plus de 200 spécialistes de la douleur et de la toxicomanie par le biais de petits groupes sur des forums d'échange en ligne et par courriel pour discuter de cas et recevoir diverses formations. Il s'agit du plus grand réseau de fournisseurs de services de traitement de la douleur et des dépendances au Canada (CADTH, 2018d).
Une sensibilisation et une éducation accrues du public au sujet de la douleur amélioreraient la prévention et les soins
Les efforts de sensibilisation constituent une stratégie de plus en plus courante pour aider à prévenir et à gérer les problèmes de santé aigus et chroniques. Ils visent à mieux harmoniser les lignes directrices cliniques fondées sur des données probantes avec les croyances largement répandues tout en abordant les questions de stigmatisation et de discrimination. Ces campagnes entraînent des changements dans les connaissances et les attitudes au sujet des problèmes de santé ainsi que des changements dans les comportements et les modes de vie. Ceci peut entraîner des changements positifs en termes de prévention des affections et de l'utilisation des soins de santé (Buchbinder et coll., 2008; Waddell et coll., 2017b).
À l'échelle provinciale et nationale, des organisations s'efforcent d'offrir de l'éducation, de la sensibilisation et du soutien en ce qui concerne l'expérience de vivre avec de la douleur chronique (p. ex., Pain BC, l'Association québécoise de la douleur chronique, Chronic Pain Association of Canada) et des organisations qui s'intéressent à des problèmes particuliers liés à la douleur chronique (p. ex., la Société de l'arthrite). Il existe également plusieurs réseaux nationaux axés sur la douleur (p. ex., Solutions for Kids in Pain, National ME/FM Action Network,, Société canadienne de la douleur) et des outils conçus pour les environnements cliniques (p.ex., autogestion) qui pourraient être utilisés pour l'éducation et la sensibilisation du public. Il serait donc extrêmement utile de coordonner les activités et de prendre appui sur les leçons tirées des efforts existants pour assurer une approche unifiée et uniforme en matière de sensibilisation et d'éducation concernant la douleur au Canada. Cette approche devrait viser de multiples populations, et divers contextes comme les écoles, les milieux de travail, les établissements de soins de santé et les foyers.
Les activités d'application des connaissances élaborées pour la douleur offrent des exemples de modèles novateurs pour traduire les résultats de la recherche dans les milieux de pratique et accroître la sensibilisation à la douleur
Lorsque j'étais jeune adulte, j'ai été confronté à la stigmatisation, non seulement par mes pairs et le système de santé, mais aussi au sein système d'éducation. Il semblait immensément difficile pour les enseignants de comprendre que je pouvais bien me porter un jour, mais que je devais lutter le lendemain avec des niveaux de douleur accrus. Mon apparence de personne souriante et au rire facile a été utilisée contre moi, comme preuve que j'inventais ma douleur et cherchais une attention particulière. Il est arrivé à de nombreuses reprises que l'obtention d'un diplôme d'études secondaires me semblait impossible en raison du manque de soutien et de compréhension.
Il y a plusieurs exemples d'activités au Canada qui visent à améliorer la santé des enfants en traduisant les connaissances en pratique. Certaines activités sont de nature plus ciblée et comportent des outils en ligne. L'initiative Pain in Child Health Initiative (PICH) de l'Hospital for Sick Children a récemment créé PICH2GONote de bas de page 17, une version mobile dynamique pour les étudiants visant à améliorer la sensibilisation et la gestion de la douleur. (Bhandri et coll., 2019). De même, l'Université de l'Alberta a mis au point des outils d'aide parentale, y compris des vidéos, des infographies et des livres électroniques. Ces outils visent à réduire la douleur causée par des interventions (p. ex., la douleur liée à la vaccination), et à améliorer la gestion des affections infantiles courantes accompagnées de douleur de même que la gestion de la douleur chronique. Le livre électronique Learning to Live with Chronic PainNote de bas de page 18 raconte les expériences d'une famille qui doit composer avec de la douleur chronique et la façon dont elle a appris à la gérer et à s'y adapter. Le livre A Journey to Learn about PainNote de bas de page 19, est une autre ressource qui présente les processus neurophysiologiques de la vie avec de la douleur en racontant à l'aide d'illustrations l'histoire d'une série de personnages qui trouvent de l'information sur la douleur et comment la gérer (Reis et coll., 2018).
D'autres applications visent davantage le grand public, comme le réseau nouvellement annoncé Solutions for Kids in Pain (SKIP) et la campagne sur les médias sociaux #ItDoesntHavetoHurt.).Note de bas de page 20 Cette dernière est une série d'activités novatrices qui mettent l'accent sur l'élaboration, la mise en œuvre et l'évaluation de campagnes de médias sociaux de marque. Ces activités sont conçues pour présenter directement aux parents et aux familles des résultats de recherche et des outils sur les pratiques exemplaires. De même, SKIPNote de bas de page 21 est un réseau de mobilisation des connaissances axé sur une meilleure gestion de la douleur chez les enfants, basé à l'Université Dalhousie et codirigé par Children's Healthcare Canada. Il vise à renforcer les capacités et à combler l'écart entre les pratiques de traitement actuelles et les données probantes disponibles dans les établissements de santé du Canada. De plus, le réseau SKIP réunit des chercheurs en douleur pédiatrique, des organisations d'utilisateurs des connaissances en première ligne, des patients et des fournisseurs de soins. Les objectifs sont d'évaluer et de comprendre les besoins des utilisateurs, d'améliorer l'accès aux outils de gestion de la douleur et d'accroître la compréhension par le public de la douleur chez les enfants et ses conséquencesNote de bas de page 1.
Section 3 : Résumé
La formation préalable à l'autorisation d'exercer et le perfectionnement professionnel continu doivent mieux intégrer dans les programmes d'études un apprentissage suffisant qui porte précisément sur la douleur. Ceci permettrait d'acquérir aux professionnels de la santé les connaissances et les compétences nécessaires pour prévenir et traiter la douleur. Ceci permettrait aussi une transformation culturelle essentielle pour mieux soutenir les actions de lutte contre la douleur au Canada. La réduction des disparités dans les programmes d'études grâce à la mise en commun des ressources d'apprentissage issus de différentes disciplines, de concert avec l'amélioration de l'assurance de la qualité des programmes de formation, contribueraient à favoriser une éducation de meilleure qualité. Il existe plusieurs exemples qui intègrent les personnes vivant avec de la douleur dans la conception, la prestation et l'évaluation des innovations en éducation. Ceci permet un passage de la théorie à la pratique, tout en mettant l'accent sur la formation et la collaboration interprofessionnelles. De même, certains intervenants commencent à mettre en œuvre des campagnes de sensibilisation plus générales dans certains secteurs de compétence et pour des populations particulières. En outre, des efforts de mobilisation des connaissances sont en cours pour accélérer la conversion des données probantes de la recherche en pratiques. Actuellement, la plupart des études se penchent sur les indicateurs de connaissance et de satisfaction des praticiens; peu s'intéressent à savoir si les améliorations des connaissances mènent aussi à de meilleurs soins et à de meilleurs résultats pour les patients. Il y a peu d'études qui examinent la portée, la diffusion et la mise en œuvre soutenue des efforts de sensibilisation. Il est clair qu'il faut une meilleure coordination entre les juridictions administratives et les disciplines de la santé. De plus, les efforts futurs doivent être fondés sur des approches anti-oppression qui tiennent compte des traumatismes et des différents besoins sociaux et culturels.
Section 4 : Recherche sur la douleur au Canada
À l'échelle mondiale, la recherche sur la douleur est axée sur les mécanismes de base, l'épidémiologie, les caractéristiques cliniques, les principes de gestion et les modèles de prestation de services de santé pour traiter la douleur. Le paysage de la recherche sur la douleur au Canada est ancré dans cet écosystème de recherche international, tout en ayant ses propres forces et défis. Par exemple, le Canada est un chef de file mondial en recherche biomédicale axée sur les mécanismes fondamentaux de la douleur (Conseil des académies canadiennes, 2012), particulièrement dans des domaines comme la génétique de la douleur et les différences de sexe en physiologie et en pathophysiologie de la douleur (Sorge et coll., 2015). Pourtant, il reste beaucoup de travail à faire pour comprendre les aspects essentiels de la douleur comme par exemples ce qui régit la transition d'une douleur aiguë à chronique et comment des évènements dans la petite enfance peuvent mener à de la douleur chronique à l'âge adulte. D'avantage de travail est aussi requis pour traduire les découvertes et les connaissances mécanistiques en éducation et en thérapies sûres et efficaces qui peuvent être offertes de façon rentable aux personnes qui en ont besoin. Compte tenu de l'ampleur et de la portée du programme de recherche sur la douleur, il est important de déterminer les priorités de recherche où les Canadiens peuvent continuer d'exceller et de tirer parti des forces de leurs programmes existants. Ceci tout en veillant à ce que les activités d'application des connaissances facilitent une meilleure intégration de la recherche sur la douleur chronique, de l'éducation et de la pratique clinique.
La recherche de premier plan exige des réseaux nationaux, une infrastructure et du soutien
Entre 2013-14 et 2017-18, les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) ont investi plus de 88 millions de dollars dans la recherche concernant la douleur dans les domaines tels que le développement de nouveaux analgésiques et des outils pour aider les fournisseurs de soins de santé à offrir des traitements plus personnalisés. L'IRSC s'est également engagé à investir 25 millions de dollars, dont 12.5 millions de dollars de l'IRSC et 12.5 millions de dollars d'un partenaire externe, afin de financer un vaste réseau multidisciplinaire de recherche sur la douleur dans le cadre de leur Stratégie de recherche axée sur le patient (SRAP) de 2016 à 2021. La SRAP des IRSC - Réseau sur la douleur chroniqueNote de bas de page 22 (CPN) est une collaboration nationale de patients, de chercheurs, de professionnels de la santé, d'éducateurs, de l'industrie et du gouvernement qui travaillent à orienter de nouvelles recherches sur la douleur chronique, à former des chercheurs et des cliniciens et à traduire les connaissances en lignes directrices et en politiques. Les patients sont engagés en tant que partenaires, travaillant avec des chercheurs et des professionnels de la santé pour améliorer les résultats pour la santé, déterminer de nouveaux traitements et offrir un système de santé plus efficace aux Canadiens.
En plus d'appuyer la communication et la collaboration entre les intervenants du domaine de la douleur, le RCD appuie des projets de recherche individuels sur des sujets liés à la douleur pédiatrique chronique, chez les personnes âgées et chez les populations autochtones. D'autres projets portent sur la santé mentale et autres comorbidités (p. ex., obésité, insomnie), les cibles thérapeutiques, les mécanismes de la douleur, les biomarqueurs, les modes d'évaluation et les interventions personnalisées. Le réseau soutient également l'infrastructure favorisant une meilleure recherche, y compris la coordination des essais multicentriques, et l'établissement d'un registre de personnes vivant avec la douleur chronique comprenant des indicateurs communs et des mesures de résultats.
Le Canada dispose d'une base solide pour un programme national de recherche sur la douleur
En 2016, les IRSC ont réuni 13 de leurs instituts ayant un intérêt commun pour la douleur afin de réfléchir à ce que les organismes subventionnaires pourraient faire pour mieux stimuler la recherche sur la douleur. Le résultat a été de réunir plus de 125 chercheurs, cliniciens, patients et décideurs de partout au Canada, aux États-Unis et au Royaume-Uni, afin de cerner les possibilités, d'élaborer un programme de recherche sur la douleur et d'encourager de nouvelles collaborations et initiatives (IRSC, 2016). La discussion a donné lieu à une courte liste de domaines de recherche liés à deux grands thèmes (tableau 3) : (1) traduire la recherche fondamentale en applications cliniques; et (2) personnaliser la médecine de la douleur. L'accent a été mis en particulier sur l'importance des partenariats entre les chercheurs, les cliniciens, les personnes vivant avec de la douleur et les décideurs.
Tableau 3 : Programme de recherche sur la douleur chronique établi à partir du Sommet sur la douleur tenu par les IRSC
Traduire la recherche fondamentale sur la douleur en nouvelles cibles pour de nouveaux diagnostics et traitements
- Mesure : La recherche est nécessaire pour améliorer l'évaluation de la douleur, la réponse au traitement et l'application de la recherche fondamentale aux soins des patients. Cela comprend les biomarqueurs qui ne sont pas nécessairement des marqueurs de la douleur, mais aussi de la vulnérabilité ou de la résilience.
- Phénotypage : Il y a différents niveaux de phénotypage (stratification) et il faut faire plus de recherche pour mieux comprendre comment prévoir le risque de douleur chronique ou la protection contre celle-ci.
- Différences entre les sexes : Nécessité d'acquérir des connaissances sur les différences entre les sexes dans la neurobiologie de la nociception et de la douleur.
- Méthodes pharmacologiques, physiques et psychologiques : Il faut mener des recherches sur les interactions entre ces méthodes tout en tenant compte de variables complexes (p. ex., les effets de la méditation en combinaison avec la pharmacothérapie pour la gestion de la douleur).
Médecine personnalisée de la douleur
- Fragmentation des soins : La fragmentation des soins est une question importante en plus de l'incidence des transitions entre les secteurs et les systèmes de soins. Les soins ne sont nulle part plus fragmentés que chez les personnes souffrant de douleur chronique. Il faut davantage de recherche sur ce problème et les solutions possibles.
- La douleur tout au long de la vie : Il faut mener des recherches sur les événements précoces de la vie et leur incidence sur la douleur aiguë et chronique tout au long du cycle de vie et pendant les soins de fin de vie.
- Le sexe, l'accès aux soins et la réponse au traitement : De nombreuses personnes vivant avec de la douleur sont des femmes, mais il y a beaucoup de préjugés associés à la douleur chez les hommes également. Il est important de comprendre le rôle du genre dans l'accès aux soins, les interactions patient- clinicien et le traitement.
- Peuples autochtones : La recherche est nécessaire pour comprendre et mettre en œuvre des modèles de soins holistiques de la douleur chronique à l'aide d'une approche à double perspective. De plus, il faut mieux comprendre comment ces modèles peuvent compléter les interventions pharmacologiques et non pharmacologiques.
Les personnes vivant avec de la douleur chronique doivent être des partenaires égaux de la recherche
La mobilisation des patients produit de nombreux résultats utiles au processus de recherche et améliore la faisabilité, l'acceptabilité, la rigueur et la pertinence (Forsythe et coll., 2019). Ainsi, le Canada est en train de devenir un chef de file dans la participation des patients à l'entreprise de recherche sur la douleur, couvrant l'éventail complet incluant l'établissement des priorités de recherche, de l'examen éthique et par les pairs, l'exécution de la recherche et l'application des connaissances. Par exemple, depuis 2017, la Société canadienne de la douleur a officiellement accrédité ses réunions scientifiques annuelles pour inclure les personnes vivant avec de la douleurNote de bas de page 23. En plus de la SRAP des IRSC – Réseau sur la douleur chronique mentionné ci-dessus, plusieurs projets au Canada ont utilisé un processus d'établissement des priorités de recherche qui réunit les patients, les membres de la famille et les cliniciens en tant que partenaires égaux.Note de bas de page 24 (Birnie et coll., 2019; Fitzcharles et coll., 2017; Poulin et coll., 2018). Chacun de ces projets met en évidence d'importantes priorités axées sur les patients et axées sur :
- l'amélioration des connaissances et des compétences en matière de douleur chronique;
- la prévention de la douleur chronique et la réduction des symptômes connexes;
- la compréhension des répercussions de la douleur chronique;
- l'amélioration du traitement de la douleur chronique axé sur le patient;
- l'amélioration de l'accès aux soins pour la douleur chronique et leur coordination;
- la compréhension de l'interaction de la douleur avec d'autres comorbidités.
Section 4 : Résumé
Il existe au Canada une base solide pour une action nationale en matière de recherche sur la douleur chronique. Des organismes nationaux de financement de la recherche, des organismes et des réseaux de recherche et de défense des intérêts, ainsi que des équipes de recherche individuelles, dont certaines travaillent avec des personnes souffrant de douleur chronique, ont travaillé à définir des orientations claires pour un futur programme de recherche. Néanmoins, il y a peu de recherches sur la façon de surveiller la qualité et l'efficacité de notre système de santé pour traiter la douleur chronique. La plupart des investissements dans la recherche convergent dans les sciences fondamentales ou les essais cliniques. Souvent, la recherche sur les différentes options de traitement n'évalue pas si les avantages prévus pour les patients et la société sont atteints. En outre, il y a des lacunes importantes dans la recherche sur la façon d'adapter des traitements particuliers aux individus (médecine personnalisée). La plupart des recherches font appel à des données agrégées sous forme de moyennes pour des groupes, ce qui peut mal se prêter à une application individualisée. Il faut un changement de paradigme qui permet de tenir compte de la variabilité entre les individus et de déterminer quels patients sont les plus et les moins susceptibles de bénéficier d'un traitement particulier (ou d'une combinaison de traitements).
Section 5 : Action nationale et internationale contre la douleur
Des travaux préparatoires sont en cours au Canada en vue d'une stratégie nationale de lutte contre la douleur
En 2011, les intervenants dans le domaine de la douleur ont demandé aux gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux d'élaborer une approche coordonnée au Canada en se dotant d'une stratégie nationale sur la douleur. La stratégie était axée sur de multiples fronts (tableau 4), y compris l'accès aux soins, la sensibilisation et l'éducation, la recherche et la surveillance continue de la douleur (Lynch, 2011; Canadian Pain Coalition & Canadian Pain Society , 2011).
Depuis, plusieurs initiatives ont été mises en œuvre dans le but d'expliquer comment établir une stratégie au Canada. En 2017, le Forum sur la santé de McMaster Health Forum a organisé un dialogue avec des intervenants de partout au Canada sur l'élaboration et l'avancement d'une stratégie nationale sur la douleur (Wilson et coll., 2017). Les participants ont convenu que les réactions à la crise des surdoses de drogues ont eu des conséquences imprévues et créé de l'incertitude chez les personnes vivant avec de la douleur chronique. Ils ont également souligné le manque d'outils disponibles pour soutenir une gestion efficace de la douleur, le manque de leadership au niveau politique et le besoin de créer un organisme de coordination national (Waddell et coll., 2017a, 2017b).
Il est urgent que les décideurs, les professionnels de la santé et les patients adoptent une stratégie nationale sur la douleur afin de fournir des services efficaces de gestion de la douleur à tous les Canadiens qui en ont besoin.
La même année, la Société de l'arthrite a tenu un symposium de deux jours sur la douleur qui portait sur l'amélioration de la recherche, de la gestion, des politiques et de la stratégie. Les participants sont parvenus à un consensus sur l'importance d'accroître la sensibilisation à la douleur en tant que problème distinct, d'appuyer la recherche, de créer des réseaux nationaux, de coordonner les efforts, et d'inclure la voix des patients. Les résultats soulignent également les priorités pour les politiques et stratégies futures sur la douleur au Canada, qui comprennent la mobilisation et l'autonomisation des patients, le développement de la recherche et de mesure surveillance, l'établissement de normes de soins et l'amélioration de l'éducation (Société de l'arthrite, 2017).
De même, en 2018, lors du Forum sur la douleur chronique de l'Académie canadienne des sciences de la santé (ACSS), plus de 120 participants ont conclu que les priorités clés du Canada comprennent les suivantes :
- améliorer les connaissances sur les causes, la physiologie et l'expérience de la douleur, y compris la schématisation des réalités actuelles des personnes vivant avec de la douleur et de celles qui la traitent;
- dresser un portrait plus complet des coûts socioéconomiques de la douleur au Canada;
- permettre une meilleure application des connaissances de la recherche et des pratiques liées à la douleur;
- schématiser la gamme complète de traitements et de solutions fondés sur des données probantes pour la douleur.
(ACSS, 2018)
Bien que j'aie la chance de consulter périodiquement un spécialiste de la douleur, je n'ai pas accès à une clinique multidisciplinaire de la douleur où des services clés, comme la physiothérapie et la psychologie, sont fournis. Beaucoup de patients de ma communauté ont encore moins (ou pas du tout) accès à un spécialiste de la douleur et en souffrent indûment. Ils ne savent pas vers qui se tourner.
En même temps, le Canadian Pain Care Forum (CPCF) travaille à coordonner et à concentrer les efforts des organisations de partout au Canada qui ont un intérêt et un désir à améliorer les politiques publiques nationales et/ou provinciales sur les soins de la douleur. Ce forum ouvert comprend des organismes sans but lucratif de sensibilisation et de défense des droits des patients et des consommateurs, des associations de professionnels de la santé, des organismes de politiques, des organismes de services médicaux, des centres universitaires de santé et de sciences, l'application de la loi, et des entreprises de produits pharmaceutiques et médicaux. Ils se réunissent tous les trimestres et reçoivent l'appui de l'Institut Michael G DeGroote Institute for Pain Reasearch and Care et du National Pain Center à l'Université McMaster.
En mai 2018, le CPCF a procédé à une mise à jour pour la stratégie canadienne sur la douleur qui a été communiquée aux cadres des organisations de ses 80 membres à l'échelle du pays, y compris Santé Canada. La proposition est un plan audacieux, mais réalisable, visant à améliorer la prévention et le traitement de la douleur chronique au Canada et, ce faisant, à aider à remédier la crise des opioïdes. La proposition décrit une approche globale comprenant quatre éléments pour régler le problème et propose des jalons d'un an, trois ans et cinq ans, en mettant l'accent sur les gains rapides au cours de la première année pour donner de l'élan (tableau 4).
Tableau 4 : Éléments proposés par le Canadian Pain Care Forum pour une stratégie canadienne sur la douleur
Meilleurs soins
- Améliorer la gestion de la douleur chronique en soins primaires
- Créer ou élargir des équipes interdisciplinaires de soins spécialisés tout au long du cycle de vie
Meilleure prévention/enseignement
- Réduire l'impact de la douleur chronique et de ses séquelles (y compris les problèmes de consommation d'opioïdes) une fois qu'elle est apparue
- Sensibiliser et éduquer le public, les employeurs, et les futurs professionnels de la santé pour produire un changement sociétal à long terme
Meilleure recherche/mise en œuvre
- Améliorer la capacité de recherche exhaustive sur la douleur du Canada pour refléter l'ampleur du problème
- Diagnostiquer les causes des nouveaux défis, mettre à l'essai des innovations pour s'attaquer aux causes et intensifier les efforts fructueux
Améliorer la coordination
- Créer un organisme national de coordination pour la prévention et la prise en charge de la douleur chronique
- Tirer parti des leçons tirées d'initiatives comme le Partenariat canadien contre le cancer et la Commission de la santé mentale du Canada
Un leadership et une coordination à l'échelle nationale amplifieraient les efforts provinciaux et territoriaux
Je pense que le Groupe de travail sera en mesure de promouvoir un niveau de sensibilisation à la douleur chronique qui n'a jamais été vu auparavant. Je pense que la sensibilisation à la douleur chronique atteint le même niveau de sensibilisation que celui qu'ont reçu des affections comme les troubles mentaux et le cancer du sein.
Les provinces et les territoires du Canada ont mis en œuvre leurs propres stratégies et mesures (tableau 5) dans le but d'améliorer les résultats du traitement de la douleur dans leur administration respective. Bien que l'on ait beaucoup mis l'accent sur la santé mentale, les troubles liés à la consommation de substances et la prescription d'opioïdes, certaines activités portent plus particulièrement sur la douleur chronique. Les caractéristiques communes à ces activités sont les suivantes :
- Exercices d'analyse de l'environnement conçus pour cartographier les services et cerner les pratiques exemplaires;
- Stratégie et orientation provinciales de haut niveau;
- Création de réseaux;
- Soutien aux programmes d'autogestion et aux cliniques multidisciplinaires;
- Élaboration de lignes directrices cliniques;
- Programmes de surveillance des ordonnances;
- Soutien d'activités éducatives pour les patients et les professionnels de la santé.
Administration | Stratégies et actions |
---|---|
Colombie-Britannique |
|
Alberta |
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Saskatchewan |
|
Manitoba |
|
Ontario |
|
Québec |
|
Nouveau-Brunswick |
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Nouvelle-Écosse |
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Île-du-Prince-Édouard |
|
Terre-Neuve-et-Labrador |
|
Nunavut |
|
Territoires du Nord-Ouest |
|
Yukon |
|
Les stratégies de lutte contre la douleur existante offrent des leçons à retenir
La douleur chronique est une affection débilitante et invalidante qui est silencieuse, épisodique, variable, et imprévisible et qui exige un niveau de conscience sociale qui ne stigmatise pas et n'exclut pas les personnes qui vivent une douleur chronique.
Des organisations et des juridictions administratives partout dans le monde ont pris des mesures pour s'attaquer au problème de la douleur chronique (tableau 6). Les efforts internationaux portent collectivement sur plusieurs éléments clés :
- La douleur doit être considérée et gérée comme un problème de santé publique, compte tenu de sa prévalence, des facteurs biopsychosociaux qui y contribuent et de la nécessité d'une action coordonnée à l'échelle mondiale.
- Des méthodes et des outils d'évaluation efficaces et efficients sont un pilier clé de toute stratégie, car ils peuvent être utilisés pour éclairer le cheminement clinique approprié pour une personne donnée et faire en sorte qu'elle participe à ses soins.
- Les modèles de soins de la douleur devraient être une voie flexible à l'intérieur de laquelle les personnes reçoivent des services dédiés qui reflètent leur expérience de la douleur et progressent dans le cheminement des soins selon leurs besoins particuliers.
- Il devrait y avoir des programmes d'éducation sur la douleur améliorés et accessibles pour le grand public ainsi que pour les professionnels de la santé.
- La création de systèmes de collecte de données à l'échelle nationale devrait être utilisée pour alimenter un programme de recherche proactif et un système axé sur l'assurance de la qualité, où des interventions et des services de soins efficaces fondés sur des données probantes peuvent être définis, mis en œuvre et évalués.
Tableau 6 : Actions internationales liées à la douleur
États-Unis
- Patient Protection and Affordable Care Act en 2010
- Rapport en 2011 de l'Institute of Medicine sur l'amélioration de l'éducation, des soins et de la recherche sur la douleur.
- En 2016, mise en œuvre d'une stratégie nationale sur la douleur visant les priorités suivantes :
- Recherche populationnelle
- Prévention et soins
- Disparités
- Prestation de services et paiement
- Éducation et formation professionnelles
- Éducation du public et communication
- En 2017, on a mis sur pied le Pain Management Best Practices Inter-Agency Task Force afin de formuler des recommandations pour combler les lacunes dans la gestion de la douleur chronique et aiguë.
- Une stratégie fédérale de recherche est en cours d'élaboration pour cerner les lacunes dans les domaines de recherche, orienter les initiatives et les programmes fédéraux et mettre en évidence les thématiques qui devraient être explorés dans des études futures.
- 2019 – Rapport du Pain Management Best Practices Inter-Agency Task Force douleur: mises à jour, lacunes, incohérences et recommandations.
Australie
- Sommet national en 2010 pour établir un cadre de référence pour améliorer la gestion de la douleur.
- 2011 –Annonce d'une stratégie nationale sur la douleur.
- 2011 – Établissement de Painaustralia pour mettre en œuvre la stratégie nationale.
- 2019 – Publication du plan d'action stratégique national pour la gestion de la douleur, qui énonce de nouveaux objectifs et de nouvelles mesures pour 2018-2021, axés sur ce qui suit :
- La douleur comme priorité nationale en santé publique.
- Des consommateurs, soignants et collectivités habilités.
- Des professionnels de la santé bien informés et compétents et la prestation de soins.
- Accès en temps opportun aux meilleures pratiques de gestion de la douleur axées sur le client.
- Les résultats en matière de gestion de la douleur sont améliorés et évalués de façon continue.
- Stratégie nationale de recherche.
- Amélioration des stratégies de prévention et d'intervention précoce.
- Soutien aux personnes vivant avec la douleur pour qu'elles participent au marché du travail et à la collectivité.
Autres actions internationales
AngleterreNote de bas de page 36
- Vérification nationale sur la douleur.
- Rapport annuel 2009 du médecin hygiéniste en chef - chapitre consacré à la douleur.
JordanieNote de bas de page 37
- Initiative de la Jordanie pour la gestion de la douleur.
MalaisieNote de bas de page 38
- La douleur comme cinquième signe vital.
NorvègeNote de bas de page 39
- Lignes directrices nationales pour l'évaluation de la douleur.
PortugalNote de bas de page 40
- Programme national de gestion de la douleur.
Pays de GallesNote de bas de page 41
- Conçu pour les personnes souffrant de maladies chroniques : Directives sur la définition des services et la mise en œuvre, douleur chronique bénigne.
Section 5 : Résumé
Il existe une base solide pour une action nationale en ce qui concerne la douleur chronique. Les intervenants ont énoncé les principales priorités d'une stratégie nationale et plusieurs provinces mènent des efforts pour mieux coordonner et soutenir la gestion optimale de la douleur chronique au sein de leur juridiction administrative. La douleur chronique semble être à l'agenda de nombreux programmes provinciaux. Des exercices de cartographie qui décrivent les services disponibles sont en cours. Il existe de plus en plus de données probantes en ce qui concerne les pratiques exemplaires en matière d'intervention et ce, à partir d'initiatives canadiennes ou ailleurs dans le monde qui visent à améliorer la gestion de la douleur chronique. La définition d'une stratégie nationale future devra comporter des éléments ayant trait à la sensibilisation et à l'éducation, aux normes et lignes directrices en matière de traitement, aux stratégies d'autogestion, aux services multidisciplinaires et spécialisés en matière de douleur, à la communication et à la collaboration entre les juridictions administratives, ainsi qu'à la recherche. Les différents intervenants y compris les personnes qui souffrent de douleur chronique ont jeté les jalons d'une telle stratégie et le gouvernement fédéral doit clairement jouer un rôle de chef de file pour concerter ces efforts en vue d'une approche optimale pour tous les Canadiens.
Section 6 : Conclusions et prochaines étapes
Il est clair que la douleur chronique est un problème de santé publique important qui touche les personnes, les familles, le système de santé et la société. Les personnes vivant avec de la douleur ont un accès limité aux services dont elles ont besoin et font souvent face à de la stigmatisation et à des souffrances indues. Cette stigmatisation recoupe souvent d'autres formes de discrimination liées à la pauvreté, au logement, à l'instabilité de l'emploi, à la maladie mentale, à la race et à l'origine ethnique, et autres facteurs. Les Canadiens vivant avec de la douleur et leurs proches méritent tout simplement mieux.
Il y a actuellement toute une gamme d'approches et de récits de réussite canadiennes qui peuvent servir de fondement à des changements grandement attendus. De plus, l'occasion est excellente pour tirer parti des données existantes au Canada et améliorer nos approches, notamment en examinant plus en profondeur le contexte social lié à la douleur chronique. Les modèles cliniques multidisciplinaires et interprofessionnels de même que les approches d'éducation éprouvées en sciences de la santé offrent des pratiques prometteuses qui pourraient être plus largement utilisées. Les politiques et les efforts des provinces et des territoires pourraient être mieux coordonnés afin de réduire le dédoublement des initiatives, de maximiser l'efficacité et la mise en œuvre de pratiques exemplaires, et de veiller à ce que les personnes vivant avec de la douleur reçoivent le même niveau de soins partout au Canada. Il est impératif de se doter d'un programme canadien de recherche sur la douleur ainsi que de l'infrastructure nécessaire pour soutenir les changements cliniques et systémiques futurs. En fin de compte, il faut du leadership et des ressources pour amplifier, élargir et accélérer les activités actuelles, coordonner les interventions et combler les lacunes de même que les inégalités actuelles. D'autres initiatives à l'échelle internationale nous enseigne que ce genre de leadership et d'investissement est susceptible de produire des rendements importants tant sur le plan humain qu'économique.
Le Groupe de travail canadien sur la douleur tient à remercier toutes les personnes qui ont participé à cette évaluation initiale de la situation de la douleur chronique au Canada. Des domaines prioritaires pour le changement ont été cernés, mais notre travail n'est pas terminé. En se fondant sur ce rapport, le Groupe de travail continuera d'examiner les données probantes et de mener d'autres consultations auprès des intervenants de partout au Canada. Au cours de la prochaine phase de notre travail, nous approfondirons les domaines abordés dans le présent rapport afin de cerner les pratiques exemplaires et prometteuses de même que les éléments d'une approche améliorée en ce qui a trait à la prévention et la prise en charge de la douleur chronique au Canada. Nous continuerons de sensibiliser la population à la problématique de la douleur chronique et d'établir des relations/réseaux pour des changements partout au pays. Ensemble, en amorçant une volonté de changement, nous pouvons améliorer la santé et le bien-être des Canadiens.
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Notes de bas de page
- Note de bas de page 1
-
Nous utilisons le terme peuples autochtones pour représenter les populations des Premières Nations, des Métis et des Inuits partout au Canada.
- Note de bas de page 2
-
https://cadth.ca/fr/acces-et-disponibilite-du-traitement-non-pharmacologique-de-la-douleur-chronique-non-cancereuse-au
- Note de bas de page 3
-
http://www.royalcollege.ca/rcsite/documents/arps/pain-medicine-f
- Note de bas de page 4
-
http://sites.utoronto.ca/pain/research/interfaculty-curriculum.html
- Note de bas de page 5
-
https://northamericanpainschool.com/fr/
- Note de bas de page 6
-
http://sites.utoronto.ca/pain/connaught/pain-across-the-ages.html
- Note de bas de page 7
-
https://www.painbc.ca/health-professionals/education
- Note de bas de page 8
-
http://www.sickkids.ca/pain-centre/Health-care-Professionals/Online%20Pain%20Curriculum/index.html
- Note de bas de page 9
-
https://www.musculoskeletalframework.net/
- Note de bas de page 10
-
https://physiotherapy.ca/fr/clinical-specialist-program
- Note de bas de page 11
-
https://www.ualberta.ca/rehabilitation/professional-development/certificate-programs/certificate-in-pain-management
- Note de bas de page 12
-
https://physiotherapy.ca/fr/blog/rep-26-programme-de-mentorat-une-initiative-de-la-division-science-de-la-douleur
- Note de bas de page 13
-
https://www.ontariofamilyphysicians.ca/education/collaborative-mentoring-networks/medical-mentoring-for-addictions-and-pain-mmap
- Note de bas de page 14
-
https://superhub.echoontario.ca/
- Note de bas de page 15
-
https://www.champlainbaseeconsult.com/publications
- Note de bas de page 16
-
https://www.atlanticmentorship.com/
- Note de bas de page 17
-
http://www.sickkids.ca/PICH/activities/PICH2GO/index.html
- Note de bas de page 18
-
http://www.echokt.ca/do-you-know-a-child-dealing-with-chronic-pain/
- Note de bas de page 19
-
https://www.yumpu.com/en/document/read/61002254/a-journey-to-learn-about-pain
- Note de bas de page 20
-
https://itdoesnthavetohurt.ca
- Note de bas de page 21
-
https://www.kidsinpain.ca/
- Note de bas de page 22
-
http://cpn-rdc.ca/
- Note de bas de page 23
-
https://patientsincluded.org/
- Note de bas de page 24
-
http://www.jla.nihr.ac.uk/
- Note de bas de page 25
-
https://www.hqontario.ca/portals/0/documents/evidence/quality-standards/qs-opioid-acute-pain-clinician-guide-fr.pdf
- Note de bas de page 26
-
https://www.hqontario.ca/Am%C3%A9liorer-les-soins-gr%C3%A2ce-aux-donn%C3%A9es-probantes/Normes-de-qualit%C3%A9/Voir-toutes-les-normes-de-qualit%C3%A9/Lombalgie
- Note de bas de page 27
-
https://www.hqontario.ca/Am%C3%A9liorer-les-soins-gr%C3%A2ce-aux-donn%C3%A9es-probantes/Normes-de-qualit%C3%A9/Voir-toutes-les-normes-de-qualit%C3%A9/Prescription-dopio%C3%AFdes-pour-soulager-la-douleur-chronique
- Note de bas de page 28
-
http://www.health.gov.on.ca/en/pro/programs/ecfa/action/primary/lower_back.aspx
- Note de bas de page 29
-
https://www.inesss.qc.ca/fileadmin/doc/AETMIS/Rapports/Autres/2006_04_res_fr.pdf
- Note de bas de page 30
-
http://www.msss.gouv.qc.ca/professionnels/maladies-chroniques/douleur-chronique/
- Note de bas de page 31
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http://publications.msss.gouv.qc.ca/msss/document-002016/
- Note de bas de page 32
-
https://www.princeedwardisland.ca/en/publication/pei-action-plan-prevent-and-mitigate-opioid-overdoses-and-deaths
- Note de bas de page 33
-
https://www.health.gov.nl.ca/health/chronicdisease/improving_health_my_way.html
- Note de bas de page 34
-
https://www.health.gov.nl.ca/health/chronicdisease/Improving_Health_Together.pdf
- Note de bas de page 35
-
https://www.canada.ca/fr/sante-canada/services/dependance-aux-drogues/consommation-problematique-medicaments-ordonnance/opioides/repondre-crise-opioides-canada/fonds-urgence-traitement/nunavut-2018.html
- Note de bas de page 36
-
https://www.britishpainsociety.org/static/uploads/resources/files/members_articles_npa_2012_1.pdf et https://s3.amazonaws.com/rdcms-iasp/files/production/public/Content/NavigationMenu/Advocacy/InternationalPainSummit/England_EffortsToImprovePain.pdf
- Note de bas de page 37
-
https://s3.amazonaws.com/rdcms-iasp/files/production/public/Content/NavigationMenu/Advocacy/InternationalPainSummit/JordanReport.pdf
- Note de bas de page 38
-
http://www.moh.gov.my/moh/resources/Penerbitan/Program%20Bebas%20Kesakitan/Garis%20Panduan/
2_in_1_P5VS_Guideline_2018_(3rd_Ed.)_.pdf - Note de bas de page 39
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https://s3.amazonaws.com/rdcms-iasp/files/production/public/Content/NavigationMenu/Advocacy/InternationalPainSummit/Norway-NationalGuidelinesForEvaluatingPain.pdf
- Note de bas de page 40
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https://s3.amazonaws.com/rdcms-iasp/files/production/public/Content/NavigationMenu/Advocacy/InternationalPainSummit/PortugalPainStrategy.pdf
- Note de bas de page 41
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https://s3.amazonaws.com/rdcms-iasp/files/production/public/Content/NavigationMenu/Advocacy/InternationalPainSummit/WalesDirectives.pdf
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