Décision d’homologation RD2024-01, Diflufénican, SC500, SC600 et SC617

Le 21 février 2024
ISSN : 1925-0924 (version PDF)
Numéro de catalogue : H113-25/2024-1F-PDF (version PDF)

Table des matières

Sous le régime de la Loi sur les produits antiparasitaires, il faut évaluer les pesticides avant que leur vente ou leur utilisation soient autorisées au Canada, afin de déterminer si, lorsqu'ils sont utilisés conformément au mode d'emploi figurant sur l'étiquette, ils ne présentent pas de risques inacceptables pour les humains ou l'environnement, et s'ils ont une valeur. L'évaluation préalable à la commercialisation prend en considération les données et les renseignementsNote de bas de page 1 provenant des titulaires d'homologation, des rapports scientifiques publiés, d'autres gouvernements et d'organismes de réglementation étrangers, et elle tient compte, le cas échéant, des commentaires formulés durant les consultations publiques. Santé Canada se fonde sur les méthodes d'évaluation des risques conformes aux normes internationales actuelles et sur des approches et des politiques de gestion des risques. On trouvera davantage de précisions sur les exigences législatives, l'évaluation des risques et la démarche de gestion des risques dans la section Approche de l'évaluation du présent document.

Énoncé de décisionNote de bas de page 2 d'homologation concernant le diflufénican, SC500, SC600 et SC617

L'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire (ARLA) de Santé Canada accorde, en vertu de la Loi sur les produits antiparasitaires, l'homologation à des fins de vente et d'utilisation du diflufénican de qualité technique et de SC500, qui contient le principe actif de qualité technique diflufénican, pour la lutte contre les mauvaises herbes en présemis et en prélevée dans les cultures de maïs et le soja; de SC600, qui contient les principes actifs de qualité technique diflufénican et métribuzine, pour la lutte contre les mauvaises herbes en présemis et en prélevée dans les cultures de soja; de SC617, qui contient les principes actifs de qualité technique diflufénican et isoxaflutole, pour la lutte contre les mauvaises herbes en présemis et en prélevée dans les champs maïs de grande culture.

Le Projet de décision d'homologation PRD2023-07, Diflufénican, SC500, SC600 et SC617, qui présente l'évaluation détaillée des renseignements soumis à l'appui de cette homologation, a fait l'objet d'une période de consultation de 45 jours qui a pris fin le 17 septembre 2023.L'évaluation a permis de conclure que, dans les conditions d'utilisation approuvées, les risques pour la santé et l'environnement et la valeur des produits antiparasitaires sont acceptables. Santé Canada a reçu des commentaires écrits concernant l'évaluation des risques au cours de la période de consultation publique menée conformément à l'article 28 de la Loi sur les produits antiparasitaires. Les commentaires écrits provenaient d'un simple citoyen et du titulaire.

Commentaires et réponses

Commentaire sur l'utilisation de produits de remplacement naturels et l'élimination des essais sur les animaux

Un commentateur a préconisé l'utilisation de produits naturels pour remplacer les herbicides chimiques, ainsi que l'élimination des essais sur les animaux.

Réponse de Santé Canada

Santé Canada a besoin de renseignements sur les effets toxiques potentiels des pesticides afin de déterminer les dangers et les risques pour la santé humaine et l'environnement liés à l'exposition aux pesticides. Règle générale, les renseignements sur la toxicité comprennent, entre autres, des données provenant d'essais sur les animaux produites par les fabricants de pesticides.

Ces études sont menées conformément aux protocoles d'essai internationaux, qui comportent des exigences visant à protéger le bien-être des animaux de laboratoire. L'approbation de tous les pesticides au Canada, y compris les pesticides non classiques (p. ex. le bicarbonate de soude et l'acide citrique) et les pesticides microbiens (p. ex. Bacillus thuringiensis), s'appuie sur un tel processus.

Bien que les essais de toxicité sur les animaux jouent actuellement un rôle essentiel dans l'évaluation des risques pour la santé humaine et l'environnement liés à l'exposition aux pesticides, Santé Canada est favorable à la réduction des essais inutiles sur les animaux lorsque cela est scientifiquement justifié. À cette fin, Santé Canada examine les requêtes des fabricants de pesticides demandant d'être exemptés des exigences concernant des études spécifiques sur les animaux ou que l'on tienne compte des produits de remplacement validés ne faisant pas appel à des essais sur animaux dans l'évaluation des risques, lorsque cela est faisable et scientifiquement justifié. En 2013, Santé Canada a publié un document d'orientation à l'intention de l'industrie concernant l'exemption relative aux études de toxicité aiguë chez les mammifères.

Par ailleurs, Santé Canada participe activement à diverses activités internationales visant à réduire les essais sur les animaux tout en assurant la protection de la santé humaine et de l'environnement. Il est important de poursuivre l'analyse des tendances et des approches utilisées ailleurs dans le monde afin d'assurer l'harmonisation continue des pratiques. Bien qu'il existe des solutions de remplacement n'utilisant pas d'animaux pour certains types d'essais (p. ex. les tests d'irritation in vitro), l'expérimentation animale continue de permettre une évaluation plus précise d'une variété d'autres effets potentiels, et, plus important encore, d'obtenir des renseignements concernant les doses auxquelles les effets peuvent se produire, de sorte que ces renseignements puissent être utilisés pour protéger la santé humaine et l'environnement.

En ce qui concerne la suggestion du commentateur concernant l'utilisation de produits non classiques, il est important que les producteurs aient accès à une variété d'outils adaptés à leurs besoins et pouvant faciliter une stratégie de lutte antiparasitaire intégrée qui tient compte de l'efficacité des pesticides, de la réduction de leur utilisation et de la gestion de la résistance. Tant les produits classiques que non classiques dont les risques sont jugés acceptables peuvent être homologués pour répondre à de tels besoins.

Commentaire concernant deux critères d'effet : la dose sans effet nocif observé (DSENO) et la dose minimale entraînant un effet nocif observé (DMENO)

Le titulaire affirme que les changements dans la formation de la méthémoglobine (MetHb) aux doses faibles dans les études de toxicité par le régime alimentaire de 14 et 28 jours chez le rat, menées avec le métabolite qui se forme dans les graines de soja, BCS-BT38895, devraient être considérés comme étant non nocifs. Le titulaire ajoute que les doses sans effet nocif observé (DSENO) dans l'étude de 14 jours devraient être respectivement de 17,0 et de 16,3 mg/kg p.c./j pour les mâles et les femelles, tandis que les DSENO de l'étude de 28 jours devraient être respectivement de 4,68 et de 3,97 mg/kg p.c./j pour les mâles et les femelles. À l'appui de son raisonnement, le titulaire déclare que les concentrations de MetHb dans le sang sont jugées tolérables et sûres chez l'humain jusqu'à 5 %, et que les concentrations inférieures à 1 % observées dans les groupes ayant reçu une faible dose dans les deux études ne devraient pas être considérées comme néfastes. Le titulaire ajoute que les changements dans la formation de MetHb se sont produits en l'absence de changements dans le poids des organes (la rate), d'effets sur le nombre de globules rouges ou la concentration d'hémoglobine et de signes de formation de corps de Heinz.

Réponse de Santé Canada

Pour déterminer le caractère néfaste de l'augmentation de la MetHb dans le sang, dans les études de toxicité de 14 et 28 jours chez le rat avec le BCS-BT38895, Santé Canada a tenu compte de la signification statistique des changements, de l'ampleur des valeurs et des changements de la méthémoglobine par rapport aux témoins, de la faible variabilité au sein des groupes témoins et des changements connexes dans le système hématopoïétique. Santé Canada a également consulté les lignes directrices de la Réunion conjointe FAO/OMS sur les résidus de pesticides (JMPR) au sujet de l'établissement des doses aiguës de référence pour les pesticides (Solecki, et al., 2005Note de bas de page 3), qui indique ce qui suit [traduction] : « Pour ce qui est de l'exposition aiguë aux xénobiotiques induisant la méthémoglobine, (…) une augmentation statistiquement significative par rapport aux témoins chez les rongeurs est considérée comme un critère prudent pour l'établissement d'une dose aiguë de référence (DARf). » L'utilisation d'une approche prudente dans l'évocation des études chez les rongeurs a été jugée justifiée en raison des différences de capacité de réduction (activité de la méthémoglobine réductase) entre les rongeurs et les humains. Les espèces ayant une capacité de réduction plus élevée, comme le rat, présentent également des concentrations de fond de MetHb plus faibles. Cependant, une augmentation statistiquement significative de la MetHb indique que la capacité de réduction résiduelle a été dépassée. Par conséquent, comme les rats ont une capacité de réduction plus élevée que les humains (Smith, 1996Note de bas de page 4), un changement qui entraîne une concentration de MetHb < 1 % chez le rat est susceptible de donner chez l'humain une concentration plus grande, voire supérieure au niveau tolérable.

La justification présentée par le titulaire est insuffisante pour tenir compte des différences physiologiques connues entre les rats et les humains en ce qui concerne la sensibilité. Les augmentations de la MetHb étaient statistiquement significatives à toutes les doses et la variabilité intragroupe était très faible, sans chevauchement notable entre les résultats des groupes ayant reçu des doses différentes, une augmentation du poids de la rate et une hématopoïèse extramédullaire ayant été observées chez les mâles à la dose d'essai la plus faible dans l'étude de 28 jours. Par conséquent, le poids de la preuve permettait de conclure que le métabolite du diflufénican BCS-BT38895 avait provoqué une méthémoglobinémie chez les rats aux doses d'essai les plus faibles. En l'absence de preuves scientifiques claires et convaincantes à l'appui de la justification présentée, Santé Canada maintient que les doses les plus faibles ayant fait l'objet d'essais dans les études de 14 jours et de 28 jours constituent les doses minimales entraînant un effet nocif observé (DMENO), et qu'aucune DSENO n'a pu être établie.

Commentaire concernant le métabolite aniline qui se forme dans les graines de soja, BCS-BT38895

Le titulaire s'est dit préoccupé par le fait que Santé Canada considère que le métabolite aniline qui se forme dans les graines de soja, le BCS-BT38895, est potentiellement cancérogène pour les rats mâles. Il a déclaré que, dans les études sur l'aniline utilisées par Santé Canada pour représenter le métabolite aniline qui se forme dans les graines de soja (et qui utilisaient plutôt la p-chloroaniline), des tumeurs sont apparues uniquement chez les mâles et uniquement chez les rats, alors qu'elles ne sont pas apparues chez la souris. En outre, les tumeurs observées dans les études sur la p-chloroaniline se sont produites à des doses auxquelles des changements non néoplasiques ont également été observés, changements qui n'ont pas été observés dans les études de 14 et de 28 jours sur le métabolite BCS-BT38895. Le titulaire s'est également dit préoccupé des différences physiologiques dans l'activité de la méthémoglobine réductase entre les espèces, notant que l'activité la plus élevée avait été constatée chez les souris et les hamsters, suivis par les rats et les humains, et que les chiens avaient manifesté l'activité la plus faible. Le titulaire a affirmé que ces différences entre espèces peuvent expliquer le fait que des tumeurs se soient formées chez le rat, mais pas chez la souris.

Réponse de Santé Canada

Comme la toxicité du métabolite BCS-BT38895 n'a été évaluée que dans le cadre d'études de toxicité par le régime alimentaire à court terme (14 et 28 jours) chez une seule espèce, dans laquelle on ne s'attendait pas à des changements prénéoplasiques, la base de données ne contient pas suffisamment de renseignements pour déterminer le potentiel cancérogène du BCS-BT38895. On a donc déterminé que pour estimer au mieux la cancérogénicité, il fallait utiliser un composé analogue, la p-chloroaniline, qui a été choisie en raison de sa similitude structurelle avec le métabolite BT38895.

Les commentaires présentés par le titulaire sont insuffisants pour dissiper les préoccupations qui persistent concernant la cancérogénicité potentielle du métabolite aniline se formant dans les graines de soja. En l'absence de preuves scientifiques claires et convaincantes à l'appui du commentaire fourni, Santé Canada maintient que l'utilisation de la p-chloroaniline, comme composé analogue au métabolite BCS-BT38895, est scientifiquement justifiée et constitue une approche qui assure la protection de la santé.

Commentaires sur l'inclusion de l'augmentation du poids de la rate chez les mâles à la dose faible

Le titulaire s'est opposé à l'inclusion, dans le tableau 5 du projet de décision d'homologation, de l'augmentation du poids de la rate chez les mâles à la dose faible issue de l'étude de toxicité par le régime alimentaire de 28 jours chez le rat avec le métabolite BCS-BT38895. Selon lui, l'augmentation du poids est de faible ampleur et il souligne que le changement n'est pas statistiquement significatif par rapport aux témoins et que tout changement macroscopique ou histopathologique associé est léger ou inexistant. Le titulaire considère que les changements sont adaptatifs et affirme que les résultats devraient être supprimés du tableau dans la décision d'homologation finale.

Réponse de Santé Canada

Après avoir examiné les changements à la dose faible dans l'étude par le régime alimentaire de 28 jours chez le rat avec le BCS-BT38895, Santé Canada a inclus l'augmentation du poids de la rate chez les mâles ayant reçu la dose faible comme résultat lié au traitement, en se fondant sur l'augmentation de 10 % du poids relatif de la rate et en tenant compte d'autres résultats liés au traitement, notamment l'augmentation des réticulocytes et des concentrations de MetHb et l'augmentation de l'hématopoïèse extramédullaire chez les mâles, et l'augmentation des concentrations de MetHb et de réticulocytes chez les femelles. Bien que le titulaire considère que ces changements sont adaptatifs et non néfastes, comme nous l'avons mentionné dans la réponse aux commentaires concernant l'augmentation de la MetHb ci-dessus, en raison de l'activité de la méthémoglobine réductase plus grande chez les rats que chez les humains, Santé Canada juge que cette approche prudente est justifiée pour déterminer la sécurité pour les humains.

Commentaire concernant la DSENO dans l'étude de toxicité par le régime alimentaire de 90 jours chez la souris menée avec le diflufénican

Le titulaire a indiqué que la DSENO dans l'étude de 90 jours sur la toxicité du diflufénican par le régime alimentaire chez la souris devrait être la dose minimale d'essai. Santé Canada a établi la DMENO chez les souris mâles à la dose minimale d'essai en se fondant sur la diminution du poids corporel et de la prise de poids corporel dans tous les groupes de mâles traités.

À la dose minimale d'essai, le poids corporel et la prise de poids corporel des souris mâles ont respectivement diminué de 10 % et de 11 % par rapport au groupe témoin traité simultanément. Le titulaire considère que la diminution du poids corporel à la dose la plus faible est adaptative et que, comme il n'y a pas eu d'autre résultat lié au traitement à cette dose, la DSENO devrait être la dose minimale d'essai.

Réponse de Santé Canada

Santé Canada considère qu'une diminution du poids corporel de 5 % par rapport aux témoins dans les études de toxicité est un effet néfasteNote de bas de page 5,Note de bas de page 6. Par conséquent, l'établissement de la DMENO chez les mâles dans l'étude de toxicité de 90 jours chez la souris à la dose la plus faible a été jugé approprié.

Commentaire sur l'inclusion de la diminution du poids du thymus dans les effets liés au traitement

Le titulaire s'est opposé à l'inclusion, dans le tableau 5 du projet de décision d'homologation, de la diminution du poids du thymus comme effet lié au traitement constaté dans l'étude toxicologique de détermination des doses par le régime alimentaire de 28 jours chez le rat avec le diflufénican. Le titulaire a déclaré que le rapport d'étude [traduction] « indique que des diminutions du poids (absolu et relatif) du thymus n'ont été observées à la dose moyenne que chez les femelles et que le poids absolu du thymus n'a diminué à la dose élevée que chez les femelles ».

Réponse de Santé Canada

L'étude de toxicité par le régime alimentaire de 28 jours chez le rat était une étude complémentaire de détermination des doses. Cette étude a été considérée comme complémentaire en raison du faible nombre d'animaux examinés et des limites de l'étude, notamment l'absence d'examen histopathologique des tissus. Ainsi, de légers changements dans le poids des organes ont été considérés comme étant liés au traitement, car il n'y avait pas d'examen histopathologique du thymus qui aurait confirmé que ce changement n'était pas néfaste. Cette constatation de l'étude de détermination des doses n'a pas eu d'effet sur l'établissement des valeurs toxicologiques de référence pour le diflufénican.

Autres renseignements

Les données d'essai confidentielles pertinentes (citées dans le PRD2023-07, Diflufénican, SC500, SC600 et SC617) sur lesquelles la décision est fondée peuvent être consultées par le public, sur demande, dans la salle de lecture de l'ARLA. Pour des précisions, veuillez communiquer avec le Service de renseignements sur la lutte antiparasitaire de l'ARLA.

Toute personne peut déposer un avis d'oppositionNote de bas de page 7 à l'égard de la présente décision d'homologation dans les 60 jours suivant la date de sa publication. Pour en savoir davantage sur les motifs d'opposition (qui doivent être fondés sur des données scientifiques), veuillez consulter la section pesticides du site Canada.ca (pour demander l'examen d'une décision) ou communiquer avec le Service de renseignements sur la lutte antiparasitaire.

Approche de l'évaluation

Cadre législatif

Selon le paragraphe 4(1) de la Loi sur les produits antiparasitaires, le ministre de la Santé a comme objectif premier de prévenir les risques inacceptables pour les individus et l'environnement que présente l'utilisation des produits antiparasitaires.

Comme le mentionne le préambule de la Loi, il est dans l'intérêt du Canada de continuer à poursuivre les objectifs du système fédéral de réglementation, par l'instauration d'un système d'homologation national reposant sur une base scientifique et abordant la question des risques sanitaires et environnementaux et de la valeur avant et après l'homologation, tout en réglementant les produits antiparasitaires au Canada; et d'homologuer pour utilisation seulement les produits antiparasitaires de risque et de valeur acceptables lorsqu'il est démontré que leur utilisation est efficace et qu'il est établi que les conditions d'homologation préviennent toute conséquence inacceptable pour la santé humaine et l'environnement.

Pour l'application de la Loi au sens du paragraphe 2(2), les risques sanitaires ou environnementaux d'un produit antiparasitaire sont acceptables, s'il existe une certitude raisonnable qu'aucun dommage à la santé humaine, aux générations futures ou à l'environnement ne résultera de l'exposition au produit ou de l'utilisation de celui-ci, compte tenu des conditions d'homologation.

Le risque sanitaire, le risque environnemental et la valeur sont définis ainsi au paragraphe 2(1) de la Loi :

Lors de l'évaluation des risques sanitaires et environnementaux d'un pesticide et de la détermination de l'acceptabilité de ces risques, le paragraphe 19(2) de la Loi sur les produits antiparasitaires prévoit que Santé Canada adopte une approche qui s'appuie sur une base scientifique. Cette approche tient compte de la toxicité et du degré d'exposition pour une caractérisation complète du risque.

Les évaluations préalables à la commercialisation sont fondées sur un ensemble prescrit de données scientifiques que le demandeur de l'homologation d'un pesticide doit fournir. Des renseignements supplémentaires provenant de rapports scientifiques publiés, d'autres ministères et d'organismes de réglementation internationaux sont également pris en considérationNote de bas de page 8.

Cadre d'évaluation des risques et de la valeur

Santé Canada applique un vaste ensemble de méthodes scientifiques modernes et utilise des données probantes pour déterminer la nature et l'ampleur des risques que peuvent poser les pesticides. Cette approche permet de protéger la santé humaine et l'environnement par l'application de stratégies de gestion des risques adéquates et efficaces, qui concordent avec les objectifs relatifs au préambule décrits ci-dessus.

L'approche de Santé Canada en matière d'évaluation des risques et de la valeur est énoncée dans le Cadre d'évaluation et de gestion des risques liés aux produits antiparasitairesNote de bas de page 9. En voici les grandes lignes :

i) Évaluation des risques potentiels pour la santé

Pour évaluer et gérer les risques sanitaires potentiels, Santé Canada suit un processus structuré, prévisible et compatible avec les méthodes internationales et le Cadre décisionnel de Santé Canada pour la détermination, l'évaluation et la gestion des risques pour la santéNote de bas de page 10.

L'évaluation des risques potentiels pour la santé commence par un examen du profil toxicologique d'un pesticide afin de calculer les doses de référence auxquelles aucun effet nocif n'est attendu, puis de s'en servir pour évaluer l'exposition prévue. Le cas échéant, on utilise des facteurs d'incertitude pour apporter une protection supplémentaire qui tient compte de la variation de sensibilité observée dans la population humaine et de l'incertitude associée à l'extrapolation aux humains des résultats d'études menées sur des animaux. Dans certaines conditions, la Loi sur les produits antiparasitaires exige l'utilisation d'un autre facteur pour conférer une protection supplémentaire aux femmes enceintes, aux nourrissons et aux enfants. Certains cas particuliers nécessitent d'autres facteurs d'incertitude, pour tenir compte par exemple des lacunes de la base de données. Pour des précisions sur l'application des facteurs d'incertitude, consulter le document SPN2008-01Note de bas de page 11.

Les évaluations servent à estimer les risques potentiels pour la santé de populations définiesNote de bas de page 12 dans des conditions d'exposition précises. Elles sont effectuées dans le contexte des scénarios d'utilisation proposés ou homologués, par exemple l'utilisation d'un pesticide sur une grande culture donnée, à une dose d'application déterminée, et avec des méthodes et des équipements conformes. Les scénarios d'exposition possibles tiennent compte de l'exposition pendant et après l'application de pesticides en milieu professionnel ou résidentiel, de l'exposition par les aliments et l'eau potable, ou encore de l'exposition découlant d'interactions avec des animaux de compagnie traités. La durée d'exposition (de courte, moyenne ou longue durée) et les voies d'exposition (voie orale, inhalation, contact cutané) prévues sont également prises en considération. L'évaluation des risques pour la santé tient également compte des renseignements disponibles sur l'exposition globale et les effets cumulatifs.

ii) Évaluation des risques pour l'environnement

Au moment d'évaluer les risques environnementaux, Santé Canada adopte une méthode structurée par niveau pour établir la probabilité qu'une exposition à un pesticide cause des effets néfastes à l'échelle de l'individu, de la population ou de l'écosystème. On commence par une évaluation préliminaire faisant appel à des méthodes simples, à des scénarios d'exposition prudents et à des paramètres d'effet toxicologique traduisant la plus grande sensibilité, puis, le cas échéant, on procède à une évaluation approfondie qui peut inclure des modèles d'exposition, des données de surveillance, des résultats d'études menées sur le terrain ou en mésocosme, ainsi que des méthodes probabilistes d'évaluation des risques.

L'évaluation environnementale tient compte à la fois de l'exposition (les propriétés chimiques, le devenir et le comportement dans l'environnement, ainsi que les doses et les méthodes d'application) et du danger (les effets toxiques sur les organismes) associés à un pesticide. L'évaluation de l'exposition permet d'examiner le déplacement du pesticide dans le sol, l'eau, les sédiments et l'air, ainsi que son absorption possible par des plantes ou des animaux et son transfert par le réseau trophique. Elle permet également d'examiner la possibilité que le pesticide pénètre dans des compartiments environnementaux sensibles, par exemple les eaux souterraines, les lacs et les cours d'eau, ainsi que la possibilité qu'il soit entraîné dans l'air. L'évaluation du danger consiste à examiner les effets sur un grand nombre d'espèces indicatrices végétales et animales reconnues à l'échelle internationale (les organismes terrestres comprennent des invertébrés, comme les abeilles, les arthropodes utiles et les lombrics, des oiseaux, des mammifères et des plantes; les organismes aquatiques comprennent des invertébrés, des amphibiens, des poissons, des plantes et des algues), ce qui suppose de tenir compte des effets sur la biodiversité et la chaîne alimentaire. Les critères d'effet pour une exposition aiguë ou chronique sont tirés d'études en laboratoire et d'études sur le terrain qui permettent de caractériser la réponse toxique et de déterminer la relation dose-effet d'un pesticide.

La caractérisation des risques pour l'environnement nécessite l'intégration de l'information sur l'exposition du milieu et les effets environnementaux pour cerner les organismes ou les compartiments environnementaux à risque, le cas échéant, ainsi que les incertitudes liées à la caractérisation des risques.

iii) Évaluation de la valeur

Les évaluations de la valeur comportent deux éléments : l'évaluation du rendement du produit antiparasitaire et de ses avantages.

L'évaluation du rendement comporte une évaluation de l'efficacité du pesticide dans la lutte contre l'organisme ciblé et de la possibilité qu'il endommage les cultures hôtes ou les sites sur lesquels il est utilisé. Si l'efficacité d'un pesticide est acceptable, l'évaluation sert à établir les allégations et les instructions appropriées figurant sur l'étiquette ainsi qu'une dose (ou une gamme de doses) d'application efficace, sans être excessive, et qui ne cause pas de dommages inacceptables au site d'utilisation ou à l'organisme/la culture hôte (ni aux hôtes et aux cultures subséquents) dans des conditions normales d'utilisation.

Bien souvent, l'établissement du rendement permet à lui seul de déterminer la valeur du pesticide, de sorte qu'il ne soit plus nécessaire de procéder à une évaluation approfondie ou générale des avantages. Dans certains cas, cependant, l'évaluation approfondie peut être indiquée pour préciser la valeur du produit ou élaborer des options de gestion des risques.

Gestion des risques

Les stratégies de gestion des risques reposent sur les résultats de l'évaluation des risques pour la santé humaine et l'environnement et les résultats de l'évaluation de la valeur. Ces stratégies prévoient des mesures appropriées d'atténuation des risques et sont indispensables pour décider si les risques sanitaires et environnementaux sont acceptables. L'élaboration de telles stratégies se fait selon les conditions d'homologation du pesticide. Les conditions peuvent être liées, entre autres, à l'utilisation (p. ex. les doses, la période, la fréquence et la méthode d'application), à l'équipement de protection individuelle, aux délais d'attente avant la récolte, aux délais de sécurité, aux zones tampons, aux mesures d'atténuation de la dérive de pulvérisation et du ruissellement, de même qu'à la manipulation, la fabrication, le stockage ou la distribution d'un pesticide. Si, pour un pesticide donné, il est impossible d'établir des conditions d'utilisation réalisables avec un risque et une valeur acceptables, l'utilisation du pesticide ne sera pas admissible à l'homologation.

La stratégie de gestion des risques sélectionnée est ensuite mise en œuvre dans le cadre de la décision d'homologation. Les conditions d'homologation des pesticides comprennent l'inscription d'un mode d'emploi juridiquement contraignant sur les étiquettes.

Toute utilisation qui n'est pas conforme au mode d'emploi de l'étiquette ou aux autres conditions précisées constitue une infraction à la Loi sur les produits antiparasitaires. La mise en œuvre des décisions postérieures à la commercialisation suit le cadre énoncé dans la Politique sur la révocation de l'homologation et la modification de l'étiquette à la suite d'une réévaluation et d'un examen spécialNote de bas de page 13.

Après la prise d'une décision, il existe des outils essentiels pour assurer l'acceptabilité continue des risques et de la valeur des pesticides homologués, notamment des activités de contrôle continu comme les évaluations postérieures à la commercialisation, et des activités de suivi et de surveillance, comme la déclaration d'incident.

Notes de bas de page

Note de bas de page 1

Note d'information – Détermination de l'acceptabilité des études pour les évaluations des risques liés aux pesticides.

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Note de bas de page 2

« Énoncé de décision », conformément au paragraphe 28(5) de la Loi sur les produits antiparasitaires.

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Note de bas de page 3

Solecki, R., Davies, L., Dellarco, V., Dewhurst, I., van Raaij, M., et Tritscher, A. 2005. Guidance on setting of acute reference dose (ARfD) for pesticides. Food and Chemical Toxicology, 43(11) : 1 569-1 593. ISSN 0278-6915. https://doi.org/10.1016/j.fct.2005.04.005. Consulté le 3 novembre 2023 à https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0278691505001419.

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Note de bas de page 4

Smith, R.P. 1996. Toxic responses of the blood. In: Klaassen, C.D., éd. Casarett & Doull's Toxicology: The Basic Science of Poisons. 5e édition. New York, NY : McGraw-Hill. p. 335-354.

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Note de bas de page 5

Foran, J.A. 1997. Principles for the selection of doses in chronic rodent bioassays. ILSI Risk Science Working Group on Dose Selection. Environ. Health Perspect. 105(1) : 18-20. doi : 10.1289/ehp.105-1469843. Consulté le 12 décembre 2023 à https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC1469843/?page=2.

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Note de bas de page 6

Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). 2012. Guidance Document 116 on the Conduct and Design of Chronic Toxicity and Carcinogenicity Studies, et lignes directrices connexes nos 451, 452 453; 2e édition. Paris. Consulté le 12 décembre 2023 à https://www.oecd-ilibrary.org/docserver/9789264221475-en.pdf?expires=1702387812&id=id&accname=oid024861&checksum=9F36529D9EDD16810627AF450182D930.

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Note de bas de page 7

Conformément au paragraphe 35(1) de la Loi sur les produits antiparasitaires.

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Note de bas de page 8

Note d'information – Détermination de l'acceptabilité des études pour les évaluations des risques liés aux pesticides.

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Note de bas de page 9

Document d’orientation de l’ARLA, Cadre d’évaluation et de gestion des risques liés aux produits antiparasitaires.

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Note de bas de page 10

Cadre décisionnel de Santé Canada pour la détermination, l'évaluation et la gestion des risques pour la santé – Le 1er août 2000.

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Note de bas de page 11

Document de principes : Utilisation de facteurs d'incertitude et du facteur issu de la Loi sur les produits antiparasitaires dans l'évaluation des risques des pesticides pour la santé humaine.

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Note de bas de page 12

Prise en compte du genre et du sexe dans l'évaluation des risques des pesticides.

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Note de bas de page 13

Directive d'homologation DIR2018-01 de l'ARLA, Politique sur la révocation de l'homologation et la modification de l'étiquette à la suite d'une réévaluation et d'un examen spécial.

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