Objectif proposé pour la qualité de l’eau potable au Canada pour les substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées : Considérations relatives au traitement

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Traitement des eaux municipales

Généralement, les études sur l'efficacité du traitement sont réalisées avec une série limitée de SPFA, à des concentrations beaucoup plus élevées que celles qui sont observées dans les eaux potables brutes et traitées (Crone et coll., 2019). L'efficacité de l'enlèvement peut varier grandement pour les SPFA ayant des propriétés physicochimiques différentes (p. ex. la longueur de la chaîne carbonée) lorsqu'elles sont évaluées à des concentrations applicables à l'eau potable. On devrait effectuer une évaluation de la vulnérabilité pour déterminer les dangers, ce qui comprend les sources potentielles de contamination et la vulnérabilité de la source d'approvisionnement en eau à la contamination par les SPFA (Santé Canada, 2021b). Il faut procéder à une caractérisation approfondie de la source d'approvisionnement en eau pour évaluer la présence, l'identité et la concentration de toute SPFA; ces renseignements sont essentiels pour établir les conditions opérationnelles et pour estimer la durée d'utilisation du milieu de traitement avant la percée. Les technologies de traitement les plus efficaces (efficacité d'enlèvement > 90 % pour certaines SPFA) sont le charbon actif granulaire (CAG), la filtration sur membrane (osmose inverse [OI] et nanofiltration [NF]) et l'échange d'anions (AIX) (Appleman et coll., 2013, 2014; Dickenson et Higgins, 2016; Sanexen, 2022). En général, les principaux points à prendre en compte lors du choix des technologies de traitement pour l'enlèvement des SPFA sont la présence d'espèces de SPFA et d'anions en compétition, la présence de matière organique et la fréquence de régénération ou de remplacement requise pour le milieu sorbant utilisé (Appleman et coll., 2013). L'efficacité du traitement de l'eau potable du point de vue de l'enlèvement des SPFA dépend de plusieurs facteurs, notamment les caractéristiques de la source d'approvisionnement en eau, la concentration et le type de SPFA, les objectifs du traitement et le bon fonctionnement du système en tout temps.

Les technologies courantes de traitement de l'eau potable (p. ex. la coagulation, la floculation et l'oxydation) ne sont pas efficaces pour enlever les SPFA. Bien qu'il existe des technologies de traitement qui permettent d'enlever efficacement certaines SPFA, aucun traitement ne peut à lui seul enlever une large gamme de SPFA dans toutes les conditions. Chaque technologie de traitement présente des avantages et des inconvénients. L'atteinte de l'objectif proposé peut nécessiter le recours à une chaîne de traitement comprenant plus d'une technologie, ou encore l'utilisation d'une technologie plusieurs fois de suite pour traiter l'ensemble des SPFA présentes dans l'eau brute. Pour assurer un enlèvement continu et efficace, chaque installation doit établir des conditions et des paramètres opérationnels fondés sur la ou les technologies de traitement choisies et les caractéristiques de l'eau brute, dont le type de SPFA, la concentration de SPFA et les objectifs de traitement.

L'élimination et la manipulation des milieux sorbants, des concentrés et des résidus sont également des éléments à considérer lors du choix d'une technologie de traitement pour l'enlèvement des SPFA. Le traitement et l'élimination des milieux filtrants au CAG utilisés et de l'eau sale de lavage à contre-courant, des résines échangeuses d'ions et des concentrés de régénération, ainsi que des concentrés de membrane et des eaux de lavage, lesquels contiennent des concentrations élevées de SPFA, sont des points importants dont il faut tenir compte dans le choix et l'utilisation d'une technologie de traitement des SPFA. Par exemple, les milieux filtrants (comme le CAG) et d'échange d'ions utilisés doivent être éliminés de manière appropriée, à l'aide de techniques spécialisées (p. ex. régénération ou destruction à haute température), pour éviter le rejet des SPFA dans l'environnement. De même, les technologies membranaires nécessitent le traitement et l'élimination du concentré, des eaux de lavage ou des produits résiduels (U.S. EPA, 2022c). La disponibilité des options d'élimination des résidus de traitement (y compris des milieux) peut également limiter le choix d'une technologie de traitement. En outre, le choix peut également être restreint par les exigences des autorités compétentes en matière d'élimination.

Un nombre limité d'études à l'échelle de banc d'essai ont évalué l'enlèvement des perfluorocarboxylates et des perfluorosulfonates par le charbon actif en poudre (CAP). D'après les résultats de ces études, l'efficacité médiane de l'enlèvement de SPFA individuelles par le CAP était de 64,5 % (Sanexen, 2022). En raison d'inefficacités, le CAP doit être combiné à d'autres technologies de traitement pour atteindre un taux d'élimination de 90 % ou plus. Il faut également tenir compte de la manière dont les boues décantées contenant le CAP chargé en SPFA seront éliminées.

C'est pour le CAG que l'on dispose du plus grand nombre de données pertinentes sur le terrain obtenues à l'échelle pilote et à grande échelle (Sanexen, 2022); cette méthode s'est d'ailleurs avérée efficace pour enlever les SPFA de l'eau potable à des concentrations relativement faibles (Appleman et coll., 2014). De plus, le CAG peut être utilisé avec de l'eau de différentes compositions chimiques et conserver ses caractéristiques de performance. Toutefois, le CAG a démontré une affinité plus grande pour les SPFA dont la chaîne carbonée compte plus de six atomes de carbone que pour les SPFA à chaîne plus courte (Gagliano et coll., 2020). En outre, les sulfonates perfluorés sont adsorbés plus facilement par le CAG que les acides carboxyliques perfluorés en raison de leur hydrophobicité accrue (Du et coll., 2014). Par conséquent, les milieux au CAG doivent être régénérés ou remplacés plus souvent lors du traitement de certaines SPFA (Rodowa et coll., 2020). Les paramètres opérationnels tels que le type de CAG (p. ex. charbon bitumineux), la taille du fût et le taux de chargement hydraulique influent également sur la durée de fonctionnement du filtre (Belkouteb et coll., 2020). Les propriétés des résines échangeuses d'anions, notamment la porosité, le groupe fonctionnel et la matrice polymère, influent sur l'efficacité du traitement des SPFA (Gagliano et coll., 2020). Étant donné que de nombreuses SPFA existent sous forme d'anions à des pH applicables à l'eau potable, les résines AIX à base forte sont capables d'enlever ces espèces de SPFA (Crone et coll., 2019). Le procédé AIX enlève également de manière préférentielle les SPFA à longue chaîne et les perfluorosulfonates (Appleman et coll., 2014). Cependant, la modification des caractéristiques des résines AIX (p. ex. l'hydrophobicité du groupe fonctionnel) peut augmenter la capacité de sorption des SPFA moins hydrophobes (Chularueangaksorn et coll., 2014; Zaggia et coll., 2016). Bien que les résines AIX offrent l'avantage d'une plus grande capacité d'adsorption que le CAG, elles sont généralement limitées à une seule utilisation pour les applications liées à l'eau potable (Crone et coll., 2019; Ross et coll., 2018). On a toutefois réussi à régénérer les résines AIX dans certaines études (Crone et coll., 2019), mais il a fallu recourir à des procédures complexes ou non standard.

Les technologies membranaires que sont l'OI et la NF permettent toutes les deux d'enlever très efficacement de nombreuses SPFA. L'OI enlève efficacement les SPFA de toutes les longueurs de chaîne selon un mécanisme d'exclusion par la taille et un mécanisme de rejet selon la charge. La NF repose principalement sur la répulsion électrostatique et l'hydrophobie, en particulier pour enlever les SPFA à chaîne courte (Dickenson et Higgins, 2016; Zeng et coll., 2017). Le taux de rejet par OI et par NF peut varier d'une SPFA à l'autre, et il peut être sensiblement plus faible pour les SPFA à charge neutre comme le FOSA (Steinle-Darling et Reinhard, 2008; Steinle-Darling et coll., 2010; Sanexen, 2022). Les deux technologies membranaires sont sujettes à des problèmes d'encrassement et d'entartrage, ce qui limite leur application à grande échelle.

Caractère réalisable du traitement

Des études évaluant le caractère réalisable du traitement des SPFA à l'échelle pilote et à grande échelle ont démontré que le CAG, l'AIX et l'OI peuvent tous réduire efficacement les concentrations d'APFC et de SPFA à chaîne courte en deçà des limites de détection allant d'une valeur inférieure à 1 à 2 ng/L pour les SPFA individuelles. Cependant, pour obtenir ces concentrations, les systèmes de traitement doivent être configurés et exploités comme il se doit. L'obtention de concentrations aussi faibles peut également se traduire par des conditions d'exploitation difficiles, notamment des temps de contact en fût vide très longs ou la nécessité de régénérer ou de remplacer fréquemment les milieux, ce qui peut s'avérer irréaliste sur le plan pratique ou économique pour certaines installations de traitement de l'eau (Sanexen, 2022).

Technologies de traitement de l'eau à l'échelle résidentielle (puits privés)

Dans les cas où l'on souhaite enlever les SPFA à l'échelle résidentielle ou des petits systèmes, par exemple, quand un ménage s'approvisionne en eau potable par un puits privé, un dispositif de traitement de l'eau potable peut réduire la concentration d'un nombre limité de SPFA dans l'eau potable.

Les dispositifs de traitement peuvent être certifiés conformes à la norme NSF 53 (pour le CAG) et à la norme NSF 58 (pour l'OI) (NSF International, 2021a, b) pour ce qui est de la réduction des concentrations de "SPFA totales" dans l'eau potable pour les sept SPFA suivantes :

Les critères révisés devraient être publiés dans les normes NSF 53 et NSF 58 au début de 2023. L'utilisation de dispositifs de traitement certifiés conformes aux critères révisés aidera les propriétaires à réduire davantage leur exposition aux SPFA par l'eau potable. L'utilisation de dispositifs de traitement certifiés selon les critères révisés permettra aux ménages de réduire davantage leur exposition aux SPFA par l'eau potable.

Lorsqu'un système de traitement de l'eau potable certifié n'est pas disponible, Santé Canada recommande fortement que tout produits chimiques utilisés dans ces systèmes de traitement (par exemple, échangeurs d'ions) soient certifiés conformes à la norme NSF/ANSI 60. De plus, les matériaux et composants utilisés dans ces systèmes de traitement devraient être certifiés à la norme NSF/ANSI 61 (pour le relargage) ainsi que la norme NSF/ANSI 372 (pour la teneur en plomb).

Les ménages devraient consulter les responsables locaux afin de déterminer les options qui s'offrent à eux pour l'élimination des milieux de traitement et des résidus qui pourraient contenir des concentrations élevées de SPFA.

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