3.0 Maintien des effectifs et attrition au sein des FAC

Le milieu dans lequel nous travaillons change constamment, et nous devons de manière proactive cerner les besoins des membres des FAC et y répondre afin de retenir notre personnel. Les FAC doivent offrir du soutien à nos militaires afin qu’ils puissent réaliser leur plein potentiel et servir tout au long de leur carrière avec honneur et satisfaction dans le cadre de leur service. Le maintien des effectifs consiste également à retenir les bonnes personnes, celles qui soutiennent positivement l’organisation avec leurs compétences, leur éducation, leur engagement et leur dévouement. Nous parlons de maintien des effectifs avec la com­préhension que, même si les FAC ont un bon taux de maintien en poste dans l’ensemble, il y a encore certains groupes démo­graphiques et groupes professionnels pour lesquels des problèmes d’attrition uniques ont été cernés.

Un faible taux d’attrition camoufle l’impact de la perte de quelques militaires dans des capacités clés. Lorsqu’un militaire quitte les FAC, il emporte avec lui des années de connaissances, d’expérience, d’études et de compétences qui ne sont pas faciles à remplacer. Même les militaires ayant moins d’années d’expé­rience représentent la perte d’ensembles uniques de compétences, de connaissances et d’investissements en matière d’instruction lorsqu’ils choisissent de quitter les FAC. Les militaires qui pos­sèdent les compétences techniques, cognitives, sociales et de leadership nécessaires pour mener à bien la mission des FAC doivent être choisis, formés et promus au sein des FAC, et ce, à grands frais. La libération imprévue de personnel, même en faible nombre, peut entraîner des lacunes critiques dans la capa­cité de maintenir les opérations, des lacunes dont la correction peut exiger des années et d’importantes ressources (humaines, matérielles et financières). Cet effet peut être encore plus pro­blématique avec la perte de personnel possédant des compétences et une expertise clé dans des domaines spécialisés, du personnel dont les compétences et les connaissances sont également très recherchées dans la société canadienneFootnote 8.

Malgré l’incidence négative que peut avoir l’attrition, une cer­taine diminution des effectifs est attendue et même souhaitable. Lorsque des militaires qui n’ont pas le rendement escompté ou qui décident qu’une carrière dans les FAC ne leur convient pas sont libérés, des possibilités d’avancement s’ouvrent à de nou­veaux militaires ou à des militaires actuels. De même, lorsque les militaires qui ont servi et contribué aux FAC prennent leur retraite à l’âge de la retraite obligatoire (ARO), des possibilités d’avancement s’ouvrent. Ce déplacement des militaires actuels et l’afflux de recrues sont essentiels à la reconstitution des FAC au fil des ans. Le but de cette stratégie n’est pas d’empêcher toute attrition. C’est plutôt l’attrition malsaine qui pose problème et qui est le centre d’attention de cette stratégie.

  • Attrition malsaine : attrition qui est à la fois évitable (lorsque le militaire choisit de quitter les FAC ou se sent obligé de le faire pour des raisons qui sont sous le contrôle de l’organisa­tion) et dysfonctionnelle (lorsque les militaires qui contribuent autrement partent). 

Toutefois, le seul fait d’examiner les données sur l’attrition ne règle que les problèmes de façon rétroactive. Lutter contre l’at­trition malsaine et soutenir le maintien en poste des membres des FAC exigent que les raisons de leur départ soient étudiées. Quelles ressources doivent exister et être utilisées pour s’assurer que nos militaires reçoivent le soutien nécessaire pour continuer de servir dans les FAC? Les efforts de maintien des effectifs doivent également tenir compte des facteurs déterminants de maintien des effectifs pour une expérience de travail positive. Ces facteurs aident les militaires à demeurer à l’emploi des FAC et peuvent avoir motivé la décision d’un militaire de se joindre aux FAC en premier lieu.

Comprendre le maintien des effectifs — Facteurs déterminants

Selon les recherches en psychologie organisationnelle et en res­sources humaines, les gens qui se sentent appréciés, respectés et soutenus dans leur milieu de travail et qui ont l’impression que leur organisation et leurs leaders se soucient de leur bien-être ont un plus grand engagement envers l’organisation (Allen et Myer, 1990), ont un meilleur rendement (Riketta, 2008), éprouvent une plus grande satisfaction au travail (Riketta et van Dick, 2005) et res­sentent le désir de rester (Allen et Myer, 1990). Lorsque les employés ne se sentent pas inclus, appréciés, respectés ou soutenus, il y a des incidences négatives sur leur bien-être (Hakanen et Schaufeli, 2012) et ils deviennent cyniques et désen­gagés (Rahman et Naz, 2013). De plus, le sentiment de ne pas être apprécié ou d’être sous-évalué est susceptible d’inciter les employés à explo­rer d’autres possibilités d’emploi (Aquino, Tripp et Bies, 2006). D’autres facteurs, comme les qualités personnelles ou la congruence personne-emploi, jouent également un rôle dans le maintien des effectifs et l’attrition. Si une personne se sent incompétente, estime que son travail manque de défis ou n’aime tout simplement pas son travail, elle peut être motivée à partir — même si elle se sent appuyée par l’organisation.

Ces variables et d’autres peuvent être influencées par l’organisa­tion, par ses processus, ses politiques et ses systèmes de soutien, ou par les leaders dans leurs interactions quotidiennes avec les employés. Certains de ces facteurs ont déjà été classés comme étant transactionnels (se rapportant à la rémunération, aux primes et aux avantages et interactions tangibles) ou relationnels (se référant aux relations interpersonnelles où la confiance, les ententes et l’engagement sont établis) (Department of National Defence, Military Personnel Generation, 2009). L’importance et le rôle des leaders dans cet aspect doivent être reconnus, en raison de l’influence considérable qu’ils ont sur l’interprétation des politiques, l’affectation du travail et la promotion d’un milieu de travail positif (ou négatif).

« Même lorsque les employés ressentent un manque de soutien de leur organisation, les leaders jouent un rôle essentiel en atténuant ces effets par des interactions positives avec leurs subordonnés. »

- Audenaert, Vanderstraeten et Buyens (2017)

En incluant le leadership, les facteurs de maintien des effectifs peuvent être regroupés en trois catégories, ce qui aidera à orienter les efforts et à déterminer les domaines d’impact les plus efficaces au moment d’élaborer et de gérer les efforts globaux et ciblés de maintien des effectifs. Ces efforts permettront de régler plus efficacement les problèmes de maintien des effectifs. Selon la littérature, les facteurs clés qui contribuent à la satisfaction glo­bale au travail, à l’engagement organisationnel et au maintien des effectifs et à l’attrition peuvent généralement être répartis dans les catégories suivantes :

  • Organisationnelle (transactionnelle) : y compris la concep­tion des tâches, la culture du milieu de travail, la formation et l’équipement, ainsi que les politiques et les stratégies;
  • Liée au leadership (relationnelle) comprend la promotion d’un milieu d’inclusion, de civilité et de respect; le leadership transformationnel; le soutien des militaires et le maintien de la souplesse et planifier afin de réduire les incidences sur les familles et de réduire les conflits travail-famille; et
  • Personnelle : y compris la congruence personne-emploi, la perception d’équité, le moral, la satisfaction au travail et la détresse psychologique.

Problèmes de maintien des effectifs au sein des groupes sous-représentés

Le faible taux d’attrition de l’ensemble des FAC masque égale­ment la perte de militaires au sein des groupes sous-représentés — de tous ces membres des groupes désignés recrutés, environ la moitié libèreFootnote 9. La perte de ces militaires empêche les FAC de maintenir un bassin de personnel qualifié, tout en perpétuant un manque de représentation aux niveaux supérieurs, ce qui influe également sur les activités de maintien des effectifs et de recrutement. Les problèmes de maintien des effectifs au sein des groupes sous-représentés s’inscrivent généralement dans les caté­gories susmentionnées (organisationnelle, liée au leadership et personnelle), mais il y a des nuances quant aux problèmes qui touchent ces groupes. Les groupes sous représentés font face à des défis plus importants en matière de harcèlement et de dis­crimination que la majorité et peuvent ressentir un manque d’inclusion sur le plan de la cultureFootnote 10 (p. ex., s’attaquer à l’inconduite sexuelle dans les FAC, ainsi qu’aux pratiques cultu­relles dangereusesFootnote 11, à la discrimination envers les peuples autoch­tones et les minorités visibles, et à la discrimination contre les membres de la communauté LGBTQ2+). Ces facteurs doivent être abordés dans le cadre d’initiatives de changement de culture à l’échelle des FAC afin d’avoir un impact durable. Les efforts découlant de la Stratégie de maintien des effectifs doivent éga­lement appuyer ce changement de culture, en veillant à ce que les mesures et les initiatives tiennent pleinement compte des points de vue et des préoccupations des groupes sous-représentés, de sorte que chaque membre des FAC soit appuyé pour s’épanouir et avoir une carrière complète au sein des FAC.

En comprenant mieux l’incidence que l’organisation peut avoir lorsqu’elle apporte des changements à ces variables et en appli­quant ces changements au moyen de mesures et d’initiatives, nous pouvons contribuer à une culture dans laquelle le maintien des effectifs sera un facteur clé au moment d’élaborer des poli­tiques, des processus et des initiatives. Grâce à cette information qui oriente les FAC, l’organisation est mieux préparée à tirer parti des efforts organisationnels existants pour s’assurer que les FAC ne sont pas seulement un milieu de travail auquel les gens veulent se joindre, mais un milieu où les gens veulent rester.

Il y a des secteurs où l’attrition est élevée; et pour régler ce problème, nous devons analyser qui quitte, et pourquoi. Les données liées à l’attrition, complétées par la recherche fournissant des informations sur les expériences de différents groupes, sont inestimables pour l’élaboration d’efforts de maintien des effectifs ciblé. En analysant les données sur l’attrition, on peut déterminer des données démographiques précises comportant des irritants particuliers qui ont une incidence sur l’attrition et élaborer des mesures appropriées pour régler les problèmes cernés.

3.1 L’attrition au sein des FAC

Le taux moyen d’attrition au sein des FAC (Force régulière et Première réserve) se situe généralement entre 8 % et 9 %. Ce taux se compare favorablement à celui du marché du travail cana­dien, tant dans le secteur privé (10,2 %) que dans le secteur public (4,7 %) (Coburn & Cowan, 2019 Note de bas de page 12 . Le taux d’attrition des FAC est également inférieur à celui de bon nombre de nos alliésNote de bas de page 13 . Avec des Statistique aussi positives, pourquoi les FAC ont-elles besoin d’une Stratégie de maintien des effectifs? Ces données cachent des aspects d’attrition malsaine, des aspects qui peuvent avoir une incidence sur l’efficacité avec laquelle les FAC peuvent mener à bien leurs missions, et sur la mesure dans laquelle elles peuvent être vraiment représentatives de la société canadienne. Pour déterminer où il y a un problème d’attrition, nous devons regarder au-delà du nombre global et creuser plus loin. Les recherches des FAC font état de l’attrition selon le nombre d’an­nées de service, le genre, le groupe professionnel et le grade, entre autres facteurs. De façon générale, l’attrition malsaine au sein des FAC peut être constatée chez les recrues au cours de la première année; les militaires ayant de 20 à 25 ans d’expérience; des groupes professionnels particuliers; et les femmes, les Autochtones et les minorités visibles au sein des FACNote de bas de page 14 .

Il est possible de se faire une meilleure idée des personnes qui quittent les FAC en appliquant régulièrement l’optique de l’ana­lyse comparative entre les sexes plus (ACS+) aux données sur l’attrition et en effectuant une analyse intersectionnelle. D’un point de vue démographique général, l’analyse de l’attrition selon le genre et le nombre d’années de service menée par le Directeur général — Recherche et analyse (Personnel militaire) (DGRAPM) révèle déjà que les femmes et les hommes ont généralement des taux d’attrition comparables jusqu’à ce qu’ils aient 20 ans de service. À ce moment-là, le taux d’attrition chez les femmes augmente considérablement, et ce sont surtout des membres de la haute direction qui partent. Si l’on tient compte également des taux d’attrition selon le genre et le groupe professionnel, les groupes professionnels de la logistique, qui, en 2020, comptaient environ 42 % de femmes, ont des taux d’attrition élevésNote de bas de page 15 . Ces éléments d’information devraient être utilisés comme indicateurs de l’endroit et de la façon dont l’analyse peut être menée pour découvrir plus de détails sur les personnes qui quittent les FAC, ce qui nous fournit des cibles potentielles pour les efforts de maintien des effectifs. Bien que des efforts plus vastes à l’appui de l’équité entre les genres aideraient à retenir les femmes dans l’ensemble et, notamment, à soutenir les groupes professionnels où le nombre de femmes est plus élevé, l’analyse intersectionnelle peut également mener à des conclusions qui nécessitent un exa­men plus approfondi. Y a-t-il des groupes professionnels aux­quels les femmes semblent incapables d’accéder ou qu’elles sont plus susceptibles de quitter après y avoir accédé? Si c’est le cas, nous devons nous demander pourquoi cela se produit et quelle est la meilleure façon d’y remédier. Ces types de questions doivent également être posées en tenant compte de l’attrition liée à d’autres populations sous-représentées dans les FAC : Autochtones, minorités visibles, personnes handicapées et membres de la communauté LGBTQ2+. Bien que nous ayons des données sur le taux d’attrition au sein de la plupart des groupes désignés (voir le tableau 1), aucun taux d’attrition n’est déclaré pour les membres de la communauté LGBTQ2+. Les données limitées sont fortement touchées par le processus d’au­to-identification chez les peuples autochtones, les minorités visibles et certains membres des groupes de personnes handica­pées, et limitent encore davantage la façon dont nous pouvons mieux déterminer et cibler les domaines à aborder en matière de maintien des effectifs.

Il est essentiel de cerner clairement les problèmes d’attrition afin d’aborder efficacement le maintien des effectifs à l’avenir, mais ce n’est pas suffisant. Pour cibler efficacement les efforts de main­tien des effectifs et veiller à ce que les facteurs influençant le maintien des effectifs soient correctement appliqués, il est néces­saire d’approfondir l’analyse du « pourquoi ».

Tableau 1: Taux d’attrition moyen par groupe désigné, 2017-2018 à 2019-2020

Taux d’attrition moyen par groupe désigné au sein des FAC, 2017-2018 à 2019-2020

Groupe désigné
Force régulière
Première réserve
Service d’administration et d’instruction des organisations de cadets
Rangers canadiens
Femmes
7,2%
14,3%
6,8%
5,3%
Autochtones
8,7%
19,4%
6,6%
6,5%
Minorités visibles
5,9%
10,6%
4,6%
8,2%
Personnes handicapées
11,1%
13,4%
6,2%
6,7%
Total
7.8%
13.7%
6.8%
5.3%

*Les données comprennent les transferts de catégorie et de sous-catégorie de service.

L’attrition au sein des FAC — Pourquoi?

Le DGRAPM fournit une mine de renseignements sur les FAC, y compris la réalisation et l’analyse de données liées à l’attrition et au maintien des effectifs au moyen du Sondage sur le maintien des effectifs, du Sondage de départ et d’autres études ciblées autonomes, comme des analyses de professions, qui visent à comprendre les facteurs ayant une incidence sur le bien-être des militaires et les facteurs de l’attrition. Au fil des décennies de recherche sur le maintien des effectifs et l’attrition, les facteurs de mécontentement sont demeurés en grande partie les mêmes, à savoir l’insatisfaction au travail, l’incidence du mode de vie militaire sur les conjoints et les enfants, l’insatisfaction profes­sionnelle, le manque d’avancement professionnel et l’insatisfac­tion à l’égard de la haute direction.

Lorsque l’analyse est divisée en données démographiques, il y a des indicateurs pour les groupes et les facteurs qui nécessitent une analyse plus poussée en vue d’appuyer l’élaboration d’efforts de maintien des effectifs ciblés. L’analyse des données du Sondage sur le maintien des effectifs (Cheng, Myers, Musolino, Yeung et Eren, 2020) a révélé qu’il y avait peu de différences importantes entre les hommes et les femmes quant à leur intention de quitter les FAC. Lorsqu’il y a des différences, l’analyse indique que les femmes ont tendance à être plus satisfaites des normes indivi­duelles d’entraînement au combat, des effets de l’affectation sur la famille, de la rémunération et des avantages sociaux, et du leadership organisationnel que les hommes. Cependant, l’analyse des réponses ouvertes à la question « énumère et discute des aspects qui préoccupent le plus un militaire » a révélé des diffé­rences. Dans ce cas, certainesFootnote 16 femmes ont plus souvent signalé leur insatisfaction à l’égard d’éléments comme l’avancement, la promotion, les rapports d’appréciation du personnel, la forma­tion et le perfectionnement, la charge et les demandes liées au travail, l’inefficacité organisationnelle et le manque de transpa­rence et d’équité en ce qui concerne le groupe professionnel que leurs homologues masculins.

Le DGRAPM mène également des études ciblées sur les groupes professionnels afin de déterminer les facteurs particuliers qui influent sur le maintien en poste et l’attrition, et mène actuel­lement le Projet Horizon — une étude longitudinale des pre­mières expériences des recrues des FAC au début de leur carrière visant à mieux comprendre l’engagement en début de carrière, le maintien en poste et l’attrition. Ces études fournissent des renseignements précieux, mais il faut poursuivre le travail afin de recueillir ou de regrouper régulièrement de l’information qui permettrait la ventilation et l’analyse des enjeux pour tous les sous-groupes de membres des FAC. L’analyse du Sondage sur le maintien des effectifs de 2019 comprenait une suggestion visant à mener plus d’études qualitatives au moyen d’entrevues et de groupes de discussion afin de dresser un portrait plus clair des enjeux. Une telle analyse peut mener à la découverte de pro­blèmes qui n’avaient pas été pris en compte auparavant. Cela pourrait mener à une enquête sur des questions qui ne sont pas actuellement couvertes et permettre de les examiner d’un point de vue stratégique.

Les groupes sous-représentés dans les données du Sondage sur le maintien des effectifs et du Sondage de départ

Ces deux sondages permettent aux militaires de s’auto-identifier comme membres de groupes sous représentés, mais le taux d’auto-identification des groupes sous-représentés dans ces son­dages est assez faible, limitant notre connaissance des facteurs de mécontentement en matière de maintien des effectifs propres à ces groupes. Il est donc difficile de tirer des conclusions qui peuvent être généralisées aux groupes sous représentés et qui peuvent être abordées efficacement dans le cadre de la Stratégie de maintien des effectifs. À ce titre, et comme il a été mentionné précédemment, les résultats ne sont pas ventilés par groupes sous-représentés, à l’exception des femmes dans les FAC. Pour remédier à ce manque de données, une des principales préoccu­pations consiste à étudier la façon de recueillir une plus grande quantité de renseignements sur les groupes sous représentés et de les analyser plus fréquemment. Cela pourrait être possible grâce à des activités de sensibilisation ciblées pour la réponse à l’enquête, à des options de réponse plus précises ou à des analyses supplémentaires via des groupes de discussion et des entrevues. Il faut aborder cette question en tenant compte du fait que les répondants peuvent hésiter à fournir de l’information. Ils peuvent craindre des répercussions sur leur vie professionnelle ou leur carrière, ou simplement ne pas être prêts à discuter de la question dans un cadre officiel. Cela peut être particulièrement vrai pour les victimes de discrimination ou de harcèlement. Il est essentiel que les militaires se sentent en sécurité lorsqu’ils communiquent de l’information, et que les données et les ren­seignements soient recueillis auprès de diverses sources si les données des sondages ne sont pas disponibles ou que l’on ne peut pas mener de sondage. Cela nous permettra d’acquérir une meilleure compréhension et de créer de meilleures mesures pour appuyer nos militaires et les efforts de changement de culture en cours d’élaboration.

En ce qui concerne les raisons générales pour lesquelles les membres des groupes sous-représentés quittent les FAC, il y a des problèmes comme la discrimination et le harcèlement, les obstacles à l’emploi et le manque d’inclusion. De vastes chan­gements culturels sont nécessaires pour s’attaquer efficacement à la majorité de ces problèmes — comme l’inconduite, le racisme, la discrimination et l’inclusion — et peuvent être appuyés adéquatement par l’application de l’ACS+ au début de l’élaboration des plans d’action pour la Stratégie de maintien des effectifs. Nous devons veiller à ce que la Stratégie de maintien des effectifs s’harmonise avec d’autres stratégies et développe­ments en matière de changement de culture de façon à ce que nos futurs efforts appuient la résolution des problèmes systé­miques (comme la discrimination, le harcèlement et les préju­gés). Dans d’autres cas, il y a des aspects qui peuvent être abordés spécifiquement dans le cadre du maintien des effectifs, par exemple, les femmes qui indiquent qu’il y a un manque de détails, de transparence et d’exactitude dans l’information qu’elles reçoivent au sujet de l’instruction (p. ex., entraînement physique). Pour les autres groupes, une analyse supplémentaire est nécessaire pour cerner les problèmes précis. Toutefois, le harcèlement et la discrimination sont considérés comme des problèmes considérables pour les Autochtones, les minorités visibles, les membres de la communauté LGBTQ2+ et les per­sonnes handicapées. Les efforts de maintien des effectifs ciblés doivent tenir compte des besoins et des préoccupations de ces sous-groupes afin de s’assurer qu’on y répond efficacement.

La Force de réserve

Il faut également tenir compte de l’attrition par élément consti­tutif lorsqu’on examine les données sur l’attrition et le maintien des effectifs. Bien que le taux global d’attrition des FAC soit assez faible, lorsqu’on le répartit entre la Force de réserveFootnote 17 et la Force régulière, il y a une différence marquée : le taux d’attrition de la Première réserve est presque le double de celui de la Force régulière, soit environ 15 %Footnote 18 par rapport à 8‑9 %, tandis que le taux d’attrition des Rangers canadiens est de 4,8 % et celui du personnel du Service d’administration et d’instruction des organisations de cadets (SAIOC) (9 %) est comparable ou supé­rieur à celui de la Force régulièreFootnote 19. Toutefois, l’attrition dans la Force de réserve peut être attribuable à des facteurs différents de ceux de la Force régulière – par exemple, les réservistes de l’Armée de terre sont en partie des étudiants qui peuvent quitter la Force de réserve pour travailler à temps plein ou être mutés dans la Force régulière.

De façon générale, les facteurs de mécontentement sont sem­blables pour les deux éléments constitutifs, la Première réserve et le SAIOC indiquant également les préoccupations liées à la famille, le manque d’occasions et les obligations civiles comme raisons de quitter les FAC (Pearce, 2020; Butler, Eren, Bremner et Budgell, 2013)Footnote 20. Cependant, il est important de voir l’attri­tion de la Force de réserve sous un angle différent de celui de la Force régulière. Bien qu’il y ait des raisons semblables pour quitter les FAC entre les membres de la Force régulière et de la Force de réserve, les facteurs qui influencent la décision des membres de la Force de réserve de quitter les FAC peuvent différer de ceux d’un membre de la Force régulière. Comme il a été recommandé pour les données sur les membres de la Force régulière, une collecte et une analyse plus approfondies et plus détaillées des données sur l’attrition au sein de la Force de réserve permettront de brosser un tableau plus clair des problèmes d’attrition et de la meilleure façon de cibler les efforts de main­tien des effectifs. Cela permettra non seulement d’élaborer des efforts de maintien des effectifs plus efficaces pour la Force de réserve, mais aussi de reconnaître les détails qui démontrent les différences au sein des facteurs de mécontentement semblables à l’égard des vastes efforts dans l’ensemble des FAC; il veille à ce que les préoccupations au sein de la Force de réserve soient entendues et puissent être traitées de façon appropriée afin d’avoir la meilleure occasion de retenir les réservistes.

Prochaines étapes

Il est impératif que les FAC utilisent efficacement les données dont elles disposent au niveau stratégique. Les FAC ont la chance de disposer d’une multitude de données recueillies dans le cadre du Sondage sur le maintien des effectifs et du Sondage de départ, en plus de recherches considérables fournissant des renseigne­ments sur les expériences des membres des FAC et les facteurs qui influent sur le maintien des effectifs. Dans de nombreux cas, ces données peuvent être jumelées à de l’information sur l’état matrimonial, l’âge, le genre, la première langue officielle, le grade, etc., qui devrait être prise en compte au moment d’élaborer des plans et des initiatives de maintien des effectifs. Une répartition démographique supplémentaire et une analyse intersectionnelle des « raisons du départ » donneront une meilleure idée des per­sonnes le plus susceptibles de quitter les FAC et pourquoiFootnote 21. La prise en compte des différents groupes professionnels et carac­téristiques démographiques à différents niveaux permettra de découvrir les secteurs où les efforts de maintien des effectifs donneront les résultats les plus efficaces et les plus percutants. Une analyse plus poussée au moyen d’autres méthodes d’étude, comme des groupes de discus­sion, des entrevues et des études longitudinales, nous permettra de mieux comprendre ce qui est à l’origine de l’attrition. Cela nous permettra d’obtenir des détails sur les raisons pour les­quelles les militaires quittent les FAC, ou envisagent de le faire, ce qui nous permettra de mieux appliquer les facteurs qui influencent le maintien en poste et l’élaboration subsé­quente des efforts de maintien des effectifs.

Les raisons de l’attrition et du maintien des effectifs diffèrent selon l’éventail des personnes qui composent les FAC. Nous devons puiser dans diverses sources de données et intégrer différentes méthodes pour obtenir une image complète de l’espace du problème et développer de meilleures solutions aux problèmes identifiés.

En plus d’effectuer une analyse intersectionnelle, nous devons examiner attentivement ce qui est demandé dans les sondages et d’autres études et chercher des occasions d’obtenir plus de renseignements sur le maintien des effectifs, en mettant l’accent sur les nouveaux enjeux qui ont une incidence sur les membres des FAC et leurs familles. Bien que les données soient considérablement ventilées (grade, genre, années de service, état matrimonial), le Sondage sur le maintien des effectifs et le Sondage de départ ne répartissent pas les résultats selon que les militaires sont Autochtones, membres d’une minorité visible, handicapés, ni ne cernent les problèmes de harcèlement, bien que la question soit posée dans les sondages. Ces renseignements doivent être pris en compte dans le cadre des efforts de maintien des effectifs, à l’appui des mesures actuelles des FAC, comme la Stratégie pour les Autochtones, la Politique sur la conduite haineuse et la modification du Règlement sur la prévention du harcèlement et de la violence en milieu de travail (projet de loi C-65). De plus, il ne faut pas oublier que les données recueillies auprès des militaires sont volontaires et que, par conséquent, la disponibilité de l’information dépend de la volonté de ces der-niers de la fournir. Cela peut présenter des défis sous forme de faibles taux de réponse, en particulier de la part des militaires représentant de petits groupes démographiques qui sont plus souvent appelés à donner leurs points de vue au moyen de sondages et de groupes de discussion. Malgré cette difficulté, des options doivent être envisagées et étudiées quant à la façon d’obtenir des données pertinentes afin de mieux les utiliser dans des mesures de maintien des effectifs efficaces. Ces options devraient inclure des communications plus fortes et plus fréquentes sur l’objet et l’utilisation des recherches et l’importance de la mobilisation de tous les intervenants, y compris les militaires.

Les FAC regroupent des communautés qui ont des expériences, des pressions et des cheminements de carrière différents. L’expérience d’un cyberopérateur et son modèle de maintien des effectifs diffèrent radicalement de celle d’un soldat d’infanterie, tout comme celle d’un réserviste diffère de celle d’un membre de la Force régulière. De même, les pressions et les exigences qui ont une incidence sur le maintien des effectifs seront propres à chaque communauté. Par conséquent, les objectifs et les cibles de maintien des effectifs pour les groupes professionnels ou les caractéristiques démographiques doivent être propres à chaque communauté. L’accent mis sur le comportement de groupe est essentiel à la réussite des programmes de maintien des effectifs ciblés. Les décisions individuelles de rester ou de quitter les FAC sont prises en fonction de facteurs locaux. Toutefois, les pressions qui poussent à l’attrition au sein de certaines communautés, qu’il s’agisse de groupes démographiques ou de groupes profes­sionnels, varient et nécessitent des approches uniques au niveau des groupes.

3.2 Efforts actuels

Les sources existantes comme l’Examen annuel des groupes pro­fessionnels militaires (EAGPM) et le niveau préférentiel de dotation (NPD) constitueront une partie importante des efforts globaux de maintien des effectifs, dans la mesure où les résultats de ces activités aideront à orienter les activités de maintien des effectifs – à déterminer où il peut y avoir des problèmes et un examen approfondi est nécessaire. De tels programmes et pro­cessus feront partie du vaste réseau d’information nécessaire au maintien efficace des effectifs. À l’heure actuelle, ces processus guident les efforts de production et de formation du personnel et permettent de cerner les groupes professionnels qui connaissent des pénuries opérationnelles. En plus de ces processus, il y a les mesures actuelles relatives à la collecte et à l’analyse des données qui fournissent des renseignements sur le maintien des effectifs – par exemple, les données sur l’attrition, les Sondages sur le maintien des effectifs et de départ, et les analyses de répartition par groupe professionnel. D’autres activités fonctionnent déjà dans le domaine du maintien des effectifs et, à ce titre, la com­munication et l’harmonisation avec ces activités sont essentielles pour faire progresser une approche globale et unifiée. Il s’agit notamment de l’offre des FAC, qui fournit un inventaire des programmes concernant la rémunération ainsi que les avantages sociaux et la conciliation travail-famille, et plus particulièrement le cheminement de carrière évolutif, un modèle d’emploi des FAC conçu pour améliorer la capacité des militaires à se déplacer entre la Force régulière et la Force de réserve, vers une transition harmonieuse entre éléments constitutifs. Le cadre du chemine­ment de carrière évolutif est conçu pour offrir aux militaires un accès équitable aux multiples possibilités d’emploi professionnel au sein des FAC. Une fois terminé, le cadre du cheminement de carrière évolutif fournira un soutien considérable aux efforts de maintien des effectifs, car il tirera parti des connaissances, des compétences, des habiletés et d’autres attributs communs à tous les groupes professionnels des FAC, tout en reconnaissant que leur capacité, leur situation familiale ou leurs intérêts peuvent changer au fil du temps. L’achèvement du cadre du cheminement de carrière évolutif constituera une étape importante et un élé­ment clé pour appuyer les efforts de maintien des effectifs à plus grande échelle.

Toujours en développement, l’offre des FAC incarne la philosophie selon laquelle les membres des FAC apportent une contribution unique à la profession des armes ; que les membres servent dans des conditions uniques ; et qu’il y a un impact distinct de la vie du service sur leurs familles. L’offre des FAC représente l’établissement, le maintien et l’adaptation d’un ensemble de programmes, de politiques et de pratiques, garantissant que tous les membres et leurs familles sont reconnus de manière appropriée pour leur contribution à la nation. La philosophie, ainsi que ses principes directeurs et son cadre ont été approuvés en juin 2021.

Un succès supplémentaire a été obtenu dans le développement et la publication prochaine du Guide interactif de l’Offre des FAC : un portail en ligne avec lequel les membres peuvent consulter toutes les politiques, programmes, pratiques et autres éléments de l’Offre des FAC. Sa sortie est prévue début 2022.

La Stratégie de maintien des effectifs reconnaît le travail considérable qui se fait déjà pour éclairer les processus de RH afin d’améliorer le sort des membres des FAC. Des efforts considérables ont été déployés pour fournir des services exemplaires aux membres des FAC. La stratégie vise à tirer parti de ces efforts existants, à fournir une vision stratégique globale des données connexes et à tenir compte du maintien des effectifs dans le cadre de l’élaboration collaborative des stratégies, des initiatives, des programmes et des processus en cours et à venir, de sorte à prendre en considération les facteurs de mécontentement cernés. De plus, elle fournira l’orientation nécessaire à l’intégration des outils permettant de déterminer de façon préventive les nouveaux facteurs de mécontentement et de régler les facteurs de mécontentement récurrents qui peuvent entraîner une attrition malsaine.

La Stratégie de maintien des effectifs constituera un complément au travail déjà effectué, en encourageant une plus grande harmonisation entre les efforts nouveaux et existants et en donnant la possibilité d’élaborer de nouvelles initiatives ou de nouveaux programmes au besoin, afin de mieux s’attaquer à l’attrition malsaine.

3.2.1 Stratégies, programmes et processus (en cours et en cours d’élaboration)

Il y a de nombreuses initiatives au sein des FAC qui s’harmo­nisent avec l’approche de la Stratégie de maintien des effectifs, dont certaines peuvent avoir une incidence considérable et évi­dente sur les facteurs d’influence du maintien des effectifs. D’autres sont peut-être plus indirectes ou subtiles, mais tout autant précieuses pour leur incidence sur les facteurs de maintien des effectifs – les possibilités de maintien des effectifs des membres des FAC se trouvent dans chaque interaction entre le militaire et l’organisation. Les projets, les initiatives et les pro­cessus qui visent à améliorer cette expérience font des FAC un meilleur milieu de travail et contribuent à améliorer les taux de maintien des effectifs dans l’ensemble des FAC, tant dans les groupes démographiques et les groupes professionnels ciblés que dans l’ensemble de l’organisation. Le tableau ci-dessous présente une liste non exhaustive de ces initiatives.

Grâce au travail de collaboration de la Stratégie de maintien des effectifs et aux diverses mesures en vigueur ou en cours d’élabo­ration, l’organisation sera en mesure d’obtenir une approche globale de maintien des effectifs, ainsi que de soutenir et d’orien­ter les efforts de maintien des effectifs ciblés.

Tableau 2: Exemples des initiatives actuelles appuyant le maintien des effectifs (en cours ou en cours d’élaboration)Footnote 22

  • Symposiums des leaders de la Défense
  • Stratégie pour les Autochtones
  • Cheminement de carrière évolutif
  • Mon guide de transition
  • Modernisation de l’évaluation et de la reconnaissance des acquis (ERA).
  • Emplois d’été à temps plein (PSE 81)
  • Programme de dédommagement des employeurs de réservistes
  • Stratégie de santé globale et de mieux être
  • Canada sans faille
  • Équilibre : la Stratégie de performance physique des FAC
  • Site Web Transition de carrière pour les militaires
  • Opération EXPÉRIENCE
  • Stratégie des RH des FAC
  • Études des analyses de professions
  • Plan d’équité en matière d’emploi 
  • Chef, Conduite professionnelle et culture
  • Directive conjointe relative à l’ACS+ et mise en oeuvre de l’agenda de la Résolution du Conseil de sécurité des Nations unies sur les Femmes, paix et sécurité (RCSNU FPS)
  • Stratégie de diversité (sera remplacée par le Cadre et plan d’action en matière d’inclusion des FAC)
  • Examen de l’universalité du service
  • Forces armées canadiennes – amélioration de l’accréditation, certifications et équivalences (FAC-ACE)
  • Plan exhaustif des services aux familles des militaires
  • Réseau pour l’emploi des conjoints des militaires
  • Opération GÉNÉRATION
  • Examen des principes de base des récompenses militaires totales (l’Offre des FAC)
  • Renouvellement de l’Éthos des FAC : Digne de confiance pour servir
  • Stratégie de modernisation de l’Armée canadienne
  • Programme d’aide aux réservistes 

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