Saisir l’occasion face à la crise : un programme de compétitivité pour l’avenir du Canada

Discours

Allocution de Matthew Boswell, commissaire de la concurrence
Canadian Club Toronto
Le 25 novembre 2020
(Le discours prononcé fait foi)

 

Bonjour à tous, et merci au Canadian Club de m’avoir invité à m’adresser à vous aujourd’hui.

J’aimerais profiter de cette occasion pour discuter du rôle de la concurrence au Canada et des raisons pour lesquelles elle est plus importante que jamais alors que nous nous efforçons de nous remettre des conséquences économiques de la pandémie en cours et que nous visons à construire une économie plus forte et plus résiliente.

La concurrence est le moteur de la croissance économique

Permettez-moi de commencer par expliquer brièvement pourquoi la concurrence est si importante dans notre économie. C’est la force qui nous pousse à faire mieux. Elle récompense l’innovation et pénalise la complaisance, et elle pousse les entreprises à développer des produits nouveaux, meilleurs et plus abordables. Il n’y a pas de motivation plus forte que la concurrence, et souvent nous sommes stimulés à réaliser notre plein potentiel lorsque d’autres nous poussent à l’atteindre. 

Toutes les études ont montré le pouvoir de la concurrence pour stimuler la productivité et les performances sur le marché. La concurrence alimente l’investissement dans les nouvelles technologies, permettant aux entreprises de supplanter les entreprises traditionnelles bien établies ou même de créer des marchés entièrement nouveaux. La concurrence stimule non seulement les entreprises, mais aussi l’économie dans son ensemble. À mesure que les entreprises apprennent à être compétitives chez elles, elles sont mieux préparées à faire face aux défis mondiaux qui les attendent à l’extérieur de nos frontières. Le Canada est, et sera toujours, un acteur clé de l’économie mondiale, et nous devons nous concentrer sur ce qui stimule notre compétitivité à l’étranger.

Au bout du compte, tous les Canadiens sont gagnants lorsque la concurrence rend notre économie plus productive et plus résiliente. Lorsque la concurrence est saine, les particuliers comme les entreprises bénéficient de prix plus bas, d’un plus grand choix, et de produits et services de meilleure qualité.

Concurrence et reprise

Nous savons que la concurrence alimente l’innovation et la croissance. C’est pourquoi, au milieu de la pandémie mondiale actuelle, nous devons nous demander : comment la concurrence s’inscrit-elle dans la reprise économique du Canada?

Je commencerais par souligner l’importance de maintenir le cap sur l’engagement du Canada à l’égard de ses lois sur la concurrence. En temps de crise économique, il est tentant pour certains de faire pression pour que les principes établis de longue date pour une saine concurrence soient assouplis et de prétendre que cela atténuera les facteurs de stress sur les marchés canadiens et aidera à la reprise économique. Or, l’histoire nous a montré que c’est tout le contraire qui se produirait.

En se mettant à l’abri de la force motrice de la concurrence, les entreprises bien établies peuvent augmenter leurs prix, réduire la qualité et devenir complaisantes. Conséquemment, ce comportement, et les politiques qui le permettent, peuvent aggraver une crise économique existante et retarder la reprise. Pour s’en prémunir, selon les mots de James Ilsley, député pendant la Grande Dépression, « la concurrence est la meilleure protection dont dispose le public ».

Malheureusement, les crises peuvent aussi être des occasions privilégiées pour les entreprises de consolider leur pouvoir de marché et de s’engager dans des activités anticoncurrentielles, que ce soit par l’acquisition de concurrents affaiblis ou par un comportement de cartel pour contrôler le prix et l’offre de biens et de services.

Pour protéger la concurrence, à la fois pendant et après la crise actuelle, nous devons porter notre attention sur le cœur de l’économie canadienne : les petites et moyennes entreprises. Les entreprises de moins de 100 employés représentent plus de 40 % de l’emploi dans le secteur privé canadien, et plus de 99 % des entreprises au Canada comptent moins de 250 employés.

Ces entreprises sont le moteur de la concurrence dans une grande partie de l’économie canadienne. Par leur entrée et leur expansion, elles défient les entreprises établies et perturbent des industries entières. Elles sont le véritable fondement de l’économie canadienne.

Malheureusement, ce sont ces petites et moyennes entreprises qui ont été le plus durement touchées par la crise actuelle. Une analyse de la Banque Royale du Canada montre que, cette année, les petites entreprises ont enregistré près de deux fois plus de pertes d’emplois que leurs homologues plus importantes, les femmes et les jeunes en souffrant de manière disproportionnée. Si les petites et moyennes entreprises du Canada sont mises à mal, nous perdons une activité économique vitale aujourd’hui et une économie plus dynamique demain.

C’est une triste réalité, mais nous verrons davantage d’entreprises quitter le marché au cours des prochains mois, ce qui augmentera la concentration de l’industrie. Le droit canadien de la concurrence contribuera à protéger les investissements réalisés par les gouvernements pour soutenir notre économie en préservant l’intensité concurrentielle des marchés dans tout le pays.

Alors que les gouvernements fournissent une aide financière pour aider les entreprises vulnérables à surmonter la crise et à rester compétitives, les lois canadiennes sur la concurrence garantissent que les entreprises ne peuvent pas utiliser cette crise pour se mettre à l’abri de la concurrence. Le Bureau restera vigilant face à de telles tentatives. Ensemble, les mesures de relance et l’engagement en faveur de la concurrence peuvent constituer une combinaison puissante pour permettre au Canada de traverser cette période d’instabilité.

L’occasion à saisir pour l’économie du Canada

Au milieu d’une telle volatilité, il est compréhensible que les Canadiens se concentrent principalement sur l’immédiat, en essayant de joindre les deux bouts et de faire en sorte que leurs familles soient en bonne santé et en sécurité dans les mois à venir. Mais nous ne devons pas non plus perdre de vue ce que le Canada peut être après la COVID-19. Les décisions que nous prenons aujourd’hui nous mettront en bonne position pour une économie plus forte et un avenir plus prospère. Je pense que la clé de cet avenir réside dans l’adoption de mesures dans trois domaines essentiels.

Premièrement, il est primordial de préserver la concurrence à l’ère des géants mondiaux du numérique. Les effets de réseau et les économies d’échelle ont créé un environnement dans lequel les marchés numériques peuvent basculer vers des niveaux de concentration élevés et donner aux entreprises un pouvoir économique sans précédent. En l’absence d’un contrôle et d’une application de la loi fondée sur des principes de la part des autorités de la concurrence pour lutter contre les abus de pouvoir sur le marché, il est possible que ces entreprises assument un rôle de contrôleur anticoncurrentiel, décidant qui peut faire concurrence et forçant potentiellement les entreprises nouvelles et innovantes à quitter le marché. Il incombe au Bureau de la concurrence de faire respecter le droit canadien de la concurrence et de veiller à ce que ces acteurs se livrent une concurrence loyale, en fonction des mérites de leurs offres. Nous devons préserver une voie d’avenir pour les nouveaux entrants afin qu’ils puissent se développer et défier même les entreprises que nous avons peut-être qualifiées de « perturbatrices » à leurs débuts. Ma première priorité en tant que commissaire de la concurrence est de veiller à ce que le Bureau dispose des outils et des ressources dont il a besoin pour préserver la concurrence à l’ère du numérique.

Deuxièmement, une infrastructure de télécommunications solide, soutenue par une concurrence vigoureuse, est fondamentale pour la réussite future du Canada dans un monde numérique. L’investissement dans l’infrastructure Internet est essentiel au Canada, et la pandémie n’a fait qu’accroître l’urgence de la situation. Les entreprises de toutes tailles ont dû rapidement modifier leurs modèles d’affaires pour proposer des offres en ligne, et pour ce faire, elles ont besoin d’un accès fiable et abordable aux réseaux canadiens. Comme nous le savons, le gouvernement fédéral a récemment annoncé la création du Fonds pour la large bande universelle dans le cadre de ses efforts dans ce domaine. La concurrence dans ce secteur est essentielle et le Bureau continuera à être vigilant contre les comportements anticoncurrentiels et à plaider pour une concurrence accrue sur les marchés des télécommunications du Canada.

Enfin, la création d’environnements réglementaires qui, à tous les niveaux de gouvernement, donnent la priorité à la concurrence dans les affaires économiques du Canada contribuera à améliorer notre productivité et notre bien-être économique général, sans compromettre les objectifs réglementaires légitimes. Nous avons actuellement une formidable occasion de repenser les règles de l’économie canadienne en mettant l’accent sur la suppression des obstacles inutiles à la concurrence qui peuvent décourager les nouveaux entrants et gêner leur capacité à se développer.

Un facteur important, au moment de nous remettre de cette crise, sera la capacité des entreprises à entrer ou à revenir sur les marchés après la pandémie, ce que l’environnement réglementaire peut soit encourager, soit frustrer. Les recherches menées par l’OCDE [en anglais seulement] placent le Canada à l’avant-dernier rang de nos pairs de l’OCDE en matière de réglementation des marchés, une mesure du degré de proconcurrence des réglementations d’un pays. L’élimination des obstacles réglementaires à la concurrence, à tous les niveaux de gouvernement, est une formidable occasion à saisir pour le Canada.

Par exemple, une étude réalisée en 2018 [en anglais seulement] estimait que le Canada pourrait accroître sa productivité de 5 % s’il procédait à une réforme réglementaire mettant davantage l’accent sur la concurrence dans l’économie canadienne. Tout comme une entreprise confrontée à une concurrence croissante, je pense que nous n’avons pas encore exploré tout notre potentiel concurrentiel en tant que pays, mais nous travaillons dur pour changer cela. Nous avons récemment publié une boîte à outils pour nous aider à renforcer notre économie grâce à l’adoption de politiques plus favorables à la concurrence. Cette publication est disponible sur notre site Web et j’encourage tout le monde à y jeter un coup d’œil. Nous devons tous réfléchir ensemble à ces questions importantes et je vous demande d’envisager comment les principes de la concurrence peuvent être intégrés dans les domaines auxquels touche votre travail. Et, bien sûr, notre équipe au Bureau est prête à aider les responsables de la réglementation et les décideurs politiques qui voudraient évaluer l’impact sur la concurrence de réglementations existantes ou proposées.

Conclusion

Alors que nous nous dirigeons vers un hiver difficile, je voudrais terminer sur une note positive. Bien qu’incroyablement difficile à bien des égards, l’année écoulée nous a montré ce dont les Canadiens sont capables en temps de crise. Nous avons fait face à cette crise non pas individuellement, mais ensemble, et il existe une force et une détermination énormes dans notre grande nation pour surmonter cette tempête et en sortir plus forts de l’autre côté. La réussite économique de notre nation est, au bout du compte, une responsabilité partagée.

Le Canada a le potentiel de récolter les bénéfices réels d’une culture de la concurrence forte, mais cela exige que nous nous engagions tous. Le rôle du Bureau est de veiller à ce que ceux qui détiennent le pouvoir économique au Canada n’abusent pas de ce pouvoir, et à ce que les entreprises de toutes tailles puissent se livrer une concurrence libre et loyale. Nous continuerons également à promouvoir et à prôner des environnements réglementaires qui donnent la priorité à la concurrence. Tous les ordres de gouvernement doivent trouver le délicat équilibre entre la réglementation et la concurrence. Les entreprises de toutes tailles doivent se livrer une concurrence vigoureuse sur la base de leurs mérites afin de progresser, d’innover, de croître et d’éviter de stagner au détriment de tous. Les consommateurs doivent continuer à voter avec leur portefeuille et à exprimer leur désir d’une concurrence accrue dans tout le pays.

En temps de crise, et dans la reprise économique que nous anticipons, nous savons qu’il est plus important que jamais de s’acquitter de notre responsabilité commune.

Je vous remercie encore une fois de m’avoir invité à m’adresser à vous aujourd’hui, et j’attends avec impatience notre discussion.

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