Partie I – Introduction et contexte

Introduction

Ce rapport sommaire présente le travail, les idées et les recommandations du Groupe de consultation sur le soutien aux survivants (GCSS) dans l’accomplissement de son rôle.

Le GCSS a été formé en 2020 comme l’un des engagements clés du Règlement du recours collectif pour inconduite sexuelle des Forces armées canadiennes (FAC) et du ministère de la Défense nationale (MDN). Par le biais de l’Annexe N du recours collectif, les parties ont convenu d’un processus et d’un mandat pour guider l’élaboration d’un cadre de stratégie de soutien aux survivants et d’un plan de mise en œuvre, ainsi que d’un plan pour l’engagement continu des intervenants auprès des survivants, tout en s’assurant que l’expertise en la matière est intégrée.

Le GCSS a réuni trois représentants des membres du groupe et trois représentants du MDN et des FAC. Notre travail a été soutenu par trois experts en la matière (EM) externes ayant une expertise sur les questions centrales du soutien aux survivants.

En dépit de la grande variété d’antécédents et de points de vue des membres du GCSS et des EM, nous partageons tous le désir et l’engagement de favoriser un changement réel et transformateur avec et pour les survivants, et avons tous une ouverture à la réimagination des systèmes de soutien afin de faire progresser cet objectif. De plus, tous les participants se sont montrés ouverts à l’exploration des dimensions sexospécifiques et culturelles de l’inconduite sexuelle, ainsi qu’à la manière dont certaines populations au sein des FAC sont plus exposées à l’inconduite sexuelle et aux interventions qui ne répondent pas adéquatement à leurs besoins.

Dans le cadre de notre mandat, nous nous sommes efforcés de nous baser sur des données probantes et de tenir compte des recommandations et des conseils des survivants, des EM externes, des examens formels, ainsi que des enquêtes et autres recherches. Nous avons exploré les pratiques prometteuses liées à l’intervention en matière d’inconduite sexuelle et au soutien des survivants chez les alliés militaires du Canada et dans d’autres juridictions canadiennes.

Au cours de ses travaux, le GCSS a tenu des réunions axées sur l’examen des politiques, des procédures et de la formation pertinentes grâce à une série de présentations informatives de membres et d’unités clés de la communauté du MDN et des FAC. Ces exposés du MDN et des FAC ont permis de poser des questions et de réfléchir aux approches actuelles des FAC en matière de soutien. Les membres du GCSS ont partagé leurs observations, expériences et points de vue au cours de discussions animées, ainsi qu’avec les trois EM par leur participation active et leurs contributions au dialogue, les présentations qu’ils ont faites et les rapports écrits qu’ils ont soumis.

Un paysage en évolution rapide

La planification préalable du travail du GCSS prévoyait que le groupe se réunirait en personne, dans la mesure du possible, et tiendrait des réunions en personne avec d’autres intervenants clés. En raison de la pandémie de COVID-19, le GCSS a dû adapter ses plans et son calendrier et tenir des réunions virtuelles tout au long de 2020-2021.

Au-delà de la pandémie, la situation pour laquelle le GCSS avait été établi a continué à évoluer de manière significative. Le 2 février 2021, Global News a fait état d’allégations d’inconduite sexuelle concernant le Chef d’état-major de la défense (CEMD), récemment à la retraite.Note de bas de page 1Cette nouvelle a créé une onde de choc et des répercussions importantes dans l’ensemble des FAC, comme en témoigne, par exemple, l’augmentation des appels de soutien adressés au Centre d'intervention sur l'inconduite sexuelle (CIIS). Trois semaines plus tard, on apprenait que l’actuel CEMD se retirait de ses fonctions après que les médias aient confirmé qu’il faisait l’objet d’une enquête pour inconduite sexuelle. Le 31 mars 2021, le Chef du personnel militaire s’est également retiré suite à des allégations d’agression sexuelle.Note de bas de page 3

Face à ces graves allégations, deux comités distincts de la Chambre des communes ont entrepris des études sur l’inconduite sexuelle au sein des FAC. Le Comité permanent de la Défense nationale (NDDN)Note de bas de page 4 a commencé son étude le 19 février 2021, et le Comité permanent de la condition féminine (FEWO)Note de bas de page 5 le 23 mars 2021. Bien que les deux comités aient interrogé un grand nombre des mêmes témoins, le NDDN s’est concentré sur les allégations du point de vue de la politique et de la responsabilité, tandis que le FEWO s’est concentré sur les expériences des membres des FAC survivants d’actes d’inconduite sexuelle, en particulier les femmes.

Un autre développement notable a eu lieu le 24 mars 2021, lorsque les FAC ont annoncé par une lettre à tous les membres que l’opération HONOUR touchait à sa fin :

« L’opération HONOUR a atteint son point culminant; nous y mettrons donc un terme, nous en conserverons les mesures fructueuses, nous apprendrons en prenant conscience de ce qui n’a pas fonctionné, et nous élaborerons un plan délibéré pour aller de l’avant. Nous harmoniserons mieux les organisations et les processus axés sur le changement culturel afin de produire de meilleurs effets.Note de bas de page 6

La lettre signalait en outre que les FAC étaient prêtes à accueillir un examen extérieur et des recommandations provenant de l’extérieur, ainsi que d’une chaîne d’établissement de rapports indépendante afin de traiter les cas d’inconduite sexuelle et autres problèmes.

Environ un mois plus tard, le 19 avril 2021, le budget 2021 comprenait des annonces majeures liées à l’inconduite sexuelle au sein des FAC. Il propose de fournir un financement de 236,2 millions de dollars sur cinq ans, à compter de 2021-2022, et de 33,5 millions par année par la suite au ministère de la Défense nationale et à Anciens Combattants Canada, dont 158,5 millions de dollars sur cinq ans et 29,9 millions de dollars par année de financement permanent de ressources existantes afin d’élargir les efforts visant à éliminer l’inconduite sexuelle dans le milieu militaire. Les annonces spécifiques liées au soutien aux survivants comprenaient :

  • « Renforcer les mécanismes de responsabilisation, promouvoir le changement de culture dans les forces armées et fournir un espace sûr aux survivants pour signaler les inconduites et accéder aux services dont ils ont besoin. »
  • « Mettre en œuvre de nouvelles mesures de surveillance externe afin d’apporter une plus grande indépendance aux processus de signalement et de jugement des cas d’inconduite sexuelle au sein de l’armée. »
  • « Améliorer les services de soutien interne offerts aux victimes, ce qui comprend de fournir un accès à des conseils juridiques gratuits et indépendants et de permettre aux militaires d’accéder à des services sans avoir à déposer une plainte officielle. »
  • « Élargir le programme de contribution existant pour appuyer les fournisseurs de services communautaires offerts aux survivants d’agressions sexuelles à l’extérieur des grands centres militaires urbains. »
  • « Accroître la portée du programme de coordination de l’intervention et du soutien (CIS) du CIIS à d’autres endroits au Canada. »
  • « Exécuter un projet pilote en ligne et en personne de groupes de soutien par les pairs à l’intention des membres des Forces armées canadiennes et des vétérans qui ont vécu de l’inconduite sexuelle pendant leur service, adaptés à l’expérience militaire. »Note de bas de page 7

Le 29 avril 2021, le ministre de la Défense nationale (MDN) a annoncé le lancement d’un examen externe complet et indépendant des politiques, procédures, programmes, pratiques et culture actuels au sein du MDN et des FAC, dans le but d’examiner le harcèlement et l’inconduite sexuelle, de cerner les obstacles au signalement et de déterminer si l’intervention est adéquate à la suite des signalements.Note de bas de page 8 L’examen est dirigé par Madame Louise Arbour, qui a notamment pour mandat de formuler des recommandations visant la prévention et l’élimination du harcèlement et de l’inconduite sexuelle, au moyen d’évaluations et de recommandations intermédiaires ainsi que d’un rapport final.Note de bas de page 9

AAlors que nous étions en train de préparer ce rapport sommaire, l’autorité chargée du troisième examen indépendant terminait son examen; le MDN a déposé le rapport au Parlement le 1er juin 2021. Dans ce rapport, l’honorable Morris J. Fish formule 107 recommandations à l’intention du MDN, dont la majorité concerne le système de justice militaire, notamment le traitement des incidents d’inconduite sexuelle.Note de bas de page 10 Le chapitre 2 du rapport est consacré à l’inconduite sexuelle et définit trois domaines prioritaires pour les recommandations : éliminer l’obligation actuelle des personnes affectées par l’inconduite sexuelle de signaler leur expérience à la chaîne de commandement; fournir des conseils juridiques gratuits et indépendants aux personnes affectées par l’inconduite sexuelle; et procéder immédiatement à la mise en œuvre de la Déclaration des droits des victimes prévues dans le projet de loi C– 77.Note de bas de page 11

Enfin, le 17 juin 2021, le FEWO a déposé son rapportNote de bas de page 12 à la Chambre des Communes. Le rapport contient 21 recommandations à l’intention de l’Équipe de la Défense pour aborder l’inconduite sexuelle au sein des FAC. Ces recommandations sont axées sur les points suivants : répondre aux signalements de cas d’inconduite sexuelle au sein des FAC, responsabiliser les hauts dirigeants et créer un milieu de travail sécuritaire et inclusif. Si le NDDN a également travaillé à la rédaction d’un rapport, il n’a finalement pas pu le terminer et le déposer avant la pause estivale.

Aller de l’avant

Collectivement, ces récents développements critiques offrent une occasion importante d’atteindre plus de survivants et de combler les lacunes dans les services que beaucoup trop de personnes connaissent. L’un des principaux défis consiste à tirer parti de l’élan créé par ces événements et à continuer d’étendre et d’améliorer les services de soutien afin de rejoindre toutes les survivants d’inconduite sexuelle, mais d’une manière qui soit en accord avec les souhaits des survivants eux-mêmes.

Les allégations profondément troublantes qui émergent à nouveau ajoutent à l’incertitude et au manque de confiance à l’égard de l’engagement, de la détermination et de la capacité du MDN et des FAC à entreprendre un réel changement. Il est tout à fait probable – en fait, presque certain – que la méfiance que nous avons observée parmi les membres des FAC, anciens et actuels, et d’autres, y compris parmi le GCSS et ses EM de temps à autre, demeurera.

Les préoccupations concernant la culture, les politiques et les procédures du MDN et des FAC en matière d’inconduite sexuelle ne sont pas nouvelles. Nous pouvons nous attendre à ce qu’elles se poursuivent alors que l’Équipe de la Défense travaille à rétablir la confiance et à renforcer le soutien aux survivants.

Le GCSS et ses EM ont tenu une réunion le 4 mars 2021 pour réfléchir aux récentes divulgations et allégations des médias. Nous sommes particulièrement préoccupés par la possibilité que le paysage actuel, qui évolue rapidement, puisse conduire à l’incertitude et avoir pour conséquence involontaire de décourager les survivants de chercher du soutien. Les membres des FAC qui ont vécu un acte d’inconduite sexuelle doivent continuer à être encouragés à rechercher du soutien confidentiel auprès du CIIS ou d’une autre ressource qualifiée.

À notre avis – après avoir passé de nombreuses heures au cours des derniers mois à écouter ces questions et défis, à en discuter et à en débattre – la communauté des FAC se trouve à un point d’inflexion important. D’un côté de la courbe, le MDN et les FAC peuvent institutionnaliser les récents changements annoncés cette année, notamment par le biais d’investissements importants promis dans le budget 2021, mais ils ne s’attaqueront pas suffisamment à la culture et, selon toute vraisemblance, ils continueront à faire face à une crise de confiance et laisseront l’inconduite sexuelle comme un problème permanent avec des survivants incapables d’accéder au type de soutien dont ils ont besoin et qu’ils méritent. Ou, de l’autre côté de la courbe, nous pouvons saisir ensemble l’occasion de faire des progrès significatifs et durables.

Notre position est que l’approche que nous avons exposée dans ce rapport sommaire – qui met l’accent sur la nécessité d’entreprendre un engagement plus large, plus holistique, plus inclusif et plus collaboratif – est un pas important vers un meilleur soutien aux survivants. Nous reconnaissons toutefois que l’occasion pourrait facilement être perdue si un leadership approprié n’est pas exercé, si un dialogue et une écoute profonds n’ont pas lieu, et si la communauté dans son ensemble ne parvient pas à s’attendre pleinement à un changement de culture réel et transformateur, et à se mobiliser dans ce sens.

Si cette occasion n’est pas saisie, il en résultera davantage de témoignages comme ceux que nous avons entendus cette année dans des forums publics, notamment dans les journaux, les médias sociaux, les réunions de commissions parlementaires et les conversations privées avec des survivants. Des témoignages de membres des FAC, actuels et anciens, et d’autres personnes qui ont directement vécu de l’inconduite sexuelle. Des témoignages de préjudice, de peur, de confiance brisée, de traumatisme, de blessure morale, de trahison institutionnelle, de blessure spirituelle, de victimisation secondaire par des interventions non soutenues et des représailles, et de carrières brisées. Des témoignages qui ne ressemblent guère aux valeurs exprimées par les FAC.

Principes directeurs

Le GCSS croit qu’il est nécessaire d’appliquer trois principes fondamentaux à l’élaboration d’une stratégie de soutien aux survivants. Les voici :

  • Humilité culturelle
  • Tenant compte des traumatismes
  • Axé sur le survivant

Ces trois principes doivent être compris comme étant transversaux à l’ensemble des thèmes et recommandations clés présentés dans le présent rapport sommaire. Par exemple, une prochaine étape importante consiste à s’engager auprès de divers survivants et intervenants afin de peaufiner les détails d’une stratégie de soutien aux survivants et d’un plan de mise en œuvre. Ce processus, ainsi que tous les autres processus de participation liés à l’inconduite sexuelle au sein des FAC, devraient utiliser les trois principes ci-dessus comme pierre angulaire et comme guide.

Thèmes clés, objectifs et recommandations

Au cours de notre travail, le GCSS a pris connaissance des lacunes et des obstacles qui empêchent les membres des FAC qui ont vécu de l’inconduite sexuelle d’être pleinement soutenus. Sur la base des réunions, des présentations, des discussions et de l’analyse de la recherche sur les pratiques prometteuses en matière de soutien aux survivants, nous partageons, dans ce rapport sommaire : nos observations générales, les domaines d’action prioritaires déterminés (c’est-à-dire les objectifs) et les recommandations.

De manière générale, les objectifs et les recommandations présentés dans ce rapport sommaire peuvent être considérés comme répondant à cinq thèmes clés et sont donc organisés de cette manière. Les principaux thèmes abordés sont les suivants :

  • Engagement, partenariats et recherche;
  • Soutien, notamment pour combler les lacunes en matière de services;
  • Formation;
  • Communication et information;
  • Responsabilité.

Les objectifs inclus ici doivent être discutés et testés en conversation avec de nombreuses autres personnes par le biais d’un processus de participation holistique qui inclut les expériences et l’expertise de divers survivants, défenseurs, EM et membres des FAC de tous les grades.

De même, les objectifs et les recommandations présentés dans ce rapport ne se veulent pas exhaustifs. Le GCSS a exploré de nombreux sujets et questions; ceux-ci ont été notés pour être suivis dans le cadre de travaux ultérieurs visant à élaborer une stratégie de soutien aux survivants. 

Certaines questions soulevées au cours du processus de consultation ont été perçues de différentes manières par les membres du groupe. Ainsi, notre rapport ne représente pas nécessairement l’unanimité de l’opinion de tous les membres sur tous les points. Les questions et les défis posés par l’inconduite sexuelle dans l’armée sont difficiles et complexes, et il faut donc s’attendre à ce que les points de vue sur la façon d’intervenir soient multiples.

Nous abordons également ces recommandations en sachant que les événements récents ont été incroyablement exigeants et difficiles pour de nombreux membres de la communauté des FAC, mais en particulier pour les survivants d’actes d’inconduite sexuelle. Bien que nous ayons cherché à répondre à certaines des préoccupations dans nos recommandations, nous reconnaissons également que la discussion continue d’évoluer autour de nous alors que nous concluons notre travail.

Dans l’ensemble, nos recommandations sont destinées à servir de base à la poursuite du travail d’élaboration d’une stratégie de soutien aux survivants et d’un plan de mise en œuvre pour les membres des FAC affectés par l’inconduite sexuelle.

La nécessité de fonder les efforts sur un changement de culture

Comme nous l’avons déjà mentionné, une observation centrale du travail du GCSS et des recommandations qui en découlent est que les efforts visant à améliorer le soutien aux survivants sont inextricablement liés aux initiatives plus vastes du MDN et des FAC axées sur la sensibilisation et la prévention, le changement de culture organisationnelle, l’accroissement de la diversité des FAC et la lutte contre les comportements haineux, et qu’ils ne peuvent être compartimentés. Toutes ces initiatives ont en commun l’obligation morale d’évoluer vers la compassion, le respect, la dignité et l’inclusion de tous, ainsi que la nécessité de reconnaître que l’objectif ultime doit être de prévenir l’inconduite sexuelle et les autres formes de préjudice. En effet, une observation et une conclusion centrale du GCSS est que le travail d’élaboration d’une stratégie de soutien aux survivants doit être encadré par des initiatives de prévention et de changement de culture en plus d’y être lié, et vice versa. Il n’y a pas de véritable soutien sans prévention et sans changement de culture. Et l’adoption d’approches globales du soutien est une pierre angulaire de la prévention et du changement de culture. Toutes ces initiatives doivent donc être associées dans toute la mesure du possible.

Contexte

Experiences of sexual misconduct in the CAF were publicly brought forward in 1998, and again in 2014, through national reporting in the media. Those reports came with calls for changes to the overall CAF culture, and for improved response and support for those affected.

Des expériences d’inconduite sexuelle au sein des FAC ont été publiquement rapportées en 1998, puis en 2014, par le biais de reportages nationaux dans les médias. Ces rapports ont été accompagnés d’appels à des changements dans la culture générale des FAC et à une amélioration de l’intervention et du soutien aux personnes affectées. L’examen externe de l’inconduite sexuelle et du harcèlement sexuel dans le cadre des FAC a permis de mieux comprendre la nécessité d’améliorer le soutien. L’examen a porté sur les politiques, procédures et programmes des FAC relatifs à l’inconduite sexuelle, y compris leur efficacité. Sur la base d’entrevues approfondies et de groupes de discussion dans lesquels plus de 700 personnes ont été entendues, ainsi que d’un examen des politiques, des programmes et des procédures pertinents des FAC, le rapport final de la Responsable de l’examen externe (REE) [Rapport Deschamps]Note de bas de page 14, publié en mars 2015, a souligné la nécessité de consacrer des ressources, des politiques et des stratégies au soutien des membres affectés. Le rapport Deschamps a :

  • Présenté dix recommandations, qui continuent de jouer un rôle d’orientation aujourd’hui;
  • Conclu que l’inconduite sexuelle au sein des FAC constitue un problème grave;
  • Souligné la nécessité de disposer de ressources, de politiques et de stratégies spécifiques pour soutenir les personnes affectées par l’inconduite sexuelle;
  • Souligné que le soutien doit être complété par des mesures permanentes axées sur le changement de culture, la coordination et le suivi, la responsabilisation, la formation et la sensibilisation, la prévention, la recherche et les données.

L’une des principales conclusions de la REE est qu’il existe une culture sous-jacente de la sexualisation au sein des FAC. Cette culture est hostile aux femmes et aux personnes 2SLGBTQ+ et propice aux incidents plus graves que sont le harcèlement sexuel et l’agression sexuelle. Le Rapport Deschamps a affirmé l’importance de renforcer le soutien aux membres affectés par l’inconduite sexuelle, par exemple en créant un centre indépendant des FAC pour recevoir les rapports d’inconduite sexuelle et fournir un soutien, en simplifiant et en rationalisant les processus de signalement, et en améliorant les processus d’enquête et l’intervention globale pour les personnes affectées.

La réponse initiale des FAC à l’Examen, le plan d’action des FAC d’avril 2015Note de bas de page 15, incluait le soutien aux membres affectés par l’inconduite sexuelle comme l’un des quatre grands axes, avec la compréhension de l’inconduite sexuelle au sein des FAC, la réponse efficace aux comportements d’inconduite sexuelle et la prévention de ces comportements.

Les efforts connexes en 2015 pour renforcer le soutien comprenaient :

  • Opération HONOUR – Un ordre d’opération qui définit la mission des FAC pour éliminer l’inconduite sexuelle. Relevant du Vice-Chef d’état-major de la défense, la Direction Conduite militaire professionnelle – Opération HONOUR (DCMP-OpH)Note de bas de page 16 était le bureau de première responsabilité des FAC pour l’opération HONOUR, et avait pour mission de mettre en place des efforts de changement institutionnel pour remédier à l’inconduite sexuelle et promouvoir une culture de respect et de dignité pour tous. L’opération HONOUR avait pour principal objectif d’améliorer le soutien aux membres affectés.
  • Le CIIS – Un centre indépendant relevant du SM de la Défense nationale qui fournit des services de soutien confidentiels aux membres des FAC affectés par l’inconduite sexuelle, ainsi que des conseils et des recommandations au MDN et aux FAC sur les politiques et programmes connexes.

Depuis la publication du rapport Deschamps, le message selon lequel le soutien doit être renforcé a été constamment réaffirmé dans des rapports et des études, validé par les recherches et les données disponibles et, surtout, exprimé très clairement par les survivants mêmes d’actes d’inconduite sexuelle.

En 2016, le DCMP-OpHNote de bas de page 17, en coopération avec le CIIS, ainsi que divers intervenants internes et externes, a examiné les services existants et entrepris une analyse comparative des besoins des victimes concernant les services fournis par d’autres (par exemple, les nations alliées, le secteur public et privé canadien), afin de déterminer les principales lacunes en matière de prestation de services. L’analyse a ciblé plusieurs lacunes en ce qui concerne le soutien aux personnes affectées par l’inconduite sexuelle au sein des FAC, notamment :

  • Une capacité limitée à fournir un soutien spécialisé qui réponde aux besoins spécifiques des hommes et des personnes 2SLGBTQ+.
  • Des incohérences et un manque de normalisation dans le niveau de soins et de soutien spécialisés disponibles dans les organismes et les régions du Canada, ainsi que dans le contexte des opérations de déploiement et des affectations à l’extérieur du Canada, y compris un manque d’uniformité dans les normes et la disponibilité des trousses d’examen consécutif à une agression sexuelle.
  • Des options limitées pour rechercher un soutien au sein de la chaîne de commandement sans déclencher d’enquête, dans le contexte du devoir de signaler.
  • Le manque d’autres options de signalement, comme le signalement restreint par des organismes tiers.
  • La continuité limitée des services entre les fournisseurs, en particulier lorsque les membres quittent les FAC.
  • Le manque d’accès à l’aide juridique ou au conseil juridique soutenu par les FAC.
  • Le manque d’options structurées pour le soutien par les pairs au sein des FAC.   

En 2017, le MDN et les FAC ont publié Protection, Sécurité, Engagement : La politique de défense du Canada qui, reconnaissant les lacunes et les défis permanents, a inclus dans ses priorités : « Fournir une gamme complète de services de soutien aux victimes et aux survivants pour les membres des Forces armées canadiennes. »Note de bas de page 18

Et en 2018, un nouvel appel à l’engagement a été formulé dans l’examen du Bureau du vérificateur général sur la réponse des FAC aux comportements sexuels inappropriés (examen du BVG)Note de bas de page 19 qui a examiné les progrès réalisés par les FAC dans l’application de mesures pour répondre à l’inconduite sexuelle, la comprendre et la prévenir, et pour soutenir ceux qui en sont affectés. L’audit a porté sur les membres de la Force régulière et de la Force de réserve des FAC. Tout en reconnaissant les améliorations apportées jusqu’à présent, l’examen a conclu que les FAC n’avaient pas encore pleinement atteint leur objectif dans l’intervention auprès des personnes affectées et dans l’aide apportée, et que certains membres ne se sentent toujours pas en sécurité ou soutenus (voir l’Encadré 2, « Examen 2018 du BVG »). Les principales lacunes concernent les points suivants :

  • Méconnaissances – Il n’existe pas de liste unique et cohérente de services offerts, et plus l’on s’éloigne de la région de la capitale nationale, moins les services offerts sont connus.
  • Coordination – Approche fragmentée du soutien; manque de coordination et de partage de renseignements entre les services; incertitude quant au rôle de certains services (par exemple, s’il s’agit d’un service de soutien ou d’un organisme officiel de signalement des incidents); les personnes affectées doivent consulter plusieurs sources avant de trouver le soutien dont elles ont besoin.
  • Disponibilité et accès – Heures d’ouverture limitées pour certains services; services réduits en fonction du lieu; pas de soutien en personne au CIIS; les applications mobiles des FAC ne sont pas toujours disponibles lors des opérations internationales.
  • Expertise en la matière – Les fournisseurs de services n’avaient pas tous une formation spécialisée suffisante pour répondre aux besoins des personnes affectées par l’inconduite sexuelle.

Encadré 2 – Bilan 2018 du BVG

La principale recommandation du BVG concernant le soutien était que les FAC :

« … devraient établir une approche nationale intégrée de soutien aux victimes pour veiller à répondre entièrement aux besoins de tout militaire qui est victime de comportements sexuels inappropriés. Cette approche devrait garantir un accès à des services et un soutien spécialisé uniformes à tous les militaires, peu importe l’endroit où ils sont déployés. »

Rapport 5 du BVG – Les comportements sexuels inappropriés – Forces armées canadiennes, novembre 2018 (recommandation 5.41)

À la suite de l’examen du BVG, dans le cadre d’un programme de recherche plus vaste visant à soutenir l’opération HONOUR, le Directeur général – Recherche et analyse (Personnel militaire) (DGRAPM) a mené une étude sur le soutien aux victimes au nom de la DCMP-OpH afin de mieux comprendre les expériences des personnes qui ont demandé ou reçu du soutien après avoir été affectées par l’inconduite sexuelle pendant leur service dans les FAC. Le projet de recherche a débuté en 2017 et s’est achevé à la mi-2018. Dans le cadre de cette recherche, 67 membres actifs et retraités de la Force régulière et de la Force de réserve ont été interrogés afin d’explorer leurs expériences vécues en ce qui concerne : les types de soutien qu’ils ont recherchés, tant formels qu’informels; la qualité des soins reçus; et les défis et les lacunes des services disponibles. Bien que la majorité des participants se soient sentis soutenus par au moins un représentant des FAC après avoir été affectés par un acte d’inconduite sexuelle, la plupart des participants ont fait état de nombreuses expériences négatives lors de leur recherche de soutien et ont ressenti un certain degré d’insatisfaction à l’égard de l’intervention des FAC à ces incidents, et du niveau de soins ou de soutien qu’ils ont reçu dans l’ensemble.Note de bas de page 20 Les défis ont été particulièrement notés en ce qui concerne le soutien en milieu de travail et le logement. Un grand nombre des limites dont il est question dans l’étude confirment les résultats précédemment rapportés ailleurs.

Ce contexte général et cet historique sont importants pour comprendre le travail du GCSS.

Depuis l’époque du rapport Deschamps, des changements ont été apportés afin d’améliorer la façon dont : 

  • La chaîne de commandement intervient lors d’incidents;
  • La police militaire et les autorités judiciaires traitent les membres affectés et leurs cas;
  • Les services de soutien spécifiques sont fournis;
  • Les données sont recueillies et les tendances sont suivies.

Un certain nombre d’ordres, de politiques, de directives et d’autres documents fondamentaux ont également été élaborés pour améliorer l’intervention globale en matière d’inconduite sexuelle.

Cependant, d’importantes lacunes et barrières liées au soutien subsistent malgré les nombreuses recommandations formulées dans ces précédents rapports et initiatives visant à lutter contre la culture de sexualisation et genrée au sein des FAC. Le travail du GCSS est axé sur la manière de combler ces lacunes afin de mieux soutenir les survivants d’inconduite sexuelle, et d’intégrer efficacement les points de vue des principaux intervenants.

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