Document d'orientation : Évaluation des répercussions potentielles sur les droits des peuples autochtones
Le 20 juin 2024, la Loi d’exécution du budget (2024) a reçu la sanction royale entraînant ainsi l’entrée en vigueur des modifications à la Loi sur l’évaluation d'impact (LEI). Ces modifications ont été apportées en réponse à la décision de la Cour suprême du Canada sur la constitutionnalité de la LEI. Au cours des prochaines semaines et des prochains mois, ce site Web ainsi que nos procédures, politiques et documents d'orientation seront mis à jour pour tenir compte de ces changements législatifs, au besoin.
Objectif
Ce document fournit des directives sur la méthode à suivre afin de procéder à l'évaluation des répercussions potentiellesNote de bas de page1 sur les droits des peuples autochtonesNote de bas de page2, laquelle est requise dans le cadre d'une évaluation d'impact d'un projet désigné au titre de la Loi sur l'évaluation d'impact (LEI). Pour plus de clarté, ces directives s'appliquent à toutes les évaluations d'impact effectuées en vertu de la LEI, y compris les projets désignés et, notamment, les activités concrètes réglementées en vertu de la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires ou de la Loi sur la Régie canadienne de l'énergie. Les concepts énoncés dans ces directives s'appliquent également aux évaluations des impacts régionales et stratégiques effectuées en vertu de la LEI.
Remerciements
L'Agence d'évaluation d'impact du Canada (l'Agence) aimerait exprimer sa gratitude aux peuples et aux organisations autochtones qui ont participé à des évaluations environnementales fédérales au cours des dernières décennies, et dont les contributions ont été déterminantes dans l'évolution des pratiques fédérales en matière d'évaluation environnementale. Les expériences qu'ont partagées les peuples autochtones et les efforts qu'ils ont investis dans le cadre des évaluations environnementales fédérales ont aidé l'Agence à poursuivre ses efforts en vue d'améliorer continuellement les évaluations fédérales ainsi que les relations entre le gouvernement du Canada et les peuples autochtones. Collectivement, ils ont influencé les concepts abordés dans le présent document d'orientation.
Comment utiliser ce document d'orientation
Ce document d'orientation doit être interprété et utilisé conjointement avec les directives contenues dans les autres sections du présent guide. Plus particulièrement, le lecteur devrait se reporter à la section 3.3, Contexte stratégique : Évaluation des répercussions potentielles sur les droits des peuples autochtones en vertu de la Loi sur l'évaluation d'impact, du Guide du praticien. Le contexte stratégique fournit des renseignements importants sur les principes directeurs sur lesquels on doit se fonder pour appuyer l'interprétation et l'utilisation des orientations d'ordre technique énoncées dans cette section.
Le présent document d'orientation est aussi destiné à être conforme aux directives fournies dans d'autres sections du Guide à l'intention des praticiens. Plus particulièrement, la consultation des peuples autochtones et la collaboration avec ceux-ci sont essentielles à l'évaluation des répercussions sur les droits des peuples autochtones. Des directives sur les processus de consultation des peuples autochtones et de collaboration avec ceux-ci dans le cadre des évaluations d'impact fédérales se trouvent dans les sections suivantes du Guide à l'intention des praticiens :
- 3.1. Contexte stratégique : Participation des Autochtones à l'évaluation d'impact
- 3.2. Document d'orientation : Participation des Autochtones à l'évaluation d'impact
- 3.5. Document d'orientation : Collaboration avec les peuples autochtones dans le cadre de l'évaluation d'impact
Contenu
Le contenu du présent document d'orientation est divisé en trois parties. La partie 1 présente la méthode d'évaluation des répercussions sur les droits des peuples autochtones. La partie 2 décrit les critères qui peuvent être appliqués dans l'analyse pour comprendre et évaluer les répercussions potentielles. La partie 3 met l'accent sur la manière d'élaborer des mesures visant à prévenir ou à atténuer les répercussions négatives, et porte aussi sur le suivi et la surveillance après l'évaluation.
Rôles et responsabilités
L'Agence a pour responsabilité d'effectuer ou de gérer les évaluations d'impact en vertu de la LEI, et de coordonner les consultations avec les groupes autochtones qui peuvent être touchés par la réalisation d'un projet désigné.Note de bas de page3
Une évaluation des répercussions potentielles sur les droits des peuples autochtones exige généralement une coopération entre la collectivité autochtone titulaire de droits, le promoteur du projet désigné, l'Agence, d'autres autorités fédérales, et, dans bien des cas, le gouvernement d'une autre instance. Les rôles et les responsabilités qu'exerce chaque partie peuvent varier d'une évaluation d'impact à l'autre, selon les circonstances.
Si une collectivité autochtone Note de bas de page4 le souhaite, elle devrait mener l'évaluation des répercussions sur ses droits étant donné qu'elle est la mieux placée pour comprendre les répercussions que pourrait avoir le projet sur ses droits et sa relation au paysage. L'Agence travaillerait alors avec la collectivité autochtone à l'évaluation tout en continuant de coordonner le processus avec les autres autorités fédérales et le promoteur du projet, au besoin.
Les autres autorités fédérales ont un rôle important à jouer en communiquant des renseignements ou des connaissances techniques, dans les limites de leur mandat, afin de contribuer à l'évaluation des répercussions potentielles du projet. D'autres ministères fédéraux devraient participer au processus d'évaluation le plus tôt possible afin de contribuer à la détermination rapide des questions et de donner des conseils, dans les limites de leur mandat, sur la méthode d'évaluation, l'évaluation des répercussions potentielles et la définition des mesures d'atténuation et d'accommodement potentielles.
Le promoteur du projet doit fournir des renseignements sur le projet qu'il propose et participer aux discussions à mesure que progresse l'évaluation des répercussions sur les droits, tout au long du processus d'évaluation d'impact. Le promoteur du projet doit mener des études et préparer la notice d'impact prévue dans les Lignes directrices adaptées relatives à l'étude d'impact concernant le projet. Le promoteur est encouragé à travailler en collaboration avec les collectivités autochtones qui pourraient être touchées par la réalisation de ce travail. La participation du promoteur du projet à l'évaluation des répercussions sur les droits, en tant que maître d'œuvre et concepteur, est aussi importante dans la définition des mesures d'atténuation potentielles.
Toutes les parties ont la responsabilité de trouver des moyens d'aborder les préoccupations relatives à la manière dont un projet peut porter atteinte à l'exercice des droits des peuples autochtones.
Dans le cas des évaluations d'impact de projets dont le processus a été remplacé par celui d'une autre instance, en vertu de l'article 31 de la LEI, le présent document d'orientation devrait être utilisé pour mener le processus d'évaluation de l'autre instance, dans la mesure où il est approprié de le faire. L'instance qui procède à l'évaluation d'impact travaillera avec les collectivités autochtones potentiellement touchées afin d'évaluer les répercussions sur leurs droits, et avec l'Agence, au besoin, afin de coordonner les consultations avec les peuples autochtones et la Couronne.
Terminologie
Les principaux termes employés dans l'ensemble du présent document d'orientation sont définis ci-dessous.
Praticien de l'EI : Aux fins du présent document d'orientation, l'expression « praticien de l'évaluation d'impact » (praticien de l'EI) s'entend de toute personne travaillant à l'évaluation des répercussions sur les droits des peuples autochtones. Cela peut comprendre les représentants du gouvernement fédéral, les représentants du gouvernement provincial, les représentants des collectivités autochtones, les promoteurs de projet, les consultants, les membres d'une commission, les membres des comités d'évaluation régionale ou d'autres personnes travaillant à l'évaluation.
Impact : Aux fins du présent document et à moins d'indication contraire, le terme « impact » s'entend des répercussions potentielles que pourrait avoir un projet proposé ou une activité physique.
Voie : La voie des répercussions est une représentation, souvent sous forme de schéma, d'une série de relations de cause à effet entre les éléments analysés, comme les effets, les actions, les extrants ou les résultats.
Droits des peuples autochtones : L'expression « droits des peuples autochtones » et le terme « droits » qui sont employés dans l'ensemble du présent document renvoient aux droits des peuples autochtones du Canada qui sont reconnus et confirmés par l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982, conformément à la Loi sur l'évaluation d'impact. La LEI prévoit que l'évaluation d'impact d'un projet désigné prend en compte un certain nombre d'éléments, notamment « les répercussions que le projet désigné peut avoir sur tout groupe autochtone et les répercussions préjudiciables qu'il peut avoir sur les droits des peuples autochtones du Canada reconnus et confirmés par l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 » (alinéa 22(1)c).)
Partie 1 : Méthode
La présente section fournit des directives sur les étapes à suivre pour procéder à l'évaluation des répercussions potentielles sur les droits des peuples autochtones. Si une collectivité autochtone a élaboré ses propres protocoles en matière de consultation ou sa propre méthode d'évaluation des répercussions sur ses droits, ces directives devraient être adaptées au cas par cas et en collaboration avec la collectivité de manière à respecter ces protocoles et cette méthode.
Une évaluation des répercussions potentielles sur les droits est un projet complexe qui peut varier considérablement. La méthode se veut souple et adaptable au besoin, en fonction du contexte. Chaque évaluation des répercussions sur les droits est unique, étant donné qu'elle est adaptée à chaque groupe autochtone détenteur de droits, à chaque projet, à chaque région ou lieu et à chaque période.
Le processus fédéral d'évaluation d'impact vise à prévoir les effets négatifs potentiels, et il permet aussi de déterminer les effets positifs potentiels, notamment les mesures qui peuvent améliorer les conditions de base sous-jacentes favorisant l'exercice d'un droit. Afin que le processus soit efficace, l'échange de renseignements et la collaboration entre le praticien de l'EI et la collectivité autochtone doivent être continus. Il est important de valider la compréhension et les conclusions tout au long du processus. Chacune des étapes énumérées ci-après contient des sous-étapes, et bon nombre d'entre elles pourraient devoir être répétées.
Aperçu de la méthode
L'évaluation des répercussions sur les droits des peuples autochtones peut être divisée en sept étapes. Chaque étape est décrite en détail dans la section suivante.
Étape 1 : Déterminer et comprendre les droits de la collectivité autochtone
- Déterminer les droits de la collectivité autochtone et collaborer afin de comprendre leur nature et leur contenu. Les peuples autochtones sont les mieux placés pour cerner les répercussions d'un projet sur leurs droits.
Étape 2 : Comprendre le contexte dans lequel s'inscrivent les répercussions sur les droits
- Déterminer les conditions environnementales et socio-économiques qui favorisent l'exercice significatif de ses droits par la collectivité autochtone.
- Comprendre comment les activités antérieures, actuelles et raisonnablement envisageables ont eu ou pourraient avoir une incidence sur les conditions qui favorisent ou limitent l'exercice significatif de ses droits par la collectivité autochtone.
- Déterminer l'importance, pour la collectivité autochtone, des zones ou des lieux précis qui pourraient être touchés par le projet.
Étape 3 : Établir les valeurs et les sujets directeurs (éléments à évaluer)
- Dans le cadre des évaluations biophysiques, ces éléments sont souvent appelés « composantes valorisées ». Les collectivités autochtones peuvent établir un ensemble de valeurs et de sujets prioritaires associés au bien-être de la collectivité, à l'expression culturelle et au moyen privilégié pour exercer leurs droits ancestraux ou issus des traités.
Étape 4 : Déterminer les voies de répercussions découlant du projet
- Déterminer les voies qui vont des activités liées au projet à l'environnement biophysique favorisant l'exercice des droits.
- Établir les autres relations entre le projet et les conditions nécessaires à l'exercice des droits, telles que l'accès aux ressources, leur qualité et leur quantité ou encore l'expérience de l'exercice des droits. Évaluer également les répercussions du projet sur l'exercice d'un droit dans les lieux privilégiés, au cours des périodes privilégiées et selon les moyens privilégiés.
Étape 5 : Évaluer le degré de gravité des répercussions
- Établir des critères clairs, en collaboration avec la collectivité autochtone détentrice de droits, afin de déterminer ce qui constitue un degré de gravité faible, modéré ou élevé.
Étape 6 : Discuter des mesures à prendre pour contrer les répercussions
- En ce qui concerne les répercussions susceptibles de se faire sentir, une discussion itérative et bilatérale est tenue sur les mesures proposées à leur égard.
Étape 7 : Valider les résultats de l'évaluation et en assurer le suivi
Ces étapes peuvent être réexaminées à mesure que progresse le processus d'évaluation d'impact, et l'analyse peut être révisée en fonction des nouveaux renseignements et des discussions continues qui se poursuivent entre toutes les parties.
Étapes de la méthode
La présente section fournit des directives détaillées sur la manière de réaliser chaque étape de l'évaluation des répercussions potentielles sur les droits, en consultation avec la collectivité autochtone potentiellement touchée.
Étape 1 : Déterminer et comprendre les droits de la collectivité autochtone
Protection des connaissances confidentielles
La transparence et la participation du public sont des aspects importants de l'évaluation d'impact. En ce qui a trait aux évaluations d'impact fédérales, les renseignements sont mis à la disposition du public sur le site Internet du Registre canadien d'évaluation d'impact (le Registre), sauf si les renseignements font l'objet d'exceptions valides établies dans la LEI.
Lorsqu'il recueille des renseignements aux fins de l'évaluation des répercussions sur les droits des peuples autochtones, le praticien de l'EI doit vérifier si les renseignements sont déjà accessibles au public; s'ils ne le sont pas, le praticien doit vérifier s'il s'agit de renseignements confidentiels qui doivent être protégés. L'Agence peut fournir des conseils sur la protection des renseignements au cours du processus d'évaluation d'impact.
La première étape pour évaluer la manière dont un projet peut avoir des répercussions sur l'exercice des droits d'une collectivité autochtone en particulier consiste à déterminer et à comprendre les droits que détient cette collectivité.
Afin d'établir une relation respectueuse fondée sur la reconnaissance et la mise en œuvre des droits, le praticien de l'EI doit tout d'abord posséder une connaissance pratique des droits de la collectivité autochtone potentiellement touchée. Le praticien de l'EI devrait commencer par recueillir des renseignements disponibles sur les droits de la collectivité en question; ces renseignements peuvent se trouver dans des documents comme des traités, des accords, des évaluations environnementales ou d'impact antérieures, des dossiers de consultation, des dossiers de recherche ou des déclarations faites par la collectivité. L'Agence encourage également les praticiens de l'EI à établir d'emblée une relation avec chacune des collectivités autochtones potentiellement touchées, si ce n'est pas déjà fait ou si le praticien n'est pas membre d'une de ces collectivités.
De façon à assurer un dialogue respectueux et fondé sur la reconnaissance des droits des peuples autochtones, les renseignements fournis par la collectivité autochtone détentrice de droits au sujet de ses droits et de la manière dont elle les exerce devraient être acceptés par le praticien de l'évaluation d'impact comme étant le fondement du dialogue. Dans certains cas, les droits détenus par une collectivité pourraient être bien compris par toutes les parties. Dans d'autres cas, il pourrait y avoir une incertitude en raison d'un manque d'information, d'interprétations divergentes, du chevauchement des revendications ou d'autres facteurs. S'il y a une incertitude ou un désaccord, il est important de souligner que le processus d'évaluation d'impact n'est pas un processus de détermination des droits. L'objectif est de déterminer et de comprendre les activités et les ressources nécessaires à la collectivité autochtone pour l'exercice de ses droits, puis d'évaluer la façon dont le projet pourrait avoir des répercussions sur ces activités et ces ressources, afin de protéger la capacité à exercer les droits. Bien qu'une analyse de la solidité de la revendication, effectuée par la Couronne, pourrait être nécessaire lorsqu'il s'agit d'envisager des mesures d'accommodement potentielles, conformément à l'obligation de consulter, les droits tels qu'ils sont décrits par la collectivité autochtone peuvent être acceptés aux fins de dialogue et d'analyse dans le cadre du processus d'évaluation d'impact.
Dans l'éventualité d'une ambiguïté ou d'un désaccord au sujet des droits détenus par une collectivité autochtone, le praticien de l'EI doit demander des conseils à l'Unité de la consultation et de l'accommodement, de Relations Couronne-Autochtones Canada et Affaires du Nord Canada, par l'intermédiaire de l'Agence d'évaluation d'impact du Canada.
Les fonctionnaires fédéraux doivent recueillir des connaissances du gouvernement fédéral existantes sur les droits de la collectivité autochtone et les relations qu'elle entretient avec la Couronne. Pour ce faire, il faudra peut-être demander à d'autres ministères et organismes fédéraux des renseignements sur les faits nouveaux; la tenue et l'échange de dossiers de consultation organisationnelle et de profils de groupes peuvent faciliter cette tâche. Les praticiens de l'EI du secteur privé sont invités à communiquer avec l'Agence pour obtenir des conseils et des directives qui les aideront à trouver des sources d'information appropriées sur les droits des collectivités autochtones et à y accéder.
Une fois la recherche initiale et la collecte de renseignements terminées, les discussions avec chaque collectivité autochtone peuvent progressivement permettre de comprendre la nature, la portée et le contenu de chaque droit, y compris la façon dont un droit (ou un ensemble de droits) peut être exercé, l'étendue géographique du territoire traditionnel ainsi que le but et l'importance du droit ou des droits pour la collectivité détentrice des droits. Il faut souligner que les collectivités autochtones pourraient ne pas utiliser le terme « droit » pour faire référence aux pratiques, aux coutumes, aux croyances ou à la vision du monde sur laquelle reposent les modes de vie importants. Néanmoins, leur lien à un secteur, leur utilisation ou leur occupation de longue date d'un secteur confirment leurs droits.
Une fois que le praticien de l'EI a une compréhension pratique des droits de la collectivité autochtone potentiellement touchée, une consultation approfondie avec la collectivité peut être lancée afin de vérifier tout renseignement ayant déjà été compilé relativement au projet, notamment les renseignements biophysiques de base. L'accent doit d'abord être mis sur l'échange de renseignements et les discussions afin de permettre au praticien de l'EI d'améliorer ou d'adapter sa compréhension de la nature des droits, notamment la manière dont ceux-ci sont exercés dans une région donnée. L'objectif de cette première discussion est de parvenir à une compréhension commune des droits de la collectivité autochtone qui pourrait être touchée par le projet désigné.
Étape 2 : Comprendre le contexte dans lequel pourraient s'inscrire les répercussions sur les droits
La prochaine étape de l'évaluation des répercussions sur l'exercice des droits consiste à acquérir une compréhension complète des facteurs contextuels dont il convient de tenir compte dans l'évaluation, en consultation avec la collectivité détentrice de droits. De manière générale, cette étape consiste à examiner les renseignements concernant les conditions qui permettent à une collectivité d'exercer ses droits et la façon dont les effets cumulatifs historiques et actuels ou les projets envisageables ont ou pourraient avoir une incidence sur ces conditions. Il faut ensuite évaluer l'état de la zone du projet et des ressources dans le secteur du projet et autour de celui-ci relativement à l'exercice des droits par la collectivité.Note de bas de page5
Une partie importante de cette analyse consiste à comprendre les terres, les eaux et les ressources essentielles à l'exercice concret des droits et la relation que la collectivité autochtone entretient avec ces terres, ces eaux et ces ressources qui sont susceptibles d'être perturbées par le projet.
(a) Déterminer les conditions environnementales et socio-économiques qui favorisent l'exercice concret des droits par la collectivité
Dans un premier temps, le praticien de l'EI doit comprendre les conditions et le contexte nécessaires à une collectivité autochtone pour l'exercice concret des droits. La participation de la collectivité et ses directives sont essentielles pour comprendre les conditions nécessaires à l'exercice des droits. Cette participation doit être adaptée à la collectivité autochtone et doit inclure toutes les parties de la collectivité pour s'assurer que les impacts différentiels du projet sont pris en considération dans l'évaluation.
Le praticien de l'EI devrait tenir compte des conditions suivantes :
- l'état des terres (notamment la biodiversité, la santé des écosystèmes, la connectivité des étendues de terre ou des cours d'eau, etc.);
- les liens ancestraux, un sentiment d'appartenance historique ou spirituelle à la région;
- la confiance dans les ressources et la disponibilité de celles-ci (une plus grande importance est accordée aux préférences en matière de lieux, de ressources et de moments pour y accéder);
- les données de référence sur la faune et la flore (abondance, répartition, santé de la population);
- l'esprit des lieux (p. ex. le sentiment de solitude et la capacité de jouir paisiblement du territoire de la manière préférée);
- les coutumes pour le transfert des connaissances (y compris linguistiques) aux générations futures;
- l'accès aux lieux, les modes d'occupation et les pratiques culturelles (notamment les contraintes de la collectivité et les différentes pratiques culturelles en fonction de l'âge ou du sexe);
- les normes et les lois en matière d'intendance;
- la valeur sociale de la région à l'égard de la pratique d'activités importantes sur le plan culturel;
- la délimitation du paysage culturel et des principaux lieux culturels;
- les indicateurs de santé des collectivités, au moyen d'une approche axée sur les déterminants sociaux de la santé.
(b) Comprendre comment les activités antérieures, actuelles et raisonnablement envisageables ont cumulativement eu ou pourraient cumulativement avoir une incidence sur les conditions favorisant ou limitant l'exercice concret des droits par la collectivité autochtone
Une fois que le praticien de l'EI comprend les types de conditions environnementales, culturelles, sociales et économiques nécessaires à l'exercice des droits, l'étape suivante consiste à évaluer comment les conditions environnementales et socio-économiques ainsi que les changements à ces dernières peuvent limiter ou favoriser la capacité de la collectivité d'exercer concrètement ses droits. Le fait de déterminer les conditions actuelles et les changements apportés à ces conditions permettra d'établir l'état du droit en question et les effets cumulatifs sur l'exercice de ce droit. Il faut établir le contexte des effets cumulatifs existants avant d'examiner les effets propres au projet.
L'approche privilégiée pour évaluer ce contexte consiste à comprendre comment une collectivité perçoit une période où les conditions favorisent l'exercice des droits (et à quoi ressemblent les conditions) en tant que référence pour l'évaluation, puis à comparer les conditions actuelles d'exercice des droits à ces conditions antérieures et à tout seuil établi par la collectivité. Ces seuils peuvent être fondés sur des échelles de perception sociale, des échelles construites, des seuils existants socialement définis (tels que des plans d'aménagement du territoire ou le concept de futurs projets souhaités), ou des seuils établis selon une approche définie conjointement.
(c) Déterminer les lieux susceptibles d'être touchés par le projet qui sont importants pour la collectivité
Le praticien de l'EI doit collaborer avec la collectivité autochtone pour déterminer comment le projet et ses composantes pourraient interagir avec son territoire traditionnel. Il faut souligner que l'interaction ne doit pas nécessairement être un chevauchement direct du projet avec les terres de la réserve : le territoire traditionnel d'une collectivité est la région géographique où ses droits sont exercés. L'exercice des droits peut être fluide et changer selon les saisons, les espèces, le protocole culturel et plusieurs autres facteurs. Le promoteur doit donc collaborer avec la collectivité autochtone pour discuter de l'incidence du projet sur la région et déterminer ce qu'elle signifie concrètement (changements au sein du territoire de la collectivité).
Les prise en compte des points suivants peuvent aider le praticien de l'EI à déterminer l'importance d'une région particulière pour une collectivité autochtone :
- le fait qu'elle est située dans le territoire traditionnel de la collectivité;
- le fait que la collectivité affirme que cette région est importante;
- la présence de nombreux noms de lieux dans la zone du projet;
- l'intensité et la fréquence des utilisations traditionnelles et culturelles dans la région;
- la diversité des utilisations et des expériences traditionnelles et culturelles dans la région;
- le caractère unique de la région en question par rapport aux pratiques culturelles;
- le rôle du lieu en matière d'échanges commerciaux et culturels;
- le rôle du lieu dans l'histoire et la culture de la collectivité.
Étape 3 : Établir les valeurs et les sujets importants à utiliser comme indicateurs pour évaluer l'incidence sur les droits
À cette étape, le praticien de l'EI et la collectivité autochtone doivent collaborer pour sélectionner les valeurs et les sujets qui pourraient être utilisés pour évaluer l'incidence sur l'exercice des droits. Cette étape est semblable à la détermination des composantes valorisées de l'écosystème dans le cadre de l'EI. Par contre, en ce qui concerne l'EI sur les droits, les indicateurs ne doivent pas nécessairement être une composante de l'écosystème. Les valeurs et les sujets d'importance qui peuvent servir d'indicateurs comprennent notamment les pratiques associées à l'exercice d'un droit, une valeur culturelle, une espèce importante sur le plan culturel ou un paysage culturel important. Cependant, il faut être en mesure d'appliquer une méthode d'évaluation appropriée pour déterminer si le projet pourrait avoir une incidence sur un indicateur donné et ce que cette incidence signifierait sur l'exercice des droits.
Le praticien de l'EI pourrait s'inspirer des principaux points de discussion suivants lorsqu'il travaille avec chaque collectivité autochtone en vue de déterminer les indicateurs appropriés :
- le lien entre la zone du projet et les zones privilégiées pour l'exercice des droits;
- le lien entre le projet et la modification ou la réduction à l'accès aux zones privilégiées;
- les espèces privilégiées ou importantes dans la zone du projet et ses environs;
- la relation entre l'habitat touché et le bien-être d'une espèce particulière;
- le lien entre une zone touchée et la vision d'intendance de la collectivité;
- le degré de préoccupation du détenteur de la culture;
- la représentation des peuples autochtones qui valorisent le lieu en raison de la gamme d'activités et des valeurs qu'il offre.
Étape 4 : Déterminer les voies des répercussions découlant du projet
L'étape 4 a pour objectif de déterminer et de décrire les voies par lesquelles le projet peut avoir une incidence sur l'exercice des droits de la collectivité autochtone.
Le praticien de l'EI doit prendre en considération les principales voies de répercussions déterminées pour le projet. Cette étape devrait comprendre une description initiale des changements à l'environnement découlant du projet ainsi que la façon dont les voies de répercussions créent des changements à l'égard de l'exercice des droits. Au moment de déterminer les voies de répercussions, il est primordial de tenir compte à la fois des valeurs tangibles (p. ex. espèces sauvages ou plantes traditionnelles) et des valeurs intangibles (p. ex. la jouissance paisible du paysage ou des sites utilisés pour l'enseignement). Les valeurs intangibles sont souvent liées à des éléments spirituels, artistiques, esthétiques et éducatifs qui sont souvent associés à l'identité des collectivités autochtones.
Des outils visuels illustrant les voies permettent de décrire et de mettre en contexte à la fois les répercussions sur l'environnement et les répercussions cernées sur l'exercice des droits. Par exemple, la figure 1 (désignée « figure 4 » dans le document source) montre une voie de répercussions sur le droit de chasser l'orignal, le bison et le caribou élaborée par la Première Nation crie Mikisew (PNCM) dans le but d'évaluer les répercussions de la mine de sables bitumineux Frontier sur ses droits.
Figure 1 : Voie des répercussions sur le droit de récolte de l'orignal, du bison et du caribou de la Première Nation crie Mikisew (graphique disponible en anglais seulement)
Étape 5 : Évaluer le degré de gravité des répercussions
L'étape 5 vise à évaluer le degré de gravité des répercussions que le projet pourrait avoir sur l'exercice des droits. L'évaluation de la gravité devrait comprendre une évaluation de la gravité probable des répercussions sans aucune mesure d'atténuation, ainsi qu'avec les mesures d'atténuation proposées. Comme pour les autres étapes de l'évaluation des répercussions sur les droits, une approche itérative devrait être adoptée pour évaluer la gravité des répercussions. Il peut être nécessaire de mettre à jour l'évaluation à mesure que de nouveaux renseignements deviennent disponibles ou que de nouvelles mesures d'atténuation sont proposées.
Voici quelques critères dont il faut tenir compte en analysant la gravité des répercussions sur chaque valeur ou droit évalué :
- Probabilité : Estimer la probabilité que les répercussions se produisent.
- Étendue géographique : Évaluer l'étendue géographique des répercussions par rapport à l'étendue géographique des droits, tels qu'ils sont exercés.
- Durée, Fréquence, durée et réversibilité : Évaluer la fréquence à laquelle un impact peut se manifester au cours d'une période donnée, la durée pendant laquelle un impact est perceptible, et la mesure dans laquelle l'exercice des droits est susceptible de revenir à son état initial.
- Bien-être culturel : Évaluer les répercussions du projet sur la capacité d'un groupe de maintenir les coutumes, les traditions et les pratiques qui font partie intégrante de sa culture distincte.
- Effets cumulatifs : Déterminer et comprendre dans quelle mesure l'exercice actuel des droits peut être plus ou moins vulnérable aux effets du projet quand les effets seront ajoutés aux conditions de base et qu'ils interagiront avec elles, notamment les effets cumulatifs existants provenant d'autres sources.
- Gouvernance : Déterminer si les effets du projet auront une incidence sur la capacité et les systèmes d'autonomie gouvernementale et d'autodétermination de la collectivité à l'égard de ses membres (y compris les générations futures) et pour la gestion des terres et des ressources traditionnelles, compte tenu des lois, des coutumes et des structures de la collectivité (y compris des titres ancestraux).
- Inégalité des répercussions : Examiner les répercussions sur les sous-populations d'une collectivité, notamment les femmes, les aînés, les jeunes, les personnes bispirituelles et d'autres, en tenant compte des risques et des avantages pour les membres de la sous-population, et de la résilience probable de la sous-population aux répercussions négatives.
- Santé : Évaluer les répercussions découlant du projet sur la santé de l'ensemble de la collectivité autochtone dans son ensemble ou sur la santé de chaque membre. Cet aspect tient compte de la santé physique, mentale, émotionnelle et spirituelle.
La réalisation d'une analyse suffisante aux étapes 1 à 4 aidera à préparer le praticien de l'EI et la collectivité autochtone à tenir compte de ces dimensions dans l'évaluation de la gravité des impacts.
Des informations supplémentaires sur la façon d'examiner et d'évaluer chacune des dimensions énumérées ci-dessus, ainsi que des critères suggérés pour déterminer la gravité des répercussions pour chacune sont fournis ci-dessous, à la partie 2. La sélection et l'application des critères doivent s'appuyer sur les commentaires de la collectivité autochtone qui détient les droits, comme il est précisé aux étapes 1 à 4. La meilleure approche consisterait à élaborer les critères en collaboration avec la collectivité.
Lorsqu'il examine la gravité des répercussions d'un projet sur les droits des populations autochtones à cette étape, le praticien de l'EI devrait tenir compte de toutes les mesures proposées pour éviter, atténuer ou compenser les répercussions cernées. (Les mesures pourraient comprendre des mesures d'atténuation, des mesures complémentaires ou des mesures d'adaptation.) Cette analyse devrait également tenir compte des points de vue de la collectivité autochtone au sujet des mesures proposées (c'est-à-dire en ce qui concerne la pertinence et l'efficacité des mesures visant à atténuer les répercussions). Cette étape devrait tenir compte du fait qu'il est possible qu'il n'existe aucune mesure permettant de réduire ou d'éviter un impact potentiel sur l'exercice des droits.
Mesure d'accommodement, mesures d'atténuation et mesures complémentaires
Les mesures d'accommodement, les mesures d'atténuation et les mesures complémentaires ont comme objectif commun d'éviter, de minimiser ou de compenser les impacts négatifs potentiels que pourrait causer un projet. La différence entre ces types de mesures réside dans la portée et la base juridique de chacune d'entre elles.
Les mesures d'accommodement désignent précisément les mesures visant à éviter, à minimiser ou à compenser les répercussions négatives potentielles sur les droits qui sont dues, en vertu de l'obligation de la Couronne de consulter. Les mesures d'accommodement font partie de l'obligation de consulter; elles s'appuient sur les obligations constitutionnelles de la Couronne et ne se limitent pas au processus d'évaluation d'impact.
Les mesures d'atténuation désignent de façon plus générale les modifications ou les ajouts à un projet qui sont proposés au cours d'une évaluation d'impact, afin d'éviter ou de réduire un impact négatif potentiel (de quelque type que ce soit, et pas nécessairement sur les droits).
Les mesures complémentaires ne font pas partie du projet, mais elles sont proposées pour contrebalancer ou compenser les effets négatifs du projet.
Les types de mesures ne s'excluent pas mutuellement. Tant les mesures d'atténuation que les mesures complémentaires pourraient potentiellement être considérées comme des mesures d'accommodement.
Le processus d'évaluation d'impact permet également de discuter des répercussions positives et négatives des projets. Les collectivités autochtones sont invitées à travailler avec les promoteurs et l'Agence afin de déterminer les répercussions positives du projet. Il pourrait s'agir de mesures visant à restaurer des milieux ou des ressources déjà perturbés afin de permettre aux collectivités autochtones de les exploiter ou de les utiliser à l'avenir, ou de tirer des avantages économiques ou sociaux ou tout autre résultat positif qui pourrait contribuer à améliorer l'exercice des droits.
Étape 6 : Discuter des mesures à prendre pour contrer les répercussions
L'un des objectifs du système fédéral d'évaluation d'impact est de favoriser la durabilité. Pour ce faire, il est possible notamment de collaborer avec les participants à une étude d'impact donnée dans le but de trouver des solutions mutuellement acceptables aux préoccupations soulevées au sujet d'un projet, notamment les préoccupations soulevées par les peuples autochtones au sujet des répercussions sur leurs droits. Il s'agit d'un processus itératif qui peut commencer à mesure que les collectivités autochtones ciblent les problèmes à l'étape de la planification de l'évaluation des répercussions et qui devrait se poursuivre jusqu'à la surveillance et au suivi, si le projet est approuvé.
Les participants à l'évaluation des répercussions sur les droits devraient discuter des solutions une fois que les parties s'entendent sur le fait qu'un projet peut empiéter sur l'exercice des droits et avoir des répercussions négatives. Selon la LEI, les mesures d'atténuation sont les mesures visant à éliminer, à réduire, à limiter ou à contrebalancer les effets négatifs d'un projet désigné et comprennent les mesures de réparation pour tout dommage causé par ces effets, notamment par remplacement, restauration, indemnisation ou tout autre moyen pouvant être utilisé pour réduire les incidences néfastes sur les droits.
Diverses options peuvent être envisagées pour contrer les répercussions sur les droits, notamment la modification de la conception du projet, les conditions fédérales et des programmes, des plans et des politiques de la Couronne. L'Agence peut tenir compte des négociations entre le promoteur et les collectivités autochtones lorsqu'elle évalue les répercussions sur les droits si une collectivité autochtone lui en fait explicitement la demande.
Dans le cadre de l'approche pangouvernementale de consultation auprès des collectivités autochtones potentiellement touchées, les ministères fédéraux peuvent recourir à des mesures complémentaires, afin de lutter contre les répercussions sur les droits qui ne peuvent pas être abordées directement dans les conditions prévues dans la déclaration de décision de l'évaluation. Les mesures complémentaires découlent des pouvoirs des ministres fédéraux ou des programmes fédéraux en dehors du processus d'évaluation d'impact.
Les collectivités autochtones sont les mieux placées pour connaître leur territoire et comprendre l'exercice de leurs droits; il est donc important qu'elles participent aux discussions sur les solutions qui permettront de contrer les répercussions sur leurs droits. Les premières solutions à explorer devraient être celles proposées par les collectivités autochtones et, s'il est impossible de les appliquer, les raisons devraient leur être fournies.
Étape 7 : Valider les résultats de l'évaluation et en assurer le suivi
Il est de mise de consulter les collectivités autochtones détentrices de droits avant de terminer l'évaluation et de tirer des conclusions définitives sur la gravité des répercussions sur leurs droits. Chaque collectivité autochtone devrait avoir la possibilité de formuler des observations sur le contenu de l'évaluation, en particulier sur l'application des connaissances et des valeurs des collectivités autochtones ainsi que des seuils établis par ces dernières. Cette validation permet de renforcer l'analyse et d'améliorer la validité et l'exactitude des conclusions. L'objectif est que toutes les parties s'entendent sur les conclusions fondées sur une évaluation faite en collaboration. Cependant, il est possible que les parties ne soient pas du même avis. Le cas échéant, toutes les perspectives et justifications des différentes conclusions devraient être consignées dans le rapport d'évaluation.
La consultation et la collaboration avec une collectivité autochtone sont encouragées tout au long du processus d'évaluation des répercussions sur ses droits et, dans la mesure du possible, afin que le suivi et la validation puissent être intégrés à chaque étape de la méthode.
Méthode
Comme l'ouvrier a à sa disposition plusieurs outils, le praticien de l'EI a le choix entre plusieurs méthodes de collecte et d'analyse de données pour évaluer les répercussions. Chaque méthode possède sa propre série de composantes valorisées et d'indicateurs, en plus de ses propres avantages et limites quant à la façon dont elle peut être utilisée pour décrire et évaluer les répercussions sur l'exercice des droits. Afin de choisir la bonne méthode, il faut tenir compte de la nature des droits, de la manière dont ils sont exercés, des répercussions, des voies d'impact et des facteurs contextuels pertinents.
On trouve, dans les documents sur l'évaluation d'impact, une vaste gamme de méthodes qui ont servi à évaluer les répercussions sur les droits. Une bonne façon de procéder pour sélectionner les méthodes consiste à demander l'avis ou la collaboration de la collectivité détentrice de droits. En utilisant une combinaison de différentes méthodes et valeurs (indicateurs à mesurer), il sera possible de mieux comprendre les diverses répercussions potentielles.
Chaque méthode possède sa propre série d'étapes, d'outils et de règles, et un praticien de l'EI qui évalue les répercussions sur les droits des peuples autochtones doit avoir une bonne connaissance des méthodes établies afin de choisir et d'utiliser la méthode ou les méthodes appropriées dans le cadre d'une évaluation donnée.
Partie 2 : Critères pour déterminer la gravité des répercussions
La partie 2 fournit des directives sur la façon d'interpréter et d'appliquer les critères pour évaluer dans quelle mesure l'exercice des droits des peuples autochtones peut être touché par un projet. L'évaluation de la gravité des répercussions devrait se faire en collaboration avec chaque collectivité autochtone, en reconnaissant que les critères énoncés dans le présent document d'orientation constituent un point de départ pour le dialogue. D'autres façons d'évaluer les répercussions sur les droits peuvent être utilisées, selon les conseils d'une collectivité autochtone.
Gravité des répercussions négatives
Dans le contexte de la LEI, l'objectif de l'évaluation des impacts d'un projet est d'éclairer la décision du gouvernement du Canada concernant le projet. Les résultats de l'évaluation devraient permettre au décideur et au grand public de comprendre comment la population et l'environnement sont susceptibles d'être touchés par le projet.
L'Agence utilise un modèle de gravité en tant que continuum pour révéler dans quelle mesure l'exercice des droits peut être touché par un projet. Les niveaux faible, modéré et élevé sont simplement des marqueurs génériques qui sont utilisés pour fournir une approximation relative du niveau de gravité.
Le niveau de gravité peut être décrit par les caractéristiques définies dans le tableau 1 (voir chaque critère pour un ensemble plus solide de considérations et de définitions qui correspondraient à chaque catégorie). Il est à noter qu'il n'est pas nécessaire que toutes les caractéristiques soient réunies au sein d'une même catégorie; par exemple, pour que la gravité soit « élevée », il suffit qu'un ou plusieurs des critères soient remplis.
Les projets ont généralement plus d'un impact. Afin d'élaborer des mesures pour éviter ou atténuer les impacts négatifs et d'éclairer les mesures d'adaptation possibles, il faut évaluer la gravité de tous les effets relevés dans l'évaluation. Pour évaluer la gravité globale des répercussions sur les droits, on utilise le niveau de gravité le plus élevé. Si l'on détermine que la gravité d'un impact négatif est élevée, alors l'impact global du projet sur les droits est considéré comme étant élevé. Les impacts peuvent également être liés à un certain nombre de critères. Cette évaluation doit être menée de manière holistique. Tout au long du processus d'évaluation, des discussions devraient avoir lieu pour déterminer si un impact négatif est acceptable pour une collectivité autochtone, compte tenu des effets positifs.
Le tableau ci-dessous fournit quelques considérations qui pourraient éclairer l'évaluation de la gravité des répercussions d'un projet sur les droits des peuples autochtones. Les considérations peuvent être adaptées en fonction du projet, de l'emplacement géographique et des conseils de chaque collectivité autochtone.
Gravité faible | Les répercussions seront probablement de portée mineure, de courte durée, peu fréquentes, de faible étendue spatiale, réversibles ou facilement évitables ou réduites; le bien-être culturel est peu perturbé; il y a peu d'effets, voire aucun, sur la santé ou les aliments traditionnels; il y a peu (ou pas) d'aménagements existants ou proposés ou de répercussions historiques sur le territoire du groupe; les projets et activités sont en accord avec les plans d'aménagement et d'utilisation des terres ou des eaux du groupe; les sous-groupes de la population sont suffisamment résilients pour résister aux répercussions et exercer les droits; l'atténuation doit permettre l'exercice du droit de la même façon qu'avant toute répercussion. |
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Gravité modérée | Les répercussions sont susceptibles d'être de moyenne envergure, de durée modérée, parfois fréquentes, possiblement ou partiellement réversibles; l'étendue spatiale touche des zones d'utilisation privilégiées ou perturbe l'interconnectivité ou le transfert des connaissances; le bien-être culturel est entravé ou modifié; il y a des impacts sur la santé holistique individuelle ou communautaire, notamment la perception des impacts; le projet interagit avec quelques zones privilégiées où les droits peuvent être exercés, et il y a certains aménagements ou perturbations historiques, actuels ou proposés; le projet peut ne pas être compatible avec certains aspects des plans d'utilisation des terres ou de l'application des lois traditionnelles et de la gouvernance; les sous-groupes vulnérables sont susceptibles d'avoir une répercussion plus importante sur la capacité d'exercer leurs droits; l'atténuation peut ne pas améliorer complètement l'impact, mais devrait permettre au groupe autochtone de continuer à exercer ses droits comme auparavant, ou d'une manière modifiée. |
Gravité élevée | Les répercussions sont susceptibles d'être majeures, permanentes ou à long terme, fréquentes, possiblement irréversibles et sur une grande étendue spatiale ou dans une zone d'utilisation exclusive ou privilégiée; le bien-être culturel est perturbé, entravé ou supprimé; le projet interagit uniquement avec la zone où un droit peut être exercé et il y a de nombreux aménagements ou perturbations historiques, existants ou proposés; la prise de décision associée à la gouvernance et au titre est négativement touchée; les sous-groupes seront affectés de façon disproportionnée par le projet et n'en tireront que peu d'avantages, voire aucun; l'atténuation n'est pas en mesure de s'attaquer pleinement aux répercussions de sorte que l'exercice du droit est considérablement réduit ou perdu. |
Critères
L'Agence a proposé une série de critères qui peuvent être utilisés pour évaluer la gravité d'un large éventail de répercussions négatives sur les droits des peuples autochtones. Cette série de critères peut servir de liste à partir de laquelle on peut élaborer l'ensemble des critères à prendre en considération pour l'évaluation des répercussions sur les droits d'une collectivité autochtone particulière, en se fondant sur les discussions avec la collectivité autochtone et les méthodes et composantes importantes qui sont déterminées. Les critères et les définitions présentés dans le présent document d'orientation se veulent souples, réceptifs et adaptables. Les praticiens de l'EI sont encouragés à modifier ou à personnaliser les critères en consultant les collectivités autochtones afin de refléter la nature des impacts liés à un projet particulier, la façon dont la collectivité autochtone souhaite présenter son information, le contexte unique du paysage, les connaissances autochtones que la collectivité fournit et les droits qui sont touchés.
Les critères proposés ci-dessous servent de point de départ de la collaboration en vue d'évaluer la gravité des répercussions sur les droits :
- probabilité;
- étendue géographique;
- fréquence, durée et réversibilité;
- bien-être culturel;
- santé;
- effets cumulatifs;
- gouvernance;
- inégalité des répercussions.
La description de chaque critère qui suit comporte une définition, des points à considérer, des questions directrices visant à orienter le travail du praticien de l'EI et une description des niveaux de gravité faible, modérée et élevée des répercussions. Il peut être utile de poser les questions directrices aux collectivités autochtones au cours de la consultation afin d'obtenir l'information nécessaire pour arriver à une conclusion solide quant à la gravité des répercussions.
Comme il est indiqué ci-dessus, le praticien de l'EI peut adapter les critères en collaboration avec la collectivité concernée. En outre, lorsqu'il existe des seuils et des critères définis par la collectivité, ceux-ci devraient être inclus dans l'ensemble des critères propres à l'évaluation.
L'information sur les critères utilisés, tels que ceux contenus dans le présent document, devrait être échangée avec les collectivités autochtones au début du processus de consultation afin d'assurer la transparence quant à la façon dont les répercussions sur les droits seront évaluées pour déterminer leur gravité.
Probabilité
La probabilité d'une répercussion sur les droits peut reposer sur la connaissance et l'expérience de répercussions similaires passées. Le cycle de vie complet d'un projet, y compris ses diverses phases et sa durée, doit être pris en compte pour déterminer la probabilité qu'un effet se produise.
Points à considérer
L'évaluation d'impact fédérale est un outil de planification qui permet de déterminer les impacts (tant positifs que négatifs) des projets avant la prise de décisions. En tant qu'exercice prédictif, les conclusions de l'évaluation sont généralement assorties d'un certain degré d'incertitude. Le fait d'examiner si des impacts pourraient se produire à cause d'activités régulières de construction, d'exploitation et d'entretien comparativement à des impacts plus spéculatifs comme des accidents ou des défaillances peut aider à éclairer un dialogue sur la probabilité qu'un impact se produise. Bien que les accidents et les défaillances soient intrinsèquement peu susceptibles de se produire, ils doivent tout de même être compris et pris en compte. Les points de vue de la collectivité autochtone devraient être pris en compte en ce qui concerne les niveaux de risque acceptables pour des événements plus spéculatifs lorsqu'il y a un degré plus élevé d'incertitude quant aux impacts potentiels.
La perception de la probabilité que des impacts se produisent devrait également être prise en compte, car cela peut entraîner un changement de comportement qui nuit à l'exercice des droits, même s'il n'y a qu'une faible probabilité d'impact. Si une collectivité croit qu'il y a une forte probabilité ou un risque inacceptable que ses pratiques changent à cause d'un impact perçu, cette modification dans l'exercice des droits devrait être prise en compte dans le reste de l'analyse afin de cerner des solutions possibles à la question.
Dans de nombreux cas, le fait de permettre aux membres d'une collectivité d'en apprendre davantage sur les stratégies efficaces d'atténuation des risques ou les cadres réglementaires en place pour faire face à la probabilité que des impacts se produisent, en organisant par exemple des ateliers ou des visites des installations mettant en évidence l'efficacité de la surveillance continue, peut aider une collectivité à avoir davantage confiance dans la gestion des risques. Le but de ces stratégies devrait être de faire en sorte que les gens se sentent en sécurité. Le fait de demander à des experts techniques d'informer les citoyens concernés qu'ils devraient se sentir en sécurité est souvent insuffisant. Il est plus important de s'assurer que les collectivités disposent de suffisamment d'information pour leur permettre de mieux comprendre les impacts du projet.
Questions directrices
- Y a-t-il un lien direct et causal entre le projet et une répercussion sur les droits ou y a-t-il une possibilité de répercussion (p. ex. va-t-on abattre des arbres ayant une valeur culturelle dans le cadre de la construction, ou le risque d'accident est-il une préoccupation)?
- Y a-t-il un projet similaire que nous pouvons examiner pour consulter les données en lien aux types de répercussions sur les droits des peuples autochtones qui pourraient se produire?
- Les outils de gestion adaptative présentés peuvent-ils réduire les conséquences des répercussions dont la probabilité est incertaine?
- Dans quelle mesure la Couronne a-t-elle confiance dans les évaluations des risques (tant pour la probabilité que pour les conséquences) disponibles à cette étape de l'évaluation d'impact?
Figure 2 : Gravité des niveaux de répercussion - Probabilité
Étendue géographique
La portée géographique fait référence à la zone spatiale sur laquelle l'impact est prévu. L'échelle particulière à un lieu et les échelles locale, régionale, provinciale, nationale et internationale constituent les échelles qualitatives types pour définir la portée géographique. Il est utile de décrire l'étendue d'un impact en termes de la part du territoire traditionnel qui serait touchée. Les principaux renseignements requis pour ce critère comprennent l'emplacement du territoire traditionnel ou visé par un traité de chaque collectivité autochtone et les interactions avec les effets du projet.
Points à considérer
Examiner les emplacements où les droits peuvent être ou sont actuellement exercés sur le territoire d'une collectivité autochtone et où les lieux de pratique privilégiés sont situés en relation avec le projet et les effets du projet. Déterminer si le projet et ses composantes donneront ou non l'accès aux populations non autochtones, et comment cela interagira avec l'exercice des droits sur le territoire d'une collectivité autochtone. Comprendre les niveaux actuels de perturbations sur le territoire traditionnel d'une collectivité autochtone et l'importance de zones particulières de récolte, de valeurs culturelles, spirituelles ou interconnectées.
Questions directrices
- Quels sont les bassins atmosphériques et hydrographiques qui pourraient subir des effets environnementaux négatifs et dans le territoire de quelle collectivité se produiraient-ils?
- Y a-t-il des espèces migratrices qui pourraient être touchées de façon importante par le projet?
- Dans l'affirmative, à qui appartient le territoire qu'elles traversent?
- Y a-t-il des préoccupations quant aux impacts en amont ou en aval du projet?
- Y a-t-il des zones de grande valeur ou d'importance qui pourraient être touchées par le projet?
Figure 3 : Gravité des niveaux de répercussion - Étendue géographique
Fréquence, durée et réversibilité
La fréquence est le nombre de fois que l'impact pourrait se produire au cours d'une période donnée (p. ex. l'altération de l'habitat aquatique se produira deux fois par année). La durée désigne la période pendant laquelle une répercussion sur un droit peut être perçue (p. ex. une journée, un mois, un an, une décennie ou en permanence). Une répercussion est réversible lorsque l'on s'attend à ce que l'exercice des droits soit possible après la répercussion causée par le projet. Cela devrait correspondre au retour à la valeur de référence ou à une autre cible par l'entremise de mesures d'atténuation ou grâce au rétablissement naturel dans un délai raisonnable, tel que défini par la collectivité autochtone.
Points à considérer
La fréquence doit être définie en termes quantitatifs dans la mesure du possible, par exemple « chaque jour », « chaque semaine » ou « plusieurs fois par an ». On peut aussi la définir qualitativement comme étant rare, sporadique, intermittente, continue ou régulière. La fréquence devrait être examinée à l'égard de la régularité à laquelle des perturbations dans l'exercice des droits peuvent se produire. Il est nécessaire d'examiner la fréquence à laquelle une collectivité autochtone peut exercer un droit particulier dans le « scénario de référence » (c.-à-d. si le projet n'avait pas lieu). Par exemple, si le droit de chasser le caribou ne peut être exercé qu'au cours d'une période précise en raison des habitudes migratoires de l'espèce et qu'un projet entravait la réalisation de ce droit, la répercussion sur ce droit pourrait être plus grave même si elle est peu fréquente.
La durée peut faire référence au temps nécessaire avant que l'exercice des droits puisse revenir aux conditions de référence par rapport auxquelles les changements découlant du projet ont été mesurés, grâce à des mesures d'atténuation ou au rétablissement naturel. La durée de l'impact peut être plus longue que la durée de l'activité qui l'a causé. Les impacts peuvent ne pas se produire immédiatement après l'activité qui les a causés, mais il faut tout de même en tenir compte. Par exemple, lorsqu'un nouveau réservoir est formé, il y aura un délai avant que les concentrations de méthylmercure n'augmentent chez le poisson. De même, l'effet sur le transfert intergénérationnel des connaissances relatives à l'exercice des droits peut ne pas être observé avant de nombreuses années après qu'un projet a perturbé l'exercice du droit. Les mesures possibles de la durée comprennent le court terme (en semaine et en mois), le moyen terme (en mois et en années) et le long terme (en années et en décennies). Les répercussions peuvent se produire sur courte durée (p. ex. quelques minutes), mais le temps nécessaire avant la reprise de l'exercice d'un droit et les répercussions culturelles d'une perturbation causée par un projet doivent être pris en compte dans l'évaluation de la durée de l'impact (p. ex. une cérémonie doit-elle avoir lieu avant qu'une chasse perturbée puisse reprendre?).
La réversibilité peut être influée par la résilienceNote de bas de page6 d'une collectivité autochtone à des facteurs de stress imposés et au degré de stress existant en lien avec sa capacité d'exercer un droit. Cela dépend aussi de la capacité de la collectivité autochtone de transmettre, entre autres, l'information, les pratiques, la langue, le protocole, les récits qui sont nécessaires à l'exercice du droit de la manière privilégiée après une perturbation.
Questions directrices
- Comment et à quel moment le projet et les effets associés peuvent-ils interagir avec l'exercice des droits?
- Qu'est-ce que la collectivité autochtone considère comme un impact réversible?
- Quelle échelle de temps la collectivité autochtone utilise-t-elle pour définir les répercussions sur leurs droits?
- Y a-t-il des droits qui sont exercés moins fréquemment et qui pourraient alors être plus vulnérables aux interruptions?
Figure 4 : Gravité des niveaux de répercussion - Fréquence, durée et réversibilité
Bien-être culturel
Le bien-être culturel peut être considéré comme étant la capacité d'un groupe de perpétuer les coutumes, les traditions et les pratiques qui font partie intégrante de la culture distincte du groupe. La dimension culturelle d'un droit des peuples autochtones ne peut pas être considérée comme un ajout; plutôt, elle est fondamentale pour évaluer les répercussions potentielles sur ce droit. De nombreux droits sont fondés sur une relation unique au paysage qui ne peut être reproduite ailleurs.
Points à considérer
Lorsqu'on examine le bien-être culturel et la vision du monde, les facteurs suivants peuvent être utiles pour comprendre les répercussions sur les droits :
- l'accès sécuritaire aux voies de déplacement et la sécurité nécessaire dans les zones d'exercice des droits;
- la continuité des traditions;
- la cohésion des groupes familiaux;
- l'intimité ou la paix nécessaires à l'exercice des droits;
- la qualité de l'expérience de la mise en pratique des droits, à la fois spirituellement et physiquement;
- l'organisation sociale, les coutumes, les traditions et les cérémonies;
- les récits et les occasions d'en raconter;
- l'utilisation et la transmission de la langue et des connaissances;
- la saisonnalité de l'utilisation de diverses ressources et pratiques à l'intérieur d'un territoire;
- la façon dont les ressources sont liées aux cérémonies ou aux costumes traditionnels;
- les réactions des entités spirituelles ou culturelles aux changements de l'environnement;
- les lois autochtones;
- tout autre facteur pertinent pour la collectivité.
L'évaluation devrait tenir compte des répercussions sur les types de zones suivants qui pourraient avoir une importance culturelle sur le territoire d'une collectivité autochtone. Veuillez prendre note que les valeurs associées aux différentes zones peuvent se chevaucher :
- Zones de patrimoine physique dotées de certaines ressources matérielles, comme des densités notables de sites archéologiques ou des lieux de sépulture;
- Zones de récolte où les modes de vie traditionnels sont pratiqués par l'entremise d'activités telles que la chasse, le piégeage, la pêche et la cueillette;
- Sites sacrés d'importance spirituelle particulière;
- Paysages culturels avec des sites patrimoniaux interconnectés, dont les voies de déplacement et les espaces entre eux.
Questions directrices
- Que se passe-t-il d'autre sur le territoire d'un point de vue social, industriel ou culturel qui pourrait avoir une incidence sur la résilience des pratiques culturelles?
- En raison du projet, les membres de la collectivité autochtone subissent-ils un stress culturel et psychologique à cause de la crainte de perdre leur capacité d'exercer leurs droits de la manière qu'ils préfèrent?
- Le praticien de l'EI a-t-il été informé par la collectivité autochtone des impacts culturels potentiels même si le groupe n'est pas en mesure de communiquer les détails parce que ce n'est pas culturellement approprié?
- Le projet aura-t-il une incidence sur l'écosystème ou les valeurs culturelles qui soutiennent le mode de vie et la santé culturelle d'une collectivité autochtone, dont ses pratiques, ses coutumes et ses traditions?
- Le projet est-il conforme à l'expression privilégiée des droits d'une collectivité autochtone, et l'appuie-t-elle?
Figure 5 : Gravité des niveaux de répercussion - Bien-être culturel
Santé
La santé est incluse comme critère suggéré, mais elle peut être considérée comme étant une valeur en soi à évaluer pour déterminer les impacts potentiels sur les droits. De plus, les changements de l'état de santé des peuples autochtones (qu'ils soient ou non propres à l'exercice des droits) doivent également être considérés comme un facteur dans une évaluation d'impact en vertu de l'article 22 de la LEI. Il peut donc y avoir un chevauchement considérable entre ce critère et d'autres parties de l'évaluation d'impact. Toutefois, l'inclusion de la santé comme dimension de l'analyse de la gravité de tous les impacts sur les droits vise à saisir l'interdépendance des impacts sur les droits et des impacts sur l'état de santé de la collectivité autochtone.
Aux fins du présent document d'orientation, la « santé » comprend des considérations relatives à la santé physique, mentale, émotionnelle et spirituelle, incluant des points de vue autochtones sur la santé. La santé peut être un concept fluide qui peut être compris de différentes façons; par conséquent, il est important de comprendre les perspectives et les définitions pratiques des collectivités autochtones potentiellement touchées et de prendre des mesures pour intégrer ces perspectives et définitions dans l'évaluation d'impact. Par exemple, l'Organisation mondiale de la santé définit la santé comme un « état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité »Note de bas de page7, tandis que l'Autorité sanitaire des Premières Nations de la Colombie-Britannique décrit la santé comme commençant par une perspective humaine individuelle et s'étendant à la terre, à la famille et à l'ensemble de la collectivitéNote de bas de page8.
Points à considérer
Lorsqu'on examine la santé au cours de l'évaluation d'impact sur les droits, il peut être utile de tenir compte des facteurs suivants :
- Comment le projet pourrait modifier la qualité, l'abondance et l'accès aux aliments traditionnels et à l'alimentation traditionnelle.
- Si les membres de la collectivité sont préoccupés par la contamination liée au projet et si cela change leur comportement dans l'exercice de leurs droits et leur consommation des aliments récoltés sur le site ou dans les zones touchées par le projet.
- Stress lié à la participation au processus d'évaluation d'impact ou à la participation continue dans l'élaboration du projet, ainsi qu'à d'autres processus fédéraux, provinciaux ou municipaux.
- Lassitude de la consultation.
- L'état actuel de la santé physique, mentale, émotionnelle et spirituelle de la collectivité.
- Modèles traditionnels de bien-être.
- Santé et mobilité des aînés et des détenteurs de connaissances culturelles, ou d'autres sous-populations de la collectivité.
- Liens entre la santé et les conditions socio-économiques.
- Interconnexion entre les effets sur le paysage et la santé mentale, émotionnelle et spirituelle de la collectivité autochtone et de ses membres.
- Infrastructure communautaire, accès aux services de santé et aux services sociaux et comportements en matière de santé ou de sensibilisation à la santé.
- Racisme et exclusion sociale.
Questions directrices
- Pour la collectivité autochtone, quelle est la définition de santé ou quel est le modèle de santé? Quels sont ses facteurs déterminants de la santé (facteurs sociaux, culturels, économiques ou environnementaux)? Comment la santé individuelle est-elle liée à l'ensemble de la collectivité ou du paysage?
- Les collectivités autochtones sont-elles préoccupées par les répercussions sur l'alimentation traditionnelle ou la sécurité alimentaire? Quelles sont les répercussions du projet sur la santé (c.-à-d. les obstacles à la récolte, les effets quantifiables ou perçus sur la qualité des aliments traditionnels, des ressources ou des écosystèmes récoltés, la réduction du succès de la récolte)?
- Qu'est-ce que les collectivités autochtones constatent sur le terrain en relation avec la santé et le bien-être en général, et comment cela change-t-il en raison des projets en cours et des répercussions du projet désigné?
- Le projet aurait-t-il une répercussion sur les pratiques économiques ou culturelles traditionnelles, comme le potlatchNote de bas de page9, qui favorisent la santé globale de la collectivité?
- Y a-t-il un stress physique ou psychologique pour les membres de la collectivité autochtone causé par la crainte de perdre leur capacité d'exercer leurs droits de la manière qu'ils préfèrent en raison du projet?
Figure 6 : Gravité des niveaux de répercussion - Santé
Effets cumulatifs
Les effets cumulatifs sur un droit peuvent découler d'un projet quand ils sont combinés à ceux d'autres activités ou projets antérieurs, actuels ou à venir. Les effets cumulatifs peuvent avoir un contexte régional ou historique et peuvent s'étendre à des aspects des droits liés à la socioéconomie, à la santé, à la culture, au patrimoine et à d'autres questions liées à l'histoire d'une collectivité autochtone et à son lien au paysage. Bien que les résultats de l'évaluation des effets cumulatifs, conformément à l'article 22 de la LEI, puissent et devraient être inclus dans ce critère, les effets cumulatifs tiennent compte d'un éventail plus large de répercussions et ne se limitent pas à l'examen des répercussions des projets et activités définis par la loi. Ce critère vise à permettre une compréhension de l'état actuel des choses et de l'historique complexe des effets interconnectés à un niveau holistique.
Point à considérer :
Lorsqu'on considère les effets cumulatifs sur les droits, il est nécessaire d'examiner les divers projets ou activités qui peuvent avoir déjà eu une répercussion sur l'exercice d'un droit dans un lieu particulier. L'examen du contexte historique exige la reconnaissance des événements passés qui ont contribué à l'état actuel des choses. Il peut être nécessaire d'examiner la situation où un droit n'est pas exercé à l'heure actuelle en raison de facteurs externes tels que la perturbation industrielle.
Pour le contexte régional, il peut être important de tenir compte de la capacité d'une collectivité autochtone d'exercer ses droits sur son territoire et dans d'autres zones privilégiées. Cette évaluation devrait viser la période du début du projet jusqu'à la remise en état. Il faudrait également prendre en compte dans le cadre de cette évaluation les projets futurs qui sont raisonnablement prévisibles et la façon dont ils pourraient être combinés aux répercussions du projet pour avoir une incidence sur l'exercice des droits.
Questions directrices :
- Quel est le point de vue des collectivités autochtones sur la façon dont leurs droits ont été affectés par les effets cumulatifs?
- L'exercice d'un droit a-t-il été touché par des politiques gouvernementales antérieures comme la réinstallation, les pensionnats indiens, les lois interdisant les pratiques culturelles, l'interdiction de récolter des ressources hors réserve, les effets d'un environnement bâti ou l'extraction de ressources?
- Dans l'affirmative, la collectivité s'efforce-t-elle de rétablir l'exercice de ce droit et le projet entraverait-il le rétablissement de l'exercice du droit en question?
- Y a-t-il des effets cumulatifs à l'exercice des droits qui n'ont peut-être pas été pris en compte lors de l'évaluation des effets environnementaux résiduels une fois les mesures d'atténuation appliquées?
- Dans le cadre du projet, est-ce que des seuils communautaires ont été dépassés ou est-ce que des lois ou des normes communautaires applicables seront enfreintes?
Figure 7 : Gravité des niveaux de répercussion – Effets cumulatifs
Gouvernance
Les Principes régissant la relation du gouvernement du Canada avec les peuples autochtones et la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones réaffirment les droits des Autochtones à l'autodétermination, y compris le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. La prise en compte des répercussions possibles sur les droits des peuples autochtones dans le processus d'évaluation d'impact devrait englober la façon dont le projet peut avoir des répercussions sur l'exercice de droits liés à la gouvernance, y compris les lois et les systèmes de gouvernance autochtones.
Les collectivités autochtones ont des responsabilités de gouvernance envers leurs membres (y compris les générations futures) en matière de planification stratégique, de gestion et d'intendance de leurs terres et ressources traditionnelles. La gouvernance et le pouvoir de décision des Autochtones peuvent être exercés par l'entremise de lois, de normes, du pouvoir, de la langue et de la manière dont les membres de la collectivité sont tenus responsables de leurs actes. La gouvernance est liée à l'autodétermination, à la compétence, à l'intendance et au statut de nation. Les collectivités autochtones ont le droit de choisir comment elles sont gouvernées et par qui, conformément à leurs lois, coutumes, structures et autres facteurs pertinents qu'elles ont elles-mêmes ciblés selon leurs propres processus et traditions.
La gouvernance peut comprendre la prise en compte de l'acceptabilité d'une répercussion (dans quelle mesure le groupe peut-il la tolérer?) et de la capacité de gestion ou de la résilience (quel niveau ou quels types de répercussions une collectivité autochtone peut-elle absorber?).
Le projet peut avoir une incidence sur les ressources, l'accès et les activités dans un lieu traditionnellement régi par les lois et pratiques autochtones. Le projet peut également influer sur l'équilibre ou la dynamique des pouvoirs au sein des collectivités et entre elles ainsi que sur la capacité d'une collectivité d'exercer son droit inhérent à l'autonomie gouvernementale.
Points à considérer
Lorsqu'on examine la gouvernance, il est nécessaire d'envisager comment un projet pourrait avoir une incidence sur les processus décisionnels d'une collectivité autochtone, dont ses décisions concernant les risques de répercussions futures.
Les décisions relatives au projet prises par un promoteur ou des gouvernements au cours de la phase préalable à l'EI ou de la phase d'EI qui ne reconnaissent pas ou ne cherchent pas à intégrer les coutumes, les lois et les pratiques autochtones peuvent nuire à l'intendance et au statut de nation. Elles peuvent également contrevenir aux lois et à la compétence autochtones. Les collectivités autochtones peuvent avoir des plans d'utilisation des terres et des eaux et des protocoles précis qui décrivent comment la consultation, les études environnementales, l'utilisation des connaissances traditionnelles ou l'exploitation des ressources devraient se faire. La planification de projets, la collecte de données et la prise de décisions subséquentes qui ne tiennent pas compte des plans et protocoles d'utilisation des terres pertinents élaborés par les collectivités autochtones peuvent être considérés comme irrespectueux de la compétence autochtone et peuvent entraîner des changements qui compromettent les buts et objectifs des collectivités autochtones en matière de gestion des ressources, de santé et de sécurité, de développement économique et de pratiques spirituelles. Si cela se produit de façon répétée, les collectivités autochtones et non autochtones risquent de perdre l'appréciation des lois et des pratiques autochtones, ce qui pourrait avoir des répercussions sur l'intendance et le statut de nation.
Ce critère peut également tenir compte des droits protégés en vertu du titre ancestral. Les droits de propriété comprennent le droit de déterminer la manière dont les terres seront utilisées, le droit de jouissance et d'occupation des terres, le droit de posséder les terres, le droit aux avantages économiques que procurent les terres et le droit d'utiliser et de gérer les terres de manière proactive. Un projet peut restreindre la capacité d'une collectivité autochtone d'exercer ses droits de propriété en ayant des répercussions sur les ressources, l'accès et la capacité de jouir des terres. Si une collectivité autochtone considère que la source de son titre est liée à un paysage (interconnecté) par des liens spirituels ou culturels selon ses récits traditionnels et son ontologie, la mise en œuvre même d'un projet peut avoir de graves répercussions sur l'intégrité du titre ou son lien avec celui-ci.
Ce critère peut mettre en évidence les répercussions sur les droits, y compris le titre, dans la mesure où elles se rapportent aux avantages économiques des terres et aux intérêts de l'exercice des droits (p. ex. un lieu a de la valeur parce qu'il donne accès au poisson qui peut être pêché et vendu). Comme le souligne la décision rendue dans l'affaire Nation Tsilhqot'in c. la Colombie-Britannique : « Les titulaires du titre ont droit aux avantages associés aux terres – de les utiliser, d'en jouir et de profiter de leur développement économique Note de bas de page10. »
Questions directrices
- Qui est/sont le(s) détenteur(s) des droits appropriés à consulter (p. ex. les chefs héréditaires ayant des responsabilités de gouvernance sur différentes parties d'un territoire autochtone)?
- Dans quelle mesure le projet, les répercussions ou le processus affaiblissent-ils l'autorité de la collectivité autochtone sur son territoire?
- Quelle est la capacité des gouvernements fédéral, provinciaux et municipaux, des collectivités autochtones et du promoteur de gérer les répercussions, une fois le projet lancé? La collectivité autochtone a-t-elle participé à la modélisation des répercussions ou a-t-elle confiance dans celle-ci pour ce qui est de la probabilité des répercussions et de l'efficacité des mesures d'atténuation et d'adaptation?
- Existe-t-il des préoccupations en lien avec la sécurité qui empêcheraient les membres de la collectivité d'accéder aux ressources et de les exploiter?
- Comment le projet pourrait-il modifier la capacité de la collectivité autochtone de tirer des avantages économiques futurs des terres ou des eaux ou de maintenir une relation continue avec celles-ci?
- Quelle est la portion ou quel est le pourcentage du territoire que le projet pourrait aliéner de l'occupation et de l'utilisation de la collectivité autochtone?
- Les décisions d'un promoteur ou d'un gouvernement, ou les répercussions d'un projet, contreviennent-elles aux lois et aux compétences autochtones (du point de vue de la collectivité)?
- Comment le projet modifie-t-il ou restreint-il l'utilisation future des terres et des eaux par la collectivité autochtone?
- Quel est l'arrangement actuel en matière de propriété foncière (p. ex. terres de la Couronne, terres privées, partie du processus des traités)?
- La collectivité autochtone revendique-t-elle le titre de propriété d'un lieu qui pourrait être touché par le projet?
- De quelle façon la collectivité autochtone croit-elle que sa revendication de titre pourrait être touchée par le projet?
- La collectivité négocie-t-elle actuellement des accords, en vertu de la Politique sur les revendications territoriales globales ou de la politique sur le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale ou dans le cadre des tables de discussion sur la reconnaissance des droits autochtones et l'autodétermination? Comment ces négociations orientent-elles l'évaluation des répercussions sur les droits?
- Le projet pourrait-il avoir une répercussion sur la relation de la collectivité autochtone avec les terres ou les eaux, d'une manière incompatible avec certains aspects de sa revendication de titre?
- Le projet aura-t-il une incidence sur la planification, la gestion ou l'intendance des terres et des ressources traditionnelles par la collectivité?
- Le projet ou le processus aura-t-il une répercussion sur l'exercice des droits de gouvernance de la collectivité autochtone?
- La collectivité autochtone a-t-elle donné son consentement libre, éclairé et préalable au projet?
Figure 8 : Gravité des niveaux de répercussion – Gouvernance
Inégalité des répercussions
Les répercussions du projet pourraient être ressenties de façon disproportionnée par certaines parties d'une population, comme les femmes, les aînés, les jeunes ou un groupe familial particulier, et les avantages pourraient ne profiter qu'à quelques personnes ou segments d'une collectivité. Les répercussions du projet pourraient être vécues de façon disproportionnée entre les différentes collectivités autochtones ou entre les générations passées, présentes ou futures.
Points à considérer
Les activités du projet qui entraînent des changements relatifs à la qualité et à la quantité des ressources ou à l'accès aux ressources peuvent avoir des répercussions sur certains utilisateurs des ressources et pourraient être plus graves pour les populations vulnérables d'une collectivité autochtone. Les activités du projet peuvent également avoir des répercussions disproportionnées sur le transfert intergénérationnel des connaissances entre les différentes parties de la collectivité et entre les collectivités. Les avantages qu'une collectivité tire des ententes sur les répercussions et les avantages, qui visent à compenser les répercussions, peuvent ne pas profiter également à l'ensemble de la collectivité. Les générations futures pourraient aussi en subir davantage les répercussions que la génération actuelle.
Des répercussions ou des avantages disproportionnés entre les différentes collectivités autochtones peuvent entraîner des inégalités régionales ou potentiellement aggraver ces inégalités.Note de bas de page11
L'analyse comparative entre les sexes plusNote de bas de page12 (ACS+) répondrait à ce critère et pourrait faciliter l'établissement des répercussions qui peuvent être largement ressenties par les femmes autochtones.
Questions directrices
- L'orientation (positive ou négative) de la répercussion change-t-elle entre les différents groupes et sous-populations? Est-ce que certains en bénéficient et d'autres pas?
- Les répercussions sont-elles ressenties de façon disproportionnée par une partie de la population, comme les femmes, les aînés, les jeunes ou un groupe familial particulier, ou les avantages ne profitent-ils qu'à quelques personnes ou à un segment de la collectivité autochtone?
- Dans quelle mesure les collectivités potentiellement touchées sont-elles résilientes? Dans quelle mesure sont-elles vulnérables aux répercussions négatives?
- Certains groupes familiaux sont-ils plus touchés que d'autres (p. ex. une partie d'un territoire traditionnel sera plus touchée par les répercussions, ce qui réduira la capacité d'une famille ou d'un groupe d'exercer ses droits)?
- Les groupes touchés sont-ils plus vulnérables au changement?
- Le projet offre-t-il un niveau acceptable d'atténuation et d'avantages du point de vue de la collectivité autochtone pour justifier les répercussions sur l'exercice des droits?
- Les mesures d'atténuation propres au projet et les avantages qu'elles procurent favorisent-elles la réconciliation et préservent-elles la capacité des générations futures de bénéficier de leurs droits?
Les questions supplémentaires posées par l'ACS+ devraient également faire l'objet de discussions avec chaque collectivité autochtone. Celles-ci comprennent notamment :
- Qui pourrait être touché par le projet? Comment le savons-nous? Ces impacts positifs ou négatifs seront-ils différents pour les sous-groupes de la collectivité autochtone?
- Existe-t-il des preuves qui laissent croire que le projet pourrait avoir un impact différent sur divers groupes, en ce qui concerne notamment les rôles culturels ou rituels dans la collectivité ou des facteurs identitaires particuliers?
- L'évaluation tient-elle compte de ces éléments de preuve et, s'il y a lieu, explique-t-elle pourquoi les différences potentielles font ou ne font pas l'objet d'une enquête?
- Comment le contexte social et historique de la collectivité autochtone influe-t-il sur la façon dont les gens peuvent être différemment touchés par le projet?
- Existe-t-il des structures ou des systèmes inéquitables au sein des collectivités autochtone qui peuvent influer sur les personnes participant au processus d'évaluation des répercussions, les points de vue exprimés ou les renseignements pris en compte? Des mesures ont-elles été prises pour créer des occasions de participation et de consultation inclusives et sécuritaires pour entendre diverses voix (p. ex. la mise à disposition de structures de garde d'enfants lors d'un événement communautaire afin de s'assurer que les prestataires de services de garde, généralement des femmes, peuvent participer à la rencontre)?
- Existe-t-il des profils de référence des collectivités autochtone, ventilés par âge, appartenance ethnique, sexe ou autres facteurs pertinents pour l'analyse?
Figure 9 : Gravité des niveaux de répercussion - Inégalité des répercussions
Partie 3 : Répercussions sur les droits des peuples autochtones
Une fois que le praticien de l'EI et la collectivité autochtone ont suivi le processus visant à déterminer les valeurs importantes et les conditions de base pour l'exercice des droits, qu'ils ont déterminé les voies de répercussions potentielles entre le projet et ces valeurs et droits, qu'ils ont établi et appliqué des critères pour évaluer la gravité des répercussions, alors le dialogue peut porter sur les mesures nécessaires pour atténuer les répercussions cernées. Idéalement, tout au long de l'évaluation, les participants devraient réfléchir aux options qui s'offrent pour répondre aux préoccupations à mesure qu'elles sont soulevées. Vers la fin du processus d'évaluation d'impact, lorsque toutes les informations techniques et les connaissances autochtones pertinentes auront été évaluées, la consultation sur les résultats de l'évaluation des répercussions sur les droits devrait permettre à toutes les parties de travailler ensemble pour trouver des solutions mutuellement acceptables aux questions en suspens et aux répercussions dans la mesure du possible.
Points à considérer
Pour déterminer si la Couronne peut se fier aux mesures d'atténuation et d'adaptation du promoteur pour remplir son obligation de consulter, en tout ou en partie, celle-ci doit tenir compte de la capacité combinée de toutes les mesures visant à éviter, à minimiser ou à compenser les répercussions négatives. Certaines des mesures d'atténuation proposées peuvent être faciles à comprendre, à évaluer et à relier aux voies de répercussions cernées, tandis que d'autres mesures peuvent exiger une expérience ou des connaissances techniques ou un examen de l'efficacité de mesures semblables appliquées ailleurs ou auparavant. Les collectivités autochtones devraient participer à un dialogue pour exposer leurs points de vue quant à la pertinence ou à l'efficacité perçue d'initiatives précises d'atténuation ou d'adaptation liées aux impacts.
Des possibilités de renforcement des capacités économiques ou autres peuvent être proposées pour compenser les répercussions sur les droits. Lorsque des renseignements sur les avantages économiques ou autres sont inclus dans les ententes sur les répercussions et les avantages entre le promoteur et les collectivités autochtones, il peut être difficile pour la Couronne de les évaluer, puisque le contenu de ces ententes est souvent confidentiel.
Les mesures d'adaptation, telles que les compensations foncières, la protection des espèces sauvages, les ententes de partage des revenus tirés des ressources et la planification de l'utilisation des terres, relèvent souvent de la compétence des gouvernements provinciaux. Les ministères fédéraux peuvent aussi avoir des programmes et des politiques sur lesquels on peut compter pour tenir compte de certaines répercussions. L'information fournie par les gouvernements provinciaux et ministères fédéraux et les observations des collectivités autochtones peuvent aider à comprendre l'efficacité de ces mesures qui pourraient compléter l'atténuation ou d'autres formes d'adaptation.
Dans le contexte des évaluations d'impact par projet, l'un des principaux outils utilisés pour l'adaptation aux impacts est l'ensemble des conditions prévues dans l'énoncé de décision sur l'évaluation d'impact et imposées comme juridiquement contraignantes au promoteur. Conformément à l'étape 7 de la méthodologie des répercussions sur les droits, des programmes de surveillance et de suivi peuvent également être nécessaires pour évaluer l'exactitude des conclusions de l'évaluation et l'efficacité des mesures d'atténuation.
Bien que les programmes de surveillance et de suivi soient généralement axés sur les composantes biophysiques, la participation des collectivités autochtones à la surveillance et au suivi, y compris la prestation de conseils continus aux organismes de réglementation, peut servir à accommoder certaines répercussions, outre les impacts biophysiques. Si telle est l'intention, il faudrait en discuter au préalable avec la collectivité autochtone.
Questions directrices
- La collectivité autochtone a-t-elle proposé des mesures d'atténuation ou d'adaptation?
- La collectivité autochtone a-t-elle été consultée au sujet de l'adaptation proposée et, dans l'affirmative, est-elle d'accord pour dire qu'elle répond à ses préoccupations?
- Si les possibilités d'emploi visent à contrebalancer les répercussions, une formation sera-t-elle offerte afin de veiller à ce que de nombreux membres de la collectivité puissent en profiter?
- Si l'adaptation prend la forme d'une compensation pour l'environnement ou les ressources naturelles, est-ce sur le territoire de la collectivité autochtone appropriée et dans un lieu où ses membres peuvent exercer leurs droits?
- La Couronne et la collectivité autochtone ont-elles confiance dans l'efficacité des mesures d'adaptation proposées pour éviter ou minimiser les répercussions sur les droits?
- Les rôles et possibilités en matière de surveillance et de suivi sont-ils en accord avec les lois autochtones et les droits à l'autonomie gouvernementale? Comment ces rôles et responsabilités peuvent-ils être adaptés à l'approche préférée des personnes concernées?
Figure 10 : Gravité des niveaux de répercussion
Conclusion
Pour conclure, selon la Commission de vérité et réconciliation, « la réconciliation consiste à établir et à maintenir une relation de respect réciproque entre les peuples autochtones et non autochtones dans ce pays »Note de bas de page13. Cette orientation vise à créer un point de convergence pour l'établissement de relations mutuellement respectueuses entre toutes les parties, de telle sorte qu'on puisse discuter des répercussions des projets sur les droits des collectivités autochtones, pendant le processus d'évaluation d'impact, et travailler ensemble à l'élaboration de solutions à l'avantage de tous.
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