2.0 Où nous en sommes : investir dans le personnel militaire de valeur
2.1 Le paysage stratégique
Deux grandes considérations stratégiques éclairent la Stratégie de maintien des effectifs et influeront sur sa mise en oeuvre, soit le contexte opérationnel actuel et futur, ainsi que les dépenses institutionnelles et les pressions sur les ressources créées par l’attrition. Les FAC doivent être en mesure de maintenir une main-d’oeuvre qualifiée dans un large éventail de capacités tout en répondant aux besoins dans les groupes professionnels essentiels qui font face à des pénuries. Pour mieux répondre aux besoins actuels ou aux lacunes en matière de capacité, comme il est indiqué dans la politique PSE, les rapports de l’ombudsman, d’autres stratégies de RH et les ordonnances connexes du CEMD, les FAC doivent cerner et aborder les aspects du milieu de travail des FAC qui ont une incidence négative sur le maintien des effectifs. Les FAC se sont engagées à investir dans une stratégie pour élaborer, mettre en oeuvre et maintenir l’environnement, les systèmes et les processus de façon appropriée à tous les niveaux de l’organisation. Une telle mesure est essentielle à la santé institutionnelle collective parce que les capacités des FAC souffrent lorsque des militaires essentiels sont obligés de quitter des FAC en raison de facteurs organisationnels comme des politiques désuètes ou le manque de souplesse de notre système de gestion du personnel militaire.
Les recherches sur l’attrition et le maintien des effectifs des FAC au cours des trois dernières décennies ont montré que les facteurs de mécontentement liés à l’attrition n’ont en grande partie pas changé. Il s’agit notamment de facteurs comme l’insatisfaction au travail, l’instabilité géographique, le manque d’avancement professionnel, les affectations indésirables et l’insatisfaction à l’égard de la haute direction. En 2009, une Stratégie de maintien des effectifs a été élaborée avec un certain nombre d’initiatives visant à tenir compte des facteurs d’attrition, y compris le recrutement et la sélection, la formation de base, la gestion de carrière et de l’emploi, la fréquence de déploiement du personnel, l’équilibre entre la carrière et la famille et le leadership. Dans deux rapports distincts publiés en 2016 (Bureau du vérificateur général du Canada, 2016a; 2016b), la vérificatrice générale (VG) du Canada a constaté que, même si l’attrition globale est demeurée faible, les unités de la Réserve de l’Armée ont eu de la difficulté à retenir leurs soldats entraînés, ainsi que « divers groupes professionnels étaient en sous-effectif depuis de nombreuses années en raison de difficultés au chapitre du recrutement, de la formation et du maintien des effectifs. » (Bureau du vérificateur général du Canada . 2016b, p. 12). Les rapports recommandaient que les FAC conçoivent et mettent en oeuvre une stratégie de maintien des effectifs pour la Réserve de l’Armée de terre et qu’elles élaborent, mettent en oeuvre, surveillent et évaluent des mesures pour optimiser le maintien des effectifs de chaque groupe professionnel. La vérificatrice générale a constaté que, bien que des mesures aient été prises à l’égard de certains aspects, la stratégie de 2009 n’avait pas été entièrement mise en oeuvre. Depuis 2014, un certain nombre d’initiatives ont été mises en oeuvre, y compris une révision de la stratégie de 2009, un appel à des outils de maintien des effectifs et des politiques de RH révisées, une nouvelle stratégie de recrutement et de maintien des effectifs propre aux Services de santé des Forces canadiennes (SSFC), à l’opération EXPÉRIENCE (une initiative de maintien des effectifs propre à l’aviation) et l’initiative « Renforcer la Réserve de l’Armée » (Bureau du vérificateur général du Canada, 2016a)Footnote 4.
Le futur contexte opérationnel est complexe et difficile. La montée des adversaires qui possèdent des capacités économiques et technologiques, l’urbanisation croissante et la létalité et la complexité toujours croissantes des armes se conjuguent pour modifier l’aspect humain de la guerre. Le contexte opérationnel futur envisagé par les FAC en est un où les compétences et les capacités humaines demeurent la clé du succès sur le champ de bataille, qu’il soit virtuel, conventionnel ou mené dans de complexes environnements maritimes, aériens et terrestres contestés. En même temps, les ressources nécessaires pour recruter et former le personnel des FAC sont limitées et doivent être soigneusement préservées. L’attrition, de façon générale, a une incidence sur la souplesse institutionnelle en consommant des ressources et en formant du personnel inutilement.
Pour appuyer les nouvelles approches qui découleront de la Conception de la structure des forces en présenceFootnote 5, il est urgent de concentrer les efforts sur les pénuries opérationnelles nouvelles et émergentes tout en fonctionnant dans un contexte où les ressources sont limitées et où chaque ressource de formation est essentielle. Les militaires expérimentés sont l’épine dorsale des FAC — ils représentent un investissement énorme en formation et en perfectionnement des compétences, et ils offrent une expérience et des connaissances inestimables à l’appui des opérations des FAC. Bien que les recrues soient bien sûr essentielles pour les FAC, s’attendre à ce que le recrutement de nouveaux membres du personnel compense entièrement la perte de militaires d’expérience est une invitation à des dépenses plus élevées, à de plus grandes demandes de ressources pour l’instruction et, plus important encore, la perte de l’expertise et des connaissances qui ont déjà été cultivées. Cet équilibre entre la nécessité de combler les pénuries opérationnelles face aux contraintes de ressources façonne l’approche et la perspective de la Stratégie de maintien des effectifs.
Groupes sous-représentés (femmes, Autochtones, minorités visibles, personnes LGBTQ2+ et personnes handicapéesFootnote 6)
Les FAC doivent refléter la société canadienne en devenant une communauté de plus en plus diversifiée et inclusive, une communauté qui améliore les opérations en reconnaissant la valeur des expériences et des antécédents uniques de chacun. Bien que les efforts de maintien des effectifs dans le cadre de la Stratégie soutiendront tous les membres des FAC, il faut également tenir compte des problèmes de maintien des effectifs qui touchent les groupes sous-représentés, car leurs expériences peuvent aider à cerner différents domaines ou ajouter des nuances aux diverses approches des efforts de maintien des effectifs. Aux fins de la présente Stratégie, le terme « sous-représenté » désigne les personnes sous-représentées dans les données, les groupes professionnels et l’ensemble des FAC (femmes, Autochtones, minorités visibles, personnes handicapées et personnes LGBTQ2+). Les FAC ont actuellement établi des objectifs de représentation pour les femmes, les Autochtones et les minorités visibles (taux de représentation de 25,1 %, 3,5 % et 11 %, respectivement) pour 2026. Cependant, les taux de représentation actuels ne sont pas à la hauteur de ces objectifs. Cependant, les FAC n’ont pas établi de cibles pour les personnes LGBTQ2+ ou les personnes handicapées.
Les efforts de maintien des effectifs doi-vent parler à tous les membres des FAC, s’assurer que les FAC reflètent la société canadienne et soutiennent les FAC en étant un environnement plus accueillant et inclusif pour tous nos membres.
En ce qui concerne le maintien des ef-fectifs, il est crucial de collecter des données pour mieux répondre aux pré-occupations des populations sous-représentées dans les FAC.
Selon Statistique Canada (2021e), les lesbiennes, les gais et les bisexuels représentent environ 3,3 % de la population canadienneFootnote 7. Nous pouvons nous attendre à ce que ce nombre augmente à mesure que le Canada devient un pays plus ouvert et inclusif et que les gens se sentiront plus à l’aise de révéler leur véritable identité. Par conséquent, nous pouvons également nous attendre à une augmentation du nombre de recrues qui s’identifient comme membres de la communauté LGBTQ2+. Bien qu’il n’ait pas été déterminé si des objectifs de représentation seront établis pour ce groupe en particulier, nous devons veiller à ce que les FAC soient un espace accueillant et inclusif de sorte que les personnes LGBTQ2+ soient acceptées, en sécurité et encouragées à se joindre aux FAC et à y faire carrière. Enfin, les personnes handicapées sont également identifiées comme faisant partie de nos groupes sous-représentés dans la Stratégie de maintien des effectifs. Les personnes handicapées comprennent non seulement les incapacités physiques, mais aussi mentales, sensorielles, d’apprentissage ou psychiatriques. Les FAC ont l’obligation de prendre des mesures d’adaptation pour les personnes handicapées afin de s’assurer que les militaires et les postulants sont en mesure de servir pendant qu’ils sont encore assujettis à l’universalité du service. Les FAC ont également la responsabilité de veiller à ce que les blessures soient évitées dans la mesure du possible et que les militaires qui subissent une blessure ou une incapacité — mentale ou physique — liée à leur service puissent recevoir les soins appropriés. Les données relatives aux facteurs de mécontentement concernant l’attrition et le maintien en poste des personnes handicapées sont limitées et doivent faire l’objet d’une enquête plus approfondie. Comme pour les autres groupes, il faut recueillir des données et effectuer des recherches supplémentaires pour appuyer efficacement les personnes handicapées et veiller à ce que celles qui sont en mesure de servir dans les FAC puissent le faire tout au long de leur carrière.
Bien que la Loi sur l’équité en matière d’emploi (LÉME) impose une exigence législative pour lutter contre la sous-représentation des personnes dans les groupes désignés (femmes, peuples autochtones, minorités visibles, personnes handicapées et LGBTQ2+), les FAC s’engagent à aller au-delà des paramètres de la LÉME. Bien que ni les personnes LGBTQ2+, ni les personnes handicapées ne soient identifiées comme faisant partie d’un groupe désigné au sein des FAC, la Stratégie de maintien des effectifs reconnaît que ces groupes restent sous-représentés dans les données connexes et fournit une orientation pour résoudre ce problème et mieux servir nos membres.
Les FAC sont déterminées à inclure tous leurs membres actuels et futurs. Pour être inclusives, les FAC doivent reconnaître que les groupes sous-représentés au sein des FAC font face à des défis uniques ou disparates pendant leur service. Ces défis peuvent comprendre un risque accru d’être victime d’inconduite, de harcèlement, de discrimination, d’obstacles à la progression et/ ou de sentiments d’appartenance ou d’aliénation différents selon le niveau d’inclusion en milieu de travail. À l’heure actuelle, de vastes efforts sont déployés pour changer la culture des FAC afin de mieux appuyer et refléter les besoins de tous ceux qui souhaitent servir. Il incombe à l’organisation d’évaluer les facteurs qui influent sur l’attrition et le maintien en poste des membres des groupes sous représentés afin de s’assurer que les divers groupes de personnes qui forment les FAC sont adéquatement pris en compte dans l’élaboration des plans de maintien des effectifs. Ce faisant, les FAC renforceront leur effectif et amélioreront l’attraction et le maintien en poste de militaires diversifiés.
Stratégies en cours et en développement pour résoudre ces problèmes:
- La voie vers la dignité et le respect : La Stratégie d’intervention des Forces armées canadiennes en matière d’inconduite sexuelle
- Le Centre d’intervention sur l’inconduite sexuelle
- La stratégie des RH des FAC
- Stratégie de santé globale et de bien-être de l’Équipe de la Défense
- Programme de gestion intégrée des conflits et des plaintes (GICP)
- Code de valeurs et d’éthique du MDN et des FC
- L’Éthos des Forces armées canadiennes : Digne de confiance pour servir
- Prévention du harcèlement et de la violence dans le lieu de travail (projet de loi C-65)
- Conduite haineuse (DOAD 5019-0, Manquement à la conduite et au rendement et Instruction du personnel militaire des FC)
En développement :
- Chef, Conduite professionnelle et culture
- Stratégie d’inclusion des FAC 2020, alias Stratégie de diversité et inclusion
- Code de conduite professionnelle militaire – Document conceptuel
Changement de culture (inconduite sexuelle, conduite haineuse, discrimination, harcèlement et violence, injustice en matière d’emploi et abus de pouvoir)
La culture est une force motrice clé pour un maintien des effectifs efficace. La culture des FAC ne reflète pas actuellement une compréhension et un respect des valeurs et de l’éthique des FAC. Cela comprend la reconnaissance du fait que l’inclusion, l’égalité et la diversité doivent être encouragées afin de maximiser l’efficacité opérationnelle. De plus, des taux inacceptables de harcèlement, de discrimination et d’inconduite sexuelle menacent la création d’un environnement véritablement inclusif. Récemment, un appel a été lancé pour que les FAC subissent un changement de culture important afin d’éliminer le harcèlement, la discrimination et l’inconduite sexuelle et d’embrasser la diversité et les valeurs du Canada, où les membres se sentiront en sécurité, valorisés et accueillis. Nous reconnaissons qu’à la lumière de la crise actuelle, la confiance dans les leaders de l’Équipe de la Défense a été affectée négativement et doit donc être rétablie. Nous reconnaissons également que les membres des FAC ont déjà fait part de leur insatisfaction à l’égard de la haute direction via le sondage sur le maintien des effectifs des FAC, ce qui en fait un problème de longue date. Pour éradiquer les comportements et pratiques inacceptables et veiller à ce que les barrières systémiques et les conduites inappropriées soient démantelées, les FAC ont mis en place une nouvelle organisation de niveau 1 – le Chef, conduite professionnelle et culture (CCPC) – pour aider à combler ces lacunes critiques. La mission du CCPC sera « d’aligner la culture et la conduite professionnelle de la Défense sur les valeurs fondamentales et les principes éthiques que nous aspirons à défendre en tant qu’institution nationale ». La vision globale est que « les FAC feront continuellement progresser leur culture et leur gouvernance pour mieux incarner les valeurs et l’éthique professionnelles partagées qui embrassent la diversité et les valeurs du Canada, où tous les membres s’épanouissent dans une institution digne, équitable, respectueuse et inclusive, tout en continuant à fournir et soutenir l’excellence opérationnelle. » (Ministère de la Défense nationale, 2021). À la lumière de cela, la Stratégie de maintien des effectifs elle-même est conçue pour être l’un des nombreux catalyseurs du changement de culture. Grâce à une gouvernance efficace, un maintien des effectifs ciblé, des mesures à prendre par la suite et d’autres efforts, la stratégie soutiendra une culture dans laquelle les membres peuvent s’épanouir dans des carrières enrichissantes, où les FAC représenteront un employeur de choix en tant qu’institution respectueuse et inclusive.
COVID-19 — Une occasion d’apprentissage sur le maintien des effectifs dans le contexte d’événements mondiaux
La pandémie de COVID-19 offre une occasion unique d’envisager les mesures et la souplesse nécessaires pour assurer le maintien des effectifs dans le contexte d’événements de grande envergure qui ont des incidences sur la santé et l’économie nationales et mondiales. La pandémie de COVID-19 a eu des répercussions partout au pays et dans le monde. Partout au Canada, la COVID-19 a eu une incidence considérable sur la santé physique et mentale des gens, ainsi que sur l’économie en raison des confinements d’urgence, des ordonnances de quarantaine et des fermetures d’entreprises. On ne connaît pas encore toutes les conséquences de la pandémie, mais les FAC devraient être prêtes à ressentir les vastes incidences de cette pandémie mondiale pour les années à venir, que ce soit sur le plan économique, pour la population canadienne ou les membres des FAC.
Les effets de la pandémie sur les Canadiens nous encouragent à jeter un regard critique sur la meilleure façon dont les FAC peuvent soutenir les militaires en temps de crise. Comme il a été mentionné dans le discours du Trône de 2020, les femmes ont été particulièrement affectées par la pandémie de COVID-19, principalement en raison des pertes d’emplois attribuables aux fermetures dans les industries de services au public. De plus, les femmes ont réduit le temps passé au travail, quitté entièrement leur travail et/ou ne cherchent pas à retourner sur le marché du travail en raison du manque d’options de soins pour personnes à charge ou d’autres considérations financières. En outre, les femmes étaient plus souvent les principales dispensatrices de soins pour les personnes à charge et étaient responsables de la majorité des tâches à la maison, sans égard à leur situation d’emploi (Statistique Canada, 2021c). L’ONU Femmes (tel que cité dans Statistique Canada, 2020i) affirme que la répartition inégale des tâches à la maison et dans la société a une incidence sur la participation au marché du travail, la qualité de l’emploi, ainsi que sur les facteurs de stress pour la santé physique et mentale des femmes. La répartition inéquitable du travail (Statistique Canada, 2021d) contribue, en partie, à l’ensemble actuel de données probantes selon lesquelles les personnes qui ont des enfants, et les femmes en particulier, subissent des répercussions beaucoup plus importantes sur la santé mentale liée à la pandémie que celles qui n’ont pas d’enfants et les hommes (Centre for Addiction and Mental Health, 2020; Statistique Canada, 2020e). Les nombreux facteurs déterminants susmentionnés pourraient faire en sorte qu’il soit plus difficile pour une femme de continuer à travailler malgré des intérêts concurrents comme les responsabilités familiales ou sociales. Si les questions intersectionnelles ne sont pas délibérément étudiées, et atténuées selon le cas, les femmes pourraient être confrontées de façon répétée à des facteurs de pression plus importants en période de turbulence, ce qui contribue à de moins bons résultats en matière de maintien des effectifs.
D’autres groupes au sein de la société canadienne peuvent également être touchés par la pandémie différemment des autres, ou plus fortement que la moyenne. Bien qu’il n’y ait pas encore d’ensemble de données particulier lié à la COVID-19, pour certains groupes, nous pouvons déduire des données antérieures et connexes des incidences possibles. Par exemple, les Canadiens s’identifiant comme membre de la communauté LGBTQ2+ sont principalement composés de sous-groupes (c.‑à‑d. une tranche d’âge plus jeune et une identité de genre autre que masculine) qui sont particulièrement touchés par des facteurs comme la perte d’emploi et/ou le manque de logement sécuritaire, ce qui entraîne un risque accru d’itinérance et des expériences accrues de harcèlement et/ou de discrimination (Statistique Canada, 2020j). Comme les personnes LGBTQ2+, les Autochtones (Statistique Canada, 2020a), les personnes handicapées et certains groupes de minorités visibles (Statistique Canada, 2020d) sont touchés de façon disproportionnée par les turbulences économiques, certains de ces groupes ayant des taux de chômage plus élevés ou des heures réduites pendant la pandémie que la moyenne nationale. Cela ajoute à l’incidence potentielle de la COVID-19, car ces groupes ont tendance à connaître des taux de pauvreté plus élevés, une plus grande probabilité de travailler dans des postes de services au public ou d’avoir des problèmes de santé préexistants. Tous ces facteurs augmentent le risque de résultats négatifs disproportionnés découlant de la pandémie de COVID-19, qu’ils soient financiers, physiques ou liés à la santé mentale. De plus, les personnes LGBTQ2+ (Statistique Canada, 2020j), les membres de la population autochtone (Statistique Canada, 2020c; 2020g), les groupes de minorités visibles et les personnes handicapées (Statistique Canada, 2020g) étaient plus susceptibles de faire l’objet d’une discrimination accrue, ainsi que de signaler une augmentation des symptômes de mauvaise santé mentale pendant la pandémie.
Lorsque l’on examine les incidences possibles sur nos propres militaires et la façon dont de tels événements peuvent avoir une incidence sur les efforts de maintien des effectifs, il est avantageux de faire preuve de prévoyance pour mieux prévoir les problèmes potentiels et préparer des solutions. Un manque soudain de services de garde peut causer un stress imprévu pour les familles des militaires, et la diversité au niveau de la composition des familles ou des obligations familiales n’aura pas une incidence égale sur chaque famille. L’un ou l’autre des parents peut devoir prendre la décision de quitter les FAC en raison d’un manque prolongé de services de garde ou lorsqu’ils sont confrontés aux besoins émergents de leurs enfants pendant la pandémie. Compte tenu des conclusions du discours du Trône et de la prévalence de la mention du « soutien à la famille » comme préoccupation dans le plus récent Sondage sur le maintien des effectifs, il est peut-être plus probable que les femmes en uniforme assument le rôle de dispensatrice de soins primaires, choisissant de quitter les FAC pour une période indéterminée. De nouvelles données probantes indiquent qu’une souplesse accrue en milieu de travail, un soutien familial et des ressources en santé mentale pourraient être nécessaires pour les militaires qui font partie de groupes touchés de façon disproportionnée, ou dont la famille comprend des minorités visibles, des Autochtones, des personnes LGBTQ2+ et des personnes handicapées.
La pandémie met également en évidence les groupes professionnels qui peuvent avoir besoin d’un soutien supplémentaire en raison de leurs rôles essentiels, comme ceux des services de santé qui font déjà face à des difficultés de maintien des effectifs ou de dotation. De plus, le risque d’exposition auquel le personnel des FAC en déploiement peut faire face dans l’exercice de ses fonctions (c.-à-d. une présence maintenue dans les foyers de soins de longue durée) et les complications pour la santé découlant de la COVID-19, met le MDN et les FAC au défi d’examiner de nouveau la protection des membres des FAC face à cette menace, ainsi que le soutien subséquent des personnes qui tombent malades et qui peuvent être incapables de servir dans les mêmes fonctions après leur rétablissement. Étant donné que les membres des FAC et leurs familles passent un temps sans précédent à domicile, et reconnaissant que les circonstances de vie individuelles peuvent présenter des risques supplémentaires en raison d’un confinement prolongé ou de relations malsaines, il faut reconnaître que les membres des FAC et leurs familles peuvent émerger de la pandémie avec des besoins imprévus. Le fait de ne pas reconnaître le risque que nos militaires prennent maintenant à la maison, les répercussions sur leur santé mentale et physique, ou les options limitées pour ceux qui seront touchés par la maladie plus tard, pourrait entraîner la perte prématurée de membres des FAC pour mener à bien la prochaine mission.
Ces exemples montrent comment les événements mondiaux, dans ce cas-ci une pandémie, peuvent affecter les membres et les opérations des FAC en général de façons nouvelles et difficiles. Les FAC ont apporté des ajustements aux efforts existants pour mieux fournir un soutien aux membres en ces temps sans précédent, tels que l’offre de cours de conditionnement physique en ligne ; conseiller les membres sur le Programme d’aide aux membres des FC et, bien sûr, utiliser de nouvelles conditions de travail à l’aide de solutions de travail numériques avec des réunions virtuelles et des vérifications régulières du personnel. Une analyse plus poussée sera nécessaire pour étudier la myriade de façons dont la COVID-19 influera sur les gens, et la façon dont les résultats pourraient être extrapolés à d’autres événements mondiaux. La réflexion stratégique des leaders et la communication claire des facteurs de stress opérationnels à venir et des mesures d’atténuation possibles seront essentielles pour que les FAC puissent accomplir leur mission et leurs tâches dans ces circonstances exceptionnelles.
Attentes post-pandémiques
En plus d’examiner comment les FAC sont touchées et réagissent aux événements mondiaux majeurs, nous devons réfléchir aux nouvelles attentes de nos militaires, alors que le monde et le Canada passent à une « nouvelle normalité ». La COVID-19 a eu un impact considérable sur la gestion organisationnelle et la continuité des activités, obligeant les organisations à adopter de nouvelles approches pour mener leurs activités et exécuter leur mandat tout en soutenant les mesures de santé publique locales et régionales. Au sein du MDN, et en particulier dans la région de la capitale nationale, de nombreux employés et militaires ont pu utiliser des régimes de travail de rechange, comme le travail à domicile, les horaires alternatifs ou moins habituels, et l’utilisation de technologies pour collaborer avec des collègues et faire progresser les tâches. Bien qu’il y ait eu des obstacles à surmonter dans les premières étapes du Plan de continuité des activités, le travail à domicile et d’autres régimes de travail de rechange se sont avérés efficaces pour permettre de répondre aux besoins personnels d’un certain nombre d’employés et de militaires, ainsi que pour faire progresser le travail de façon nouvelle et créative. La souplesse des modalités de travail que la pandémie a encouragé et l’efficacité avec laquelle le MDN a utilisé ces modalités, même en plus grand nombre que jamais auparavant, font que cette souplesse pourrait devenir un facteur plus important pour les employés et les militaires actuels et nouveaux. Ce n’est qu’un exemple des changements mis en oeuvre pour faire face aux contraintes de la pandémie. D’autres changements pourraient inclure des mesures sanitaires accrues dans tout le Canada, telles que la réduction de la capacité d’accueil, le port de masques dans les espaces clos et l’encouragement à rester à la maison dès l’apparition de symptômes afin de réduire l’infection par la COVID-19. Les mesures de santé publique accrues ont également eu une incidence considérable sur la transmission du virus le plus commun de la grippe (Agence de la santé publique du Canada, 2020), offrant ainsi d’autres avantages pour la santé. L’impact positif de ces mesures sur la santé de nos militaires et de nos employés peut être une considération valable pour maintenir et améliorer un milieu de travail sain pour tous ceux qui travaillent au sein du MDN et des FAC.
Pour ce qui est de l’avenir, les solutions à des problèmes complexes et individuels doivent être complètes, mais souples. Les solutions doivent tenir compte des incidences futures des événements actuels ainsi que des incidences potentielles des mesures que nous prenons, et rechercher des efficacités potentielles entre les stratégies, les programmes et les autorités responsables afin d’aborder au mieux les questions et les préoccupations qui ont une incidence sur le maintien des effectifs. Les solutions proposées doivent répondre aux besoins de l’organisation et des membres des FAC, tout en permettant l’identification et le ciblage de groupes professionnels, de grades, de données démographiques, de qualifications et de compétences en particulier. La Stratégie de maintien des effectifs n’est pas une solution unique à tous les problèmes de maintien des effectifs et d’attrition, mais elle fournit plutôt une méthodologie pour appuyer un engagement ciblé, soutenu et en évolution sur les questions de maintien des effectifs. La stratégie exige une évaluation régulière et continue, afin de cerner les faits nouveaux qui ont une incidence ainsi que les nouvelles tendances, de sorte que les décisions et les mesures de suivi puissent être prises plus rapidement et de façon uniforme.
2.2 La voie à suivre : une approche holistique
La société canadienne est en constante évolution, ce qui signifie que les données démographiques, ainsi que les perspectives et les valeurs des Canadiens, ont changé et continueront de changer. Compte tenu de ces changements et de l’incidence des influences mondiales sur les besoins militaires à venir, la façon dont les FAC s’acquittent de leur mandat évoluera également. Les changements de politiques internes et externes auront une incidence sur la façon dont les militaires sont employés dans les FAC, et nos efforts pour retenir nos militaires de valeur doivent emboîter le pas. Les domaines qui influencent le maintien des effectifs ont une grande portée et se retrouvent à chaque étape du parcours d’un militaire tout au long de sa carrière. Ainsi, la seule façon de progresser est d’adopter une vision holistique du maintien des effectifs. Une vision holistique tient compte à la fois du milieu de travail et du contexte personnel pour cerner les domaines dans lesquels réside l’insatisfaction et ceux qui ont le potentiel de devenir une préoccupation future. Elle prend en compte les efforts organisationnels dans l’évaluation des activités de maintien des effectifs, la promotion des valeurs et des services des FAC, la prévention de l’attrition par des mesures proactives, et les efforts ultérieurs pour soutenir les mesures de maintien des effectifs lorsque les militaires choisissent de partir. Cette approche permettra aux FAC de s’attaquer aux facteurs qui influencent le maintien des effectifs de leurs membres, où qu’ils se trouvent.
La valeur et la nécessité de retenir les talents se répercutent sur chaque élément de la mise sur pied, de l’emploi et de la gestion de la force. Du recrutement à l’emploi en passant par la formation, l’accent mis sur le maintien des capacités, de l’expérience et des talents adéquats a un impact sur le succès de l’institution.
L’interrelation du maintien des effectifs
Le maintien des effectifs est le résultat de multiples facteurs interreliés qui influent sur l’ensemble de l’espace des ressources humaines. D’autres initiatives et efforts stratégiques auront une incidence sur les éléments de maintien des effectifs, et en tant que telle, la Stratégie de maintien des effectifs doit travailler en collaboration et en étant consciente du travail effectué dans ces domaines et dans d’autres domaines connexes :
- La stratégie des RH des FAC
- L’offre des FAC
- La Stratégie de santé globale et de bien-être
- Le Plan global pour les familles des militaires
- Le Plan d’équité en matière d’emploi
- Et d’autres initiatives, bureaux et efforts connexes
Le maintien des effectifs est le résultat de multiples facteurs transversaux qui influencent l’ensemble des ressources humaines. L’importance du maintien des effectifs, et son impact sur tous les aspects des FAC, signifient que la responsabilité du maintien des effectifs ne relève pas uniquement de cette stratégie. D’autres initiatives et efforts stratégiques ont un impact sur différents éléments du maintien des effectifs au niveau des individus, des groupes ou des capacités. Il s’agit notamment d’initiatives récentes ou en cours de réalisation, comme :
- La Stratégie des RH des FAC : une stratégie en cours d’élaboration visant à adapter le système de gestion du personnel militaire pour répondre aux exigences du domaine du personnel de l’avenir, en se concentrant sur les besoins institutionnels tout en respectant les aspirations individuelles, en soutenant la réalisation d’initiatives ciblées et en lançant des efforts de collaboration pour modifier les principaux instruments de politique afin de soutenir et de s’aligner sur les objectifs stratégiques;
- La Stratégie de maintien des effectifs est un élément clé du programme de gestion plus vaste décrit dans la Stratégie des RH des FAC, qui tiendra compte de nombreux facteurs institutionnels ayant une incidence sur le développement et le maintien des capacités. Les éléments de maintien des effectifs, comme la gestion des talents et l’amélioration de la culture organisationnelle, sont élaborés et décrits dans cette métastratégie.
- L’Offre des FAC : les politiques, les programmes et les pratiques qui procurent aux membres des FAC des avantages tangibles et intangibles qu’ils perçoivent comme ayant de la valeur en contrepartie de leur contribution aux FAC et à leurs objectifs, y compris toutes les offres monétaires et non monétaires des FAC;
- Le cheminement de carrière évolutif (CCÉ) est le modèle d’emploi des FAC conçu pour offrir une carrière enrichissante aux membres des FAC. Il permet les aspirations personnelles et la gestion de la conciliation travail-vie, tout en assurant l’efficacité opérationnelle;
- La Stratégie de santé globale et de mieux-être : une stratégie élaborée pour créer les conditions nécessaires permettant à nos membres des FAC et aux employés civils de la Défense de mieux équilibrer les demandes concurrentes au travail et à la maison, ce qui se traduit par une productivité et une réussite accrues;
- Le Plan global pour les familles des militaires : comprenant Canada sans faille et Bases des Forces canadiennes Canada, ce plan vise à aider à stabiliser la vie familiale des membres des FAC et de leurs familles qui doivent fréquemment déménager;
- Le Plan d’équité en matière d’emploi : un plan pour appuyer l’exigence législative visant à assurer la création de possibilités d’emploi équitables et surmonter les obstacles systémiques à l’emploi auxquels font face les groupes désignés, ce qui aidera à atteindre les objectifs d’EE des FAC; et
- De nombreux examens et processus qui ont une incidence sur les FAC, comme les analyses de professions, l’examen du processus de réenrôlement et l’examen du processus de recrutement de la Force de réserve.
En plus des activités susmentionnées, le concept de maintien des effectifs est lié et fonctionne en tandem avec le recrutement et une gestion efficace des RH. En nous attaquant aux facteurs qui influent sur les taux d’attrition actuels et en nous attaquant de façon proactive aux facteurs qui pourraient survenir, nous nous assurons que les recrues actuelles et éventuelles sont moins susceptibles d’être touchées par les problèmes auxquels font face les militaires en service aujourd’hui. De plus, la mise en oeuvre de pratiques adéquates de RH qui s’appliquent à l’ensemble des FAC, en dehors de celles qui sont actuellement reconnues comme des problèmes — ou des problèmes potentiels — permet d’offrir un meilleur soutien à nos militaires et d’accroître le maintien des effectifs global. Cela nous donne l’occasion de démontrer aux recrues potentielles que les FAC sont un employeur qui apprécie son personnel, en prend soin et le soutient. De plus, les efforts de maintien des effectifs et de recrutement sont complémentaires. À mesure que nous nous attaquons aux facteurs de maintien des effectifs, nous pouvons mieux appuyer les efforts de recrutement (c.-à-d. si les postulants ont besoin de plus de clarté sur le mode de vie militaire). De plus, au fur et à mesure que de nouvelles personnes se joignent aux FAC, des besoins et des préoccupations différents liés aux facteurs de maintien des effectifs peuvent survenir ou les anciens peuvent se reproduire. Ce faisant, nous devons être prêts à continuellement améliorer la façon dont les FAC interagissent avec les militaires et les soutiennent.
L’attention croissante portée à l’interaction entre les militaires et l’organisation contribue directement à l’établissement d’une culture qui favorise le maintien des effectifs au sein des FAC. La mise en oeuvre du changement au niveau organisationnel aura une incidence sur la culture d’ensemble et abordera les grands enjeux qui ont un effet sur l’attrition au sein des FAC. Cependant, certains groupes clés rapportent constamment des taux d’attrition plus élevés que le reste des FAC. Ces groupes bénéficieront d’une approche plus immédiate et ciblée pour résoudre leurs problèmes d’attrition, tandis que le changement organisationnel global sera un effort à long terme ayant des effets durables.
Une stratégie de maintien des effectifs efficace exige une approche à deux volets. D’une part, les facteurs qui ont une incidence sur les problèmes d’attrition des FAC peuvent être associés à certains groupes professionnels et circonstances personnelles. Par conséquent, le maintien des effectifs ciblé est très pertinent, car il met en évidence les lacunes qui nécessitent actuellement une attention immédiate (et idéalement avant qu’un tel besoin ne se présente) et concentre les efforts sur elles. Parallèlement, les membres des FAC qui partagent leurs points de vue dans le cadre de sondages et de groupes de discussion, qui visent à comprendre les facteurs qui ont une incidence sur le bien-être des militaires et, en fin de compte, les facteurs d’attrition, indiquent régulièrement des facteurs de mécontentement à l’échelle des FAC. La réduction au minimum de la cause ou de la source de ces facteurs de mécontentement aidera à s’attaquer aux causes générales de l’attrition.
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