Chapitre 7 : La gouvernance dans les organismes de sport

Partie I — Le système sportif canadien

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Un besoin urgent de réformer la gouvernance

Bon nombre d’enjeux qui ont conduit à la création de la Commission reflètent une défaillance fondamentale de la gouvernance dans le système sportif. Nous avons également constaté que de nombreuses personnes avec lesquelles nous nous sommes entretenus ont souligné ces mêmes lacunes en matière de gouvernance.

Si des efforts ont été déployés par le passé pour remédier aux lacunes en matière de gouvernance, principalement au niveau des organismes nationaux de sport, il est clair que la gouvernance demeure un enjeu à tous les niveaux du milieu sportif. Ce milieu comprend les organismes nationaux de sport, les organismes nationaux de services multisports, les organismes provinciaux et territoriaux de sport, les groupes communautaires de sport, les clubs et les ligues.

Les organismes nationaux, provinciaux et territoriaux de sport sont souvent des entités complexes, dont certaines gèrent des budgets importants. Pour fonctionner, ces organismes nationaux de sport dépendent fortement de bénévoles qui assument différents rôles, notamment celui de membre de conseil d’administration. Ces bénévoles sont souvent d’anciens athlètes, des parents d’athlètes ou des officiels, sans aucune expérience ou expertise en matière de gouvernance.

En particulier, ces personnes ne sont généralement pas conscientes de la complexité des besoins des enfants et des jeunes en situation de vulnérabilité. De même, la nécessité de traiter les allégations de maltraitance et d’abus au sein de leur organisme est souvent mal comprise.

Bien qu’il soit reconnu que les bénévoles jouent un rôle essentiel et critique dans le système sportif, en plus d’apporter une contribution financière en nature incalculable au secteur, ils n’ont pas toujours une connaissance approfondie des principes de bonne gouvernance. Ils ne disposent généralement pas de l’expertise, des compétences et de la formation nécessaires pour être des décideurs efficaces, en particulier lorsqu’ils sont responsables d’enjeux et de défis de plus en plus complexes au sein des organismes de sport.

Dans le système actuel, les gouvernements, en tant que bailleurs de fonds, peuvent établir des lignes directrices en matière de gouvernance et s’en servir comme outils autonomes ou comme conditions de financement. Par conséquent, les organismes de sport peuvent être obligés de suivre des règles de gouvernance et des exigences qui sont liées à leurs ententes de financement. Ils doivent également se conformer aux exigences de la législation fédérale, provinciale ou territoriale sur les organisations à but non lucratif. Toutefois, ces législations ne prévoient que des exigences statutaires de base en matière de gouvernance, comme les principales obligations des membres du conseil d’administration, ainsi que les obligations et les droits des membres de l’organisme.

L’émergence et la croissance de clubs, de ligues et d’organismes privés constituent un autre défi à une gouvernance appropriée au sein du système sportif et à sa surveillance. Ces entités se situent à l’extérieur du système sportif traditionnel et échappent à la portée des organismes nationaux, provinciaux et territoriaux de sport.

Il n’est donc pas surprenant que les approches de gouvernance dans le monde du sport aient manqué de cohérence. De plus, le suivi de la conformité aux règles de gouvernance a été peu ou pas efficace. Ces facteurs ont conduit à un système sportif où des pratiques de gouvernance médiocres et des structures de gouvernance inadéquates ont mené à un traitement inadéquat des plaintes liées aux abus, à la maltraitance et au sport sécuritaire.

Dans cette section, nous examinons:

En quoi consiste la gouvernance

Comme l’indique le Rapport final 2022 : Révision de la gouvernance de Hockey Canada de l’honorable Thomas Cromwell, le terme « gouvernance » a de nombreuses définitions et « décrit généralement les pratiques et procédures employées par la direction d’une organisation afin d’attribuer les pouvoirs et d’encadrer les responsabilités pour les prises de décisions et les activités opérationnelles »Note de bas de page 1. Plusieurs facteurs influencent la gouvernance, notamment la mission et l’objectif de l’organisme, les exigences législatives et réglementaires applicables, ainsi que les politiques et les normes.

Des pratiques de bonne gouvernance sont courantes dans la plupart des contextes canadiens. Elles sont renforcées par des institutions très réputées, comme l’Institut des administrateurs de sociétés et le Centre d’excellence pour la gouvernance, une initiative de l’Association des hôpitaux de l’Ontario, responsable du Guide to Good Governance (le guide de la bonne gouvernance). Toutefois, ces pratiques reconnues ne sont pas reflétées de manière uniforme dans le domaine du sport, qui semble avoir pris du retard et fonctionner selon des normes obsolètes.

Cadre de gouvernance actuel à l’échelle nationale

Législation

Bien que la Loi canadienne sur les organisations à but non lucratif soit celle qui régit tous les organismes nationaux de sport financés par le gouvernement fédéral, elle ne constitue qu’une base générale pour la gouvernance des organismes de sport. Il est également important de noter que la Loi sur l’activité physique et le sport ne donne aucune indication sur la gouvernance des organismes de sport. Étant donné que les exigences en matière de gouvernance prévues par la législation sont rudimentaires, il est nécessaire d’aller au-delà de ces lois pour trouver un encadrement en matière de gouvernance.

Pratiques exemplaires généralement reconnues

Les pratiques exemplaires généralement reconnues pour les organisations à but non lucratif sont décrites dans le Guide to Good Governance (le guide de la bonne gouvernance)Note de bas de page 2. L’honorable Thomas Cromwell a cité ce guide dans son Rapport final 2022 : Révision de la gouvernance de Hockey Canada. Ce guide a aussi été mentionné par d’autres experts en gouvernance. Il fournit des lignes directrices précises et pratiques qui aident les organismes à but non lucratif à mettre en œuvre les pratiques de gouvernance les mieux adaptées à leurs besoins. Les principes fondamentaux de la transparence, de l’imputabilité, de l’intégrité et de l’impartialité, de l’équité et de la responsabilité sont au cœur de ces pratiques exemplaires et lignes directrices reconnues.

Les politiques et cadres fédéraux constituent une autre source de pratiques exemplaires en matière de gouvernance.

Politiques et cadres

Le Code de gouvernance du sport canadien et le Cadre pour assurer l’intégrité dans le sport de Sport Canada

En février 2020, à la suite des travaux réalisés dans le cadre du plan d’action 2019 de la Stratégie canadienne du sport de haut niveau, un groupe de travail dirigé par le Comité olympique canadien a été constitué. Ce groupe de travail avait pour tâche d’examiner les codes de gouvernance d’autres pays, d’effectuer de la recherche sur les pratiques exemplaires en matière de gouvernance dans le sport et de discuter de l’approche à adopter pour rédiger un code et des pratiques exemplaires qui seraient inclus dans un code de gouvernance du sport canadien.

De vastes efforts de mobilisation ont été déployés pour élaborer et développer le codeNote de bas de page 3. Une série de rencontres avec des organismes nationaux de sport a été organisée afin de recueillir leurs rétroactions et commentairesNote de bas de page 4. À l’issue de cette phase de mobilisation, en avril 2021, le Code de gouvernance du sport canadien a été publié en ligneNote de bas de page 5.

Afin de soutenir la mise en œuvre du Code de gouvernance du sport canadien, le Comité olympique canadien a également préparé le Cadre pour une bonne gouvernanceNote de bas de page 6. Ce cadre relie les principes du Code au bulletin de gouvernance de Sport Canada. Ce bulletin a depuis été abandonné, mais il sera abordé dans la section ci-dessous.

Le Code de gouvernance du sport canadien vise à améliorer les pratiques de gouvernance au sein des organismes nationaux de sport et à renforcer l’imputabilité, la transparence et la conduite éthique dans le sport canadien. Le Code a été structuré de manière à s’appliquer à tous les organismes nationaux de sport qui représentent des sports au sein du programme olympique. Un passage du Code encourage fortement tous les autres organismes nationaux de sport à adopter les exigences en matière de gouvernance qui y sont énoncéesNote de bas de page 7.

Le Code de gouvernance du sport canadien permet aux organismes nationaux de sport qui comptent moins de quatre employés à temps plein d’adhérer à un standard alternatif de pratiques dans certains domaines, bien que le respect intégral du Code soit encouragéNote de bas de page 8.

Tous les organismes nationaux de sport couverts par le Code de gouvernance du sport canadien sont régis par la Loi canadienne sur les organisations à but non lucratifNote de bas de page 9. La Commission comprend que l’application du Code aux organismes nationaux de sport qui font partie du programme olympique a été choisie comme une première étape à l’harmonisation des pratiques en matière de gouvernance.

En mai 2023, une première annonce a été faite par l’ancienne ministre des Sports et ministre responsable de l’Agence de développement économique du Canada pour les régions du QuébecNote de bas de page 10. Cette annonce précisait que tous les organismes nationaux de sport financés par le gouvernement fédéral seraient tenus d’adopter le Code de gouvernance du sport canadien et d’apporter les modifications correspondantes à leurs structures de gouvernance d’ici avril 2025 pour recevoir des fonds fédéraux.

De nombreux organismes nationaux de sport ont entamé des démarches afin d’apporter les modifications nécessaires à leurs structures et assurer leur conformité au Code en date du 1er avril 2025. Toutefois, comme indiqué ci-dessus, le Cadre pour assurer l’intégrité dans le sport, un ensemble révisé de lignes directrices, a été publié en novembre 2024 à la suite d’un changement de ministre. Ce cadre indiquait que les « principes de bonne gouvernance » seraient intégrés dans les mécanismes de redditions de compte existants pour les organismes financés par le gouvernement fédéral. Ainsi, le Code de gouvernance du sport canadien ne serait pas rendu obligatoire pour tous les organismes nationaux de sport financés par le gouvernement fédéralNote de bas de page 11.

Ce changement a provoqué la frustration de certains organismes nationaux de sport. Plusieurs d’entre eux avaient investi des ressources et usé de leur influence pour convaincre les organismes provinciaux et territoriaux de sport qui en sont membres de modifier leurs règlements administratifs pour qu’ils se conforment au Code. Les organismes nationaux de sport ont dû expliquer à leurs membres pourquoi tous ces travaux avaient été entrepris.

Le gouvernement maintient que le Code de gouvernance, bien que non obligatoire, demeure une source de pratiques exemplaires établies en matière de gouvernance des organismes de sport. À compter d’avril 2025, les organismes nationaux de sport financés par le gouvernement fédéral n’ont que cinq exigences fondamentales à satisfaire en matière de gouvernanceNote de bas de page 12. Ces exigences font partie des critères d’évaluation pour l’admissibilité au Programme de soutien au sport (les particularités des programmes de financement de Sport Canada, des processus, des critères d’admissibilité et des critères d’évaluation sont abordées au chapitre 5)Note de bas de page 13. Les organismes nationaux de services multisports et les centres et instituts canadiens de sport financés par le gouvernement fédéral disposent d’une année supplémentaire, soit jusqu’en avril 2026, pour satisfaire aux mêmes exigencesNote de bas de page 14.

Voici les cinq exigences fondamentales en matière de gouvernance :

  1. Un plan stratégique qui présente la mission/le mandat, la vision, les valeurs, les objectifs, le rôle et les responsabilités du conseil et de la direction, les indicateurs de rendement, etc.
  2. Un conseil d’administration qui inclut ce qui suit :
    • Diversité : des processus en place qui favorisent la représentation d’un éventail d’identités et d’expériences au sein de la communauté que les membres du conseil servent ou avec laquelle ils établissent des liens.
    • Voix des athlètes : un processus transparent et inclusif de sélection d’un représentant des athlètes pour siéger à son conseil d’administration.
    • Orientation et formation du conseil : des processus en place pour fournir une orientation et une formation aux nouveaux membres et aux membres réélus portant sur les principes fondamentaux de la bonne gouvernance et les responsabilités du conseil.
    • Comités de surveillance : établissement et maintien, auxquels s’ajoute le mandat approuvé par le conseil, des comités de surveillance.
  3. Des contrôles internes servant aux contrôles financiers et à la gestion continue des risques.
  4. Des mesures organisationnelles de transparence en place visant à afficher des documents relatifs à la gouvernance sur site Web, afin qu’ils soient rapidement disponibles et accessibles au public.
  5. Des politiques et procédures disciplinaires et d’appel qui comprennent l’accès à un mécanisme indépendant de règlement des différends par l’entremise du Centre de règlement des différends sportifs du CanadaNote de bas de page 15.

Il convient de noter que toutes les exigences en matière de gouvernance à l’égard des critères d’admissibilité du Programme de soutien au sport, à l’exception d’une seule, sont reflétées dans le Code de gouvernance du sport canadien. La seule exigence qui manque à ce dernier est la nécessité d’établir des politiques et procédures disciplinaires et d’appel qui comprennent l’accès à un mécanisme indépendant de règlement des différends par l’entremise du Centre de règlement des différends sportifs du Canada.

Le Bulletin de gouvernance de Sport Canada et le Program Risk Assessment Tool (PRAM) (« Outil d’évaluation des risques du programme »)

En 2019, Sport Canada a élaboré le Bulletin de gouvernance de Sport Canada pour servir de mécanisme de surveillance en vertu du Cadre de financement et de responsabilité en matière de sport. Ces bulletins visaient à évaluer la manière dont les organismes de sport financés par le gouvernement fédéral s’alignaient sur les priorités du gouvernement.

La première phase du Bulletin, publiée en 2019, a évalué les progrès réalisés à l’égard des mesures de promotion de l’intégrité, de la diversité et de l’inclusion dans le sport, ainsi qu’à l’égard de la communication et la participationNote de bas de page 16. La deuxième phase, publiée en 2021, était axée sur les principes de bonne gouvernanceNote de bas de page 17. Des organismes ont été invités à présenter des preuves de leur conformité et ont reçu des notes numériques et des commentaires sur les domaines à améliorerNote de bas de page 18.

Le Bulletin devait fournir des lignes directrices sur les pratiques exemplaires et influencer la manière dont les ressources étaient allouées, car « les organismes [étaient] encouragés à utiliser les résultats du bulletin pour préparer les prochaines demandes de financement adressées à Sport Canada »Note de bas de page 19. Cependant, le mécanisme de bulletins a été suspendu après que des préoccupations aient été soulevées quant au fait que des notes élevées avaient été accordées à des organismes chez qui d’importants problèmes de gouvernance et d’intégrité ont été découverts par la suiteNote de bas de page 20.

Sport Canada utilise maintenant un outil standard d’évaluation des risques appelé Outil d’évaluation des risques du programme. Cet outil, qui est utilisé avant d’accorder ou de refuser un financement, permet d’évaluer le risque que représentent les demandeurs de fonds. Dans le cadre de cette évaluation des risques, Sport Canada tient compte d’un certain nombre de facteurs, notamment si le demandeur a mené à bien d’autres projets financés, s’il a tenu le ministère informé de ses progrès, s’il fonctionne efficacement au quotidien et s’il dispose de bonnes procédures de gouvernance.

Au moyen de l’Outil d’évaluation des risques du programme, Sport Canada examine des enjeux qui relèvent de deux catégories : l’environnement externe (qui comprend la gouvernance) et le risque lié à l’activité. Le résultat de l’évaluation des risques d’une demande de financement déterminera les conditions à inclure dans l’entente de contribution afin d’atténuer les risques identifiés.

Par exemple, si une demande est considérée comme présentant un risque élevé, l’entente de contribution peut prévoir la répartition du financement en plusieurs versements. Elle pourrait également inclure des exigences supplémentaires en matière de rapports et décrire les activités de surveillance spécifiques qui doivent être entreprises.

Bien que cet outil soit un outil standard et utilisé au ministère du Patrimoine canadien, nous comprenons qu’il n’est pas conçu spécifiquement pour évaluer les organismes nationaux de sport.

Rapports et études sur la gouvernance dans le système sportif

En 2022, un certain nombre d’études et de rapports importants ont été publiés sur des enjeux de gouvernance cernés au sein de trois grands organismes nationaux de sport financés par le gouvernement fédéral : Soccer Canada, Hockey Canada et Gymnastique Canada. Les rapports 2022 de McLaren Global Sport Solutions inc. sur Soccer CanadaNote de bas de page 21, la révision de la gouvernance de Hockey Canada par le juge Thomas CromwellNote de bas de page 22 ainsi que le rapport de McLaren Global Sport Solutions inc. sur Gymnastique CanadaNote de bas de page 23 offrent tous des recommandations réfléchies et détaillées sur la gouvernance du sport.

Certaines recommandations de ces études ont été reprises dans les rapports de deux comités permanents de la Chambre des communes qui ont entrepris des examens du sport sécuritaire. Le Comité permanent du patrimoine canadien a déposé un rapport intitulé « La pratique sécuritaire du sport au Canada »Note de bas de page 24 en 2024, et le Comité permanent de la condition féminine a déposé un rapport intitulé « Il est temps d’écouter les survivantes »Note de bas de page 25 en 2023.

Plusieurs de ces recommandations réitèrent l’importance des principes de bonne gouvernance. Ils encouragent le respect de ces principes en préconisant l’adoption de déclarations claires par les conseils d’administration ainsi que le développement et l’adoption de processus et de procédures pour plusieurs responsabilités liées à la gouvernance.

Par exemple, le rapport CromwellNote de bas de page 26 recommandait que les conseils d’administration adoptent des déclarations visant, par exemple, à éclaircir les rôles et les responsabilités, à définir la nature des droits de vote discrétionnaires et à adopter un modèle de gouvernance. Ces documents recommandent également aux conseils d’administration d’adopter ou d’établir divers processus et procédures concernant leur fonctionnement, comme l’échelonnement des mandats des membres du conseil, les processus d’évaluation annuelle du conseil, les processus de recrutement de la présidence du conseil, et les procédures et processus relatifs aux réunions du conseil. Il convient de noter que cette même pratique est incluse dans le Guide to Good GovernanceNote de bas de page 27.

De plus, il a été fortement recommandé d’assurer une représentation réelle des athlètes au sein de la structure de gouvernance et des processus décisionnels des organismes de sport.

Enfin, ces rapports et études ont souligné le besoin d’ouverture et de transparence dans l’utilisation des fonds publics. Cela a mené le gouvernement du Canada à exiger des organismes nationaux de sport qu’ils fournissent des données financières complètes.

Cadre de gouvernance actuel au niveau provincial et territorial

Législation

La législation applicable aux organismes provinciaux et territoriaux de sport est la Loi canadienne sur les organisations à but non lucratif ou son équivalent provincial ou territorial. Certains gouvernements provinciaux et territoriaux précisent en vertu de quelle loi l’entité doit être constituée pour pouvoir bénéficier d’un financement, tandis que d’autres ne le précisent pas ou laissent cette question à la discrétion de l’organisme de sport.

Tout comme la loi fédérale sur les organisations à but non lucratif, les cadres législatifs provinciaux et territoriaux fournissent habituellement un cadre général de gouvernance pour les organismes de sport. Toutefois, certaines provinces et certains territoires vont plus loin. Par exemple, le Yukon a imposé par voie législative des exigences en matière de gouvernance à ses organismes territoriaux de sport comme condition de financement, par l’entremise du Règlement sur les loisirsNote de bas de page 28 pris en vertu de la Loi sur les loisirsNote de bas de page 29.

D’autres provinces et territoires imposent à leurs organismes provinciaux ou territoriaux de sport des exigences en matière de gouvernance qui vont au-delà des exigences prévues dans la loi applicable aux organisations à but non lucratif. Lorsque la conformité est requise pour être admissible à recevoir un financement, ces provinces et ces territoires imposent de telles exigences au moyen d’une politique plutôt que d’une intervention législative.

Par conséquent, lors de l’examen des enjeux de gouvernance, il est important de tenir compte des pratiques exemplaires généralement reconnues, comme celles décrites dans le Guide to Good GovernanceNote de bas de page 30.

Code de gouvernance du Québec

Le Québec est la seule province à avoir élaboré un code de gouvernance spécifiquement adapté aux organismes à but non lucratif de sport et de loisirs. Il s’agit du Code de gouvernance des organismes à but non lucratif (OBNL) québécois de sport et de loisir, publié en mai 2024Note de bas de page 31.

Ce code fournit des lignes directrices en matière de politiques sur le sport et de pratiques exemplaires de gouvernance pour les organismes de sport. Le respect de ce code est une condition pour recevoir un financement de la division des loisirs et du sport du ministère de l’Éducation.

Le code québécois prévoit que le conseil d’administration d’un organisme doit adopter une déclaration décrivant son rôle et ses responsabilités. Cela comprend notamment la planification stratégique, l’évaluation du rendement de l’organisme, la supervision des affaires de l’organisme, la gestion des finances, la gouvernance, ainsi que le recrutement et l’évaluation de la direction générale. La déclaration doit également préciser les responsabilités et les attentes à l’égard des membres du conseil d’administrationNote de bas de page 32.

Les exigences des gouvernements fédéral et québécois en matière de gouvernance sont efficaces dans la seule mesure où elles sont liées au financement. Au-delà de ces conditions de financement, les gouvernements n’exercent aucun contrôle direct sur la gouvernance des organismes de sport.

Un examen de ce qui existe actuellement sur le plan des cadres de gouvernance du sport révèle que ce qui est en place au niveau fédéral n’est pas nécessairement reproduit au niveau provincial et territorial ou local.

Cadres de gouvernance dans d’autres pays

Plusieurs pays ont adopté des codes et des cadres de gouvernance relatifs au sport ou à l’activité physique. Pour ce rapport préliminaire, nous nous référons aux cadres de gouvernance du sport en Nouvelle-Zélande, en Australie, au Royaume-Uni et aux Pays-Bas.

Ces quatre pays ont adopté des approches différentes en matière de gouvernance dans le sport. Ils démontrent l’importance d’une approche intentionnelle et uniforme des structures et du cadre de gouvernance du sport au sein d’un pays. Une telle approche favorise une culture sportive solide et atténue les vulnérabilités d’un système de gouvernance.

Nouvelle-Zélande

Sport New Zealand a mis en place un cadre de gouvernance conçu spécifiquement pour les organismes de sport et de loisirsNote de bas de page 33. Bien que cela ne soit pas obligatoire, les organismes de sport sont encouragés à s’aligner sur les principes prévus dans ce cadre de gouvernance. Un programme d’accréditation appelé « Governance Quality Mark » (marque de qualité en gouvernance) incite les organismes à se conformer au cadre de gouvernance. Grâce à ce programme, un organisme de sport qui répond à des normes de gouvernance spécifiques sera accrédité et pourra utiliser et afficher un symbole qui confirme sa conformité aux normes de gouvernanceNote de bas de page 34.

En plus de ce cadre, Sport New Zealand a élaboré une ressource nommée Nine Steps to Effective GovernanceNote de bas de page 35 (neuf étapes pour une gouvernance efficace), qui fait partie intégrante de son programme de renforcement des capacités. Cette ressource donne un aperçu de certains des éléments importants que les personnes qui participent à la gouvernance des organismes de jeu, d’activité physique récréative et de sport doivent prendre en compte lorsqu’elles abordent des enjeux de gouvernanceNote de bas de page 36.

Royaume-Uni

UK Sport et Sport England ont lancé le Code for Sport Governance (le code de gouvernance du sport). Ce code définit les exigences obligatoires en matière de gouvernance pour les organismes de sport qui sollicitent un financement du gouvernement et de la loterie nationale auprès de UK Sport ou de Sport EnglandNote de bas de page 37.

Le Code for sport Governance définit les degrés requis de transparence, de diversité et d’inclusion, d’imputabilité et d’intégrité. Bien qu’il soit obligatoire, le Code fait preuve de souplesse en adoptant une approche selon laquelle la conformité aux exigences du code dépend du palier auquel appartient l’organismeNote de bas de page 38. Comme UK Sport et Sport England investissent dans différents types d’organismes et que la taille des investissements diffère, ils appliquent le code proportionnellement en utilisant trois paliers.

Chaque palier a un degré différent d’exigences obligatoires en matière de gouvernanceNote de bas de page 39. UK Sport et Sport England, à leur seule discrétion, positionnent un organisme au palier qu’ils jugent le plus approprié. Cette décision tient compte des circonstances de l’investissement et de la situation de l’organisme, et est conforme à des définitions larges et préétablies des paliersNote de bas de page 40.

En 2021, UK Sport a publié sa Equality, Diversity and Inclusion Strategy (stratégie d’égalité, de diversité et d’inclusion). Cette stratégie définit quatre priorités :

Le deuxième principe du Code for sport Governance prévoit que les organismes de sport doivent recruter et mobiliser des personnes issues de milieux diversNote de bas de page 42. Les exigences spécifiques varient en fonction du palier auquel appartient l’organisme de sport. Par exemple, les organismes du palier 1 peuvent confirmer qu’ils se conforment à cette exigence en soumettant à UK Sport l’un des documents suivants, entre autres possibilités :

Pour les organismes du palier 1, il est également indiqué qu’un évaluateur de UK Sport ou de Sport England peut contacter l’organisme pour confirmer sa conformité et déterminer s’il est réellement engagé en faveur de la diversité et de l’inclusionNote de bas de page 43.

Pour les organismes du palier 3, les exigences sont plus strictes. Ils doivent rendre leur objectif public afin de s’assurer que la haute direction représente et reflète la diversité de la communauté qu’elle sertNote de bas de page 44. Chaque année, ces organismes doivent élaborer un plan d’action en faveur de la diversité et de l’inclusion et le soumettre à l’approbation de UK Sport ou de Sport EnglandNote de bas de page 45. Le plan doit décrire les actions proposées par l’organisme pour atteindre une diversité suffisante au sein de la haute direction et doit être publié sur le site Web de l’organisme. De plus, ces organismes doivent publier une mise à jour annuelle de leur plan d’actionNote de bas de page 46.

Nous comprenons que UK Sport travaille en étroite collaboration avec les organismes de sport pour les aider à se conformer à ces exigences. Lorsqu’un organisme de sport ne satisfait pas aux exigences de UK Sport, les fonds sont retenus et des conditions sont mises en place jusqu’à ce qu’il s’y conforme.

Il convient de noter qu’au sein de sa propre structure, le plan de diversité et d’inclusion de UK Sport prévoit que :

d’ici 2031, les personnes qui font partie de UK Sport seront le reflet de la société britannique. Plus précisément, cela signifie que leur conseil d’administration, leur équipe de direction et leur personnel seront composés, séparément et collectivement, d’un minimum de 50 % de femmes, de 20 % de personnes handicapées, de 18 % de personnes d’origines ethniques diverses et de 3 % de personnes 2ELGBTQI+, ainsi que de personnes issues de milieux variés et dont les parcours de vie, les origines géographiques et les réalités socioéconomiques diffèrentNote de bas de page 47.

Ces pourcentages sont calculés en fonction de la population démographique nationale du recensement de 2021.

Australie

En Australie, les principes de gouvernance du sport ont été élaborés conjointement dans le cadre d’un processus de consultation à l’échelle du secteur sportifNote de bas de page 48. Bien que ces principes de gouvernance aient tendance à s’appliquer davantage à l’échelle nationale, étatique et territoriale, ils peuvent être utilisés dans l’ensemble du secteur sportif australienNote de bas de page 49.

Selon la Commission australienne du sport, les principes de gouvernance dans le sport sont destinés à soutenir un niveau élevé de rendement de la part des personnes qui gouvernent un sportNote de bas de page 50. Pour aider les organismes de sport à mettre en œuvre ces principes de gouvernance, la Commission australienne du sport a mis en place une équipe dédiée à cette tâche. L’équipe de la gouvernance du sport et du renforcement organisationnel fournit un soutien consultatif aux conseils d’administration des organismes nationaux de sportNote de bas de page 51 en les aidant à développer des pratiques de gouvernance conformes aux principes et aux normes de gouvernance du sportNote de bas de page 52.

Ces normes de gouvernance du sport ont elles aussi été établies à la suite d’un processus de consultation à l’échelle du secteur. Ces normes permettent aux organismes de sport d’évaluer l’efficacité et l’efficience de leurs systèmes et de leurs processus de gouvernance respectifsNote de bas de page 53. Il existe 35 normes, chacune suivant une échelle de 4 points (1 représentant un faible niveau de maturité et 4 représentant le niveau de maturité le plus élevé)Note de bas de page 54. Chaque norme s’aligne sur un principe de gouvernance du sportNote de bas de page 55.

Les organismes de sports nationaux et d’État sont invités à autoévaluer leur gouvernance par rapport à chaque norme en utilisant l’échelle de notation décrite ci-dessusNote de bas de page 56. À l’issue de ce processus, la Commission australienne du sport publie un rapport intitulé « Sport Governance Standards Benchmarking Report » (rapport d‘analyse comparative des normes de gouvernance). Ce rapport donne un aperçu de la maturité actuelle des organismes de sport en matière de gouvernance et cerne les besoinsNote de bas de page 57. La Commission australienne du sport peut donc réorienter ses priorités en ce qui a trait au soutien, à l’éducation et aux ressources pour le secteurNote de bas de page 58.

De plus, il convient de noter que la maturité attendue d’un organisme de sport en Australie en matière de gouvernance est basée sur l’investissement financier qu’il reçoit de son bailleur de fonds (que ce soit la Commission australienne du sport ou les agences d’État ou de territoire dédiées au sport et aux loisirs) ainsi que sur les revenus qu’il génèreNote de bas de page 59. Essentiellement, les attentes à l’égard des organismes de sport dépendent de leur capacité interne globaleNote de bas de page 60. La Commission australienne du sport précise que les attentes font référence au niveau de maturité prévu plutôt qu’à un niveau de conformité strictNote de bas de page 61.

Le quatrième principe des normes de gouvernance du sport prévoit qu’un conseil d’administration doit être composé de personnes aux profils diversifiés et ayant des perspectives et des expériences différentes, et ce, afin d’assurer une meilleure prise de décisionNote de bas de page 62. Selon les normes relatives à ce principe, la matrice de sélection des membres du conseil d’administration devrait prévoir une combinaison de compétences, d’expertise et d’expériencesNote de bas de page 63. Des objectifs devraient également être fixés pour que la composition du conseil d’administration tienne compte de la diversité, de l’équité et de l’inclusion. Enfin, le conseil d’administration ne devrait pas être composé à plus de 50 % de personnes du même sexe, la présidence ou la vice-présidence devrait être occupée par une femme ou une personne issue de la diversité des genres, et les membres du conseil d’administration devraient être indépendantsNote de bas de page 64.

L’Australie a récemment lancé sa National Gender Equity in sport Governance PolicyNote de bas de page 65. Sous réserve de certaines exceptions, cette politique exige que tous les organismes nationaux et étatiques de sport, ainsi que ceux recevant un financement spécifique, atteignent les objectifs d’équité des genres au sein de leurs conseils d’administration d’ici juillet 2027Note de bas de page 66. L’équité, la diversité et l’inclusion sont également au cœur de l’Australia’s Sport Participation Strategy — Play WellNote de bas de page 67 (la stratégie australienne de participation sportive – jouons bien) et de la 2032+ High Performance sport Strategy (la stratégie sportive de haute performance 2032+)Note de bas de page 68.

Pays-Bas

En 2005, le Comité olympique néerlandais a introduit un code de bonne gouvernance dans le sportNote de bas de page 69. Cela faisait suite à la publication en 2003 d’un code de conduite dans le secteur des entreprises, qui contenait des recommandations sur plusieurs enjeux liés à la gouvernance afin de restaurer la confiance des investisseurs et des citoyens dans le monde corporatif.

Le Code of Good Sports Governance (code de bonne gouvernance sportive) cible les membres du Comité olympique néerlandais. Il a été mis à jour en 2021 et repose sur quatre principes : la responsabilité, la démocratie, la société et la transparenceNote de bas de page 70. Tous les organismes de sport des Pays-Bas sont désormais tenus de se conformer à ce codeNote de bas de page 71.

Toutefois, la conformité au Code est basée sur un principe de « conformité et justification ». Il offre donc une marge de manœuvre en fonction du contexte propre à chaque organisme. De cette manière, il constitue une boussole pour l’intégrité et la gouvernance socialement responsable de chaque organisme de sport aux Pays-BasNote de bas de page 72. Les membres des conseils d’administration et les responsables de la supervision des organismes de sport aux Pays-Bas rendent compte de leur conformité au Code lors des assemblées générales et dans les rapports annuelsNote de bas de page 73.

Gouvernance dans les organismes de sport : conclusions et recommandations préliminaires

Afin de reconnaître et de renforcer l’importance d’une gouvernance saine et efficace dans l’ensemble du système sportif, nous présentons ci-dessous les recommandations préliminaires de la Commission et leur justification. Ces recommandations visent à corriger les lacunes actuelles en matière de bonne gouvernance au sein du système sportif. Nous sommes d’avis qu’il est essentiel que les structures de gouvernance des organismes de sport reflètent une conscience, des compétences et des capacités spécifiques afin d’aborder efficacement l’ensemble des enjeux complexes susceptibles d’émerger dans le contexte sportif.

Conformément au mandat de la Commission, ces recommandations préliminaires sont partagées afin de permettre aux participants l’occasion de les examiner et de les commenter, que ce soit dans le cadre du Sommet national ou par l’entremise d’autres activités de mobilisation, avant que la Commission soumette ses recommandations finales au gouvernement du Canada. La Commission attend avec intérêt l’occasion de poursuivre cet important dialogue.

Nos recommandations préliminaires s’articulent autour de quatre concepts importants :

Normes de gouvernance obligatoires : conclusions préliminaires

On nous a fait part à plusieurs reprises du fait que la gouvernance au sein du système sportif repose sur le bénévolat et que de nombreuses personnes siégeant aux conseils d’administration des organismes nationaux de sport sont des bénévoles. Les participants ont indiqué à maintes occasions que ces bénévoles sont souvent issus du sport qu’ils représentent (comme par exemple d’anciens athlètes, d’entraîneurs, de parents d’athlètes ou d‘administrateurs sportifs). Compte tenu de cette réalité, il n’est pas surprenant d’apprendre qu’il existe des défis importants en matière de gouvernance au sein du système sportif.

Ces défis comprennent notamment le manque de compétences essentielles, de formation et de compréhension des responsabilités des membres des conseils d’administration ainsi que la présence de conflits d’intérêts réels ou perçus. D’autre part, le manque de diversité en ce qui a trait au genre et à l’ethnicité souligne la nécessité d’un plus large éventail de perspectives et d’expériences dans le processus de prise de décision. Le manque d’expertise spécifique en matière de parasport au sein des conseils d’administration des organismes de parasport a également été souligné.

Les participants ont aussi exprimé que la charge de travail des conseils d’administration varie en fonction de la taille de l’organisme national de sport, des compétences des membres du conseil et de leur expérience en matière de gouvernance. Nous comprenons que ces personnes occupent généralement ces postes en plus d’un emploi à temps plein, ce qui leur laisse peu de temps pour s’y consacrer. Compte tenu de cette réalité, certains nous ont fait part de leur inquiétude quant au fait que l’imposition de normes de gouvernance alourdirait le travail déjà exigeant des conseils d’administration qui devraient en assurer la conformité.

Nous avons également été informés que certains organismes nationaux de sport pourraient trouver difficile, voire impossible, de se conformer à des exigences obligatoires en matière de gouvernance en raison de leurs structures de gouvernance actuelles. Par exemple, si le règlement administratif actuel d’un organisme n’est pas conforme aux exigences de gouvernance, l’organisme de sport devra demander une modification de son règlement. Cette demande est soumise au vote des membres de l’organisme, qui sont souvent des organismes provinciaux et territoriaux de sport. Dans un tel contexte, des organismes nationaux de sport ont indiqué qu’il serait difficile d’imposer de tels changements. Dans d’autres cas, il a été suggéré qu’un organisme de sport pourrait être empêché de se conformer en raison des exigences spécifiques de sa fédération internationale.

D’un autre côté, bon nombre des enjeux soulevés par les participants au sujet des organismes de sport pourraient être résolus par la mise en œuvre de pratiques de bonne gouvernance. Par exemple, les conflits d’intérêts pourraient être évités par le recrutement et la sélection de membres aux profils diversifiés pour siéger au conseil d’administration. La transparence et l’imputabilité pourraient être assurées par la publication proactive et cohérente de rapports annuels et d’états financiers détaillés sur une page Web facilement accessible et identifiable.

Dans les cas où un organisme de sport a fait l’objet de critiques menant à une vérification ou à une évaluation plus large de l’organisme, cela s’est souvent traduit par un examen de l’organisme, y compris de sa structure de gouvernance. Les rapports issus de ces examens fournissent des recommandations à l’organisme pour qu’il corrige et prévienne les lacunes identifiées. En ce qui concerne la bonne gouvernance, les recommandations font généralement référence à des principes fondamentaux et reconnus de bonne gouvernance, dont plusieurs sont repris dans le Code de gouvernance du sport canadien.

En reconnaissant l’importance de ces exigences en matière de gouvernance, il convient de noter qu’à la suite de l’annonce du ministre en 2023, certains organismes nationaux de sport ont commencé à travailler pour se conformer au Code de gouvernance du sport canadien. Sport Canada exige désormais que tous les organismes nationaux de sport, les organismes nationaux de services multisports et les centres et instituts canadiens de sport financés par le gouvernement fédéral se conforment à quatre exigences énoncées dans le Code en matière de gouvernance. En fait, la Commission a été informée qu’au moins 33 organismes nationaux de sport ont désormais signalé leur conformité au Code de gouvernance du sport canadien.

Pour la Commission, il est clair que des normes de gouvernance obligatoires renforceraient la cohérence des structures de gouvernance de tous les organismes de sport. Cela offrirait un guide aux conseils d’administration dont le degré de connaissances en matière de gouvernance varie. Avec le temps, un appui adéquat et un mécanisme de surveillance de la conformité, il en résulterait des structures et des pratiques de gouvernance plus fortes et plus efficaces au sein du système sportif.

Bien que le respect du Code de gouvernance du sport canadien puisse présenter certains défis, la Commission est d’avis que des mesures peuvent être mises en place pour les atténuer. Par exemple, pour aider les organismes de sport à se conformer au Code, celui-ci pourrait intégrer un libellé et des approches qui reconnaissent les différences, les réalités uniques et les divers processus internes de gouvernance et de prise de décision des organismes de sport.

D’autre part, une période de transition pourrait être envisagée afin de donner suffisamment de temps aux organismes de sport pour s’y conformer, et ce, sans entraver leur admissibilité au financement pendant la période de transition. Cette période de transition pourrait également prendre en considération la capacité d’un organisme de sport à se conformer. Par exemple, un petit organisme de sport pourrait avoir besoin d’une période de transition plus longue qu’un grand organisme.

Enfin, en reconnaissant qu’il peut être difficile pour certains organismes de se conformer au Code, un appui et un accompagnement adéquats devraient être mis à leur disposition pour les aider et les guider dans cette démarche. Il convient de noter qu’il existe des ressources et des cours sur la gouvernance qui sont élaborés par des institutions réputées au Canada et qui sont adaptés aux organismes à but non lucratif.

La Commission comprend aussi que le Comité olympique canadien offre aux organismes nationaux de sport, aux organismes nationaux de services multisports et aux organismes provinciaux et territoriaux de sport un programme de formation gratuit sur la gouvernance, dispensé par l’intermédiaire d’une école d’administration affiliée à une université. Ces ressources devraient être exploitées par tous les organismes de sport au Canada.

Normes de gouvernance obligatoires : recommandations préliminaires

Compte tenu de l’importance d’une bonne gouvernance, la Commission invite fortement le gouvernement du Canada à mettre en œuvre les recommandations 28 à 31 une fois que le rapport final de la Commission aura été publié. Cela permettrait d’entamer le processus qui vise à s’assurer que les organismes de sport se conforment au Code de gouvernance du sport canadien.

Une fois que l’entité sportive centralisée dont il est question au chapitre 6 aura été établie et sera en fonction, ces responsabilités devraient lui être confiées.

La Commission recommande donc que :

  1. Le gouvernement du Canada exige que tous les organismes de sport qu’il finance adoptent et se conforment au Code de gouvernance du sport canadien. Une révision de ce Code sera donc nécessaire puisqu’il est actuellement conçu pour les organismes nationaux de sport. La responsabilité de réviser le Code devrait être transférée à l'entité sportive centralisée décrite au chapitre 6 une fois qu'elle sera établie.
  2. Une période de transition raisonnable soit prévue pour permettre aux organismes de sport financés par le gouvernement fédéral de se conformer au Code de gouvernance du sport canadien sans que cela affecte leur financement. Cette période ne devrait pas s’appliquer aux exigences en matière de gouvernance qui sont actuellement obligatoires dans le cadre du Programme de soutien au sport pour les organismes nationaux de sport, les organismes nationaux de services multisports et les centres et instituts canadiens de sport.
  3. Le gouvernement du Canada offre un appui, notamment des fonds, aux organismes de sport qu’il finance afin que ceux-ci se conforment au Code de gouvernance du sport canadien. Ce rôle devrait être transféré à l'entité sportive centralisée décrite au chapitre 6 une fois qu'elle sera établie.
  4. Le gouvernement du Canada soit l’entité responsable du Code de gouvernance du sport canadien ainsi que de sa révision périodique afin de s’assurer que le contenu du Code demeure à jour et reflète l’évolution des pratiques exemplaires en matière de gouvernance. Ce rôle devrait être transféré à l'entité sportive centralisée décrite au chapitre 6 une fois qu'elle sera établie.

Bonification des normes de gouvernance : conclusions préliminaires

Plusieurs participants et experts en gouvernance ont cerné des exigences en matière de gouvernance qui ne sont pas actuellement prises en compte dans le Code de gouvernance du sport canadien. Ils ont également cerné des exigences. Le rapport Cromwell, le Guide to Good Governance (le guide de la bonne gouvernance) ainsi que les rapports des comités permanents du patrimoine canadien et de la condition féminine soutiennent par ailleurs la bonification du Code de gouvernance du sport canadien.

La modification des exigences prévues dans le Code soulève des préoccupations similaires à celles évoquées dans la section « Normes de gouvernance obligatoires » ci-dessus. Toutefois, la Commission est d’avis que lorsque ce Code deviendra obligatoire, certaines modifications devraient être envisagées. Nous soulignons ci-dessous quatre modifications qui devraient être prises en considération.

Conseils d’administration représentatifs

Selon notre analyse des données du recensement canadien de 2021, environ 30 % de la population canadienne s’identifie comme des personnes autochtones, noires ou de couleur (PANDC)Note de bas de page 74. Malgré ces données démographiques, il a été noté au cours de nos activités de mobilisation que la diversité n’est toujours pas reflétée de manière cohérente dans la composition des conseils d’administration des organismes de sport.

De nombreuses personnes ont fait part de leur inquiétude à la Commission quant à l’absence de voix diverses dans les processus décisionnels, notant que plusieurs conseils d’administration demeurent très insulaires et que les mêmes personnes prennent constamment les mêmes décisions. D’autres ont indiqué que les conseils d’administration n’offraient pas toujours un environnement accueillant et inclusif pour les personnes racisées. Par exemple, on nous a fait part de situations dans lesquelles des membres racisés de conseils d’administration ont dû justifier leur expérience et leurs compétences pour un poste au sein du conseil ou pour des postes de dirigeants. Ils ont également été ouvertement victimes de racisme.

La diversité doit être reflétée à tous les niveaux du système sportif, y compris au sein des conseils d’administration. Pour que les personnes issues de communautés diverses se reconnaissent dans un sport, elles doivent se reconnaître dans toutes les structures du sport et, surtout, dans les postes de direction comme au sein des conseils d’administration. Le changement se produit autour de la table de décision, et un véritable changement a moins de chances de se produire si la diversité n’est pas représentée à cette table.

Même si la conformité au Code de gouvernance du sport canadien n’est pas obligatoire, la Commission souligne que le Code prévoit ce qui suit :

[…] chaque [organisme national de sport] devrait développer une politique de diversité à appliquer à son conseil d’administration. La diversité désigne le large éventail de caractéristiques démographiques qui existent dans la société canadienne, y compris, sans toutefois s’y limiter, le genre, l’identité sexuelle, la race, l’ethnicité, l’orientation sexuelle, la classe sociale, les moyens économiques, les capacités, l’âge, la langue officielle parlée du Canada, la religion et l’éducation. Le conseil d’administration devrait s’assurer chaque année de son approche et de ses initiatives adoptées pour attirer des administrateurs ayant les compétences et la diversité requises (y compris en ce qui concerne la représentation des genres), qu’il considère ses initiatives réussies et toute étape additionnelle que le conseil adoptera vers cet objectifNote de bas de page 75.

On nous a suggéré que des attentes claires en matière de diversité au sein des conseils d’administration étaient nécessaires pour susciter le changement. Cela nécessiterait de rendre obligatoire une représentation diversifiée au sein des conseils d’administration et de créer des occasions pour que les personnes racisées puissent occuper des postes de direction. C’est d’ailleurs ce que beaucoup ont suggéré.

En l’absence d’un mandat clair, les organismes de sport pourraient répondre qu’ils ne sont pas en mesure d’assurer une représentation diversifiée. S’il s’agissait d’une exigence obligatoire, les organismes de sport n’auraient d’autre choix que de trouver un moyen de s’y conformer.

Il a toutefois été reconnu que l’arrivée de personnes racisées au sein des conseils d’administration après la mise en œuvre d’une telle exigence pourrait être perçue par certains comme des nominations symboliques plutôt que des nominations fondées sur le mérite et l’apport de nouvelles compétences. Malgré cette préoccupation, des membres de communautés racisées étaient d’avis qu’une telle approche est nécessaire pour parvenir à un véritable changement.

Des membres de ces communautés ont également insisté sur le fait que toute exigence rendant la représentation des personnes racisées obligatoire au sein des conseils d’administration doit être accompagnée de mesures de soutien afin de s’assurer que ces personnes demeurent en poste. Par exemple, une mesure de soutien pourrait consister à assurer une formation sur la lutte contre le racisme et sur l’inclusion auprès des membres des conseils d’administration, et à veiller à ce qu’au moins deux membres représentant une diversité raciale soient nommés.

Bon nombre de participants ont suggéré que le fait de rendre la représentation des personnes autochtones, noires et de couleur obligatoire au sein des conseils d’administration permettrait de composer des conseils qui reflètent véritablement la société canadienne. Une autre approche a aussi été suggérée, soit celle d’exiger des conseils d’administration qu’ils adoptent une déclaration décrivant leur stratégie pour atteindre la diversité au sein du conseil, avec un objectif d’avoir au moins 30 % des membres du conseil qui sont issus de communautés composées de personnes autochtones, noires, ou de couleur.

Pour s’assurer que les conseils d’administration s’acquittent de leurs responsabilités en matière de diversité, il nous a été suggéré que les organismes de sport soient tenus de présenter un rapport annuel sur la composition de leur conseil. Ce rapport serait soumis au bailleur de fonds gouvernemental de l’organisme et à ses membres lors de l’assemblée générale annuelle.

La valeur et l’importance de la diversité des conseils d’administration ne sont pas des concepts nouveaux. Le rapport CromwellNote de bas de page 76 et les rapports du Comité permanent de la condition féminineNote de bas de page 77 ont tous deux souligné l’importance de veiller à ce que les conseils d’administration reflètent la diversité.

La Commission reconnaît que la plupart des organismes de sport disposent déjà de politiques et de stratégies en matière de diversité, d’équité et d’inclusion. Toutefois, ces politiques et stratégies, à elles seules, n’ont pas entraîné les changements souhaités pour assurer une représentation diversifiée des personnes racisées au sein des conseils d’administration.

Il est évident que le fait de s’appuyer uniquement sur des efforts volontaires ou discrétionnaires n’a pas suffi à assurer une représentation diversifiée sur le plan racial. Afin d’accélérer des progrès concrets et mesurables en matière de diversité au sein des conseils d’administration, et afin d’accroître la représentation des Noirs, des Autochtones et des personnes de couleur au sein des conseils d’administration des organismes de sport, la Commission est d’avis que la diversité raciale doit être incluse dans la matrice des compétences pour la sélection des membres des conseils d’administration.

De plus, afin de cultiver un environnement accueillant, inclusif et sécuritaire au sein des conseils d’administration, une formation sur la lutte contre le racisme et sur l’inclusion doit être offerte périodiquement. Compte tenu de l’importance des enjeux qui s’y rattachent, nous sommes d’avis que la proposition visant à rendre obligatoire la représentation des Noirs, des Autochtones et des personnes de couleur au sein des conseils d’administration mérite une réflexion plus approfondie et un examen sérieux.

Représentation des athlètes

Des athlètes ont fait part à la Commission de leur position unique au sein des organismes nationaux de sport, étant donné que ces organismes existent pour les servir. Cependant, les athlètes ne sont souvent pas considérés comme des membres des organismes de sport et ont historiquement été exclus des structures de gouvernance formelles, en particulier des conseils d’administrationNote de bas de page 78.

Tout au long de nos activités de mobilisation, des athlètes ont revendiqué leur représentation au sein des structures de gouvernance, y compris le droit de vote. D’autres participants ont souligné la nécessité de reconnaître la pluralité des parties prenantes individuelles du système sportif, notamment les entraîneurs, les officiels et les administrateurs sportifs.

Néanmoins, plusieurs participants ont fait part de leurs préoccupations concernant la représentation des athlètes au sein des structures de gouvernance des organismes nationaux de sport.

Certains participants ont soulevé une inquiétude quant au fait que les intérêts des athlètes peuvent parfois ne pas s’aligner avec des intérêts plus larges qui visent l’accroissement du taux de participation et l’amélioration de la programmation dans l’ensemble du système sportif.

Nous avons également entendu dire que l’intérêt personnel des athlètes envers leur sport pouvait conduire à des conflits d’intérêts dans la prise de décision. Certains ont suggéré que ces conflits d’intérêts pourraient être atténués en ayant des représentants athlètes à la retraite plutôt que des athlètes actifs. D’autres ont suggéré la possibilité de faire appel à des représentants athlètes provenant des volets parasportif et non parasportif du sport en question, avec un droit de vote limité aux décisions relatives à l’autre volet du sport. On a noté que cela n’est possible que lorsque le sport est intégré.

Les organismes nationaux de sport ont également souligné le défi que représentent leurs structures de gouvernance actuelles. La Commission a appris que dans certaines structures de gouvernance, les règlements administratifs prévoient que les membres du conseil d’administration sont élus par les membres de l’organisme national de sport, qui comprennent des organismes provinciaux et territoriaux de sport. Ces règlements ne prévoient pas actuellement l’obligation qu’un membre du conseil d’administration soit un représentant des athlètes.

Dans ce contexte, un vote des membres serait nécessaire pour modifier les règlements administratifs afin d’exiger que l’un des membres du conseil d’administration soit un représentant des athlètes. Certains organismes nationaux de sport ont indiqué qu’il leur serait difficile d’insister pour que leurs membres, des organismes provinciaux et territoriaux de sport, élisent un athlète au conseil d’administration. Selon eux, cette situation s’expliquerait par le fait que l’élection d’un athlète pourrait réduire la capacité de ces organismes à faire valoir leurs propres préoccupations auprès de l’organisme national de sport.

Ces organismes ont aussi expliqué que si un poste de représentant des athlètes était créé, les candidats à ce poste ne seraient en concurrence qu’avec d’autres candidats au même poste. Pour certains, un tel représentant des athlètes serait élu sans obtenir le « vote populaire ». Comme alternative à la représentation des athlètes au conseil d’administration, certains ont suggéré des mécanismes permettant de recueillir l’avis des athlètes et de les faire participer aux travaux des comités.

La Loi canadienne sur les organisations à but non lucratif, qui constitue le cadre législatif, n’empêche aucunement la représentation des athlètes au sein d’un conseil d’administration. Le représentant des athlètes doit remplir les conditions requises pour être membre du conseil d’administration et être élu par les membres ou nommé par le conseil d’administration conformément aux exigences de la loiNote de bas de page 79. Il est également possible pour un organisme national de sport de nommer un représentant des athlètes au poste d’observateur du conseil.

Le Code de gouvernance du sport canadien, publié en 2021, reconnaît qu’une véritable représentation des athlètes dans la structure de gouvernance est fondamentaleNote de bas de page 80. Bien que le Code encourage fortement les organismes nationaux de sport à avoir un représentant des athlètes au sein de leur conseil d’administration, la décision sur la meilleure façon d’assurer une représentation significative dans la structure de gouvernance est laissée à chaque conseilNote de bas de page 81.

Le Code prévoit aussi qu’un organisme national de sport qui décide de ne pas avoir de représentant des athlètes au sein de son conseil doit nommer au moins un représentant des athlètes en tant qu’observateur du conseil. Quelle que soit l’approche choisie par le conseil d’administration, une procédure de sélection d’un représentant des athlètes doit être mise en place et prévoir une participation significative des athlètes de ce sportNote de bas de page 82.

Les critères d’admissibilité au Programme de soutien au sport de Sport Canada, publiés en 2024, exigent que les organismes nationaux de sport disposent d’un processus transparent et inclusif pour sélectionner un représentant des athlètes au sein de leur conseil d’administrationNote de bas de page 83.

La confusion et l’incertitude persistent quant à l’obligation de représentation des athlètes au sein des conseils d’administration. L’importance d’une représentation réelle et authentique des athlètes au sein de la structure de gouvernance du sport et des processus décisionnels a été reconnue dans le rapport CromwellNote de bas de page 84 et dans les rapports des deux comités parlementaires permanents. Compte tenu de cette importance, nous comprenons que certains organismes nationaux de sport et organismes nationaux de services multisports ont pris des mesures pour effectuer ce changement au sein de leurs structures de gouvernance.

Pour toutes ces raisons, la Commission est d’avis que la représentation des athlètes en tant que membres élus ayant plein droit de vote au sein des conseils d’administration des organismes nationaux de sport, des organismes nationaux de services multisports, et des centres et instituts canadiens de sport, devrait être obligatoire.

Formation obligatoire sur la prévention et la lutte contre la maltraitance dans le sport

La Commission a entendu de nombreux témoignages de personnes victimes ou survivantes qui estiment que leur expérience n’a pas été suffisamment prise en compte par la direction ou le conseil d’administration de leur organisme de sport. Par conséquent, de nombreuses personnes ont estimé qu’elles se trouvaient souvent sans aucune orientation claire et qu’elles avaient du mal à obtenir un recours, une réparation ou des indications sur la manière de procéder.

Nous avons entendu de nombreux témoignages tragiques d’athlètes réduits au silence ou mis à l’écart par des organismes pour avoir fait état d’allégations d’abus ou de maltraitance. Malheureusement, ces athlètes étaient souvent considérés comme des agents perturbateurs ou accusés de chercher à se venger de leurs propres lacunes en matière d’entraînement ou de performance.

Les expériences partagées avec la Commission, combinées aux conclusions et recommandations des examens du sport sécuritaire des deux comités parlementaires permanents, du rapport Cromwell et des deux rapports McLaren, démontrent que toute personne au sein d’un organisme national de sport, y compris les membres du conseil d’administration, doit avoir une compréhension globale des enjeux de maltraitance et du Code de conduite universel pour prévenir et contrer la maltraitance dans le sport.

La recommandation 17 du rapport du Comité permanent de la condition féminine soutient également cette proposition de formation obligatoire. Le Code de gouvernance du sport canadienNote de bas de page 85 et les critères d’admissibilité au financement du Programme de soutien au sportNote de bas de page 86 exigent une orientation et une formation obligatoires pour les membres des conseils d’administration sur les principes fondamentaux de la bonne gouvernance et les responsabilités des conseils d’administration.

La Commission est d’avis qu’une formation sur la prévention et la lutte contre la maltraitance dans le sport, fondée sur le Code de conduite universel pour prévenir et contrer la maltraitance dans le sport, doit faire partie de la formation obligatoire pour tous les conseils d’administration des organismes de sport.

Transparence financière

En tant que récipiendaires de fonds publics, les organismes de sport doivent être responsables devant leur bailleur de fonds, mais aussi, et surtout, devant la population canadienne. À de nombreuses reprises, la Commission a entendu des participants qui n’étaient pas en mesure de trouver des documents financiers essentiels, comme les états financiers annuels, sur les sites Web des organismes de sport. Ce manque de transparence et de renseignements facilement accessibles diminue la confiance du public.

De nombreuses personnes, y compris des athlètes, ont revendiqué une transparence financière totale concernant les fonds reçus de Sport Canada et la fourniture de renseignements détaillés permettant de savoir comment ces fonds sont dépensés.

L’optimisation de la transparence est conforme aux principes d’ouverture et d’imputabilité, qui constituent le fondement de l’un des principes de bonne gouvernance et de leadershipNote de bas de page 87. En divulguant de manière proactive et cohérente leurs données financières et en partageant leurs renseignements et leurs documents importants sur la gouvernance, les organismes de sport peuvent démontrer leur utilisation appropriée et efficace des fonds. Cette transparence renforcera à son tour la confiance du public, démontrera que l’organisme se conforme à son obligation de reddition de comptes et rehaussera la crédibilité de l’organisme.

Des données financières transparentes et accessibles ont aussi été demandées par d’autres participants, notamment des experts en gouvernance. Cela a également été mentionné dans le rapport CromwellNote de bas de page 88, ainsi que dans la quatrième recommandation du rapport du Comité permanent du patrimoine canadienNote de bas de page 89.

Pour ces raisons, la Commission est d’avis qu’il faudrait envisager d’exiger des organismes de sport qu’ils publient sur leur site Web les trois documents suivants :

Bonification des normes de gouvernance : recommandations préliminaires

La Commission recommande donc que :

  1. Le gouvernement du Canada bonifie le Code de gouvernance du sport canadien en y ajoutant les pratiques obligatoires suivantes pour tous les organismes de sport financés par le gouvernement fédéral :
    1. la diversité raciale doit être incluse dans la matrice des compétences utilisée pour la sélection des membres du conseil d’administration
    2. tous les membres du conseil d’administration doivent recevoir une formation périodique sur la lutte contre le racisme et sur l’inclusion
    3. le conseil d’administration doit comprendre un représentant des athlètes qui siège en tant que membre du conseil ayant plein droit de vote
    4. tous les membres du conseil d’administration doivent recevoir une formation périodique sur la prévention et la lutte contre la maltraitance dans le sport, sur la base du Code de conduite universel pour prévenir et contrer la maltraitance dans le sport.
      Comme indiqué dans la recommandation 37, le programme national d’éducation sur la sécurité dans le sport, qui relèverait de l’entité sportive centralisée une fois établie, répondrait à cette exigence.
    5. Les organismes de sport publiquement les documents suivants sur leur site Web :

      1. les procès-verbaux de toutes les réunions du conseil d’administration
      2. un rapport annuel décrivant tous les fonds publics reçus et offrant un compte-rendu de leur utilisation
      3. un rapport annuel décrivant les activités et les progrès de l’organisme

      Ces documents s’ajouteraient aux documents que les organismes de sport doivent publier sur leur site Web pour se conformer au Code de gouvernance du sport canadien. Ces documents comprennent les statuts de constitution ou de prorogation, le règlement administratif, les états financiers annuels, les procès-verbaux des assemblées des membres, le mandat du conseil d’administration, les mandats de tous les comités et un rapport annuel sur la diversité.

Surveillance des normes de gouvernance et conformité : conclusions préliminaires

Les participants à notre processus de mobilisation ont noté qu’il existe un manque évident de surveillance des pratiques de gouvernance des organismes nationaux de sport. Cette surveillance est nécessaire pour garantir le respect des exigences en matière de bonne gouvernance. Certaines personnes ont soulevé des inquiétudes quant au fait que Sport Canada distribue des fonds publics à ces organismes sans aucune surveillance. Elles appellent donc à l’instauration de vérifications pour s’assurer que les normes de gouvernance et les pratiques exemplaires sont effectivement appliquées. Plusieurs personnes ont également souligné que si les politiques, les pratiques et les procédures existent sur papier, elles ne sont pas toujours mises en œuvre.

Comme indiqué précédemment dans le rapport, nous reconnaissons qu’une fonction de vérification de la conformité a été créée par Sport Canada. Toutefois, pour garantir la mise en œuvre de pratiques de bonne gouvernance, il ne suffit pas de demander aux organismes de sport de s’auto-déclarer conformes et de soumettre des documents justificatifs. Le processus de vérification doit aller plus loin pour s’assurer que les exigences obligatoires en matière de gouvernance sont respectées. D’autre part, lorsqu’un organisme de sport a du mal à assumer ses responsabilités, il est également important de veiller à ce que des conseils et un appui lui soient apportés pour l’aider à corriger toute lacune.

Pour garantir la conformité, la Commission estime qu’il est essentiel d’effectuer des vérifications aléatoires et périodiques de la gouvernance afin d’examiner le degré de conformité des organismes de sport au Code de gouvernance du sport canadien. Étant donné que ces organismes reçoivent des fonds importants qui proviennent de l’argent des contribuables, il est impératif de mettre en place des mécanismes de contrôle formels qui assurent l’application cohérente du Code. Cela permettrait de garantir que les organismes nationaux de sport sont gouvernés de manière appropriée et efficace. Idéalement, cette fonction de surveillance de la gouvernance ne relèverait pas de Sport Canada. Elle résiderait plutôt au sein de l’entité sportive centralisée dont il est question au chapitre 6.

Le Code de gouvernance du sport canadien se trouve actuellement sur les sites Web du Comité olympique canadien et du Centre de documentation pour le sport. Plusieurs participants rencontrés par la Commission ne pouvaient pas identifier l’entité qui est actuellement responsable du Code, suggérant qu’il appartient à la communauté sportive dans son ensemble. D’autres pensaient plutôt que Sport Canada est l’entité responsable du Code. Le manque de clarté sur ce point démontre une fois de plus l’absence de leadership dans le sport.

La collaboration, la coopération et la mobilisation sont importantes pour élaborer un code de gouvernance. Ces principes garantissent que le code tient compte et reflète les réalités des organismes qu’il régit. Toutefois, pour qu’un code de gouvernance demeure pertinent et crédible au sein de la communauté sportive, il est essentiel qu’il relève de la responsabilité d’une seule entité.

La Commission est d’avis qu’une entité indépendante responsable de la surveillance de la conformité en matière de gouvernance des organismes nationaux de sport devrait également être responsable du Code de gouvernance du sport canadien et de sa révision périodique.

Surveillance des normes de gouvernance et conformité : recommandations préliminaires

La Commission recommande donc que :

  1. Le gouvernement du Canada effectue des vérifications périodiques des organismes de sport financés par le gouvernement fédéral afin de s’assurer de la mise en œuvre et du respect du Code de gouvernance du sport canadien. Ce rôle devrait être transféré à l'entité sportive centralisée décrite au chapitre 6 une fois qu'elle sera établie.

Gouvernance à tous les niveaux du sport : conclusions préliminaires

Tout au long de ses activités de mobilisation, la Commission a constaté que certains participants pensaient à tort que les organismes nationaux de sport avaient une autorité et un contrôle sur les organismes provinciaux et territoriaux de sport.

Lorsque nous leur avons demandé, des organismes nationaux de sport ont répété à maintes reprises que leur portée et leur mandat se limitent aux activités nationales. Certains ont également expliqué que les organismes provinciaux et territoriaux de sport sont souvent des membres au sein de leur structure de gouvernance. En tant que membres, ceux-ci élisent le conseil d’administration.

Des organismes nationaux de sport ont souligné que cette structure leur donne peu de pouvoir ou de contrôle au-delà de leur structure de gouvernance nationale, ce qui conduit à une gouvernance inefficace dans l’ensemble. Certains participants nous ont dit qu’il y avait un embouteillage au niveau provincial et territorial, expliquant que les efforts déployés au niveau national se répercutent peu au niveau provincial et territorial, et encore moins au niveau communautaire.

Il demeure néanmoins que le système sportif canadien ne se limite pas aux organismes nationaux de sport, mais s’étend également aux organismes provinciaux et territoriaux de sport, puis au niveau communautaire ou local. La Commission reconnaît que pour assurer une approche cohérente de la gouvernance dans l’ensemble du système sportif, les exigences qui s’appliquent aux organismes nationaux de sport devraient également s’appliquer aux organismes provinciaux et territoriaux de sport et aux organismes communautaires de sport. En fait, de nombreux participants rencontrés par la Commission ont revendiqué une telle approche.

Au chapitre 3 du présent rapport, nous avons offert un aperçu du partage des compétences entre le gouvernement fédéral et les provinces et territoires, comme il est défini dans la Loi constitutionnelle de 1867Note de bas de page 90. Compte tenu de ce partage des compétences, nous sommes d’avis que l‘uniformisation et l’harmonisation des pratiques de gouvernance du sport ne peuvent être réalisées que par une véritable collaboration entre les deux paliers de gouvernement.

Nous exposons ci-après les options envisagées par la Commission pour harmoniser les normes de gouvernance à tous les niveaux du sport au Canada. L’objectif de cet exercice est de donner aux participants l’occasion de discuter des approches proposées, que ce soit dans le cadre du Sommet national ou par l’entremise d’autres activités de mobilisation, avant que la Commission soumette ses recommandations finales au gouvernement du Canada.

Alors que nous discutons des options pour uniformiser les pratiques de gouvernance du sport dans l’ensemble du système sportif, allant du niveau national aux niveaux provincial, territorial et communautaire, nous reconnaissons que les provinces et les territoires disposent de leur propre législation pour régir les organismes à but non lucratif et de leurs propres exigences en matière de financement. Bien que certaines de ces exigences puissent empêcher un organisme provincial ou territorial de sport d’adopter pleinement le Code de gouvernance du sport canadien, une version modifiée du code adaptée aux particularités de chaque province ou territoire pourrait être adoptée.

Gouvernance à tous les niveaux du sport : recommandations préliminaires

Option 1 : Utiliser le pouvoir de dépenser pour mettre en œuvre des normes de gouvernance uniformes

La Commission recommande donc que :

  1. Le gouvernement du Canada utilise son pouvoir de dépenser pour parvenir à une plus grande uniformité des normes de gouvernance du sport entre le niveau fédéral et le niveau provincial et territorial du sport. Ce rôle devrait être transféré à l'entité sportive centralisée décrite au chapitre 6 une fois qu'elle sera établie.

Pour uniformiser et renforcer toutes les structures de gouvernance du sport afin qu’elles puissent répondre de manière compétente et efficace aux plaintes relatives à la maltraitance et au sport sécuritaire, et afin qu’elles puissent en assurer la bonne gestion, la Commission encourage fermement la mise en œuvre du Code de gouvernance du sport canadien à tous les niveaux du système sportif.

Chacun des éléments examinés ci-dessous permettrait à lui seul d’améliorer les enjeux de gouvernance du sport. Toutefois, une approche combinant chacun de ces éléments aurait un plus grand impact. Cette approche permettrait de résoudre les problèmes persistants de gouvernance interne des organismes de sport de manière cohérente au sein des organismes nationaux, provinciaux et territoriaux de sport, et ce, dans l’ensemble du système sportif canadien.

Nous notons que l’approche décrite dans les trois premiers éléments ci-dessous a déjà été présentée et soutenue par d’éminents chercheurs dans le domaine du sportNote de bas de page 91.

Conformité au Code de gouvernance du sport canadien comme condition d’adhésion aux organismes nationaux de sport financés par le gouvernement fédéral

Comme indiqué dans la recommandation 28, le gouvernement du Canada devrait exiger que tous les organismes de sport qui reçoivent des fonds fédéraux adoptent le Code de gouvernance du sport canadien et s’y conforment. De plus, le gouvernement du Canada pourrait exiger que les organismes nationaux de sport financés par le gouvernement fédéral modifient leurs règles d’adhésion pour exiger que leurs membres (les organismes provinciaux et territoriaux de sport) adoptent et respectent également le Code de gouvernance du sport canadien ou sa version modifiée en tant que condition d’adhésion.

Nous reconnaissons que cette approche aurait une portée limitée. Elle n’engloberait que les organismes nationaux de sport financés par le gouvernement fédéral et les organismes provinciaux ou territoriaux qui en sont membres, laissant de côté plusieurs organismes de sport non financés. D’autre part, il est possible que certains organismes provinciaux et territoriaux de sport de plus grande envergure et bien financés n’aient pas besoin d’être affiliés à leur organisme national de sport. Ils pourraient donc refuser de se conformer à cette exigence et révoquer leur adhésion. Il est donc possible que cette approche, à elle seule, n’aboutisse pas à un véritable changement.

Adoption du Code de gouvernance du sport canadien comme condition de financement des organismes provinciaux ou territoriaux de sport

Pour étendre davantage l’adoption et le respect du Code de gouvernance du sport canadien ou de sa version modifiée, le gouvernement du Canada pourrait utiliser son pouvoir de dépenser pour imposer indirectement des exigences en matière de gouvernance aux organismes provinciaux, territoriaux et communautaires de sport.

Cela pourrait se faire au moyen d’accords de contribution entre le gouvernement du Canada et les gouvernements provinciaux et territoriaux. Ces accords pourraient conditionner le financement destiné aux organismes provinciaux, territoriaux et communautaires de sport au respect du Code de gouvernance du sport canadien ou de sa version modifiéeNote de bas de page 92. Encore une fois, si adoptée, cette approche aurait un effet limité, car elle ne s’appliquerait qu’aux organismes provinciaux, territoriaux et communautaires de sport récipiendaires de fonds fédéraux.

Pour une application encore plus large du Code de gouvernance du sport canadien ou de sa version modifiée, le gouvernement du Canada pourrait aussi encourager les gouvernements provinciaux ou territoriaux à exiger que tous les organismes provinciaux ou territoriaux de sport adoptent et se conforment au Code ou à sa version modifiée comme condition pour recevoir des fonds provinciaux ou territoriaux.

Les provinces et les territoires pourraient également exiger que les organismes de sport qu’ils financent modifient leurs règles d’adhésion pour exiger que tous leurs membres (les organismes communautaires de sport) adoptent et se conforment au Code de gouvernance du sport canadien ou sa version modifiée comme condition d’adhésion. Cette approche permettrait d’élargir le champ d’application des normes de gouvernance du sport au-delà des organismes provinciaux et territoriaux de sport qui sont membres d’organismes nationaux de sport financés par le gouvernement fédéral.

Mesures incitatives pour les organismes nationaux, provinciaux et territoriaux de sport

Afin d’inciter les organismes nationaux de sport à modifier leurs règles d’adhésion, le gouvernement du Canada pourrait en fonction de la mesure dans laquelle leurs membres ont adopté et se sont conformés au Code de gouvernance du sport canadien ou à sa version modifiée.

Enfin, au moyen de son financement, le gouvernement du Canada pourrait inciter les provinces et les territoires à établir le niveau de financement qu’ils allouent aux organismes provinciaux et territoriaux de sport en fonction de la mesure dans laquelle leurs membres ont adopté et se sont conformés au Code de gouvernance du sport canadien ou à sa version modifiée.

Financement supplémentaire pour faciliter la conformité

Les organismes nationaux de sport, les provinces et les territoires n’ont pas nécessairement les ressources et les capacités requises pour effectuer le suivi du respect des exigences de gouvernance auprès de leurs membres ou des organismes de sport qu’ils financent. Le gouvernement du Canada pourrait donc allouer des fonds supplémentaires à cette fin.

Option 2 : Passer par la collaboration pour établir des normes de gouvernance uniformes

La Commission recommande donc que :

  1. Le gouvernement du Canada collabore avec les gouvernements provinciaux et territoriaux afin d’établir et d’imposer par voie législative des normes fédérales, provinciales et territoriales similaires en matière de gouvernance du sport. Ce rôle devrait être transféré à l'entité sportive centralisée décrite au chapitre 6 une fois qu'elle sera établie.

Une autre option serait que le gouvernement du Canada parvienne à un accord avec les gouvernements provinciaux et territoriaux pour la mise en place d’un cadre de collaboration. Par l’entremise de ce cadre, les deux paliers de gouvernement adopteraient chacun une législation prescrivant des normes similaires de gouvernance du sport fondées sur le Code de gouvernance du sport canadien.

Cette approche nécessiterait une coordination et une collaboration importantes. Cependant, si cette approche était retenue, elle permettrait l’harmonisation et l’uniformisation des pratiques de gouvernance du sport à tous les niveaux du sport, que ce soit au niveau national, provincial, territorial ou communautaire. Étant donné que cette approche est de nature collaborative, il est possible que certaines provinces ou certains territoires refusent d’y participer et choisissent de légiférer selon leur compétence respective.

Conclusion sur la gouvernance

La bonne gouvernance est au cœur de tout système sain, sécuritaire et efficace. Elle devrait être accueillie et encouragée par tous en tant qu’objectif commun affirmant l’importance du respect des principes fondamentaux de transparence, d’imputabilité et d’équité. Le respect de la bonne gouvernance ne doit pas être considéré comme un fardeau, mais plutôt comme une norme de base qui sert à protéger la société et qui profite à toutes les personnes impliquées dans le système sportif. En mettant en œuvre les principes de bonne gouvernance, les organismes atténueront les risques et amélioreront leur gestion et leur réponse aux plaintes relatives à la maltraitance et au sport sécuritaire.

Cependant, nous sommes également conscients que ce sont des bénévoles qui dirigent les structures de gouvernance au sein des organismes de sport. Il est de plus en plus difficile de recruter et de maintenir en poste ces personnes dévouées, qui servent inlassablement les organismes de sport qu’elles dirigent. Par conséquent, l’imposition de nouvelles exigences en matière de gouvernance nécessitera beaucoup de temps, d’efforts et de ressources. C’est pourquoi des ressources appropriées devront être allouées pour garantir le respect de ces exigences.

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2025-08-28