Rétrospective de l’année

En vertu du paragraphe 9.3(2) de la Loi sur la défense nationaleNote de bas de page 1, le juge-avocat général est tenu de présenter un rapport annuel au ministre de la Défense nationale sur l’administration de la justice militaire au sein des Forces armées canadiennes. J’ai le grand plaisir de présenter mon premier rapport annuel au ministre de la Défense nationale sur l’administration de la justice militaire au sein des Forces armées canadiennes pour la période de référence du 1er avril 2023 au 31 mars 2024.

Faits marquants de l’année dans le domaine de la justice militaire

La période de référence 2023/24 marque une autre année occupée et stimulante pour le Cabinet du juge-avocat général (Cabinet du JAG). Comme le mentionnent les rapports précédents, le système de justice militaire a subi des changements importants au cours des dernières années, en particulier avec l’entrée en vigueur du projet de loi C-77, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et apportant des modifications connexes et corrélatives à d’autres loisNote de bas de page 2, qui, entre autres, a introduit la Déclaration des droits des victimes et un nouveau système d’audience sommaire pour traiter les inconduites mineures au niveau de l’unité. Cette évolution s’est poursuivie tout au long de la période visée par le présent rapport avec un certain nombre de changements importants qui sont brièvement décrits ci-dessous.

Projet de loi C-66, Loi sur la modernisation du système de justice militaire – Le 21 mars 2024, le gouvernement a déposé le projet de loi C-66, Loi sur la modernisation du système de justice militaireNote de bas de page 3, à la Chambre des communes. Le projet de loi C-66 modifierait la Loi sur la défense nationale afin de moderniser le système de justice militaire en répondant, entre autres, à un certain nombre de recommandations formulées dans le Rapport de l’examen externe indépendant et complet du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes (EEIC) par l’ancienne juge de la Cour suprême Louise ArbourNote de bas de page 4 et le Rapport de l’autorité du troisième examen indépendant au ministre de la Défense nationale (EI3) par l’ancien juge de la Cour suprême Morris J. FishNote de bas de page 5.

Les modifications proposées par le projet de loi à la Loi sur la défense nationale peuvent être divisées en quatre volets thématiques.

Le premier volet des modifications législatives proposées répondrait à la recommandation no 5 de l’EEIC en retirant définitivement aux Forces armées canadiennes la compétence d’enquêter et de juger les infractions d’ordre sexuel prévues au Code criminel qui sont présumées avoir été commises au Canada. Avec ce changement, les autorités civiles auraient compétence exclusive pour enquêter sur de telles infractions et intenter des poursuites lorsqu’elles sont présumées avoir été commises au Canada.

Le deuxième volet des modifications législatives proposées répondrait à huit recommandations de l’EI3 (2, 7, 8, 10, 13, 14, 15 et 16) en modifiant le processus de nomination de trois autorités clés de la justice militaire, soit le grand prévôt des Forces canadiennes (dont le titre serait remplacé par grand prévôt général), le directeur des poursuites militaires et le directeur du service d’avocats de la défense, faisant de ces postes des nominations par le gouverneur en conseil et prévoyant leur mandat. Le grand prévôt général rendrait compte au ministre de la Défense nationale de l’exercice des responsabilités mentionnées dans la Loi sur la défense nationale. De plus, le ministre de la Défense nationale pourrait établir des lignes directrices ou donner des instructions générales par écrit au grand prévôt général concernant les responsabilités, ainsi que des lignes directrices ou des instructions générales par écrit au directeur des poursuites militaires en ce qui concerne une poursuite en particulier. De plus, le projet de loi confirme que l’exercice par le juge-avocat général de son autorité sur tout ce qui touche à l’administration de la justice militaire s’effectue dans le respect de l’indépendance des autorités du système de justice militaire. Le projet de loi vise également à élargir les critères d’éligibilité à une nomination comme juge militaire pour inclure les militaires du rang, ce qui contribuerait à diversifier le bassin de candidats potentiels. Enfin, le projet de loi élargit le groupe de personnes pouvant déposer une plainte pour ingérence dans le cadre d’une enquête de la police militaire et prévoit que les policiers militaires ou quiconque exerce des fonctions de nature policière sous la direction du grand prévôt général sont tenus de déposer une telle plainte dans certaines circonstances.

Le troisième volet des modifications proposées vise à retirer les juges militaires d’être jugées par le système d’audience sommaire et à renforcer le soutien aux victimes en élargissant l’accès des agents de liaison de la victime aux particuliers agissant pour le compte d’une victime en vertu de la Déclaration des droits des victimes. Ces modifications s’ajoutent aux efforts déployés dans le cadre de l’ancien projet de loi C-77, qui a introduit la Déclaration des droits des victimes.

Finalement, le projet de loi C-66 propose également d’apporter des modifications à la Loi sur la défense nationale pour harmoniser les dispositions concernant les renseignements sur les délinquants sexuels et les interdictions de publication avec les modifications apportées au Code criminel par l’ancien projet de loi S-12Note de bas de page 6 qui est entré en vigueur en octobre 2023. Ces modifications sont nécessaires pour s’assurer que le système de justice militaire reste conforme à la Charte canadienne des droits et libertésNote de bas de page 7 et soit aligné avec le système civil de justice pénale.

Le plan global de mise en œuvre – Les efforts continus du Cabinet du JAG en vue de moderniser la justice militaire sont désormais pris en compte dans le plan global de mise en œuvre du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes, un plan pluriannuel visant à créer une approche plus ouverte, transparente et responsable à l’égard du changement de culture et des initiatives de modernisation de la justice militaire. Le plan global de mise en œuvre intègre les recommandations de quatre examens externes clés, soit l’EI3, l’EEIC, le rapport du Groupe consultatif de la ministre de la Défense nationale sur le racisme systémique et la discriminationNote de bas de page 8 et le rapport du Comité consultatif sur la présentation d’excuses nationales du 2e Bataillon de constructionNote de bas de page 9. Le Cabinet du JAG joue un rôle important en contribuant aux priorités institutionnelles globales dans la promotion des initiatives de modernisation de la justice militaire qui font partie du plan global de mise en œuvre.

Le processus de sélection des juges militaires – Un nouveau processus de sélection des juges militaires a débuté le 31 août 2023, avec un message général des Forces armées canadiennes sollicitant les candidatures des personnes intéressées à voir leur nom ajouté à la liste des candidats potentiels à la nomination en tant que juges militaires de la Force régulière et de la Force de réserve. Les candidatures des personnes qualifiées sont examinées par le comité de sélection des juges militaires, un comité composé de cinq personnes nommées par le ministre, qui évalue les candidats et assiste le ministre dans le processus de sélection. Le comité fournit au ministre des conseils sur les qualifications, la compétence et la convenance générale des candidats. L’objectif du processus est de s’assurer qu’un bassin actuel de candidats évalués pour la magistrature militaire est disponible pour pourvoir les postes vacants.

Le départ à la retraite du juge en chef de la Cour d’appel de la cour martiale – Le 30 octobre 2023, le juge en chef de la Cour d’appel de la cour martiale, l’honorable B. Richard Bell, a pris sa retraite de la Cour. Le juge en chef Bell siégeait à la Cour d’appel de la cour martiale depuis 2015. Au cours de sa carrière à la Cour d’appel de la cour martiale, il a mené de nombreuses initiatives importantes pour améliorer la cour et le système de justice militaire, notamment en exigeant que les décisions de la cour soient publiées simultanément dans les deux langues officielles et en instituant un programme de formation spécialisée pour les juges sur des sujets tels que l’agression sexuelle, le droit humanitaire international et la détermination de la peine. L’honorable Elizabeth A. Bennet agira à titre de juge en chef par intérim jusqu’à ce qu’un nouveau juge en chef soit nommé. La juge en chef intérimaire Bennett est juge à la Cour d’appel de la Colombie-Britannique depuis 2009 et siège à la Cour d’appel de la cour martiale depuis 1999.

Le rapport du Comité d’examen de la rémunération des juges militaires – Le 31 janvier 2024, le Comité d’examen de la rémunération des juges militaires a publié le rapport de ses recommandations sur la rémunération appropriée des juges militaires pour la période de 2019 à 2023. Le Comité d’examen de la rémunération des juges militaires est un organisme créé par le Parlement pour assurer un processus indépendant, objectif et dépolitisé d’établissement des salaires des juges. Le comité, qui a pour mandat, en vertu de la Loi sur la défense nationale, de soumettre tous les quatre ans au ministre des recommandations concernant le caractère adéquat de la rémunération des juges militaires, joue un rôle semblable et fonctionne selon des principes juridiques similaires à ceux de son homologue civil, la Commission d’examen de la rémunération des juges. En formulant ses recommandations sur la rémunération des juges militaires, le comité tient compte de facteurs comme la nécessité d’attirer les meilleurs candidats pour la magistrature et le besoin de préserver l’indépendance judiciaire et l’état de l’économie au Canada. Dans son dernier rapport, le comité a recommandé que les juges militaires aient la parité de rémunération avec les autres juges nommés par le gouvernement fédéral et que les juges militaires reçoivent une nouvelle indemnité annuelle de faux frais de 3 000 $. Le ministre a accepté ces recommandations le 31 juillet 2024.

La désignation d’un nouveau juge militaire en chef – Le 21 mars 2024, le gouverneur en conseil a désigné une nouvelle juge militaire en chef : Capitaine de vaisseau Catherine Julie Deschênes. La Capitaine de vaisseau Deschênes est juge militaire depuis 2019. Auparavant, elle a été avocate militaire au Cabinet du JAG, où elle a occupé de nombreux postes au Canada et dans le cadre d’opérations dans le monde entier, y compris à titre de conseillère juridique du bureau du Chef d’état-major de la Défense. Le poste de juge militaire en chef était vacant depuis mars 2020. Le Lieutenant-colonel Louis-Vincent d’Auteuil, juge militaire en chef adjoint, a agi à titre de juge militaire en chef par intérim depuis mars 2020.

La Politique sur la justice militaire au niveau de l’unité 2.0 – Le processus d’audience sommaire est en place depuis juin 2022. Dans le cadre de la modernisation continue du système de justice militaire, la Politique sur la justice militaire au niveau de l’unité (Politique JMNU) a été mise à jour le 12 avril 2024, peu après la fin de la période de référence actuelle. Les mises à jour de la Politique JMNU 2.0 comprennent des annexes décrivant les éléments des manquements d’ordre militaire, des conseils aux autorités du système de justice militaire compétentes sur les droits des victimes et sur les droits des personnes affectées par des manquements d’ordre militaire. Les mises à jour de la Politique JMNU 2.0 comprenaient également des directives supplémentaires pour les officiers tenant une audience sommaire sur la détermination des sanctions appropriées et la rédaction de motifs. Le Cabinet du JAG continuera de travailler avec les commandants des Forces armées canadiennes et tous les intervenants pour continuer à moderniser le système de justice militaire, y compris le processus d’audience sommaire afin de satisfaire aux exigences des Forces armées canadiennes.

La justice militaire et la Cour suprême à l’ère de la Charte

Un autre événement important s’est produit en octobre 2023, lorsque la Cour suprême du Canada a entendu les arguments dans l’affaire R c EdwardsNote de bas de page 10 concernant l’indépendance des juges militaires. Il s’agit de la plus récente affaire de justice militaire entendue par le plus haut tribunal du Canada. L’arrêt de la Cour suprême, dans lequel elle confirme que les cours martiales satisfont aux exigences constitutionnelles d’un tribunal indépendant et impartial, a été rendu public en avril 2024, peu après la fin de la période de référence. Néanmoins, l’arrêt Edwards offre l’occasion de souligner le rôle déterminant que la Cour suprême a joué dans l’évolution du système de justice militaire.

La première importante contribution de la Cour suprême à l’évolution de la justice militaire à l’ère de la Charte a été sa décision de 1992 dans l’affaire R c GénéreuxNote de bas de page 11. Cet arrêt est fondamental pour un certain nombre de raisons. Premièrement, il a confirmé la légitimité, la nécessité et la constitutionnalité du système de justice militaire dans son ensemble. S’exprimant au nom de la majorité, le juge en chef Lamer a fait remarquer ce qui suit :

Pour que les Forces armées soient prêtes à intervenir, les autorités militaires doivent être en mesure de faire respecter la discipline interne de manière efficace. Les manquements à la discipline militaire doivent être réprimés promptement et, dans bien des cas, punis plus durement que si les mêmes actes avaient été accomplis par un civil. […] Le recours aux tribunaux criminels ordinaires, en règle générale, serait insuffisant pour satisfaire aux besoins particuliers des Forces armées sur le plan de la discipline. Il est donc nécessaire d’établir des tribunaux distincts chargés de faire respecter les normes spéciales de la discipline militaireNote de bas de page 12.

En même temps, la Cour s’est penchée sur la question de savoir si les cours martiales étaient suffisamment indépendantes pour satisfaire aux exigences de l’alinéa 11d) de la Charte. La Cour a examiné la même question dans l’arrêt Edwards. À ce sujet, la Cour a conclu que la cour martiale générale, telle qu’elle était alors constituée, ne respectait pas le droit de l’accusé d’être jugé par un tribunal juste et indépendant. Plus précisément, la Cour a conclu que la nomination ponctuelle d’avocats militaires du Cabinet du JAG pour présider les cours martiales générales ne répondait pas aux exigences de sécurité financière ou d’inamovibilité, tandis que la participation des officiers supérieurs aux étapes clés du processus des cours martiales compromettait l’indépendance institutionnelle de la cour martiale générale. La réponse du Canada à l’arrêt Généreux, ainsi qu’à un rapport de l’ancien juge en chef Brian DicksonNote de bas de page 13, a été la Loi modifiant la Loi sur la défense nationale et apportant des modifications connexes et corrélatives à d’autres loisNote de bas de page 14, à l’époque, la plus vaste série de modifications à la Loi sur la défense nationale depuis son adoption en 1950. Cette Loi a établi que les juges militaires sont nommés à titre inamovible par le gouverneur en conseil et sont indépendants du Cabinet du JAG.

En 2016, la Cour suprême a de nouveau examiné la question de l’indépendance du système de justice militaire dans l’arrêt R c CawthorneNote de bas de page 15. Cette affaire portait sur le pouvoir du ministre de la Défense nationale d’interjeter appel en vertu de la Loi sur la défense nationale. La Cour a rejeté les arguments selon lesquels le fait de conférer ce pouvoir au ministre violait le droit à un poursuivant indépendant garanti par l’alinéa 11d) et l’article 7 de la Charte. La Cour a conclu que le ministre a droit à la forte présomption qu’il exerce son pouvoir discrétionnaire en matière de poursuites indépendamment de toute considération partisane et que le simple fait que le ministre soit membre du Cabinet n’écarte pas cette présomption. Par conséquent, la Cour a confirmé les dispositions de la Loi accordant au ministre le pouvoir d’interjeter appel.

En plus de confirmer les fondements constitutionnels du système de justice militaire et d’examiner les questions d’indépendance, les décisions de la Cour suprême ont également joué un rôle essentiel en clarifiant la portée de la compétence de ce système. Dans l’arrêt R c MoriarityNote de bas de page 16, la Cour a examiné si les dispositions de la Loi sur la défense nationale qui incorporent des infractions au Code criminelNote de bas de page 17 et à d’autres lois fédérales dans la compétence du système de justice militaire, étaient inconstitutionnelles pour cause de portée excessive. Les appelants dans cette affaire ont soutenu que la compétence dont jouit le système de justice militaire à l’égard des infractions au Code criminel exigeait un lien entre les circonstances de l’infraction présumée et le service militaire. La Cour a rejeté cet argument et a conclu que l’objectif du législateur en créant le système de justice militaire était d’établir des procédures pour assurer la discipline, l’efficacité et le moral des troupes. La Cour a conclu qu’un comportement criminel, même lorsqu’il est commis dans des circonstances qui ne sont pas directement liées à des fonctions militaires, peut avoir une incidence sur les normes applicables au titre de la discipline, de l’efficacité et du moral des troupes et, par conséquent, relève de la compétence du système de justice militaireNote de bas de page 18

La Cour suprême a examiné une deuxième fois la question de la compétence du système de justice militaire à l’égard des infractions au Code criminel dans l’arrêt R c StillmanNote de bas de page 19. L’argument principal présenté à la Cour dans cette affaire était de savoir si la disposition de la Loi sur la défense nationale accordant au système de justice militaire la compétence à l’égard des infractions au Code criminel violait le droit d’un accusé à un procès avec jury garanti par l’alinéa 11f) de la Charte. L’alinéa 11f) prévoit que tout inculpé a le droit, sauf s’il s’agit d’une infraction relevant de la justice militaire jugée par un tribunal militaire, de bénéficier d’un procès avec jury lorsque la peine maximale prévue pour l’infraction dont il est accusé est un emprisonnement de cinq ans ou une peine plus grave. La Cour a statué que la disposition contestée de la Loi sur la défense nationale est conforme à l’alinéa 11f) et a confirmé que le Parlement avait validement adopté les infractions d’ordre militaire désignées comme « infraction relevant de la justice militaire » à l’alinéa 11f) de la Charte. En s’appuyant sur son raisonnement dans l’arrêt Moriarity, la Cour a également conclu que le statut de militaire de l’accusé était suffisant pour accuser une personne d’une infraction d’ordre militaire en vertu de la Loi sur la défense nationale et qu’un lien de connexité avec le service militaire n’était pas requis. En arrivant à cette conclusion, la Cour a réaffirmé sa conclusion dans l’affaire Généreux selon laquelle le système de justice militaire existe pour assurer le maintien de la discipline, de l’efficacité et du moral des Forces armées canadiennes. En examinant l’évolution du système de justice militaire depuis l’arrêt Généreux, les juges Moldaver et Brown ont fait remarquer que

[l]e système de justice militaire a beaucoup évolué. Il est passé d’un modèle de discipline centré sur le commandement qui offrait de faibles garanties procédurales à un système de justice parallèle s’apparentant beaucoup au système civil de justice pénaleNote de bas de page 20.

Le développement le plus récent de la Cour suprême concernant son rôle continu dans l’évolution du système de justice militaire est sa décision dans l’affaire Edwards, dans laquelle la Cour est revenue sur la question qu’elle avait examinée pour la première fois dans l’affaire Généreux : la question de savoir si les cours martiales sont des tribunaux suffisamment indépendants et impartiaux pour répondre aux exigences de l’alinéa 11d) de la Charte. L’arrêt Edwards concerne une série de pourvoisNote de bas de page 21 dans lesquelles des membres des Forces armées canadiennes ont interjeté appel de leurs déclarations de culpabilité pour des infractions d’ordre militaire au motif que le statut militaire des juges de la cour martiale violait leurs droits garantis par l’alinéa 11d).

En rejetant l’appel, la Cour a affirmé que les membres accusés des Forces armées canadiennes qui comparaissent devant une cour martiale dans le système de justice militaire, ont droit à la même garantie d’indépendance et d’impartialité judiciaire, que les accusés qui sont jugés dans le système civil. Toutefois, la Cour a conclu qu’il n’était pas nécessaire que les deux systèmes soient identiques en tous points et que l’alinéa 11d) n’exige pas une indépendance totale ni idéale. Le juge Kasirer a affirmé pour la majorité que

[s]uivant sa configuration actuelle dans la [Loi sur la défense nationale], le système de justice militaire canadien garantit pleinement l’indépendance judiciaire des juges militaires d’une manière qui tient compte du contexte militaire, et plus particulièrement des politiques législatives visant à maintenir la “discipline, l’efficacité et le moral” au sein des Forces ainsi que “la confiance du public dans [...] [une] force armée disciplinée” […]. Bien compris, le contexte militaire ne diminue pas l’indépendance judiciaireNote de bas de page 22.

L’idée centrale de l’arrêt de la Cour est que les juges militaires sont et peuvent être à la fois des officiers militaires et des juges. Le système de justice militaire au Canada a évolué et est maintenant un système parallèle au système civil de justice pénale, au sens que les militaires peuvent être rassurés de savoir que s’ils font face à un procès devant une cour martiale, ils seront jugés par un juge indépendant et impartial comme le garantit la Constitution.

Conclusion

Il s’agit d’une période stimulante et excitante pour le système de justice militaire, qui continue de changer pour s’adapter aux normes juridiques et sociales en évolution du Canada. À mesure que ce processus se déroule, le Cabinet du JAG demeure pleinement engagé à veiller à ce que le système de justice militaire suit le rythme de ces changements, guidé par le chevauchement des impératifs de la primauté du droit, les droits de tous les participants et les exigences uniques des Forces armées canadiennes.

Fiat Justitia

Robin F. Holman, MSM, CD
Brigadier-général

Notes de bas de page

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2024-11-12