Guide sur les Syndromes associés aux ITS : Rectite
Le présent guide fournit un aperçu de la prise en charge et du traitement empirique de la rectite associée aux infections transmissibles sexuellement (ITS). La rectite est l’inflammation de la muqueuse rectale qui ne s’étend pas à plus de 10 à 12 cm de la marge anale.
Sur cette page :
- Importance en santé publique
- Étiologie courante associée aux ITS
- Manifestations cliniques
- Tests diagnostiques
- Traitement empirique et prise en charge
- Suivi
- Déclaration et notification aux partenaires
- Références
Importance en santé publique
Les infections de l'anus et du rectum sont souvent transmises sexuellement et sont généralement associées aux relations sexuelles anales réceptives au cours desquelles il y a un contact direct ou indirect avec la muqueuse rectaleNote de bas de page 1.
Étiologie courante associée aux ITS
La rectite peut être une infection polymicrobienne. Les infections transmissibles sexuellement (ITS) associées à la rectite comprennent Chlamydia trachomatis (CT) (génotypes lymphogranulomatose vénérienne [LGV] et non-LGV), Neisseria gonorrhoeae (GC), Treponema pallidum et le virus Herpes simplex (VHS)Note de bas de page 2.
Dans une étude menée auprès des hommes gais, bisexuels et autres hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (gbHARSAH) atteints de rectite, les agents étiologiques suivants ont été détectésNote de bas de page 3 :
- GC (20 %);
- VHS (13 %);
- CT (11 %);
- Infections mixtes (10 %, dont 3 % avec le VHS);
- T. pallidum (syphilis) (1 %).
Puisque plusieurs provinces et territoires font face à des éclosions de syphilis, envisager un diagnostic de syphilis chez les personnes présentant une rectite, des ulcérations anogénitales ou des éruptions cutanées.
Dans le cas des personnes atteintes d'une infection par le virus de l'immunodéficience humaine (VIH) à un stade avancé, considérer une infection aux cryptosporidies ou aux microsporidies en tant que diagnostic différentielNote de bas de page 2.
Des infections entériques peuvent également être acquises lors d'activités sexuelles oro-anales et entraîner une rectocolite et une entériteNote de bas de page 2. La rectocolite peut être associée à la LGV, à Entamoeba histolytica, à Campylobacter spp., à Salmonella spp. et à Shigella spp. L'entérite peut être associée à une infection à Giardia lamblia. Consulter un collègue expérimenté puisque le traitement et la prise en charge de la rectocolite et de l'entérite ne sont pas abordés dans ce guide.
Manifestations cliniques
Les symptômes et les signes de la rectite comprennent :
- Douleur anorectale;
- Envie continue ou récurrente d'aller à la selle;
- Constipation;
- Selles sanguinolentes;
- Écoulement rectal mucopurulent.
Suspecter une LGV en cas de lymphadénopathie inguinale ou fémorale, ou s'il y a des antécédents de relations sexuelles anales réceptives sans condoms et de rectite hémorragique aiguë ou de rectocolite. Les écoulements sanguins, purulents ou muqueux de l'anus et la constipation sont fréquents en présence de la LGVNote de bas de page 4Note de bas de page 5Note de bas de page 6Note de bas de page 7.
Chez les personnes ayant le VIH, il existe d'autres causes possibles de rectite, et les infections sont souvent plus graves. La rectite aiguë peut se manifester par des écoulements sanguinolents, des ulcérations périanales douloureuses ou des ulcérations des muqueusesNote de bas de page 8.
La douleur abdominale, la diarrhée, les crampes, le ballonnement, la nausée ou la fièvre sont souvent associés à des entéropathogènes, qui peuvent être transmis lors d'activités sexuelles avec contact fécal-oral, et à des infections localisées dans la partie supérieure du tractus intestinal.
La rectite peut également être secondaire à une maladie inflammatoire de l'intestinNote de bas de page 9.
Tests diagnostiques
- Effectuer un écouvillonnage rectal en vue d'un test d'amplification des acides nucléiques (TAAN) pour détecter CT et GC (si disponible) et d'une mise en culture pour détecter GC (si disponible).
- Demander que les échantillons rectaux positifs à CT provenant de personnes présentant des symptômes évoquant une LGV et de partenaires sexuels de personnes atteintes de LGV soient acheminés au laboratoire provincial ou territorial (si possible) ou au Laboratoire national de microbiologie (LNM) pour un test de génotypage de LGV.
- Prélever des échantillons de lésions ou de bubons en vue d'un TAAN pour détecter la présence de CT et de LGV.
- Effectuer une sérologie pour la syphilis.
- Si le tableau clinique ou les antécédents le justifient, recueillir des échantillons de selles pour une mise en culture des entéropathogènes et un examen parasitologique. Consulter le laboratoire local pour déterminer s'il est possible de réaliser un TAAN pour la recherche de protozoaires.
- Considérer une anuscopie chez les personnes symptomatiques qui ont des relations sexuelles anales réceptives.
Traitement empirique et prise en charge
La décision de traiter de façon empirique ou d'attendre les résultats des tests doit être fondée sur :
- La gravité de l'état clinique;
- La probabilité qu'une infection soit présente;
- Les facteurs de risque d'infections transmissibles sexuellement et par le sang (ITSS) décelés chez la personne;
- La disposition de la personne à s'abstenir de toute activité sexuelle et à revenir pour obtenir les résultats des tests ou faire l'objet d'un suivi.
Dans le cadre d'un traitement empirique, la présence d'écoulement ano-rectal est une indication pour le traitement des infections à GC et CTNote de bas de page 8Note de bas de page 9.
Traitement empirique pour la rectite |
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Ceftriaxone 250 mg IM dose en unique [A-l] ou Céfixime 800 mg PO en dose unique [A-l] |
Remarques :
- La céfixime est considérée comme un traitement alternatif pour les gbHARSAH.
- Des données suggèrent que la doxycycline est plus efficace que l'azithromycine pour le traitement des infections rectales à CTNote de bas de page 11Note de bas de page 12.
- Les génotypes LGV de CT nécessitent un traitement de plus longue durée : doxycycline 100 mg PO BID pendant 21 jours.
- L'azithromycine est préférable à la doxycycline pour le traitement des infections rectales à GC en raison des taux élevés de résistance à la tétracycline et des préoccupations quant à l'observance du traitement sur plusieurs joursNote de bas de page 13Note de bas de page 14Note de bas de page 15Note de bas de page 16.
Traiter les partenaires sexuels actuels avec le même traitement empirique que le cas index.
Consulter les guides propres à l'étiologie pour le traitement lorsque la syphilis ou une infection génitale au virus Herpes simplex est suspectée.
Suivi
Évaluer la réponse au traitement chez toutes les personnes traitées pour une rectite. Envisager d'orienter les personnes ayant une rectite persistante ou récurrente à un collègue expérimenté, un gastro-entérologue ou un infectiologue aux fins d'investigations plus approfondies.
Le test de contrôle dépend de l'agent pathogène confirmé par les analyses de laboratoire. Consulter le guide propre à l'étiologie.
Déclaration et notification aux partenaires
Si un traitement pour une ITS est indiqué, il convient de notifier, d'évaluer, de dépister et de traiter (le cas échéant) les partenaires sexuels. Consulter les guides propres à l'étiologie pour connaître les recommandations sur la déclaration obligatoire et la notification aux partenaires.
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