Réponse de l’ARC au rapport de l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement
Il s’agit du premier examen de l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement (OSSNR) du programme de l’Agence du revenu du Canada (Agence) visant à protéger les organismes de bienfaisance contre l’abus à des fins terroristes, administré par la Division de la revue et de l’analyse (DRA). L’examen, centré uniquement sur la charge de travail de vérification de la DRA, a évalué le caractère raisonnable, la nécessité et la conformité avec la loi des activités et du processus de prise de décisions du programme en matière de sécurité nationale.
Introduction
L’Agence reconnaît le rôle important des organes d’examen au sein des communautés de sécurité nationale et de renseignement et a accueilli l’examen de l’OSSNR. L'Agence croit que les recommandations de l’OSSNR aideront à améliorer le programme de vérification de sorte qu’elle pourra conserver son rôle d’appui administratif aux efforts du Canada dans la lutte contre le financement du terrorisme. L’Agence reconnaît l’importance de l’amélioration continue de ses processus et de ses procédures afin de renforcer la constance et l’impartialité dans la prise de décisions et d’assurer la qualité supérieure du programme de vérification des organismes de bienfaisance et elle s’engage à mettre en place des améliorations pour renforcer ces processus. L’Agence est satisfaite du fait que l’OSSNR a conclu que bon nombre de ses procédures d’évaluation du risque en matière d’abus à des fins terroristes et de ses pratiques en matière d’évaluation du risque connexe ont été améliorées.
Même si l’Agence a depuis longtemps le mandat de protéger l’intégrité du système d’enregistrement des organismes de bienfaisance (qui comprend l’interdiction du soutien du terrorisme), la DRA a été établie en 2003 en reconnaissance du fait que l’évolution des activités terroristes a entraîné une redéfinition du rôle et de l’importance des efforts à l’appui du plan du Canada en matière de lutte contre le terrorisme et de ses engagements internationaux à cet égard. Par le truchement de la DRA, l’Agence joue un rôle proactif dans la détection et l’examen des liens entre les groupes terroristes et les organismes de bienfaisance enregistrés ou les organismes qui demandent l’enregistrement pour veiller à ce que les partisans du terrorisme n’exploitent pas le secteur de la bienfaisance.
Les contributions de l’Agence au régime canadien de lutte contre le financement des activités terroristes se concrétisent dans l’administration de la Loi de l’impôt sur le revenu (LIR) et servent à prévenir l’exploitation des organismes de bienfaisance enregistrés en veillant à ce que des mesures soient en place pour atténuer les risques. Les contributions de l’Agence sont aussi essentielles à la conformité du Canada aux normes internationales qui visent à protéger le secteur à but non lucratif contre le financement du terrorisme, ce qui concorde avec la conclusion de l’OSSNR selon laquelle la fonction de vérification de l’Agence respecte les obligations internationales du Canada en matière de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme.
Il est primordial de comprendre que ce ne sont pas tous les résultats de vérification où des risques relatifs au terrorisme sont décelés au départ qui comprendront des conclusions liées explicitement au terrorisme, puisque certaines préoccupations initiales peuvent être abordées durant la vérification et les préoccupations finales peuvent démontrer l’adéquation des mesures d’atténuation des risques en place, plutôt que de confirmer que les ressources étaient utilisées pour appuyer le terrorisme. Au bout du compte, l’Agence ne peut qu’aborder les risques de financement du terrorisme qui concernent le non‑respect possible de la LIR. Il incombe aux organismes d'application de la loi, et non à l’Agence, d’enquêter sur les infractions liées au terrorisme, même celles qui concernent l’exploitation d’un organisme de bienfaisance enregistré.
Le programme de vérification des organismes de bienfaisance de l’Agence a évolué au fil du temps, et la compréhension des risques de financement du terrorisme et l’efficacité des approches d’atténuation des risques se sont améliorées. Nous sommes satisfaits du fait que l’OSSNR ait conclu que l’Agence est consciente des changements dans le contexte de menace. L’Agence est consciente des répercussions que les préoccupations relatives au terrorisme ont sur les organismes de bienfaisance qu’elle sélectionne aux fins de vérification, ainsi que sur les communautés du Canada où les risques d’abus sont peut-être plus présents étant donné leurs liens avec des zones en conflit où opèrent des groupes terroristes qui ciblent des organisations sans but lucratif afin de gagner leur sympathie et leur soutien. L’Agence est aussi consciente du risque de préjugés dans l’exécution de son mandat et prend des mesures pour éliminer les préjugés autant que possible, notamment au moyen de la formation continue et d’améliorations aux processus et à la prise de décision.
Puisque l’OSSNR a centré son examen de la charge de travail de l’Agence sur la période depuis la création de la DRA et qu’il s’est concentré uniquement sur la fonction de vérification, les conclusions ne reflètent malheureusement pas toujours les pratiques actuelles de l’Agence et n’accordent pas suffisamment de poids aux améliorations apportées aux processus ou à d’autres activités que l’Agence réalise pour aider les organismes de bienfaisance à atténuer les risques d’abus à des fins terroristes. L’Agence informe les organismes de bienfaisance et le public grâce à une éducation ouverte et continue dès l’enregistrement et tout au long du cycle de vie de l’organisme, à des pages Web sur la prévention de l’abus à des fins terroristes, et à des efforts de mobilisation du secteur de la bienfaisance.
L’Agence présente les réponses suivantes aux recommandations de l’OSSNR, confirmant ainsi son accord avec la plupart des recommandations, ainsi que les éléments du rapport qu’elle conteste respectueusement.
Recommandation 1
L’OSSNR recommande que l’Agence recueille et évalue des données démographiques sur le secteur de la bienfaisance pour veiller à ce que le traitement des organismes de bienfaisance soit libre de toute discrimination.
Réponse de l'Agence pour Recommandation 1
L’Agence est en désaccord avec cette recommandation.
La Loi sur la protection des renseignements personnels protège la vie privée des particuliers en ce qui a trait à leurs renseignements personnels et réglemente la collecte et l’utilisation de ces renseignements par le gouvernement fédéral. De plus, les ministères et les agences gouvernementales doivent recueillir uniquement des renseignements liés directement à un programme ou à une activité en cours.
En ce qui concerne les organismes de bienfaisance enregistrés, l’Agence ne recueille que les renseignements nécessaires pour administrer les incitations fiscales relatives aux dons de bienfaisance, ainsi que le système d’enregistrement des organismes de bienfaisance, y compris veiller à l’observation continue des dispositions de la Loi par les organismes de bienfaisance. Même si l’Agence possède un pouvoir limité de collecte de renseignements démographiques du secteur de la bienfaisance pour évaluer le programme, elle ne peut pas exiger des organismes qu’ils fournissent ces renseignements puisqu’ils ne sont pas nécessaires pour l’administration de ces dispositions ni ne seraient utiles à des fins d’observation.
L’Agence s’engage à améliorer la documentation et l’évaluation de ses activités d’enregistrement et de vérification pour s’assurer que son traitement des organismes de bienfaisance est libre de toute discrimination. Cela comprendra la surveillance et l’évaluation de la façon dont ces programmes sont réalisés et l’examen des résultats pour identifier les secteurs de préjugés ou de traitement injuste possibles.
L’Agence affirme qu’elle ne se base pas sur la religion ou la confession pour sélectionner les organismes de bienfaisance enregistrés aux fins de vérification ni n’applique ses politiques ou procédures différemment. L’Agence reconnaît que les défis et les sensibilités en matière de préjugés inhérents à l’administration des programmes qui soutiennent les priorités en matière de sécurité nationale (lutte contre le terrorisme). Ces défis ne sont pas uniques à l’Agence ni au Canada. Le racisme et la discrimination, qui découlent de préjugés, sont des enjeux réels et importants que l’Agence prend très au sérieux. L’Agence croit fermement en l’importance de la diversité, de l’inclusion et de la lutte contre le racisme, conformément à ses valeurs de professionnalisme, d’intégrité, de respect et de collaboration, et continuera d’appuyer les améliorations apportées à ses processus et procédures pour limiter les possibilités de préjugés dans la prise de décisions.
Recommandation 2
L’OSSNR recommande que la DRA élabore une méthode fondée sur les faits pour valider, de façon continue, les indicateurs de risque sur lesquels elle s’appuie pour justifier l’examen d’un organisme de bienfaisance en raison de préoccupations liées au terrorisme et qu’elle mette à jour les lignes directrices connexes.
Réponse de l'Agence pour Recommandation 2
L’Agence est d’accord avec cette recommandation.
L’Agence maintient un guide interne complet pour guider l’application des indicateurs de risque de financement du terrorisme. Même si un examen formel de ces indicateurs n’a pas été réalisé depuis 2016, ils ont été créés à la suite de recherches et de consultations avec des organismes de services de sécurité nationaux. L’Agence veille à ce que ces indicateurs concordent aux indicateurs reconnus à l’échelle internationale, comme le préconise le Groupe d’action financière (GAFI), en réalisant des analyses comparatives régulièrement. À ce jour, les indicateurs utilisés par l’Agence reflètent des préoccupations qui lui ont été présentées au moyen d’indices et les indicateurs reconnus à l’échelle internationale sont demeurés relativement stables durant cette période.
Pour améliorer son efficacité dans l’étude des menaces changeantes dans le domaine du financement du terrorisme, l’Agence s’engage à élaborer et à mettre en œuvre un examen régulier de son approche axé sur les risques pour évaluer l’abus à des fins de financement du terrorisme des organismes de bienfaisance.
Recommandation 3
L’OSSNR recommande que la DRA documente officiellement ses décisions indiquant quand et pourquoi elle lancera ses vérifications.
Réponse de l'Agence pour Recommandation 3
L’Agence est d’accord avec cette recommandation.
Les décisions relatives au lancement des vérifications à la suite d'un renvoi sont généralement influencées par certains facteurs, comme les priorités, la taille et la complexité prévues des vérifications, et la disponibilité des vérificateurs. Bien que le nombre de renvois aux fins de vérification non attribués liés à l’abus à des fins terroristes soit généralement faible, l’Agence reconnaît la nécessité d’apporter des améliorations aux documents qui justifient ces décisions.
Pour l’exercice 2025-2026, l’Agence mettra en place un mécanisme de suivi officiel pour superviser les renvois aux fins de vérifications et peaufiner les processus de documentation des critères de sélection et des décisions en matière de vérification. Cela permettra à l’Agence de documenter officiellement les décisions sur la planification annuelle des vérifications et de déterminer les organismes de bienfaisance enregistrés qui feront l’objet d’une vérification durant un exercice financier en fonction des priorités et des ressources disponibles.
Recommandation 4
L’OSSNR recommande que la DRA mette à jour son processus d’évaluation des risques d’abus à des fins terroristes dans les activités d’un organisme de bienfaisance afin de favoriser une prise de décisions structurée et éclairée sur la nécessité et le moment de réaliser une vérification connexe. Cela devrait :
- garantir que la prise de décisions est éclairée par les risques à chaque étape;
- clarifier la façon de pondérer les indicateurs et d’évaluer les risques;
- exiger que les évaluations des risques soient mises à jour à l’aide des renseignements actuels avant de lancer une vérification.
Réponse de l'Agence pour Recommandation 4
L’Agence est généralement d’accord avec cette recommandation.
L’Agence s’engage à améliorer ses processus et ses procédures afin d’assurer la constance et l’impartialité de la prise de décisions, favorisant ainsi un programme de vérification des organismes de bienfaisance de qualité. L’Agence s’engage à renforcer ses protocoles afin de garantir la documentation de toutes les évaluations du risque et de tous les processus d’établissement de la charge de travail pour les dossiers liés à un risque possible d’abus à des fins terroristes. Cette initiative comprendra aussi la définition des critères et de la terminologie, favorisant une approche structurée et uniforme en matière d’évaluation et de documentation des niveaux de risque.
L’Agence veillera aussi à ce que tous les indicateurs de risque et les risques calculés soient documentés afin de démontrer une application uniforme des mesures d’observation et d’appuyer les justifications pour procéder (ou non) aux vérifications. Traditionnellement, même si les contextes d’évaluation étaient documentés, les indicateurs de risque pertinents qui ont éclairé les évaluations et, par conséquent, la décision au dossier, n’étaient pas toujours indiqués clairement dans les évaluations écrites.
À compter de maintenant, l’Agence mettra à jour les évaluations du risque selon les besoins, particulièrement là où l’on remarque un délai important entre la fermeture de l’évaluation et le lancement de la vérification connexe, ou lorsque de nouveaux renseignements sont disponibles pour permettre une meilleure compréhension des risques en évolution.
Toutefois, l’Agence n’est pas d’accord avec l’accent que l’OSSNR met sur les renseignements provenant des partenaires pour guider les évaluations du risque de l’Agence. Bien que ces renseignements puissent contribuer à l’évaluation du risque réalisée par l’Agence, cette dernière n’a pas le même mandat que ses partenaires ni n’a besoin de renseignements dans tous les cas pour que suffisamment de préoccupations soient soulevées et qu’un renvoi aux fins de vérification soit justifié.
Le manque de renseignements provenant de partenaires ne devrait pas être perçu comme un signe qu’il n’y a aucun risque significatif du point de vue de l’Agence. Dans les cas où l’obtention de renseignements provenant de partenaires est pertinente, l’Agence s’engage à s’assurer que les renseignements demeurent à jour.
L’Agence est aussi en désaccord avec l’affirmation que fait l’OSSNR dans son rapport selon laquelle l’absence d’une approche normalisée ou pondérée rend les déterminations de l’Agence « très subjectives » et nuit à sa capacité de déterminer, aux fins de vérification, les organismes de bienfaisance enregistrés les plus à risque de se trouver en situation d’inobservation. Le manque d’évaluations quantitatives n’invalide pas l’importante évaluation qualitative qui justifie les sélections aux fins de vérification, fondées sur toute une gamme de renseignements et d’analyses approfondies. De plus, les analystes de l’Agence suivent des formations approfondies et respectent des lignes directrices détaillées pour évaluer la gravité des risques et utiliser efficacement les indicateurs de risques.
Toutefois, l’Agence entreprend d’élaborer et de mettre à l’essai un modèle de notation pour quantifier et compléter son processus d’évaluation qualitative du risque actuel. Cette initiative vise à maintenir une prise de décisions constante et impartiale. On prévoit qu’il sera terminé pour la fin de 2026.
Recommandation 5
L’OSSNR recommande que la DRA prenne des mesures pour s’assurer que son processus de décisions menant à une vérification est appuyé par de l’information ou des renseignements actuels et crédibles, en tenant compte des informations disculpatoires et des facteurs atténuants.
Réponse de l'Agence pour Recommandation 5
L’Agence est d’accord avec cette recommandation.
Cette recommandation représente les pratiques et les lignes directrices actuelles de l’Agence pour évaluer les informations utilisées dans l’évaluation des risques et les processus opérationnels par rapport aux normes de recherche établies. Ces normes confirment les méthodes que le personnel devrait utiliser pour recueillir, organiser et évaluer de manière critique les informations, y compris les renseignements provenant de partenaires, en fonction de principes fondamentaux, comme la pertinence, la fiabilité et l’équilibre, l’exactitude, la récence, la neutralité ou l’impartialité, la transparence et la traçabilité. De plus, les employés et les gestionnaires de l’Agence suivent des formations sur les méthodes de recherche et la pensée analytique.
L’Agence reconnaît les exemples présentés par l’OSSNR en ce qui concerne les références à des renseignements non à jour dans une évaluation du risque; toutefois, à eux seuls, ces renseignements n’ont pas servi de base principale ou importante à un renvoi aux fins de vérification. Ils ne reflètent pas non plus une tendance constante dans les évaluations du risque de l’Agence en ce qui concerne les abus à des fins terroristes.
Selon les préoccupations soulevées dans l’examen de l’OSSNR, l’Agence s’engage à examiner ses processus et ses procédures pour déterminer et mettre en place d’autres mesures visant à réduire les risques de préjugés dans la prise de décision, particulièrement en ce qui concerne l’évaluation et la documentation d’informations disculpatoires.
Recommandation 6
L’OSSNR recommande que l’Agence réalise une comparaison orientée des résultats de vérification entre la DRA et la Division de l’observation afin de déterminer si les différences indiquées ici sont justifiées.
Réponse de l'Agence pour Recommandation 6
L’Agence est en désaccord avec cette recommandation.
Les vérifications de l’Agence visent à appliquer de manière uniforme les règlements qui s’appliquent à tous les organismes de bienfaisance enregistrés, même lorsqu’il s’agit d’évaluer des risques qui pourraient être liés à l’abus à des fins terroristes. Tous les résultats de vérification sont déterminés sur une base individuelle, en tenant compte des mêmes lignes directrices et non au moyen de cibles. De plus, après avoir communiqué les premières préoccupations relatives aux vérifications des organismes de bienfaisance et où la révocation de l'enregistrement était une possibilité, l’OSSNR a reconnu que la DRA a considéré les observations présentées par les organismes de bienfaisance (processus d'équité administrative offert à tous les organismes de bienfaisance), ce qui l’a aidée à déterminer que la révocation n'est pas nécessaire dans tous les cas.
Néanmoins, l’Agence examinera son programme de vérification des organismes de bienfaisance afin de déterminer les possibilités d’améliorations qui permettront d’appuyer les approches de vérification constantes et fondées sur les risques, et les résultats de vérification appropriés et proportionnels aux inobservations détectées.