Guide de la détermination de l'admissibilité Chapitre 9 - Section 5

9.5.0 Autres situations

Même lorsqu'une occasion d'emploi est considérée comme convenable, d'autres facteurs ou situations permettent de conclure qu'il y a un motif valable de refuser cette occasion, et ce, même si ces facteurs ou situations ne sont pas mentionnés précisément dans la loi.

Si tel est le cas, il ne faut pas imposer une exclusion au bénéfice des prestations. Ces facteurs sont les suivants :

9.5.1 Conditions de travail dangereuses

Un prestataire a un motif valable de refuser un emploi qui comporte un danger réel et probable. La crainte d'un travailleur que son inexpérience puisse entraîner une blessure pourrait bien être fondée si le travail peut être effectivement dangereux.

Lorsque le danger est peu probable et que la peur semble être plus perçue que réelle, le refus pourrait être injustifié. Chaque cas doit être jugé selon ses mérites après un recueil de faits approprié, tant auprès du prestataire que de l'employeur. Il faut obtenir les détails sur la nature de chaque situation dangereuse réelle ou perçue et l’existence de précautions de santé et de sécurité.

Il reste que la peur est un état d’esprit. Même lorsqu'elle semble dénuée de fondement, la présence de circonstances atténuantes peut être reconnue. Le danger de contagion d'un prestataire peut être réel dans son esprit ou certaines machineries peuvent le rendre très nerveux. Le vertige qu'occasionnent les hauteurs ou la claustrophobie ressentie dans les ascenseurs peut constituer non seulement des circonstances atténuantes, mais peut servir de motif valable. On peut demander un certificat médical ou s’en remettre à la crédibilité des déclarations.

9.5.2 Forces armées

À cause des exigences particulières que comporte une carrière dans les Forces armées, ce genre d'emploi tient plus d'une vocation que d'un simple gagne-pain. Pour cette raison, on considère qu’il existe un motif valable en cas de refus de s’enrôler ou de prolonger le service.

9.5.3 Nécessité de vivre séparément du conjoint

Lorsque le déménagement de toute la famille n'est pas souhaitable, quand l'emploi proposé au loin n'est que temporaire, il faut se demander, après avoir tenu compte des dépenses qu'occasionneraient le déplacement et l'entretien de 2 logis, s'il est plus raisonnable de décliner ou d'accepter l'offre.

Il arrive souvent que les 2 conjoints soient sur le marché du travail; s'inspirant des principes régissant l'abandon volontaire d'emploi, à moins d'indication contraire, on tiendra pour acquis que la région qu'un couple habite est celle qui favorise la carrière professionnelle de l'un des 2, choix que le couple a déjà fait et qui doit être respecté. L'acceptation d'un emploi par l'autre conjoint serait influencée par ces facteurs. Lorsque ce premier choix nécessite que l'autre refuse d'aller travailler à une distance telle que le couple serait tenu de vivre séparément pendant de longues périodes, le refus peut être justifié. Par exemple, une personne peut être justifiée de refuser un emploi permanent qui ne lui permettrait de voir son conjoint que les fins de semaine. En général, on s'attend à ce que les conjoints habitent ensemble en permanence et si des facteurs d'ordre économique doivent les séparer, la situation doit être exceptionnelle et la séparation de courte durée (section 6.5.3 du Guide).

Toutefois, lorsqu'un couple vient s'installer en permanence dans une région presque dépourvue de possibilités d'emploi, il devra nécessairement être prêt à accepter des périodes de séparation si l’un d’eux ou tous 2 ont l’intention de rester sur le marché du travail.

La Loi n'exige pas expressément que les prestataires déménagent afin d'accepter un emploi convenable. Toutefois, elle exige qu'ils postulent un emploi convenable (vacant ou sur le point de l'être) et qu'ils acceptent un tel emploi, qu'ils tirent parti de toute possibilité d'emploi convenable (LAE 27(1)a) et b)); qu'ils soient disponibles pour travailler (LAE 18(1)); et qu'ils déploient tous les efforts raisonnables et habituels afin d'obtenir un emploi convenable (LAE 50(8)).

Dans certains secteurs, comme ceux de la construction, de l'exploitation minière, de la foresterie, de l'expédition, ou d'autres secteurs spécialisés ou types d'emploi temporaire ou saisonnier, un prestataire peut être tenu de vivre loin de ses proches ou à l'extérieur de sa ville de résidence pour de longues périodes. Les travailleurs de certains secteurs particuliers s'attendent à devoir vivre à l'extérieur du foyer familial pendant une certaine période (CUB 63327). Les prestataires qui choisissent de travailler dans ces secteurs doivent généralement accepter de vivre loin de leur famille pendant de longues périodes, pour autant que l'on ne les empêche pas d'aller voir leur famille à intervalles réguliers (CUB 56814, CUB 56893).

Dans ce genre de situations, plutôt que d'être volontairement sans emploi, les prestataires doivent chercher et accepter toute occasion d'emploi convenable dans le secteur où ils ont accumulé leurs heures d'emploi assurables, s'il est entendu que le fait d'accepter un nouvel emploi dans ce secteur ne les empêche pas d'aller voir leur famille régulièrement (CUB 78646, CUB 79985). Par exemple, un ingénieur minier vivant régulièrement loin de sa famille dans le cadre de son emploi situé en Saskatchewan est mis à pied. Compte tenu de la nature de la profession qu'il a choisi d'exercer, s'il retourne dans la province où il habite, ce prestataire doit être disposé à chercher et à accepter toute occasion d'emploi se trouvant en Saskatchewan, ainsi que dans la région où il habite.

Si un emploi convenable n'est pas immédiatement disponible en Saskatchewan et que le prestataire retourne dans la région où il habite, le prestataire doit être disposé à retourner travailler en Saskatchewan si on le rappelle, pour autant que le prestataire peut aller visiter sa famille régulièrement. À défaut de chercher et d'accepter un tel emploi, le prestataire risque de faire l'objet d'une exclusion pour avoir refusé un emploi, et peut également entraîner une présomption de non-disponibilité.

9.5.4 Milieu de travail

Lorsque le prestataire a de bonnes raisons de croire qu'une situation intolérable se présenterait au lieu de travail éventuel, expressément une situation qui ne peut être tolérée, il se peut que le refus soit justifié. Une situation intolérable est une situation qui est inhabituelle, extrême ou grave (CUB 41607).

Une déclaration non concluante ne suffit pas à cet égard. Il faut mener un recueil de faits auprès du prestataire et de l'employeur et déterminer dans quelle mesure la situation était si intolérable qu'une personne raisonnable ne pouvait l'accepter.

Ce peut être le cas lorsque la preuve démontre que le prestataire a travaillé pour l'employeur auparavant et qu'il a été congédié ou a quitté, ou lorsqu'il est établi que le milieu de travail n'est par ailleurs pas convenable. Toutefois, il peut y avoir des cas où la preuve démontre qu'une personne raisonnable aurait dû accepter l'emploi malgré le fait que le prestataire ne s'est pas auparavant « entendu » avec l'employeur, que le travail s'effectue dans une vielle usine ou que le travail est monotone.

9.5.5 Affiliation syndicale

Une personne a le droit de devenir membre d'une association ou d'un syndicat de travailleurs ou de refuser de s'y joindre. L'employeur et le syndicat ne peuvent porter atteinte à ce droit. Une fois la personne membre d'une association ou d'un syndicat, elle a le droit d'observer les règles licites de l'association ou du syndicat.

L'article 35 de la Loi mentionne :

« Malgré les autres dispositions de la présente partie, nul prestataire n'est exclu du bénéfice des prestations ni inadmissible pour l'une des raisons prévues aux articles 30 à 33 du seul fait qu'il a quitté ou refusé d'accepter un emploi si, en conservant ou en acceptant cet emploi, il eût, en ce qui concerne une association, une organisation ou un syndicat de travailleurs, perdu le droit, selon le cas :

  1. de s'y affilier ou de s'abstenir de s'y affilier; ou
  2. de continuer d'y être affilié et d'en observer les règles licites. » (LAE 35)

Bien qu'à première vue l'article 35 de la Loi semble s'appliquer aux cas où le prestataire refuse un emploi en raison de pressions du syndicat, ce n'est pas le cas. Ce droit ne protège pas des restrictions que les syndicats peuvent imposer à leurs propres membres; au lieu de cela, la perte du « droit » mentionné à l'article 35 est censée s'appliquer à la perte d'un droit juridique lié à l'affiliation à un syndicat et au respect des règles licites. Elle n'est pas destinée à viser l'application de politiques, de règlements, de constitutions, etc., internes au syndicat, qui pourraient avoir pour effet de menacer un prestataire, de lui infliger une amende ou de l'exclure du syndicat en question.

L'intention de l'article 35 de la Loi est de protéger le droit du prestataire à :

En d'autres mots, le prestataire ne peut être exclu du bénéfice des prestations pour avoir refusé un emploi si le fait d’accepter cet emploi lui ferait perdre le droit de s’affilier à un syndicat, se désaffilier d’un syndicat ou refuser une affiliation syndicale.

Par conséquent, le refus d'accepter un emploi par ailleurs convenable n'est justifié que lorsque l'acceptation de l'emploi éventuel signifie que le prestataire perdrait le droit de s'affilier au syndicat de son choix, de continuer d'y être affilié et d'en observer les règles licites ou de s'abstenir de devenir membre du syndicat reconnu au lieu d'affaires de l'employeur. Il incombe au prestataire de démontrer qu'il aurait été lésé dans ses droits.

Les tribunaux ont toujours estimé que les menaces ou les pressions exercées par un syndicat à un prestataire de quitter ou de refuser l'emploi est une affaire personnelle entre le prestataire et le syndicat.

9.5.6 Cours de formation

Un prestataire a un motif valable de refuser une offre d'emploi convenable pendant qu'il suit un cours vers lequel il a été dirigé aux termes de l'article 25 de la LAE. Lorsque le prestataire suit un cours vers lequel il n'a pas été dirigé, il n'existe aucun motif valable de refuser un emploi autrement convenable si le prestataire souhaite commencer ou poursuivre un cours de formation.

9.5.7 Travaux de la ferme

Un prestataire est justifié de refuser une offre d'emploi durant toute période où il est travailleur indépendant dans le secteur de l'agriculture dans une mesure autre que limitée (RAE 30(2) et 30(4)). Toutefois, puisqu'il s'agit d'un travailleur indépendant, on estime qu'un tel prestataire effectue des semaines entières de travail et n'est donc pas admissible aux prestations (RAE 30(1)).

Lorsqu'il s'agit d'une ferme de peu d'envergure, un prestataire dira souvent qu'il est disposé à accepter du travail ailleurs au cours de la saison morte et même parfois au cours de la saison agricole. Le cas échéant, il ne saurait être justifié d'invoquer par la suite les travaux de la ferme et le soin du bétail pour refuser une offre d'emploi convenable qu'un prestataire devrait, en d'autres circonstances, normalement accepter.

Enfin, si l'exploitant d'une ferme veut rester ou retourner sur le marché du travail, il doit d'abord prendre les mesures qui le libéreront de ses responsabilités agricoles advenant une possibilité d'emploi. Lorsqu'une offre d'emploi convenable concerne un emploi à une certaine distance de chez lui, mais que la durée du trajet à parcourir reste raisonnable, la nécessité pour le prestataire d'être chez lui à une certaine heure ou l'impossibilité de partir plus tôt le matin ne constitueraient pas un motif valable de refuser l'emploi en question (section 9.3.1.2 du Guide).

9.5.8 Vacances

Il se peut qu'un prestataire ayant pris des dispositions pour partir en vacances soit avisé d'une possibilité d'emploi. S'il lui est difficile ou impossible de mettre fin à ses vacances plus tôt ou si la date de début de l'emploi ne peut être repoussée, le prestataire peut avoir un motif valable de refuser l'emploi. Toutefois, ce prestataire serait exclu du bénéfice des prestations pendant ses vacances puisqu'il ne serait pas considéré comme disponible pour travailler pendant ce temps (LAE 18(1)(a)).

9.5.9 Possibilité d'obtenir un autre emploi

Il se peut qu'un prestataire refuse un emploi parce qu'il s'attend à obtenir un autre emploi plus satisfaisant. Un motif valable de refus peut exister dans de telles circonstances, suivant la situation personnelle de chaque prestataire. La Commission doit effectuer une recherche de faits rigoureuse avant qu'une décision à ce sujet soit prise. Les situations suivantes peuvent se présenter :

9.5.9.1 Emploi au moment de l'offre

Un prestataire a un motif valable de refuser une offre d'emploi s'il occupe déjà un emploi permanent à temps plein. Par contre, le refus d'un emploi permanent ou à temps plein n'est pas justifié du seul fait qu'une personne occupe un emploi occasionnel ou à temps partiel. Il en est de même de quelqu'un qui, ayant le choix entre 2 emplois, choisit celui de plus courte durée à moins que ce choix comporte aussi à brève échéance la promesse d'un emploi durable.

9.5.9.2 Promesse d'emploi

L’assurance d’obtenir dans un futur immédiat un emploi à plein temps mieux rémunéré est une bonne raison pour refuser une offre d’emploi convenable. Il n'est pas nécessaire qu'il y ait certitude absolue, il suffit d'une assurance raisonnable qu'un autre emploi sera offert comme promis. L'employeur doit avoir fait une véritable offre d'emploi, comportant une certaine assurance. En règle générale, toute affirmation du prestataire en ce sens doit être appuyée d'une preuve documentaire; l'obtention subséquente de l'emploi dans le délai prévu peut servir d'indice qu'il y a eu promesse d'emploi.

Par futur immédiat, on entend une période pouvant aller jusqu'à 4 semaines à partir de la date de l'offre d'emploi. Toutefois, peu importe le temps qui s'est écoulé entre l'offre d'emploi et la date de début de l'emploi, tous les facteurs doivent être examinés au moment de déterminer si un prestataire a un motif valable de refuser un emploi. Si l'autre emploi ne débute pas immédiatement, la Commission devra déterminer si le prestataire est toujours disponible pour travailler (section 10.8.2 du Guide).

Il peut y avoir des cas où un prestataire a accepté auprès d’un employeur un emploi devant commencer plus de 4 semaines après la date de l’offre d’emploi. Si le prestataire se voit offrir un emploi auprès d’un autre employeur avant le début du premier emploi, il doit examiner la possibilité de refuser l’emploi auprès du premier employeur, afin de mettre immédiatement fin à sa période de chômage. Il faudrait examiner toutes les modalités des 2 offres avant de déterminer si le prestataire avait un motif valable de refuser la deuxième offre.

Un prestataire peut également avoir reçu l'assurance d'obtenir un travail plus rémunérateur et à temps plein qu'il exécuterait pour son propre compte, et ce, dans un futur immédiat. Une fois de plus, il faut examiner si cet emploi doit commencer plus de 4 semaines après la date de l'offre d'emploi.

La promesse d'un autre emploi de courte durée ou du rappel rattaché à un emploi saisonnier ne constitue pas un motif valable pour refuser un emploi lorsque l'emploi offert sera d'une longue durée. On n'attachera point d'importance à une promesse d'emploi si, le moment venu, le prestataire n'accepte plus l'emploi en question. Il n'y a pas de motif valable là où l'acceptation de l'emploi offert de courte durée (par exemple : 2 à 3 semaines) ne compromet pas la possibilité d'obtenir plus tard l'emploi espéré.

9.5.9.3 Autres emplois obtenus plus tard

L'obtention d'un autre emploi peu après que l'offre a été faite peut confirmer une déclaration précédente voulant que le prestataire avait une promesse d'obtenir un emploi plus rémunérateur à temps plein dans un futur immédiat. Le fait que le prestataire a trouvé un autre emploi après avoir refusé une offre de travail ne justifie pas nécessairement le refus de l’offre précédente. Il n'en reste pas moins que l'obtention d'un emploi témoigne des efforts et du souhait d'une personne de mettre fin à sa période de chômage. Combinée à d'autres facteurs, l'obtention d'un autre emploi peu après l'offre peut constituer des circonstances atténuantes qui seraient prises en considération pour déterminer que le refus est justifié.

[Septembre 2019]

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