Utilisation des nouvelles approches méthodologiques d'évaluation des risques

Série de fiches de renseignements : Sujets relatifs aux évaluations des risques des substances en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement (1999) (LCPE)

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Nouvelles approches méthodologiques (NAM)

L'approche traditionnelle de l'évaluation des risques chimiques repose sur des essais de toxicité chez les animaux pour évaluer une gamme d'effets nocifs possibles sur la santé. Toutefois, les études sur des animaux de laboratoire sont coûteuses, prennent du temps et peuvent avoir une pertinence biologique limitée, en plus de présenter des préoccupations éthiques animales. Les nouvelles méthodes d'approche (NAM) constituent une solution de rechange souhaitable aux méthodes traditionnelles d'essai sur les animaux pour les essais de toxicité chimique.

Les NAM sont définies de façon générale comme toute technologie, méthodologie, approche ou combinaison de technologies qui peuvent être utilisées pour remplacer, réduire ou améliorer les essais de toxicité sur les animaux et permettre une priorisation et/ou une évaluation plus rapides ou plus efficaces des produits chimiques. Ces méthodes peuvent comprendre l'utilisation de modèles informatisés (computationnels), d'essais d'organismes entiers modernisées (par exemple les essais sur embryons de poisson-zèbre en tant que modèles pour le critère d'effet chez les mammifères et le critère d'écotoxicité) ou des épreuves faisant appel à des molécules biologiques, à des cellules, à des tissus ou à des organes, ainsi que des démarches de prédiction de l'exposition. Les essais faisant appel à des molécules biologiques peuvent comprendre des études « omiques » indiquant la dose chimique à laquelle les changements moléculaires commencent à se produire.

Les NAM peuvent être utilisées pour améliorer la compréhension des mécanismes qui sous-tendent les effets nocifs et pour déterminer les doses en dessous desquelles des effets ne devraient pas se produire du point de vue de la toxicité humaine ou écologique. Les données générées par les NAM sont de plus en plus utilisées pour fournir de l'information sur les dangers, l'exposition et les risques afin de prioriser les produits chimiques en vue de la prise d'autres mesures et peuvent contribuer au poids de la preuve dans les évaluations des risques des produits chimiques. De plus, les données associées aux NAM peuvent mettre en évidence les domaines où des essais supplémentaires peuvent être nécessaires dans le cadre d'une stratégie d'essais intégrée ou étagée.

Importance des NAM

On déploie des efforts soutenus à l'échelle internationale pour remplacer, réduire ou raffiner l'utilisation des essais classiques de toxicité menés sur des animaux vertébrés. Les données générées par les NAM peuvent être utilisées pour compléter les ensembles de données pris en compte dans les évaluations pour l'environnement et la santé humaine. La nature mécaniste des données générées par les NAM peut améliorer notre compréhension de la façon dont un produit chimique ou un mélange provoque la toxicité. De plus, les NAM peuvent fournir des données plus pertinentes sur le plan humain ou écologique que les essais de toxicité standard effectués sur des animaux. Par exemple, contrairement aux études sur les animaux, les approches fondées sur les cellules et les organes permettent l'utilisation de tissus humains et, par conséquent, les données de toxicité obtenues de ces NAM peuvent être plus pertinentes pour éclairer les évaluations pour la santé humaine.

Les NAM sont particulièrement utiles dans les situations où il y a peu de données, car la production de données peut se faire à l'aide de modèles informatiques, d'essais faisant appel à des cellules ou d'autres approches qui nécessitent moins de ressources et offrent un débit plus élevé (ce qui signifie que plus de données peuvent être générées dans la même période) que les méthodes classiques d'essais de toxicité menés sur des animaux vertébrés. Il a été démontré que les méthodes fondées sur les NAM qui sont utilisées dans les évaluations des risques chimiques menées en vertu de la LCPE protègent autant la santé humaine et l'environnement que les méthodes classiques d'essais menés sur des animaux. Afin de réduire la dépendance à l'égard des essais menés sur des animaux vertébrés tout en maintenant la rigueur scientifique nécessaire pour que les décisions réglementaires continuent de protéger les Canadiens et l'environnement contre les substances nocives, il est important d'intégrer les NAM dans le cadre d'évaluation des risques.

Dans le même ordre d'idées, on a apporté à la LCPE en juin 2023 des modifications qui tiennent compte de la nécessité de remplacer, de réduire ou de raffiner l'utilisation des essais menés sur des animaux vertébrés dans l'évaluation des risques que posent les substances. Des travaux sont en cours à Santé Canada (SC) et à Environnement et Changement climatique Canada (ECCC) en vue de la mise au point et de la mise en œuvre d'une stratégie pour remplacer, réduire ou raffiner les essais menés sur des animaux vertébrés dans le cadre de la LCPE. La stratégie se veut souple, et sa mise en œuvre s'adaptera au fur et à mesure aux sciences et aux technologies qui se feront jour, inclura des échanges continus avec la population du Canada, les partenaires autochtones et les intervenants concernés, et se fera en collaboration avec les partenaires nationaux et internationaux.

Comment le Canada utilise les NAM en vertu de la LCPE

L'un des principaux objectifs du développement, de la validation et de l'utilisation continus des NAM au Canada est de réduire le recours aux animaux pour les essais de toxicité tout en répondant aux besoins en données pour l'évaluation des risques dans la transition vers le remplacement des méthodes d'essai sur les animaux. Depuis de nombreuses années, le gouvernement du Canada détermine activement les domaines où les NAM peuvent appuyer l'évaluation des risques. Il a notamment consulté un organisme consultatif externe, le Comité scientifique sur le Plan de gestion des produits chimiques (PGPC), pour obtenir des conseils sur les considérations relatives à l'intégration des NAM dans le PGPC. Dans le cadre du processus continu d'intégration des NAM aux programmes de réglementation, les scientifiques de SC et ECCC continuent de travailler à l'élaboration, à la normalisation et à la validation des NAM, en déterminant les domaines d'incertitude, ainsi qu'à l'établissement de cadres pour guider l'intégration continue des données des NAM. Ce travail contribue à assurer la confiance dans l'application des NAM à l'évaluation des risques chimiques afin de continuer à protéger la santé humaine et l'environnement. Les NAM sont utilisées dans divers contextes décisionnels (par exemple, examen préalable, établissement des priorités et prise de décisions éclairées en matière d'évaluation des risques) dans le cadre des programmes des substances existantes et des substances nouvelles du Canada en vertu de la LCPE.

Le Programme des substances nouvelles permet l'utilisation de NAM pour répondre aux exigences en matière de renseignements techniques prescrites par le Règlement sur les renseignements concernant les substances nouvelles (substances chimiques et polymères) (voir la section 8.4 du Document d'orientation pour la déclaration et les essais de substances nouvelles : Produits chimiques et polymères). Dans une évaluation des risques chimiques, les données des NAM peuvent être substituées aux données traditionnelles lorsque l'on détermine que la NAM fournit une mesure scientifiquement valide du paramètre à l'étude qui est jugée suffisante aux fins de l'évaluation des risques. Les NAM aux premières étapes de la normalisation et de la validation peuvent être utilisées pour cerner les lacunes dans les données et fournir des renseignements mécanistes dans le cadre d'une approche fondée sur le poids de la preuve.

Pour le Programme des substances existantes, les données générées à partir des approches fondées sur les NAM ont été de plus en plus utilisées pour appuyer le regroupement et les lectures croisées, l'établissement des priorités et l'évaluation du potentiel de risque des substances à données insuffisantes dans le cadre du PGPC. Les NAM qui commencent à être utilisées pour l'établissement des priorités et l'évaluation des substances existantes en vertu de la LCPE sont décrites dans les documents sur l'approche scientifique (DAS). Par exemple, un DAS pour la santé humaine décrit une approche pour convertir une concentration qui cause un effet dans les cellules exposées (bioactivité) à une dose qui devrait causer un effet chez les humains à l'aide de méthodes non animales et de calcul à haut débit. La dose équivalente humaine (ou point de départ) résultante est ensuite comparée à l'estimation de l'exposition humaine pour cette substance chimique, et le ratio entre ces chiffres (c'est-à-dire le ratio de l'exposition bioactive) présente une approche quantitative fondée sur le risque qui peut servir de substitut protecteur en l'absence de données traditionnelles sur les dangers. Il s'agit d'une approche prometteuse pour la priorisation des produits chimiques et l'évaluation préalable qui n'exige pas l'utilisation d'animaux. Sur le plan environnemental, un DAS décrit l'approche de classification du risque écologique (CRE) visant à prioriser les substances organiques (version 2.0, aussi appelée CRE2). L'approche de CRE2 est une approche à haut débit qui intègre les données de diverses NAM avec les données traditionnelles sur les animaux afin de prioriser les substances et de classer le risque écologique potentiel (des renseignements supplémentaires sont disponibles dans la fiche d'information sur l'approche de CRE).

Bien qu'il y ait eu des progrès importants dans l'élaboration et la mise en œuvre de NAM, la science n'a pas encore évolué au point où ces méthodes peuvent remplacer complètement tous les essais menés sur des animaux vertébrés. Par exemple, les essais faisant appel à des cellules et à des tissus peuvent être excellents pour l'évaluation de la toxicité locale (par exemple celle touchant la peau), mais des critères d'effet plus complexes, comme la toxicité pour le développement ou la reproduction ou la cancérogénicité, peuvent être difficiles à évaluer pleinement à l'aide des NAM. Par exemple, une évaluation du processus par lequel les composés sont absorbés et distribués dans tout le corps est un facteur important pour évaluer n'importe quel type de toxicité systémique, et ces processus peuvent être difficiles à saisir avec des NAM cellulaires. De plus, les NAM cellulaires actuellement disponibles peuvent ne pas avoir une couverture biologique complète (c'est-à-dire représentative de tous les tissus) dans le corps humain. Des modèles informatiques améliorés et des NAM tissulaires plus complexes (par exemple, des systèmes microphysiologiques) sont en cours d'élaboration, entre autres stratégies, pour améliorer ces domaines d'incertitude.

Activités internationales pour faire progresser les NAM

SC et ECCC appuient la recherche et les collaborations internationales, et travaillent avec l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et des partenaires internationaux en matière de réglementation afin d'élaborer, de valider et d'utiliser des solutions de rechange aux essais classiques de toxicité menés sur des animaux. Par exemple, SC et ECCC participent à l'élaboration et à la validation de lignes directrices en matière d'essais de toxicité fondés sur les NAM dans le cadre du programme de lignes directrices de l'OCDE pour les essais. Ces lignes directrices d'essai deviennent des normes d'identification des dangers chimiques. De plus, SC et ECCC dirigent l'élaboration et l'harmonisation de méthodes d'évaluation des produits chimiques en utilisant les données scientifiques les plus récentes par l'entremise du Groupe de travail sur l'évaluation des dangers de l'OCDE et y participent. Cela comprend le projet d'études de cas de l'OCDE visant à élaborer des approches intégrées en matière d'essais et d'évaluation (IATA), qui vise à combiner diverses sources d'information, comme les données des NAM et les méthodes d'essai traditionnelles, afin de caractériser le danger chimique. Le Canada codirige également l'initiative Accélérer le rythme de l'évaluation des risques que posent les produits chimiques (ARAPC), une collaboration gouvernementale internationale visant à faciliter l'application de la recherche en éliminant stratégiquement les obstacles et en déterminant les possibilités de faire progresser l'utilisation des NAM dans l'évaluation des risques chimiques. De plus, SC et ECCC participent à divers groupes de travail axés sur l'élaboration de NAM spécifiques [par exemple, le groupe consultatif de l'OCDE sur les essais et l'évaluation des perturbateurs endocriniens, le groupe de travail de l'OCDE sur la neurotoxicité développementale des poissons-zèbres et le groupe consultatif de l'OCDE sur les sciences émergentes en évaluation des produits chimiques [ESCA AG]) (anciennement le comité consultatif élargi sur l'examen préalable moléculaire et la toxicogénomique)].

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2025-03-05