Rapport rétrospectif relatif à la 45e élection générale

Avant-propos du greffier du Conseil privé

J’ai eu le privilège de servir les Canadiens dans de nombreuses fonctions, y compris en tant que greffier du Conseil privé depuis 2023. À ce titre, je prends très au sérieux mon rôle de direction du groupe d’experts qui est responsable de la mise en œuvre du Protocole public en cas d’incident électoral majeur (PPIEM). Comme le prévoit ce protocole, les membres du groupe d’experts et moi sommes responsables de la coordination des efforts du gouvernement visant à protéger l’intégrité des élections fédérales du Canada contre des éléments perturbateurs, y compris les menaces d’ingérence étrangère et d’extrémisme violent.

Cette responsabilité est particulièrement importante compte tenu de la grande attention accordée à l’ingérence étrangère dans les élections au Canada et du fait qu’il est nécessaire de veiller à ce que toutes les mesures requises soient en place afin d’intervenir de manière appropriée.

Depuis la 44e élection générale, des conclusions et des recommandations pertinentes ont été émises par des comités parlementaires, le Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, Morris Rosenberg, dans son évaluation du PPIEM après l’élection de 2021, ainsi que David Johnston, rapporteur spécial indépendant, et la commissaire Marie‑Josée Hogue par l’entremise de leurs rapports.

J’espère que, lorsqu’ils liront les délibérations et les décisions décrites dans le présent rapport, les Canadiens se sentiront rassurés du fait que l’approche adoptée par le gouvernement pour protéger la 45e élection générale était à la hauteur du travail approfondi effectué par ces personnes et ces comités et qu’elle en a tenu compte. Par exemple, les communications sans précédent que le gouvernement a entreprises auprès des Canadiens pour les sensibiliser à l’égard des menaces possibles; ces efforts s’appuyaient directement sur les recommandations formulées par la commissaire Hogue et d’autres.

Je suis très reconnaissant envers toutes les personnes nommées ci-dessus, ainsi qu’envers les autres personnes qui ont offert des conseils sur les façons dont le gouvernement peut continuer à améliorer l’administration du PPIEM. Je remercie également mes collègues au sein du groupe d’experts pour la 45e élection générale : Natalie Drouin, sous-greffière du Conseil privé et conseillère à la sécurité nationale et au renseignement auprès du premier ministre, Shalene Curtis‑Micallef, sous-ministre de la Justice et sous-procureure générale du Canada, Tricia Geddes, sous-ministre de la Sécurité publique du Canada, et David Morrison, sous-ministre des Affaires étrangères. Chaque membre a entrepris la tâche avec le plus grand sérieux, puis a soigneusement délibéré pour prendre chaque décision et évaluer l’information dont nous disposions.

Collectivement, le travail effectué par notre groupe d’experts a été guidé par un seul principe inébranlable : les Canadiens doivent être convaincus que leur élection est sécurisée, que leurs voix sont entendues et que leur gouvernement continue de s’intéresser à cette question. Je suis fier du dévouement et du travail acharné qui ont été déployés pour cette mission dans le cadre de l’élection de 2025, autant par notre groupe d’experts que par tous ceux qui nous ont appuyés. Je suis aussi heureux de constater qu’aucun des incidents examinés par le groupe d’experts n’a menacé la capacité du Canada à tenir des élections libres et équitables.

Après la 45e élection générale, je crois qu’à cet égard, le Canada continue de servir de modèle pour le reste du monde – un pays où la démocratie n’est pas qu’un système, mais aussi un engagement commun. Un endroit où les citoyens prennent le temps nécessaire pour parvenir à une décision éclairée, examiner de près, participer et, en fin de compte, façonner l’avenir de ce pays.

C’est la véritable force de la démocratie canadienne et nous devons toujours la protéger. La force de notre démocratie réside dans les mesures de protection que nous mettons en place ainsi que dans la confiance et la participation des gens que nous servons.

 

John Hannaford
Ancien Greffier du Conseil privé et secrétaire du Cabinet

1. Introduction

Conformément aux lignes directrices à l’intention des membres du groupe d’experts sur la mise en œuvre de la Directive du Cabinet sur le Protocole public en cas d’incident électoral majeur (PPIEM)Note de bas de page 1 , le rapport suivant décrit les délibérations et la prise de décisions du gouvernement du Canada pendant la période de transitionNote de bas de page 2  de la 45e élection générale (45e EG) en ce qui concerne des incidents qui auraient pu menacer la capacité du Canada à tenir des élections libres et équitables.

Le présent rapport devrait être lu avec le rapport du Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignements visant les élections (le Groupe de travail). Pour la première fois, le Groupe de travail a publié une version publique de son rapport après-action sur les menaces visant une élection générale. Ce rapport décrit ce que le Groupe de travail s’attendait à voir, ses observations d’activités qui représentaient une menace pour  la 45e EG et les mesures qu’il a prisesNote de bas de page 3 .

Ensemble, ces rapports visent deux objectifs. Premièrement, dans la mesure du possible et en fonction des renseignements dont nous disposons, ils ont pour but de mettre la lumière sur les incidents d’ingérence étrangère, les cybermenaces et l’extrémisme violent qui ont été observés pendant la période de transition, afin de sensibiliser les Canadiens à ces enjeux et d’améliorer la résilience des citoyens à l’avenir. Deuxièmement, ils cherchent à expliquer les façons dont le gouvernement s’est préparé pour la 45e EG, est intervenu et continue d’assurer une bonne préparation à l’avenir. Le gouvernement et le groupe d’experts ont tous deux déployé des efforts de planification considérables en prévision d’une recrudescence d’activités d’ingérence étrangère pendant les élections générales de 2025.

Les activités d’ingérence étrangère au Canada continuent d’être omniprésentes, complexes et persistantes. Comme le gouvernement l’a toujours indiqué, il existe un seuil minimum d’activités d’ingérence étrangère au Canada, y compris pendant une élection générale. Bien que le groupe d’experts ait été périodiquement informé d’incidents survenus pendant la 45e élection générale, ces activités correspondaient dans l’ensemble à l’évaluation préélectorale du risque d’ingérence étrangère et d’actes d’extrémisme violent. Le groupe d’experts a estimé qu’aucun des incidents décelés n’a eu d’incidence notable sur l’élection. Les conclusions ci-dessous ainsi que le reste du rapport concordent avec les conclusions de l’Enquête publique sur l’ingérence étrangère selon lesquelles, même si les institutions démocratiques canadiennes sont restées solides face à l’ingérence étrangère, il est nécessaire de rester vigilant et de s’améliorer continuellement afin de contrer efficacement les menaces en constante évolution.

Les leçons à retenir suivantes sont mises en évidence, puis approfondies tout au long du présent rapport.

  1. Dans le cadre de ses efforts visant à protéger l’élection pendant la période de transition, le groupe d’experts du PPIEM, ainsi que le gouvernement du Canada de façon plus générale, ont pris des mesures bien avant la 45e EG, ce qui était essentiel pour assurer une bonne préparation en vue des tâches à accomplir pendant la période électorale. À l’avenir, les membres du groupe d’experts du PPIEM devraient continuer à prendre de telles mesures.
  2. Le gouvernement a proactivement communiqué de l’information à d’autres entités, y compris les partis politiques du Canada et des plateformes en ligne, tout au long de la campagne électorale. En particulier, les partis politiques se sont montrés disposés à traiter la menace d’ingérence étrangère avec la gravité qu’elle mérite. À l’avenir, les membres du groupe d’expert du PPIEM devraient continuer de considérer la transmission d’informations à ces entités comme étant un outil principal pour atténuer les risques et ils devraient continuer de cultiver ces relations afin de veiller à ce que l’information soit communiquée dans les deux sens en tout temps, et ce, pas uniquement en période électorale. Cette communication devrait tenir compte du mandat des organisations membres du Groupe de travail, ainsi que celui du gouvernement de façon plus générale.
  3. Les discussions, autant avec des partenaires internationiaux qu’avec de potentiels acteurs étrangers malveillants, constitue une mesure principale avant et pendant l’élection. Ces discussions ont permis de veiller à ce que le gouvernement du Canada apprenne de l’expérience des autres, et qu’il renforce les attentes concernant ce qui constitue un comportement acceptable et dissuade les états étrangers d’adopter des comportements inacceptables en période électorale. À l’avenir, les membres du groupe d’experts du PPIEM devraient continuer de prendre en considération les points de vue internationaux et diplomatiques afin de guider leurs délibérations.
  4. Grâce à la tenue de breffages périodiques, auprès des medias, afin de leur communiquer les conclusions du gouvernement du Canada en période électorale, les Canadiens ont pu recevoir régulièrement des mises à jour et des analyses en temps opportun et de manière cohérente. La réaction des représentants des médias à l’égard de ces breffages a été en grande partie favorable. À l’avenir, les membres du groupe d’experts du PPIEM devraient poursuivre leur réflexion sur les meilleures façons de garantir que les Canadiens sont informés des incidents qui ont lieu en période électorale, dans la mesure du possible et en tenant compte des considérations liées à la sécurité nationale.

Une version classifiée de ce rapport a été présentée par le greffier du Conseil privé au premier ministre et au Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement. La présente version publique a été élaborée dans le but de promouvoir la transparence et de sensibiliser davantage le public, tout en respectant les considérations liées à la sécurité nationale.

2. Contexte

Établi dans la Directive du Cabinet sur le PPIEM, le groupe d’experts du PPIEM est un groupe non partisan de hauts fonctionnaires mis sur pied par le gouvernement du Canada en 2019 pour surveiller les menaces possibles à l’intégrité des élections fédérales pendant la période de transition et y remédier. Sa fonction primaire est de surveiller les incidents, y compris la manipulation de l’information et l’ingérence étrangère, les cybermenaces et l’extrémisme violent, qui pourraient miner le processus électoral et la confiance que lui accorde le public.

Le groupe d’experts est composé de cinq hauts fonctionnaires : le greffier du Conseil privé, le conseiller à la sécurité nationale et au renseignement auprès du premier ministre et les sous-ministres des Affaires étrangères, de la Sécurité publique et de la Justice. Pendant une période électorale, le groupe d’experts reçoit des breffages et des évaluations de renseignements de la part d’agences de sécurité nationale, principalement par l’entremise du Groupe de travail. Si le groupe d’experts considère un incident ou série d’incidents suffisamment sérieux, au point d’avoir une incidence sur la capacité du Canada à tenir une élection libre et équitable, le groupe d’experts peut émettre une annonce publique afin d’en informer les Canadiens.

Le groupe d’experts du PPIEM et la Directive du Cabinet, par laquelle il est établi, sont des mesures clés mises en place dans le cadre du Plan pour protéger la démocratie canadienne, qui a pour objectif global de protéger le système électoral contre les menaces et de renforcer la confiance dans les institutions démocratiques du Canada. Le groupe d’experts vient s’ajouter aux autres efforts en matière de sécurité nationale et travaille étroitement avec Élections Canada, le Bureau du commissaire aux élections fédérales et d’autres organismes de surveillance.

En dehors d’une période d’élection générale, d’autres structures sont en place pour répondre aux cas de manipulation d’information et d’ingérence étrangère, de cybermenaces ou d’extrémisme violent, et les ministres jouent un rôle lorsque nécessaire. Par exemple, le Comité des sous-ministres chargé des interventions en matière de renseignement traite de rapports sur le renseignement utilisable et coordonne des interventions sur le plan opérationnel en vue de protéger les processus et les institutions démocratiques du Canada. En outre, le Comité de coordination des sous-ministres adjoints sur la sécurité des élections (CCSMASE) offre une orientation pour assurer la collaboration et la coordination interorganismes et la préparation du système en ce qui a trait à la sécurité électorale. En 2023, le gouvernement a créé le poste de coordinateur national de la lutte contre l’ingérence étrangère afin de lutter contre l’ingérence étrangère en assurant un leadership pour élaborer une réponse fédérale commune et améliorer la connaissance de la situation et la transparence grâce à la mobilisation communautaire.

Après la 44e élection générale, Morris Rosenberg, examinateur indépendant, a examiné le PPIEM, sa mise en œuvre et son efficacité à réagir aux menaces. En janvier 2025, la commissaire Marie‑Josée Hogue a aussi publié son rapport final dans le cadre de l’Enquête publique sur l’ingérence étrangère dans les processus électoraux et les institutions démocratiques fédéraux (EPIE), qui a examiné les répercussions possibles de l’ingérence étrangère sur les 43e et 44e élections générales et qui a émis des recommandations, y compris en ce qui concerne le PPIEM. Les deux rapports ont souligné  la nécessité pour le gouvernement de mieux communiquer et faire connaître l’existence et le mandat du groupe d’experts du PPIEM, ainsi que le processus décisionnel de celui-ci lorsqu’il examine des incidents et détermine les mesures appropriées. Ces rapports contiennent aussi des commentaires sur la composition du groupe d’experts, l’éventail de mesures qui pourraient être prises au-delà d’une annonce par le groupe d’experts, les breffages requis avant une élection générale afin de veiller à la sensibilisation et à la préparation du groupe d’experts, ainsi que sur le besoin de mieux informer les partis politiques du contexte de la menace. Une évaluation indépendante similaire sera entreprise à l’égard de la 45e EG, comme le prévoit l’article 9 de la Directive du Cabinet. Cette évaluation indépendante sera rendue publique et éclairera les changements qui seront apportés à la Directive du Cabinet et aux activités du groupe d’experts.

3. Préparatifs en vue de la 45e élection générale

Afin de laisser suffisamment de temps de préparation avant la 45e EG, chaque membre du groupe d’experts a reçu un breffage individuel concernant sa responsabilité en tant que membre du groupe d’experts au titre de la Directive du Cabinet sur le PPIEM.
De janvier 2024 à mars 2025, le groupe d’experts a tenu 17 réunions en prévision de la 45e EG. Dans le cadre de ces réunions, divers intervenants provenant du gouvernement du Canada, de gouvernements internationaux, d’universités et de la société civile ont breffé et rencontré le groupe d’experts. Ce dernier a aussi travaillé avec des fonctionnaires de l’ensemble du gouvernement afin d’examiner et de renforcer les structures de gouvernance en place pour la 45e EG, conformément aux recommandations de M. Rosenberg, examinateur indépendant, et de la commissaire Hogue. Le groupe d’experts a aussi étudié des solutions visant à améliorer les communications avec les Canadiens afin de mieux les sensibiliser au contexte de la menace.

3.1 Mandat, communication et outils de mobilisation du groupe d’experts

Avant la 45e EG, les membres du groupe d’experts ont examiné et mis en œuvre différentes solutions pour améliorer les structures en place afin de les appuyer dans leur rôle. L’une des principales initiatives pour surmonter les obstacles relevés dans l’évaluation de 2021 du Protocole et les recommandations de l’EPIE était la publication par le greffier, en janvier 2025, des lignes directrices à l’intention des membres du groupe d’experts de la mise en œuvre du PPIEM. Les lignes directrices du greffier visent à améliorer la préparation du groupe d’experts, à clarifier ses procédures sur le plan opérationnel et à assurer une communication efficace avec les Canadiens pendant la période de transition. Elles définissent également la responsabilité du groupe d’experts selon laquelle celui-ci doit avoir recours à une vaste gamme de mesures pour protéger l’intégrité électorale, y compris la communication claire avec les Canadiens concernant les outils dont dispose le gouvernement, ainsi que les attentes du greffier à l’égard des membres du groupe d’experts en période électorale. Les lignes directrices insistent aussi sur le rôle essentiel que jouent les membres Panel dans la coordination des efforts du gouvernement visant à protéger l’intégrité des élections fédérales et soulignent la nécessité pour les différents ministères et organismes gouvernementaux de se coordonner.

En vue de mettre en pratique ces principes clés, le groupe d’experts a demandé aux fonctionnaires de préparer un ensemble de mesures qui allaient être adoptées et mises en œuvre au moment de la délivrance des brefs. Ces mesures comprenaient les suivantes :

3.2 Amélioration de la sensibilisation et des connaissances du groupe d’experts à l’égard du contexte de la menace

De janvier 2024 à mars 2025, le groupe d’experts a été breffé par le Groupe de travail et par l’Unité de l’impact et de l’innovation du Bureau du Conseil privé (BCP) à de multiples occasions et sur différents sujets et enjeux, y compris :

Le groupe d’experts a également demandé au Groupe de travail d’élaborer un rapport classifié et un rapport non classifié sur le contexte de la menace avant la 45e EG. Le rapport classifié a été utilisé pour breffer le groupe d’experts, alors que le rapport non classifié a été utilisé pour informer les Canadiens dans le cadre des breffages techniques hebdomadaires.

En plus de recevoir des breffages sur le contexte de la menace au Canada, le groupe d’experts a entrepris une série d’exercices fondés sur des scénarios, inspirés de situations réelles observées dans plusieurs pays, et a délibéré sur les directives à donner aux fonctionnaires quant aux mesures à prendre et le raisonnement sous-tendant chacune des décisions. Le groupe d’experts a aussi participé, en collaboration avec Élections Canada et le Bureau du commissaire aux élections fédérales, à un exercice de simulation conjoint d’une demi-journée, dans lequel tous les participants devaient réagir à divers incidents pendant une période électorale fictive. L’exercice de simulation et les exercices continus fondés sur des scénarios ont aidé le groupe d’experts à se familiariser avec les outils existants pour orienter les interventions, permettant ainsi de s’assurer que le groupe d’experts possède les moyens de prendre en considération un ensemble de facteurs dans ses processus décisionnels.

3.3 Collaboration et discussions avec des acteurs externes

Étant donné que le Canada n’est pas le seul pays à se heurter à des menaces visant l’intégrité de ses élections fédérales, le groupe d’experts a rencontré des pairs internationaux, qui ont tenu des élections en 2024 et 2025, afin de mieux comprendre les menaces auxquelles sont exposés d’autres pays et les pratiques exemplaires que ces pays ont adoptées pour protéger leurs processus électoraux. Les membres du groupe d’experts ont rencontré des représentants de la France, du Royaume-Uni et des États-Unis. Ils ont également rencontré des représentants de l’Allemagne. Ces rencontres ont permis au groupe d’experts de recueillir des points de vue récents et précieux sur les observations et les expériences de chaque pays, y compris des commentaires sur les mesures prises, mettant en valeur à la fois les réussites et les défis, ainsi que les leçons retenues.

En outre, en novembre 2024, le sous-ministre des Affaires étrangères a animé une séance de breffage à Ottawa où des hauts représentants de pays ayant une présence diplomatique au Canada ont été invités à prendre note des directives claires concernant les pratiques acceptables et inacceptables en matière d’engagement diplomatique au Canada, surtout pendant une période d’élection générale.

En plus d’une collaboration internationale accrue, le groupe d’experts a tenu des réunions avec le directeur général des élections et la commissaire aux élections fédérales afin de veiller à bien comprendre leurs rôles et responsabilités pendant une période électorale, tout en établissant des canaux de communication pour toute coordination requise. Le groupe d’experts a aussi rencontré des organisations de la société civile et des universitaires, comme le Réseau canadien de recherche sur les médias numériques (RCRMN), pour recueillir des points de vue provenant de l’extérieur du gouvernement du Canada.

De plus, dans le but d’améliorer l’intégrité de l’information en ligne en prévision de la 45e EG, le groupe d’experts a appuyé un plan pour mobiliser les plateformes de médias numériques et les entreprises technologiques, ainsi que la publication, le 23 mars 2025, de l’« Énoncé des principes démocratiques canadiensNote de bas de page 4  », qui réclamait un effort collaboratif afin de protéger l’intégrité de l’information pendant l’élection générale. Bien qu’en 2019 et 2021, les plateformes de médias sociaux aient accepté de respecter les principes d’intégrité, d’authenticité et de transparence d’une déclaration volontaire, compte tenu de l’espace virtuel évolutif, l’Énoncé a été publié afin de souligner le rôle essentiel que jouent tous les secteurs de la société, y compris les plateformes de médias sociaux, pour assurer un écosystème sain.

Des discussions avec des plateformes de médias numériques et des entreprises technologiques ont commencé en septembre 2024 et ont continué jusqu’en avril 2025. Avant la 45e EG, des discussions bilatérales ont été organisées avec les principales plateformes et entreprises de médias sociaux.

3.4 Réaction aux recommandations de l’EPIE

Dans le rapport final de l’EPIE publié en janvier 2025, la commissaire Hogue a mentionné que les membres du groupe d’experts sont relativement peu connus du public et que ce n’est pas tout le monde qui comprend que les fonctionnaires sont non partisans. Pour régler ce problème, la commissaire Hogue a suggéré que le gouvernement du Canada envisage d’ajouter comme membre du groupe d’experts un Canadien éminent en qui le public a confiance et qui pourrait être le représentant du groupe d’experts si une annonce était nécessaire pendant une période électorale. Pour assurer la légitimité et l’adhésion du public, la commissaire Hogue a aussi mentionné qu’avant d’ajouter un autre membre au groupe d’experts, les partis politiques représentés à la Chambre des Communes et les sénateurs devraient être consultés.

Bien que la commissaire ait énoncé qu’elle ne s’attendait pas à ce que cette recommandation soit mise en œuvre avant la 45e EG, les membres du groupe d’experts ont convenu que des efforts devraient être faits pour accélérer la nomination d’un sixième membre, compte tenu du potentiel qu’aurait cette recommandation de démontrer davantage aux Canadiens l’impartialité du groupe d’experts. Par conséquent, les membres du groupe d’experts, par l’entremise du greffier du Conseil privé, ont envoyé une lettre aux partis politiques représentés à la Chambre des Communes et aux leaders du Sénat le 5 mars 2025, afin de proposer l’ajout d’un Canadien éminent comme membre du groupe d’experts en vue de la 45e EG. L’approbation de tous les destinataires devait être obtenue afin de procéder à cette nomination, ce qui n’a pas été le cas.

La commissaire Hogue a aussi énoncé que, selon elle, la manipulation de l’information « représente le plus grand risque pour notre démocratie. Il s’agit d’une menace existentielleNote de bas de page 5  ». Compte tenu de son mandat consistant à coordonner des mesures en réaction aux menaces, le groupe d’experts a salué l’annonce du gouvernement concernant l’affectation de la somme supplémentaire de 5,95 millions de dollars, à compter de 2024-2025, afin d’accroître la capacité du Mécanisme de réponse rapide d’Affaires mondiales Canada (AMC) de surveiller et de renforcer les défenses de l’écosystème canadien de l’information de source ouverte et de tenir les Canadiens au courant d’une possible ingérence étrangère pendant les électionsNote de bas de page 6 .

4. Activités pendant la 45e EG

Lorsque la 45e élection générale a été déclenchée le 23 mars 2025, le mandat du groupe d’experts du PPIEM de surveiller les incidents pouvant menacer la capacité du Canada à tenir des élections libres et équitables est entré en vigueur. Comme il est mentionné dans les lignes directrices du greffier, le groupe d’experts apporte une contribution importante à la coordination des efforts du gouvernement visant à protéger l’intégrité des élections fédérales. Pour accomplir cette tâche, des réunions hebdomadaires et spéciales du groupe d’experts ont été organisées pendant la période de transition pour examiner les incidents et orienter les mesures prises par le gouvernement du Canada afin de contrer et d’atténuer les répercussions de ces incidents. Du 24 mars 2025 au 30 avril 2025, le groupe d’experts s’est réuni à huit occasions pour examiner les incidents repérés.

Le 24 mars 2025, le greffier du Conseil privé, au nom du groupe d’experts du PPIEM, a fait une déclaration sur la protection des élections générales au CanadaNote de bas de page 7 . Deux documents d’information sur les « Mesures pour protéger l’élection générale de 2025 » et le fait de « Repérer et signaler les cas de désinformation » ont aussi été publiés en même temps que la déclaration du greffier, tel qu’exigé par le groupe d’experts dans le cadre de leurs réunions préparatoiresNote de bas de page 8  Note de bas de page 9 .

Le 24 mars 2025, le Groupe de travail sur les MSRE a commencé à produire et à partager avec les membres du groupe d’experts des rapports de situation quotidiens (RAPSIT), fondés sur les rapports des membres et des observateurs du Groupe de travail sur les MSRE. Du 24 mars 2025 au 7 mai 2025, 31 RAPSIT ont été produits et diffusés aux membres du groupe d’experts.

Le groupe du CCSMASE a aussi tenu des réunions quotidiennes, tel qu’exigé par le groupe d’experts, afin d’examiner l’information fournie dans les RAPSIT du Groupe de travail et de fournir des recommandations au groupe d’experts quant aux mesures à envisager. Du 24 mars 2025 au 1er mai 2025, des SMA et d’autres fonctionnaires d’Élections Canada, du Bureau du commissaire aux élections fédérales, le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), le Centre de la sécurité des télécommunications (CST) et le Centre canadien pour la cybersécurité (Centre canadien pour la cybersécurité ), la Gendarmerie royale du Canada (GRC), Affaires mondiales Canada (AMC), le Centre intégré d’évaluation des menaces (CIEM), Sécurité publique ainsi que les équipes des Communications, de la Sécurité et du Renseignement (S et R) et des Institutions démocratiques (ID) du BCP se sont réunis 27 fois pour examiner les incidents décrits dans les RAPSIT, faire le point sur les mesures prises suivant les directives du groupe d’experts et veiller à ce que les efforts du gouvernement soient cohérents et concertés.

Le fait d’assurer la mise en place de structures robustes en prévision de la 45e EG a été déterminant dans le breffage exhaustif du groupe d’experts, afin que ce dernier prenne rapidement des décisions et que le gouvernement du Canada réagisse de manière efficace. Ces efforts ont permis au gouvernement du Canada d’adopter une position plus transparente et ouverte avec les intervenants externes et le public afin de les sensibiliser davantage quant aux attentes pendant la 45e EG.

Comme il est mentionné ci-dessous et dans le rapport après-action du Groupe de travail, le groupe d’experts a été informé des mesures prises pour réagir aux multiples tentatives d’ingérence étrangère par des acteurs étatiques hostiles pendant la 45e EG et a coordonné ces mesures. En réponse, le groupe d’experts a demandé que divers partenaires dans l’ensemble du gouvernement du Canada prennent rapidement des mesures, qui comprenaient un éventail de solutions : discuter avec des représentants des partis politiques, communiquer avec des plateformes de médias sociaux, assurer la liaison avec d’autres pays et communiquer avec les Canadiens par l’entremise de breffages techniques hebdomadaires.

Lorsqu’il a délibéré sur les mesures appropriées à prendre, le groupe d’experts a examiné le contexte général de chaque incident et a pris en considération un ensemble de facteurs comme le potentiel qu’avait l’incident de miner la crédibilité de, ou d’avoir un impact notable sur l’élection, son niveau de confiance à l’égard du renseignement ou de l’information, ainsi que la portée, l’ampleur, la crédibilité et la durée de vie de l’incident.

4.1 Communication avec les représentants et les candidats des partis politiques

En s’appuyant sur les connaissances acquises lors des élections antérieures, ainsi que celles tirées du rapport de 2021 de M. Rosenberg et du rapport final de l’EPIE, le gouvernement du Canada reconnaît l’importance d’améliorer le partage d’informations aux partis politiques. C’est pourquoi une partie importante des efforts déployés pendant la 45e EG visait à fournir des breffages, y compris des breffages classifiés, aux partis politiques afin d’appuyer leurs interventions éclairées et efficaces pour contrer les potentielles tentatives d’ingérence étrangère pendant les élections générales. Le greffier a souligné l’importance de ces efforts dans ses lignes directrices afin de mettre en œuvre d’autres mesures dont dispose le gouvernement du Canada, et il a expressément mentionné les interventions auprès de représentants des partis politiques.

Lorsque les élections ont été déclenchées le 23 mars 2025, des réunions ont été organisées entre des fonctionnaires du BCP et des membres du Groupe de travail sur les MSRE et les représentants des partis politiques disposant des cotes de sécurité requises. Les représentants des partis politiques habilités ont été informés des menaces pesant sur la 45e EG, du rôle du Groupe d’experts du Protocole public en cas d’incident électoral majeur, et de la stratégie de communication prévue par le gouvernement du Canada pour les élections à venir.

Les représentants des partis politiques ont aussi été mis au fait du Programme de sécurité des candidats, qui a été lancé pour la 45e EG. Le programme visait à améliorer la sécurité des candidats en fonction de leurs besoins. Grâce à ce programme, une couche de protection additionnelle a été fournie par l’intermédiaire de services de sécurité non armés du secteur privé à tous les candidats qui se sentaient intimidés ou menacés, mais dont le niveau de risque n’atteignait pas le seuil pour justifier la protection de la GRC ou de la police locale.

De plus, afin de mieux informer les candidats des ressources mises à leur disposition pendant la 45eEG, un courriel a été envoyé à tous les candidats inscrits. Ce courriel comprenait des ressources, des liens et les coordonnées des services gouvernementaux afin que tous les candidats et candidates inscrits puissent obtenir de l’aide, le cas échéant. Ces deux mesures de sensibilisation ont été prises conformément aux directives du Groupe d’experts issues des réunions préparatoires.

Des réunions spéciales avec des représentants des partis politiques ont aussi été organisées pendant la 45e EG à mesure que le groupe d’experts en apprenait plus sur des tentatives de la part d’acteurs étatiques hostiles d’influencer les résultats de l’élection. Des réunions individuelles ont également été organisées avec certains partis politiques afin de partager des renseignements et de discuter de tentatives d’ingérence étrangère, dont certaines ont aussi été abordées lors des séances de breffage technique hebdomadaires, organisées par des membres du Groupe de travail sur les MSRE et des fonctionnaires du BCP.

Par exemple, dans le contexte de l’évaluation de la possibilité d’ingérence électorale russe dans la 45e EG et en réponse aux efforts observés d’un réseau de sites web, des remarques de nature générale sur les tactiques possibles utilisées par des acteurs étrangers ont été fournies dans le cadre d’une réunion d’information destinée aux représentants des partis politiques. Ces renseignements ont été partagés afin de sensibiliser davantage à la question, sans pour autant attirer l’attention sur le réseau en question, compte tenu du peu d’intérêt observé. En ce qui concerne le ciblage du candidat du PCC Joe Tay et l’opération d’information visant le candidat du PLC Mark Carney, des réunions bilatérales ont été organisées avec les partis politiques. Ces réunions ont permis de communiquer des renseignements afin de permettre aux partis politiques de prendre des mesures pour mieux se protéger et protéger leurs candidats.

Toutes les réunions concernant la divulgation d’informations classifiées ont eu lieu dans le centre-ville d’Ottawa. Des fonctionnaires du BCP et du Groupe de travail ont participé aux réunions afin de s’assurer que les informations les plus exactes et les plus à jour soient fournies aux représentants des partis politiques.

Dans tous ces cas, après avoir évalué les incidents à l’aide de divers critères – y compris les répercussions potentielles des incidents sur l’intégrité de l’élection, la capacité des électeurs de voter en toute connaissance de cause, et le risque de confusion ou de perte de confiance de la part du public à l’égard des institutions démocratiques – le groupe d’experts a conclu que la mesure la plus appropriée et proportionnelle à prendre à l’encontre de ces incidents était d’informer les représentants des partis politiques concernés, parfois parallèlement à d’autres mesures d’intervention. Ainsi, les personnes directement touchées étaient en mesure de prendre rapidement des mesures pour régler le problème et atténuer tout effet potentiel.

4.2 Communication avec les plateformes de médias sociaux

Pendant la 45e EG et selon la directive du groupe d’experts, des représentants du BCP ont tenu trois réunions multilatérales avec d’importantes plateformes et entreprises de médias sociaux, accompagnés de représentants d’AMC , du Centre canadien pour la cybersécurité , de Patrimoine canadien et de Sécurité publique Canada. Cette nouvelle approche s’alignait avec les efforts entrepris avant la délivrance des brefs et a permis d’avoir des échanges ouverts concernant les attentes du Canada à l’égard de l’intégrité de l’information en ligne pendant la 45e EG. Elle a aussi établi des canaux de communication efficaces au sein du gouvernement, avec des plateformes de médias numériques et des entreprises technologiques et cela a servi de tribune pour signaler et discuter d’incidents ou de menaces à l’intégrité de l’élection observés par le gouvernement ou par les plateformes de médias sociaux.
En outre, les représentants du Groupe de travail sur les MSRE ont eu des rencontres bilatérales avec des représentants de deux plateformes de médias sociaux, à la demande du groupe d’experts, afin de discuter de certains incidents :

Après avoir examiné ces incidents et avoir délibéré sur les possibilités d’intervention, le groupe d’experts a conclu que les rencontres avec les plateformes de médias sociaux, en parallèle avec d’autres mesures d’intervention, constituaient une mesure d’intervention essentielle et avantageuse. Ces mesures d’intervention sont conformes au poids qu’accorde le PPIEM aux interventions proportionnelles et efficaces qui sont conçues pour minimiser les préjudices tout en conservant la transparence et la confiance.

4.3 Communication avec d’autres pays

Comme lors des deux précédentes élections générales, AMC a publié le dimanche 23 mars 2025 une circulaire à l’intention des missions diplomatiques étrangères au Canada et de leurs postes consulaires, leur rappelant leurs obligations en vertu de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques et de la Convention de Vienne sur les relations consulaires, ainsi que les pratiques diplomatiques acceptables attendues pendant la période électorale au Canada.

Le groupe d’experts a été informé de l’intérêt que pourraient manifester des dignitaires étrangers au Canada pour tenter d’influencer les élections, notamment en utilisant des groupes communautaires canadiens.

Le groupe d’experts a déterminé que l’envoi d’un rappel officiel aux missions diplomatiques étrangères au Canada dans le but de réitérer les comportements diplomatiques acceptables et inacceptables pendant les élections fédérales au Canada constituait une étape prudente et nécessaire. Ce rappel, qui a été envoyé le mardi 15 avril 2025, a renforcé les protocoles diplomatiques établis et a clairement exprimé l’attente du gouvernement voulant que les gouvernements étrangers respectent la souveraineté du Canada et l’intégrité du processus électoral du Canada. En tant que communication proactive à l’intention des représentants étrangers, ce rappel tentait de dissuader les tentatives d’ingérence et visait à conserver le respect et la compréhension mutuels entre le Canada et les pays étrangers représentés au Canada.

Le rappel officiel adressé aux missions diplomatiques étrangères au Canada afin de réitérer les comportements diplomatiques acceptables et inacceptables pendant les élections fédérales canadiennes a peut-être entraîné une diminution des activités pouvant être perçues comme de l’ingérence étrangère de la part de diplomates étrangers.

Le groupe d’experts a déterminé que l’initiative d’informer un pays partenaire d’un incident d’intérêt était une mesure nécessaire et constructive. Le partage de tels renseignements renforce la coopération bilatérale et améliore la capacité collective de déceler les menaces qui transcendent les frontières nationales, d’y répondre et de les atténuer.

4.4 Communication avec les Canadiens

Suivant les directives du groupe d’experts, des fonctionnaires du BCP, du SCRS, d’AMC, du CST et de la GRC ont tenu cinq breffages techniques hebdomadaires avec les médias du 24 mars 2025 au 21 avril 2025. Ces breffages techniques ont constitué une initiative fondamentale, la première en son genre, et ont permis de communiquer directement avec les Canadiens au sujet de ce que le Groupe de travail a pu observer pendant la 45e EG, y compris de l’information factuelle et à jour sur les différentes tactiques employées par les acteurs étrangers, ainsi que d’informer les Canadiens sur les mesures d’atténuation possibles. Les sujets abordés dans le cadre de ces breffages techniques comprenaient le contexte de la menace avant la 45e EG, les risques de répression transnationale, les pratiques exemplaires en matière de cybersécurité ainsi que le harponnage et les opérations de piratage et de divulgation.

Grâce à cette initiative, le gouvernement du Canada a communiqué avec les Canadiens au sujet de divers incidents qui ont été observés pendant la 45e EG. Les réunions du groupe d’experts ont orienté les sujets abordés par les fonctionnaires lors des breffages techniques, ce qui a permis au groupe d’experts de faire une attribution claire concernant les incidents repérés. Les breffages ont aussi permis de communiquer plus généralement aux Canadiens les menaces globales observées. Par exemple :

Avant la 45e EG, à la fin du mois de decembre 2024, les autorités chinoises ont promis une prime contre l’arrestation de M. Tay, ce qui a donné lieu à une intensification d’interactions sur les réseaux sociaux, suivie d’un ralentissement, juste avant le début de la période électorale. Pendant la 45e EG, le groupe d’experts a reçu des mises à jour régulières sur les incidents observés et enregistrés, concernant le candidat du PCC Joe Tay. Des efforts importants ont été dévoués pour veiller à ce que la meilleure information disponible concernant ces incidents soit obtenue, et le groupe d’experts a entrepris de longues délibérations afin de déterminer les mesures d’atténuation appropriées :

Dans certains des cas mentionnés plus haut, le groupe d’experts a délibéré sur la façon de trouver un juste équilibre entre les avantages de sensibiliser au sujet des activités malveillantes et le risque de potentiellement aider les acteurs étatiques hostiles à atteindre leurs objectifs. Par exemple, dans des cas où un faible niveau d’interaction a été observé relativement à des campagnes de manipulation d’information et d’ingérence étrangères, le fait de divulguer certains détails précis pourrait amplifier par inadvertance la menace en attirant l’attention sur l’incident. Dans ces cas, le groupe d’experts a considéré les breffages techniques comme une occasion d’informer les Canadiens de manière générale au sujet des tactiques employées et des mesures prises par les acteurs menaçants, tout en minimisant le risque d’amplifier inutilement des incidents en particulier. De plus, les délibérations du groupe d’experts ont aussi démontré l’importance de veiller à ce que ce dernier ait la capacité d’obtenir des informations supplémentaires afin de compléter et de valider les rapports reçus par le groupe d’experts pour décision.

4.5 Autres incidents

En ce qui concerne des incidents signalés au groupe d’experts qui étaient limités quant à leur portée ou pour lesquels les renseignements n’étaient pas suffisants pour évaluer pleinement la situation, le groupe d’experts a indiqué aux fonctionnaires de continuer d’assurer un suivi étroit des rapports. Cette directive avait pour but d’assurer que tout changement ou toute intensification soient repérés rapidement, ce qui permettrait de prendre des mesures appropriées en temps opportun.

En outre, le groupe d’experts a examiné d’autres incidents signalés qui ne nécessitaient pas son intervention directe. Dans certains cas, ces incidents ont été résolus efficacement dans le cadre des responsabilités et des pouvoirs établis des divers organismes chargés de la sécurité nationale concernés, ce qui a permis aux membres du groupe d’experts de concentrer leur attention sur des incidents plus complexes. Il s’agissait notamment d’incidents signalés au groupe d’experts et liés à des cybermenaces, à la cybercriminalité, et à la surveillance de menaces d’extrémisme violent. Dans d’autres cas, il s’agissait d’examiner des incidents portés à l’attention des Canadiens par des entités non gouvernementales, telles que le Réseau canadien de recherche sur les médias numériques.

Dans l’ensemble, cette approche a mis en évidence l’importance de la coordination, de la communication claire et de la confiance dans les mandats opérationnels des organismes de sécurité nationale du Canada ainsi que l’importance des efforts plus généraux d’entités non gouvernementales, tout en permettant au groupe d’experts d’être prêt à intervenir si la nature de l’incident change ou devient plus grave.

5. Lessons retenues et prochaines étapes

Dans le cadre de l’engagement du gouvernement visant à protéger les institutions démocratiques, une série d’initiatives a été entreprise avant et pendant la 45e EG et appuyée par les efforts du groupe d’experts du PPIEM. Les préparations et les délibérations du groupe d’experts ont pour but de démontrer une maturité institutionnelle croissante en ce qui concerne la surveillance et l’identification des menaces, la coordination des interventions et le renforcement de la confiance du public. Le résumé suivant fait état des aspects à souligner et comprend des recommandations en vue d’un développement futur, afin de veiller à ce que les processus électoraux du Canada restent sécuritaires, équitables et transparents.

5.1 État de préparation

La participation à des exercices fondés sur des scénarios, ainsi qu’à un exercice de simulation avec la participation d’Élections Canada et du Bureau du commissaire aux élections fédérales, a grandement amélioré l’état de préparation du groupe d’experts en permettant aux membres d’explorer différentes possibilités de menace et options d’interventions. Il est clairement avantageux de rendre cette approche officielle, y compris par la création d’une base de données évolutive de scénarios provenant de situations passées, actuelles et hypothétiques.

À l’avenir, les membres du groupe d’experts du PPIEM devraient continuer d‘investir dans ces efforts. Ils peuvent apporter certaines améliorations en s’assurant que les membres du groupe d’experts du PPIEM ont une bonne compréhension des incidents ou des situations qui ont commencé avant l’émission des brefs et qui pourraient se poursuivre pendant la période électorale, ainsi qu’en réalisant des analyses et en élaborant des stratégies d’atténuation à l’égard des circonscriptions électorales qui sont les plus à risque d’être la cible d’ingérence électorale étrangère. Ces améliorations permettraient d’avoir un portrait complet sur le plan opérationnel, afin de pouvoir prendre des décisions éclairées en temps opportun.

5.2 Interaction avec d’autres entités

Le groupe d’experts du PPIEM est d’avis qu’établir des relations de travail robustes avec d’autres entités, comme des partis politiques, des plateformes en ligne et des membres de la société civile, constituait un aspect essentiel de sa capacité à remplir son mandat lié à la 45e EG. Par exemple, ces relations ont permis au groupe d’experts d’être mis au courant et de prendre des mesures appropriées pour tenter de résoudre les incidents portés à l’attention du groupe d’experts par les partis politiques et des candidats. À l’avenir, les groupes d’experts du PPIEM devraient continuer de considérer la communication d’informations à ces entités comme constituant un outil principal pour atténuer les risques et d’établir des relations robustes qui sont conçues pour veiller à ce que l’information soit échangée dans les deux sens, et ce, pas seulement pendant les périodes électorales.

Les rencontres avec des membres de la société civile jouent un rôle important dans le soutien de l’état de préparation du groupe d’experts. Des groupes comme le Réseau canadien de recherche sur les médias numériques (RCRMN) offrent de précieuses observations sur l’environnement de l’information et les enjeux émergents qui ont le potentiel d’avoir une incidence sur l’intégrité de l’élection. Leurs points de vue aident le groupe d’experts à mieux comprendre le contexte global et contribuent à l’adoption d’une approche plus éclairée et adaptée à la protection des institutions démocratiques du Canada.

À l’avenir, les groupes d’experts du PPIEM devaient aussi veiller à ce que des canaux de communication soient établis et prêts à être utilisés pour rejoindre des Canadiens qui pourraient être les plus à risque d’être la cible d’ingérence étrangère ou de répression transnationale. Ces liens permettraient d’assurer la communication efficace d’informations et de donner au groupe d’experts la capacité d’étayer des faits véridiques liés à des incidents observés. De plus, un soutien dévoué à la traduction lors des prochaines élections devrait être disponible afin de s’assurer que les communications du Groupe de travail et du groupe d’experts du PPIEM puissent être diffusées rapidement et interprétées dans diverses langues, en plus du français et de l’anglais, afin d’accroître leur portée dans les communautés issues de diasporas qui sont touchées. Le gouvernement devrait aussi envisager d’autres outils et moyens permettant de s’adresser aux leaders communautaires et aux Canadiens pendant et après les périodes électorales, et prendre des mesures afin de veiller à ce que ces outils répondent aux besoins des destinataires.

5.3 Collaboration entre les gouvernements

Le groupe d’experts du PPIEM est d’avis que les prochains groupes d’experts devraient s’efforcer d’échanger les leçons retenues lors de la 45e EG avec les partenaires provinciaux, territoriaux et internationaux. Offrir des exercices fondés sur des scénarios aux gouvernements provinciaux et territoriaux, ainsi que déterminer s’il serait possible d’offrir des séances de breffage classifiés aux représentants de ces gouvernements renforcerait l’état de préparation des élections provinciales, territoriales et municipales.

Une collaboration continue avec tous les ordres de gouvernement au Canada et avec les partenaires internationaux sera essentielle pour harmoniser les évaluations sur les menaces et renforcer la résilience démocratique, et les prochains membres du groupe d’experts du PPIEM devraient s’assurer d’investir suffisamment d’efforts en ce sens.

5.4 Transparence

Le groupe d’experts du PPIEM se réjouit du fait que le public ait trouvé généralement efficaces les efforts faits pendant la 45e EG pour améliorer les communications, à l’aide de breffages techniques hebdomadaires et de mises à jour publiques qui ont permis d’assurer une transparence et de conserver la confiance du public. À l’avenir, les groupes d’experts du PPIEM devraient envisager la possibilité d’affiner et d’élargir cette approche en tirant parti d’autres plateformes – en particulier les plateformes de médias sociaux et les plateformes numériques – et en assurant une approche multilingue pour s’adresser aux communautés à risque, y compris celles qui sont touchées par l’ingérence étrangère et la répression transnationale.

5.5 Gouvernance et réaction aux recommandations en suspens

Les structures de gouvernance en place pendant la 45e EG, comme les réunions quotidiennes du CCSMASE et le soutien administratif offert par le BCP au groupe d’experts, ont été hautement efficaces pour permettre la transmission d’informations de l’ensemble du gouvernement du Canada au groupe d’experts du PPIEM en temps opportun. Des comptes rendus détaillés des discussions qui ont eu lieu lors des réunions du groupe d’experts et du CCSMASE ont aussi permis d’avoir une documentation exacte sur les délibérations et un suivi des points de décision. À l’avenir, les groupes d’experts du PPIEM devraient continuer de s’assurer que des mécanismes gouvernementaux efficaces et qu’une tenue minutieuse des documents sont en place pour les prochaines élections.

En outre, les membres du groupe d’experts du PPIEM devraient être disposés à contribuer aux efforts plus généraux du gouvernement du Canada visant à déterminer la meilleure façon de répondre aux recommandations en suspens de l’EPIE, ainsi qu’aux recommandations provenant de l’évaluation indépendante de la Directive du Cabinet qui sera effectuée après la 45e EG. Ces recommandations comprennent celles qui sont liées à l’avenir du Groupe de travail et à la capacité du gouvernement de surveiller l’environnement d’information de source ouverte pour repérer la manipulation d’information et l’ingérence étrangère, ainsi que les modifications possibles à la Directive du Cabinet, y compris la recommandation de l’EPIE selon laquelle un membre externe devrait être nommé.

En attendant que le gouvernement examine les modifications à la Directive du Cabinet, les prochains groupes d’experts du PPIEM devraient continuer à intégrer des éléments des lignes directrices du greffier dans leurs activités. Pour la 45e EG, ces lignes directrices ont été perçues comme étant instrumentales pour orienter les délibérations du groupe d’experts et les efforts de celui-ci visant à coordonner les mesures prises par le gouvernement. Elles constituaient un complément essentiel à la Directive du Cabinet en définissant les attentes relatives à l’échange efficace d’information en temps opportun, à l’interne et avec le public, dans le but de contribuer à une transparence accrue pour renforcer la confiance du public à l’égard de l’intégrité du processus électoral. La publication du présent rapport rétrospectif fait partie de ces efforts.

6. Conclusion

Les membres du groupe d’experts du PPIEM espèrent que le présent rapport documente une approche de plus en plus coordonnée et mature à l’égard de leur rôle, pendant les périodes de transition, consistant à coordonner la préparation du gouvernement afin que ce dernier puisse réagir aux menaces à l’intégrité des élections fédérales au Canada. En même temps, les prochains groupes d’experts du PPIEM devraient délibérer au sujet de questions pour lesquelles une réflexion approfondie et un effort continu permettraient d’améliorer l’état de préparation et la résilience du groupe d’experts lors d’élections futures.

Idéalement, les réflexions du groupe d’experts mettent en évidence la réalité plus générale voulant qu’il soit nécessaire de s’occuper de l’intégrité électorale pendant le cycle de vie complet de la gouvernance démocratique. Alors que le Canada se tourne vers les prochaines élections, les leçons de la 45e EG serviront de référence pour le progrès et de point de départ pour un engagement futur sur la meilleure façon de protéger et de favoriser l’intégrité démocratique dans un contexte de plus en plus exigeant.

Annexe A - Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignement visant les élections, « Menaces pesant sur la 45e élection générale du Canada — Rapport après action »

Sommaire

Le 23 mars 2025, le premier ministre Mark Carney a présenté à la gouverneure générale Mary Simon une recommandation visant à dissoudre le Parlement, qu’elle a approuvée. Les brefs électoraux ont été publiés et la date de l’élection générale a été fixée au 28 avril 2025.

Conformément à son mandat, le Groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignement visant les élections (le Groupe de travail MSRE) a effectué une surveillance accrue des activités d’ingérence étrangère et des menaces d’extrémisme violentNote de bas de page 11  visant la 45e élection générale du Canada (EG45), et ce, du 24 mars au 5 mai 2025, soit une semaine après le jour du scrutin.

Le présent rapport donne un aperçu du contexte de la menace prévu par le Groupe de travail MSRE pour l’EG45, de ses observations sur les activités menaçant cette élection et des mesures qu’il a prises à la suite des réunions du Comité sur les incidents électoraux critiquesNote de bas de page 12  (le « Comité »). Il s’appuie sur les informations fournies par les membres du Groupe de travail MSRE ainsi que sur celles qui lui ont été communiquées directement par les partis politiques et les candidats. Il convient de noter qu’une version classifiée de ce rapport existe et a été transmise au Comité.

Au cours de l’EG45, le Groupe de travail MSRE a observé certaines activités qui correspondaient aux méthodes d’ingérence étrangère connues et qui relevaient du mandat des membres du groupe. Aucun des incidents observés par le Groupe de travail MSRE au cours de l’EG45 n’a été jugé par le Comité comme ayant eu une incidence sur la capacité du Canada à tenir une élection libre et équitable.

Voici quelques exemples d’activités observées par le Groupe de travail MSRE :

Le Groupe de travail MSRE a présenté au Comité de l’information sur ces incidents et a pris les mesures nécessaires conformément aux directives du Comité. Le Groupe de travail MSRE a informé les Canadiens de ces incidents par divers moyens de communication, notamment dans le cadre des séances d’information techniques hebdomadaires destinées aux médias qui ont eu lieu tout au long de la période électorale.

Renseignements généraux

Mandat du Groupe de travail MSRE

Créé en 2019, le Groupe de travail MSRENote de bas de page 13  est un groupe de travail opérationnel interministériel chargé de coordonner les efforts de collecte et d’analyse du gouvernement du Canada concernant les menaces qui pèsent sur les processus électoraux fédéraux du Canada. Il est composé d’experts du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), du Centre de la sécurité des télécommunications (CST), qui englobe aussi le Centre canadien pour la cybersécurité (CCC), du Mécanisme de réponse rapide du Canada (MRR) d’Affaires mondiales Canada (AMC) et de la Gendarmerie royale du Canada (GRC). Chacune des organisations membres se penche sur les questions relevant de son mandat. Le Groupe de travail MSRE comptait également plusieurs observateurs, notamment le Centre intégré d’évaluation des menaces, Sécurité publique Canada, le Bureau du Conseil privé (BCP) et le Bureau du commissaire aux élections fédérales. Pour l’EG45, le secrétariat du Groupe de travail MSRE était hébergé au SCRS, qui en assurait également la présidence.

Le Groupe de travail MSRE sert de point de contact clair pour la collaboration et la coordination avec l’appareil du renseignement et de la sécurité. Ses membres coordonnent l’examen et l’analyse du renseignement, aident à faire le point sur la situation au moyen d’évaluations de la menace, de rapports et de séances d’information et, lorsque leur mandat le permet, coordonnent les mesures visant à atténuer les menaces. Pendant une élection générale, le Groupe de travail MSRE fournit régulièrement des rapports de renseignement au Comité. À partir de l’information et des renseignements fournis par le Groupe de travail MSRE, le Comité détermine si une menace justifie une annonce publique, conformément au Protocole public en cas d’incident électoral majeur (« le Protocole »).

Itérations précédentes du Groupe de travail MSRE

Depuis sa création en 2019, le Groupe de travail MSRE a été mobilisé à trois reprises afin d’assurer une surveillance accrue des menaces pesant sur les élections générales, soit en 2019 pour l’EG43, en 2021 pour l’EG44 et en 2025 pour l’EG45. En outre, depuis mai 2023, le Groupe de travail MSRE a également surveillé 12Note de bas de page 14  élections partielles fédérales ainsi que la course à la chefferie du Parti libéral du Canada (PLC) en 2025.

Conformément à la Directive du Cabinet sur le Protocole public en cas d’incident électoral majeur publiée en 2019, le Protocole a fait l’objet de deux évaluations indépendantes réalisées par des experts mandatés par le BCP, la première menée par James JuddNote de bas de page 15  après l’EG43 et la seconde menée par Morris RosenbergNote de bas de page 16  après l’EG44. Les deux rapports comprenaient des recommandations et ont été présentés au premier ministre et au Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement. En conséquence, le Protocole a été révisé et mis à jour en prévision des prochaines élections. L’un des principaux changements a consisté à communiquer plus clairement avec les Canadiens afin de les sensibiliser davantage aux menaces et aux incidents susceptibles d’avoir une incidence sur l’EG45.

Enquête publique sur l’ingérence étrangère

Le 7 septembre 2023, le gouvernement a mis sur pied l’Enquête publique sur l’ingérence étrangère dans les processus électoraux et les institutions démocratiques fédéraux (EPIE) et a nommé la juge Marie-Josée Hogue comme commissaire. Son rapport final a été publié le 28 janvier 2025.

L’une des principales recommandations de la commissaire Hogue était que le gouvernement communique de manière plus proactive avec le public au sujet des risques posés par l’ingérence étrangère et des mesures qu’il prend pour préserver l’intégrité des élections fédérales.

Réponse aux rapports

Selon le Protocole, le Comité doit communiquer avec les Canadiens uniquement si l’on détermine qu’un incident ou une série d’incidents susceptibles de compromettre la capacité du Canada à tenir des élections libres et équitables s’est produit. Cependant, ces dernières années, le Canada et ses alliés ont reconnu l’importance de divulguer publiquement les incidents liés à la manipulation de l’information et à l’ingérence par des entités étrangères afin de sensibiliser les citoyens, de renforcer leur résilience et de maintenir leur confiance dans les résultats électoraux.

Conformément aux recommandations formulées dans les rapports Judd, Rosenberg et Hogue sur l’amélioration des communications auprès des Canadiens, le Groupe de travail MSRE a tenu des séances d’information techniques hebdomadaires à l’intention des médias pendant la période de transitionNote de bas de page 17 .

Évolution de la sensibilisation du public à l’ingérence étrangère, des médias sociaux, des nouvelles technologies et l’incidence sur l’EG45

Avant l’EG45, Le Groupe de travail MSRE a déterminé que l’évolution des médias sociaux et des nouvelles technologies avait des répercussions sur le contexte de la menace pesant sur l’élection. Le Groupe de travail estimait qu’il était probable que l’évolution des médias sociaux et la croissance soutenue, au Canada, des plateformes basées en RPC aient une incidence sur le contexte de la menace entourant l’élection. Le Groupe de travail a également déterminé que les acteurs étatiques hostiles tiraient de plus en plus parti de l’intelligence artificielle (IA), y compris l’IA générative (p. ex. l’hypertrucage), pour s’ingérer dans les processus démocratiques dans le monde entier.

Comme prévu, le Groupe de travail a observé des activités liées à des opérations d’information dirigées par des États étrangers sur des plateformes de médias sociaux avant l’EG45. Par rapport aux deux élections générales précédentes au Canada, certaines plateformes de médias sociaux utilisées par les Canadiens ont grandement réduit les mesures prises pour protéger les élections, ce qui pourrait avoir contribué à rendre le milieu de l’information en ligne plus propice aux activités étrangères d’ingérence et de manipulation de l’information.

À l’heure actuelle, le Groupe de travail n’est pas en mesure d’établir les répercussions précises du virage effectué par certaines des plateformes de médias sociaux.  

Bien que la technologie de l’IA en général se soit perfectionnée depuis les deux dernières élections, les méthodes utilisées par les acteurs étatiques hostiles pour manipuler l’information lors de l’EG45 étaient globalement semblables à celles utilisées lors des élections précédentes. Le Groupe de travail n’a constaté aucune utilisation marquante de l’IA générative par les acteurs étatiques hostiles dans le contexte de l’EG45. De plus, comme prévu, la plus grande partie de la désinformation créée à l’étranger (avec et sans l’appui de l’IA) n’a pas suscité beaucoup de réaction ou d’intérêt chez la population canadienne en général.

Surveillance par le Groupe de travail MSRE et mesures prises par celui-ci avant et pendant la 45e élection générale

Tout au long des années 2024 et 2025, le Groupe de travail MSRE a déployé des efforts considérables pour renforcer les capacités collectives de préparation et d’intervention des parties prenantes concernées avant et pendant l’EG45.

Efforts de préparation avant les élections

Avant la période électorale, le Groupe de travail a pris des mesures proactives pour informer les parties prenantes sur les menaces qui pourraient avoir des répercussions sur le processus électoral et pour les y préparer. À compter de 2024, le Groupe de travail MSRE a offert des séances d’information périodiques au Comité de coordination des sous-ministres adjoints sur la sécurité des élections (CCSMASE), en mettant l’accent sur les menaces émergentes et en évolution qui pèsent sur le processus électoral.

À la suite d’un engagement pris lors de l’Enquête publique sur l’ingérence étrangère, le sous-ministre des Affaires étrangères a tenu, le 21 novembre 2024, une séance d’information avec le corps diplomatique étranger en poste au Canada. L’objectif était de sensibiliser les participants à l’évolution du contexte des relations diplomatiques au Canada et de leur rappeler les pratiques appropriées en la matière. Plus précisément, cette séance d’information a permis de fournir des informations sur les sensibilités liées à l’ingérence étrangère au Canada et de donner des exemples de comportements diplomatiques acceptables et inacceptables au Canada.

En décembre 2024, des représentants du Groupe de travail MSRE ont participé au symposium Beyond 2024—Lessons Learned in Mitigating Hybrid Threats to Elections (Au-delà de 2024 – Leçons apprises dans la lutte contre les menaces hybrides pesant sur les élections), organisé par le Centre d’excellence pour la lutte contre les menaces hybridesNote de bas de page 18  et tenu à Helsinki, en Finlande. Cela a permis au Groupe de travail MSRE de mieux comprendre les leçons tirées des élections menées ailleurs dans le monde en 2024, soit aux États-Unis et dans l’Union européenne, par les responsables de la sécurité. Au cours de l’hiver 2025, le Centre d’excellence pour la lutte contre les menaces hybrides et le BCP ont organisé un exercice de mise en situation en deux parties à Ottawa, auquel le Groupe de travail MSRE a participé. Cet exercice a permis de mettre à l’épreuve la réponse de la fonction publique fédérale face à une menace dans le contexte d’une élection fédérale. Le Groupe de travail MSRE a ainsi acquis une compréhension approfondie des leçons tirées des élections tenues dans le monde en 2024 et renforcé sa capacité à cerner les menaces pesant sur les élections et à y faire face, améliorant ainsi la sécurité et l’intégrité du processus électoral.

À l’hiver 2025, le CCSMASE a organisé deux séances de formation exhaustives d’une demi-journée. Il a réuni les principales parties prenantes, y compris les membres du Groupe de travail MSRE, afin de discuter du contexte actuel de la menace, de clarifier les rôles et les responsabilités et de définir les mécanismes opérationnels et le cadre de communication visant à garantir la sécurité des élections. Cela a permis d’améliorer la capacité à faire face aux menaces, de renforcer la posture de sécurité électorale du gouvernement et de mieux le positionner pour faire face à l’évolution du contexte de la menace pesant sur les élections.

Au cours de la même période, le Groupe de travail MSRE a également collaboré avec divers groupes avant la période électorale, notamment en offrant une séance d’information à la Commission des débats des chefs à la fin du mois de février 2025 pour aborder la question du mandat et du rôle du Groupe de travail MSRE dans la protection de l’élection. Fin mars 2025, le Groupe de travail MSRE a organisé une séance d’information à l’intention des employés de la Chambre des communes, afin de présenter sa composition et son mandat et de les sensibiliser à son champ d’action et à ses responsabilités. Toujours fin mars, le Centre canadien pour la cybersécurité, en tant que membre du Groupe de travail MSRE, a rencontré les médias qui diffusaient les débats des chefs afin de discuter des conseils habituels concernant les mesures et la posture de défense en matière de cybersécurité.

Activités et mobilisation en période électorale

Collaboration avec des entités gouvernementales et à l’étranger

Au cours de la période de surveillance, le Groupe de travail MSRE a produit des rapports de situation quotidiensNote de bas de page 19  fondés sur les informations rapportées par les membres du Groupe de travail MSRE et des observateurs concernant leurs domaines opérationnels respectifs. Ces rapports ont été préparés principalement pour appuyer le Comité, mais ils ont également été communiqués au gouvernement du Canada selon le principe du besoin de savoir. De plus, le Groupe de travail MSRE s’est réuni chaque semaine et a appuyé les téléconférences quotidiennes du CCSMASE. Ce dernier a examiné les rapports, a formulé des recommandations et a suggéré des mesures à prendre au Comité. Le directeur du SCRS a breffé le Comité chaque semaine au nom du groupe de travail MSRE, ce qui a permis de maintenir un niveau élevé de connaissance de la situation tout au long de la période électoraleNote de bas de page 20 .

Au début de la période électorale, AMC a envoyé un avis aux missions diplomatiques étrangères au Canada, leur rappelant, ainsi qu’à leurs postes consulaires, leurs obligations prévues par la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques et la Convention de Vienne sur les relations consulaires ainsi que les pratiques diplomatiques acceptables en période électorale au Canada. Un deuxième rappel a été envoyé à mi-parcours de la période électorale.

Tout au long de la période électorale, la présidente du Groupe de travail MSRE a également informé les représentants des partis politiques au sujet des menaces pesant sur l’EG45, leur fournissant de l’information et des observations impartiales afin de les aider à protéger leurs campagnes. De plus, en avril 2025, une fois tous les candidats confirmés, le BCP a envoyé un courriel détaillé à ces derniers, dans lequel figuraient de l’information provenant du Groupe de travail MSRE sur les tactiques utilisées par les auteurs de menaces, des conseils sur la sécurité personnelle et la cybersécurité ainsi que des directives sur la marche à suivre pour signaler des incidents au Groupe de travail MSRE, ce qui a permis aux candidats de prendre des mesures proactives pour sécuriser leurs campagnes. C’était la première fois que le BCP communiquait directement avec tous les candidats confirmés lors d’une élection générale.

Enfin, en avril 2025, les membres du Groupe de travail MSRE ont rencontré à Ottawa des représentants du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme (BIDDH) de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). L’une des fonctions de cette organisation consiste à observer les élections dans tous ses États membres, y compris le Canada. Elle a donc envoyé une mission d’évaluation des besoins au Canada en vue de l’élection fédérale. Ses représentants ont rencontré des interlocuteurs clés intervenant dans divers aspects de l’EG45 afin d’évaluer le contexte et les préparatifs préélectoraux au Canada, d’examiner l’évolution de l’architecture électorale canadienne depuis 2021, en mettant l’accent sur la coordination, la structure et la sensibilisation des citoyens, et de déterminer s’il fallait assigner une mission d’observation électorale de l’OSCE au Canada. Le rapport de l’OSCE a souligné la robustesse du processus électoral au Canada, affirmant sa confiance dans l’intégrité du cadre démocratique du pays. À ce titre, l’OSCE n’a pas recommandé de surveillance à grande échelle des élections canadiennes.

Collaboration avec les plateformes de médias sociaux

Les membres du Groupe de travail MSRE ont communiqué avec les plateformes de médias sociaux afin de traiter des cas précis où l’on soupçonnait la présence d’activités d’ingérence, et de manipulation de l’information étrangères ou de répression transnationale. Bien que le Groupe de travail MSRE n’ait pas donné de consignes directes aux plateformes de médias sociaux, il a activement partagé des informations et les a encouragées à faire respecter leurs conditions d’utilisation afin de préserver l’intégrité de l’information en ligne sur leurs plateformes.

Séances d’information techniques à l’intention des médias

Les activités liées à la menace peuvent miner la confiance du public à l’égard de l’intégrité des processus et des institutions du Canada. L’une des meilleures façons de contrer l’ingérence étrangère consiste à faire en sorte que le public soit résilient et bien informé. Par conséquent, et en réponse directe aux recommandations ayant découlé de l’EPIE, le Groupe de travail a entrepris des démarches pour accroître la transparence. Ainsi, il a décidé de communiquer davantage d’informations au public au sujet des menaces qui pèsent sur le Canada ainsi que des mesures mises en place pour détecter et contrer ces menaces. Pour la première fois lors d’une élection générale fédérale, et en réponse directe aux recommandations de l’EPIE, le Groupe de travail MSRE a fourni des séances d’information techniques hebdomadaires aux médias pendant la période de transition.

Un cadre de communication décrivant les processus et les procédures du gouvernement du Canada conçus pour protéger l’élection pendant la période de transition a été élaboré. Il visait d’abord à veiller à ce que les partenaires du gouvernement du Canada adoptent une approche coordonnée en matière de communication si jamais un incident se produisait pendant la période électorale et que cet événement ne méritait pas une annonce officielle d’après les critères du Comité. Dans l’ensemble, le Comité a conclu qu’une annonce publique n’était pas nécessaire pendant l’EG45, mais que certains incidents observés par le groupe de travail MSRE justifiaient d’informer le public au moyen de séances d’information techniques.

Les séances d’information techniques à l’intention des médiasNote de bas de page 21  visaient à sensibiliser et à éduquer les Canadiens, par l’entremise des médias, aux menaces susceptibles d’avoir des répercussions sur le processus électoral. Des représentants du gouvernement du Canada qui faisaient partie du Groupe de travail MSRE ont tenu cinq séances d’information techniques à l’intention des médias pendant la période électorale. Au cours de ces séances, ils ont traité des incidents observés et du contexte de la menace, fait des rappels et formulé des recommandations au public et aux médias en prévision du jour de l’élection, et mis en lumière les travaux en cours pour protéger les élections. Voici des exemples de sujets abordés dans le cadre des séances d’information techniques :

Divers produits de communication (notamment des communiqués de presse, des documents d’information, des avis aux médias et du contenu pour les médias sociaux) ont été publiés avant et pendant la période électorale afin de fournir aux Canadiens des outils et des ressources, et de compléter l’information fournie lors des séances d’information techniques destinées aux médias. Ces produits ont été publiés sur le site Web du BCP. Les informations relatives à une opération d’information sur WeChat et à une opération de répression transnationale menée par la RPCNote de bas de page 23  ont également été traduites en chinois traditionnel et simplifié.

En somme, les séances d’information techniques ont permis de faire savoir au public et aux médias que le Groupe de travail MSRE n’avait pas constaté d’incidents qui avaient eu des répercussions sur la capacité du Canada à tenir des élections libres et équitables avant la date du vote, selon l’évaluation du Comité.

Ingérence étrangère

Le Groupe de travail MSRE souligne que les activités d’ingérence étrangère complexes, envahissantes et incessantes représentent une menace grave pour la sécurité nationale du Canada et l’intégrité de ses institutions démocratiques en tout temps, et pas uniquement pendant les processus électoraux. Les États étrangers qui se livrent à des activités d’ingérence étrangère prennent pour cible tous les ordres de gouvernement au Canada – fédéral, provincial, municipal et autochtone – ainsi que diverses facettes de la société civile canadienne (p. ex. les communautés religieuses, ethniques et culturelles, le grand public, les médias et le milieu universitaire). Les activités d’ingérence étrangère transcendent par ailleurs les lignes de parti, les idéologies et les origines ethniques. Pour certains États étrangers, les activités d’ingérence étrangère font partie de leur comportement habituel au Canada et les élections sont considérées comme des occasions propices à la conduite de telles activités.

En effet, comme la population est davantage sensibilisée à l’ingérence étrangère et qu’elle surveille de plus près ce type d’activités, les auteurs de menace ont probablement adapté leurs techniques pour mieux dissimuler leurs activités, qui seront encore plus difficiles à détecter. Le contexte de la menace pour l’EG45 a également été influencé par les changements dans l’environnement des réseaux sociaux, l’émergence de nouvelles technologies facilitant l’exécution de campagnes d’information malveillantes, l’utilisation accrue de l’intelligence artificielle et l’augmentation des cybermenaces visant les élections.

République populaire de Chine (RPC)

Avant l’EG45, le Groupe de travail MSRE a estimé que la RPC continuerait probablement à prendre pour cible les institutions démocratiques et la société civile canadiennes afin de faire avancer ses objectifs stratégiques. Les représentants et les intermédiaires de la RPC étaient susceptibles de mener des activités d’ingérence étrangère au moyen d’un ensemble complexe de mécanismes ouverts et secrets. Il était très probable que la RPC utilise des outils fondés sur l’IA pour tenter de s’ingérer dans les processus démocratiques du Canada pendant l’EG45, notamment en se servant des médias sociaux pour promouvoir des discours favorables à ses intérêts. De plus, il était très probable que la RPC vise les communautés ethniques, culturelles et religieuses d’origine chinoise au Canada en utilisant des méthodes clandestines et trompeuses.

En outre, comme indiqué précédemment, la RPC s’est livrée à des activités de répression transnationale, y compris tout un éventail de tactiques visant à exercer une influence et un contrôle au-delà de ses frontières. Ces tactiques consistent notamment à faire pression sur les personnes vivant au Canada pour qu’elles s’abstiennent d’adopter des opinions jugées hostiles par la RPC ou pour qu’elles retournent en Chine, et à menacer les membres de leur famille vivant en Chine par un ensemble de mesures coercitives, notamment la détention ou des sanctions financières.

Opération d’information en ligne sur WeChat qui a pris pour cible l’EG45

Au cours de l’EG45, le Groupe de travail MSRE a détecté une opération d’information en ligne menée sur la plateforme de médias sociaux chinoise WeChat et lancée par le compte d’actualités le plus populaire de la plateforme, Youli-Youmian. Cette opération d’information a amplifié les discours contrastés au sujet du premier ministre et leader du PLC, Mark Carney, avec des pics observés de ce qui semble être un comportement inauthentique et coordonné avant la campagne électorale du 10 mars, puis de nouveau le 25 mars 2025, soit pendant la période électorale. Les publications dont la diffusion a été amplifiée ont suscité un engagement important (de 85 000 à 130 000 interactions), en plus d’accumuler un grand nombre de visionnements (environ un à trois millions). Le Groupe de travail n’est pas en mesure de vérifier le nombre d’interactions et de visionnements effectués depuis le Canada.

Pour favoriser la découvrabilité des publications diffusées le 25 mars 2025 par le compte Youli-Youmian, un groupe de 30 comptes WeChat moins populaires les a amplifiées de manière inauthentique et coordonnée. Les rapports de renseignement établissent un lien entre le compte Youli-Youmian et la Commission centrale sur les questions politiques et juridiques du Parti communiste chinois. Le compte Youli-Youmian a également été impliqué dans des attaques visant les députés Michael Chong (en juin 2023) et Chrystia Freeland (en janvier 2025).

Le lien établi grâce aux renseignements entre le compte Youli-Youmian sur WeChat et des entités affiliées à l’État chinois suggère la possibilité d’une ingérence étrangère qui aurait pu servir à influencer les communautés chinoises au Canada dans le contexte de l’EG45.

Le Comité a assisté à trois séances d’informations distinctes sur l’opération d’information menée sur WeChat. Les mesures ci-dessous ont été prises par la suite :

Campagne menée contre Joseph Tay

Pendant l’EG45, le Groupe de travail MSRE a observé des activités de répression transnationale dans la sphère numérique à l’encontre de Joseph Tay, candidat du Parti conservateur du Canada (PCC) dans la circonscription de Don Valley North, à Toronto. Le candidat est un militant connu pour son soutien aux efforts en faveur de la démocratie dans la région administrative spéciale de Hong Kong. Fin décembre 2024, la police de Hong Kong a lancé un mandat d’arrêt contre M. Tay et a offert une récompense d’un million de dollars hongkongais (environ 185 000 dollars canadiens). Selon ce mandat, M. Tay aurait violé la loi sur la sécurité nationale de Hong Kong, invoquant des accusations d’« incitation à la sécession » et de « collusion avec des forces étrangères ».

Le Groupe de travail MSRE a constaté que du contenu inexact en lien avec la récompense et le mandat d’arrestation pesant sur M. Tay avait été amplifié de manière coordonnée, tout comme du contenu portant sur la compétence de M. Tay à occuper un poste en politique. Cette activité a été observée sur diverses plateformes de médias sociaux et sites d’information en langue chinoise, et a suscité divers degrés d’engagement. En décembre, l’appel à l’arrestation de M. Tay a fait l’objet d’un engagement important sur les médias sociaux. Celui-ci a toutefois connu une baisse avant le début de l’EG45. Le Groupe de travail MSRE a également détecté un « filtrage par mot-clé » qui supprimait les résultats de recherche associés au nom de M. Tay en chinois traditionnel et simplifié sur certaines plateformes de médias sociaux basées en RPC et utilisées par les Canadiens, ne renvoyant que de l’information sur la récompense et le mandat d’arrêt visant M. Tay.

Confirmer l’origine de telles activités peut prendre beaucoup de temps et nécessiter une analyse approfondie, et les acteurs malveillants déploient des efforts considérables pour dissimuler leur implication dans de telles activités d’ingérence étrangère. Cependant, le rapport de renseignement indique que l’un des comptes impliqués dans ces activités a toujours été lié aux autorités gouvernementales chinoises et à des entités favorables à la RPC à Hong Kong.

Le Comité a été informé des rapports portant sur M. Tay à six reprises pendant la période de surveillance de l’EG45. Voici les mesures prises à la suite des discussions du Comité :

Fédération de Russie

La Russie déploie des efforts soutenus pour constituer des réseaux de diffusion qui recyclent et amplifient les propos du Kremlin sur les médias sociaux et les sites Web d’actualité. En prévision de l’EG45, le Groupe de travail a déterminé qu’il était possible que la Russie continue d’utiliser ses réseaux en ligne pour mener de façon opportuniste des opérations de manipulation de l’information et d’ingérence étrangère contre la population canadienne.

Tout au long de l’EG45, le Groupe de travail MSRE a observé les efforts déployés par la Fédération de Russie pour tirer parti de ses réseaux étrangers de manipulation de l’information et d’ingérence en ligne. Il s’agit d’un réseau de sites Web qui diffusent et amplifient les informations agrégées par les médias contrôlés par le gouvernement russe sur les candidats canadiens et l’élection tout au long de la période électorale. La plupart des contenus publiés pendant l’EG45 portaient sur diverses affirmations concernant le chef du Parti libéral du Canada, Mark Carney. Dans l’ensemble, les publications de ces réseaux ont suscité peu d’intérêt chez les utilisateurs en ligne et ont été très peu consultées; il est donc peu probable que les Canadiens aient vu ce contenu.

Le Comité a été informé à trois reprises des opérations étrangères d’ingérence et de manipulation de l’information étrangères, après quoi les mesures suivantes ont été prises :

Inde

Avant l’EG45, le Groupe de travail MSRE a déterminé que le gouvernement indien avait l’intention et la capacité de s’ingérer dans les communautés et les processus démocratiques du Canada pour promouvoir ses intérêts stratégiques. Le gouvernement indien s’appuyait de plus en plus sur des intermédiaires et des contacts situés au Canada pour mener des activités liées à l’ingérence étrangère.

Le groupe de travail MSRE a surveillé activement les activités potentielles liées à l’ingérence étrangère du gouvernement indien durant l’EG45.

Pakistan

Avant l’EG45, le Groupe de travail MSRE a déterminé que le gouvernement pakistanais pourrait mener des activités d’ingérence étrangère contre le Canada, conformément à son objectif stratégique de promouvoir la stabilité de la scène politique, de la sécurité et de l’économie du Pakistan et de contrer l’influence croissante de l’Inde à l’international.

Le groupe de travail MSRE a surveillé activement les activités potentielles liées à l’ingérence étrangère du gouvernement pakistanais durant l’EG45.

Cybermenaces

Avant l’EG45, le Groupe de travail a fait remarquer que les cyberactivités liées à la menace visant les élections avaient augmenté dans le monde entier, et qu’elles faisaient peser une menace réelle et croissante sur les processus démocratiques du Canada, bien qu’il ait estimé que le Canada demeure une cible relativement moins prioritaire que certains de ses alliés, comme les États-Unis et le Royaume-Uni.

Tout au long de la période de surveillance du Groupe de travail, le CCC a offert un soutien spécialisé à Élections Canada : il s’est tenu à l’affût des menaces pour la cybersécurité qui pesaient sur l’élection, sur les informations en lien avec l’élection et sur l’infrastructure d’information. Le SCRS a également examiné ses propres sources de renseignement afin de détecter tout indice de cybermenaces visant l’EG45. Aucun cyberincident important lié à l’EG45 n’a été observé.

Extrémisme violent

Bien que le Groupe de travail MSRE se concentre principalement sur l’ingérence étrangère, la GRC et le SCRS ont le mandat et le pouvoir d’enquêter sur les menaces d’extrémisme violent. Le Groupe de travail MSRE s’est engagé à surveiller et à signaler toute menace d’extrémisme violent visant l’EG45.

Il a été estimé peu probable que des extrémistes violents commettent des actes de violence grave contre des personnes ou des biens en lien avec l’EG45. Bien que cette menace ait été évaluée comme peu probable, les grands rassemblements publics restaient des cibles faciles pour les auteurs de menaces.

Tout au long de l’EG45, aucune activité extrémiste violente visant l’élection n’a été observée. Les activités extrémistes qui ne constituaient pas une menace pour la sécurité nationale pendant l’EG45 semblaient être de nature criminelle et avaient probablement pour but de tourner en dérision le processus démocratique canadien dans son ensemble. Certaines personnes qui ont des opinions extrêmes ont profité d’élections et d’événements publics antérieurs pour dénigrer des candidats et les valeurs démocratiques canadiennes. Bien que certaines activités et certains discours incivils, en particulier en ligne, soient offensants et puissent même être criminels, la plupart ne répondent pas aux critères fixés pour la sécurité nationale et ne sont pas considérés comme de l’extrémisme violent. Par le passé, les candidats, en particulier les chefs de parti, ont été la cible de certains actes criminels à caractère idéologique.

Incidents non attribués à des acteurs étatiques étrangers ou à des extrémistes violents

En outre, après avoir surveillé les plateformes de médias sociaux, le Groupe de travail MSRE a observé de faux articles d’actualité et des publicités en ligne aux titres sensationnels en lien avec les élections canadiennes qui renvoyaient vers des sites Web faisant la promotion de stratagèmes de fraude financière.
Le Groupe de travail MSRE a reçu plusieurs signalements d’incidents où le nom et l’image de personnalités politiques, notamment le chef du Parti libéral du Canada Mark Carney et le chef du Nouveau Parti démocratique Jagmeet Singh, ont été utilisés pour promouvoir des cryptomonnaies et des escroqueries financières. Les fraudeurs ont utilisé de faux articles et de fausses vidéos qui semblaient provenir de sources légitimes comme CBC News pour inciter les Canadiens à s’inscrire à des programmes gouvernementaux fictifs ou à investir dans les cryptomonnaies. Ces incidents révèlent une tendance plus générale à l’usurpation de l’identité de personnalités politiques à des fins de fraude en ligne et d’escroquerie, et sont considérés comme n’étant pas directement liés à l’EG45 ni à de l’ingérence étrangère.

Plusieurs cas d’escroquerie ont été signalés au Comité et des mesures ont été prises en vertu des pouvoirs existants, notamment émettre une demande de retrait pour usurpation d’identité d’un actif de la Couronne et informer les victimes d’usurpation d’identité ou de violation de marque de commerce.

Conclusion

Au cours de la période électorale, le Groupe de travail MSRE a observé des cas d’ingérence étrangère, tels que la répression transnationale et l’amplification inauthentique et coordonnée de contenus en ligne, ainsi que des menaces en ligne, telles que des escroqueries et de la désinformation. Ces activités ont été observées à petite échelle et restent souvent difficiles à attribuer à un acteur étranger.

Parmi tous les incidents signalés au Comité par le Groupe de travail MSRE pendant l’EG45, aucun n’a été jugé par le Comité comme ayant eu une incidence sur la capacité du Canada à tenir des élections libres et équitables.

Deux de ces cas potentiels ont été abordés ouvertement lors des séances d’information technique hebdomadaires à l’intention des médias et offertes par les membres du Groupe de travail MSRE. Ces séances d’information s’inscrivaient dans le cadre d’une initiative plus large visant à renforcer la communication avec le public pendant la période électorale afin de le sensibiliser aux risques d’ingérence étrangère et aux mesures prises par le gouvernement pour protéger l’intégrité des élections fédérales.

Aucun cyberincident visant l’intégrité des élections n’a été détecté pendant l’EG45, et aucun acteur extrémiste violent se livrant à des activités menaçantes visant les élections n’a été observé.

Renforcer notre résilience collective face aux menaces qui pèsent sur nos processus électoraux est une responsabilité qui incombe à l’ensemble de la société. En tant que Canadiens, il est essentiel de rester vigilants face à ces menaces. L’ingérence étrangère, qui peut prendre la forme de désinformation, de répression transnationale, et d’autres formes de manipulation, constitue une menace majeure. De plus, les Canadiens doivent se méfier de la manipulation des médias sociaux, notamment des activités en ligne coordonnées et inauthentiques, des articles de presse mensongers et des escroqueries qui utilisent le nom et l’image de personnalités politiques pour promouvoir des stratagèmes de fraude financière.

Les Canadiens doivent rester vigilants face à la répression transnationale, qui consiste en des tentatives d’États étrangers d’intimider, de contraindre, de harceler ou de menacer des personnes, en particulier celles qui critiquent des gouvernements étrangers ou leurs intérêts. De plus, les cybermenaces, notamment le piratage, l’hameçonnage et d’autres activités dans le cyberespace, peuvent compromettre l’information personnelle et nuire aux processus démocratiques. Il est donc essentiel de faire preuve d’esprit critique à l’égard de l’information consommée en ligne et d’être conscient du risque de désinformation et de fausses nouvelles, qui peuvent être utilisées pour manipuler l’opinion publique et influencer les résultats électoraux.

Les Canadiens peuvent prendre plusieurs mesures pour se protéger et protéger l’intégrité des institutions démocratiques canadiennes. Ils peuvent notamment vérifier l’information avant de la faire circuler en ligne, se méfier des contenus sensationnels ou provocateurs, s’appuyer sur des sources d’information fiables et se tenir informé des risques d’ingérence étrangère et de cybermenaces. La population est encouragée à signaler toute activité suspecte et tout incident d’intimidation, de harcèlement, de coercition ou de menace aux autorités compétentes. De plus, le soutien d’initiatives qui favorisent la littératie médiatique et la réflexion critique peut permettre aux Canadiens d’évaluer de manière critique l’information et de repérer les cas potentiels de désinformation ou de manipulation. En restant vigilants et en prenant ces mesures, les Canadiens peuvent contribuer à protéger l’intégrité de leurs institutions démocratiques et à garantir la sécurité et l’intégrité de leurs processus électoraux.

Annexe

Définitions

Cybermenaces : Activités malveillantes menées dans le cyberespace par des acteurs (étatiques ou non étatiques) qui visent à exploiter les technologies de communication de l’information afin d’obtenir un accès non autorisé à des systèmes et à des réseaux ou de manipuler des personnes, dans le but d’atteindre divers objectifs ». Les objectifs de ces acteurs peuvent être financiers (p. ex. activités cybercriminelles) ou constituer des menaces pour la sécurité nationale (p. ex. l’espionnage, le sabotage ou les activités d’influence étrangère facilités dans le cyberespace). 

Désinformation : Toute information fausse visant à manipuler des personnes, des organisations et des pays, à leur causer des préjudices ou à les orienter dans la mauvaise direction.

Extrémisme violent : L’usage de la violence grave ou de menaces de violence contre des personnes ou des biens dans le but d’atteindre un objectif politique, religieux ou idéologique au Canada.

Ingérence étrangère : Activités menées ou soutenues par un État ou un acteur étranger qui sont préjudiciables aux intérêts nationaux du Canada, et qui sont d’une nature clandestine ou trompeuse ou comportent des menaces envers quiconque. Dans le contexte du processus électoral canadien, les auteurs d’ingérence étrangère ont pour objectif d’influencer l’issue des élections ou d’ébranler la confiance du public dans les institutions démocratiques canadiennes. L’ingérence étrangère peut prendre la forme d’une manipulation de l’information (y compris la désinformation), d’une répression transnationale ou d’autres méthodes.

Manipulation de l’information et ingérence étrangères : Terme générique désignant les efforts déployés par des États étrangers pour manipuler clandestinement l’environnement de l’information afin d’atteindre des objectifs stratégiques. Une telle manipulation peut miner la confiance du public dans les institutions démocratiques, accentuer la polarisation sociétale et perturber l’exécution des mandats des gouvernements et la mise en œuvre de leurs engagements. La manipulation de l’information et l’ingérence étrangère comprennent la désinformation ainsi que de nombreuses autres façons de manipuler l’information.

Répression transnationale : Forme d’ingérence par laquelle des États étrangers tentent de promouvoir leurs intérêts et de faire taire les critiques et les dissidents. Ces États étendent leur répression interne au-delà de leurs frontières afin d’intimider, de contraindre, de harceler et de faire taire les détracteurs ou ceux qu’ils considèrent comme une menace pour leur pouvoir ou pour leur porter atteinte. La répression transnationale peut se manifester par des moyens physiques, mais elle se perpétue de plus en plus dans le cyberespace, où elle peut prendre la forme de campagnes de harcèlement et de dénigrement en ligne.

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2025-10-02