Rapport 2 : Recommandations relatives à la politique du gouvernement du Canada en matière de drogues, telle qu'elle est énoncée dans le projet de Stratégie canadienne sur les drogues et autres substances (SCDAS)

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Organisation : Santé Canada

Publiée : 2021-06-06

Table des matières

Message des coprésidents

Chère sous-ministre adjointe déléguée,

C'est avec plaisir que nous présentons ce deuxième rapport du Groupe d'experts sur la consommation de substances de Santé Canada, dans lequel figurent des recommandations sur la politique du gouvernement du Canada en matière de drogues, telle qu'elle est énoncée dans le projet de Stratégie canadienne sur les drogues et autres substances.

Nous sommes honorés d'avoir la responsabilité de coprésider ce Groupe d'experts et nous sommes conscients de l'occasion historique que cela représente de contribuer à la discussion sur la manière d'améliorer la gestion et la réglementation des substances contrôlées au Canada.

Nous percevons cette occasion comme un moment décisif pour les politiques visant à réduire les méfaits liés à la consommation de substances. Notre Groupe d'experts s'est réuni virtuellement pendant la COVID-19, avec des rappels hebdomadaires de la façon dont le racisme systémique historique et actuel, les inégalités sociales ainsi que les décisions en matière de politiques alimentent les méfaits liés à la consommation de substances.

Le Groupe d'experts a été tenu de répondre à des questions précises au sujet de la SCDAS. Il y a répondu dans le rapport, mais a ressenti le besoin d'aller plus loin et de signaler clairement que des mesures audacieuses sont nécessaires pour s'attaquer au problème pressant de l'augmentation des surdoses et d'autres méfaits liés à la consommation de substances au Canada.

Le temps est venu de procéder à un changement de paradigme dans la politique. L'accueil de la légalisation du cannabis et d'autres enquêtes récentes d'opinion publique laissent entendre que le Canada souhaite passer à un investissement accru double dans un réseau complet de services et de soutiens offerts à ceux qui consomment des substances, à l'aide de stratégies plus récentes telles que la réglementation des substances contrôlées, la décriminalisation de la simple possession et de la consommation de drogues, et l'élargissement de l'approvisionnement plus sécuritaire. Les données probantes appuient ces solutions de rechange en matière de politiques comme des moyens de réduire les méfaits liés à la consommation de substances en fonction des groupes, notamment la Commission globale de politique en matière de drogues ainsi que les présentations et les mémoires transmis au Groupe d'experts par les groupes communautaires canadiens, les organisations représentant les personnes ayant vécu ou vivant une expérience, les cliniciens et le milieu universitaire.

Nous remercions toutes les personnes qui ont transmis leurs connaissances et leur sagesse. Elles ont aidé le Groupe d'experts à développer sa réflexion et à formuler des recommandations en fonction des meilleures données probantes.

Ce fut un privilège de travailler avec le groupe diversifié d'experts qui constituent le Groupe d'experts. Chaque membre a offert une perspective unique à notre effort collectif et contribué à un riche dialogue qui a donné lieu aux recommandations que nous vous présentons aujourd'hui.

Pour terminer, nous remercions le Secrétariat et le rédacteur de rapport qui nous ont habilement soutenus tout au long de ce travail.

Cordialement,

Coprésidents, Groupe d'experts sur la consommation de substances de Santé Canada

Carol Hopkins
Dr Kwame McKenzie
Mike Serr

Section relative à la vérité et à la réconciliation dans la Stratégie canadienne sur les drogues et autres substances

Les enfants refont surface en 2021 pour dire la vérité. Sera-t-elle entendue cette fois-ci?

Au cours du mandat du Groupe d'experts, 215 enfants autochtones ont été découverts dans une tombe anonyme du plus grand pensionnat au Canada, situé à Tk'emlúps te Secwépemc, Kamloops, en Colombie-Britannique. Cette découverte rappelle au Canada le traumatisme intergénérationnel subi par de nombreuses familles qui ont survécu au système de pensionnat, un traumatisme qui constitue une cause profonde du problème de consommation de substances. Selon les croyances autochtones spirituelles, le Grand esprit et notre Mère nourricière, la Terre se sont assurés que les enfants seraient découverts aujourd'hui. Un rappel que, bien que le monde commence à se sortir de la pandémie, nous ne pouvons ignorer la vérité et que nous devons agir pour veiller à ce que la politique en matière de drogues tienne compte des traumatismes vécus.

Les Premières Nations :

Les politiques et systèmes coloniaux du Canada font du tort aux peuples, aux familles et aux communautés des Premières Nations, Inuits et Métis en les dissociant des forces que procurent leur statut de nation, leur langue, leur territoire et leur culture. Les politiques et affectations de ressources aux Premières Nations, Inuits et Métis ont trop longtemps été limitées par des décisions justifiées par un déficit, des modes de financement inadaptés et un racisme épistémique cherchant à faire disparaître la valeur des peuples autochtones et de leurs connaissances sacrées.

Ce racisme systémique a perpétué l'héritage du traumatisme intergénérationnel et ancré une mentalité publique selon laquelle les peuples autochtones sont incapables de se prendre en charge et de gérer leurs propres programmes et communautés. Par ailleurs, en raison de ce refus de fournir des ressources et des mécanismes équitables en vue de remédier au gouffre juridictionnel et d'effacer « l'option » perçue pour répondre aux besoins des peuples autochtones, ces communautés sont laissées sans ressources pertinentes pour répondre à l'acuité des besoins liés aux drogues et à l'alcool.

Les objectifs de développement durables des Nations Unies, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et les appels à l'action de la Commission de vérité et de réconciliation expriment tous l'importance des facteurs déterminants sociaux de la santé, favorisent le droit à la santé mentale et au bien-être, avec équité et un accès à des soins de santé de qualité comme moyen de prolonger l'espérance de vie des peuples autochtones du Canada.

La réconciliation pour les peuples, les familles et les communautés des Premières Nations, Inuits et Métis au Canada nécessite une capacité de ressources équitables en vue d'assurer l'accès à des services fondés sur la distinction, la culture et le territoire, à un continuum de soins tenant compte des traumatismes, à des services de réduction des méfaits ainsi qu'à des données probantes renseignées par des personnes qui consomment des drogues et de l'alcool. La réconciliation nécessite également que les bons services soient disponibles et accessibles pour les peuples autochtones en ce qui concerne le système de justice pénale, les femmes autochtones et les personnes de divers genres, les personnes autochtones vivant avec le VIH, les personnes autochtones défavorisées sur le plan économique, les jeunes et les aînés autochtones, les personnes autochtones vivant avec un handicap tel que l'ensemble des troubles causés par l'alcoolisation fœtale (ETCAF), ainsi que les personnes autochtones touchées de façon disproportionnée par les urgences environnementales qui les déconnectent de la sécurité. Les peuples autochtones sont représentés de manière disproportionnée dans chacune de ces circonstances en raison du traumatisme intergénérationnel, transmis par des facteurs sociaux et peut-être des changements épigénétiquesNote de bas de page 1, dont les politiques néfastes sans ressources adéquates pour y répondre sont la source. Les politiques néfastes ne se limitent pas aux politiques en matière de drogues. Elles englobent l'ensemble du spectre des politiques colonialistes, notamment le système de pensionnats indiens dont les préjudices continuent de résonner à travers les communautés des Premières Nations, Inuits et Métis à ce jour.

Un changement immédiat et complet en matière de politique est nécessaire pour rectifier les préjudices historiques et actuels subis par les peuples, les familles et les communautés des Premières Nations, Inuits et Métis. Ce changement doit être appuyé par des ressources proportionnelles aux besoins. Chaque jour perdu est un jour supplémentaire de préjudices potentiellement irréparables. Des mesures importantes du changement seront nécessaires pour parvenir à un changement complet en matière de politique. Nous devons par ailleurs veiller à ce que des données désagrégées de grande qualité, pertinentes sur le plan culturel et fondées sur les distinctions soient disponibles et accessibles pour les communautés autochtones.

Résumé

Le présent rapport expose les conclusions et les recommandations de la deuxième partie du mandat du Groupe d'experts sur la consommation de substances de Santé Canada.

Le Groupe d'experts s'est réuni, a écouté les présentations, examiné les documents et délibéré sur les recommandations relatives à la politique du gouvernement du Canada en matière de drogues, telle qu'elle est énoncée dans le projet de Stratégie canadienne sur les drogues et autres substances (SCDAS) du 5 mai au 9 mai 2021.

Le Groupe d'experts a étudié six questions précises liées à la façon dont le projet de SCDAS énonce le problème des méfaits liés à la consommation de substances au Canada; ses objectifs et principes généraux; ses quatre piliers, à savoir la prévention, le traitement, la réduction des méfaits et l'application de la loi, ainsi que la base de données probantes; ses domaines de priorité; la manière de mieux soutenir les populations les plus à risque; et tout autre problème ou domaine qui devrait être inclus. Le Groupe d'experts s'est servi des questions pour structurer ses discussions, puis a choisi une approche plus générale et plus stratégique pour présenter ses recommandations.

Le Groupe d'experts souhaite mettre l'accent sur cinq messages principaux liés à la stratégie du Canada en matière de substances :

  1. La politique du Canada sur les substances doit considérablement changer pour remédier à la stigmatisation structurelle et l'éliminer, se concentrer sur la santé des personnes qui consomment des substances, et s'aligner sur les données probantes actuelles.
  2. Des mesures audacieuses s'imposent de toute urgence, notamment une approche de décriminalisation, l'élaboration d'un cadre unique de santé publique qui réglemente l'ensemble des substances, ainsi que l'élargissement de l'approvisionnement plus sécuritaire.
  3. Des solutions spécialement conçues pour le Canada sont nécessaires et doivent être adaptées aux contextes historiques, culturels, sociaux, politiques et géographiques précis des groupes démographiques divers du Canada.
  4. Un leadership national est essentiel afin d'assurer l'existence de normes pour la variété de soutiens et de services auxquels les personnes au Canada qui consomment des substances devraient avoir accès.
  5. Le Canada doit effectuer de nouveaux investissements importants afin de pouvoir traiter adéquatement les répercussions de la consommation de substances.

Les recommandations du Groupe d'experts en réponse aux questions précises qui lui a ont été posées au sujet de la SCDAS sont réparties en deux sections : recommandations sur la façon d'énoncer le problème des méfaits liés à la consommation de substances au Canada et recommandations sur la voie à suivre.

Les recommandations du Groupe d'experts sur la manière d'énoncer le problème sont les suivantes :

Méfaits liés à la politique

Méfaits liés à la consommation de substances

Consommation de substances et personnes qui consomment des substances

Financement insuffisant et manque de services

Les recommandations du Groupe d'experts sur la voie à suivre sont les suivantes :

Réglementation légale

Approvisionnement plus sécuritaire

Financement

Réduction de la stigmatisation

Équité

Leadership national

Approche intégrée

Introduction

Il s'agit du deuxième des deux rapports préparés par le Groupe d'experts sur la consommation de substances de Santé Canada, établi pour fournir à Santé Canada des conseils et des recommandations éclairés indépendants sur :

Le Groupe d'experts s'est réuni pour la première fois le 10 mars 2021 et a présenté son premier rapport à la sous-ministre adjointe déléguée, Direction générale des substances contrôlées et du cannabis de Santé Canada le 6 mai 2021. Les faits saillants et les recommandations mis en évidence dans le premier rapport du Groupe d'experts devraient être pris en compte lors de la lecture de ce second rapport. Plus précisément, le Groupe d'experts estime que la criminalisation de la possession simple cause des préjudices aux Canadiens et que cela doit cesser. Le Groupe d'experts a tenu compte de cinq enjeux principaux lors de la formulation des recommandations : stigmatisation; préjudices disproportionnés aux populations subissant une inégalité structurelle; méfaits causés par le marché des drogues illicites; fardeau financier sur les systèmes de santé et de justice pénale; et problèmes sous-jacents non traités.

Le Groupe d'expert a également tenu compte des obligations du Canada dans le cadre des traités internationaux, des leçons retenues dans d'autres territoires de compétence, de la question importante de la sécurité, des soutiens offerts à la communauté, des développements récents en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances (LRCDAS), et du cadre juridique général canadien.

Le Groupe d'experts a formulé quatre recommandations liées à la décriminalisation et à la réglementation, et quatre recommandations connexes (voir l'annexe C). Outre la recommandation de lever les sanctions pénales et les mesures coercitives pour la simple possession et la consommation de substances, le Groupe d'experts a recommandé l'intégration de toutes les substances - y compris les substances actuellement visées par la SCDAS, le tabac, le cannabis et l'alcool - dans un cadre unique de santé publique englobant les substances légalement réglementées. Cette recommandation a de profondes répercussions pour une nouvelle SCDAS, qui fera l'objet d'une évaluation plus poussée dans le présent rapport.

Ce second rapport présente les recommandations et les conseils du Groupe d'experts visant à renforcer l'approche du gouvernement en matière de consommation de substances. Bien qu'il puisse être lu de manière indépendante, il s'appuie sur le premier rapport et devrait être interprété dans le contexte du premier rapport.

Membres du Groupe d'experts

Les biographies des membres du Groupe d'experts sont proposées dans l'annexe A.

Approche et méthodologie

Aperçu

Le Groupe d'experts a reçu un projet de Stratégie canadienne sur les drogues et autres substances (SCDAS) aux fins d'examen et de commentaires. La version de la SCDAS examinée par le Groupe d'experts était datée d'août 2020.

Le Groupe d'experts a été tenu de répondre à six questions précises sur la SCDAS :

  1. Le problème est-il correctement énoncé quant aux méfaits de la consommation de substances au Canada?
  2. La SCDAS comporte-t-elle les bons buts, principes et objectifs généraux?
  3. Les quatre piliers de la Stratégie (prévention, traitement, réduction des méfaits et répression) et la base de données probantes présentent-ils des lacunes?
  4. Avons-nous les bons domaines prioritaires pour l'avenir?
  5. Comment pouvons-nous mieux soutenir les populations les plus exposées aux préjudices liés à la consommation de substances par l'intermédiaire de la SCDAS?
  6. Y a-t-il d'autres questions ou domaines que nous devrions inclure dans la SCDAS?

Le Groupe d'experts a structuré beaucoup de ses discussions en fonction de ces questions, mais a finalement convenu de présenter un ensemble plus général de recommandations qui ne sont pas toutes particulièrement liées aux questions ou à l'ébauche de la SCDAS fournies à Santé Canada.

Le travail s'est déroulé au cours de six réunions, les 5, 12, 19 et 26 mai, et les 2 et 9 juin 2021. Les réunions duraient de deux (2) à cinq (5) heures et étaient organisées par l'intermédiaire d'un outil de vidéoconférence en ligne. Le Secrétariat du Groupe d'experts a préparé les comptes rendus des délibérations de chacune des réunions aux fins d'utilisation par les membres du Groupe d'experts.

Divers documents et résumés ont été remis aux membres du Groupe d'experts et examinés avant les réunions. Les membres ont également collaboré et échangé de manière asynchrone entre les réunions par courriel et à l'aide de la plateforme GCcollab du gouvernement du Canada.

Présentations et soumissions

Les organisations et personnes suivantes ont présenté ce qui suit au Groupe d'experts pendant la deuxième partie de son mandat :

5 mai 2021

19 mai 2021

26 mai 2021

2 juin 2021

Messages clés

En s'appuyant sur les recommandations du Groupe d'experts dans son premier rapport, le Groupe d'experts souhaiterait mettre l'accent sur les principaux points suivants concernant les politiques et les stratégies du Canada en matière de substances :

  1. La politique du Canada sur les substances doit considérablement changer pour remédier à la stigmatisation structurelle et l'éliminer, se concentrer sur la santé des personnes qui consomment des substances, et s'aligner sur les données probantes actuelles. Les personnes qui consomment des substances ne sont pas le problème. Les forces systémiques sociales, historiques et politiques (y compris la colonisation, l'inégalité sociale et le racisme) ainsi que les politiques inadéquates (notamment la criminalisation de la simple possession, un marché des drogues illicites non réglementées extrêmement toxiques et une réglementation inappropriée de l'alcool) constituent les facteurs fondamentaux à l'origine des décès par intoxication et de nombreux autres méfaits liés à la consommation de substances. Les nouvelles solutions, à commencer par la réglementation légale, devraient mettre l'accent sur les facteurs déterminants sociaux de la santé, la santé publique et les droits des personnes qui consomment des substances. L'élaboration et la légale, devraient mettre l'accent sur les facteurs déterminants sociaux de la santé, la santé mise en place de ces solutions doivent solliciter la participation des personnes ayant vécu ou vivant une expérience et les organisations qui les représentent, puisque ce sont elles les plus touchées.
  2. Des mesures audacieuses sont nécessaires de toute urgence. La guerre contre les drogues a mené à ce qui semble être une guerre contre les personnes qui consomment des drogues. Des personnes meurent chaque jour et la situation au Canada, déjà particulièrement mortelleNote de bas de page 2, empire au lieu de s'améliorerNote de bas de page 3. Le Canada présente le taux de mortalité causée par une surdose qui croît le plus rapidement au monde, et ce, malgré son vaste ensemble d'interventions de prévention des surdoses légalement disponibles, notamment la distribution de naloxone, les services de vérification des drogues et des sites de consommation supervisée. Bien que ces interventions puissent expliquer le taux de mortalité canadien légèrement inférieur à celui des États-Unis (où le taux est le plus élevé au monde), les succès modestes découlant de ces interventions à ce jour ont été éclipsés par l'aggravation alarmante de l'épidémie de surdoses au CanadaNote de bas de page 4. Les politiques actuelles du Canada en matière de drogues ne parviennent pas à garder les gens en vie et doivent immédiatement être transformées par l'intermédiaire de la décriminalisation, de l'élaboration d'un cadre unique de santé publique qui réglemente toutes les substances, et de l'élargissement de l'approvisionnement sécuritaire.
  3. Des solutions spécialement conçues pour le Canada sont nécessaires et doivent être adaptées à nos contextes historiques, culturels, sociaux, politiques et géographiques précis. Bien que nous puissions apprendre d'autres territoires de compétences, le Canada doit élaborer ses propres solutions, qui reconnaissent les droits souverains des peuples autochtones et soutiennent leurs gouvernements en fournissant une prévention appropriée, une réduction des méfaits, des traitements et des approches de rétablissement; qui assurent des protections équitables et des résultats pour d'autres groupes touchés de façon disproportionnée par les méfaits liés à la consommation de substances, y compris, sans toutefois s'y limiter, les femmes, les populations noires et les populations racialisées; et qui tiennent compte de la taille de notre pays et de la répartition de sa population entre le nord et le sud, les régions urbaines et rurales.
  4. Un leadership national est essentiel. Le gouvernement doit prendre les commandes pour dépasser les frontières politiques et juridictionnelles et parvenir à un consensus sur les normes nationales concernant le continuum de services et de ressources équitables axés sur les personnes, nécessaires pour s'assurer que les personnes au Canada qui consomment des substances ont accès à des protections et à des soutiens complets et appropriés.
  5. Le Canada doit effectuer de nouveaux investissements importants pour traiter cette question. Il devrait y avoir une voie de financement distincte de la santé mentale, afin de renforcer l'importance et l'urgence de cette question.

Des recommandations plus précises figurent dans les sections suivantes portant sur la façon d'énoncer le problème dans la stratégie et dans quelle partie de la Stratégie canadienne sur les drogues et autres substances (SCDAS) devrait se concentrer sur la voie à suivre.

Énoncé du problème

Bien que l'énoncé du problème dans le projet de SCDAS présente un enjeu général et systémique, le Groupe d'experts a découvert des lacunes et des défis importants qui doivent être traités. La SCDAS doit équilibrer des énoncés clairs et concis pour faciliter la compréhension avec la reconnaissance de la complexité de cette question et l'importance d'une approche intégrée.

Le Groupe d'experts a été particulièrement préoccupé par le fait que la stratégie passe sous silence les méfaits liés à la politique, et par la manière dont le projet de SCDAS aborde les méfaits liés à la consommation de substances, la consommation de substances et les personnes qui consomment des substances.

Méfaits liés à la politique

Recommandation : fournir davantage de contexte sur les méfaits liés à la politique, les répercussions des facteurs déterminants sociaux de la santé ainsi que les méfaits historiques et leurs effets intergénérationnels persistants.

Les méfaits liés à la politique, et plus particulièrement les méfaits découlant de la criminalisation de la simple possible, doivent être reconnus en tant que part importante du problème. Les groupes d'experts internationaux ont montré que l'interdiction de certaines drogues a conduit à l'augmentation de l'activité criminelle et à un marché des drogues illicites très toxiques extrêmement fort et non réglementé. L'interdiction a également favorisé la stigmatisation et la discrimination et a miné les droits des personnes qui consomment des substances. La politique d'interdiction a été signalée comme une source importante des méfaits subis par les personnes qui consomment des droguesNote de bas de page 5.

L'énoncé du problème doit également reconnaître et décrire plus clairement les méfaits historiques, intergénérationnels et persistants causés par le racisme structurel historique et continu au Canada.

Recommandation : décrire les répercussions d'une réglementation inadéquate des produits pharmaceutiques, du tabac, de l'alcool, du cannabis et des substances illicites sur la question liée à la consommation de substances au Canada, et reconnaître que l'alcool cause actuellement plus de dommages que les substances couvertes par la SCDASNote de bas de page 6.

Outre les méfaits causés par le marché des drogues illicites extrêmement toxiques, des méfaits importants ont été provoqués par la prescription excessive ou la stratégie marketing agressive des substances actuellement légales comme étant saines et bénéfiques. L'accès aux options pharmaceutiques pour l'approvisionnement en drogues toxiques fait partie d'un accès plus sécuritaire, mais accroître l'accès ne signifie pas nécessairement réduire les méfaits de manière générale, comme cela a été démontré, par exemple, par l'expérience du Canada avec l'alcoolNote de bas de page 7.

Méfaits liés à la consommation de substances

Recommandation : élargir la définition des méfaits liés à la consommation de substances.

L'ampleur absolue des méfaits liés à la consommation de substances doit être comprise afin de créer une base solide pour la stratégie. Ces méfaits vont au-delà des troubles liés à la consommation de substances tel que le définit la cinquième édition du Diagnostic and Statistical Manual (DSM) de l'American Psychiatry Association (APA). Les méfaits liés à la consommation de substances englobent des méfaits bien plus variés que les conséquences individuelles sur la santé directement liées aux substances. Ils comprennent par exemple la stigmatisation, les méfaits disproportionnés subis par les populations touchées par une inégalité structurelle, la violence liée au marché des drogues illicites, un fardeau financier élevé sur le système de santé et de justice pénale, et des problèmes sous-jacents non traitésNote de bas de page 8.

Recommandation : reconnaître et décrire les méfaits disproportionnés et distincts subis par la population et les communautés noires.

Le projet de SCDAS ne mentionne pas les populations noires au Canada même si cette dernière présente un taux de persécution liée aux drogues plus élevée que les autres populations, bien qu'elles ne consomment pas plus de drogues que ces autres populations. Le terme racisme anti-Noir a été reconnu au Canada pour capturer la nature systémique de l'exposition disproportionnée des facteurs déterminants sociaux négatifs de la santé et de leurs répercussions sur les populations noires au Canada. L'histoire coloniale de notre pays, la traite transatlantique des esclaves et la discrimination raciale dans les institutions, les services publics, les politiques et les lois expliquent pourquoi les populations noires au Canada sont moins susceptibles d'être présentes dans la salle de conférence ou d'avoir de bons résultats à l'école, et plus susceptibles de vivre dans la pauvreté; ils expliquent pourquoi leur taux de chômage est plus élevé, pourquoi leur rémunération est inférieure pour des compétences comparables, pourquoi elles sont plus susceptibles de vivre dans des logements précaires et pourquoi elles sont plus susceptibles d'être en contact avec le système de justice pénale. Alors que, d'une manière générale, la population noire présente un risque accru de subir des méfaits liés à la consommation de substances, différentes inégalités sociales peuvent se recouper et accroître les risques de méfaits précis pour certains groupes au sein des populations noires. Par exemple, la criminalisation de la consommation de drogues conduit au fait que les femmes noires font l'objet d'une surveillance policière disproportionnée quant à la protection de la jeunesse. Il s'agit également de la population carcéraleNote de bas de page 9 qui augmente le plus rapidement, et la population 2SLGBTQQI fait face à des taux élevés de traumatisme, de stigmatisation et de surveillance policière.

Consommation de substances et personnes qui consomment des substances

Recommandation : prendre en compte et décrire l'ensemble du spectre de l'utilisation de substances en vue de fournir une compréhension plus complète et nuancée de la situation.

Dans le projet de SCDAS, la formulation décrivant l'utilisation de substances comme étant problématique semble parfois se concentrer sur une utilisation chronique ou habituelle, ce qui n'illustre pas de façon précise l'utilisation problématique de substances. Le document présente une version simplifiée des diverses situations d'utilisation de substances en faisant uniquement la distinction entre l'utilisation à faible risque et l'utilisation à risque élevé.

Selon les recommandations du Groupe d'experts, la SCDAS doit inclure une compréhension plus nuancée de l'ensemble du spectre de l'utilisation de substances, et se baser sur cette dernière, tel que le décrit le tableau adapté du document A Public Health Approach to Drug Control in CanadaNote de bas de page 10. Il doit également tenir compte de la réalité selon laquelle les personnes peuvent passer d'un type de consommation à un autre, qu'elles ne le font pas de manière séquentielle et que le seuil permettant de déterminer si un type d'utilisation présente un faible risque ou un risque élevé peut varier selon les substances.

Figure 1: Spectre de consommation de substances
Figure 1
Figure 1 - Équivalent textuel

Le graphique présente un spectre de consommation de substances, de l'absence de consommation aux troubles liés à la consommation de substances. Commençant sans aucune substance consommée, le tableau passe à « consommation bénéfique », une consommation qui a des effets positifs social, spirituel ou pour la santé. La consommation bénéfique est suivie de « consommation occasionnelle à faible risque », définie comme consommation éclairée, fondée sur des décisions qui comprend et atténue les risques impliqués. Vient ensuite la « consommation à risque élevé », c'est-à-dire une consommation qui peut avoir des effets négatifs sociaux et pour la santé, mais qui ne correspond pas à la définition d'un trouble lié à la consommation de substances. Enfin, le « trouble lié à la consommation de substances » est expliqué comme une condition médicale gérable pouvant comprendre une dépendance psychologique et physique ainsi que des conséquences négatives sociales et pour la santé.

Recommandation : reconnaître les nombreux profils de personnes qui consomment des substances et éviter les formulations qui renforcent la stigmatisation.

Les « personnes qui consomment des substances » représentent une grande catégorie englobant diverses situations et expériences. La clé du succès réside dans l'inclusion de toutes les personnes qui consomment des substances dans la portée de la stratégie - en d'autres termes, une bonne partie de la population canadienneNote de bas de page 11.

Parmi les personnes qui consomment des substances, on observe un sous-ensemble relativement petit présentant des troubles liés à la consommation de substances et des besoins liés à la gravité élevée, un nombre plus important de personnes à risque et qui cherchent à obtenir des soins formels, une population plus vaste à risque, mais qui ne cherchent pas de soins formels et, enfin, une population en santé qui ne présente aucun facteur de risque et n'a pas besoin de soins. Une stratégie exhaustive doit reconnaître l'ensemble de ces sous-populations afin de répondre adéquatement à leurs différents besoins et situations.

En outre, il est important de noter que la stigmatisation est alimentée par la langueNote de bas de page 12, et par l'idée que la consommation de drogues d'une personne en tant que telle cause des torts à d'autres personnes. Lorsque l'on aborde les méfaits liés à la consommation de substances, la stratégie doit employer une formulation explicite axée sur les méfaits eux-mêmes et qui ne stigmatise pas les personnes qui consomment des substances. De même, lorsque l'on décrit une consommation problématique de substances, il est important de rester axés sur les problèmes liés à la consommation et non sur les personnes qui en consomment, ou sur la manière dont elles les consomment.

Financement insuffisant et manque de services

Recommandation : reconnaître et décrire le manque de ressources et de services pour les personnes qui consomment des substances ou qui souffrent de troubles liés à la consommation de substances.

Les services offerts aux personnes qui consomment des substances sont généralement catégorisés dans les « services en santé mentale et en dépendance » et ces services sont régulièrement sous-financésNote de bas de page 13Note de bas de page 14. Le système ayant de la difficulté à répondre aux besoins les plus aigus, l'accès aux services pour les personnes souffrant de troubles liés à la consommation de substances n'est pas approprié, et les services pour les personnes à risque, mais qui n'ont pas reçu de diagnostic de troubles sont quasiment inexistants. Les personnes souhaitant parler à un expert de leur consommation de substances n'ont personne vers qui se tourner. Par ailleurs, on constate un manque de renseignements et de directives accessibles sur la consommation de substances.

Prochaines étapes

Le projet de SCDAS examiné par le Groupe d'experts comprenait des buts, des principes, des objectifs, des piliers et des domaines de priorité. Alors que le document comporte beaucoup d'idées et stratégies utiles, le Groupe d'experts considère qu'un changement important sera nécessaire, car l'ébauche présume que le statu quo, qui interdit certaines substances en les rendant illégales en vertu de la SCDAS, se poursuivra.

Étant donné l'échelle, la portée et l'urgence du problème, le Groupe d'experts souhaite mettre en évidence deux priorités essentielles, une réglementation légale ainsi qu'une intervention d'urgence concernant un approvisionnement plus sécuritaire, en plus d'un certain nombre d'autres objectifs, priorités et principes qui doivent être inclus dans une stratégie fédérale exhaustive pour une approche de santé publique concernant les substances psychoactives au Canada.

Réglementation légale

Recommandation : inclure en tant que priorité fondamentale de la SCDAS l'élaboration et la mise en œuvre immédiates d'un cadre unique de santé publique composé de règlements précis couvrant l'ensemble des substances, y compris les drogues actuellement illicites ainsi que l'alcool, le tabac et le cannabis. Ce cadre doit minimiser l'envergure du marché illégal, apporter de la stabilité et de la prévisibilité aux marchés réglementés des substances, et fournir un accès à des substances plus sécuritaires pour les personnes qui risquent de se blesser ou de mourir après avoir consommé des substances illicites toxiques.

Étant donné les renseignements indiquant une toxicité croissante sur le marché des drogues illicites, en particulier depuis 2015, et les dizaines de milliers de Canadiens de tous les horizons qui ont perdu la vie en conséquenceNote de bas de page 15, ce travail est urgent. Le travail doit être entrepris en étroite collaboration avec les personnes ayant vécu ou vivant une expérience et les organisations qui les représentent, les organisations de la société civile et d'autres intervenants clés.

Une réglementation efficace doit trouver le bon équilibre entre les extrêmes d'interdiction et de déréglementation complète, associés à l'augmentation des méfaits sociaux et pour la santéNote de bas de page 16.

Ce cadre de réglementation doitNote de bas de page 17Note de bas de page 18Note de bas de page 19:

En élaborant et en mettant en œuvre ce nouveau cadre, le gouvernement du Canada doit tenir compte de la manière de rediriger et de réaffecter les ressources actuellement consacrées aux poursuites pénales liées à la possession de drogues. Il doit également utiliser son influence avec d'autres pays afin d'accroître la pression pour l'évolution des ententes internationales en vue de faciliter la réglementation.

Approvisionnement plus sécuritaire

Recommandation : inclure en tant que priorité urgente de la SCDAS l'élaboration, la mise en œuvre et l'évaluation d'une stratégie exhaustive d'intervention en cas d'urgence afin d'accroître l'accès à des solutions de rechange plus sécuritaires au marché des drogues illicites toxiques, en partenariat avec les personnes ayant vécu ou vivant une expérience et les organismes qui les représentent.

Un comité d'experts doit se réunir dans les trois mois qui suivent la rédaction du présent rapport pour diriger la conception d'un programme national d'approvisionnement plus sécuritaire, avec l'objectif d'accroître l'accès à un approvisionnement plus sécuritaire pour un (1) million de Canadiens risquant de mourir en raison de la toxicité des substances. Ce comité d'experts doit :

Financement

Recommandation : Fournir un financement suffisant et continu pour la stratégie.

Le financement doit équivaloir à la portée des problèmes, doit être distribué à divers secteurs proportionnellement à l'impact démontré, et doit être récurrent de manière à maintenir le soutien en place même lorsque les gouvernements changent. Les politiques actuelles coûtent actuellement très cher au Canada. En 2017, le coût estimé des soins de santé au Canada en lien avec la consommation d'opioïdes, d'autres dépresseurs et cocaïne ainsi que d'autres stimulants, était d'un milliard de dollarsNote de bas de page 24; par ailleurs, le coût de la surveillance policière et des procédures judiciaires liées à la possession de drogues dépassait six milliards de dollarsNote de bas de page 25. Bien qu'un investissement initial important soit requis pour revoir le système et régler la crise d'intoxication par les drogues, on peut s'attendre à ce que les coûts diminuent avec le temps en raison de l'impact des nouvelles politiques plus efficaces.

Réduction de la stigmatisation

Recommandation : inclure un objectif lié à la réduction de la stigmatisation.

Dans son premier rapport, le Groupe d'experts a défini la stigmatisation comme un problème fondamental qui multiplie les méfaits et accroît le risque de conséquences négatives. La réduction de la stigmatisation prend du temps et un effort soutenu, car elle nécessite de changer les croyances sous-jacentes qui ont été instaurées et renforcées au fil des ans. La mise en œuvre de lois qui interdisent la discrimination contre les personnes qui consomment des substances peut accélérer le processus en fournissant des incitatifs pour changer les comportements. Il est également important de modifier le message public et la formulation utilisée; par ailleurs, l'éducation du public peut, d'une manière générale, jouer un rôle. Des efforts visant à réduire la stigmatisation doivent s'appuyer sur les travaux déjà effectués dans ce domaine pour d'autres problèmes de santé, notamment le VIH/sida, et sur d'autres travaux liés à l'anti-oppression, tels que ceux d'Anne BishopNote de bas de page 26.

Recommandation : définir le rôle de l'application de la loi en tant que moyen de soutenir clairement les objectifs du cadre de santé publique et de la réglementation légale en se concentrant sur les organisations criminelles et l'approvisionnement en drogues illicites toxiques.

L'application de la loi peut constituer un outil efficace à l'appui de règlements et de politiques équitables fondés sur des données probantes; toutefois, elle a toujours été associée à la surveillance policière et aux poursuites pénales des infractions mineures, conduisant ainsi à des méfaits importants pour les personnes qui consomment des substances. Avec la mise en œuvre d'un cadre de réglementation légale pour toutes les substances, l'objectif de l'application de la loi passera naturellement à l'inspection des institutions légales pour s'assurer que les règlements sont appliqués, et pour réduire l'importation, la fabrication et le trafic de substances actuellement illicites et leurs précurseurs.

Équité

Recommandation : faire de l'équité un principe fondamental et faire de l'équité, de l'antiracisme et de l'anticolonialisme un domaine de priorité dans la nouvelle SCDAS.

Étant donné les méfaits disproportionnés subis par des populations précises, en particulier les peuples autochtones, noirs et racialisés, un travail urgent et important doit être fait pour améliorer l'équité en matière d'accès à un soutien et à des services de qualité.

Plusieurs approches pourraient aider à faciliter une meilleure équité :

Accroître l'équité permettra de maintenir la sécurité des communautés, en faisant en sorte que les membres de la communauté qui consomment des substances restent en santé et en sécurité, et en donnant aux communautés la possibilité de s'exprimer sur la définition de ce que la sécurité signifie pour eux.

Leadership national

Recommandation : inclure en tant qu'objectif la mise en œuvre de normes nationales pour fournir des soutiens aux personnes qui consomment des substances, notamment des services de réduction des méfaits, et décrire le rôle des provinces et des territoires dans notre système et la manière dont Santé Canada s'assurera que les soutiens répondent aux normes nationales à l'échelle du pays.

Les gouvernements provinciaux et territoriaux sont chargés de répondre aux besoins de leurs populations, et à ceux des peuples des Premières Nations, des Inuits et des Métis en particulier; toutefois, le système actuel ne fournit pas une responsabilisation suffisante. Un leadership et un soutien forts à l'échelle nationale sont nécessaires pour veiller à ce que toutes les parties respectent leurs obligations, et à ce que toutes les personnes vivant au Canada bénéficient d'un accès équitable aux soutiens, aux services et aux bienfaits pour la santé.

Des normes nationales doivent reconnaître les forces dans la culture et la langue des Premières Nations, des Inuits et des Métis qui protègent et facilitent le bien-être; elles doivent également inclure des pratiques fondées sur la culture et le territoire.

Les normes nécessiteront la mise en œuvre de mesures clés, ainsi que des rapports les concernant, à l'appui de la responsabilisation dans le système. La mise en œuvre de normes nationales doit également comprendre des plans et des ressources pour l'éducation et la formation des professionnels de la santé.

Ce rôle de leadership à l'échelle fédérale serait mieux exécuté en établissant une direction générale distincte et correctement financée, axée uniquement sur la santé liée à la consommation de substances (consulter le glossaire), séparée de la santé mentale, dont le mandat couvre l'ensemble des substances, y compris le tabac, l'alcool, le cannabis et les substances actuellement visées par la SCDAS. Cette organisation serait responsable de la mobilisation des connaissances et de la prise de mesures fondées sur des preuves, de la collecte et de la coordination des données nationales, de leur traduction et de leur diffusion, et de la formulation de recommandations en matière de politiques fondées sur ces données probantes.

Recommandation : inclure un objectif lié à l'évaluation, la reconnaissance, la réduction et la gestion des méfaits liés à la politique.

De nombreuses recherches portent sur les méfaits liés à la politique et le gouvernement fédéral doit adopter un rôle de leadership dans la reconnaissance et le traitement de ces derniers. Une formation potentielle pour un tel objectif pourrait être « les méfaits importants qui découlent des cadres politiques actuels sont évalués et reconnus, et les mesures visant à minimiser et à corriger ces méfaits ont été mises en œuvre en collaboration avec les personnes ayant vécu ou vivant une expérience et d'autres intervenants ».

Ce travail ne devrait pas uniquement remédier aux méfaits passés. Il est également important de mettre en place des mesures pour détecter et corriger rapidement toute conséquence néfaste involontaire des nouvelles politiques.

Approche intégrée

Recommandation : retirer la notion de « piliers » de la stratégie et la remplacer par une approche plus globale et intégrée qui représente mieux l'interconnexion des différents domaines d'action.

L'encadrement du projet de stratégie à l'aide de piliers - prévention, traitement et rétablissement, réduction des méfaits et application de la loi - avec une base de données à l'appui, indique des composantes distinctes pouvant fonctionner de manière indépendante; par ailleurs, les « piliers » sont davantage liés à une approche de justice pénale plutôt qu'à une approche relative à la santé de la santé. Le modèle de santé liée à la consommation de substances adopté par l'ACEPANote de bas de page 27 et le Cadre du continuum du mieux-être mental des Premières NationsNote de bas de page 28 sont des exemples de présentations circulaires communiquées au Groupe d'experts qui reflètent et renforcent la manière dont toutes les dimensions d'une stratégie doivent travailler ensemble pour réussir. D'autres approches abordées par le Groupe d'experts pourraient consister à présenter les principaux objectifs de la stratégie en tant que cercles qui s'entrecoupent à l'image d'un diagramme de Venn, ou à emprunter le cadre de prévention primaire, secondaire et tertiaire concernant l'approche liée à la santé de la populationNote de bas de page 29. Cette dernière approche permettrait de mettre davantage l'accent sur les facteurs déterminants sociaux de la santé et de mieux faciliter l'intégration de la prévention, de la réduction des méfaits, du traitement et du rétablissement dans un continuum de soutiens et de services.

Recommandation : encadrer le but général de la stratégie en tant qu'approche de promotion de la santé concernant la consommation de substances et la réduction des méfaits.

Il devient évident qu'adopter une approche centrée sur le problème n'est pas aussi efficace que d'orienter son attention et son énergie vers un objectif positif. Cette situation a déjà été observée dans d'autres domaines, notamment la santé physique et mentale, dans lesquels la promotion de la santé constitue un élément central de l'ensemble de la stratégie.

Pour éduquer le public, il sera nécessaire de minimiser les méfaits et d'atteindre des objectifs à long terme en ce qui concerne la santé liée à la consommation de substances. L'éducation du public doit inclure la communication de renseignements sur les substances et leurs risques, ainsi que sur les substances toxiques qui circulent sur le marché illégal.

Recommandation : articuler la réduction des méfaits en tant qu'approche de santé publique efficace, fondée sur des données probantes et exempte de jugement pour les personnes qui consomment des substances, intégrée dans un continuum complet de services de santé et sociaux incluant le logement.

La réduction des méfaits appuie à la fois une justice sociale pour les personnes criminalisées en raison de leur consommation de substances et une réponse en matière de santé publique fondée sur des données probantes en ce qui concerne la consommation de substances dans la communauté. La réduction des méfaits doit passer des exemptions à la politique existante à une intervention acceptée et centrale avec un continuum complet de soutiens et de soins.

Les données probantes indiquent que la réduction des méfaits n'accroît pas ou n'encourage pas la consommation de substances. Les stratégies et les services liés à la réduction des méfaits peuvent amoindrir les conséquences négatives associées à la consommation de substances, notamment les préoccupations sociales, physiques, émotionnelles ou spirituelles. Il a été démontré que les personnes sollicitant des services de réduction des méfaits sont plus susceptibles de suivre un traitement continu après avoir accédé à ces services. Certaines initiatives de réduction des méfaits ont également réussi à réduire les maladies transmissibles par le sang, notamment le VIH/sida et l'hépatite C, et à réduire les taux de mortalité liés aux surdoses de drogues.Note de bas de page 30

Puisque la réduction des méfaits nécessite que les interventions et les politiques conçues pour servir les personnes qui consomment des drogues reflètent les besoins précis des personnes et des communautés, il n'existe pas de formule universelle pour mettre en œuvre la réduction des effets. Pour réussir la mise en œuvre, nous devons investir dans des programmes de réduction créés et exécutés par la communauté et permettre aux communautés d'élaborer et de gérer des programmes qui leur correspondent, en sachant que les communautés ne sont pas monolithiques, qu'elles subissent de multiples axes d'oppression qui s'entrecoupent, et qu'elles nécessitent un leadership et des programmes qui intègrent et utilisent des approches intersectionnelles (2SLGBTQQI, communautés noires, communautés autochtones, travailleurs du sexe).

Recommandation : inclure un continuum exhaustif de soins et de services pour la réduction des méfaits, le traitement et le rétablissement.

Le trouble lié à la consommation de substance se manifeste de plusieurs façons et présente une probabilité de récidive. Par ailleurs, pour les personnes souhaitant obtenir un soutien, des programmes de traitement et de rétablissement seront nécessaires et varient des programmes à court terme proposant une consommation contrôlée, à des programmes axés sur l'abstinence et à un suivi et à des soutiens à long terme. Différentes options de traitement doivent être disponibles en fonction de la présence et de la gravité des troubles simultanés. Ce système de soins axé sur le traitement et le rétablissement doit être largement accessible, couvert pour tous et fournir des services de qualité alignés sur les données probantes. Il doit également s'appuyer sur la sagesse des peuples autochtones, qui ont créé des programmes fondés sur la culture et le territoire qui sont utiles pour gérer les causes profondes de la consommation de substances.

Recommandation : inclure des mesures liées au marché du travail dans le cadre d'une approche intégrée à l'appui de certaines populations.

Lorsque l'emploi rejoint la consommation de substances, la stigmatisation joue un grand rôle et empêche les personnes de demander de l'aide pour traiter les troubles liés à la consommation de substances. C'est particulièrement le cas pour les travailleurs de la santé, pour les personnes qui travaillent dans le système de justice pénale et pour les personnes dont les professions sont exigeantes physiquement, notamment les ouvriers du bâtiment). Le système actuel de soins de santé liés aux dépendances n'est ni bien compris ni bien intégré. On observe également des obstacles culturels et sur le marché du travail pour obtenir le soutien nécessaire, notamment un manque de congés de maladie rémunérés ou des protections telles que l'ancienneté.

Les soins actuels ne sont pas conformes au principe de santé du Canada en matière d'universalité et d'accès équitable. L'accès à des programmes de traitement et de rétablissement de qualité n'est pas équitable, les programmes de l'industrie privée sont coûteux, l'accent est fortement mis sur les programmes résidentiels et les listes d'attente pour bénéficier des programmes publics sont longues. Un spectre complet est nécessaire, avec des normes à l'échelle du spectre, ainsi que des mesures connexes qui facilitent l'accès aux soutiens appropriés.

Recommandation : aligner et intégrer la politique internationale du Canada sur sa politique nationale relative aux substances.

Le Canada pourrait jouer un rôle important dans la progression des efforts de réduction des méfaits en fonction des données probantes à l'échelle internationale, ainsi que dans le soutien à la mise en œuvre de pratiques plus équitables et plus efficaces dans le monde. La progression de ces questions sur la scène internationale faciliterait également la mise en place d'un soutien mutuel avec d'autres territoires de compétences

Annexe A : Biographies des membres du Groupe d'experts

Carol Hopkins (coprésidente), directrice générale de la Thunderbird Partnership Foundation (une division de la Fondation autochtone nationale de partenariat pour la lutte contre les dépendances).

Dr Kwame McKenzie (coprésident), chef de la direction de l'Institut Wellesley, directeur de l'équité en santé au Centre de toxicomanie et de santé mentale, professeur de psychiatrie à l'Université de Toronto et consultant auprès de l'Organisation mondiale de la Santé.

Mike Serr (coprésident), chef de police, Service de police d'Abbotsford; président du Comité consultatif sur les drogues, Association canadienne des chefs de police (ACCP) et président du Comité spécial sur la décriminalisation des drogues illicites de l'ACCP.

Serge Brochu, Ph.D., professeur, École de criminologie de l'Université de Montréal.

Deirdre Freiheit, présidente et directrice générale des Bergers de l'espoir et de la Fondation des Bergers de l'espoir.

Gord Garner, directeur exécutif, Association communautaire d'entraide par les pairs contre les addictions.

Charles Gauthier, président et chef de la direction, Downtown Vancouver Business Improvement Association.

Cheyenne Johnson, directrice exécutive, British Columbia Centre on Substance Use (BCCSU).

Harold R. Johnson, Aîné, conseiller et ambassadeur, Northern Alcohol Strategy Saskatchewan, ancien procureur provincial.

Damon Johnston, président, Fondation manitobaine de lutte contre les dépendances, et président, Aboriginal Council of Winnipeg.

El Jones, poète, éducatrice, journaliste et activiste communautaire vivant en Nouvelle-Écosse africaine.

Mae Katt, infirmière praticienne en soins de santé primaires, Thunder Bay et Première Nation Temagami.

Robert Kucheran, président du conseil d'administration, Syndicats des métiers de la construction du Canada.

Frankie Lambert, agent des communications, AQPSUD (Association Québécoise pour la promotion de la santé des personnes utilisatrices de drogues/Québec Association for Drug User Health Promotion).

Anne Elizabeth Lapointe, directrice générale, Maison Jean Lapointe et Centre québécois de lutte aux dépendances.

Dr Shaohua Lu, psychiatre légiste spécialisé, professeur clinicien adjoint, Université de la Colombie-Britannique.

Donald MacPherson, directeur, Coalition canadienne des politiques sur les drogues.

Akwasi Owusu-Bempah, Ph.D., professeur adjoint, département de sociologie, Université de Toronto.

Hawkfeather Peterson, président de la BC/Yukon Association of Drug War Survivors (BCYADWS) et coordonnateur régional des pairs de la Northern Health Authority en Colombie-Britannique.

Dan Werb, Ph.D., directeur exécutif, Centre on Drug Policy Evaluation, MAP Centre for Urban Health Solutions, Li Ka Shing Knowledge Institute, hôpital St. Michael's, professeur adjoint, Institut des politiques, de la gestion et de l'évaluation de la santé de l'Université de Toronto, et professeur adjoint, Division des maladies infectieuses et de la santé publique mondiale de l'Université de Californie à San Diego.

Annexe B : Recommandations extraites du premier rapport

Dans son premier rapport, en date du 6 mai 2021, le Groupe d'experts sur la consommation de substances a formulé les recommandations suivantes sur les solutions de rechange aux sanctions pénales pour la simple possession de substances contrôlées et les questions connexes.

Décriminalisation et réglementation

1. Élimination de toutes les sanctions et mesures coercitives

Recommandation : recommande à l'unanimité que Santé Canada mette fin aux sanctions pénales pour possession simple et la plupart des membres recommandent que Santé Canada mettent fin à toutes les mesures coercitives liées à la possession simple et à la consommation.

À titre d'experts, nous estimons que les sanctions, de quelque nature qu'elles soient, pour possession simple ou consommation de substances sont préjudiciables aux Canadiens. La consommation de substances devrait être gérée comme une priorité sociale et de santé, en portant attention aux déterminants sociaux de la santé, et non par des sanctions pénales ou civiles.

Quant aux mesures coercitives, les données portant sur le traitement forcé, coercitif ou obligatoire, notamment les tribunaux de traitement de la dépendance, sont partagées et les taux de réussite sont habituellement faiblesNote de bas de page 31,Note de bas de page 32. De plus, la décriminalisation ou la réglementation peut être moins efficace et peut aggraver les inégalités structurelles si les peines et les conditions font en sorte que les personnes qui consomment des drogues risquent d'être considérées comme des criminels en cas de non-respect des sanctions civiles.

Cela n'empêche pas d'offrir un soutien ou un traitement volontaire en plus ou à la place de sanctions en vertu d'autres lois.

La mise en œuvre et les solutions pour les jeunes, les enfants en âge scolaire et leur famille doivent être étudiées et développées davantage afin de s'assurer que cette population dispose du soutien nécessaire.

2. Changement législatif

Recommandation : La plupart des membres du Groupe d'experts recommandent que le gouvernement du Canada entame immédiatement un processus de modification législative afin de rassembler la Loi réglementant certaines drogues et autres substances (LRCDAS), la Loi sur le tabac et les produits de vapotage (LTPV), la Loi sur le cannabis et toute autre loi fédérale pertinente dans un même cadre juridique en matière de santé publique composé de structures réglementaires spécialement adaptées aux différents types de substances.

La réglementation des drogues aura une incidence majeure sur la résolution de la crise des décès attribuables à la toxicité des drogues et sur la réduction de la portée du marché non réglementé des drogues. Elle s'attaquera aux principaux facteurs de blessures et de décès dus à la toxicité des substances et favorisera une approche de la consommation de substances axée sur la promotion de la santé. Il sera important de mettre en place des structures réglementaires spécialement adaptées aux différents types de substances afin de tenir compte des différents niveaux de toxicité des substances, ainsi que des résultats uniques de chaque type de substance sur le plan social et de la santé.

Regrouper toutes les substances sous une seule loi permettra également d'harmoniser la réglementation de toutes les substances susceptible de causer un préjudice, comme l'alcool, le tabac et le cannabis, et possiblement atténuer plus efficacement les préjudices grâce à une approche plus uniforme et cohérente.

3. Seuils

Recommandation : Le Groupe d'experts recommande que les seuils de possession simple soient fondés sur la présomption d'innocence et qu'ils soient fixés à un niveau suffisamment élevé pour représenter les habitudes d'achat et de consommation de toutes les personnes qui consomment des drogues.

Les personnes qui consomment des drogues ont des besoins et des habitudes de consommation différents. Certaines personnes atteintes d'un trouble lié à la consommation de substances consomment plus que d'autres en raison d'un niveau de tolérance élevé. D'autres personnes à faibles revenus fixes ont tendance à s'approvisionner une ou deux fois par mois, quand elles reçoivent leur paie, et se trouvent donc en possession de quantités plus importantes que la « moyenne ». Les personnes qui dépendent du marché des drogues illicites peuvent également acheter des quantités plus importantes pour réduire au minimum leur exposition à une violence éventuelle. La détermination de seuils de quantité est essentielle et les processus conduisant à une telle détermination doivent être codirigés par des personnes ayant vécu ou vivant une expérience concrète de la consommation de drogues.

4. Expurgation

Recommandation : Dans le cadre de la décriminalisation, le Groupe d'experts recommande que les casiers judiciaires provenant de délits antérieurs pour possession simple soient entièrement expurgés. Il devrait s'agir d'une suppression complète, automatique et gratuite.

Les casiers judiciaires exposent les consommateurs de drogues à une discrimination, rendant difficile d'obtenir un emploi rémunéré et favorisant une stigmatisation et une marginalisation accrues.

Recommandations connexes

Les mesures recommandées ci-dessus sont importantes, mais restent insuffisantes. D'autres mesures doivent être mises en place afin d'atténuer les préjudices subis par les personnes qui consomment des substances et d'éviter des conséquences inattendues à mesure que des modifications sont apportées aux politiques.

5. Services de soutien aux personnes qui consomment des drogues ou des substances ou qui sont en rétablissement

Recommandation : Le Groupe d'experts recommande que le Canada réalise d'importants investissements visant à fournir un éventail complet de services de soutien aux personnes qui consomment des drogues ou des substances ou qui sont en rétablissement.

Les services de soutien peuvent inclure des centres de consommation supervisée, un éventail d'options de traitement, des solutions de rechange de qualité pharmaceutique aux drogues illicites, des logements, des services de vérification des drogues et d'autres services de soutien social.

Il est urgent d'avoir accès à un approvisionnement sûr en produits de rechange de qualité pharmaceutique afin de réduire l'exposition des consommateurs à la toxicité des drogues illégales.

Il est également urgent d'offrir plus de services de consommation supervisée, notamment pour les drogues qui s'injectent, se reniflent ou se fument, ainsi que des services d'aide à l'injection pour les personnes qui ne sont pas en mesure d'effectuer l'injection elles-mêmes.

6. Données probantes et surveillance

Recommandation : Le Groupe d'experts recommande la mise en œuvre d'un système plus détaillé et mieux adapté afin de recueillir, d'utiliser et de diffuser plus rapidement et plus efficacement des données probantes sur la consommation de substances et ses effets, et sur les répercussions des politiques gouvernementales sur la santé et le bien-être des Canadiens.

Des systèmes doivent être mis en place afin de surveiller les répercussions des politiques et de permettre de réagir rapidement à l'évolution de la situation. Il est primordial de s'assurer que les politiques canadiennes relatives aux substances sont fondées sur les meilleures données probantes accessibles tout en étant également éclairantes, adaptatives et efficaces. À ce jour, la collecte de données semble porter principalement sur les préjudices causés par la consommation de substances plutôt que sur une approche de la consommation de substances axée sur la promotion de la santé.

Des études plus ciblées doivent être menées auprès des populations marginalisées, notamment les peuples autochtones, les communautés noires, les personnes racialisées et les communautés de nouveaux arrivants. Ce travail nécessitera le renforcement des capacités au sein de ces populations. D'autres initiatives doivent également être prises pour ventiler les données sur ces populations et pour publier régulièrement ces données ventilées à l'échelle nationale ainsi que dans l'ensemble des provinces et territoires.

Les données recueillies devraient être utilisées pour renforcer l'éducation publique, la promotion de la santé, la prévention, le traitement et la protection contre les substances contaminées.

7. Droits des peuples autochtones du Canada, des Premières Nations, des Métis et des Inuits

Recommandation : Le Groupe d'experts encourage vivement Santé Canada à respecter les droits souverains des peuples autochtones du Canada et à aider leurs gouvernements à fournir les méthodes de prévention et de traitement appropriés.

Quels que soient les changements mis en œuvre, ils ne doivent pas empiéter sur les droits des Autochtones, et les Premières Nations, les Inuits et les Métis devraient pouvoir être autonomes et appliquer leurs connaissances, leur culture et leurs traditions relativement à la consommation de substances.

En outre, la législation et la réglementation doivent reconnaître l'autorité et la souveraineté des Premières Nations, des Métis et des Inuits, et les soutenir dans la réparation des préjudices disproportionnés que les politiques actuelles infligent à leurs peuples.

8. Consultation approfondie

Recommandation : Le Groupe d'experts recommande que Santé Canada mette sur pied un nouveau comité composé de personnes ayant vécu ou vivant une expérience concrète de la consommation de substances afin de fournir des conseils sur la mise en œuvre de ses recommandations.

Les personnes ayant vécu ou vivant une expérience concrète de la consommation de substances possèdent une expertise unique dans ce domaine et seront directement touchées par toute décision stratégique portant sur la possession et la consommation de substances. Les prochaines consultations devraient s'assurer qu'elles sont solidement et équitablement représentées, notamment les personnes appartenant à des groupes particuliers comme les femmes autochtones, les communautés noires, les personnes racialisées, les personnes incarcérées, les immigrants et les personnes sans statut.

Les consultations devraient également être élargies pour comprendre un éventail plus vaste de témoignages et de perspectives, afin d'optimiser la réussite de la mise en œuvre d'éventuelles décisions.

Annexe C : Glossaire

Dépendance

Maladie médicale chronique traitable impliquant des interactions complexes entre les circuits cérébraux, la génétique, l'environnement et les expériences de vie d'un individu (voir les troubles liés à la consommation de substances).

Décriminalisation

Suppression des sanctions pénales pour une activité. Les approches de fait sont celles qui ne requièrent aucun changement aux lois ou règlements. Les approches de droit nécessitent de changer les lois ou les règlements.

Drogue

Pour les besoins du présent rapport, « drogue » fait référence aux substances psychoactives illicites ou non autorisées.

Toxicité des drogues

Caractère toxique d'une drogue pouvant causer des dommages fonctionnels, biochimiques ou structurels au corps humain. La toxicité peut être aiguë ou chronique et causer des blessures physiques, cognitives ou psychologiques temporaires ou permanentes, pouvant aller jusqu'au décès.

Équité

L'absence de différences évitables ou remédiables entre différents groupes de personnes, qu'ils soient définis selon des critères sociaux, économiques, démographiques ou géographiques. (OMS)

Méfaits

Conséquence négative sur une personne, une famille, une communauté ou la société au sens large, y compris des répercussions directes, indirectes et intergénérationnelles ou des répercussions physiques épigénétiques, sociales, économiques, financières et pour la santé mentale.

Réduction des méfaits

La réduction des méfaits est une approche de santé publique utilisant des stratégies et des approches pratiques afin de réduire les méfaits liés à la consommation de substances.

Les diverses stratégies de réduction des méfaits comprennent une consommation plus sécuritaire, une gestion de la consommation, l'abstinence, le traitement des conditions de consommation en plus de la consommation elle-même, et la rencontre de personnes qui consomment des substances « là où elles se trouvent », non seulement en termes de consommation de substances, mais aussi sur le plan géographique (p. ex., communautés rurales et éloignées), social, culturel et pendant leurs parcours.

Personnes ayant vécu ou vivant une expérience de la consommation de substances

Personnes qui consomment actuellement ou qui ont consommé des substances par le passé, ou leur famille ou membres de la communauté, qui sont touchés de manière collective et directe par la consommation de substances.

Personnes qui consomment des drogues

Personnes qui consomment des substances psychoactives illicites ou non autorisées.

Rétablissement

Un processus du changement par lequel les personnes améliorent leur santé et leur mieux-être, vivent une vie autonome et cherchent à atteindre leur plein potentiel. Quatre grandes dimensions soutiennent une vie en rétablissement :

(Substance Abuse and Mental Health Services Administration)

Règlement

Supervision de la production, de la fabrication, de l'importation, de la distribution, de la promotion des produits et de la vente par le gouvernement.

Approvisionnement plus sécuritaire

Approvisionnement légal et réglementé de drogues qui sont habituellement accessibles uniquement sur ordonnance médicale ou par l'intermédiaire du marché des drogues illicites.

Simple possession

Cela fait référence à la possession telle qu'elle est définie dans le paragraphe 4(3) du Code criminel du Canada et mentionnée dans la SCDAS :

  1. une personne est en possession d'une chose lorsqu'elle l'a en sa possession personnelle ou que, sciemment :
    1. ou bien elle l'a en la possession ou garde réelle d'une autre personne,
    2. ou bien elle l'a en un lieu qui lui appartient ou non ou qu'elle occupe ou non, pour son propre usage ou avantage ou celui d'une autre personne;
  2. lorsqu'une de deux ou plusieurs personnes, au su et avec le consentement de l'autre ou des autres, a une chose en sa garde ou possession, cette chose est censée en la garde et possession de toutes ces personnes et de chacune d'elles.

Déterminants sociaux de la santé

Il s'agit des facteurs sociaux et économiques qui influencent la santé des gens, notamment le statut social, les revenus, l'éducation, l'emploi et les conditions de travail, l'accès équitable et opportun aux services et soins de santé, la discrimination ou le racisme vécus, etc. La personne n'a généralement aucun contrôle sur ces facteurs. Dans le cas des populations autochtones, les facteurs déterminants de la santé comprennent également les processus liés à la colonisation, la culture, la langue et le territoire.

Stigmatisation

Attitude sociale, politique et culturelle négative envers un groupe ou une personne avec une manière d'être ou un comportant distinctif, fondée sur un ensemble profondément ancré de fausses croyances, et impliquant un jugement manifeste et implicite, un comportement d'oppression et de la discrimination. Les causes courantes de la stigmatisation sont les stéréotypes, la peur, les normes de colonisation, les dynamiques inégales de pouvoir, le manque de sensibilisation et la mésinformation. Les politiques et les lois renforcent et exacerbent souvent la stigmatisation (voir la section sur le racisme structurel).

Racisme structurel

Système de politiques publiques, pratiques institutionnelles, représentations culturelles et autres normes fonctionnant de différentes manières qui se renforcent souvent et qui favorisent les Blancs et perpétuent l'inégalité envers les personnes de couleur.

Substance

Sauf lorsqu'il est fait référence à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances et à ses dispositions, dans le présent rapport, une substance est définie plus largement comme une substance psychoactive, c'est-à-dire des « produits chimiques qui traversent la barrière hémato-encéphalique et affectent les fonctions mentales telles que les sensations de douleur et de plaisir, la perception, l'humeur, la motivation, la cognition et d'autres fonctions psychologiques et comportementales » (ACSP), et comprend les substances contrôlées en vertu de la SCDAS ainsi que d'autres substances non autorisées, l'alcool, le tabac et le cannabis.

Trouble lié à la consommation de substances

État de santé pouvant être diagnostiqué et traité, et défini comme étant léger, modéré et grave. Les troubles liés à la consommation de substances sont diagnostiqués en évaluant un profil complexe de symptômes incluant la perte de contrôle, une modification du comportement social, une consommation risquée et des indicateurs pharmacologiques.

Santé liée à l'utilisation de substances

Expression adoptée par des organisations de personnes ayant vécu ou vivant une expérience pour mettre l'accent sur les besoins en service et soutien liés à la santé non satisfaits offerts aux personnes qui consomment des substances, une situation qui doit être étudiée et traitée de la même manière que les besoins en santé mentale ou physique.

Traitement

Services permettant de déterminer et de traiter les troubles liés à la consommation de substances par la gestion du sevrage et des interventions pharmacologiques ou psychologiques.

Marché des drogues non réglementées

Vente et achat de substances qui échappent à la supervision du système légal et réglementaire canadien.

Note de bas de page

Note de bas de page 1

Catalyst, Passing down history: How our biology may play a role in the transmission of trauma.

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Note de bas de page 2

WorldAtlas, Highest Overdose & Drug Related Death Rates In The World, 2021

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Note de bas de page 3

Gouvernement du Canada, Méfaits associés aux opioïdes et aux stimulants au Canada, Mars 2021

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Note de bas de page 4

Gouvernement du Canada, Méfaits associés aux opioïdes et aux stimulants au Canada, Mars 2021

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Note de bas de page 5

Transform Drug Policy Foundation, The War on Drugs: Are we paying too high a price?

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Note de bas de page 6

Institut canadien de recherche sur l'usage de substances et Centre canadien sur les dépendances et l'usage de substances, Coûts et méfaits de l'usage de substances au Canada (2015-2017)

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Note de bas de page 7

Institut canadien de recherche sur l'usage de substance, Stratégies pour réduire les méfaits et les coûts liés à l'alcool au Canada : Une revue des politiques fédérales, 2019

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Note de bas de page 8

Groupe d'experts sur la consommation de substances de Santé Canada, rapport no 1, Recommandations sur les solutions de rechange aux sanctions pénales pour la simple possession de substances contrôlées, mai 2021

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Note de bas de page 9

Feminist Review, celling black bodies: black women in the global prison industrial complex, 2005

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Note de bas de page 10

Health Officers Council of British Columbia, A Public Health Approach to Drug Control in Canada, 2005

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Note de bas de page 11

Harm Reduction International, Regional Overview - North America, 2021

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Note de bas de page 12

Community Addictions Peer Support Association, There Is an Urgent Need to Reduce Substance Use Stigma, 2019

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Note de bas de page 13

Association canadienne pour la santé mentale, Mettre fin à la disparité en santé au Canada, 2018

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Note de bas de page 14

Thunderbird Partnership Foundation, NNADAP Funding Parity Report: Ontario Region Case Study - Executive Summary, Fondation autochtone nationale de partenariat pour la lutte contre les dépendances, Inc., 2018

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Note de bas de page 15

Gouvernement du Canada, Méfaits associés aux opioïdes et aux stimulants au Canada, Mars 2021

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Note de bas de page 16

Waterloo Region Crime Prevention Council's Working Group on Cannabis Legalization-Regulation, An Ounce of Prevention, 2018

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Note de bas de page 17

Commission globale de politique en matière de drogues, Régulation : Pour un contrôle responsable des drogues, 2018

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Note de bas de page 18

Association canadienne de santé publique, Nouvelle démarche de gestion des substances psychotropes illégales au Canada, 2014

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Note de bas de page 19

Health Officer's Council of British Columbia, Public Health Perspectives for Regulating Psychoactive Substances: What we can do about Alcohol, Tobacco and Other Drugs, 2011

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Note de bas de page 20

International Journal of Drug Policy, Consumer protection in drug policy: The human rights case for safe supply as an element of harm reduction, 2021

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Note de bas de page 21

Journal of Studies on Alcohol and Drugs, Addressing the Syndemic of HIV, Hepatitis C, Overdose, and COVID-19 Among People Who Use Drugs: The Potential Roles for Decriminalization and Safe Supply, 2020

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Note de bas de page 22

Public Health in Practice, « Safer opioid distribution » as an essential public health intervention for the opioid mortality crisis - considerations, options and models towards broad-based implementation, 2020

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Note de bas de page 23

Journal de l'Association médicale canadienne, A safer drug supply: a pragmatic and ethical response to the overdose crisis, 2020

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Note de bas de page 24

Institut canadien de recherche sur l'usage de substances et Centre canadien sur les dépendances et l'usage de substances, Coûts et méfaits de l'usage de substances au Canada (2015-2017), 2020

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Note de bas de page 25

Réseau juridique VIH/sida du Canada, Decriminalizing drug possession for personal use in Canada: Recent developments, 2020

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Note de bas de page 26

Anne Bishop, Becoming an Ally - Breaking the Cycle of Oppression in People, 2015

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Note de bas de page 27

Association communautaire d'entraide par les pairs contre les addictions (ACEPA), présentation au Groupe d'experts, mai 2021

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Note de bas de page 28

Gouvernement du Canada et l'Assemblée des Premières Nations, Cadre du continuum du mieux-être mental des Premières Nations, 2015

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Note de bas de page 29

Gouvernement du Canada, Mise en œuvre de l'approche axée sur la santé de la population, 2013

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Note de bas de page 30

Ministère de la Santé de la Colombie-Britannique, Harm Reduction - A British Columbia Community Guide, 2005

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Note de bas de page 31

Justice Research and Policy Journal, Drug Treatment Courts: A Quantitative Review of Study and Treatment Quality, 2012

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Note de bas de page 32

Ministère de la Justice du Canada, Programme de financement des tribunaux de traitement de la toxicomanie évaluation, 2017

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