Évaluation des risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes au Canada 2025 : Rapport
Table des matières
- Résumé
- Introduction
- Chapitre 1 : Contexte de risque au Canada
- Chapitre 2 : Cadre d'atténuation des risques du Canada
- Chapitre 3 : Évaluation des menaces liées au recyclage des produits de la criminalité
- Chapitre 4 : Évaluation des menaces liées au financement des activités terroristes
- Chapitre 5 : Évaluation des vulnérabilités face au recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes
- Annexe A : Méthodologie
- Annexe B : Énoncé sur l'ACS+ et l'inclusion financière
- Annexe C : Suppléments des partenaires du régime canadien de LRPC/FAT
- Annexe D : Liste des principaux acronymes/sigles et abréviations
Résumé
Le Canada dispose d'un régime de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes (LRPC/FAT) solide qui contribue à ses efforts pour lutter contre le crime organisé transnational et qui constitue un élément clé de sa stratégie antiterroriste. Ce régime fédéral est composé de 13 ministères et organismes fédéraux, chacun disposant de mandats en matière de politique, de réglementation, de renseignement et d'application de la loi. Il est le fruit d'une collaboration avec des homologues provinciaux et municipaux et plus de 38 000 entreprises canadiennes ayant des obligations de déclaration en vertu de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes (LRPCFAT), connues sous le nom d'entités déclarantes, afin de prévenir, de détecter et de perturber cette criminalité financière.
L'application d'une approche fondée sur le risque pour lutter contre ces crimes financiers au Canada repose sur une compréhension précise, nuancée et actuelle des risques, éclairée par une évaluation des menaces, des vulnérabilités et des conséquences liées au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes. Cela comprend l'équilibre entre les priorités que sont la protection de l'intégrité du système financier canadien et de la sécurité des Canadiens, le respect de la vie privée et des autres droits des Canadiens, et l'atténuation du fardeau réglementaire et des conséquences imprévues avec lesquelles l'industrie et les clients à qui elle fournit des services doivent composer.
L'Évaluation des risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes au Canada 2025 est une évaluation complète des menaces et des vulnérabilités les plus urgentes en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes au Canada. Elle se penche sur les risques inhérents et discute des mesures d'atténuation mises en place pour y répondre. Les constatations sont éclairées par des consultations avec les autorités fédérales et les intervenants externes, y compris les gouvernements provinciaux et territoriaux, le secteur privé, les organismes sans but lucratif et les partenaires internationaux.
Le présent rapport vise à appuyer l'élaboration de politiques, l'affectation des ressources et l'établissement des priorités fondées sur des données probantes pour les autorités publiques, et à aider les entreprises du secteur privé et les organisations non gouvernementales à appliquer des mesures ciblées et proportionnées pour atténuer les risques.
Principales conclusions
- Son économie et son secteur financier forts, ouverts et stables font du Canada un pays source, un pays cible et un pays de transit attrayant pour les produits de la criminalité. Les groupes criminels organisés (GCO) et les tiers facilitateurs sont les principaux acteurs de la menace de recyclage des produits de la criminalité au Canada. La plupart des opérations de recyclage des produits de la criminalité à grande échelle et sophistiquées au Canada font appel à des tiers spécialisés qui fournissent des services de recyclage des produits de la criminalité en échange de commissions, de frais ou d'autres avantages.
- Le trafic de drogues illégales demeure la plus grande menace liée au recyclage des produits de la criminalité au Canada, suivi de la fraude, de la fraude commerciale et du recyclage des produits de la criminalité fondé sur le commerce, et des crimes fiscaux. On estime que ces menaces représentent chacune des milliards de dollars en produits illicites chaque année au Canada. Ces produits sont souvent blanchis à l'aide de méthodes complexes et de facilitateurs sophistiqués. De plus, ces crimes peuvent avoir des effets dévastateurs sur les Canadiens, notamment la perte de vies humaines et de l'insécurité financière. Le jeu illégal, le passage de clandestins, la traite de personnes, le vol qualifié, le vol (y compris le vol d'automobiles), la contrebande transfrontalière, la corruption les rançongiciels et d'autres types d'extorsion demeurent également des menaces importantes liées au recyclage des produits de la criminalité qui causent des préjudices importants aux Canadiens. Collectivement, ces menaces impliquent des GCO et des réseaux de recyclage des produits de la criminalité de portée nationale et internationale.
- Le paysage du financement du terrorisme au Canada demeure en grande partie limité et de faible valeur. La plupart des attaques terroristes au Canada au cours de la dernière décennie ont été perpétrées par des acteurs isolés motivés par des raisons idéologiques. Ces attaques à motivation idéologique étaient caractérisées par un faible niveau de sophistication qui nécessite généralement moins de ressources. Les principaux auteurs de menace étrangers ayant des liens observés avec le financement du terrorisme au Canada sont motivés par des motifs religieux ou politiques. On constate que ces groupes dépendent de sources et de méthodes de financement diversifiées, notamment le financement participatif, les cryptomonnaies, les systèmes informels de transfert de valeur (SITV), l'appui d'un État, le détournement d'organismes à but non lucratif (OBNL) et les activités criminelles.
- Le portrait des vulnérabilités du Canada demeure relativement stable. Les banques d'importance systémique nationale, les sociétés privées, les fiducies expresses, les cryptoactifs et certains types d'entreprises de services monétaires (ESM) sont les secteurs, les structures corporatives et les produits de paiement les plus vulnérables à l'exploitation pour le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. Ils sont très accessibles aux particuliers au Canada et à l'étranger, traitent des volumes de transactions élevés et offrent des délais de traitement rapides. Dans certains cas, ils offrent la possibilité d'effectuer les transactions avec une transparence réduite et des structures complexes qui masquent l'origine et la destination des fonds. Les entreprises qui font affaire avec des personnes politiquement vulnérables, de même que les pays qui ont des cadres de LRPC/FAT faibles ou dans lesquels des entités terroristes inscrites sont réputées exercer leurs activités, peuvent être exposées à des risques plus élevés de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes nécessitant une vigilance accrue.
- La plupart des secteurs à risque élevé, y compris ceux qui offrent des produits et services à risque élevé, sont réglementés par la LRPCFAT, qui exige des mesures de conformité rigoureuses et une vigilance pour prévenir, détecter et signaler les soupçons de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. D'autres secteurs à risque élevé, comme les sociétés et les professionnels du droit, sont également assujettis à des exigences réglementaires fédérales, provinciales ou territoriales ou à des normes professionnelles. Ces mesures d'atténuation contribuent à réduire les vulnérabilités inhérentes au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes.
- La grande majorité des OBNL au Canada présentent peu ou pas de risques quant au recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes, et seulement un petit sous-ensemble entreprend des activités vulnérables aux abus liés au financement des activités terroristes. Ces risques doivent être évalués au cas par cas, en se fondant sur des renseignements crédibles et en tenant compte des mesures d'atténuation. Les OBNL sont assujettis à une surveillance administrative d'ordre fédéral, provincial et territorial, en particulier en ce qui concerne la constitution en société ou le statut fiscal.
- Depuis 2018, le gouvernement a investi près de 470 millions de dollars pour renforcer les ressources de données, le renseignement financier, l'échange d'information et les capacités d'enquête afin d'appuyer les enquêtes sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. Des partenariats public-privé ont été établis pour cibler plusieurs des menaces les plus élevées au Canada en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Le Canada continue d'accorder la priorité à la mise en œuvre de nouvelles mesures visant à renforcer la prévention, la détection et la perturbation du recyclage des produits de la criminalité et du financement des activités terroristes et à contrer les risques persistants et émergents.
- À l'avenir, le gouvernement du Canada surveillera les principales tendances qui devraient façonner le paysage des risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes au pays. L'ingérence étrangère qui cherche à menacer les communautés canadiennes et à miner la souveraineté, les institutions démocratiques et les intérêts nationaux du Canada demeure une préoccupation. La fraude demeure une menace dynamique et croissante que les nouvelles technologies, comme l'intelligence artificielle et la mésinformation/désinformation rendent de plus en plus possible. Il existe également un lien toujours plus étroit entre le crime organisé transnational et le terrorisme, y compris les acteurs terroristes qui tirent parti des réseaux du crime organisé pour obtenir du soutien et les GCO qui peuvent mener des activités terroristes. Le gouvernement du Canada continue d'élaborer des mesures fondées sur le risque pour protéger les Canadiens et le système financier canadien.
Introduction
Le recyclage des produits de la criminalité (RPC) et le financement des activités terroristes (FAT) représentent de graves menaces à la sécurité des Canadiens, ainsi qu'à l'intégrité du système financier canadien.
Le recyclage des produits de la criminalité est à la base de la plupart des activités criminelles au Canada. C'est le processus qu'utilisent les criminels pour convertir ou dissimuler l'origine des produits de la criminalité afin de faire croire qu'ils proviennent de sources légitimes. Il soutient, récompense et perpétue les activités criminelles, comme le trafic de drogues, la traite de personnes, le vol et la fraude, en permettant aux criminels de tirer profit des produits de leurs crimes. Bien qu'il soit difficile de les quantifier en raison de la nature clandestine de ces activités, le Service canadien de renseignements criminels (SCRC) estime qu'entre 45 et 113 milliards de dollarsNote de bas de page 1 sont blanchis chaque année au Canada.
Le financement des activités terroristes, en revanche, consiste en la collecte et la fourniture d'actifs, comme des fonds, provenant de sources légitimes ou illégitimes, au profit ou à l'usage d'un terroriste isolé ou d'un groupe terroriste. Bien que le volume du financement des activités terroristes au Canada soit jugé faible, les conséquences des attaques terroristes meurtrières et destructrices au Canada comme à l'étranger sont graves.
Le gouvernement du Canada s'est engagé à lutter contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. Pour ce faire, le gouvernement du Canada a mis en place un régime fédéral de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes (LRPC/FAT) solide qui est composé de 13 ministères et organismes fédéraux, chacun disposant de mandats connexes en matière de politique, de réglementation, de renseignement et d'application de la loi. Ce régime fédéral fonctionne de concert avec des homologues provinciaux et municipaux et plus de 38 000 entreprises canadiennes ayant des obligations de déclaration en vertu de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes (LRPCFAT), connues sous le nom d'entités déclarantes, afin de prévenir, de détecter et de perturber ces activités illégales.
La compréhension des risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes est un élément fondamental de la Stratégie du Régime canadien de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, qui dresse la liste des mesures prioritaires du gouvernement pour répondre à ces risques et à cet environnement opérationnel en constante évolution tout en améliorant le rendement et les résultats.
L'évaluation nationale des risques inhérents est un élément central d'un cadre plus large pour soutenir un processus continu d'identification, d'évaluation et d'atténuation des risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme au Canada. Ce cadre est résumé à la figure 1.
L'Évaluation des risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes au Canada 2025 (le rapport de 2025) facilite l'adoption d'une approche cohérente fondée sur les risques pour atténuer les risques les plus urgents liés au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada. Il vise à appuyer l'élaboration de politiques fondées sur des données probantes, l'affectation des ressources et l'établissement des priorités opérationnelles par les autorités publiques. Il appuie également l'application de mesures d'atténuation ciblées et proportionnées par le secteur privé, les entreprises et les organismes non gouvernementaux pour lutter contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes.
Le rapport de 2025 intègre des données provenant des activités opérationnelles, du renseignement financier, des entités déclarantes et d'autres parties prenantes. L'évaluation comprend l'analyse de données qualitatives et quantitatives provenant de diverses sources, y compris les observations des organismes responsables de l'application de la loi, des autorités fiscales et frontalières, des renseignements financiers et criminels, des données des secteurs public et privé, ainsi que des connaissances tirées de collaborations internationales.
Cadre canadien d'évaluation des risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme au Canada
Le rapport de 2025 s'appuie sur les évaluations des risques publiées en 2015 et en 2023 pour améliorer l'analyse des menaces et des vulnérabilités inhérentes. Notamment, le rapport de 2025 applique une perspective axée sur le risque résiduel pour mettre en relief les mesures continues que le gouvernement du Canada, les gouvernements provinciaux et territoriaux, les organismes de surveillance, les organismes responsables de l'application de la loi et le secteur privé appliquent pour atténuer les vulnérabilités en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes auxquelles se heurtent des entreprises, professions, structures organisationnelles et produits financiers. Cette analyse supplémentaire aide à contextualiser les menaces et les vulnérabilités inhérentes présentes dans le paysage canadien des risques vis-à-vis des mesures concrètes prises par divers acteurs pour contrôler ces risques.
Le rapport de 2025 donne un aperçu de la situation du risque au Canada avec des renseignements disponibles jusqu'au 31 décembre 2024, sauf indication contraire, et exclut certains renseignements pour des raisons de sécurité nationale. Il est complété par des produits de renseignement stratégique, des évaluations des risques et des orientations axées sur les risques publiés en permanence par les partenaires du régime, comme l'indique plus en détail l'annexe C.
Compte tenu des liens entre le recyclage des produits de la criminalité, le financement des activités terroristes et le contournement des sanctions, ce rapport devrait également être lu conjointement avec l'évaluation du financement de la prolifération et d'autres risques de contournement des sanctions réalisée par le Canada en 2025, qui se penche sur la vulnérabilité du Canada dans ces domaines.
Chapitre 1 : Contexte de risque au Canada
Conséquences du recyclage des produits de la criminalité et du financement des activités terroristes :
Le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes ont de graves conséquences sociales, économiques et politiques (voir le tableau 1). Bien qu'elles puissent impliquer des auteurs et des typologies différents s'agissant des menaces, ces deux activités exploitent l'économie et les systèmes financiers en tirant parti des vulnérabilités qui permettent l'anonymat et l'opacité des transactions.
En fin de compte, les motivations financières sous-tendent les activités liées au crime organisé au Canada, y compris celles liées au trafic de drogues, à la traite de personnes, à la fraude et au vol d'automobiles. Le recyclage des produits de la criminalité est ce qui permet à ces criminels de profiter des produits de leurs crimes, contribuant ainsi à soutenir un large éventail de crimes graves, tant au Canada qu'à l'étranger. Cela pose des risques pour la sécurité et le bien-être financier des Canadiens, tout en nuisant à la réputation de l'économie canadienne et du Canada sur la scène internationale.
Le recyclage des produits de la criminalité peut avoir des conséquences économiques et sociales négatives pour la population canadienne. Il alimente les actgéographique ivités criminelles comme le trafic de fentanyl qui mène à des surdoses d'opioïdes qui dévastent des communautés et des familles partout au pays. Une étude de 2024 de l'Australian Institute of Criminology souligne comment le recyclage des produits de la criminalité peut favoriser la corruption, la concurrence déloyale et des distorsions générales du marché en raison d'activités criminelles ou lorsque les criminels détournent des fonds des victimes vers des actifs intéressants pour le recyclage des produits de la criminalitéNote de bas de page 2. Par exemple, le groupe d'experts sur le recyclage des produits de la criminalité dans le secteur immobilier de la Colombie-Britannique a estimé de manière prudente une augmentation de 5 % du prix des biens immobiliers résidentiels en Colombie-Britannique attribuable au recyclage des produits de la criminalité Note de bas de page 3.
Le recyclage des produits de la criminalité lié à l'évasion fiscale prive les gouvernements de recettes et de capacités de dépense pour les infrastructures, les biens et les services publics. En 2021, Statistique Canada estimait l'activité économique souterraine, à savoir les activités qui échappent aux mesures en raison de leur clandestinité, de leur illégalité ou de leur nature informelle, à 68,5 milliards de dollars, soit 2,7 % du produit intérieur brut (PIB) totalNote de bas de page 4.
Le financement des activités terroristes appuie les activités de groupes extrémistes violents ou terroristes motivés par des questions idéologiques, politiques et religieuses. Les attaques à fort impact ne nécessitent pas forcément de ressources financières considérables. Les conséquences de la violence terroriste peuvent contribuer à un état d'insécurité au pays et à l'étranger, et comprendre la perte de vies humaines, la destruction de biens, un climat de peur et une érosion de la confiance civique chez les Canadiens.
La prospérité, l'intégrité financière et économique et la réputation du Canada sont compromises lorsque des institutions publiques ou privées ne respectent pas des normes professionnelles, éthiques ou juridiques élevées, ou ne luttent pas efficacement contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. Cela peut avoir une incidence sur les décisions d'investissement et la confiance des investisseurs dans le Canada en tant que bon endroit pour faire des affaires, ainsi que sur la position du Canada auprès des principaux partenaires internationaux.
Conséquences sociétales
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Conséquences économiques
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Conséquences politiques
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Contexte intérieur du Canada
Les structures géopolitiques, socioéconomiques, juridiques et de gouvernance d'un pays sont des éléments qui façonnent son contexte national et son paysage de risques. Le Canada a une économie stable et ouverte dotée d'institutions démocratiques solides. Ces caractéristiques font partie des atouts du Canada, mais peuvent également être exploitées par les criminels pour recycler les produits de la criminalité et financer des activités criminelles ou terroristes.
Cadre juridique, géographie et démographie
Au Canada, les pouvoirs législatifs sont répartis entre les deux ordres de gouvernement – fédéral et provincialNote de bas de page 5. Au fédéral, le Parlement du Canada exerce une compétence législative exclusive sur diverses questions, notamment le droit criminel et les procédures pénales, la réglementation du commerce, la monnaie, les banques et les questions d'intérêt national. Il a également compétence pour adopter des lois relatives à la constitution de certaines sociétés. Le régime fédéral de LRPC/FAT est fondé sur des lois de compétence fédérale. Ces lois comprennent notamment le Code criminel du Canada, qui énonce les infractions pénales générales applicables à l'échelle du pays, ainsi que le cadre procédural de base applicable aux poursuites criminelles.
Au niveau provincial, chaque législature provinciale exerce une compétence législative exclusive sur son territoire respectif sur certaines questions, notamment l'administration de la justice pénale et civile, la propriété et les droits civils, la constitution de certaines sociétés et les questions de nature locale. Par conséquent, de nombreuses entreprises et professions vulnérables aux menaces de recyclage de produits de la criminalité et de financement des activités terroristes sont réglementées à l'échelle provinciale, tout en étant assujetties à la réglementation fédérale en matière de LRPC/FAT.
Les poursuites pour la plupart des infractions au Code criminel relèvent des procureurs généraux provinciaux. Le Service des poursuites pénales du Canada (SPPC), au nom du procureur général du Canada, est responsable des poursuites relatives aux infractions criminelles en vertu d'autres lois fédérales, notamment la Loi réglementant certaines drogues et autres substances et la Loi sur le cannabis. Le procureur général du Canada peut également intenter des poursuites pour le recyclage des produits de la criminalité provenant de la perpétration d'infractions qui relèvent de lui, comme pour les infractions de terrorisme et de financement des activités terroristes et certaines infractions liées au crime organisé.
Les services de police sont également une question de responsabilités partagées et de coopération, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et les corps policiers constitués par les provinces (qu'ils soient municipaux ou provinciaux) participant à l'application du droit pénal. Compte tenu de la portée de ses activités nationales, la GRC, dans le cadre de son mandat de la Police fédérale, joue un rôle de premier plan dans la lutte contre les stratagèmes complexes de recyclage de produits de la criminalité et les crimes graves du crime organisé.
Il est donc essentiel d'assurer une coordination étroite entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux sur les questions de LRPC/FAT pour comprendre et atténuer les risques connexes et prendre des mesures d'application de la loi efficaces.
L'étendue géographique du Canada et sa proximité avec les États-Unis, la plus grande économie et le plus grand centre financier du monde, peuvent créer des possibilités d'activités criminelles et de recyclage des produits de la criminalité. En particulier, les liens économiques étroits entre le Canada et les États-Unis, caractérisés par le volume élevé de passagers, de marchandises et de fonds qui traversent la frontière sur une base régulière, sont autant d'occasions que les GCO transnationaux et les blanchisseurs d'argent peuvent exploiter pour transférer des fonds et des valeurs de l'autre côté de la frontière. Le vaste territoire du Canada représente également des difficultés lorsqu'il s'agit de détecter et de perturber les activités criminelles et le mouvement des produits de la criminalité connexes.
Environ 87 % des 41 millions d'habitants du Canada vivent dans les quatre plus grandes provinces du pays : l'Ontario (39 %), le Québec (22 %), la Colombie-Britannique (14 %) et l'Alberta (12 %)Note de bas de page 6. Les trois plus grandes villes du Canada sur le plan démographique – Toronto, Montréal et Vancouver – sont d'importants centres culturels et économiques avec une présence importante dans le secteur financier. Les activités du crime organisé visent souvent les concentrations de population et d'activité économique dans ces régions, y compris la criminalité financière, le vol d'automobiles, les fraudes ciblant certaines communautés de la diaspora et l'exploitation des marchés immobiliers en pleine effervescence. Parallèlement, les nouveaux débouchés économiques dans les régions moins développées du Canada, comme les collectivités nordiques ou plus éloignées du Canada, qui disposent souvent de ressources plus limitées en matière d'application de la loi, peuvent également être exploités par des groupes criminels.
Le Canada favorise une société multiculturelle et diversifiée qui intègre continuellement de nouveaux Canadiens. Selon le Recensement de 2021 de Statistique Canada, 26,4 % de la population est composée de Canadiens de première génération, et la population canadienne englobe plus de 450 origines ethniquesNote de bas de page 7. De nombreux Canadiens ont des liens personnels et financiers étroits avec des communautés partout dans le monde. La Banque mondiale estime qu'en 2023, les Canadiens ont envoyé plus de 8,5 milliards de dollars américains à l'étranger et en ont reçu près de 850 millionsNote de bas de page 8. Ces transferts de fonds sont une source de financement importante et nécessaire à la croissance économique et au développement durables dans de nombreuses régions du monde. Cependant, cette activité peut également être exploitée par des auteurs d'activités menaçantes et illicites. Le Canada a donné la priorité à la promotion de moyens abordables pour envoyer et recevoir de l'argent de l'étranger en les accompagnant de mesures de contrôles en matière de LRPC/FAT.
Économie, commerce et système financier
À la fin de 2023, le Fonds monétaire international (FMI) estimait que le Canada se classait au 10e rang des économies du monde en termes de PIB nominalNote de bas de page 9. Selon Statistique Canada, le commerce international de biens et de services représente plus de 64 % du PIB du CanadaNote de bas de page 10.
Les États-Unis sont le plus grand partenaire commercial du Canada (en 2023, plus de 77 % des exportations de marchandises du Canada étaient destinées aux États-Unis ou les traversaient, et plus de 50 % des importations de marchandises du Canada provenaient des États-Unis)Note de bas de page 11. Environ 51 % des exportations totales de services du Canada ont été destinées aux États-Unis, tandis qu'environ 59 % de ses importations totales de services provenaient des États-UnisNote de bas de page 12. Le Canada s'est classé parmi les cinq principales destinations mondiales pour l'investissement direct étranger (IDE) des États-UnisNote de bas de page 13, tandis que 50 % de l'IDE du Canada est allé aux États-Unis en 2023Note de bas de page 14. Parmi les autres partenaires commerciaux clés, mentionnons l'Union européenne, la Chine, le Mexique, le Japon et le Royaume-Uni, tant pour les exportations que pour les importations de marchandises et de servicesNote de bas de page 15.
Ces échanges commerciaux ouverts et importants du Canada avec des pays du monde entier présentent des vulnérabilités en matière de fraude commerciale et de recyclage des produits de la criminalité fondé sur le commerce. Le gouvernement accroît les ressources et les outils à sa disposition pour combattre ces menaces.
Le Canada dispose d'un système financier vaste et mature, avec 8,3 billions de dollars d'actifs détenus par des institutions financières à la fin de 2023Note de bas de page 16. Selon l'Association des banquiers canadiens, 40 % des actifs des institutions financières sont concentrés dans le secteur bancaire, qui est dominé par six grandes banques d'importance systémique nationale (BISN)Note de bas de page 17 (dont deux sont considérées comme étant d'importance systémique mondiale) qui, au total, détiennent 93 % des actifs bancaires totauxNote de bas de page 18. Le secteur de l'assurance-vie au Canada est également très concentré, les trois plus grands assureurs-vie représentant plus de 70 % du total des primes nettesNote de bas de page 19.
Cryptoactifs et cryptomonnaies
Les cryptoactifs, tels que définis par les Autorités canadiennes en valeurs mobilières, sont des actifs purement numériques utilisant des registres publics sur Internet comme preuve de propriété. Ils ont recours au chiffrement, aux réseaux poste à poste et à une technologie de registres distribués, comme la chaîne de blocs, pour effectuer, vérifier et sécuriser les opérations.Ils peuvent servir de moyen d'échange ou de stockage d'éléments de valeur ou à d'autres fins commerciales.
Il existe différents types de cryptoactifs. L'un de ces types est la cryptomonnaie, qui est une monnaie numérique ou un moyen d'échange qui n'a pas cours légal. Elle peut servir à acheter des produits et des services, ou à des fins spéculatives, notamment pour effectuer des opérations sur une plateforme de négociation de cryptoactifs.
La LRPCFAT et son règlement utilisent le terme « monnaie virtuelle », qui peut englober les cryptoactifs et la cryptomonnaie. Chaque fois que le terme « monnaie virtuelle » est utilisé dans le document, il fait expressément référence au sens qu'il a dans la LRPCFAT et son règlement.
Le Canada a un taux élevé d'inclusion financière, 99,6 % de la population âgée de plus de 15 ans ayant un compte auprès d'une institution financière officielleNote de bas de page 20. L'adoption de la finance numérique, des technologies financières de rechange et des interactions financières virtuelles est en hausse partout au pays, 82 % des internautes canadiens ayant fait appel à des services bancaires en ligne en 2022Note de bas de page 21.
Une étude de 2023 de la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario a révélé que 10 % des Canadiens possédaient des cryptoactifs, et que l'adoption des cryptoactifs au Canada était principalement stimulée par les investisseursNote de bas de page 22.
Compte tenu de la prédominance et de la concentration du secteur financier officiel au Canada, il s'agit d'un domaine d'intérêt important pour les initiatives stratégiques de réglementation et de surveillance en matière de LRPC/FAT, y compris l'adaptation du cadre du Canada pour tenir compte de l'utilisation croissante des nouvelles technologies.
Dynamique de l'argent comptant dans l'économie canadienne
Bien que l'argent comptant demeure largement disponible au Canada, son utilisation a diminué depuis le début des années 2000. Selon Paiements Canada, l'argent comptant avait été utilisé dans 11 % des transactions en 2023. La transaction moyenne en espèces était de 26 $, et l'utilisation de l'argent comptant a diminué de 20 % en termes de volume depuis 2019Note de bas de page 23. Au Canada, l'argent comptant est le plus souvent obtenu dans des guichets automatiques bancaires et utilisé pour des achatsNote de bas de page 24.
L'utilisation d'argent comptant en soi n'indique pas la présence d'activités criminelles. Cependant, certaines caractéristiques propres à l'argent comptant, en particulier son anonymat, peuvent le rendre attrayant pour les blanchisseurs d'argent et les financiers du terrorisme. Par exemple, les crimes motivés par des questions économiques, comme le trafic de drogues ou d'armes à feu, génèrent d'importantes sommes de produits illicites en espèces. L'argent comptant est également utilisé pour transporter d'importantes sommes issues d'activités criminelles, y compris au-delà des frontières internationales.
Les blanchisseurs d'argent peuvent utiliser des transactions en espèces pour convertir les produits de la criminalité en actifs légitimes qui stockent de la valeur et peuvent être vendus, « blanchissant » ainsi de fait les fonds, ou utilisés à des fins personnelles (p. ex., achat de biens immobiliers, de véhicules, de bijoux et d'autres biens ou services).
Pour ces raisons, les particuliers et les entreprises qui effectuent des transactions en espèces substantielles et sans pouvoir expliquer raisonnablement la source de cet argent peuvent présenter des risques élevés de recyclage des produits de la criminalité. Les exigences en matière de déclaration des opérations importantes en espèces aident à atténuer ces risques.
Contexte international
Le Canada est un membre fondateur du Groupe d'action financière (GAFI), l'organisme international de normalisation en matière de LRPC/FAT. Le GAFI publie des listes de pays à haut risque présentant de graves lacunes stratégiques dans la lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et le financement de la prolifération. Le GAFI appelle tous les membres à faire preuve d'une vigilance renforcée et, dans les cas les plus graves, les pays sont appelés à appliquer des contre-mesures afin de protéger le système financier international contre ces juridictions.
Le Canada procède également à ses propres évaluations pour repérer les pays préoccupants en matière de recyclage des produits de la criminalité, de financement des activités terroristes et d'évitement des sanctions qui ne figurent pas sur la liste des pays à haut risque du GAFI. Cela peut inclure les pays intermédiaires qui sont exploités pour contourner les contrôles appliqués aux pays à haut risque; les pays ayant des liens financiers solides avec le Canada qui ont d'importants secteurs bancaires informels ou qui pratiquent le secret bancaire, affichent des niveaux élevés de corruption ou vivent de l'instabilité sociale, économique ou institutionnelle; ou les pays ou les lieux préoccupants selon les intérêts du Canada en matière de sécurité nationale.
Afin de protéger l'intégrité du système financier canadien, le ministre des Finances du Canada peut donner des directives aux entités déclarantes de la LRPCFAT pour qu'elles appliquent des mesures renforcées lorsqu'elles traitent avec des entités étrangères ou des États étrangers à l'échelle nationale et infranationale. Ces directives fournissent au ministre des Finances un mécanisme pour réagir aux risques transfrontaliers émergents en fonction de l'information fournie par les organisations internationales ou les autorités compétentes nationales.
Plus précisément, des directives ministérielles ont été publiées à l'encontre de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) en décembre 2017 et de la République islamique d'Iran en juillet 2020, deux pays qui font l'objet d'un appel à l'action du GAFI. Note de bas de page 25 Une directive ministérielle propre à la Fédération de Russie a été émise en février 2024 en raison de nouvelles préoccupations en matière de recyclage des produits de la criminalité soulevées par le gouvernement du Canada, et appuyée par un bulletin de CANAFENote de bas de page 26. Ces directives ministérielles sont régulièrement révisées et mises à jour en réponse aux risques émergents. Les directives ministérielles sur la Russie et la RPDC ont été mises à jour en mars 2025 en raison des risques croissants associés à ces deux pays, stipulant des mesures supplémentaires à prendre par les entités déclarantes afin de protéger le secteur financier canadien.
CANAFE exige également que ses entités déclarantes soient conscientes des risques et encourage une vigilance accrue à l'égard de la clientèle pour les opérations financières liées au Myanmar, qui fait l'objet d'un appel du GAFI pour que des mesures de vigilance renforcées et fondées sur les risques soient prises.
Les données de CANAFE semblent indiquer que l'ampleur de la connectivité financière entre le Canada et l'Iran et la Russie reste très faible, chaque pays représentant moins d'un pour cent de la valeur de tous les transferts électroniques de fonds internationaux à déclarer à CANAFE au cours d'une année donnée. De plus, il n'y a pas de liens commerciaux ou financiers directs entre le Canada et la RPDC en raison des interdictions complètes en vigueur en vertu des lois canadiennes sur les sanctions. Cependant, l'analyse de CANAFE et de ses partenaires montre que certains acteurs illicites utilisent des administrations intermédiaires pour masquer la source et la destination des fonds et contourner ainsi les exigences et les restrictions canadiennes en matière de déclaration. Ces risques sont abordés plus en détail dans l'évaluation du financement de la prolifération et d'autres risques de contournement des sanctions réalisée par le Canada en 2025.
CANAFE a mis en évidence d'autres pays et lieux préoccupants. On a observé que des blanchisseurs d'argent professionnels chinois exploitent des systèmes bancaires clandestins qui permettent de contourner les contrôles monétaires du gouvernement chinois. Les Émirats arabes unis ont été mis en évidence comme une administration intermédiaire utilisée pour les flux financiers illicites en provenance de la Chine, de Hong Kong et de l'Iran. CANAFE a également observé que la Turquie et les pays de la Communauté des États indépendants sont des administrations intermédiaires pour les stratagèmes de recyclage des produits de la criminalité et d'évitement des sanctions liés à la Russie.
Dans la réalisation d'évaluations pertinentes pour les risques transfrontaliers, CANAFE tire des renseignements sur les enjeux existants et émergents d'un éventail de sources nationales et internationales, ainsi que de rapports du secteur privé.
Tendances émergentes qui façonnent le contexte de risque au Canada
Au Canada, le contexte de risque concernant le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes demeure dynamique et évolutif, influencé par les tendances plus générales touchant la géopolitique, la criminalité, les technologies, la culture et le paysage national et international de la réglementation et de l'application de la loi. Ces tendances et les risques de recyclage des produits de la criminalité connexes continuent d'être surveillés par les partenaires du régime canadien de LRPC/FAT.
Risques émergents liés à l'ingérence étrangère
La désinformation est une information fausse ou manipulée, délibérément diffusée dans l'intention d'induire les autres en erreur par des personnes qui savent qu'elle est fausse.
La mésinformation est une information fausse ou manipulée, diffusée sans l'intention de tromper ou d'induire en erreur.
La Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité (Loi sur le SCRS) définit les « menaces envers la sécurité du Canada » comme des « activités influencées par l'étranger qui touchent le Canada ou s'y déroulent et sont préjudiciables à ses intérêts, et qui sont d'une nature clandestine ou trompeuse ou comportent des menaces envers quiconque ». Ces activités sont communément appelées « ingérence étrangère » et sont presque toujours menées pour favoriser les intérêts d'un État étranger au détriment du Canada. L'ingérence étrangère constitue une menace pour la souveraineté, les institutions démocratiques, les intérêts nationaux et les valeurs du Canada.
Les États étrangers utilisent diverses techniques pour concrétiser leur ingérence, telles que l'incitation, la culture, la coercition, le financement illicite, les cyberactivités malveillantes, la mésinformation/désinformation et l'espionnage. Voici des exemples d'ingérence de la part d'États étrangers ou de ceux qui agissent en leur nom :
- les menaces, le harcèlement ou l'intimidation contre toute personne ou communauté au Canada ou leurs proches à l'étranger;
- le ciblage des fonctionnaires de différentes administrations canadiennes pour influencer les politiques publiques et la prise de décisions d'une manière secrète, trompeuse ou menaçanteNote de bas de page 27.
Les États étrangers qui cherchent à s'ingérer au Canada comptent souvent sur des réseaux d'intermédiaires à l'intérieur du pays pour mener leurs activités. Ces acteurs et leurs intermédiaires peuvent utiliser des ressources financières, obtenues légalement ou illégalement, pour soutenir des méthodes de répression transnationales, comme le harcèlement, l'intimidation, les menaces et la violence.
Les techniques de recyclage des produits de la criminalité sont souvent employées pour masquer l'origine des fonds, généralement fournis par des acteurs étatiques, et leur destination, qui est utilisée pour financer des activités d'ingérence étrangère. Les États étrangers qui cherchent à transférer de l'argent vers des activités d'ingérence étrangère peuvent profiter des réseaux existants, souvent de nature criminelle, pour mettre en commun et blanchir des fonds provenant de différentes sources. Ils peuvent également transférer des fonds à des communautés particulières au Canada, à des organismes religieux ou culturels ou à des personnes politiquement vulnérables qui risquent d'être exploités à des fins de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes.
La GRC a détecté une collaboration entre des acteurs étrangers et des GCO au Canada pour mener des activités d'intimidation et d'autres activités d'ingérence. Ce lien potentiel entre des États hostiles et des GCO transnationaux augmente la menace d'ingérence étrangère.
Bien que cette menace d'ingérence étrangère ne soit pas nouvelle, elle demeure une préoccupation significative à mesure que le monde devient plus concurrentiel et que certains États sont plus disposés à utiliser tous les moyens à leur disposition pour défier la démocratie et l'ordre mondial existantNote de bas de page 28.
Lien entre le crime organisé transnational et le terrorisme
Comme l'a souligné la résolution 2482 des Nations Unies de 2019, il existe un lien croissant entre le terrorisme et le crime organisé transnational, qui crée un lien d'intérêt mutuel. Les terroristes peuvent tirer parti du crime organisé pour leur soutien logistique et pour financer leurs activités par le commerce illicite des ressources naturelles, l'enlèvement contre rançon, l'extorsion et d'autres opérations illégales.
En février 2025, le Canada a inscrit plusieurs GCO transnationaux sur la liste des entités terroristes en raison de leur participation au terrorisme. Ces entités sont des organisations criminelles qui, par leurs activités et leurs opérations, mènent des activités terroristes, y participent ou les facilitent en prenant des otages, en attaquant des infrastructures civiles et essentielles et en s'efforçant de diminuer la capacité des gouvernements locaux de fonctionner efficacement et d'appliquer les lois. Ces groupes ont également utilisé des engins explosifs improvisés pour semer la terreur et intimider les populations locales, notamment en attaquant des routes, en empêchant le passage des forces de l'État et en frappant des cibles spécifiques. De plus, les activités de trafic de drogue de ces groupes menacent la sécurité nationale et doivent être arrêtées à l'aide de tous les outils disponibles.
Technologies nouvelles et en développement
Les progrès technologiques rapides ont eu des répercussions profondes sur l'environnement opérationnel canadien en matière de LRPC/FAT au cours des dernières années. Les technologies continuent de façonner les activités criminelles financières, ainsi que les efforts d'atténuation avancés par les organismes de réglementation et les organismes d'application de la loi canadiens.
L'intelligence artificielle générative est un type d'intelligence artificielle entraînée sur de grands ensembles de données pour produire du contenu comme du texte, des fichiers audio, du code, des vidéos et des images en fonction des éléments saisis par l'utilisateur.
L'informatique quantique combine l'informatique et la physique et fait appel aux principes de la mécanique quantique pour résoudre des problèmes trop complexes pour les ordinateurs ordinaires.
Notamment, l'utilisation abusive de l'intelligence artificielle (IA), et en particulier de l'IA générativeNote de bas de page 29, présente des risques croissants d'exploitation par les criminels et les GCO, qui comptent de plus en plus sur la technologie pour automatiser et améliorer leurs activités illicites. La puissance de l'IA peut être amplifiée lorsqu'elle est associée à d'autres technologies émergentes, comme l'informatique quantique, qui a des capacités potentielles pour permettre un traitement plus rapide et plus précis de données complexes.
D'après le Centre canadien pour la cybersécurité, l'utilisation d'agents conversationnels et de courriels persuasifs générés par l'IA devrait intensifier la fraude et les escroqueries, causant plus de tort aux victimes. Les outils d'IA générative peuvent produire des pièces d'identité contrefaites, lesquelles peuvent être utilisées pour créer des sociétés fictives ou ouvrir des comptes bancaires, contournant ainsi les processus traditionnels de vérification d'identité et aidant encore plus les criminels à mener leurs activités frauduleuses. CANAFE a noté que les groupes extrémistes et les fraudeurs pouvaient utiliser des images générées par l'IA montrant de fausses atteintes aux droits de la personne, zones de conflit ou catastrophes naturelles pour recueillir des fonds. De plus, l'IA générative peut automatiser et masquer les transactions financières, compliquant ainsi la traçabilité pour déterminer l'origine et la destination des fonds illicites.
Malgré ces risques, l'IA offre un potentiel de transformation pour améliorer l'efficacité et l'efficience des efforts de LRPC/FAT. En 2023, CANAFE a proposé une nouvelle vision de modernisation pour lutter contre les menaces émergentes découlant de l'innovation technologique. Cette initiative vise à établir et à améliorer les compétences, les processus et les technologies dont CANAFE a besoin pour détecter et combattre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes en temps réel. Les systèmes d'IA avancés appuient également les fonctions de gestion des risques et de conformité des institutions financières en analysant des données financières complexes, en détectant des tendances anormales et en recensant des indicateurs potentiels de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristesNote de bas de page 30.
L'essor de la finance décentralisée (FiDé) démontre également un potentiel d'impact sur l'environnement opérationnel en évolution de LRCP/FAT. La FiDé est un terme général pour désigner un système financier basé sur Internet qui utilise la technologie de la chaîne de blocs pour permettre d'effectuer des transactions directement entre deux personnes, sans intermédiaire. Les plateformes de FiDé négocient exclusivement des cryptoactifs et peuvent héberger des versions virtuelles de produits et services financiers traditionnels, comme des prêts, des options et des produits dérivés.
Les plateformes de FiDé fonctionnent en ligne et jouissent donc d'une portée mondiale, permettant des transferts transfrontaliers anonymes et rapides, souvent sans suivre les processus de vérification d'identité et de vigilance à propos de la clientèle qu'appliquent généralement les intermédiaires financiers traditionnels, comme les banques, les ESM ou les bourses. Par conséquent, les criminels transnationaux utilisent de plus en plus les cryptoactifs et les plateformes de FiDé pour déplacer des fonds illicites et éviter de déclencher des obligations en matière de LRPC/FATNote de bas de page 31.
Stéréotypes, préjugés et discours en ligne
Les médias sociaux et Internet ont le pouvoir d'amplifier l'information et la mésinformation/désinformation à des vitesses sans précédent. Les gouvernements, les organismes d'application de la loi et le secteur privé doivent demeurer vigilants quant aux conséquences potentielles de la mésinformation/désinformation, des stéréotypes et des préjugés implicites lorsqu'ils recueillent et analysent des renseignements pour évaluer les risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Les communautés autochtones, racisées et religieuses minoritaires au Canada sont plus à risque de stéréotypes négatifs et de préjugés.
Les hypothèses stéréotypées alimentées par des représentations partiales ou incomplètes de certains groupes, races ou religions sont particulièrement problématiques, car elles peuvent fausser la perception et surestimer le risque que représentent certains clients ou secteurs par rapport aux menaces réelles de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Cela peut contribuer à réduire les risques ou à limiter l'accès aux services financiers à des communautés ou à des secteurs entiers qui peuvent ensuite se tourner vers des canaux financiers informels ou non réglementés qui sont encore plus vulnérables aux risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Un solide processus de vigilance et d'évaluation des risques à l'égard de la clientèle devrait s'appuyer sur des renseignements crédibles, fondés sur des données probantes et corroborées ainsi que sur des analyses objectives pour contrer la mésinformation/désinformation et les préjugés.
Évolution du paysage de l'application de la réglementation
Alors que le Canada adapte en permanence son cadre de LRPC/FAT et les mesures de surveillance et d'application de la loi aux risques évolutifs dans ce domaine, les auteurs de menaces continuent de transformer leurs méthodes et leurs techniques relatives au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes. Les acteurs illicites peuvent rechercher des secteurs non réglementés (ou sous-réglementés), comme ceux qui ne sont pas couverts par la LRPC/FAT ou qui ne sont pas assujettis à des exigences en matière de LRPC/FAT, afin d'exploiter les lacunes en matière de réglementation et d'application.
Par exemple, à mesure que des registres de propriété effective sont établis et mis en place au Canada et ailleurs dans le monde, les acteurs illicites peuvent chercher des juridictions où les exigences de transparence en matière de propriété des entreprises sont moins strictes. Une transparence accrue dans certains pays aidera les autorités à démêler les structures d'entreprise complexes souvent exploitées par les auteurs de menace et les blanchisseurs d'argent tiers. Cependant, les pays qui affichent une transparence moindre peuvent devenir plus vulnérables aux menaces de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes.
Chapitre 2 : Cadre d'atténuation des risques du Canada
Le Canada dispose d'un régime de LRPC/FAT complet qui fournit une approche coordonnée pour atténuer les risques inhérents au recyclage des produits de la criminalité et au financement du terrorisme recensés dans cette évaluation et pour combattre les crimes financiers plus largement. Ce régime complète également le travail des organismes d'application de la loi et de renseignement engagés dans la lutte contre le crime organisé national et transnational et le terrorisme.
Le régime de LRPC/FAT est composé de 13 partenaires fédéraux, dont l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), l'Agence du revenu du Canada (ARC), le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), le ministère des Finances, le Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE), Affaires mondiales Canada (AMC), Innovation, Sciences et Développement économique Canada (ISDE), le ministère de la Justice, le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF), le Service des poursuites pénales du Canada (SPPC), Sécurité publique Canada, Services publics et Approvisionnement Canada (SPAC) et la Gendarmerie royale du Canada (GRC).
Le régime canadien de LRPC/FAT repose sur trois piliers interdépendants : (i) politique et coordination; (ii) prévention et détection; et (iii) enquête, poursuites et perturbation.
Piliers du régime canadien de LRPC/FAT
i. Politique et coordination
Le premier pilier comprend le cadre stratégique et législatif du régime ainsi que sa coordination nationale et internationale, que dirige le ministère des Finances. La LRPCFAT est la mesure législative qui établit le cadre canadien de LRPC/FAT, conjointement avec d'autres textes législatifs importants, dont le Code criminel.
La LRPCFAT exige que les institutions financières visées par règlement, ainsi que certaines entreprises et professions non financières, que l'on appelle des entités déclarantes, identifient leurs clients, tiennent des dossiers et administrent un programme interne de conformité en matière de LRPC/FAT. Elle crée un système obligatoire de déclaration des opérations financières douteuses, des mouvements transfrontaliers d'espèces considérables et de certaines opérations visées par règlement. Elle crée également des obligations pour les entités déclarantes de déceler les risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme et de mettre en place des mesures pour atténuer ces risques.
La LRPCFAT établit également un régime d'échange de renseignements où, selon certaines conditions prescrites, les renseignements présentés par les entités déclarantes sont analysés par CANAFE et les résultats sont diffusés aux partenaires du régime. Les renseignements diffusés en vertu de la LRPCFAT peuvent faciliter les enquêtes et les poursuites intentées dans le cadre d'infractions liées au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes. Ces renseignements peuvent également éclairer les rapports sur les tendances et les typologies de CANAFE afin d'aider à éduquer le public et les entités déclarantes sur les enjeux connexes.
Le Code criminel est la loi criminelle générale du Canada qui énonce le droit pénal matériel et les règles de procédure. Il cite les infractions de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes, ainsi qu'un large éventail d'autres infractions, y compris celles qui peuvent être des infractions de recyclage des produits de la criminalité sous-jacentes dans le cadre de telles activités. Il s'agit notamment de la fraude, de l'extorsion, de la corruption, du jeu illégal, de la contrefaçon, du vol qualifié et de la traite des personnes.
Le Code criminel établit également les pouvoirs généraux d'enquête dont disposent les organismes d'application de la loi, y compris les ordonnances de communication, les pouvoirs de suivi et de traçage, ainsi que les pouvoirs de perquisition, de saisie et de blocage. Il comprend des règles de détermination de la peine ainsi que des cadres pour la confiscation des biens et des produits de la criminalité liés aux infractions.
D'autres lois contribuent également au cadre canadien de LRPC/FAT. Par exemple, la Loi de l'impôt sur le revenu fédérale contient des obligations concernant l'enregistrement des fiducies auprès de l'ARC, et la Loi canadienne sur les sociétés par actions et les lois provinciales et territoriales équivalentes établissent des exigences en matière de transparence de la propriété effective.
La coordination des politiques nationales sur les questions de LRPC/FAT se fait par l'intermédiaire de trois principales structures de comités qui se réunissent régulièrement tout au long de l'année :
- une structure de gouvernance interministérielle, composée de représentants de haut niveau des partenaires du régime de LRPC/FAT, fait avancer les initiatives stratégiques nouvelles et en cours et surveille la performance;
- un Comité consultatif sur le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes (public-privé), composé de hauts représentants d'organismes fédéraux et de secteurs des entités déclarantes, facilite l'échange de renseignements pertinents sur les risques ainsi que l'élaboration et la mise en application de politiques en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes;
- des groupes de travail fédéraux, provinciaux et territoriaux, composés de représentants de la politique et de la surveillance dans les domaines de la réglementation du secteur financier, de la sécurité, du droit des sociétés et de l'application de la loi dans toutes les administrations canadiennes, coordonnent les questions stratégiques dans les domaines où la compétence est partagée. Cela comprend la promotion d'un cadre pancanadien de transparence de la propriété effective.
Le régime de LRPC/FAT appuie et renforce les efforts des organismes d'application de la loi et de renseignement engagés dans la lutte contre le crime organisé national et transnational ainsi que le terrorisme, contribuant ainsi aux efforts plus vastes du Canada en matière de lutte contre le terrorisme et de sécurité nationale. Couper les sources de revenus et priver les terroristes et autres groupes extrémistes violents de fonds et de biens est l'un des moyens les plus efficaces de miner leurs activités. Les efforts du régime de LRPC/FAT sont conformes à la Stratégie antiterroriste du Canada, qui est en cours de mise à jour. La prochaine stratégie de lutte contre le terrorisme et l'extrémisme violent fournira au gouvernement du Canada une orientation stratégique pour contrer les nouvelles menaces terroristes et extrémistes violentes, offrira au public canadien un meilleur aperçu de la situation actuelle des menaces et de la façon dont le gouvernement du Canada y fait face, et renforcera la confiance du public dans la communauté canadienne de la sécurité et du renseignement en adoptant une approche pangouvernementale axée sur la mobilisation des principaux partenaires au Canada et à l'étranger.
La protection de l'intégrité du système financier international contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme nécessite une présence internationale forte pour améliorer les capacités juridiques, institutionnelles et opérationnelles à l'échelle mondiale. Les initiatives internationales du Canada en matière de LRPC/FAT sont promues grâce à son rôle de chef de file au sein du Groupe des Sept (G7), du Groupe des Vingt (G20), des unités de renseignement financier du Groupe Egmont, du Joint Chiefs of Global Tax Enforcement (J5) ainsi que du volet de travail anti-financement de la Coalition mondiale contre DaechNote de bas de page 32.
Le Canada est un membre fondateur et un participant actif du GAFI. Il a joué le rôle de vice-président du GAFI pour la période de 2023 à 2025 et de coprésident de l'organisme régional s'apparentant au GAFI, à savoir le Groupe Asie-Pacifique sur le blanchiment d'argent (GAP), pour la période de 2022 à 2024. Le GAFI élabore des normes internationales de LRPC/FAT et surveille leur mise en œuvre efficace auprès de ses 40 membres et de plus de 200 pays de son réseau mondial au moyen d'examens par les pairs et de rapports publics. Il dirige également les efforts internationaux liés à l'élaboration de politiques et à l'analyse des risques, tout en recensant et signalant les nouvelles tendances et méthodes de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme. Ce travail permet de s'assurer que les pays disposent des outils appropriés pour faire face aux risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme.
Le Canada fournit également de l'expertise et du financement pour accroître la capacité de LRPC/FAT dans les pays qui cherchent à renforcer leurs propres régimes, notamment par l'intermédiaire du Programme de renforcement des capacités de lutte contre la criminalité et du Programme de renforcement des capacités antiterroristes administrés par AMCNote de bas de page 33. Ces programmes soutiennent également les autres piliers du régime de LRPC/FAT en renforçant la capacité d'autres pays à prévenir, détecter et perturber les activités de recyclage des produits de la criminalité et de financement du terrorisme, y compris celles qui peuvent avoir une incidence sur le Canada, à enquêter sur ces activités et à intenter des poursuites.
ii. Prévention et détection
Le deuxième pilier comprend des mesures destinées à empêcher que des personnes placent des produits de la criminalité ou des actifs liés au terrorisme dans le système financier, ainsi que des mesures visant à déceler le placement et le mouvement de tels actifs.
Au cœur de ce deuxième pilier, on trouve les entités déclarantes qui mettent en œuvre de telles mesures de prévention et de détection en vertu de la LRPCFAT ainsi que les organismes de réglementation, principalement CANAFE et le BSIF, qui les supervisent. CANAFE est le principal organisme qui effectue des évaluations de LRPC/FAT auprès de toutes les entités déclarantes, y compris les institutions financières fédérales, afin de promouvoir la conformité à la LRPCFAT et à son règlement. Le BSIF se concentre quant à lui sur les répercussions prudentielles de la conformité des institutions financières sous réglementation fédérale en matière de LRPC/FAT, dans son évaluation continue de leurs cadres de gestion de la conformité réglementaire. Certaines entités déclarantes sont également supervisées par des organismes de réglementation provinciaux et territoriaux, dont bon nombre donnent des directives à leurs membres pour respecter leurs obligations en vertu de la LRPCFAT et concluent des ententes d'échange de renseignements avec CANAFE. L'ARC s'efforce également de prévenir toute utilisation abusive du secteur de la bienfaisance à des fins de financement des activités terroristes.
Une plus grande transparence des personnes morales, y compris les sociétés et les constructions juridiques, comme les fiducies, contribue également à prévenir et à détecter le recyclage des produits de la criminalité et le financement du terrorisme. C'est pourquoi le gouvernement du Canada a mis en place un registre de la propriété effective accessible au public afin d'améliorer la transparence des sociétés constituées en vertu d'une loi fédérale, et des mesures similaires ont été prises à l'échelle provinciale. L'obligation supplémentaire pour les entités déclarantes de repérer les divergences entre les bénéficiaires effectifs des sociétés avec lesquelles elles font affaire aidera également à soutenir des registres exacts et à jour afin de prévenir l'utilisation abusive des sociétés à des fins d'activités illicites.
CANAFE est également l'unité du renseignement financier du Canada. Il agit de façon autonome et est indépendant des services de police provinciaux et municipaux, des organismes d'application de la loi et des autres entités auxquelles il est autorisé à communiquer des renseignements financiers, comme les organismes de réglementation des valeurs mobilières et les cellules étrangères de renseignement financier. En 2023-2024, CANAFE a produit plus de 4 600 dossiers de communication de renseignements financiers contenant 297 733 déclarations d'opérations financières couvrant plus de 900 000 opérations financières, à l'appui d'enquêtes sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes et les menaces à la sécurité du Canada.
iii. Enquêtes, poursuites et interruptions
Le dernier pilier se rapporte aux activités d'enquête sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes ainsi qu'à leur perturbation et aux poursuites. Les partenaires de l'application de la loi, appuyés par les communications de renseignements de CANAFE, mènent des enquêtes liées au recyclage des produits de la criminalité, au financement des activités terroristes et à d'autres crimes à but lucratif.
En tant que corps de police national et en tant que corps de police provincial ou local dans de nombreuses administrations, la GRC joue un rôle fondamental dans le régime canadien de LRPC/FAT en enquêtant sur des cas de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes, en procédant à des arrestations, en portant des accusations et en saisissant des fonds ou des biens soupçonnés d'être liés à des infractions (y compris les biens employés pour faciliter des activités terroristes) ou à des produits de la criminalité. La GRC collabore également avec les services de police provinciaux et municipaux du Canada pour enquêter sur les activités de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes dans leurs collectivités, notamment au moyen d'enquêtes conjointes et indépendantes et par l'intermédiaire de la Réponse intégrée canadienne au crime organisé (RICCO). La RICCO réunit les principales forces de police du Canada afin de coordonner un plan stratégique de lutte contre le crime organisé ou les crimes graves grâce à l'intégration des efforts de la police canadienne aux niveaux municipal, provincial, territorial et nationalNote de bas de page 34.
L'ASFC a le mandat et le pouvoir de détecter la fraude commerciale qui sous-tend de nombreux stratagèmes de recyclage de produits de la criminalité de nature commerciale, ainsi que d'enquêter dessus. Lorsqu'un mandat du Code criminel est défini en plus de la législation frontalière, l'ASFC et la GRC s'épaulent et en se référant des cas en s'apportant du soutien ou, plus officiellement, dans le cadre d'opérations coopératives conjointes. L'ASFC s'appuie également sur son pouvoir de déclaration en vertu de la partie 2 de la LRPCFAT qui la rend responsable de l'exécution de la Déclaration sur les mouvements transfrontaliers d'espèces ou d'effets d'une valeur de 10 000 $ ou plus et de toute saisie connexe, ains que son pouvoir en vertu de la nouvelle partie 2.1 de la LRPCFAT d'assurer la conformité de tous les biens importés au ou exportés du Canada.
L'ARC applique les lois fiscales par l'intermédiaire de son Programme des enquêtes criminelles, qui enquête sur l'évasion fiscale, les autres crimes fiscaux graves et les activités de recyclage des produits de la criminalité liées à ces infractions en vue de renvoyer les cas au SPPC. De plus, elle a un programme d'audit civil spécialisé, le Programme d'audit de revenu illicite, pour vérifier les particuliers et les entreprises dont on sait ou soupçonne qu'ils tirent des revenus d'activités illicites, et elle travaille avec des partenaires pour coordonner des mesures telles que les saisies-arrêts, les privilèges sur des actifs et les saisies d'espèces pour recouvrer les montants dus.
Le SPPC est chargé de lancer et de mener des poursuites fédérales et territoriales, y compris celles qui impliquent des infractions liées au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes, et fournit des conseils juridiques aux organismes d'application de la loi dans le cadre de leurs enquêtes. Ces organismes sont également appuyés par les services de poursuites provinciaux, qui, selon les données de l'Enquête intégrée sur les tribunaux de juridiction criminelle (EITJC) de Statistique Canada, poursuivent en justice la plupart des infractions de recyclage des produits de la criminalité portées devant les tribunaux au Canada. Les bureaux provinciaux et territoriaux de confiscation civile jouent également un rôle important dans la confiscation de biens soupçonnés d'être liés à des activités criminelles, dans les situations où des poursuites criminelles ne sont pas viables.
Comme le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes ont souvent des dimensions internationales, les partenaires opérationnels du régime ont noué et maintenu des partenariats avec leurs principaux homologues étrangers. La GRC assure la liaison pour l'échange de renseignements criminels avec les forces de police internationales, y compris aux États-Unis et dans les pays partenaires du Groupe des cinq, et les agents de liaison apportent leur aide dans les poursuites intentées dans le cadre d'affaires internationales de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. L'ARC peut poursuivre les cas internationaux d'évasion fiscale à l'aide d'instruments d'échange de renseignements, comme les accords bilatéraux et multilatéraux. Le Canada participe à l'entraide juridique officielle et à l'extradition des personnes sous la direction du Service d'entraide internationale de Justice Canada.
En plus de ce travail, les partenaires du régime participent à un large éventail de groupes de travail et de comités pour faciliter les enquêtes et l'interruption de ces activités criminelles à l'échelle internationale, comme le Dialogue nord-américain sur les drogues, le Groupe des cinq sur l'application de la loi, le groupe d'experts d'INTERPOL sur la lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le Joint Global Chiefs of Tax Enforcement (J5).
Surveillance et améliorations du régime
Évaluations du régime canadien de LRPC/FAT
Le régime canadien de LRPC/FAT fait l'objet d'examens externes réguliers, notamment par des comités et des bureaux du Parlement et des organismes internationaux, afin d'en assurer l'efficacité et l'amélioration continue.
Les principaux examens qui contribuent aux mesures stratégiques du Canada en matière de risques liés au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes comprennent : un examen législatif de la LRPCFAT par le Parlement du Canada tous les cinq ans (le plus récent a été effectué par le Comité des finances de la Chambre des communes en 2018); une vérification de la protection des renseignements personnels de CANAFE tous les deux ans par le Commissariat à la protection de la vie privée (la plus récente date de 2024); une consultation entre les ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux de la Justice et de la Sécurité publique, et des examens ponctuels des partenaires du régime par l'Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement afin de s'assurer que ces activités sont légales, raisonnables et nécessaires.
À partir de la période 2019-2022, le gouvernement du Canada a participé à la commission d'enquête sur le recyclage des produits de la criminalité en Colombie-Britannique, connue sous le nom de « Commission Cullen », qui a examiné les activités de recyclage des produits de la criminalité dans cette province.
Le régime canadien de LRPC/FAT fait également l'objet d'un examen international périodique les pairs au sein du GAFI. Le dernier examen complet du Canada s'est achevé en 2016 et les conclusions de sa prochaine évaluation mutuelle devraient être publiées en 2026.
Amélioration du régime : principales mesures
Le gouvernement du Canada prend les crimes financiers au sérieux. Le cadre canadien de LRPC/FAT est constamment peaufiné pour tenir compte des risques nouveaux et émergents, y compris ceux recensés dans le cadre des divers examens du régime de LRPC/FAT et du processus d'évaluation nationale des risques. À cette fin, des mesures visant à améliorer le cadre de LRPC/FAT ont été annoncées dans tous les budgets fédéraux depuis 2019, ainsi que dans les énoncés économiques de l'automne 2023 et 2024.
Plus récemment, reconnaissant le rôle du recyclage des produits de la criminalité dans le soutien et la perpétuation des crimes transfrontaliers, comme le trafic de fentanyl, le gouvernement a accordé la priorité aux mesures visant à lutter contre ces crimes nuisibles par diverses initiatives en 2025, notamment :
- la publication d'une directive du premier ministre sur la criminalité transnationale et la sécurité de la frontière afin de fournir des directives aux organismes fédéraux de sécurité nationale, d'application de la loi et de renseignement sur la façon d'appuyer les efforts pangouvernementaux pour lutter contre le commerce illicite de drogues et les réseaux criminels transnationaux qui le mènent;
- l'annonce d'une nouvelle capacité de 200 millions de dollars pour permettre à Sécurité publique Canada et au CST de recueillir des renseignements sur le crime organisé transnational et de les transmettre à des partenaires nord-américains;
- le lancement du Partenariat intégré sur le renseignement en matière de blanchiment d'argent (PIRBA) afin d'améliorer l'échange de renseignements tactiques entre les organismes d'application de la loi et le secteur financier afin de détecter, de dissuader et de perturber les réseaux sophistiqués de recyclage des produits de la criminalité;
- la création d'une cellule opérationnelle conjointe de renseignement qui se concentre sur la criminalité transnationale organisée, le recyclage des produits de la criminalité, la sécurité de la frontière et le trafic de drogues, afin de faciliter la circulation rapide et efficace du renseignement destiné aux opérations d'application de la loi au Canada et à l'étranger.
De manière plus générale, la lutte contre la criminalité financière nécessite des investissements pour améliorer l'efficacité opérationnelle afin de suivre le rythme des activités criminelles de plus en plus organisées et sophistiquées. Des changements continus doivent également être apportés au cadre législatif et réglementaire afin de fournir des outils efficaces pour lutter contre les nouvelles techniques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes.
Au cours des dernières années, le Canada a mis la priorité sur les investissements et les changements stratégiques dans plusieurs domaines clés, y compris les investissements dans les partenaires opérationnels du régime et les changements législatifs et réglementaires visant à améliorer la transparence des entreprises et l'échange d'information tout en étendant les obligations en matière de LRPC/FAT aux secteurs vulnérables ou en renforçant ces obligations.
Pleins feux sur l'investissement dans l'efficacité opérationnelle
Depuis 2018, le gouvernement a investi près de 470 millions de dollars pour renforcer les ressources de données, le renseignement financier, l'échange d'information et les capacités d'enquête afin d'appuyer les enquêtes sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes au Canada. Ces investissements comprennent :
- 90,6 millions de dollars sur cinq ans, à compter de 2018-2019, pour que l'ARC lutte contre des cas supplémentaires d'évasion fiscale et d'évitement fiscal abusif;
- 16,9 millions de dollars sur cinq ans, à compter de 2019-2020, et 1,9 million de dollars par année par la suite, pour renforcer les capacités opérationnelles de CANAFE dans le but d'améliorer la surveillance des pratiques financières modernes, d'élargir les partenariats public-privé et d'accroître la sensibilisation et les examens dans les secteurs de l'immobilier et des casinos;
- 78,9 millions de dollars sur cinq ans et 20 millions de dollars par année par la suite à compter de 2019-2020 à la GRC pour améliorer la capacité de la police fédérale, notamment pour soutenir la création de nouvelles équipes intégrées d'enquête sur le recyclage des produits de la criminalité en Colombie-Britannique, en Alberta, en Ontario et au Québec, ainsi que d'infrastructures informatiques et d'outils numériques pour pouvoir déposer des poursuites dans le cas de crimes financiers complexes;
- 16 millions de dollars sur cinq ans, à compter de 2020-2021, pour permettre à SPAC de mettre sur pied une équipe de juricomptables spécialisés venant soutenir les enquêtes sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes;
- 28,6 millions de dollars sur quatre ans, à compter de 2020-2021, et 10,5 millions de dollars par année par la suite, pour créer le Centre d'expertise sur la fraude commerciale et le recyclage des produits de la criminalité de nature commerciale au sein de l'ASFC afin de repérer les fraudes commerciales complexes et d'enquêter sur ces dernières;
- 89,9 millions de dollars sur cinq ans, à compter de 2022-2023, et 8,8 millions de dollars par année par la suite, pour permettre à CANAFE de mettre en œuvre de nouvelles exigences en matière de LRPC/FAT, d'améliorer son expertise, de moderniser ses fonctions de conformité et d'améliorer ses systèmes internes;
- 27 millions de dollars sur cinq ans, à compter de 2024-2025, et 2,3 millions de dollars par année par la suite, pour permettre à CANAFE d'améliorer sa cyberrésilience et d'assurer la mise en œuvre de mesures de sécurité des données supplémentaires à long terme;
- 1,7 million de dollars sur deux ans, à compter de 2024-2025, au ministère des Finances pour conclure la conception et le cadre juridique de l'Agence canadienne des crimes financiers;
- 29,9 millions de dollars sur cinq ans, à compter de 2024-2025, et 4,2 millions de dollars par année par la suite, pour que l'ASFC mette en œuvre de nouveaux pouvoirs en matière de fraude commerciale et de recyclage des produits de la criminalité de nature commerciale et crée une unité de transparence commerciale pour mieux cerner les flux financiers illicites.
Pleins feux sur le renforcement du cadre législatif et réglementaire du Canada
Le Parlement a modifié le Code criminel en 2023-2024 pour fournir de nouveaux outils à l'appui des enquêtes et des poursuites. Il s'agit notamment d'une nouvelle infraction visant expressément le recyclage des produits de la criminalité au profit d'une organisation criminelle et de dispositions facilitant les poursuites pour le recyclage des produits de la criminalité par des tiers non impliqués dans les crimes sous-jacents. Les réformes du Code criminel en 2023-2024 comprenaient également des dispositions pour faciliter la perquisition et la saisie d'actifs numériques (qui peuvent inclure des cryptoactifs) qui sont des produits de la criminalité, et d'autres mesures pour faciliter les enquêtes, telles qu'une ordonnance du tribunal exigeant qu'une personne garde un compte ouvert pour aider à une enquête et une ordonnance de communication qui permet aux organismes d'application de la loi d'obtenir des documents ou des données à plusieurs dates précises pendant que l'ordonnance est en vigueur.
Des modifications législatives ont également été apportées à la LRPCFAT pour permettre à CANAFE de communiquer des renseignements financiers à d'autres organismes du gouvernement lorsqu'il a des motifs raisonnables de soupçonner que lesdits renseignements seraient pertinents pour enquêter sur une infraction liée au recyclage des produits de la criminalité, au financement d'activités terroristes ou au contournement de sanctions, ou des menaces pour la sécurité du Canada. Cela comprend les bureaux provinciaux et territoriaux de confiscation civile, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC), les agents d'application de la loi d'Environnement et Changement climatique Canada et de Pêches et Océans Canada, le BSIF, le Bureau de la concurrence et Revenu Québec afin de soutenir les efforts liés aux mandats de chacun de ces organismes.
Pleins feux sur le renforcement de la transparence des sociétés et l'échange d'information
Les sociétés peuvent être structurées de manière à dissimuler le véritable propriétaire de biens, d'entreprises et d'autres actifs de valeur. Les autorités étant incapables de déterminer leur véritable propriété, ces sociétés peuvent devenir des outils pour ceux qui cherchent à blanchir de l'argent, à éviter les impôts ou à échapper aux sanctions. Pour résoudre ce problème, le Canada a fait des progrès importants en vue d'accroître la transparence des structures d'entreprise aux échelles fédérale, provinciale et territoriale.
En janvier 2024, le gouvernement fédéral a lancé un registre public et consultable de la propriété effective des sociétés fédérales, donnant accès aux renseignements non publics à CANAFE, aux organismes d'application de la loi et aux autres organismes d'enquête. De plus, pour les années d'imposition se terminant après le 30 décembre 2023, les fiducies doivent déclarer l'identité de leurs bénéficiaires effectifs à l'ARC.
En vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions, Corporations Canada a le pouvoir d'assurer l'exactitude du registre fédéral de la propriété effective. Le gouvernement a adopté un règlement pour compléter ces efforts en exigeant que les entités réglementées par la LRPCFAT signalent directement à Corporations Canada toute divergence dans les renseignements sur la propriété effective figurant dans le registre fédéral qu'elles observent dans le cours normal de leurs activités. Cette obligation, qui entrera en vigueur en octobre 2025, ne s'appliquera que dans les cas où les entités déclarantes estiment qu'il existe un risque élevé de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes.
Toutes les provinces et tous les territoires continuent de participer activement aux discussions avec le gouvernement fédéral par l'entremise d'un groupe de travail pour appuyer l'établissement d'une approche pancanadienne en matière de transparence de la propriété effective. Plusieurs provinces ont déjà pris des mesures concrètes pour faire progresser la transparence des entreprises dans leurs territoires respectifs :
- En mars 2023, le Québec a instauré un registre des bénéficiaires effectifs couvrant les sociétés et les personnes morales constituées ou inscrites pour faire des affaires dans la province. Il permet des recherches du public depuis mars 2024. Les renseignements non publics du registre sont accessibles aux organismes d'application de la loi et à d'autres organismes gouvernementaux pour les aider à s'acquitter de leur mandat.
- La Colombie-Britannique a adopté une loi visant à créer un registre public des bénéficiaires effectifs et a également établi le Land Owner Transparency Registry (registre concernant la transparence des propriétaires fonciers) qui comprend des renseignements sur la propriété effective des terres dans cette province.
- La Colombie-Britannique a adopté une loi visant à créer un registre public des bénéficiaires effectifs, qu'elle envisage de lancer en 2025. Elle a également établi le Land Owner Transparency Registry (registre concernant la transparence des propriétaires fonciers) qui comprend des renseignements sur la propriété effective des terres dans cette province.
- Dans les Perspectives économiques et revue financière de l'Ontario 2024, la province de l'Ontario a annoncé qu'elle étudiait également les options pour un registre de la propriété effective. Le Budget de l'Ontario 2025: Un plan pour protéger l'Ontario a annoncé son intention de lancer des consultations publiques pour informer la création d'un registre de propriété effective et d'autres mesures potentielles visant à donner aux régulateurs et aux forces de l'ordre les moyens de lutter contre le blanchiment d'argent et le financement du crime organisé.
Échange de renseignements avec le secteur privé
Le Canada reconnaît que les criminels peuvent profiter du manque de capacités d'échange de renseignements entre les entités déclarantes pour faciliter leurs activités illicites et échapper à la détection. Des modifications législatives sont entrées en vigueur en mars 2025 afin d'améliorer la capacité des entités déclarantes en vertu de la LRPCFAT à échanger des renseignements entre elles afin de mieux détecter et dissuader le recyclage des produits de la criminalité, le financement des activités terroristes et le contournement des sanctions, tout en maintenant les mesures de protection des renseignements personnels. Les entités déclarantes qui participent à ce cadre volontaire devront établir un code de pratique décrivant leurs rôles et responsabilités en la matière. Le cadre comprend un rôle de surveillance attribué au Commissariat à la protection de la vie privée en vertu des règlements.
Pleins feux sur le renforcement du cadre législatif et réglementaire du Canada
Depuis 2020, le Canada a apporté des modifications à la LRPCFAT et à ses règlements afin d'étendre les obligations aux secteurs jugés plus vulnérables face au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes. Ces secteurs comprennent : les entreprises de véhicules blindés, les prêteurs hypothécaires non réglementés, les assureurs de titres, les fournisseurs de services de paiement auparavant exclus de la réglementation en matière de LRPC/FAT, les plateformes de financement participatif, les entreprises intermédiaires, appelées « acquéreurs », offrant des services de retraits en espèces pour les guichets automatiques de marque privée, les sociétés d'affacturage, les entreprises d'encaissement de chèques, et les sociétés de financement et de crédit-bail.
Compte tenu des vulnérabilités accrues que représentent les ESM, le gouvernement a également renforcé leur cadre d'enregistrement au titre de la LRPCFAT afin d'exiger que les ESM domestiques présentent une vérification du casier judiciaire de leurs directeurs généraux, de leur président, de leurs administrateurs et de toute personne qui contrôle directement ou indirectement 20 % ou plus de l'entreprise au moment de l'enregistrement. Ces exigences, qui entreront en vigueur le 1er octobre 2025, répondent au risque accru qu'un acteur criminel s'infiltre dans la structure d'une ESM. Le gouvernement a également criminalisé l'exploitation d'une ESM non enregistrée.
Chapitre 3 : Évaluation des menaces liées au recyclage des produits de la criminalité
Aperçu
Le Canada est un pays source, un pays cible et un pays de transit pour les produits de la criminalité. On estime que des milliards de dollars sont blanchis au Canada chaque année, générés par une gamme de crimes à but lucratif perpétrés par divers auteurs de menaces. Les auteurs de menace qui perpètrent des crimes à but lucratif au Canada vont de personnes peu averties ayant des penchants criminels, y compris les petits criminels et les membres de gangs de rue, à des GCO et à des blanchisseurs d'argent tiers.
Auteurs de menace de recyclage des produits de la criminalité au Canada
Groupes criminels organisés
Qu'est-ce que le recyclage des produits de la criminalité?
Le recyclage des produits de la criminalité est un processus utilisé pour dissimuler la source de fonds ou de biens découlant d'activités criminelles. Il existe trois étapes communément reconnues (mais pas nécessairement mutuellement exclusives) dans le processus de recyclage des produits de la criminalité :
- le placement, qui consiste à introduire les produits de la criminalité dans le système financier;
- la dispersion, qui consiste à convertir les produits de la criminalité en une autre forme et à créer un enchevêtrement complexe d'opérations financières dans le but de brouiller les pistes de vérification et de masquer l'origine et la propriété des fonds. Cette étape peut inclure des opérations comme l'achat et la vente d'actions, de biens et de propriétés;
- l'intégration, qui consiste à réintroduire les produits une fois recyclés dans l'économie, maintenant qu'ils ont une origine en apparence légitime.
Le processus de recyclage des produits de la criminalité est continu, dans la mesure où de l'« argent sale » est constamment introduit dans le système financier.
Un GCO est un groupe structuré de trois personnes ou plus agissant de concert dans le but de commettre des activités criminelles, afin d'obtenir, directement ou indirectement, un avantage matériel, par exemple un avantage financier. Les GCO génèrent chaque année des milliards de dollars de produits de la criminalité qui sont recyclés par l'intermédiaire du secteur financier canadien et d'autres entreprises et professions vulnérables.
Selon le Rapport public sur le crime organisé au Canada 2024 du SCRC, plus de 4 000 GCO sont en activité dans tout le pays. Parmi ceux évalués par le SCRC, sept sont considérés comme des menaces nationales de haut niveau en raison de leurs réseaux très compétents et parfaitement établis et de leur participation à de multiples secteurs criminels, y compris le recyclage des produits de la criminalité.
Les associations fluides et informelles entre les GCO sont de plus en plus nombreuses. Elles sont facilitées par les technologies de pointe qui leur permettent d'étendre et de diversifier plus facilement leurs activités. Les trois réseaux criminels les plus interconnectés au Canada restent les gangs de motards criminels, les groupes mafieux et les gangs de rue. Les GCO les plus influents au Canada ont une portée transnationale et ont des liens avec divers pays d'Amérique, d'Europe et d'Asie. Selon le SCRC, les GCO sophistiqués en activité au Canada possèdent l'infrastructure et les réseaux nécessaires pour recycler de grandes quantités de produits de la criminalité dans de nombreux secteurs d'activité en utilisant diverses méthodes pour échapper à toute détection et à toute tentative d'interruption.
Blanchisseurs d'argent professionnels et tiers
Méthodes courantes de recyclage
Le recyclage des produits de la criminalité peut faire appel à plusieurs techniques et méthodes. Voici quelques exemples remarquables cités dans le rapport :
- La structuration (parfois aussi appelée schtroumpfage) consiste à exécuter des transactions financières selon des modèles précis pour éviter les seuils de déclaration.
- Le schtroumpfage du coucou est une technique de structuration par laquelle les criminels utilisent les comptes de clients d'une banque, à l'insu de ces derniers, pour blanchir leurs fonds.
- Les mules sont des personnes qui, consciemment ou à leur insu, transfèrent ou transportent des fonds au nom de l'auteur d'un crime ou d'un blanchisseur d'argent.
- Un prête-nom est une personne autorisée à effectuer des opérations pour le compte d'une autre personne ou entité. Le recours à un prête-nom (conscient ou inconscient) est une méthode couramment utilisée par les criminels pour se distancier des opérations qui pourraient être liées à des soupçons de recyclage.
- La contrebande d'argent en vrac implique que les criminels transfèrent d'importantes sommes d'argent comptant comme étape du processus de recyclage des produits de la criminalité. Ces transactions ont souvent lieu dans des lieux publics, avec de grandes quantités d'argent dans des valises ou de grands sacs à dos.
Les techniques de recyclage des produits de la criminalité continuent d'évoluer à mesure que les criminels s'adaptent aux nouvelles technologies et aux nouvelles mesures d'application de la loi.
Au Canada, les opérations de recyclage des produits de la criminalité sophistiquées et à grande échelle font presque toujours appel à des tiers, y compris des intermédiaires professionnels, qui pour la plupart ne participent pas à la perpétration des infractions sous-jacentes générant les produits de la criminalitéNote de bas de page 35. Elles peuvent également impliquer des tiers non professionnels, comme des prête-noms et des mules.
Le recyclage des produits de la criminalité professionnel consiste en la prestation de services de recyclage des produits de la criminalité en échange d'une commission, d'honoraires ou d'autres avantages. Les blanchisseurs d'argent professionnels ont la capacité de collecter et d'orchestrer le transfert de flux financiers illicites et de se livrer à des stratagèmes complexes de recyclage des produits de la criminalité pour le compte de GCO transnationaux, de groupes terroristes et d'autres acteurs illicites. Pour ce faire, ils utilisent des fonds de trésorerie mondiaux pour régler des transactions au nom d'acteurs illicites à plusieurs endroits en même temps et coopèrent souvent entre eux pour effectuer des transactions sur différents marchés afin de soutenir le recyclage des produits de la criminalité, le contournement des sanctions ou le contournement des mesures de contrôle des devises.
Les blanchisseurs d'argent professionnels peuvent opérer au sein d'un réseau comprenant des agents de collecte et des coordonnateurs – qui coordonnent les ramassages d'argent et les mules – et des contrôleurs financiers internationaux – qui négocient des opérations de recyclage des produits de la criminalité pour le compte de clients criminels transnationaux et d'autres acteurs illicites. Les blanchisseurs professionnels peuvent posséder des titres de compétences, une formation, une infrastructure ou d'autres connaissances spécialisées qui facilitent la cooptation des secteurs financiers et du commerce international.
Des tiers moins sophistiqués, comme les prête-noms et les mules, peuvent également être cooptés, à leur insu ou non, pour participer à des stratagèmes complexes de recyclage des produits de la criminalité. Les prête-noms sont des personnes, souvent sans antécédents criminels, qui sont recrutées par des criminels ou affiliées à des criminels pour aider à recycler les produits d'activités illicites. Les prête-noms peuvent ouvrir des comptes bancaires, acquérir des biens immobiliers ou constituer des entreprises à leur nom, ce qui masque la véritable propriété des actifs et les liens criminels avec ces derniers. Les prête-noms peuvent sciemment participer à ces activités en échange d'une indemnisation, être contraints d'y participer ou encore participer à leur insu à de tels stratagèmes.
Les GCO peuvent également compter sur des porteurs d'argent en vrac, qui prennent le produit de transactions illicites de moindre envergure, comme la vente de drogues, et le combine avec de l'argent comptant en vrac dans le but de le remettre à un blanchisseur d'argent professionnel. Celui-ci est à son tour responsable de masquer l'origine criminelle de ces fonds et de les réintégrer dans l'économie légitime.
Les mules sont des personnes qui transportent les produits de la criminalité, sciemment ou non, pour des organismes criminels ou des blanchisseurs d'argent. Elles jouent un rôle dans le mouvement et le placement des produits de la criminalité dans le système financier. Elles peuvent également agir comme prête-noms pour les biens immobiliers, les véhicules, les appareils électroniques et les marchandises impliqués dans des stratagèmes de recyclage de produits de la criminalité de nature commerciale, et peuvent obtenir des prêts immobiliers et effectuer des paiements pour disperser et intégrer les produits de la criminalité. Les mules sont souvent des étudiants, des chômeurs, des personnes âgées et des travailleurs migrants qui peuvent être recrutés par l'intermédiaire d'offres d'emploi frauduleuses en ligne. L'analyse de CANAFE a montré que les mules peuvent ouvrir des comptes contenant des renseignements d'identification contrefaits, falsifiés ou volés. Dans de nombreux cas, CANAFE a observé que l'activité du compte ou le volume des opérations semblaient incompatibles avec la situation financière apparente du client et les renseignements professionnels déclarés.
Le projet Collecteur était une enquête à grande échelle menée par l'unité Initiative intégrée de contrôle des produits de la criminalité de la GRC, appuyée par des enquêteurs de la GRC de l'Ontario et de l'ARC, qui a permis de découvrir un réseau professionnel sophistiqué de recyclage des produits de la criminalité fournissant des services de transfert d'argent aux GCO au moyen d'un SITV ayant des ramifications au Liban, aux Émirats arabes unis, en Iran, aux États-Unis et en Chine. Les fonds ont ensuite été retournés aux exportateurs de cocaïne en Colombie et au Mexique. À ce jour, 18 personnes ont été arrêtées et plus de 32 millions de dollars d'actifs ont été saisis ou bloqués dans le cadre de l'enquêteNote de bas de page 36.
En 2020, la GRC a lancé une enquête sur une organisation professionnelle de recyclage des produits de la criminalité de Montréal après avoir reçu un tuyau de la Drug Enforcement Administration (DEA) des États-Unis. L'enquête a abouti au dépôt d'accusations, notamment de recyclage des produits de la criminalité, contre trois personnes de Montréal et de Laval, après la découverte de leurs liens avec des organisations criminelles colombiennes. L'enquête a révélé le recyclage de plus de 18 millions de dollars en moins d'un anNote de bas de page 37.
En 2024, l'Équipe fédérale de la criminalité financière pour la région du Nord-Ouest de la GRC a arrêté un résident de la Colombie-Britannique après une enquête qui a révélé un stratagème ayant permis de blanchir environ 47 millions de dollars de produits de la criminalité provenant de la vente illicite de cannabis en ligne entre 2018 et 2020.
Les agents ont découvert que le réseau de recyclage des produits de la criminalité se composait d'une série de sociétés à numéros fonctionnant comme des ESM non enregistrées. Ces entreprises auraient reçu, viré ou converti des produits de la criminalité en faisant des ventes illicites de cannabis par l'intermédiaire de multiples dispensaires en ligne. Le résident de la Colombie-Britannique a été accusé de recyclage de produits de la criminalité, d'infraction au profit d'une organisation criminelle, de possession non autorisée de cannabis pour la vente et de défaut d'enregistrer une ESM.
Cinq autres personnes ont été accusées et reconnues coupables de défaut d'enregistrer une ESM et se sont fait confisquer les produits de la criminalité dans le cadre de l'enquêteNote de bas de page 38.
Analyse des résultats de l'évaluation des menaces liées au recyclage des produits de la criminalité
Les menaces de recyclage des produits de la criminalité ont été évaluées à l'aide des critères suivants :
- Niveau de sophistication de l'auteur : Capacité démontrée des auteurs de la menace à orchestrer et à exécuter des opérations complexes de recyclage des produits de la criminalité.
- Complexité de l'activité de recyclage des produits de la criminalité : Complexité observée ou soupçonnée dans l'activité de recyclage des produits de la criminalité liée à ce type de menace.
- Portée de l'activité de recyclage des produits de la criminalité : Étendue globale des activités de recyclage des produits de la criminalité liées à ce type de menace, y compris la portée géographique et la diversité des réseaux.
- Valeur estimée des produits de la criminalité : Ampleur de la valeur monétaire estimée des produits de la criminalité générés annuellement par le crime à but lucratif.
Bien que la dynamique de chaque menace évaluée soit unique, les cotes sont présentées au tableau 2.
Menace élevée |
Concerne des auteurs de menace sophistiqués et bien établis, dotés d'une vaste portée géographique et de vastes réseaux de blanchiment d'argent, tant à l'échelle nationale qu'internationale, ainsi que d'importants produits de la criminalité (plus d'un milliard de dollars par année). Les auteurs de menace associés peuvent exploiter les vulnérabilités de multiples secteurs d'activité ; utiliser divers canaux de diffusion, acteurs et techniques d'obscurcissement ; et employer des méthodes complexes de blanchiment d'argent qui impliquent des opérations à l'intérieur et à l'extérieur des frontières canadiennes. |
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Menace moyenne |
Concerne des auteurs de menace modérément sophistiqués dont les opérations de recyclage des produits de la criminalité sont concentrées dans quelques zones géographiques, avec des liens limités avec des GCO, ou générant des produits de la criminalité modérés (entre 100 millions de dollars et un milliard de dollars par année). Les auteurs de menace associés exploitent généralement des vulnérabilités touchant un nombre limité de secteurs d'activité et de produits ou utilisent des techniques rudimentaires. |
Menace faible |
Concerne des auteurs de menace peu sophistiqués ou générant des produits de la criminalité limités (moins de 100 millions de dollars par année) avec des opérations de recyclage des produits de la criminalité et une portée géographique limitées. Les auteurs de menace associés exploitent généralement des vulnérabilités touchant un nombre limité de secteurs d'activité et de produits ou utilisent des techniques rudimentaires. |
Ce rapport met en évidence les menaces évaluées, classées de « élevée » à « faible ». Ces menaces sont les plus pertinentes dans le contexte canadien, car elles génèrent ou mettent en cause les produits de la criminalité les plus élevés et posent le plus grand risque pour la sécurité du Canada et des Canadiens.
Cote de menace élevée
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Cote de menace moyenne
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Cote de menace faible
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Menaces élevées de recyclage des produits de la criminalité
Menace de recyclage des produits de la criminalité liée au trafic de drogues illégales : : Le Canada continue de faire face à une crise de surdoses d'opioïdes alimentée par des groupes criminels organisés motivés par le profit et le fentanyl illégal qu'ils vendent. Ces GCO cherchent à maximiser leurs profits en intégrant du fentanyl et d'autres opioïdes synthétiques illégaux à l'approvisionnement en drogues illicites, car ces substances sont peu coûteuses et faciles à produire et à dissimulerNote de bas de page 39.
En raison de la nature lucrative du marché illégal du fentanyl en particulier, le trafic de drogue génère des produits de la criminalité importants au Canada, incitant les criminels à perpétuer leurs activités et alimentant d'autres types d'activités criminelles. Les GCO transnationaux sont les principaux acteurs de l'approvisionnement du marché intérieur et facilitent le trafic de drogues à destination et en provenance du Canada. Le Rapport public sur le crime organisé au Canada 2024 du SCRC indique que 93 % des GCO évalués sont impliqués à la fois dans la fabrication et la distribution de drogues illégales, principalement destinées au marché intérieur, ce qui leur permet d'être plus autonomes. La plupart des GCO sont impliqués dans le trafic de cocaïne, bien que leur participation au trafic de fentanyl ait augmenté de plus de 42 % depuis 2019, en raison des profits élevés associés au commerce illicite de fentanylNote de bas de page 40.
Les GCO exploitent la vulnérabilité de divers secteurs économiques, y compris les ESM, les banques et les casinos, ainsi que la vulnérabilité de différents produits de paiement, comme l'argent comptant, les cartes prépayées et les cryptoactifs, pour recycler les produits de la vente de drogues. Bien que l'utilisation de l'argent comptant reste répandue dans le recyclage des produits du trafic de drogues, l'utilisation de cryptoactifs pour se procurer des drogues et des précurseurs chimiques auprès de sources sur le Web sombre et le Web de surface est devenue plus courante, ce qui présente de nouveaux défis pour les organismes d'application de la loi.
La Stratégie canadienne sur les drogues et autres substances (SCDAS) établit la réponse du Canada à la menace des drogues illicites. Renouvelé en 2023, la SCDAS équilibre les priorités en matière de santé et de sécurité publiques. Elle englobe quatre domaines d'action intégrés liés à la consommation de substances : prévention et éducation; données probantes; services et soutien liés à la consommation de substances (traitement, réduction des méfaits et rétablissement); contrôle des substances.
Dans le cadre de la SCDAS renouvelée et du budget de 2023, le gouvernement du Canada a fourni 42 millions de dollars à la GRC pour renforcer le renseignement et la capacité opérationnelle, 6,4 millions de dollars à SPAC pour élargir l'accès aux services de juricomptabilité et 4,6 millions de dollars à Sécurité publique Canada pour développer une application de cartographie des surdoses en ligne.
Plus récemment, le Plan frontalier du Canada investit 1,3 milliard de dollars pour renforcer la frontière canadienne, notamment pour contrer la menace de la production et de la distribution illégales de fentanyl. Les investissements appuient :
- les efforts visant à détecter et à perturber la production et le commerce du fentanyl illégal grâce à un contrôle accru aux frontières, à une capacité de profilage des drogues, à des processus de réglementation des précurseurs et à l'élargissement des mesures d'application de la loi;
- des outils supplémentaires tels que des dispositifs de détection de produits chimiques, des hélicoptères, des drones, des tours de surveillance mobiles, du personnel et d'autres équipes de chiens détecteurs;
- la nomination d'un commissaire à la lutte contre le fentanyl du Canada (tsar du fentanyl);
- l'élaboration d'un nouveau partenariat intégré de renseignement sur le recyclage des produits de la criminalité;
- la désignation de plusieurs groupes criminels organisés transnationaux sur la liste des entités terroristes afin de fournir aux forces de l'ordre des outils supplémentaires pour démanteler et perturber les opérations de ces organisations ; et
- une surveillance 24 heures sur 24 de la frontière canado-américaine.
Réponse stratégique du Canada
Les GCO qui sont activement impliqués dans le trafic de drogues illégales utilisent un large éventail de méthodes pour recycler les produits de la criminalité, dont le mélange de fonds illicites avec des revenus commerciaux légitimes, le transfert de fonds illicites par l'intermédiaire de sociétés fictives, la contrebande de grandes quantités d'espèces, le recyclage de produits de la criminalité de nature commerciale, l'investissement dans l'immobilier pour légitimer des transactions financières et le cyberrecyclage des produits de la criminalité à l'aide de plateformes de technologie financière en ligne. Des trafiquants de drogue sophistiqués établissent des structures commerciales complexes comprenant plusieurs prête-noms, diverses adresses et une dissimulation de la propriété effective des actifs. Les entreprises peuvent également obtenir les services de comptables et d'avocats qui possèdent des connaissances et des compétences pouvant être exploités par les criminels.
Presque tous les grands GCO transnationaux utilisent des blanchisseurs d'argent tiers pour recycler les produits de la vente de drogues illégales. Ces blanchisseurs d'argent tiers peuvent occuper diverses professions. Cependant, il s'agit souvent de propriétaires ou d'associés de sociétés commerciales ou d'ESM qui utilisent leur profession et leurs connaissances, l'infrastructure associée à leur secteur d'activité et leurs réseaux pour faciliter le recyclage des produits de la criminalité, donnant ainsi un vernis de légitimité aux organisations criminelles. Les grandes organisations de trafic de drogues, qui sont souvent transnationales, semblent exploiter des SITVNote de bas de page 41 offrant sécurité, anonymat et polyvalence et pouvant être utilisés à mauvais escient.
Le projet Guardian, lancé en 2018, est un partenariat public-privé dirigé par la Banque Canadienne Impériale de Commerce (CIBC) et soutenu par des organismes canadiens d'application de la loi, des partenaires internationaux et CANAFE pour lutter contre le trafic de fentanyl illiciteNote de bas de page 42.
Retracer les mouvements de fonds liés au trafic illicite de fentanyl est une priorité pour CANAFE. Grâce à une analyse stratégique de ses renseignements financiers et en collaboration avec les institutions financières canadiennes et la GRC, CANAFE a publié en 2025Note de bas de page 43 une alerte opérationnelle sur les indicateurs de recyclage des produits de la criminalité liés à cette activité illicite. En 2023-2024, CANAFE a rapporté 93 déclarations d'opérations douteuses aux autorités policières sur 354 sujets différents.
Le projet Legion est une initiative de partenariat public-privé dirigée par la Banque Toronto-Dominion (TD), avec l'appui des organismes canadiens d'application de la loi et de CANAFE. Le projet Legion cible les activités illicites liées au cannabis en mettant l'accent sur la question du recyclage des produits de la criminalité connexes. Note de bas de page 44 Le marché du cannabis illicite entraîne une perte importante de recettes fiscales et participe au financement d'autres activités illégales et nuisibles menées par des GCO dans les collectivités de tout le pays.
En 2023-2024, CANAFE a produit plus de 60 communications de renseignements financiers à l'appui d'enquêtes menées par des organismes d'application de la loi concernant des activités illicites liées au cannabis aux niveaux municipal, provincial et fédéral.
En octobre 2023, le Groupe de la lutte contre le crime organisé du Manitoba de la GRC a souligné la contribution de CANAFE au projet Doom, une enquête sur des activités suspectes dans les casinos de Winnipeg L'enquête a permis de déterminer qu'une personne de Winnipeg fournissait des drogues illégales à des communautés éloignées des Premières Nations. Les produits en espèces provenant de la vente des drogues illégales étaient ensuite utilisés dans les casinos pour dissimuler leur lien avec l'activité criminelle. Une personne a été accusée de trafic de fentanyl et de cocaïne ainsi que de possession et de recyclage des produits de la criminalité. La police a également saisi 498 grammes de crack, 882 comprimés d'OxyContin (fentanyl) contrefaits, 241 comprimés de Percocet et 26 comprimés de gabapentineNote de bas de page 45.
En août 2023, les équipes d'intervention en matière d'application de la loi de l'Alberta ont souligné la contribution de CANAFE au projet Carlos, qui a mené à l'arrestation de sept personnes pour leur rôle dans une opération de trafic de stupéfiants de plusieurs millions de dollars. Au total, 33 accusations ont été portées pour des infractions allant du trafic de drogues au blanchiment d'argent, en passant par le complot criminel et les infractions liées au crime organisé. Le projet Carlos a permis la saisie de drogues d'une valeur de plus de 4,5 millions de dollars, dont du fentanyl, et de près d'un million de dollars en espècesNote de bas de page 46.
En janvier 2024, la Sûreté du Québec a souligné la contribution de CANAFE à une enquête qui a mené au démantèlement d'un réseau de producteurs et de trafiquants qui vendaient illégalement du cannabis en ligne. Plus de 70 000 transactions, pour un total de 15 millions de dollars, auraient été effectuées par des trafiquants liés au crime organisé. Dix personnes ont été accusées de recyclage des produits de la criminalité et de production, de possession, de trafic et de vente de cannabis illiciteNote de bas de page 47.
En août 2023, le service de police de Hamilton a démantelé un important producteur de fentanyl et d'autres drogues synthétiques dans la région du Grand Hamilton et de Toronto. À l'issue d'une longue enquête, 48 accusations criminelles ont été portées contre douze personnes, notamment pour possession de substances contrôlées en vue d'en faire le trafic, production de substances, produits de la criminalité et possession d'armes à feu. La police a également saisi un laboratoire opérationnel de fabrication de fentanyl, plus de 64 kilogrammes de drogues, dont 25,6 kilogrammes de fentanyl, 18 kilogrammes de méthamphétamine et 6 kilogrammes de kétamine, ainsi que 350 000 $ de produits de criminalité, dont des voitures, des bijoux et de l'argent comptantNote de bas de page 48.
À la suite du retrait des accusations liées à une enquête sur l'importation et le trafic présumés de drogues dans le cadre de laquelle plus de 3 millions de dollars de produits de la criminalité présumés, dont de l'argent comptant et des articles de luxe, ont été saisis, le Programme d'audit de revenu illicite de l'ARC a effectué des vérifications sur trois contribuables et des sociétés impliquées. Grâce à ces vérifications, l'ARC a établi une dette totale de 5,73 millions de dollars, y compris les pénalités et les intérêts, pour les années d'imposition allant de 2017 à 2022. Après que trois ordonnances ont été rendues par la Cour fédérale, l'ARC a intercepté 815 000 $ de l'argent saisi, empêchant que ces produits soient réinvestis dans des activités illicites.
Menace de recyclage des produits de la criminalité liée à la fraude : La fraude implique une conduite malhonnête dans l'intention de subtiliser de l'argent, des biens ou des renseignements aux victimes. Les pertes déclarées liées à la fraude augmentent d'année en année, le Centre antifraude du Canada (CAFC) rapportant des pertes atteignant 638 millions de dollars en 2024Note de bas de page 49. Les pertes déclarées par les autorités sont largement sous-estimées, car seulement de 5 % à 10 % des victimes signalent ces incidents de fraudeNote de bas de page 50. On estime des montants élevés de produits de la criminalité sont générés par la fraude au Canada chaque année. La fraude inflige aux victimes des conséquences préjudiciables qui dépassent les pertes financières évidentes. De nombreuses victimes signalent une détresse émotionnelle et psychologique associée à des sentiments de honte, d'embarras et d'anxiété. Les victimes peuvent également vivre un isolement social en raison de relations tendues résultant d'incidents de fraude.
Le Centre antifraude du Canada (CAFC)
Le Centre antifraude du Canada est le dépôt central d'informations et de renseignements sur la fraude au Canada. Il est exploité conjointement par la GRC, la Police provinciale de l'Ontario et le Bureau de la concurrence Canada (BUCO). En tant que service de police national géré par la GRC, le CAFC offre un soutien à tous les organismes d'application de la loi au Canada. Les principales responsabilités du CAFC comprennent les suivantes :
- Prévention : Servir de principale source nationale de matériel et d'éducation sur la fraude et les crimes contre l'identité.
- Perturbation : Collaborer avec des partenaires, notamment des institutions financières, des sociétés de cartes de crédit, des fournisseurs de services de télécommunication et des fournisseurs d'accès Internet, pour mettre fin à la fraude et prévenir les pertes financières.
- Renseignement : Produire et diffuser des renseignements opportuns, exacts et utiles sur la fraude pour éduquer et aider les citoyens, les entreprises, les organismes d'application de la loi et les institutions gouvernementales au Canada et dans le monde.
- Soutien : Fournir un soutien direct aux victimes de fraude par l'intermédiaire de son centre d'appels et de son unité de soutien aux aînés.
- Partenariats : Maintenir des partenariats solides avec le secteur privé et les organismes d'application de la loi pour prévenir la fraude et aider aux enquêtes.
Réponse stratégique du Canada
Les stratagèmes utilisés par les fraudeurs font souvent écho aux tendances sociétales plus larges et aux événements en cours. De mars 2020 à janvier 2022, le CAFC a enregistré 32 476 signalements de fraude liée à la COVID-19, totalisant une perte de 8,53 millions de dollars. À mesure que la fraude liée à la pandémie a diminué en 2022, elle a été remplacée par des stratagèmes de fraude liés à d'autres événements d'actualité, comme le conflit en cours entre la Russie et l'Ukraine, l'aide humanitaire liée à l'ouragan Fiona, la panne nationale du 8 juillet 2022 sur le réseau de télécommunications de Rogers, les faux investissements dans les cryptoactifs, et autres.
La plupart des stratagèmes de fraude à grande échelle au Canada sont perpétrés par des criminels avertis, en particulier ceux qui sont qualifiés dans le domaine des technologies. La forte prévalence de l'utilisation des médias sociaux, les progrès et l'adoption rapides des cryptoactifs, de la FiDé et de l'intelligence artificielle permettent aux criminels de commettre plus largement et plus rapidement des fraudes à une échelle transnationaleNote de bas de page 51. Le Centre canadien pour la cybersécurité estime que la fraude et les escroqueries sont les formes de cybercriminalité les plus courantes qui touchent les CanadiensNote de bas de page 52.
La fraude est associée à de multiples techniques de recyclage des produits de la criminalité et à l'exploitation de plusieurs secteurs d'activité. L'analyse de la GRC a révélé que ces techniques comprennent le transfert de fonds au profit d'une société enregistrée (potentiellement une société fictive) suivi d'un transfert immédiat de fonds à des tiers ou à des personnes morales sans aucun lien dans plusieurs administrations, des transferts de fonds effectués volontairement par des victimes et des comptes compromis par des fraudeurs. Une fois que les actifs liés à une fraude sont transférés à l'extérieur du secteur financier canadien, il devient plus difficile de les récupérer et moins nécessaire pour ces acteurs d'utiliser des techniques sophistiquées de recyclage des produits de la criminalité. Le recyclage réussi des produits obtenus des victimes de fraude perpétue davantage ce type de crime et permet aux criminels de réinvestir dans des technologies de pointe et d'accroître leurs capacités opérationnelles.
Dans le vaste domaine de la fraude, il y a plusieurs sous-types de crimes préoccupants. Le tableau 4 énumère les sous-types de fraudes préoccupants et résume la dynamique du recyclage des produits de la criminalité connexe et la participation des GCO.
Fraude par marketing de masse Type de fraude qui se sert de méthodes de communication de masse (comme le téléphone, le Web ou les courriels, le courrier postal, la télévision, la radio ou les contacts personnels) pour solliciter et escroquer des victimes potentielles.Note de bas de page 53 La fraude par marketing de masse peut impliquer d'autres types de fraudes dont il est question dans ce tableau (p. ex., fraude amoureuse, fraude en matière d'investissement). |
La fraude par marketing de masse implique souvent l'usurpation d'identité dans les secteurs bancaire, hypothécaire, juridique, des cryptoactifs et de l'investissement traditionnel. Bien que certains GCO établis au Canada soient impliqués, les acteurs étrangers, qui font parfois appel à des associés canadiens pour l'acheminement des paiements, jouent un rôle important dans cette activité. Les opérations organisées à l'étranger (p. ex., les centres d'appels frauduleux en Asie du Sud-Est) gagnent en popularitéNote de bas de page 54. La GRC a vu des produits de la criminalité être envoyés vers plusieurs marchés, notamment en Asie du Sud-Est, dans les Caraïbes, en Amérique du Sud, en Europe, en Afrique de l'Ouest et en Océanie. Certains acteurs étrangers sont connus pour utiliser un éventail de méthodes et de techniques de recyclage des produits de la criminalité, y compris le schtroumpfage, la structuration, les prête-noms et les mules, les sociétés fictives, les sociétés-écrans, les ESM (y compris des SITV) et les systèmes bancaires clandestins illicites. |
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Fraude en matière d'investissement Type de fraude (souvent commis dans des opérations de fraude par marketing de masse) qui cherche à appâter une victime potentielle avec des promesses de placements à risques faibles ou nuls et des rendements élevés qui sont finalement inexistants. Il peut inclure des investissements liés à l'immobilier et aux cryptoactifs, ainsi que des combines à la Ponzi et des systèmes pyramidaux. |
En 2023, les fraudes en matière d'investissement représentaient l'un des trois principaux types de fraudes, avec les niveaux les plus élevés de pertes pour les victimes déclarées. Environ 60 % des 310 millions de dollars de pertes déclarés au CAFC étaient liés à des fraudes d'investissement dans des cryptoactifs. L'analyse de la GRC a montré que les personnes qui se livrent à cette activité démontrent la capacité d'exploiter divers secteurs d'activité et à employer diverses méthodes pour recycler les produits de la fraude. Ils utilisent notamment des cryptoactifs, des administrations étrangères à risque élevé dont la réglementation sur la lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes est faible, des sociétés fictives/sociétés-écrans et des transferts électroniques de fonds à l'intérieur ou à l'extérieur du Canada. Les activités transactionnelles liées aux produits de la fraude peuvent également comprendre de la structuration, du schtroumpfage, des prête-noms et des mules. |
Fraude sur les marchés financiers Type de fraude en matière d'investissement en lien avec les marchés financiers (bourses, marchés d'options, etc.), tant au pays qu'à l'étranger. Il comprend les inconduites connexes, telles que les délits d'initiés interdits, les faux prospectus, la fraude portant atteinte au marché public, la manipulation frauduleuse des bourses et la manipulation frauduleuse des opérations boursières. |
La fraude sur les marchés financiers est un crime très sophistiqué. Ses acteurs exploitent l'industrie des services financiers, principalement du secteur bancaire au Canada et à l'étranger, pour recycler les produits de la criminalité. On a également pu observer des blanchisseurs d'argent professionnels facilitant les mouvements de fonds. L'étendue de la participation des GCO canadiens dans ce domaine n'est pas totalement connue. Les virements télégraphiques, le dépôt de lettres de crédit et les traites bancaires sont des méthodes pour recycler les produits de la criminalité par l'intermédiaire du secteur bancaire. En outre, des transferts de fonds au profit d'une société ouverte suivis d'un transfert immédiat de fonds à des tiers ou à des personnes morales sans aucun lien dans plusieurs administrations ont également été observés. |
Fraude amoureuse Type de fraude (souvent commis dans des opérations de fraude par marketing de masse) par lequel les auteurs expriment de fausses intentions amoureuses pour accéder à l'argent, aux comptes bancaires ou aux cartes de crédit d'une victime. |
Les stratagèmes de fraude amoureuse sont souvent organisés dans des pays étrangers en ciblant les Canadiens. Selon les données de la GRC, le recyclage des produits de la fraude amoureuse ressemble beaucoup à celui d'autres types de fraude par marketing de masse. Les victimes de fraude amoureuse peuvent également être utilisées comme mules involontaires pour blanchir de l'argent, généralement acquis auprès d'une autre victime ou d'une activité criminelle. Plus de 58 millions de dollars ont été déclarés perdus au CAFC à cause de fraudes amoureuses en 2024. |
Fraude hypothécaire Fausse déclaration délibérée de renseignements pour obtenir un financement hypothécaire qui ne serait pas accordé autrement. |
La fraude hypothécaire est associée à des GCO sophistiqués, principalement à l'étape d'intégration du recyclage des produits de la criminalité. Les criminels peuvent créer des demandes de prêt frauduleuses et exploiter des acteurs tiers, comme des prête-noms ou des sociétés fictives, pour masquer la transaction immobilière et s'en distancerNote de bas de page 55. Une fois le prêt approuvé et les fonds avancés, les criminels peuvent alors faire passer des fonds illicites pour légitimes. On a également observé que la fraude hypothécaire facilitait d'autres activités criminelles des GCO, comme la production et la distribution de drogues illégales ou la gestion d'une maison de prostitution. Les GCO impliqués dans la fraude hypothécaire et le recyclage de leur argent par l'immobilier sont principalement concentrés en Colombie-Britannique et en Alberta. Les GCO impliqués dans la fraude immobilière ciblent les grandes banques canadiennes, les investisseurs immobiliers, les propriétaires ou les locatairesNote de bas de page 56. |
Fraude contre l'identité Utilisation de renseignements personnels falsifiés ou volés, souvent à des fins criminelles. |
La fraude contre l'identité est associée aux GCO sophistiqués, en particulier ceux qui ont accès à des compétences technologiques hautement qualifiées. La GRC a constaté que ce type de fraude implique souvent un accès non autorisé à distance à des comptes financiers, provoquant le transfert de titres ou de fonds en dehors des comptes des victimes. Ces plateformes ont souvent mis en œuvre plusieurs niveaux de sécurité et peuvent comprendre les coordonnées bancaires de dépôt direct des victimes. Les auteurs de fraude contre l'identité affichent des connaissances et des capacités sophistiquées dans la redirection des fonds par l'intermédiaire du système bancaire officiel vers des comptes sous leur contrôle pour avoir accès aux fonds générés par la fraude. De plus, les fraudeurs commettent souvent des escroqueries à distance dans plusieurs juridictions internationales et nationales, en utilisant la technologie pour éviter toute détection par les forces de l'ordreNote de bas de page 57. En 2024, 9 487 cas de fraude d'identité ont été signalés au CAFCNote de bas de page 58. |
Fraude par carte de paiement Type de fraude qui consiste à dérober une carte de crédit ou de débit, ou les renseignements de paiement connexes, et à l'utiliser pour effectuer des achats ou retirer des fonds. |
Les GCO demeurent impliqués dans la fraude par carte de paiement. Les groupes impliqués activement dans ces menaces sont également connus pour participer à d'autres marchés criminels et peuvent utiliser le produit de la fraude par carte de paiement pour financer d'autres activités criminelles. Ces groupes sont principalement basés en Ontario et en Colombie-Britannique, mais ont le potentiel de commettre des fraudes par carte de paiement à l'extérieur de leurs administrations respectives. On soupçonne plusieurs secteurs d'être utilisés pour recycler les produits de la fraude par carte de paiement, y compris les institutions financières, les ESM et les casinos en ligne, physiques et routiers, par de multiples méthodes, notamment l'utilisation de cryptoactifs, de la structuration des dépôts bancaires, du schtroumpfage, de sociétés-écrans, de prête-noms et de mules. Les produits de paiement prépayés sont attrayants pour le recyclage des fonds impliqués dans cette fraude en raison de leur facilité d'utilisation et de leur large acceptationNote de bas de page 59. |
Lancé en juin 2017, le projet Caméléon est un partenariat public-privé sous la direction de HSBC CanadaNote de bas de page 60 qui se concentre sur le recyclage des produits provenant de la fraude amoureuse et de la fraude liée au besoin urgent d'argent (arnaque des grands-parents). Ce projet a mobilisé des entreprises, CANAFE et des organismes d'application de la loi pour repérer les activités illicites et signaler les opérations douteuses, dans le but de protéger les victimes et leur argent. En consultation avec le CAFC, CANAFE a publié une alerte opérationnelle sur le recyclage des produits de la fraude amoureuse en 2019Note de bas de page 61.
En 2024, le Service de police de Toronto a procédé à 12 arrestations et a porté 102 accusations dans le cadre d'une importante enquête sur une fraude contre l'identité intitulée Projet Déjà Vu. L'enquête a débuté en 2022 à la suite d'un signalement d'une institution financière où plusieurs comptes synthétiques avaient été ouverts. L'enquête a révélé un stratagème par lequel les auteurs auraient créé plus de 680 identités synthétiques uniques et les auraient exploitées pour ouvrir des centaines de comptes de banque et de crédit dans des institutions financières de l'Ontario.
Le stratagème a entraîné des pertes d'environ 4 millions de dollars. La police a récupéré plusieurs dizaines de documents d'identité synthétique et des centaines de cartes de paiement et saisi environ 300 000 $ en espèces canadiennes et étrangères à titre de produits de la criminalité. Le Service de police de Toronto a reçu l'appui des services de police régionaux de Halton, Peel et Waterloo, de l'ARC et de CANAFE dans son enquête. En général, les comptes obtenus sous des identités synthétiques sont connus pour faciliter d'autres infractions criminelles graves, notamment le recyclage de produits provenant de la traite de personnes, du trafic de drogues et des vols à main arméeNote de bas de page 62.
En 2024, la Police provinciale de l'Ontario (PPO) a lancé le projet Atlas, une initiative visant à lutter contre la fraude mondiale en matière d'investissement dans les cryptomonnaies qui touche des gens dans le monde entier, y compris en Ontario. Le projet a pour objectif de contrer la fraude organisée, d'aider les victimes à récupérer les fonds volés et d'éduquer le public sur les escroqueries liées à l'investissement dans les cryptomonnaies. Dans le cadre de l'initiative, les enquêteurs de la PPO peuvent communiquer de manière proactive avec les personnes qui ont subi des pertes afin de soutenir les efforts de récupération de cryptomonnaies pour les victimes ou d'appuyer les poursuites contre les contrevenants.
En novembre 2024, l'initiative a permis d'empêcher le vol de plus de 70 millions de dollars en cryptomonnaies par les cybercriminels et de geler plus de 24 millions de dollars en pertes frauduleuses. En collaboration avec des partenaires d'application de la loi du monde entier, les enquêteurs ont identifié plus de 2 000 adresses de portefeuille de cryptomonnaies liées à des victimes de fraude dans 14 pays, dont le Canada, les États-Unis, l'Australie, l'Allemagne et le Royaume-UniNote de bas de page 63.
Menace de recyclage des produits de la criminalité liée à la fraude commerciale et au recyclage de produits de la criminalité de nature commerciale : La fraude commerciale implique la fausse déclaration intentionnelle de renseignements commerciaux et douaniers. La fraude commerciale liée au commerce international de marchandises constitue une infraction désignée pour le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes au Canada lorsque la fraude entraîne une perte de revenus pour le gouvernement du Canada (droits et taxes). La fraude commerciale ayant un lien avec le Canada se produit au moyen de divers mécanismes, y compris la fausse facturation, la description erronée des marchandises et l'utilisation d'expéditions fictives.
Le recyclage des produits de la criminalité de nature commerciale consiste à dissimuler les produits du crime provenant de diverses infractions sous-jacentes et à transférer de la valeur par le biais de transactions commerciales afin de légitimer leur origine illicite. Le blanchiment d'argent par le commerce utilise la fraude commerciale comme principale méthode pour transférer de la valeur avec des vendeurs et des acheteurs complices dans différentes juridictions, en utilisant diverses techniques pour falsifier le prix, la valeur, la quantité ou la qualité des importations ou des exportations.
Description erronée des marchandises |
Déclarer de manière erronée le type de produit ou sa qualité crée un écart entre la valeur du produit déclaré et ce qui est réellement expédié. |
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Facturation multiple |
En fournissant plusieurs factures ou déclarations pour les mêmes marchandises, le vendeur peut justifier plusieurs paiements pour un seul envoi, que ce soit par l'intermédiaire de la même institution financière ou de plusieurs institutions financières. |
Surévaluation et sous-évaluation |
Les marchandises sont facturées ou déclarées aux services douaniers au-dessus ou en dessous de leur valeur réelle. La sous-évaluation des biens permet aux acheteurs d'obtenir une valeur excédentaire une fois qu'un paiement est effectué. De même, la surévaluation d'un bien permet au vendeur de gagner l'excédent de valeur au moment du paiement des biens en question. |
Cargaisons surévaluées et sous-évaluées |
Gonfler la quantité réelle de marchandises expédiées sur les déclarations douanières permet à l'acheteur de remettre l'excédent de valeur au vendeur, tandis que la réduction de la quantité réelle de marchandises expédiées sur les déclarations douanières permet au vendeur de remettre l'excédent de valeur à l'acheteur. |
Cargaisons fantômes |
Présenter et traiter des documents douaniers et d'expédition ainsi que les paiements correspondants sans jamais expédier de marchandises réelles. |
Transferts financiers fantômes |
Transférer des fonds à titre de paiements pour des marchandises sans faire de déclaration aux services douaniers ni expédier de marchandises réelles. |
On estime que des montants significatifs de produits illicites sont blanchis chaque année au Canada par le biais de fraudes commerciales et de blanchiment d'argent de nature commerciale. On estime qu'environ 80 % des flux financiers illicites à l'échelle mondiale se font dans le cadre de la fausse facturation utilisée dans les stratagèmes de recyclage de produits de la criminalité de nature commercialeNote de bas de page 64. Le GAFI a noté que les « transactions d'un compte ouvert » – ventes internationales dans lesquelles les marchandises sont expédiées et livrées avant l'échéance du paiement et qui sont utilisées dans environ 80 % des transactions commerciales internationales – sont particulièrement vulnérables aux stratagèmes de recyclage de produits de la criminalité de nature commercialeNote de bas de page 65.
Centre d'expertise sur la fraude commerciale et le blanchiment d'argent par voie commerciale
En avril 2020, le gouvernement a créé le Centre d'expertise sur la fraude commerciale et le blanchiment d'argent par voie commerciale (le « Centre d'expertise ») au sein de l'ASFC. Le Centre d'expertise détecte les transactions douanières non conformes suspectes et produit des renseignements que les agents de l'ASFC peuvent consulter pour confirmer la non-conformité et prendre les mesures appropriées. Cela peut comprendre la saisie de marchandises et l'imposition de sanctions pécuniaires en vertu de la loi douanière, ou le renvoi des formes les plus graves de fraude commerciale, comme le recyclage des produits de la criminalité de nature commerciale, aux enquêtes douanières et criminelles.
Ce travail a été élargi en 2024 par la création du Centre de lutte contre la criminalité financière frontalière en tant que nouvelle division de l'ASFC. La nouvelle division comprend le Centre d'expertise existant en plus de deux nouvelles capacités annoncées dans l'Énoncé économique de l'automne 2023 et le budget de 2024 : la création d'une unité de la transparence commerciale et d'un nouveau cadre pour les enquêteurs responsables de la conformité réglementaire. Ces enquêteurs permettront à l'ASFC d'obtenir de nouveaux pouvoirs en vertu de la nouvelle partie 2.1 (Déclaration de marchandises) de la LRPCFAT, qui est entrée en vigueur en avril 2025 et élargit le mandat de l'ASFC au-delà des enjeux douaniers pour assurer la conformité des flux de marchandises à destination et en provenance du Canada aux fins de la LRPC/FAT.
Réponse stratégique du Canada
Les stratagèmes de recyclage de produits de la criminalité de nature commerciale peuvent varier en complexité et en sophistication, car les criminels peuvent se servir de n'importe quelle marchandise, y compris de celles pour lesquelles des droits de douane élevés s'appliquent. Les stratagèmes simples dissimulent souvent des valeurs illicites en achetant et en vendant des biens difficiles à évaluer, comme des œuvres d'art et des antiquités, ou des biens recherchés, comme des véhicules et des produits de luxe. À l'inverse, les stratagèmes très complexes intègrent souvent des techniques professionnelles de recyclage des produits de la criminalité, y compris l'utilisation de sociétés fictives, de produits financiers complexes ou opaques, comme les fiducies, et de méthodes de commerce de marchandises, comme le transit par des zones franches.
Les GCO et les acteurs terroristes sont connus pour s'appuyer sur des techniques de recyclage des produits de la criminalité de nature commerciale, généralement facilitées par des réseaux professionnels de recyclage des produits de la criminalité, notamment des contrôleurs financiers internationaux. Les contrôleurs de fonds internationaux sont des blanchisseurs d'argent professionnels transnationaux qui se spécialisent dans le transfert de valeur par des moyens formels et informels à l'échelle mondiale pour le compte des GCO. Ils sont particulièrement prolifiques dans la mise en œuvre de stratagèmes de recyclage des produits de la criminalité de nature commerciale. Leurs connaissances, leur expertise et leur portée mondiale leur permettent de manipuler de multiples chaînes commerciales, processus douaniers et mécanismes de financement, souvent sous la couverture d'une entreprise apparemment légitime.
Menace de recyclage des produits de la criminalité liée à d'autres crimes fiscaux : L'évasion fiscale se définit comme le non-respect intentionnel des lois fiscales du Canada par des actions comme la falsification ou l'altération de documents et de déclarations, l'omission d'inscrire un renseignement important dans un registre ou un livre de comptes, la dissimulation d'un revenu ou le gonflement des dépenses. D'autres crimes fiscaux peuvent inclure la sous-évaluation délibérée du revenu ou la réclamation d'un faux remboursement, d'une fausse remise ou d'une fausse prestation. Les produits de l'évasion fiscale et d'autres crimes fiscaux sont considérés comme des produits de la criminalité et recoupent souvent le recyclage des produits de la criminalité, car les criminels utilisent des techniques propres à ce domaine pour dissimuler la véritable source des fondsNote de bas de page 66. L'évasion fiscale et les autres crimes fiscaux ont de graves conséquences, car ils réduisent les revenus du gouvernement et minent la confiance du public dans le régime fiscal canadien.
L'ARC a estimé la perte potentielle de revenus fiscaux résultant de l'inobservation fiscale, ce qui se reflète dans l'écart fiscal. L'écart fiscal, qui est le résultat d'actions intentionnelles et non intentionnelles, est estimé à des milliards de dollars par annéeNote de bas de page 67. De plus, l'économie souterraine, étroitement liée à l'évasion fiscale, devrait dépasser les 72 milliards de dollarsNote de bas de page 68 en 2023, soit 2,5 % du PIB total. Elle comprend les activités économiques, légales ou illégales, qui ne sont pas déclarées et qui entraînent le non-respect des lois fiscales. Selon ces estimations, les produits de la criminalité provenant de l'évasion fiscale ou d'autres crimes fiscaux sont susceptibles d'être importants.
L'évasion fiscale est souvent pratiquée par des criminels spécialisés, y compris les GCO, qui peuvent également orchestrer d'autres stratagèmes de crime fiscal (p. ex., réclamer le remboursement frauduleux de droits ou d'impôt). La GRC a constaté que les GCO participant à l'évasion fiscale sont très structurés et recyclent souvent leurs produits illicites par l'intermédiaire de sociétés et de comptes à l'étranger. On a souvent établi un lien entre ces GCO et d'importants réseaux de recyclage des produits de la criminalité qui tirent parti du système financier mondial pour dissimuler des revenus et des actifs. Par exemple, le projet Collecteur a découvert un stratagème de recyclage des produits de la criminalité avec des ramifications dans plusieurs pays exploitant une ESM et utilisant de fausses factures. Quatre contribuables ont été reconnus coupables d'évasion fiscale dans le cadre de cette affaireNote de bas de page 69.
Environ 900 personnes, entreprises et fiducies canadiennes ont été trouvées dans la fuite des « Panama Papers » de 2016. Bien que la présence du nom d'une personne sur cette liste n'implique pas nécessairement la non-observation de la législation fiscale canadienne, il s'agit d'un indicateur que des structures d'entreprise et des produits et services financiers complexes à l'étranger continuent d'être utilisés pour transférer des bénéfices vers des pays à faible taux d'imposition et transférer des fonds vers des comptes non déclarés aux autorités fiscales à des fins d'évitement fiscal et d'évasion fiscaleNote de bas de page 70. De plus, les registres opaques des sociétés au Canada ont toujours permis aux investisseurs étrangers sans scrupules d'échapper à l'impôt sur le revenu par l'intermédiaire de structures d'entreprise.
Enquêtes criminelles de l'ARC
L'ARC cible les promoteurs de stratagèmes fiscaux sophistiqués et enquête sur des cas importants d'évasion fiscale comportant une composante internationale. L'ARC accorde également la priorité aux éléments suivants :
- les enquêtes conjointes avec d'autres organismes d'application de la loi, y compris les cas d'évasion fiscale impliquant le recyclage de produits de la criminalité;
- les cas importants d'évasion fiscale liée à l'impôt sur le revenu ou la taxe sur les produits et services/taxe de vente harmonisée (TPS/TVH), y compris l'économie souterraine;
- les infractions fiscales graves ciblant les prestations, les crédits et les faux remboursements.
La menace de recyclage des produits de la criminalité existe dans tous les cas de crimes fiscaux. Dans les poursuites criminelles, l'ARC s'attaque au cas par cas aux aspects de l'affaire liés au recyclage des produits de la criminalité.
Réponse stratégique du Canada
Les méthodes des auteurs de crimes fiscaux ont évolué au cours des dernières années. Le lancement des prestations d'urgence et des subventions canadiennes liées à la COVID-19 en 2020 a été suivi d'une augmentation des cyberattaques, des vols d'identité et des fraudes contre les contribuablesNote de bas de page 71. L'ampleur du programme de prestation d'urgence liée à la COVID-19 s'est traduite par une augmentation importante des cas où des personnes non autorisées ont accédé aux comptes de contribuables de l'ARC pour changer leur adresse ou leurs coordonnées de dépôt direct dans le but de demander une prestation au nom d'un contribuable légitime et de rediriger les paiements vers une autre adresse ou un autre compte bancaire associé à la personne non autorisée. L'ARC a déployé de multiples mesures de sécurité, technologies, processus et mesures de contrôle pour assurer la sécurité des renseignements des contribuables afin de combattre des menacesNote de bas de page 72.
Certains fournisseurs de conseils fiscaux – y compris les comptables, les avocats et les conseillers financiers – sont utilisés, consciemment ou à leur insu, par les acteurs malveillants qui cherchent à contourner ou à éviter l'impôt ou à obtenir des remboursements frauduleux à l'aide de diverses techniques. Le secteur immobilier canadien représente également un mécanisme notable utilisé par les criminels pour faciliter l'évasion fiscale et le recyclage des produits de la criminalité. Les professionnels du secteur immobilier peuvent, sciemment ou à leur insu, faciliter l'évasion fiscale et le recyclage des produits de la criminalité en manipulant le prix d'une propriété donnée ou en utilisant des prête-noms, de fausses identités, des sociétés ou des fiducies pour cacher l'identité des bénéficiaires effectifsNote de bas de page 73.
Une enquête de l'ARC a révélé qu'un résident d'Ottawa, en Ontario, a utilisé sa conjointe pour transférer des revenus non déclarés provenant de « contrats privés ». Pour les années 2008 à 2012, les accusés ont déclaré un revenu de leur cabinet dentaire dans leurs déclarations de revenus individuelles, mais ont ensuite déduit à tort la totalité du montant à titre de dépense d'entreprise, évitant ainsi un impôt fédéral de plus de 500 000 $. Ils ont plaidé coupables à un chef d'accusation de fraude fiscale et de recyclage des produits de la criminalité en vertu du Code criminel et ont été condamnés en 2019 à une peine d'emprisonnement avec sursis de deux ans moins un jour. C'était la première fois au Canada que les dispositions du Code criminel sur le recyclage des produits de la criminalité étaient appliquées avec succès à une condamnation pour évasion fiscale.
Menaces moyennes de recyclage des produits de la criminalité
Menace de recyclage des produits de la criminalité liée au jeu illégal : En vertu du Code criminel, toutes les formes de jeux et de paris (jeux de hasard) sont interdites, et diverses infractions criminelles peuvent s'appliquer selon l'activité spécifique. Les activités de jeux et de paris légaux doivent être visées par une ou plusieurs des exemptions du Code criminel, comme les loteries mises sur pied et gérées par une province, les paris sur les courses de chevaux réglementés par l'Agence canadienne du pari mutuel, ou d'autres exemptions, comme les paris privés entre des personnes qui ne prennent part d'aucune façon à l'industrie du jeu. Cette interdiction générale s'applique aux casinos en ligne et aux paris sportifs. Les exploitants de jeux illégaux minent les contributions économiques et fiscales de l'industrie du jeu légal et peuvent exposer les clients à des risques majeurs.
Compte tenu de la taille estimée du secteur canadien du jeu, de son importance pour le crime organisé et de l'ampleur des saisies réalisées dans le passé avec des mesures d'application de la loi antérieures, on estime que l'ampleur du jeu illégal au Canada génère des montants significatifs de produits de la criminalité chaque année. Le crime organisé est le principal fournisseur de jeux illégaux au Canada, principalement par l'intermédiaire des maisons de jeux illégales. En 2023, le SCRC a évalué que 39 GCO actifs au Canada sont impliqués dans des stratagèmes de jeu illégaux. Bien que le marché du jeu illégal au Canada soit petit, il est très rentable.
Le jeu illégal peut à la fois générer des produits de la criminalité et être utilisé pour recycler des produits de la criminalité. Les produits de la criminalité proviennent généralement de diverses infractions sous-jacentes, notamment le trafic de drogues, la traite de personnes et le trafic d'armes. Des limites de mise élevées de 20 000 $ par main pour certains jeux permettent de recycler rapidement de l'argent dans des volumes élevés. Les profits des maisons de jeux illégales sont recyclés par l'intermédiaire de sociétés à numéro ou de biens immobiliers et sont investis dans d'autres activités criminellesNote de bas de page 74. Les exploitants de jeux illégaux ont également démontré leur capacité à exploiter les entités financières et les ESM, y compris les fournisseurs de services de paiement, pour recycler les produits de la criminalité par l'intermédiaire de sites de jeu autorisés et non autorisés hébergés au pays et à l'étranger. Note de bas de page 75
Il existe également des risques de recyclage des produits de la criminalité associés aux sites de paris en ligne connus sous le nom de « paris sportifs » exploités par les GCO au Canada. Les paris sportifs en ligne comprennent des structures de gestion complexes pour isoler ceux qui sont au sommet de l'organisme. Les paris sportifs se font par transfert d'argent directement du parieur à l'agent, les origines et les flux connexes n'étant pas retraçables. L'impact des paris sportifs en ligne légaux au Canada sur le marché des paris sportifs illicites n'a pas été entièrement évalué au moment de la rédaction du présent rapport.
Au début de 2022, l'unité d'application spéciale des forces combinées de l'équipe conjointe d'enquête sur les jeux illégaux de la Colombie-Britannique a ouvert une enquête sur un café après avoir reçu des rapports d'activités de jeu illégales. En juillet 2023, l'équipe conjointe a arrêté 11 personnes et saisi plusieurs articles dans le cadre de cette enquête, notamment des terminaux de loterie vidéo, des téléphones cellulaires et environ 14 000 $ en espècesNote de bas de page 76.
Menace de recyclage des produits de la criminalité liée à la corruption (y compris les pots-de-vin et la collusion) : Au Canada, la corruption est d'étendue et d'envergure variables et prend de nombreuses formes différentes, allant du versement de pots-de-vin à petite échelle pour obtenir un avantage ou un bénéfice, au détournement par un fonctionnaire de biens gouvernementaux à des fins personnelles, en passant par des stratagèmes de corruption ou de collusion à grande échelle visant à obtenir illégalement des contrats publics lucratifs. Les tentatives de dissimuler ou de faciliter des paiements ou des produits issus de la corruption peuvent en soi tirer parti de techniques de recyclage des produits de la criminalitéNote de bas de page 77. En plus des activités de corruption menées au pays, certaines entreprises canadiennes ont été impliquées dans le versement de pots-de-vin à des fonctionnaires étrangers pour promouvoir leurs intérêts commerciauxNote de bas de page 78. Bien que certains stratagèmes ne constituent pas de la corruption, ils peuvent impliquer une fraude dans un processus d'approvisionnement et générer des revenus gonflés.
La corruption et le recyclage des produits qu'elle génère ont de graves conséquences économiques et sociales pour le Canada et les Canadiens. La corruption érode la confiance dans les institutions, favorise la concurrence déloyale et conduit souvent au détournement des ressources publiques des services ou des investissements essentiels qui favorisent le développement durable et la prospérité à long terme.
Les cas de corruption peuvent être complexes et impliquer de multiples acteurs, y compris des fonctionnaires à tous les niveaux ou des entrepreneurs. Les acteurs peuvent faire partie de réseaux complexes et hautement structurés capables de disperser et d'occulter les sources de fonds illégaux, notamment en s'associant à des entreprises apparemment crédibles et établies. De telles opérations peuvent être camouflées comme des transferts légitimes et, à ce titre, les enquêtes peuvent échouer à retracer de manière appropriée les fonds qui circulent rapidement ou à travers des structures opaques. Les progrès technologiques, comme les applications de messagerie cryptée et les messages qui disparaissent, continuent de faciliter les stratagèmes de corruption et de collusion.
Le SCRC estime qu'une proportion relativement faible des GCO est impliquée dans la corruption, la subornation et les activités connexes de recyclage des produits de la criminalité au Canada. L'indice de perception de la corruption 2024 de Transparency International classe également le Canada au 15e rang sur 180 pour ce qui est des pays les moins corrompus, devant la plupart de ses pairs et au deuxième rang du G7Note de bas de page 79.
Personnes politiquement vulnérables et dirigeants d'organisations internationales
Les personnes politiquement vulnérables (PPV) et les dirigeants d'organisations internationales (DOI) occupent des postes à risque de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Les PPV et les DOI peuvent être exploités par des criminels, qui utilisent leur statut et leur pouvoir pour se livrer au recyclage des produits de la criminalité ou au financement des activités terroristes, ou peuvent eux-mêmes commettre des actes criminels en cherchant à utiliser leurs réseaux et leurs ressources pour recycler les produits de leurs crimes, comme les pots-de-vin ou la corruption. Les membres de la famille et les proches collaborateurs des PPV et des DOI sont également des cibles potentielles, car ces personnes peuvent plus facilement éviter la détection.
Bien que les fonctionnaires canadiens ne soient pas à l'abri des pots-de-vin et de la corruption, la Commission Cullen a souligné que les fonctionnaires corrompus étrangers qui tentent de protéger le produit de leurs activités illégales en les transférant au Canada présentent un risque accru pour le Canada. Les secteurs de l'économie considérés comme les plus vulnérables aux abus de la part des PPV et des DOI pour le recyclage des produits de la criminalité comprennent l'immobilier, les banques, les casinos, les fournisseurs de services aux entreprises et la profession juridique.
L'Équipe des enquêtes internationales et de nature délicate de la GRC, à Ottawa, a mené à bien une enquête sur SNC-Lavalin et ses filiales dans le cadre du projet Assistance pour avoir versé plus de 47 millions de dollars à des fonctionnaires étrangers afin d'obtenir des contrats en Libye. En 2020, un des dirigeants de SNC-Lavalin a été condamné à huit ans et six mois d'emprisonnement pour fraude, corruption d'un agent public étranger, recyclage des produits de la criminalité et deux chefs d'accusation pour possession de produits de la criminalité devant la Cour supérieure du Québec.
En lien avec cette condamnation, la Cour a ordonné la confiscation des actifs du dirigeant dont la valeur est estimée à plus de 4 millions de dollars. Il a également été condamné à une amende de 24,6 millions de dollars tenant lieu de confiscation d'autres produits de la criminalité.
SNC-Lavalin, en tant qu'entreprise, a également reçu une amende de 280 millions de dollars et s'est vu remettre une ordonnance de probation de trois ans, assortie de conditions qui obligent le groupe à maintenir et, au besoin, à renforcer encore son programme de conformité, ses pratiques en matière de tenue de documents et ses normes et procédures de contrôle interneNote de bas de page 80.
Menace de recyclage des produits de la criminalité liée à la contrebande transfrontalière de tabac et d'armes à feu illicites : Le Canada continue de subir une contrebande transfrontalière de tabac et d'armes à feu illicites. Le tabac illicite (aussi appelé tabac de contrebande) désigne tout produit du tabac, y compris le tabac brut, qui n'est pas conforme à la réglementation canadienne sur le tabac en matière d'importation, de fabrication, de distribution et de taxation. Le tabac de contrebande mine les efforts du gouvernement pour réduire les taux de tabagisme, génère des profits qui alimentent d'autres activités criminelles et entraîne des pertes de recettes fiscales.
Le marché du tabac illicite au Canada comprend les cigarettes contrefaites importées de l'étranger; les cigarettes illégales fabriquées au Canada et aux États-Unis dans les réserves autochtones et vendues au Canada; les cigarettes produites légalement au Canada, aux États-Unis ou à l'étranger et vendues en franchise de taxe à des non-Autochtones; et le tabac « haché fin » importé illégalement, principalement par des fabricants canadiens. Les plus grandes quantités de tabac illicite trouvées au Canada continuent de provenir d'exploitations de fabrication basées sur les réserves autochtones qui chevauchent le Québec, l'Ontario et l'État de New York.
En 2024, les enquêteurs criminels de l'ASFC ont ouvert une enquête sur une opération de contrebande de cigarettes après que des agents de l'ASFC ont intercepté de nombreuses cargaisons de cigarettes de contrebande aux Opérations commerciales de l'aéroport international de Vancouver et au Centre du courrier international de Vancouver. À la suite d'une enquête, en novembre 2024, les enquêteurs criminels de l'ASFC ont exécuté un mandat de perquisition dans une résidence de Vancouver. Les articles suivants ont été saisis :
- 3 826 cartouches de cigarettes de contrebande;
- 4,2 kilogrammes de cannabis illégal;
- 51 915 $ en argent comptant et jetons de casino.
Les agents de l'ASFC ont arrêté un résident de Vancouver de 34 ans pour son implication présumée dans l'opération de contrebande de cigarettes. L'enquête est en cours.
Les renseignements financiers confirment que les GCO actifs dans la contrebande et le trafic de tabac illicite ont la sophistication et la capacité d'utiliser une variété de secteurs et de méthodes (p. ex., combinaison des produits de la criminalité avec les revenus légalement obtenus, structuration, schtroumpfage) pour recycler la grande quantité de produits en espèces générée par ces crimes.
Le marché des armes à feu illégales au Canada continue d'attirer des GCO de tous niveaux de sophistication, principalement des gangs de rue opérant dans les villes métropolitaines, ainsi que des personnes ayant des tendances criminelles. Le SCRC estime que plus de 70 GCO participent à la contrebande d'armes à feu illicites en provenance des États-Unis. De plus en plus, les GCO se spécialisent dans la fabrication d'armes à feu de fabrication privée et la contrebande des composants nécessaires. En général, les GCO utilisent les armes à feu pour renforcer leur position sur d'autres marchés criminels, comme le marché des drogues illégales.
En ce qui concerne le risque de recyclage des produits de la criminalité, les acteurs individuels ont tendance à recycler les produits de la criminalité pour un usage personnel après la transaction, en utilisant des méthodes et des techniques simples telles que la structuration des dépôts, l'achat de jetons de casino ou l'utilisation de transferts électroniques de fonds. Ils peuvent également compter sur un petit réseau d'associés pour recycler leurs produits. On estime que ces acteurs présentent un faible niveau de sophistication, de capacité et de portée. La GRC a constaté que la plupart des transactions semblent concerner des ventes ponctuelles plutôt que des cargaisons plus importantes d'armes à feu.
Pour les acteurs plus sophistiqués, le trafic d'armes à feu n'est probablement qu'un aspect de leurs activités illégales et, à ce titre, le produit du trafic d'armes à feu ferait partie de leurs activités globales de recyclage des produits de la criminalité. Ces acteurs peuvent également utiliser les services de blanchisseurs d'argent professionnels.
Menace de recyclage des produits de la criminalité liée au passage de clandestins et à la traite de personnes : Le Canada reste une cible pour des réseaux mondiaux de passage de clandestins et de traite de personnes de plus en plus sophistiqués. La traite de personnes implique de recruter, de transporter et de loger des personnes ou d'exercer un contrôle ou une influence sur leurs mouvements afin de les exploiter ou de faciliter leur exploitation, généralement à des fins sexuelles ou de travail forcé. Le passage de migrants ou de clandestins est le fait d'assurer l'entrée illégale dans un pays d'une personne qui n'est ni un ressortissant ni un résident permanent de ce pays. Ce passage peut se faire par voie maritime, aérienne ou terrestreNote de bas de page 81.
En raison de la sous-déclaration de la traite de personnes, il est difficile de déterminer de manière fiable l'ampleur des produits de la criminalité qu'elle génère. À l'échelle mondiale, on estime que la traite des personnes génère 150 milliards de dollars américains par annéeNote de bas de page 82. Au Canada, les gains financiers tirés de la traite des personnes sont considérés comme matériellement importants. La traite des personnes et le passage de clandestins infligent des traumatismes profonds et durables aux victimes en leur causant des dommages physiques et psychologiques.
Au Canada, la forme de traite de personnes la plus détectée par les organismes d'application de la loi est la traite à des fins d'exploitation sexuelle. Les indicateurs de la traite d'une victime comprennent les pages en ligne créées en son nom pour solliciter des clients, les transferts inhabituels vers un tiers inconnu, le dépôt d'argent dans des comptes par des tiers, les virements électroniques avec messages sexuellement explicites et l'achat de quantités inhabituelles de réservations dans des hôtels et de repas de restauration rapideNote de bas de page 83.
Les auteurs de la traite de personnes font preuve d'un niveau modéré de sophistication dans leurs opérations de recyclage des produits de la criminalité. Cependant, la participation des GCO à la traite de personnes indique qu'il est possible d'accroître la sophistication des activités de recyclage des produits de la criminalité dans ce domaine, car elles peuvent les combiner avec d'autres produits d'activités criminels. Le SCRC constate une augmentation de 24 % de la participation des GCO à la traite de personnes depuis 2020, l'exploitation sexuelle nationale demeurant la forme la plus courante de traiteNote de bas de page 84. Les trafiquants de personnes sont généralement connus pour utiliser de l'argent comptant, des cartes prépayées, des virements par courrier électronique et des cryptoactifs. Ils utilisent souvent des mules ou des prête-noms pour recycler les produits de la criminalité, généralement par l'intermédiaire de comptes personnels. Ils tirent également parti de comptes d'entreprise, de sociétés-écrans et d'entreprises commerciales légitimesNote de bas de page 85.
Contrairement à la traite des personnes, le passage de clandestins implique généralement des personnes consentantes. La traite des personnes peut se produire entièrement à l'intérieur d'un même pays, alors que le passage de clandestins n'a lieu que lorsqu'il y a transport entre des pays. La source de profit du passage de clandestins est la redevance que la personne paie pour être passée clandestinement. Dans les cas de traite, les profits sont réalisés par l'exploitation de la victime. Note de bas de page 86 Les personnes faisant l'objet d'un passage de clandestins peuvent devenir des victimes de la traite, car beaucoup sont vulnérables à l'exploitation après être entrées dans un nouveau pays de manière irrégulière, sans beaucoup de liens sociaux ou sans connaître pleinement leurs droits.
Selon une analyse du SCRC, le trafic de migrants serait le fait d'un nombre limité de GCO au Canada. Compte tenu de la sophistication, de la planification logistique et des ressources financières nécessaires à la conduite de ces opérations, les GCO impliqués dans cette activité sont soupçonnés d'être très compétents pour blanchir les produits de leurs crimes. Des sommes importantes peuvent être générées par des opérations de trafic individuelles, par exemple jusqu'à 65 000 $ par personne pour un passage illicite vers le Canada via les Caraïbes et les États-Unis.Note de bas de page 87
Un rapport du GAFI de 2022 a révélé que les SITV constituent la méthode la plus courante de transfert de fonds provenant du trafic de migrants. Cela peut compliquer la conduite des enquêtes financières par les forces de l'ordre. D'autres méthodes incluent le transport physique de fonds par l'intermédiaire de passeurs ou de mules.
Efforts du Canada pour lutter contre le passage de clandestins
Le gouvernement du Canada lutte contre le passage de clandestins en appliquant sa Stratégie de prévention du passage de clandestins. Renouvelée en mars 2024 pour cinq ans, la Stratégie de prévention du passage de clandestins vise à prévenir et à perturber les opérations maritimes de passage de clandestins et à démanteler les réseaux de passeurs de migrants du crime organisé qui ciblent le Canada comme destination. Cette stratégie pangouvernementale, coordonnée par AMC et exécutée par la GRC et IRCC, facilite la collecte de renseignements et la sensibilisation dans les pays d'origine et de transit.
De plus, pour contribuer aux efforts mondiaux de lutte contre le passage de clandestins, le Canada met en œuvre le Plan d'action du G7 pour prévenir et contrer le passage de clandestins, adopté conjointement par les pays du G7 en octobre 2024. Le plan décrit cinq piliers d'action :
- renforcer les capacités des organismes d'application de la loi contre les groupes de passeurs de migrants;
- renforcer la coopération internationale entre les policiers, les magistrats et les agents frontaliers;
- renforcer la coopération avec les pays d'origine et de transit des flux migratoires irréguliers;
- prévenir et sensibiliser;
- accroître la connaissance et la surveillance du passage de clandestins.
Par ce plan d'action, le G7 confirme son engagement à intensifier ses efforts pour prévenir, contrer et éradiquer les GCO qui se livrent au passage de clandestins et à les dépouiller des produits générés par cette activité criminelle.
Efforts du Canada pour lutter contre la traite des personnes
La Stratégie nationale de lutte contre la traite des personnes oriente la réponse du Canada à la traite des personnes. Depuis 2019, cette approche pangouvernementale est menée par le gouvernement fédéral, en collaboration avec les provinces et les territoires, les organisations non gouvernementales et les communautés autochtones. La stratégie s'articule autour de cinq piliers : l'autonomisation, la prévention, la protection, les poursuites et les partenariats. Elle soutient les efforts visant à prévenir la traite, à autonomiser et à soutenir les survivants, à traduire les auteurs en justice et à renforcer la sécurité des collectivités grâce à des investissements ciblés et à une action fédérale coordonnée
Le projet Protect est un partenariat public-privé dirigé par la Banque de Montréal, avec l'aide d'autres banques, d'organismes canadiens d'application de la loi et de CANAFE. Lancé pour la première fois en 2016, le projet Protect cible la traite de personnes à des fins d'exploitation sexuelle en mettant l'accent sur l'aspect du recyclage des produits de la criminalité. L'alerte opérationnelle de 2021 de CANAFE intitulée « Indicateurs actualisés : Recyclage de produits provenant de la traite de personnes à des fins d'exploitation sexuelle » propose 58 indicateurs supplémentaires pour aider les entreprises à mieux détecter et déclarer les opérations douteuses associées à la traite de personnes à des fins d'exploitation sexuelle.
L'objectif du projet est d'améliorer la compréhension collective de cette activité criminelle et d'améliorer la détection du recyclage des produits de la traite de personnes à des fins d'exploitation sexuelle. CANAFE a transmis 147 communications de renseignements financiers liées à la traite de personnes en 2023-2024. Le projet Protect a été élargi en 2023-2024 pour inclure le recyclage des produits associés à la traite de personnes à des fins de travail forcé.
En juillet 2023, l'Équipe d'intervention en matière de trafic de substances de la Saskatchewan de la GRC à Swift Current a fait appel aux renseignements financiers de CANAFE au cours d'une enquête sur une opération de traite de personnes dans le cadre de laquelle on avait utilisé une banque d'emplois populaire pour recruter une femme adulte du Bangladesh séjournant au Canada avec un permis de visiteur. Après avoir fourni à la femme un permis de travail, la personne accusée l'a forcée à travailler de 10 à 12 heures par jour, sept jours par semaine, pendant plusieurs mois dans divers restaurants. Lorsqu'elle ne travaillait pas, elle était obligée de rester dans un sous-sol en béton non aménagé, mal éclairé et fortement endommagé par l'eau. À l'issue de l'enquête, deux personnes ont été inculpées de traite d'une personne. Une personne a également été inculpée de trois chefs d'accusation d'agression sexuelleNote de bas de page 88.
En juin 2024, la GRC et le Groupe de travail régional de Cornwall ont démantelé un réseau international de passage de clandestins qui aurait acheminé des centaines de migrants vers les États-Unis dans la région de Cornwall, en Ontario, entre juillet 2022 et juin 2023. Les migrants auraient payé des milliers de dollars aux passeurs. Les traversées nocturnes dangereuses coûtent la vie à certains migrants. La GRC a identifié et accusé huit personnes associées à ces activités, dont le principal chef de l'opération criminelleNote de bas de page 89.
Menace de recyclage des produits de la criminalité liée à l'extorsion et aux rançongiciels : Il y a extorsion lorsqu'une personne obtient illégalement de l'argent, des biens ou des services d'une personne, d'une entité ou d'une institution par la coercitionNote de bas de page 90. Les incidents d'extorsion ont augmenté considérablement au Canada au cours de la dernière décennie, avec près de 14 000 cas déclarés en 2023Note de bas de page 91. Les principaux types d'extorsion touchant les Canadiens comprennent les rançongiciels et la sextorsion financière.
L'extorsion perturbe les opérations commerciales et augmente les coûts commerciaux associés à la mise en place de systèmes de sécurité ou au paiement de rançons pour protéger les actifs. Pour les particuliers, l'extorsion entraîne souvent des pertes financières, la compromission de données personnelles et des dommages psychologiques. Le produit de l'extorsion permet aux criminels de réinvestir dans l'infrastructure et les ressources nécessaires pour perpétuer davantage ces crimes.
Les criminels impliqués dans l'extorsion peuvent aller des particuliers aux GCO et font preuve de divers niveaux de sophistication, de capacité et de portée pour recycler les produits liés à l'extorsion. Les activités de structuration et de schtroumpfage, de combinaison et de raffinage des casinos peuvent être utilisées pour recycler le produit de l'extorsion, en particulier l'argent comptant.
On a constaté une augmentation de la sophistication du recyclage des produits de la criminalité à mesure que les formes d'extorsion liées à la cybercriminalité se multiplient. Les formes d'extorsion liées à la cybercriminalité qui tirent parti des cryptoactifs – ou qui convertissent les produits de la criminalité en cryptoactifs – ont tendance à utiliser des techniques plus sophistiquées pour transférer des fonds et sont commises par des auteurs de menaces qui disposent d'une expertise technologique pour commettre leurs crimes et dissimuler leur identité et leur emplacement physiqueNote de bas de page 92.
Les rançongiciels sont utilisés lorsqu'un auteur compromet l'appareil d'une victime, crypte ses données et exige une rançon pour fournir une clé de déchiffrement. Les auteurs de rançongiciels exfiltrent souvent des fichiers avant de les chiffrer et menacent de divulguer publiquement des renseignements sensibles si la rançon n'est pas payéeNote de bas de page 93. Depuis 2020, les attaques par rançongiciel ont augmenté en ampleur, en fréquence et en complexité. Une étude réalisée en 2023 par la firme de cybersécurité Palo Alto Networks et l'institut de sondage Angus Reid révèle que la rançon moyenne payée par les entreprises canadiennes était de 1,13 million de dollars, soit une augmentation de près de 150 % en deux ansNote de bas de page 94.
Le modèle de rançongiciel en tant que service, disponible à la location ou à l'achat sur le Web sombre, a réduit les barrières techniques à l'entrée pour les auteurs de telles menaces, contribuant à l'augmentation globale des incidents de rançongiciels. De même, les attaques à l'hameçonnage au Canada sont de plus en plus répandues et sophistiquées grâce aux nouveaux outils et services, y compris les trousses d'hameçonnage en tant que service proposé en ligne aux cybercriminels. Collectivement, de telles attaques peuvent avoir des répercussions importantes sur l'intégrité des principaux secteurs d'activité et du système financier canadien.
Les conséquences des rançongiciels peuvent être considérables et comprennent souvent des perturbations commerciales essentielles, des pertes de données et des coûts de récupération potentiellement importants. Dans les secteurs des infrastructures essentielles, comme les soins de santé, les rançongiciels peuvent provoquer des préjudices physiques à des personnes, voire entraîner des pertes de vies humaines. En raison de leurs conséquences sur les personnes et les capacités des organismes à fonctionner, les rançongiciels sont l'une des formes de cybercriminalité les plus perturbatrices auxquelles se heurte le CanadaNote de bas de page 95.
Les auteurs de menaces par rançongiciel exigent presque exclusivement un paiement sous forme de cryptomonnaie, qui souvent recyclées par des techniques et des services comme des chaînes de pelage (où la cryptomonnaie est transférée par l'intermédiaire d'une série de portefeuilles, avec de petites sommes de fonds « pelées » et encaissées à chaque étape pour brouiller les pistes), des mélangeurs (un service qui mélange des fonds de cryptomonnaie potentiellement identifiables ou « contaminés » avec d'autres), des plateformes de jeu en ligne et d'autres plateformes de FiDé, avant d'être échangées contre de la monnaie fiduciaire dans des bourses de cryptoactifs situées dans des administrations où les contrôles de LRPC/FAT sont faiblesNote de bas de page 96. La vitesse à laquelle les fonds sont transférés, puis échangés avec de la monnaie fiduciaire, rend difficile la détection des paiements de rançon en temps réel.
L'hameçonnage est une attaque par laquelle un escroc appelle une victime, ou lui envoie un texto ou un courriel, ou utilise les médias sociaux pour l'inciter à cliquer sur un lien malveillant, à télécharger des logiciels malveillants ou à divulguer des renseignements sensibles, généralement pour en retirer un gain financier. Les tentatives d'hameçonnage prennent souvent la forme d'un envoi massif de messages généraux en apparence légitimes et en provenance d'une source de confiance comme une institution financière ou un fournisseur de services de messagerie.
En 2021, la GRC a effectué un piratage inversé de serveurs contrôlés par des criminels qui a bloqué un logiciel malveillant conçu pour exploiter les réseaux informatiques contre de l'argent et qui avait facilité des cyberattaques internationales pendant des années. Le logiciel malveillant que la GRC a aidé à démanteler a été utilisé dans des cas de rançongiciel très médiatisés : des propriétaires de réseaux informatiques – généralement de grandes institutions comme des entreprises privées, des ministères ou des universités – qui ont été empêchés d'accéder à leurs propres données jusqu'à ce qu'une rançon importante soit versée à des criminelsNote de bas de page 97.
La sextorsion est une forme de chantage en ligne où la victime est convaincue d'envoyer des images ou des vidéos sexuelles d'elle-même avant d'être menacée de les voir partagées avec d'autres personnes à moins que la victime ne paie le délinquant ou n'envoie d'autres images. L'auteur peut alors menacer de partager le contenu publiquement sur les médias sociaux ou de l'envoyer à ses amis et à sa famille. Bien que la sextorsion puisse toucher n'importe qui, ce crime en ligne touche particulièrement les jeunes Canadiens âgés de 14 à 24 ansNote de bas de page 98. Les répercussions psychologiques de la sextorsion sur les victimes peuvent être graves et durables. Dans certains cas, ces impacts peuvent avoir un aboutissement extrême, comme l'automutilation ou même le suicide.
Le Centre canadien de protection de l'enfance rapporte qu'il reçoit en moyenne sept signalements de sextorsion par jour et que les demandes d'argent sont souvent liées aux réseaux internationaux de GCONote de bas de page 99. Les paiements sont effectués par divers moyens, y compris les cryptoactifs, les virements électroniques et les ESM. Habituellement, une fois que les fonds ne sont plus sous le contrôle de la victime, la valeur est transférée rapidement pour tenter de masquer la source illicite des fonds.
En plus de la sextorsion, la production et la distribution de matériel pédopornographique est un autre sujet de préoccupation important. L'analyse de CANAFE relative à l'exploitation sexuelle des enfants en ligne indique que les expéditeurs de paiement (à savoir les acheteurs présumés) sont généralement des hommes âgés de 40 à 60 ans, et que les transferts sont généralement inférieurs à 100 $ (bien qu'ils soient plus élevés pour certaines destinations de l'Europe de l'Est). La collecte des paiements pour ces contenus se fait en envoyant des cryptomonnaies directement ou indirectement à un marché du Web sombre où ces contenus sont vendus. Des transactions ont également été enregistrées à l'aide d'ESM et d'entreprises de traitement des paiementsNote de bas de page 100.
Stratégie nationale du Canada pour la protection des enfants contre l'exploitation sexuelle sur Internet
La Stratégie nationale pour la protection des enfants contre l'exploitation sexuelle guide la réponse du Canada à l'exploitation sexuelle des enfants en ligne depuis 2004. Elle aborde le problème de l'exploitation sexuelle des enfants en ligne grâce à une approche multidimensionnelle, qui repose sur quatre piliers : la prévention et la sensibilisation ; la traque, la perturbation et les poursuites ; la protection ; et les partenariats, la recherche et le soutien stratégique.
Le projet Shadow est un partenariat public-privé codirigé par la Banque Scotia et le Centre canadien de protection de l'enfance, avec l'appui des organismes canadiens d'application de la loi et de CANAFE pour lutter contre l'exploitation sexuelle des enfants en ligne. L'objectif du projet est d'améliorer la compréhension collective de cette menace et d'améliorer la détection des éléments permettant le recyclage des produits de la traite de personnes à des fins d'exploitation sexuelle des enfants en ligne. CANAFE a transmis 45 communications de renseignements financiers liées à l'exploitation sexuelle d'enfants en ligne en 2023-2024. Les communications de renseignements financiers ont compris 127 déclarations d'opérations douteuses distinctes qui portaient sur 320 sujets d'intérêt provenant des dix provinces et de deux territoires.
Menace de recyclage des produits de la criminalité liée au vol et au vol qualifié : Au Canada, les vols et les vols qualifiés sont commis par un large éventail d'auteurs de menaces. Bien que les vols et les vols qualifiés à petite échelle soient principalement commis par des personnes opportunistes et des petits voleurs, les vols et les vols qualifiés à plus grande échelle sont fréquemment associés aux GCO. Cette évaluation se penche sur les vols et les vols qualifiés les plus graves, y compris le vol d'automobile.
Les victimes de vol, notamment de vol qualifié, subissent des pertes financières, de la détresse émotionnelle et, dans certains cas, des préjudices physiques. Les entreprises subissent des pertes de revenus et doivent accroître leurs dépenses de sécurité, ce qui a une incidence sur leur rentabilité et leur croissance.
Au Canada, les vols à grande échelle de plus de 5 000 $, hors vols d'automobiles, ont augmenté de 49 % entre 2013 et 2023Note de bas de page 101. En particulier, le vol de cargaisons – lorsque des marchandises sont volées pendant leur transport – a augmenté de 59 % au Canada et aux États-Unis en 2024, selon CargoNET, un réseau de prévention et de récupération des vols de marchandisesNote de bas de page 102. On pense également que les GCO ciblent l'équipement lourd, comme l'équipement agricole ou de construction. Après avoir doublé entre 2022 à 2023, le SCRC indique que la participation des GCO aux vols de véhicules est restée stable en 2024; cependant, la participation des GCO est de plus en plus signalée dans l'Ouest canadien, en réponse aux efforts accrus déployés en matière d'application de la loi dans l'Est du Canada. Les GCO les plus sophistiqués et les plus compétents participant au vol de véhicules au Canada ont des réseaux transnationaux bien établis qui approvisionnent les marchés étrangers en véhicules canadiens volés.
Plan d'action national du Canada pour lutter contre le vol de véhicules
En 2024, le gouvernement du Canada a publié les Mesures nationales de lutte contre le vol de véhicules visant à perturber, à démanteler et à poursuivre les GCO impliqués.
Les Mesures nationales comprennent des changements législatifs et réglementaires, y compris au Code criminel, pour mettre en place des peines plus sévères pour le vol de véhicules impliquant des actes de violence, le crime organisé et le blanchiment d'argent, une nouvelle circonstance aggravante applicable au moment de la détermination de la peine lorsqu'il y a des preuves qu'un délinquant a impliqué un jeune dans la commission d'une infraction, ainsi que des modifications à la Loi sur la radiocommunication afin de réglementer les dispositifs utilisés pour voler des véhicules.
D'autres mesures comprennent l'échange amélioré de renseignements entre les autorités douanières et les autorités policières municipales, provinciales, fédérales et internationales. Ces mesures visent à soutenir les enquêtes criminelles, le dépôt d'accusations et les poursuites, en s'appuyant sur les efforts conjoints déjà en cours. Le gouvernement a également annoncé des améliorations en matière d'intervention qui permettront d'examiner un plus grand nombre de conteneurs maritimes, grâce à l'augmentation de la capacité de l'ASFC et à l'intégration de nouveaux outils de ciblage.
Les données de Statistique Canada sur les vols déclarés par la police (à l'exclusion des vols d'automobiles) semblent indiquer que le total des produits de la criminalité se chiffrait en centaines de millions de dollars en 2023. Le vol d'automobiles, en particulier, est une menace en constante évolution qui générerait d'importants produits de la criminalité. Une grande partie de ces profits va aux acheteurs et aux exportateurs de véhicules volés, tandis qu'une autre partie importante de ces profits est réalisée au point de vente final dans un pays étranger.
Les renseignements financiers de CANAFE et la sophistication des opérations de vol observés par les forces policières semblent indiquer que les GCO impliqués dans le vol d'automobiles au Canada ont des capacités sophistiquées en matière de recyclage des produits de la criminalité. Ils utilisent des fraudes commerciales et des techniques connexes pour dissimuler l'origine illicite des automobiles et transporter les produits de la criminalité à l'intérieur des frontières du Canada, à l'étranger et vers le Canada. Certains font également appel à des blanchisseurs d'argent professionnels pour mener des stratagèmes complexes de recyclage des produits de la criminalité, y compris de nature commerciale, au vu des montants importants de produits de la criminalité qui peuvent être obtenus à l'extérieur du Canada.
Les méthodes employées pour masquer la circulation des produits de la criminalité comprennent la contrebande d'espèces, les transferts électroniques de fonds internationaux, l'utilisation de prête-noms et la création de sociétés-écrans et de sociétés fictives. De plus, les renseignements financiers semblent indiquer que des personnes ou des entités soupçonnées d'avoir un rôle important dans un réseau de trafic de voitures possèdent des entreprises de transport de marchandises et de logistique, des concessionnaires de voitures d'occasion, des entreprises de pièces automobiles, des entreprises d'importation et d'exportation et des entreprises de remorquage situées dans la région du Grand Toronto ou la région métropolitaine de Montréal, ou transigent fréquemment avec de telles entreprises.
L'ASFC fournit un soutien essentiel aux partenaires d'application de la loi pour perturber ces activités criminelles, enquêter dessus et intenter des poursuites. En 2024, l'ASFC a intercepté 2 277 véhicules volés, ce qui représente une augmentation de 26 % par rapport à 2023 et d'environ 83 % par rapport à 2020. De plus, l'ASFC a adopté un protocole de demande de renseignements pour regrouper et accélérer l'échange de renseignements douaniers avec les services de police compétents et a répondu à 2 758 demandes en 2024.
En 2023, la Police régionale de Peel a utilisé les renseignements financiers de CANAFE dans le cadre d'une opération policière conjointe enquêtant sur une série de vols de semi-remorques et de marchandises à Peel et dans l'ensemble de la région du Grand Toronto. L'enquête a abouti au démantèlement d'un réseau criminel. Au total, le projet Big Rig a donné lieu à 15 arrestations et à 73 accusations, ainsi qu'à la récupération de 6 990 000 $ en marchandises volées et de 2 250 000 $ en semi-remorques voléesNote de bas de page 103.
Menaces faibles de recyclage des produits de la criminalité
Menace de recyclage des produits de la criminalité liée aux crimes environnementaux : Les crimes environnementaux préoccupants du point de vue du recyclage des produits de la criminalité au Canada comprennent les crimes liés à la pollution, les crimes contre la faune et la pêche illicite et non réglementée. Le montant des produits de la criminalité générés au Canada par chacun de ces crimes environnementaux varie, mais le montant total de tous les crimes pourrait potentiellement se chiffrer en centaines de millions de dollars par année. Ces crimes causent des dommages durables à la population, à l'économie et aux écosystèmes du Canada en menaçant la santé publique, en endommageant la faune et les habitats, en réduisant la biodiversité marine et en contribuant aux effets des changements climatiques. Ils ébranlent également les moyens de subsistance des Canadiens, en particulier ceux qui vivent dans des collectivités rurales ou qui travaillent dans des industries qui dépendent des ressources naturelles.
Au Canada, les crimes liés à la pollution comprennent le trafic de déchets électroniques, l'importation de produits contrefaits ne respectant pas les normes environnementales du Canada (p. ex., les moteurs contrefaits) et l'utilisation de pratiques trompeuses pour saper la réglementation sur les émissions, comme le rejet ou le recours à des tiers pour rejeter illégalement des déchets.
Au Canada, les crimes contre la faune comprennent le trafic d'espèces canadiennes, notamment les défenses de narval, les peaux d'ours polaires, les œufs de faucon pèlerin et le ginseng sauvage, par l'intermédiaire de marchés illicites établis. Les espèces sauvages faisant l'objet d'un trafic illégal sont de plus en plus transportées avec des produits légaux de flore et de faune, ce qui rend plus difficile la détection et l'interception des marchandises acquises illégalement. Les auteurs de menace dans ce domaine sont souvent des personnes opportunistes et criminelles qui font preuve d'un faible niveau de sophistication. Cependant, les GCO transnationaux semblent de plus en plus impliqués.
La pêche illicite désigne la pêche par des navires d'un pays ou de navires étrangers sans permission ou qui entreprennent des activités de pêche qui contreviennent aux lois et aux règlements de ce pays ou encore à ses obligations internationalesNote de bas de page 104. Les zones côtières sont vulnérables à la pêche illicite par les petites et moyennes entreprises, ainsi que par des individus opportunistes et organisés. Ces acteurs peuvent commettre des fraudes en sous-déclarant ou en déclarant de manière erronée les poissons pêchés légalement et illégalement. Les méthodes peuvent également inclure la corruption de fonctionnaires dans les ports, l'utilisation de secteurs d'activité intégrés verticalement, la déclaration erronée de prises illégales comme des prises légales lorsqu'elles sont vendues sur les marchés commerciaux, le versement de pots-de-vin aux pêcheurs autochtones titulaires de permis autochtones spéciaux et le remplissage supérieur la normale des emballages pour sous-déclarer les prises. De plus, le manque de transparence sur la propriété de certains quotas de pêche rend les marchés de la côte ouest du Canada vulnérables au recyclage des produits de la criminalité, à l'évasion fiscale et au contournement des sanctions par des criminels. Les principaux acteurs impliqués dans la pêche illicite sont les pêcheurs, les acheteurs, les expéditeurs et les transformateurs qui tentent de contourner les exigences réglementaires et de déclaration des prises, avec une participation présumée de certains GCO.
Les produits générés par les crimes contre la faune ont augmenté depuis 2023. Les méthodes utilisées pour recycler les produits de la criminalité contre la faune peuvent varier selon le pays de destination et le type de produit faisant l'objet d'un trafic illégal. CANAFE a recensé plusieurs typologies dans les stratagèmes de recyclage des produits de la criminalité associés au trafic illégal d'espèces sauvages, y compris l'utilisation de prête-noms, de sociétés-écrans appartenant à des trafiquants ou à leurs associés et de fonds dispersés entre des comptes liés. Les transactions en espèces, les virements télégraphiques et les transferts d'argent par courriel étaient les principales transactions dans les déclarations de soupçons soumis à CANAFE relativement au trafic d'espèces sauvagesNote de bas de page 105. Les méthodes de recyclage des produits de la pêche illicite peuvent être relativement simples, ces produits étant principalement utilisés pour des dépenses directes ou un placement immédiat. Cela peut inclure le placement dans des structures d'entreprises familiales intégrées verticalement, comme un restaurant familial situé près du point de pêche. Le transfert des produits entre plusieurs comptes bancaires d'entreprise pour masquer la source initiale des fonds est également une possibilité.
Le projet Anton, lancé en 2023, est la première initiative de ce type axée sur un partenariat public-privé international (dirigé par la Banque Scotia et soutenue par CANAFE, le réseau United for Wildlife de la Royal Foundation et d'autres partenaires nationaux et internationaux afin de lutter contre le commerce illégal d'espèces sauvages.
Le projet porte le nom d'Anton Mzimba, responsable de la sécurité de la réserve naturelle privée de Timbavati en Afrique du Sud et conseiller technique mondial en conservation, qui a été assassiné pour son engagement à protéger et à conserver la faune. En sa mémoire, le projet Anton vise à améliorer la compréhension collective du commerce illégal d'espèces sauvages et à améliorer la détection du blanchiment des produits de ce crime.
Depuis le lancement du projet Anton, CANAFE a produit plus de 25 communications de renseignements financiers exploitables liés au commerce illicite d'espèces sauvages pour les organismes d'application de la loi du Canada et des partenaires internationaux.
Menace de recyclage des produits de la criminalité liés aux prêts usuraires : Les usuriers sont des prêteurs illégaux qui opèrent en dehors de tout cadre réglementaire et qui prêtent en contravention du paragraphe 347(1)Note de bas de page 106 du Code criminel, « Taux d'intérêt criminel ». Les usuriers sont souvent associés au crime organisé et semblent cibler les joueurs riches et flambeurs, les personnes à faible revenu, les joueurs à problèmes qui jouent dans des établissements de jeu légaux ou illégaux (y compris en ligne), les consommateurs de drogues illicites et les entrepreneurs qui ont besoin de capitaux pour démarrer une entreprise ou maintenir à flot une entreprise. L'usurier piège les personnes vulnérables dans des cycles d'endettement, épuisant les familles et les communautés. Il permet aux GCO de financer et d'étendre leurs activités par le jeu illégal, le commerce de la drogue et d'autres crimes.
Les prêts usuraires peuvent faire partie d'opérations de plus grande envergure soutenues par des GCO et peuvent impliquer des auteurs de menace ayant un niveau relativement élevé de sophistication dans le recyclage des produits générés par les activités criminelles liées aux prêts. Les prêts usuraires semblent se limiter à un petit nombre de GCO plus sophistiqués au Canada, ainsi qu'à un petit nombre d'opérateurs indépendants.
Au Canada, on estime que l'usure génère des montants relativement faibles de produits de la criminalité. En raison de la stigmatisation qui y est associée, ainsi que des taux d'intérêt élevés prévus et des risques d'emprunter de l'argent auprès d'organismes criminels, le niveau réel des produits de la criminalité provenant des prêts usuraires pourrait être considérablement sous-déclaré. On pense que les usuriers font appel à diverses méthodes de recyclage des produits de la criminalité, y compris le recyclage de fonds par l'intermédiaire de casinos et d'institutions financières, ou encore des secteurs de l'immobilier et de la construction.
Menace de recyclage des produits de la criminalité liée à la contrefaçon : Dans le contexte canadien, la contrefaçon concerne principalement les marchandises contrefaites et la monnaie contrefaite. En ce qui concerne les marchandises, une vaste gamme de produits contrefaits et piratés sont vendus au Canada, principalement en ligne, Toronto, Montréal et Vancouver demeurant les principaux points d'entrée de ces produits sur le marché canadien. La Chine est la principale source de produits contrefaits importés au Canada.
Les produits de la criminalité générés annuellement par la contrefaçon s'élèvent à plusieurs centaines de millions de dollars. Les produits contrefaits affaiblissent les industries légitimes, réduisent les recettes fiscales du gouvernement et posent des risques pour la santé et la sécurité des Canadiens. La contrefaçon de monnaie entraîne des pertes financières pour les Canadiens et les entreprises. La fausse monnaie peut également miner la confiance du public dans le dollar canadienNote de bas de page 107.
D'après les données du SCRC, les GCO actifs sur le marché criminel de la contrefaçon et de la falsification sont principalement basés en Colombie-Britannique et en Ontario, avec des concentrations plus faibles au Québec et dans les provinces maritimes. Les GCO semblent avoir établi des liens avec des canaux de distribution mondiaux illicites, ce qui leur permet d'importer des volumes croissants de produits contrefaits au Canada. Les clients qui achètent ces produits ne savent pas forcément qu'ils sont contrefaits.
La plupart des auteurs de menace impliqués dans la contrefaçon de marchandises qui ciblent des clients au Canada font preuve d'un faible niveau de sophistication en matière de recyclage des produits de la criminalité. L'analyse de CANAFE semble indiquer divers niveaux de complexité dans les opérations de recyclage des produits de la criminalité par les faussaires. Ces derniers peuvent exploiter les marchés en ligne, utiliser des sociétés-écrans et utiliser à mauvais escient des services offerts par des entreprises de traitement des paiements pour recycler des fonds illicites et les réintégrer dans le système financier avant de les transférer rapidement à l'étranger ou à d'autres sociétés.
En revanche, le volume de faux billets de banque vendus au Canada a diminué d'environ 50 % au cours des dernières annéesNote de bas de page 108. L'introduction des billets en polymère au début des années 2010 a eu des conséquences considérables sur le marché de la fausse monnaie et a contribué à la baisse des taux de fausse monnaie au cours de la dernière décennieNote de bas de page 109. Les risques de recyclage des produits de la criminalité découlant de cette activité sont faibles par rapport aux autres infractions sous-jacentes.
Chapitre 4 : Évaluation des menaces liées au financement des activités terroristes
Aperçu
L'évaluation de la menace liée au financement des activités terroristes indique que le paysage du financement des activités terroristes au Canada est en grande partie faible et qu'il se caractérise par des transactions de faible valeur et des flux financiers limités. Peu de preuves semblent indiquer que des fonds terroristes entrent ou reviennent au Canada pour financer le terrorisme intérieur.
Qu'est-ce que le financement des activités terroristes?
Le financement du terrorisme consiste à utiliser des fonds, des biens ou d'autres services pour encourager, planifier, contribuer ou participer à des actes terroristes, où la motivation principale n'est pas le gain financier.
Deux différences principales distinguent le financement du terrorisme du recyclage des produits de la criminalité :
- les fonds peuvent provenir de sources légales, et non pas seulement d'actes criminels;
- l'argent est un moyen et non une fin – le but premier étant d'utiliser les fonds pour faciliter ou mener à bien des activités terroristes.
Lorsqu'il y a un lien entre le financement des activités terroristes et le Canada, les fonds proviennent du Canada et sont (i) soit dirigés vers des terroristes nationaux, qui utilisent principalement des méthodes d'autofinancement pour soutenir les attentats, (ii) soit vers des pays étrangers où l'on sait que des terroristes sont actifs ou qui présentent des liens financiers avec des groupes terroristes internationaux. Dans le contexte canadien, les terroristes peuvent aller d'acteurs isolés à des groupes terroristes organisés.
Compte tenu des graves conséquences des activités terroristes au Canada et à l'étranger, le Canada doit demeurer vigilant pour protéger sa sécurité nationale contre les terroristes et les extrémistes violents, y compris leur financement.
Le Canada est une société diversifiée et multiculturelle où de nombreuses personnes entretiennent des liens avec des communautés du monde entier. Cela contribue aux flux financiers du Canada vers de nombreux pays étrangers, qui peuvent être des sources de financement importantes et légitimes pour le développement économique et d'autres fins sociales. Les mesures prises par le gouvernement ou des entités du secteur privé afin d'atténuer les risques liés au financement des activités terroristes devraient être examinées au cas par cas. Cette évaluation ne doit pas servir à justifier des comportements ou des actions discriminatoires envers des communautés particulières au Canada ou à l'étranger. La grande majorité des fonds qui quittent le Canada par voie de transferts de fonds ne soutiennent pas les activités de financement des activités terroristes.
Méthodologie pour l'évaluation des menaces liées au financement des activités terroristes
Les menaces liées au financement des activités terroristes au Canada sont déterminées en fonction de renseignements actualisés concernant le contexte des menaces au Canada et à l'étranger, y compris les cas connus ou soupçonnés de financement des activités terroristes sur lesquels enquêtent ou qu'observent les organismes d'application de la loi et les services de renseignement canadiens.
Les menaces liées au financement des activités terroristes sont évaluées selon que l'extrémisme violent repose sur des motivations idéologiques, politiques ou religieuses, en fonction de trois critères :
- le niveau de sophistication des auteurs de menace, y compris les réseaux de financement établis et la capacité d'avoir un financement résilient, durable et à long terme;
- les capacités des auteurs de menace à entreprendre des opérations de financement des activités terroristes au Canada, y compris l'accès à des intermédiaires, à des réseaux et à des liens avec le crime organisé;
- les liens avec le Canada, y compris le financement présumé des activités terroristes en provenance du Canada, à l'intérieur des frontières canadiennes et à destination du Canada.
Aucune cote de menace particulière n'est attribuée aux groupes identifiés dans la présente évaluation. Les groupes ou mouvements terroristes mentionnés dans le présent rapport ont été identifiés comme étant actifs dans la collecte et le transfert de fonds au Canada et dans le système financier canadien.
Méthodes de financement des activités terroristes
Types d'extrémisme violent
Trois catégories d'extrémisme violent peuvent être établies à partir des définitions figurant dans le droit canadien, notamment le Code criminel et la Loi sur le SCRS. Bien qu'aucune de ces catégories ne soit nécessairement exclusive, le SCRS identifie les types d'extrémisme violent suivants dans sa publication de 2025 intitulée Protéger la sécurité nationale en partenariat avec tous les Canadiens :
Extrémisme violent à motivation idéologique (EVI)
Les acteurs de l'EVI sont influencés par diverses influences plutôt que par un système de croyances unique. La radicalisation est plus souvent causée par une combinaison d'idées et de griefs qui donne naissance à une vision du monde personnalisée, inspirée de sources diverses. L'EVI comprend la violence sexiste, xénophobe, anti-autorité et d'autres formes de violence motivées par des griefs.
Extrémisme violent à motivation politique (EVP)
L'EVP encourage le recours à la violence pour établir de nouveaux systèmes politiques, ou de nouvelles structures et normes au sein des systèmes existants.
Extrémisme violent à motivation religieuse (EVR)
L'EVV encourage le recours à la violence dans le cadre d'une lutte spirituelle contre un système perçu comme immoral. Ses adeptes croient que le salut ne peut être atteint que par la violence.
Les méthodes de financement des activités terroristes varient en fonction de la structure, des motivations, du contexte géopolitique et des liens des acteurs en question. Les terroristes s'adaptent et exploitent les canaux légaux et illégaux pour se financer. Les terroristes collectent, déplacent et utilisent des fonds à l'aide de diverses méthodes, adaptant souvent leurs stratégies financières aux efforts d'application de la loi et aux contrôles réglementaires.
Le coût d'une attaque terroriste varie considérablement, en fonction de la sophistication du groupe terroriste ou de la personne concernée et de la nature de l'attaque. Les attaques terroristes percutantes peuvent nécessiter des fonds minimes, ce qui complique davantage les enquêtes de sécurité nationale. Les fonds ont tendance à être recueillis et transférés sous forme de petits montants, rendant leur détection et le suivi difficilesNote de bas de page 110. Le degré de sophistication d'un acteur terroriste dans sa création et ses opérations peut également déterminer l'étendue de l'utilisation des diverses techniques et l'ampleur du financement requis. Les acteurs isolés sont moins susceptibles d'utiliser des techniques sophistiquées pour financer leurs activités, comptant plutôt sur des revenus personnels ou à d'autres sources légales.
Bien qu'il y ait peu de preuves que des fonds terroristes entrent ou reviennent au Canada, la collecte de fonds et l'autofinancement à l'échelle nationale sont des enjeux préoccupants, car les fonds sont souvent transférés vers des pays à risque élevé, à savoir des lieux où les entités terroristes inscrites sont connues pour y exercer leurs activités, ou vers des pays présentant certaines lacunes quant à l'adoption et à l'application des mesures de lutte contre le financement des activités terroristes.
Activité criminelle |
De nombreux terroristes complètent leur financement avec des activités illicites, comme le trafic de drogue, les enlèvements en vue d'une rançon, la contrebande d'armes et l'extorsion. Certains groupes terroristes se livrent à la traite de personnes, à la contrefaçon et à la cybercriminalité pour diversifier leurs sources de revenus. |
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Financement participatif |
Les plateformes de financement participatif permettent aux particuliers ou aux groupes de demander des fonds en ligne directement auprès de membres du public qui peuvent être dispersés géographiquement. On a observé que les terroristes cooptent des plateformes de financement participatif pour atteindre un public mondial afin de solliciter des fonds et des dons pour soutenir les activités terroristes. |
Cryptomonnaies |
Les cryptomonnaies deviennent de plus en plus attrayantes pour le financement des activités terroristes en raison de la nature même de leurs réseaux décentralisés et basés sur des pseudonymes qui permettent aux individus d'envoyer ou de recevoir des fonds partout dans le monde. |
Systèmes informels de transfert de valeur |
Les SITV, comme hawala, hundi et fei'chien, impliquent des négociants qui facilitent le transfert de valeur à un tiers dans une autre administration sans avoir à déplacer physiquement les articles. On a vu des groupes terroristes utiliser un SITV pour contourner les canaux bancaires officiels afin de transférer des fonds au-delà des frontières. |
Détournement d'organismes à but non lucratif (OBNL) et caritatifs |
Les groupes terroristes opérant à l'étranger dans des zones de conflit ou dans des territoires contrôlés par des groupes terroristes sont connus pour utiliser ou abuser des OBNL, fictifs ou légitimes (détournement involontaire de fonds), pour recueillir et transférer des fonds. |
Autofinancement |
L'autofinancement s'entend des stratégies et des techniques, légales et illégales, employées par les terroristes pour générer leurs propres ressources financières et financer ainsi leurs actes violents. Les terroristes isolés recourent généralement à des méthodes d'autofinancement pour soutenir leurs actes terroristes. |
Appui d'un État |
Certains groupes terroristes dépendent du soutien financier des gouvernements nationaux. En particulier, le financement de l'Iran représente une source majeure de fonds pour le Hamas et le Hezbollah. L'Iran est connu pour utiliser des techniques de recyclage des produits de la criminalité de nature commerciale, des sociétés-écrans, des institutions financières, des services de correspondants bancaires et des cryptoactifs pour soutenir ces groupes terroristes. |
Évolution du paysage terroriste mondial
La nature de la menace terroriste mondiale a évolué depuis le début des années 2000. À l'époque, les activités terroristes étaient en grande partie dirigées par des groupes aux motifs religieux, comme Al-Qaïda et les talibans. La montée de Daech après 2013, en particulier, a incité des personnes du monde entier – y compris des Canadiens – à se rendre en Syrie et en Iraq pour se livrer à des activités extrémistes violentes. Souvent appelées « combattants terroristes étrangers », ou « voyageurs canadiens extrémistes » dans le contexte intérieur, ces personnes ont participé à diverses activités, notamment le combat de première ligne, la collecte de fonds, la planification opérationnelle et la diffusion de propagande en ligne. Les combattants terroristes étrangers provenant du Canada ne constituaient pas un phénomène nouveau, mais le nombre de personnes qui quittaient le Canada pour se rendre en Syrie se joindre à Daech et la vitesse à laquelle cela s'est produit sont devenus remarquables.
Bien que les menaces posées par ces groupes demeurent, le paysage actuel des menaces terroristes est devenu plus complexe. On a constaté une croissance mondiale des groupes extrémistes violents à caractère idéologique et politique motivés par divers facteurs, comme l'isolement social, le ressentiment contre le gouvernement et la mésinformation/désinformation. Ces groupes et ces individus ont trouvé des réseaux aux vues similaires qui perpétuent leur radicalisation, ce qui, dans certains cas, peut déboucher sur des actes violents. Ces activités, en grande partie en ligne et diffuses, compliquent de plus en plus, pour les services de renseignement et les organismes d'application de la loi, la détection, la perturbation et la prévention de ces menaces.
À cela s'ajoute un lien de plus en plus étroit entre le terrorisme et le crime organisé transnational qui donne naissance à une relation d'intérêt mutuel. Les terroristes peuvent tirer parti du crime organisé à diverses fins, favorisant ainsi leurs objectifs idéologiques, religieux ou politiques.
Le Canada reconnaît que les GCO transnationaux peuvent former des alliances avec des groupes terroristes pour sécuriser les routes, financer les opérations et soutenir leurs objectifs, créant un réseau complexe de flux financiers illicites. Les liens entre ces organisations criminelles et les réseaux terroristes posent un défi pour à la sécurité internationale, car ils permettent aux deux groupes d'étendre leurs activités. Il est important de contrer ces réseaux financiers pour perturber leurs canaux de financement et affaiblir leur influence.
En février 2025, le Canada a inscrit sept GCO transnationaux sur la liste des entités terroristes en vertu du Code criminel, dont Cártel del Golfo, Cártel de Sinaloa, La Familia Michoacana, Cárteles Unidos, La Mara Salvatrucha, Tren de Aragua et Cártel de Jalisco Nueva Generación.
Ces sept organisations sont maintenant considérées comme des entités terroristes en vertu de la loi canadienne.L'inscription de ces organisations sur la liste des entités terroristes aide les organismes canadiens de sécurité, de renseignement et d'application de la loi à lutter contre le terrorisme et joue un rôle clé dans la lutte contre les activités de financement intérieures.
Auteurs de menaces liées au financement des activités terroristes pertinents pour le Canada
Régime d'inscription des terroristes du Code criminel
Le régime d'inscription du Code criminel du Canada établit le cadre juridique pour désigner une personne ou un groupe comme une entité terroriste.
Un groupe ou un individu peut être inscrit sur la liste s'il existe des motifs raisonnables de croire qu'il a sciemment commis, tenté de commettre ou facilité une activité terroriste ou y a participé, ou encore qu'il a sciemment agi pour le compte d'une entité terroriste, sous sa direction ou en association avec elle. Les seuils légaux pour l'inscription d'une entité sont établis à l'article 83.05 du Code criminel.
Être inscrit sur la liste des entités terroristes entraîne des conséquences importantes. Selon le Code criminel, commet une infraction toute personne se trouvant au Canada ou à l'étranger qui fait sciemment le commerce de biens appartenant à une entité terroriste ou contrôlés par celle-ci. Afin d'éviter la responsabilité criminelle, les banques et les maisons de courtage peuvent geler les actifs de l'entité, qui peuvent alors faire l'objet d'une saisie, d'un blocage ou d'une confiscation en vertu du Code criminel.
Le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile est responsable de la tenue de la liste et publie cette information en ligne : Entités inscrites actuellement.
Le gouvernement du Canada regroupe les menaces terroristes en trois grandes catégories : l'extrémisme violent à caractère idéologique (EVCI), l'extrémisme violent à caractère politique (EVCP) et l'extrémisme violent à caractère religieux (EVCR). Bien qu'il existe des méthodes de financement communes aux terroristes, quelle que soit leur motivation principale, il existe des méthodes de financement distinctes associées à l'EVCI, à l'EVCP et à l'EVCR.
Au cours de la dernière décennie, les auteurs des attentats au Canada qui ont fait le plus de morts étaient le plus souvent des individus isolés motivés par divers griefs, dans la plupart des cas dans la catégorie de l'EVCI. Ces acteurs ont tendance à s'inspirer des réseaux diffus et à mener leurs attaques avec des moyens peu sophistiqués, comme des armes blanches ou des véhicules, qui nécessitent généralement moins de ressources. Les groupes associés à l'EVCP et à l'EVCR ont généralement des réseaux de financement internationaux sophistiqués ainsi que des portefeuilles de financement et des sources de revenus plus importants en raison de leurs activités de longue date.
Les principaux groupes menaçants qui continuent d'avoir des liens financiers avec le Canada sont abordés ci-dessous.
Extrémisme violent à caractère idéologique
L'EVCI est une menace croissante pour la sécurité nationale du Canada et s'appuie sur un éventail complexe d'idées provenant de l'ensemble du spectre idéologique traditionnel « gauche-droite ». Cela comprend les opinions anti-autorité, xénophobes, sexistes et d'autres types d'extrémistes violents. Selon le SCRS, entre 2014 et 2024, les attaques liées à l'EVCI au Canada ont fait 26 morts et plus de 40 blessésNote de bas de page 111.
Le SCRS a divisé les violences commises par les auteurs de menaces liées à l'EVCI au Canada en quatre catégories principales :
- violence xénophobe : violence à caractère racial ou ethnique fondée sur la peur ou la haine de ce qui est perçu comme étranger, étrange ou différent;
- violence antiautoritaire : violence contre l'autorité de l'État et des entités responsables de l'application de la loi;
- violence sexiste : violence motivée par la haine de personnes ayant un genre ou une orientation sexuelle différents;
- autres violences fondées sur des récriminations : violence commise par des personnes sans lien clair avec un groupe organisé ou une orientation extérieure.
La radicalisation de l'EVCI est le plus souvent provoquée par une combinaison d'idées et de récriminations donnant lieu à une vision du monde personnalisée inspirée par diverses sources, dont des livres, des vidéos, des discussions en ligne et des conversations. Les personnes ayant des opinions extrémistes violentes tentent souvent de créer une culture de la peur, de la haine et de la méfiance qui peut pousser une personne à inciter des actes violents, à les permettre ou à se mobiliser pour de tels actesNote de bas de page 112.
En décembre 2024, le Canada a inscrit huit groupes liés à l'EVCI et une personne sur la liste des entités terroristes en vertu du Code criminel : Proud Boys, Division Atomwaffen, The Base, Mouvement impérial russe, Blood & Honour, Combat 18, Three Percenters, Aryan Strikeforce et le néonazi américain James Mason.
Il convient de distinguer les mouvements d'EVCI des groupes d'EVCI. Les mouvements d'EVCI sont souvent des réseaux informels ou de vagues coalitions d'individus partageant les mêmes idées, sans structure ni direction claire. Ils peuvent se dissoudre et se reformer à tout moment sur une question donnée. Quoi qu'il en soit, les groupes d'EVCI, comme la Division Atomwaffen et The Base, présentent une direction hiérarchique plus structurée avec des objectifs plus clairement définis. Ces groupes comprennent des personnes motivées par la croyance en la supériorité de la race blanche qui dirigent leur violence contre les communautés non blanches.
La misogynie a également été une caractéristique importante des attaques liées à l'EVCI au Canada. Le mouvement des célibataires involontaires, ou « incels » en abrégé, est un réseau principalement en ligne de personnes ayant des opinions misogynes extrêmes qui mettent l'accent sur l'incapacité perçue de ses membres à trouver des partenaires amoureux ou sexuelsNote de bas de page 113. Les thèmes de la communauté des incels se concentrent sur l'échec et la frustration perçus, ainsi que sur la solitude, la colère et la haineNote de bas de page 114.
Méthodes de financement de l'EVCI
L'alerte opérationnelle sur le financement des activités terroristes de CANAFE de décembre 2022 recense trois sous-catégories d'acteurs de l'EVCI au Canada : les personnes agissant seules (ou acteurs isolés), les réseaux transfrontaliers et les groupes organisésNote de bas de page 115.
Les personnes agissant seules qui commettent des attaques terroristes liées à l'EVCI ont tendance à se financer elles-mêmes en utilisant leurs économies, leurs revenus d'emploi ou de l'argent provenant de la famille ou d'amisNote de bas de page 116. Les attaques terroristes commises par ces personnes agissant seules sont souvent peu sophistiquées et nécessitent un financement limité.
Des méthodes d'autofinancement ont été observées dans deux attaques terroristes importantes au Canada menées par des personnes agissant seules radicalisées par l'EVCI.
En 2020, un jeune homme de 17 ans radicalisé par l'idéologie des incels a tué une femme et en a blessé une autre dans un salon de massage à Toronto à l'aide d'une simple épée.
En 2021, quatre membres d'une famille musulmane ont été tués lorsqu'un individu a foncé sur eux avec une camionnette à un passage pour piétons à London, en Ontario. En 2024, l'individu a été condamné à l'emprisonnement à perpétuité pour meurtre au premier degré et tentative de meurtre constituant un acte de terrorisme.
Les réseaux transfrontaliers et les groupes d'EVCI organisés se distinguent des personnes agissant seules dans leur financement. Les groupes organisés comptent souvent sur les communautés en ligne et les réseaux transfrontaliers pour collecter des fonds, et on a observé qu'ils dépendent d'une foule de méthodes de financement, y compris des activités commerciales, comme la vente de marchandises, l'organisation d'événements payants, comme des conférences et des concerts, le financement participatif, l'imposition de frais d'adhésion et l'obtention de dons.
Les réseaux transfrontaliers utilisent de grandes ESM et des transferts électroniques de fonds pour transférer l'argent, souvent à des tiers se trouvant dans des endroits préoccupants en ce qui a trait à l'EVCI, comme l'Europe de l'Est ou d'autres zones géographiques où le groupe d'EVCI en question est connu pour exercer ses activités. Les groupes organisés, en revanche, ont tendance à collecter des fonds par diverses méthodes, notamment les transferts électroniques de fonds, la vente de marchandises et les dépôts fréquents en espèces. Certains groupes sont également connus pour se livrer au trafic de drogue, au trafic d'armes et au vol pour financer leurs activités.
Les plateformes de financement participatif et les médias sociaux s'efforcent de plus en plus d'empêcher la collecte de fonds des groupes d'EVCI sur leurs réseaux, ce qui amène les auteurs de menaces liées à l'EVCI à rechercher d'autres méthodes de financement, notamment l'envoi d'argent par la poste, par chèque ou par mandat, ou encore le recours croissant aux cryptomonnaies.
Extrémisme violent à caractère politique
L'EVCP encourage l'utilisation de la violence pour établir de nouveaux systèmes politiques ou de nouvelles structures et normes au sein des systèmes existants. Bien que l'EVCP puisse inclure des éléments religieux, ses acteurs sont davantage tournés vers l'autodétermination ou la représentation politique que vers la suprématie raciale ou ethniqueNote de bas de page 117.
Les organismes d'application de la loi et les services de renseignement ont constaté que plusieurs entités terroristes de la catégorie de l'EVCP inscrites au Canada en vertu du Code criminel, comme le Hamas, le Hezbollah et les groupes extrémistes violents du mouvement Khalistani de Babbar Khalsa International et de la Fédération internationale de la jeunesse sikh, recevaient un soutien financier en provenance du Canada.
L'alerte opérationnelle de 2022 de CANAFE sur le financement des activités terroristes désigne le Hezbollah comme la deuxième entité terroriste internationale la plus fréquemment citée dans la réception de fonds en provenance du CanadaNote de bas de page 118.
Méthodes de financement de l'EVCP
Le Hamas et le Hezbollah sont des groupes établis et bien financés qui entrent dans la catégorie de l'EVCP. Ces groupes utilisent diverses méthodes de financement pour soutenir leurs activités, y compris l'exploitation abusive des ESM et des banques, l'utilisation de cryptomonnaies, le financement par des États, le détournement du secteur des organismes caritatifs et des OBNL et les activités criminelles.
Des groupes extrémistes du mouvement Khalistani qui soutiennent l'action violente pour établir un État indépendant au Pendjab, en Inde, sont soupçonnés d'avoir collecté des fonds dans un certain nombre de pays, y compris le Canada. Ces groupes disposaient autrefois d'un vaste réseau de collecte de fonds au Canada, mais il semble désormais constitué de plus petites cellules de personnes qui appuient la cause mais qui ne sont pas affiliées à un groupe en particulier.
Exploitation abusive du secteur financier : Le Hamas et le Hezbollah sont connus pour utiliser des ESM, en particulier des SITV comme les hawalas, pour transférer de l'argent au-delà des frontières. Le Hezbollah, en particulier, est connu pour utiliser le secteur bancaire libanais pour conserver ses avoirs. Une poursuite devant un tribunal de New York, Lelchook v. Société Générale de Banque au Liban SAL, met en évidence la façon dont une banque libanaise aujourd'hui disparue fournissait des services financiers au Hezbollah, notamment par le biais de correspondants bancaires aux États-UnisNote de bas de page 119. Le secteur financier canadien peut également être exposé à des risques découlant des relations de correspondant bancaire avec des institutions connues ou soupçonnées de servir le Hezbollah au Liban.
Cryptomonnaies : Les cryptomonnaies telles que le Bitcoin et le Tether sont apparues dans les stratégies de financement du Hamas et du Hezbollah, bien que celles-ci aient tendance à représenter des dons de faible valeur. Le Hamas et le Hezbollah utilisent les plateformes en ligne et les médias sociaux pour solliciter des dons sous forme de cryptomonnaies. Le Hamas, en particulier, a été l'un des premiers à adopter les cryptomonnaies pour collecter et transférer des fonds, le groupe ayant présumément commencé à solliciter des dons en Bitcoins dès 2019Note de bas de page 120. Pour convertir la cryptomonnaie en espèces, le Hamas utilise des bureaux de change, des ESM et des SITV au Liban, en Turquie et en SyrieNote de bas de page 121. Cependant, l'ampleur et l'efficacité avec lesquelles ces groupes ont réussi à collecter et à utiliser de la cryptomonnaie pour soutenir leurs activités restent incertainesNote de bas de page 122.
Financement par des États : Ce financement, surtout en provenance d'Iran, est une source importante de revenus pour le Hamas et le Hezbollah qui leur permet de maintenir leurs activités. En mai 2024, le Financial Crimes Enforcement Network (FinCEN) des États-Unis a envoyé un avis aux institutions financières pour contrer le financement des organisations terroristes soutenues par l'Iran. Cet avis fournit une analyse approfondie des méthodes utilisées par l'Iran pour contourner les sanctions internationales afin de collecter des fonds et de les transférer au Hamas et au Hezbollah. Cela comprend la vente de pétrole et d'armes et le recours à des sociétés-écrans, à des institutions financières, à des relations de correspondant bancaire et à des cryptomonnaiesNote de bas de page 123. Le Canada a observé des tendances similaires utilisées par l'Iran pour soutenir les activités du Hezbollah et du Hamas.
Détournement des activités caritatives et à but non lucratif : L'utilisation abusive des secteurs de la bienfaisance et des OBNL a été observée comme une méthode de financement importante du Hamas et du Hezbollah. Des groupes extrémistes violents du mouvement Khalistan sont aussi connus pour utiliser des réseaux pour solliciter des dons auprès des communautés de la diaspora afin de collecter et de transférer des fonds, notamment par l'intermédiaire de GCO. Malgré ces observations, on estime que la génération de revenus par le détournement des OBNL représente un pourcentage relativement faible des budgets opérationnels des groupes terroristes dans leur ensembleNote de bas de page 124. En 2024, le Groupe Egmont, un organisme qui réunit 174 unités du renseignement financier, a publié un aperçu des schémas de détournement des OBNL et de la manière dont les unités du renseignement financier peuvent améliorer leurs méthodes pour tirer le meilleur parti de la coopération internationale en échangeant des renseignements financiers pour perfectionner la détection et obtenir de meilleurs résultats dans la lutte contre le détournement des OBNL pour financer le terrorismeNote de bas de page 125.
Activités criminelles : Les activités criminelles sont également un moyen de financement important pour les fins de l'EVCP, en particulier pour le Hezbollah qui a de solides partenariats avec des GCO internationaux et nationaux. Le Hezbollah reste un acteur mondial très actif dans le commerce de la cocaïne, de l'héroïne, du fentanyl et du captagonNote de bas de page 126, avec des réseaux de trafiquants couvrant l'Amérique latineNote de bas de page 127, le Canada et les États-UnisNote de bas de page 128. Il emploie également des techniques de recyclage des produits de la criminalité de nature commerciale. Par exemple, CANAFE a signalé que des fonds soupçonnés d'appuyer le Hezbollah ont été envoyés ou reçus en lien avec le commerce de voitures d'occasionNote de bas de page 129. Les responsables américains ont vu le Hezbollah acheter des voitures d'occasion en Amérique du Nord et les expédier pour les revendre par l'intermédiaire de pays comme les Émirats arabes unis, l'Afrique du Sud, l'Angola, la Côte d'Ivoire, la République démocratique du Congo, la Belgique, le Royaume-Uni, Hong Kong, la Tanzanie, le Kenya et le Yémen, le produit de cette vente étant ensuite transféré au Liban par des services de messagerieNote de bas de page 130. Le port de Montréal est un lieu connu de transit pour les véhicules de luxe expédiés au Liban, une activité qui soutient financièrement le Hezbollah.
Extrémisme violent à caractère religieux
L'EVCR incite l'usage de la violence dans le cadre d'une lutte spirituelle contre un système perçu comme immoral. Les adeptes croient que le salut ne peut être atteint que par la violence. Bon nombre des entités inscrites sur la liste des terroristes en vertu du Code criminel figurent dans la catégorie des groupes d'EVCR. Daech et les talibans sont désignés comme les principaux groupes d'EVCR constituant une menace de financement des activités terroristes pour le Canada. L'alerte opérationnelle de 2022 de CANAFE sur le financement des activités terroristes désigne Daech comme l'entité terroriste internationale la plus fréquemment citée dans la réception de fonds en provenance du CanadaNote de bas de page 131.
La menace d'extrémisme violent (ERV) contre le Canada s'est accrue en 2023, en raison d'acteurs isolés inspirés qui ont tenté des attentats ou, dans un cas, réussi à les perpétrer. Cette tendance croissante devrait se poursuivre et utilisera probablement des méthodes peu sophistiquées, en grande partie autofinancées. Les dirigeants charismatiques de l'EVCR au Canada continuent de se servir des événements internationaux pour inspirer les attaques et amplifier leur propagande en vue de radicaliser et de recruter des personnes vulnérables, tout en incitant à la fois les actes de violence au pays et les voyages internationaux vers des zones de conflit.Note de bas de page 132
Méthodes de financement de l'EVCR
Daech et les talibans sont des groupes établis et bien financés qui entrent dans la catégorie de l'EVCR. Bien que ces groupes exercent leurs activités dans des contextes différents qui présentent des défis distincts en matière de financement du terrorisme, les deux recourent à diverses méthodes de financement pour soutenir leurs activités, y compris les réseaux de financement internationaux, le trafic de drogues, la contrebande d'argent, l'exploitation des appels humanitaires et les SITV. Ces groupes s'appuient également sur des techniques de recyclage des produits de la criminalité et des services professionnels de recyclage des produits de la criminalité, y compris l'utilisation d'intermédiaire, de la dispersion et de la contrebande d'espèces pour masquer l'origine des fondsNote de bas de page 133.
En tant qu'autorités de facto de l'Afghanistan depuis 2021, les talibans contrôlent l'économie nationale, y compris la génération de revenus par le biais des taxes, des tarifs douaniers et des frais d'agences gouvernementales perçus en échange de services fournis. De plus, l'Afghanistan sous les talibans est redevenu un refuge pour les groupes terroristes transnationaux, y compris les groupes ayant des liens avec le Canada. Les talibans opèrent principalement en Afghanistan et sont connus pour utiliser des sociétés-écrans et des sites de stockage d'espèces dans le monde entier, notamment à DubaïNote de bas de page 134.
En comparaison, Daech, autrefois concentré en Syrie et en Iraq, a éclaté et s'est étendu, adoptant des stratégies plus localisées pour financer ses opérations dans le monde entier par l'intermédiaire de ce qu'il appelle ses « provinces »Note de bas de page 135. Les talibans et Daech sont connus pour dépendre fortement de ces systèmes pour déplacer et dissimuler des fonds. Le Canada, l'Iraq, le Liban, le Pakistan, la Syrie, la Turquie, les Émirats arabes unis et le Yémen sont les pays les plus susceptibles d'obtenir des fonds ou des biens. Note de bas de page 136
Les acteurs de l'EVCR, en particulier Daech, poussent également les combattants terroristes étrangers à voyager à l'étranger pour soutenir leur cause. Cependant, le nombre de combattants terroristes étrangers, dont les voyageurs extrémistes canadiens, a fortement diminué depuis l'effondrement du soi-disant califat territorial de Daech en 2019. L'ampleur des fonds pour soutenir les voyages des combattants étrangers a donc diminué, car moins de personnes participent à des conflits à l'étranger. Pour les Canadiens qui tentent de voyager à l'étranger, les organismes canadiens d'application de la loi et les services de renseignement disposent d'outils pour surveiller et porter les accusations de terrorisme pertinentes en vertu du Code criminel.
En 2022, la GRC a arrêté une citoyenne canadienne à son arrivée au Canada, après qu'elle, ses enfants et un autre adulte ont été libérés d'un camp de détenus de Daech en Syrie. Elle faisait l'objet d'une enquête de l'Équipe intégrée de la sécurité nationale depuis novembre 2014. En vertu du Code criminel, quatre accusations de terrorisme ont été portées, dont une accusation de financement du terrorismeNote de bas de page 137.
En 2023, un résident de Toronto a été accusé par l'Équipe intégrée de la sécurité nationale de la GRC pour son rôle dans la collecte de fonds pour Daech. L'individu aurait aidé à collecter des fonds pour les combattants de Daech par le biais du financement participatif. L'enquête a révélé qu'il avait réalisé et diffusé de la propagande pro-État islamique sur les réseaux sociaux dans le but de radicaliser et de recruter des personnes pour le groupe terroriste. Il est allégué que l'individu a également conspiré avec un membre étranger de l'État islamique pour commettre des attaques terroristes contre des ambassades étrangères en Afghanistan et qu'il a fourni de la propagande et des recherches liées aux attaques menées en Afghanistan contre des ressortissants étrangersNote de bas de page 138.
Alors que les talibans sont moins susceptibles d'utiliser des cryptomonnaies, Daech exploite de plus en plus cet outil de financement, sollicitant des fonds sur les plateformes de médias sociaux, notamment Telegram, WhatsApp et Facebook, bien qu'il demeure moins utilisé que les méthodes traditionnelles comme les hawalas et les autres types d'ESMNote de bas de page 139. Par exemple, on a pu constater que Daech en Afrique de l'Ouest effectuait des paiements à l'aide de TetherNote de bas de page 140 et que certaines factions de Daech en Somalie renvoient chaque mois des dizaines de milliers de dollars au Moyen-Orient sous forme de cryptomonnaiesNote de bas de page 141. Le Canada a également vu Daech exploiter des conflits, des catastrophes naturelles et des appels humanitaires pour solliciter des dons en cryptomonnaies de donateurs conscients ou manipulés. En particulier, Daech a exploité les conditions humanitaires et sécuritaires désastreuses dans les camps de personnes déplacées du nord-est de la SyrieNote de bas de page 142.
Atténuer les menaces de financement des activités terroristes au Canada
La lutte contre le financement des activités terroristes nécessite une approche multidimensionnelle avec une collaboration qui s'étend à l'ensemble des gouvernements fédéral, provinciaux, territoriaux et municipaux, ainsi qu'au secteur privé et à la société civile. Le cadre législatif et réglementaire du Canada établit des obligations quant à la protection de l'intégrité du système financier canadien contre toute exploitation abusive à des fins de financement des activités terroristes.
Le Canada conserve une réponse politique solide en matière de lutte contre le terrorisme et le financement du terrorisme, fondée sur un cadre législatif complet et divers programmes stratégiques et opérationnels. Le cadre législatif et réglementaire s'appuie sur plusieurs lois fédérales, y compris la LRPCFAT, la Loi antiterroriste, le Code criminel et la Loi de l'impôt sur le revenu. Divers règlements, dont le Règlement d'application des résolutions des Nations Unies sur la lutte contre le terrorisme et le Règlement d'application des résolutions des Nations Unies sur le Taliban, EIIL (Daech) et Al-Qaïda (résolution 1267 du Conseil de sécurité des Nations Unies) éclairent également ce cadre.
Infractions liées au financement des activités terroristes
Commet une infraction toute personne se trouvant au Canada ou à l'étranger qui fait sciemment le commerce de biens, y compris des fonds, appartenant à une entité terroriste inscrite ou contrôlés par celle-ci. En vertu du paragraphe 83.1(1) du Code criminel et du paragraphe 8(1) du Règlement d'application des résolutions des Nations Unies sur la lutte contre le terrorisme, toute personne au Canada et tout Canadien à l'étranger est tenu de communiquer sans délai avec la GRC ou le SCRS si elle croit que des biens qui sont en sa possession ou sous son contrôle appartiennent à une entité terroriste inscrite ou sont détenus ou contrôlés par elle ou pour son compte, ainsi que tout renseignement portant sur une transaction, réelle ou projetée, mettant en cause ces biens.
Infractions liées au financement des activités terroristes en vertu du Code criminel
Les articles 83.02 à 83.04 du Code criminel énoncent les principales infractions de financement des activités terroristes au Canada. En vertu de ces articles, commet une infraction toute personne qui fournit, collecte, met à disposition, utilise ou possède des biens ou des services à des fins terroristes dans l'intention de les voir utiliser, ou en sachant qu'ils seront utilisés, en tout ou en partie pour une activité terroriste ou pour en faire bénéficier un groupe terroriste.
Selon le Code criminel, le terme « groupe terroriste » s'entend d'une entité inscrite. « Entité » s'entend d'une personne, d'un groupe ou d'une organisation.
En vertu de la LRPCFAT et des règlements connexes, les entités déclarantes sont également tenues de déclarer les biens terroristes en leur possession à CANAFENote de bas de page 143. Les entités déclarantes doivent également produire des déclarations d'opérations douteuses à CANAFE si elles ont des motifs raisonnables de soupçonner qu'une opération ou une tentative d'opération est liée à la perpétration d'une infraction de financement d'activités terroristesNote de bas de page 144.
Afin de faciliter la prestation de l'aide humanitaire dans les zones contrôlées par les terroristes, le Parlement a modifié le Code criminel en 2023 afin d'établir une exception légale à la responsabilité criminelle pour les activités d'aide humanitaire (paragraphe 83.03[4]). Les modifications ont également établi un régime d'autorisation pour protéger les Canadiens de toute responsabilité criminelle lorsque la fourniture d'aide internationale et d'autres activités nécessaires procurerait un avantage accessoire, mais inévitable, à un groupe terroristeNote de bas de page 145.
Réponse aux combattants terroristes étrangers
Les voyageurs extrémistes canadiens sont des personnes ayant un lien avec le Canada par la citoyenneté, la résidence permanente ou un visa en cours de validité, qui sont soupçonnées d'avoir voyagé à l'étranger pour se livrer à des activités liées au terrorisme. Ces personnes peuvent quitter le Canada pour soutenir ou faciliter des activités extrémistes violentes ou y participer.
Depuis 2001, au moins 200 voyageurs extrémistes canadiensNote de bas de page 146 se sont rendus à l'étranger pour se joindre à Daech et à d'autres groupes terroristes en Afghanistan, au Pakistan et dans certaines parties de l'Afrique du Nord et de l'Est. Pour ceux qui rentrent au pays, les autorités canadiennes ont le mandat d'intenter des poursuites criminelles ou adopter d'autres méthodes de réduction de la menace. Plusieurs infractions liées au départ du Canada ou à une tentative de quitter le Canada dans le but d'aller commettre certaines infractions de terrorisme ont été intégrées au Code criminel en 2013.
Depuis 2013, 17 Canadiens ont été accusés d'infraction liée à des voyages à des fins terroristes et sept personnes ont été reconnues coupables. Des accusations ont également été portées dans six autres cas, impliquant neuf personnes qui ne se trouvent pas actuellement au Canada. Au début de 2023, le gouvernement du Canada a rapatrié six femmes canadiennes et leurs enfants en provenance de camps situés dans le nord-est de la Syrie, et six autres enfants canadiens ont été rapatriés de la région en 2024. Le SCRS a divulgué des renseignements qui ont appuyé les efforts d'enquête de la GRC et ont permis au SPPC de porter des accusations et d'émettre des engagements de ne pas troubler l'ordre public au retour des individus au Canada.
Le Canada déploie divers outils pour s'assurer que les personnes ne voyagent pas pour mener des activités terroristes ou extrémistes violentes à l'étranger, y compris le Décret sur les passeports canadiens, les engagements de ne pas troubler l'ordre public liés au terrorisme ou l'inscription en vertu de la Loi sur la sûreté des déplacements aériens. Lorsque des personnes finissent par voyager, les autorités canadiennes s'efforcent de surveiller leurs activités liées à la menace à l'étranger, ainsi que leur retour au Canada, afin d'atténuer toute menace que ces personnes peuvent représenter.
Le gouvernement travaille également avec les autorités provinciales, les OBNL et les services sociaux pour faciliter la réadaptation et la réinsertion sociale de ces personnes, dans la mesure du possible. Le Centre canadien d'engagement communautaire et de prévention de la violence, hébergé par Sécurité publique Canada, finance des initiatives pour les travailleurs de première ligne afin d'aider les voyageurs extrémistes et leurs familles à se distancier des idéologies extrémistes violentesNote de bas de page 147.
Chapitre 5 : Évaluation des vulnérabilités face au recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes
Aperçu
Un large éventail d'entreprises et de services financiers et non financiers au Canada sont exposés à des risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Ainsi, les grandes banques, les ESM, les cryptoactifs et certaines sociétés et fiducies expresses sont considérées comme les plus vulnérables. Cette évaluation des vulnérabilités inhérentes aux secteurs et aux produits demeure globalement stable depuis 2023. Bon nombre des changements constatés dans les vulnérabilités sont liés à la technologie, comme les cryptoactifs, les plateformes de financement participatif et les casinos en ligne, où les risques évoluent plus rapidement et augmentent globalement. La plupart des secteurs jugés les plus vulnérables font l'objet de mesures d'atténuation rigoureuses, par la réglementation, la surveillance et l'application de la loi.
Les secteurs d'activité, les professions, les structures d'entreprise et les produits financiers ont été évalués en fonction des critères suivants :
- Caractéristiques inhérentes : Ampleur de l'importance économique du secteur ou de la profession, complexité de sa structure opérationnelle, intégration avec d'autres secteurs et portée et accessibilité des opérations pour les clients.
- Nature des produits et services : Nature et portée des produits et services vulnérables proposés par le secteur ou la profession, de même que le volume, la rapidité et la fréquence des opérations des clients associés à ces produits et services.
- Nature des relations d'affaires : Proportion des activités de nature transactionnelle par rapport aux activités ayant cours sur une base récurrente, des relations d'affaires directes par rapport à celles qui sont indirectes et de l'exposition à des clients et à risque élevé, comme les PPV, ou à d'autres clients considérés comme à risque élevé dans le contexte du secteur.
- Portée géographique : Expositions aux administrations désignées comme à risque élevé par le GAFI et à des espaces géographiques marqués par des caractéristiques préoccupantes.
- Nature du mode de prestation : Mesure dans laquelle l'offre de produits et services peut être effectuée dans l'anonymat (méthodes de vérification de l'identité en personne ou pas en personne, recours à des tiers) et sa complexité (p. ex., recours à plusieurs intermédiaires avec peu de contrôles immédiats).
Des cotes de vulnérabilité « faible », « moyenne », « élevée » ou « très élevée » ont été appliquées à chaque critère d'évaluation, puis les cotes individuelles ont été regroupées pour obtenir une cote globale pour chaque secteur d'activité, profession ou produit. Bien que la dynamique de vulnérabilité de chaque domaine évalué soit unique, les caractéristiques de chaque cote de vulnérabilité sont résumées au tableau 7.
Très élevée |
Secteurs ou professions gérant des transactions et des actifs selon un volume, une rapidité ou une valeur très élevés, offrant une large gamme de produits et de services vulnérables, intégrés à de nombreux autres secteurs vulnérables et très accessibles aux clients canadiens et internationaux. Les relations d'affaires sont très transactionnelles et comprennent des clients à risque élevé, comme les PPV, les entreprises à forte intensité de liquidités ou les personnes morales complexes. Ces secteurs ou professions réalisent d'importantes transactions transfrontalières, y compris vers des administrations à risque élevé, ou utilisent souvent des modes de prestation complexes qui offrent un niveau élevé d'anonymat. |
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Élevé |
Secteurs ou professions gérant des transactions et des actifs selon un volume, une rapidité ou une valeur élevés, offrant certains produits et services vulnérables, intégrés à certains autres secteurs vulnérables et très accessibles dans tout le Canada. Les relations d'affaires sont transactionnelles et comprennent des clients à risque élevé, comme les PPV, les entreprises à forte intensité de liquidités ou les personnes morales complexes. Ces secteurs ou professions réalisent souvent des transactions transfrontalières, y compris vers des administrations à risque élevé, ou peuvent utiliser des modes de prestation complexes qui offrent un niveau élevé d'anonymat. |
Moyenne |
Secteurs ou professions gérant des transactions et des actifs selon un volume, une rapidité ou une valeur faible, offrant peu de produits et de services vulnérables, pouvant être intégrés à quelques autres secteurs vulnérables et présentant une accessibilité relativement limitée. Les relations d'affaires se font principalement sur une base récurrente et directe, et comprennent rarement des clients à risque élevé, comme les PPV, les entreprises à forte intensité de liquidités ou les personnes morales complexes. Ces secteurs ou professions réalisent des transactions transfrontalières limitées, avec une exposition limitée aux administrations à risque élevé, ou utilisent parfois des modes de prestation complexes qui offrent un niveau élevé d'anonymat. |
Faible |
Secteurs ou professions gérant des transactions et des actifs selon un volume, une rapidité ou une valeur faible, offrant des services limités, y compris des transactions en espèces limitées. Les relations d'affaires se font presque entièrement sur une base récurrente et directe, et comprennent rarement, voire jamais des clients à risque élevé, comme les PPV, les entreprises à forte intensité de liquidités ou les personnes morales complexes. Ces secteurs ou professions réalisent exclusivement des transactions nationales, sans aucune exposition aux administrations à risque élevé, ou utilisent rarement, voire jamais des modes de prestation complexes qui offrent un niveau élevé d'anonymat. |
Le rapport de 2025 traite des secteurs et des produits cotés de « très élevé » à « moyen » en ce qui a trait à leur vulnérabilité inhérente au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes, car ils représentent les segments de l'économie canadienne les plus vulnérables à l'utilisation abusive. Les principaux secteurs et produits présentant un risque élevé sont classés comme « très élevé » ou « élevé » pour refléter les différences d'importance relative, comme la taille du secteur, le volume des transactions et la diversité des produits.
Les secteurs et les produits à faible vulnérabilité sont toujours évalués par rapport au régime canadien de LRPC/FAT, mais ne sont pas mis en évidence dans le rapport.
Cote de vulnérabilité très élevée | |
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Sociétés* | Fiducies expresses* |
Banques d'importance systémique nationale | Entreprises de services monétaires (ESM) |
(BISN) | Cryptoactifs |
Cote de vulnérabilité élevée | |
Entreprises de véhicules blindés | Avocats et notaires du Québec |
Casinos physiques et en ligne | Prêteurs hypothécaires |
Coopératives de crédit et caisses populaires | Autres banques nationales |
Plateformes de financement participatif | Fournisseurs de services de paiement |
Négociants en métaux précieux et pierres précieuses | Courtiers immobiliers, représentants des ventes et promoteurs |
Succursales de banques étrangères | Courtiers en valeurs mobilières |
Filiales de banques étrangères | Sociétés de fiducie et de prêt |
Entreprises d'importation et d'exportation | |
Cote de vulnérabilité moyenne | |
Comptables | Sociétés de financement et de crédit-bail |
Notaires de la Colombie-Britannique | Sociétés d'assurance-vie |
Entreprises d'encaissement de chèques | Courtiers en hypothèques |
Fournisseurs de services aux entreprises | Organisations à but non lucratif |
Courtages en douane et transitaires | Sociétés de personnes* |
Société d'affacturage | Guichets automatiques privés à étiquette blanche |
* La vulnérabilité se rapporte à la capacité de ces entités à servir à dissimuler la propriété effective, facilitant ainsi le camouflage et la conversion de produits illicite. |
Atténuer les vulnérabilités inhérentes du Canada au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes
Le rapport de 2025 s'appuie sur les analyses publiées en 2015 et en 2023 pour intégrer l'application d'une « perspective axée sur le risque résiduel » à l'évaluation des vulnérabilités inhérentes du Canada au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes. Cette mise à jour met en évidence les mesures d'atténuation prises afin de corriger les vulnérabilités pour chaque secteur et produit évalué selon trois critères : le cadre législatif et réglementaire, les mesures de surveillance et d'application de la loi et la mobilisation du secteur privé.
Cadre législatif et réglementaire
Le Canada tient à jour un cadre législatif solide en matière de LRPC/FAT, qui est composé de plusieurs lois fédérales, dont la LRPCFAT et le Code criminel. Ce cadre est étayé par des règlements et des lignes directrices, ainsi que par des traités et des conventions qui appuient les efforts internationaux de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité, le financement des activités terroristes et la prolifération des armes de destruction massive. D'autres lois fédérales, comme la Loi sur les banques, la Loi canadienne sur les sociétés par actions et la Loi de l'impôt sur le revenu, complètent le cadre fédéral de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes et contribuent à dissuader les activités illégales dans certains secteurs. Les cadres législatifs et réglementaires provinciaux et territoriaux sont également complémentaires et dissuadent les activités illégales.
La LRPCFAT recense les secteurs d'activité et les professions assujettis aux exigences législatives et réglementaires fédérales en matière de LRPC/FAT, appelés « entités déclarantes », et désigne CANAFE comme l'organisme de supervision de la LRPC/FAT et l'unité du renseignement financier du Canada.
Les entités déclarantes en vertu de la LRPCFAT comprennent :
- les entités financières, comme les banques, les coopératives d'épargne et de crédit, les sociétés de fiducie et de prêt;
- les sociétés d'assurance-vie, les courtiers et les agents;
- les courtiers en valeurs mobilières;
- les ESM, y compris les entreprises d'encaissement de chèques, les plateformes de financement participatif, les prestataires de services de paiement, les guichets automatiques à étiquette blanche, les entreprises de véhicules blindés et les opérateurs de monnaie virtuelle;
- les comptables et les cabinets comptables;
- les casinos;
- les sociétés notariales et les notaires publics de Colombie-Britannique;
- les courtiers immobiliers, les agents et les promoteurs;
- les administrateurs hypothécaires, les courtiers en hypothèques et les prêteurs hypothécaires;
- les négociants en métaux précieux et pierres précieuses.
En 2025, la portée des entités déclarantes visées par la LRPCFAT s'étendra à d'autres secteurs jugés plus vulnérables au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes. Les sociétés d'affacturage, les sociétés de financement et de crédit-bail et les entreprises d'encaissement de chèques sont devenues des entités déclarantes le 1er avril 2025. Les assureurs de titres et les acquéreurs de guichets automatiques à étiquette blanche seront également assujettis à la LRPCFAT à compter du 1er octobre 2025.
Bien que les obligations précises varient d'une industrie à l'autre, la LRPCFAT impose quatre exigences fondamentales : Premièrement, les entités déclarantes sont tenues de s'acquitter des exigences de vigilance à l'égard de la clientèle afin de bien comprendre qui est leur client avant d'effectuer certaines activités financières ou d'ouvrir un compte. Cela comprend les exigences relatives à la vérification de l'identité des clients, aux relations d'affaires, à la surveillance continue, à la propriété effective, à l'identification des tiers et à l'évaluation des PPV.
Deuxièmement, les entités déclarantes sont tenues de tenir certains registres liés aux services fournis aux clients. Par exemple, les entités financières qui acceptent des dépôts, comme les banques et les coopératives de crédit, doivent tenir des registres détaillés sur les comptes qu'elles ouvrent et les opérations effectuées par l'intermédiaire de ces comptes.
Troisièmement, les entités déclarantes sont tenues de produire des déclarations d'opérations auprès de CANAFE dans les circonstances prescrites. Ces déclarations comprennent :
- les déclarations d'opérations douteuses, qui doivent être transmises dès que possible lorsqu'il y a des motifs raisonnables de soupçonner qu'une opération est liée à la perpétration ou à la tentative de perpétration d'une infraction liée au recyclage des produits de la criminalité, au financement des activités terroristes ou au contournement de sanctions;
- les déclarations de biens appartenant à une personne ou entité inscrite, qui doivent être transmises immédiatement lorsqu'une entité déclarante a l'obligation de communiquer des renseignements en application du Code criminel ou d'un décret ou d'un règlement pris en vertu de la Loi sur les Nations Unies. Des exigences supplémentaires relatives à la déclaration des biens sanctionnés en vertu de la Loi sur les mesures économiques spéciales de la Loi sur la justice pour les victimes de dirigeants étrangers corrompus (loi de Sergueï Magnitski) entreront en vigueur à l'automne 2025. Dans la plupart des cas, les entités déclarantes sont tenues d'informer la GRC et le SCRS si elles découvrent qu'elles sont en possession de tels biens;
- les déclarations d'opérations importantes en espèces, qui doivent être produites lorsqu'une entité déclarante reçoit un montant de 10 000 $ ou plus en espèces en une seule opération, ou en deux opérations ou plus au cours d'une période de 24 heures;
- les déclarations d'opérations importantes en monnaie virtuelle, qui doivent être produites lorsqu'une entité déclarante reçoit un montant en monnaie virtuelle équivalant à 10 000 $ ou plus en une seule opération, ou en deux opérations ou plus au cours d'une période de 24 heures;
- les déclarations de télévirements, qui doivent être produites lorsqu'une entité financière, une ESM ou un casino traite un transfert international de 10 000 $ ou plus en une seule opération, ou en deux opérations ou plus au cours d'une période de 24 heures;
- les déclarations de déboursement de casino, qui doivent être produites lorsqu'un casino effectue un déboursement de 10 000 $ ou plus en une seule opération, ou en deux opérations ou plus au cours d'une période de 24 heures.
Enfin, chaque entité déclarante est tenue d'établir et de mettre en œuvre un programme de conformité. Ce programme doit comprendre l'élaboration et l'application de politiques et de procédures permettant à l'entité déclarante d'évaluer le risque d'infraction liée au recyclage des produits de la criminalité ou de financement des activités terroristes dans le cadre de ses activités.
Afin d'assurer la conformité, la LRPCFAT établit un cadre pour les sanctions administratives qui peuvent être appliquées aux personnes ou aux entités réglementées en vertu de la Loi. Les infractions particulières et la classification de ces infractions (mineures, graves ou très graves) sont énoncées dans les règlements connexes. Les infractions et les poursuites pénales pour les cas de non-conformité criminelle figurent également dans la LRPCFAT.
Mesures de surveillance et d'application de la loi
Toutes les entités déclarantes sont surveillées par CANAFE. Dans le cadre de son mandat principal, CANAFE mène un programme de supervision global fondé sur les risques afin de s'assurer que les entreprises remplissent leurs obligations au titre de la LRPCFAT et des règlements connexes.
La conformité avec la législation garantit que les entreprises et les professions réglementées atténuent les risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Elle permet également de veiller à ce que CANAFE reçoive les renseignements dont il a besoin pour produire des renseignements financiers exploitables à l'intention des organismes d'application de la loi et de sécurité nationale du Canada.
Pour maximiser la conformité des entités déclarantes, CANAFE mène des activités de sensibilisation auprès de l'industrie afin d'aider les entreprises réglementées à mieux comprendre leurs obligations, évalue les niveaux de conformité au moyen d'examens et d'autres fonctions de surveillance, effectue des suivis après l'évaluation pour s'assurer que les lacunes relevées en matière de conformité sont comblées et applique la conformité au moyen de différents outils d'application de la loi.
CANAFE a aussi le pouvoir législatif de communiquer des renseignements aux organismes d'application de la loi lorsqu'il a des motifs raisonnables de croire que les renseignements seraient pertinents pour enquêter sur une infraction à la LRPCFAT ou pour intenter des poursuites concernant une non-conformité criminelle à l'égard de cette loi. Ces communications peuvent avoir lieu lorsque CANAFE a détecté une non-conformité criminelle d'une entité déclarante ou lorsqu'il a reçu des renseignements volontaires d'un organisme d'application de la loi sur ladite non-conformitéNote de bas de page 148. En 2023-2024, CANAFE a communiqué 14 cas de ce type aux organismes d'application de la loiNote de bas de page 149.
D'autres organismes de réglementation fédéraux, dont le BSIF, l'ARC, ISDE et l'ASFC, contribuent également au cadre fédéral de supervision de la LRPC/FAT du Canada, soit par la réglementation des entités déclarantes au titre de la LRPCFAT, soit pour d'autres secteurs, professions ou produits vulnérables, comme les OBNL, les sociétés et les sociétés d'importation et d'exportation.
Les organismes de réglementation provinciaux et territoriaux, comme les organismes de réglementation des valeurs mobilières, ainsi que plusieurs organismes d'autoréglementation, y compris ceux qui régissent la profession juridique, contribuent également au cadre de surveillance des entreprises et des professions vulnérables du Canada.
Mobilisation du secteur privé
Le secteur privé joue un rôle de première ligne dans la prévention et la détection du recyclage des produits de la criminalité et du financement des activités terroristes. Plus de 38 000 entités déclarantes sont assujetties à la surveillance de CANAFE. Bon nombre de ces entreprises et professions prennent des mesures supplémentaires pour lutter contre le recyclage des produits de la criminalité et ses crimes sous-jacents, notamment en collaborant avec le gouvernement pour mieux détecter les menaces potentielles, découvrir des liens financiers plus larges et fournir des renseignements pour faire avancer les enquêtes nationales, soit par le biais de partenariats public-privé, soit par l'intermédiaire de divers groupes de travail public-privé.
Les retours du secteur privé et d'autres intervenants permettent d'assurer l'efficacité du cadre canadien de LRPC/FAT. Le gouvernement sollicite ces retours de diverses façons, notamment par l'intermédiaire du Comité consultatif sur le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes et de ses groupes de travail, et dans le cadre de processus de consultation publique. Le Comité consultatif sur le secteur de la bienfaisance de l'ARC évalue également les méthodes d'évaluation nationale des risques en tenant compte de la diversité du secteur et des efforts déployés pour atténuer les risques de financement des activités terroristes. Il rend compte de ses conclusions au ministre du Revenu national.
La plupart de ces entreprises et professions coordonnent leurs efforts de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes par l'intermédiaire d'associations de l'industrie. En plus de servir de point de contact central pour discuter avec le gouvernement, ces associations peuvent jouer un rôle clé dans la création de codes de conduite de l'industrie ou d'évaluations des risques pour aider leurs membres à se conformer aux exigences de la LRPCFAT.
Bien que le secteur juridique ne soit pas assujetti aux exigences de la LRPCFAT, il a également été proactif dans sa mobilisation auprès du gouvernement sur les questions liées à la criminalité financière. La Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada (FOPJC) copréside un groupe de travail conjoint avec le ministère des Finances depuis 2019. Le FOPJC publie également des orientations et des évaluations des risques liés à la lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes sur son site Web publicNote de bas de page 150.
Analyse des résultats de l'évaluation des vulnérabilités
Entités financières
Le FMI estime que le Canada possède l'un des systèmes financiers les plus importants et les plus développés au monde. Les entités financières au Canada comprennent à la fois les institutions financières sous réglementation fédérale, y compris les banques, les sociétés de fiducie et de prêt, les sociétés d'assurance et les coopératives de crédit, ainsi que les secteurs d'entités financières de moindre envergure, comme les sociétés d'affacturage et les sociétés de financement et de crédit-bail. Cette section présente également une évaluation de la vulnérabilité au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes posée par les cartes prépayées en circuit ouvert, qui sont généralement délivrées par des entités financières.
Vulnérabilités au RPC/FAT des BISN (très élevées) et des autres banques canadiennes (élevées) : Le système financier canadien est très concentré, avec 36 banques canadiennes constituées en société au Canada, y compris les six grandes BISN, en date d'avril 2025. Les BISN ont une présence importante dans le secteur financier canadien, que ce soit en matière de volume des transactions, d'actifs financiers et d'étendue des activités, tant au pays qu'à l'étranger. Ces conglomérats financiers représentent la majorité du secteur financier canadien, détenant environ 93 % du total des actifs bancairesNote de bas de page 151, et sont largement impliqués dans divers secteurs d'activité, notamment les activités bancaires, les fiducies et les prêts, les assurances et les opérations de valeurs mobilières. Les BISN sont évaluées comme ayant un niveau de vulnérabilité inhérente très élevé, tandis que les autres banques canadiennes sont aux prises avec un niveau élevé. Cette différence est attribuable à la portée géographique plus large des BISN, à une plus grande exposition aux juridictions à risque élevé et à un nombre plus important de clients transfrontaliers.
Les banques canadiennes sont des institutions universelles qui proposent un grand nombre de produits et de services vulnérables, y compris l'acceptation de dépôts, l'émission de prêts et de cartes de crédit, les placements et les services bancaires aux entreprises. Les banques font face à des transactions dont le volume, la vitesse et la fréquence sont très élevés, ce qui augmente leur profil de vulnérabilité. Les petites et moyennes banques peuvent utiliser les BISN comme intermédiaires pour la compensation des chèques et les services de virement télégraphique. Le secteur est également fortement intégré à d'autres secteurs, notamment l'immobilier, le financement et les valeurs mobilières.
Il est très accessible, avec des succursales et des services de guichets automatiques disponibles partout au pays selon l'institution. Toutes ces institutions offrent également des services bancaires en ligne sous une forme ou une autre, certaines banques canadiennes étant même entièrement en ligne sans emplacements physiques. Les banques nationales ont une exposition mondiale par l'intermédiaire d'importants correspondants bancaires et conservent un accès exclusif au réseau SWIFT utilisé pour les virements télégraphiques. Une partie des activités concernent des juridictions à risque élevé.
Le secteur dessert un large éventail de clients de détail et de consommateurs ayant des professions et des formes d'entreprises variées. Cette base très large de clientèle comprend des clients à risque élevé, y compris des particuliers fortunés, des PPV canadiennes et étrangères (comme des chefs d'État ou des chefs du gouvernement, des membres du conseil exécutif du gouvernement ou des membres d'une assemblée législative, des sous-ministres ou des personnes de rang équivalent), des non-résidents et des personnes occupant des postes dans des professions ou des secteurs vulnérables au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes. Les banques peuvent offrir des services transactionnels et continus à leur clientèle, bien que la majorité des relations d'affaires soient continues avec des titulaires de comptes ayant été intégrés en tant que clients, ce qui facilite le devoir de vigilance continue à l'égard de la clientèle de même que les efforts de surveillance continus.
Les services bancaires sont fournis par des modes de prestation en personne ou non qui varient en termes de complexité et de niveau d'anonymat accordé aux clients. Les banques sont également vulnérables face au risque de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes lorsqu'elles sont utilisées par des tiers et des intermédiaires, comme des professionnels du droit et des comptables, pour effectuer des opérations bancaires au nom de leurs clients.
Vulnérabilités au RPC/FAT des filiales de banques étrangères (élevées) et des succursales de banques étrangères (élevées) : En date d'avril 2025, il y avait 15 filiales de banques étrangères constituées au Canada et 29 succursales canadiennes autorisées de banques étrangères exerçant leurs activités au Canada. De ces 29 succursales de banques étrangères, 27 offrent des services complets, tandis que 2 se spécialisent uniquement dans les services de prêt.
Les filiales de banques étrangères sont des banques universelles régies par la Loi sur les banques qui appartiennent à des institutions étrangères admissibles. La vulnérabilité des produits et services offerts par ces filiales de banques étrangères est semblable à la vulnérabilité de ceux qui sont offerts par les banques nationales. Les filiales de banques étrangères sont étroitement intégrées à leurs sociétés mères, ainsi qu'à d'autres banques et secteurs dans leur pays d'origine. Les filiales de banques étrangères au Canada peuvent avoir recours à des ententes d'impartition avec des tiers plus fréquemment que les banques nationales. Bien que certains services soient fournis à l'interne, les filiales de banques étrangères en sous-traitent souvent d'autres à des banques affiliées au Canada ou dans leur pays d'origine. Parmi les services couramment externalisés, mentionnons la gestion d'actifs, la planification financière, les placements dans des fonds communs de placement, la planification successorale, les conseils fiscaux, les services de fiducie et d'autres services-conseils.
Les succursales de banques étrangères sont des bureaux canadiens de banques ayant leur siège social à l'étranger qui ont obtenu la permission de faire des affaires au Canada. Les succursales de banques étrangères ne sont pas constituées en vertu de la Loi sur les banques et sont assujetties à certaines restrictions, car elles ne sont pas considérées comme une entité juridique distincte au Canada. Ces succursales proposent un nombre plus limité de produits et de services vulnérables que les opérations bancaires de détail fournies par les banques nationales et les filiales de banques étrangères.
Les filiales et les succursales de banques étrangères au Canada proposent des produits et des services vulnérables à un large éventail de clients. Leurs relations d'affaires comprennent un mélange d'interactions transactionnelles et continues avec les clients. Une large part de leurs clients peut être classée comme à risque élevé, comme les non-résidents qui ne sont pas présents au Canada ou qui viennent d'administrations à risque élevé, les particuliers fortunés et les PPV canadiennes et étrangères. Les filiales de banques étrangères ciblent souvent des communautés spécifiques de la diaspora au Canada ainsi que des individus étrangers, ce qui peut les rendre plus exposées aux PPV étrangères et aux clients ayant des liens avec des administrations à haut risque.
Certaines filiales ou succursales de banques étrangères proposent des services exclusivement dans un environnement n'impliquant aucune interaction en personne. La variabilité des modes de prestation peut obscurcir l'identification des clients.
Vulnérabilités au RPC/FAT des sociétés de fiducie et de prêt (élevées) : Le secteur canadien des sociétés de fiducie et de prêt gère une quantité importante d'actifs. En date d'avril 2025, il y avait 41 sociétés de fiducie et 12 sociétés de prêt au Canada, des sociétés qui sont réglementées à l'échelle fédérale en vertu de la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêtNote de bas de page 152. Ce secteur est bien intégré, en particulier avec les banques, en raison des changements législatifs et des acquisitions qui ont amené les sociétés de fiducie et de prêt à être principalement détenues et contrôlées par des banques et d'autres institutions financières. Les sociétés de fiducie et de prêt qui appartiennent à des banques présentent des transactions affichant un volume, une vitesse et une fréquence comparables à ceux des grandes banques. Les sociétés de fiducie et de prêt indépendantes, ou celles qui ne sont pas contrôlées par d'autres institutions financières, ont tendance à effectuer moins d'opérations.
Les sociétés de fiducie et de prêt offrent des produits et des services vulnérables, y compris des dépôts, des prêts et d'autres activités bancaires traditionnelles. Les sociétés de fiducie sous réglementation fédérale peuvent agir à titre de fiduciaires pour des fiducies, des régimes de retraite et des contrats d'agence, ce qui leur permet d'administrer des successions, une activité que les banques ne sont pas autorisées à entreprendre. La plupart des sociétés de fiducie et de prêt sont des filiales de BISN et sont utilisées par la banque mère pour des services spécialisés liés aux dépôts, à la gestion de patrimoine et aux services de placement. Les transactions commerciales sont principalement effectuées en personne, notamment par l'intermédiaire d'un réseau de courtiers et d'agents.
Ce secteur dessert des millions de clients, dont beaucoup peuvent être considérés comme des clients à haut risque, comme les non-résidents, les PPV et les particuliers fortunés. Le profil de la clientèle est principalement axé sur le marché intérieur, mais peut comprendre des personnes situées dans des administrations à risque élevé qui font des affaires par l'intermédiaire d'un tiers. Les tiers sont souvent impliqués dans la création et la gestion de comptes en fiducie, ainsi que dans des prêts et des transactions immobilières complexes. Les sociétés de fiducie et de prêt affichent d'une exposition considérable au marché international, principalement grâce à leurs relations avec les BISN. Le secteur conserve des vulnérabilités inhérentes au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes en raison de la complexité de ses modes de prestation et d'un niveau modéré d'anonymat, accentué par le recours à des services d'impartition et à des agents.
Vulnérabilités au RPC/FAT des sociétés d'assurance-vie (moyennes) : Le secteur de l'assurance-vie du Canada est composé de sociétés d'assurance-vie canadiennes et étrangères exerçant leurs activités au Canada, ainsi que de courtiers et d'agents indépendants, et génère un grand nombre d'opérations liées aux polices. En avril 2025, on comptait 34 sociétés d'assurance-vie canadiennes et 22 sociétés d'assurance-vie étrangères sous la surveillance du BSIFNote de bas de page 153.
Les sociétés d'assurance-vie proposent une diversité de produits et de services, comme l'assurance, la gestion de patrimoine (placement) et la planification successorale, et sont bien intégrées à d'autres secteurs, y compris les banques. Ce secteur présente une structure opérationnelle complexe avec de multiples secteurs d'activité. Bien que les principaux produits et services du secteur présentent un faible risque, les experts de l'industrie craignent que le secteur ne soit coopté pour l'étape de l'intégration du recyclage des produits de la criminalité où des fonds illicites sont réintroduits dans le système financier.
Les pratiques de souscription dans le secteur de l'assurance-vie offrent une plus grande assurance quant au profil et aux antécédents financiers des clients. Cependant, dans certains cas, il peut encore s'avérer difficile de discerner la source ultime des paiements de primes. La plupart des transactions liées aux polices sont effectuées au pays par les propriétaires des polices, mais les blanchisseurs d'argent pourraient avoir la possibilité d'acheminer des fonds illicites vers certains produits d'assurance pour dissimuler leurs origines en fonction des caractéristiques du produit.
La disponibilité des prêts sur les produits d'assurance-vie entière et d'assurance-vie universelle peut également donner lieu à une vulnérabilité accrue, car la valeur de rachat peut être retirée et remboursée pendant toute la durée du certificat, y compris dans le cas d'une assurance financée par une prime unique. Néanmoins, la plupart des activités de prêt sont considérées comme à faible risque, car elles appuient principalement les primes liées à la police et les dépenses importantes. Les cas d'activités de prêt excessives semblant indiquer un comportement de recyclage des produits de la criminalité ou de financement des activités terroristes sont rares.
Les sociétés d'assurance-vie entretiennent des relations continues, directes et principalement en personne avec leurs clients, dont un faible pourcentage sont des PPV et d'autres clients à risque élevé. Dans ce secteur, cinq assureurs canadiens exploitent des succursales ou des filiales étrangères à l'extérieur du Canada.
Les sociétés d'assurance-vie comptent principalement sur des courtiers et des agents indépendants pour vendre leurs produits. La plupart des courtiers et des agents sont des représentants de sociétés d'assurance-vie et affichent peu d'intégration directe avec d'autres secteurs d'activité. L'accessibilité aux services se limite généralement à la portée géographique des marchés régionaux canadiens. Bien que certains services en ligne existent, ils servent principalement à diriger les clients vers les courtiers locaux. Compte tenu de la nature des produits vendus par les courtiers et les agents d'assurance-vie, il est rare qu'ils fassent appel à des tiers ou qu'ils utilisent des modes de prestation anonymes. Les clients transfrontaliers sont rares et sont généralement gérés par les sociétés d'assurance-vie. Les courtiers et les agents d'assurance-vie sont donc considérés comme présentant une faible vulnérabilité inhérente au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes.
Le secteur de l'assurance-vie est également soutenu par des entités intermédiaires, aussi appelées agents généraux gestionnaires, qui fournissent principalement un soutien administratif aux sociétés d'assurance-vie et aux courtiers ou agents d'assurance-vie. Ces agents généraux gestionnaires ne sont pas connus pour interagir directement avec les clients et sont donc moins exposés au risque de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes que les autres types d'entités de ce secteur. En raison de cette faible vulnérabilité inhérente, les agents généraux gestionnaires ne sont pas assujettis à la LRPCFAT.
Vulnérabilités au RPC/FAT des coopératives de crédit et des caisses populaires (élevées) : Le secteur canadien des coopératives de crédit et des caisses populaires est important en termes de gestion d'actifs et de présence dans l'ensemble du pays. En décembre 2024, 185 coopératives de crédit étaient en activité au Canada (à l'exclusion le Mouvement Desjardins) et géraient collectivement un actif d'une valeur de 313 milliards de dollars. Le Mouvement Desjardins, le plus important groupe financier coopératif en Amérique du Nord, exploitait à lui seul 204 caisses populaires en Ontario et au Québec, et gérait un actif d'une valeur de 381 milliards de dollars au cours de la même périodeNote de bas de page 154.
Bien que la taille globale du secteur et le volume des transactions soient inférieurs à ceux du secteur bancaire, ses activités commerciales demeurent complexes. Les coopératives de crédit et les caisses populaires proposent divers produits et services de détail, y compris des comptes-chèques, des virements télégraphiques, des lignes de crédit et des prêts hypothécaires qui sont accessibles à un large éventail de clients. Les principales vulnérabilités du secteur en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes sont associées aux opérations internationales, aux mouvements de fonds importants ou rapides, aux risques associés à l'intervention de tiers et aux opérations en espèces.
Les coopératives de crédit et les caisses populaires proposent des services bancaires partout au Canada et peuvent effectuer des virements télégraphiques nationaux et internationaux au nom de clients qui peuvent impliquer des administrations à risque élevé. Les coopératives de crédit et les caisses populaires desservant des collectivités plus rurales peuvent être exposées à des niveaux élevés de criminalité et de corruption en raison de l'isolement géographique et des défis particuliers associés à ces régions. Le Canada rural connaît une gravité de la criminalité 33 % plus élevée que les régions urbaines, tant en volume qu'en gravitéNote de bas de page 155, ce qui rend ces régions vulnérables à l'exploitation par le crime organisé impliqué dans le trafic de drogues et le recyclage des produits de la criminalité.
Certaines coopératives de crédit et caisses populaires proposent des services aux travailleurs de passage, leur permettant d'envoyer des fonds dans leur pays d'origine. Certains de ces pays peuvent être des pays désignés par le GAFI comme présentant un risque élevé de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Néanmoins, par rapport aux banques, le secteur est davantage tourné vers le marché intérieur, ce qui atténue certains des risques que peuvent représenter les expositions géographiques plus importantes. Le secteur des coopératives de crédit et des caisses populaires a tendance à préférer l'interaction en personne dans les succursales, apportant un sentiment de communauté et réduisant l'anonymat dans les relations d'affaires. Cependant, comme de plus en plus d'institutions financières offrent des services en ligne à leurs clients, les grandes coopératives de crédit et les caisses populaires adoptent des applications mobiles comparables à celles offertes par les banques.
Vulnérabilités au RPC/FAT des sociétés d'affacturage (moyennes) : L'affacturage est une activité financière exclusivement interentreprises. Les sociétés d'affacturage fournissent des liquidités à un client à l'avance en échange de la valeur en espèces d'un certain montant de créances du client (c.-à-d. de factures) qui seront recouvrées ultérieurement par la société d'affacturage, majorée d'une commission et de frais. Ce secteur spécialisé compte environ 65 entreprises partout au Canada. Bien que l'affacturage soit le seul secteur d'activité de la plupart des sociétés d'affacturage au Canada, plus de la moitié du volume total d'affacturage au Canada relève d'institutions financières sous réglementation fédérale.
Le secteur de l'affacturage est intégré aux secteurs bancaire et juridique, ce qui facilite les transactions et la rédaction des contrats. La capacité du secteur à transférer directement des fonds à l'étranger est limitée. La plupart des opérations d'affacturage sont effectuées par chèque et par transfert électronique de fonds de gros montants, avec une disponibilité limitée pour l'utilisation d'espèces. La clientèle est principalement constituée de grandes entreprises sophistiquées, bien que les petites et moyennes entreprises aient de plus en plus recours à ces services d'affacturage. La nature interentreprises de ce secteur peut être exploitée par des acteurs malveillants qui utilisent des structures de propriété complexes pour masquer la propriété effective ultime.
Comme dans d'autres secteurs, les vulnérabilités propres au secteur de l'affacturage peuvent être exacerbées dans les situations où une entreprise peut être contrôlée par des criminels, ce qui entraîne une collusion entre la société d'affacturage et l'entreprise auprès de laquelle les factures sont achetées.
Vulnérabilités au RPC/FAT des sociétés de financement et de crédit-bail (moyennes) : Le secteur du financement et du crédit-bail au Canada est diversifié, composé de plus de 220 bailleurs nationaux et internationaux ainsi que de petites entreprises indépendantes. Le crédit-bail est un processus par lequel la société de crédit-bail permet à une autre partie d'utiliser un actif, comme de l'équipement ou un véhicule, pendant une période déterminée en échange d'un paiement régulier. Une société de crédit-bail peut être une institution financière ou une société privée qui propose des baux à des particuliers et à des entreprises. Environ 85 % des services de crédit-bail sont proposés par des institutions financières sous réglementation fédérale. Ce secteur offre une gamme de services de crédit-bail et de financement aux particuliers et aux entreprises qui peuvent être complexes et impliquer de multiples parties au Canada et à l'étranger. Le secteur est intégré aux secteurs bancaire, automobile et agricole, entre autres.
Les contrats de crédit-bail peuvent être proposés directement ou indirectement. Dans le cadre d'un contrat de crédit-bail direct, un fournisseur propose le crédit-bail comme option de financement et dispose d'un service interne qui supervise le contrat. Dans le cadre d'un contrat de crédit-bail indirect, un intermédiaire financier ou une société de crédit-bail achète un actif auprès d'un vendeur et permet au crédit-preneur d'utiliser l'actif pendant la durée du contrat de crédit-bail et après le paiement intégral. Le crédit-preneur traite directement avec l'intermédiaire financier ou la société de crédit-bail. Les sociétés de financement peuvent offrir une gamme de services plus large que les sociétés de crédit-bail et peuvent également opérer directement ou indirectement avec les clients. Les accords de financement et de crédit-bail directs et indirects présentent tous deux des risques avérés de recyclage des produits de la criminalité.
Les sociétés de financement et de crédit-bail permettent diverses méthodes de paiement telles que le prélèvement automatique, l'argent comptant, les transferts électroniques de fonds, les mandats et les chèques. Les paiements liés au crédit-bail et au financement peuvent être effectués avec des produits illicites, créant une vulnérabilité à l'étape de l'intégration du recyclage des produits de la criminalité.
Les activités du secteur sont à la fois nationales et internationales, le niveau d'exposition géographique dépendant du modèle d'affaires propre à chaque société de financement ou de crédit-bail. La plupart des accords de financement et de crédit-bail garantis par les actifs se concentrent sur l'échelle nationale, tandis que d'autres types d'accords de financement et de crédit-bail, comme le financement du commerce et des exportations, ont une plus grande exposition internationale.
Les sociétés de crédit-bail et de financement ont généralement des relations d'affaires continues avec les clients et les fournisseurs, ce qui reflète leur intérêt à s'assurer que les paiements sont effectués et que l'actif sous-jacent est maintenu. Cette caractéristique fait également écho à l'incidence de la fraude dans l'ensemble du secteur, qui nécessite un devoir de vigilance et de surveillance continue plus approfondi que dans d'autres secteurs, en particulier du point de vue de la prévention des pertes.
Les criminels sont également connus pour préférer ces contrats de financement et de crédit-bail, car ils ne subissent aucune perte lorsqu'un bien loué est saisi par les forces de l'ordre. Il y a également eu des cas démontrés où les GCO ont pris des dispositions pour financer des véhicules pour les trafiquants de drogues de rue, en partie comme récompense et en partie pour faciliter le commerce de la drogueNote de bas de page 156. Les services de financement et de location de produits de consommation de plus grande valeur et de luxe, comme les véhicules automobiles, les bateaux, les œuvres d'art et d'autres articles de grande valeur, sont ceux qui affichent le plus grand risque de recyclage des produits de la criminalité parmi les différents services fournis par ce secteur. Les accords de financement et de crédit-bail concernant les produits de moindre valeur, comme la plupart des autres produits de consommation (location de meubles avec option d'achat, appareils électroniques, etc.), présentent un faible risque sur le plan du recyclage des produits de la criminalité.
Les produits de paiement prépayés en circuit ouvert sont généralement émis par des institutions financières sous réglementation fédérale et peuvent être des cartes physiques ou virtuelles pouvant être utilisées presque partout où les cartes de crédit ou de débit sont acceptées. En revanche, les produits de paiement prépayés en circuit fermé sont des produits de paiement prépayés physiques ou virtuels qui ne peuvent être utilisés que pour effectuer des achats auprès d'une seule entreprise de vente au détail, d'entreprises affiliées (comme celles situées dans un seul centre commercial) ou d'autres endroits désignés (p. ex., des transports en commun). Les produits de paiement prépayés en circuit fermé sont également souvent appelés cartes-cadeaux de commerçants.
Le niveau d'utilisation des produits de paiement prépayés en circuit ouvert par la population canadienne demeure stable, mais continue de ne représenter qu'une petite fraction de l'ensemble des transactions de l'économie. Il convient de noter que la détention de ce type de produits a connu une forte baisse entre 2017 et 2021, et qu'elle est restée à des niveaux inférieurs depuis. En 2023, la détention de produits prépayés en circuit ouvert était de 9 %, soit un niveau légèrement supérieur à son plus bas niveau de 2021Note de bas de page 157.
Les produits de paiement prépayés en circuit ouvert et en circuit fermé présentent différents niveaux de vulnérabilité inhérente au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes, les produits en circuit ouvert étant considérés comme très vulnérables et les produits en circuit fermé comme moins vulnérables. Les produits prépayés en circuit ouvert peuvent être chargés en espèces et utilisés comme mode de paiement, être utilisés pour retirer de l'argent ou être transférés de personne à personne au Canada ou à l'étranger.
La relation d'affaires avec les clients est transactionnelle et peut impliquer des transactions qui ne se déroulent pas en personne. Compte tenu de la nature du produit, les clients peuvent présenter un risque élevé, y compris ceux qui occupent des professions vulnérables ou travaillent dans des entreprises vulnérables. Certains produits en circuit ouvert peuvent être achetés et chargés de manière relativement anonyme, tandis que d'autres, qui peuvent être rechargés avec des limites de rechargement plus élevées, exigent une preuve d'identité. Bien que les produits de paiement prépayés soient relativement transférables à l'échelle transfrontalière, le contexte de leur délivrance au Canada a évolué et l'anonymat s'est réduit, réduisant parallèlement le risque qu'ils représentent.
Mesures prises en matière de réglementation, de surveillance et d'application de la loi
Les entités financières, y compris les banques, les coopératives de crédit, les caisses populaires, les sociétés de fiducie et de prêt, ainsi que les sociétés d'assurance-vie, les courtiers et les agents, sont depuis longtemps assujetties à des mesures de contrôle réglementaire en matière de RPC/FAT en vertu de la LRPCFAT et sous la supervision de CANAFE. Les entités financières qui délivrent des produits de paiement prépayés en circuit ouvert sont également assujetties à des exigences exhaustives en matière de tenue de registres et de vigilance à l'égard de la clientèle pour ces produits, semblables à celles établies pour l'ouverture d'un compte bancaire.
Les sociétés d'affacturage et les sociétés de financement et de crédit-bail sont assujetties à la LRPCFAT et à la supervision de CANAFE depuis le 1er avril 2025. L'élargissement de la LRPCFAT aux entreprises qui offrent exclusivement des services d'affacturage, de financement et de crédit-bail a comblé une lacune réglementaire et uniformisé les règles du jeu en matière de réglementation au Canada. Les institutions financières sous réglementation fédérale qui proposent un grand nombre de services dans ces secteurs sont déjà assujetties au cadre législatif canadien en matière de LRPC/FAT.
L'importance des entités financières canadiennes en matière de portée géographique et de connectivité internationale exige la collaboration des acteurs de la supervision au-delà des frontières. CANAFE donne la priorité à la collaboration et à la coopération efficaces avec les organismes de réglementation étrangers à travers sa stratégie de surveillance. CANAFE a conclu des protocoles d'entente avec des organismes de surveillance et de réglementation étrangers en matière de LRPC/FAT, dont plusieurs aux États-Unis. Le protocole d'entente entre CANAFE et le FinCEN, l'unité américaine du renseignement financier et de supervision en matière de LRPC/FAT, est en place depuis 2011 et permet l'échange de renseignements mutuellement bénéfiques. CANAFE a également officialisé sa coopération transfrontalière avec les autorités de surveillance bancaires américaines en septembre 2024, lorsqu'il a signé une déclaration de coopération multilatérale avec l'Office of the Comptroller of the Currency, le Board of Governors of the Federal Reserve System et la Federal Deposit Insurance Corporation. Cette déclaration permet l'échange de renseignements mutuellement avantageux liés au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes, ainsi qu'à d'autres activités financières illicites, afin de faciliter l'exercice de leurs fonctions respectives en matière de supervision des institutions financières transfrontalières.
À l'échelle nationale, les entités financières font l'objet d'une surveillance et d'un contrôle approfondis en vertu de diverses lois fédérales en plus de la LRPCFAT, notamment la Loi sur les banques, la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêt, la Loi sur les sociétés d'assurances, la Loi sur les associations coopératives de crédit, la Loi sur l'Agence de la consommation en matière financière du Canada, la Loi sur la Société d'assurance-dépôts du Canada et la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques. Toutes les entités financières exerçant des activités au Canada sont également tenues de recenser les biens assujettis à des sanctions en vertu de la Loi sur les mesures économiques spéciales, de la Loi sur les Nations Unies et de la Loi sur la justice pour les victimes de dirigeants étrangers corrompus (loi de Sergueï Magnitski). Ce vaste cadre réglementaire complète le régime fédéral de LRPC/FAT, ou dissuade les activités illégales dans l'ensemble du secteur.
Les entités financières au Canada sont supervisées par plusieurs organismes de réglementation fédéraux. Le BSIF est le surveillant prudentiel du Canada chargé de contribuer à la confiance du public dans le système financier canadien en réglementant toutes les banques canadiennes, les sociétés de fiducie et de prêt constituées en vertu d'une loi fédérale, les sociétés d'assurance, les sociétés de secours mutuels et les régimes de retraite privés. Le BSIF appuie le régime de LRCP/FAT par sa surveillance prudentielle des risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes qui pourraient nuire à la solidité financière des entités qu'il réglemente. Le BSIF a publié la ligne directrice de Gestion de la conformité à la réglementation (GCR) qui exige que les banques établissent des cadres de GCR pour garantir le respect des exigences réglementaires. Ces cadres visent à permettre aux institutions financières fédérales, comme les banques, d'appliquer une approche fondée sur le risque en vue de cerner, d'évaluer, de communiquer, de gérer et d'atténuer les risques liés à la conformité réglementaire.
L'Agence de la consommation en matière financière du Canada (ACFC) veille à l'application des dispositions visant les consommateurs de la Loi sur les banques et de la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêt, assurant ainsi le respect des mesures de protection des consommateurs. La Banque du Canada fait la promotion de la prospérité économique et financière du Canada en cultivant un système financier stable et efficace. En vertu de la Loi sur la compensation et le règlement des paiements du Canada, la Banque du Canada exerce la surveillance réglementaire des infrastructures de marché financier désignées et agit à titre d'autorité de résolution pour les infrastructures de marché financier désignées à l'échelle nationale. Le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada veille au respect de la législation sur la protection des renseignements personnels.
Les coopératives de crédit au Canada sont sous réglementation provinciale ou fédérale. Les provinces ont leur propre loi qui établit le cadre juridique pour le fonctionnement et la surveillance de ces coopératives de crédit.
Les entités financières participent à divers forums de collaboration gouvernementale à l'échelle fédérale, y compris le Comité consultatif sur le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes, dirigé par Finances Canada. Ce comité offre au gouvernement et au secteur privé une tribune pour échanger des renseignements sur les nouveaux risques, les tendances et les mesures d'atténuation en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Elles sont également bien représentées par diverses associations de l'industrie, dont l'Association des banquiers canadiens, l'Association canadienne des coopératives financières, le Forum des petites banques et l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes. Les associations de l'industrie fournissent à leurs membres des renseignements, des études et un soutien opérationnel, tout en collaborant avec les gouvernements, les organismes de réglementation et les organismes d'application de la loi pour faire connaître et combattre la criminalité financière.
Les entités financières jouent un rôle central pour dissuader les criminels et les terroristes d'exercer leurs activités dans l'économie légitime. Les banques canadiennes, en particulier, sont les plus grandes entités déclarantes de CANAFE en termes de volume, ce qui en fait des sources essentielles de renseignements dont CANAFE a besoin pour produire des renseignements financiers grâce auxquels les organismes d'application de la loi peuvent cibler, perturber et démanteler le crime organisé. Les grandes banques canadiennes ont assumé des rôles de leadership dans le cadre de partenariats public-privé où elles travaillent avec CANAFE et d'autres partenaires canadiens du régime de LRPC/FAT pour suivre l'argent afin de repérer des sujets potentiels, de découvrir des liens financiers plus larges et de produire des renseignements à l'appui des enquêtes au niveau des projets à l'échelle nationale. Ces initiatives donnent des résultats tangibles. En 2023, CANAFE a transmis plus de 450 communications de renseignements financiers exploitables aux organismes d'application de la loi dans le cadre de ses sept partenariats public-privéNote de bas de page 158.
CANAFE donne la priorité à la conformité stricte des entités financières dans le cadre de leurs activités de surveillance axées sur les risques. Les examens d'entités financières entrepris au cours de l'exercice 2023-2024 ont donné lieu aux sanctions administratives les plus lourdes jamais imposées par CANAFE à plusieurs grandes banques canadiennes pour des manquements graves à la conformité.
Les organismes canadiens d'application de la loi prennent des mesures dans les cas où des criminels exploitent des entités financières de dépôt pour commettre des crimes financiers. Notamment, la GRC et les forces de l'ordre locales donnent la priorité à la saisie des comptes bancaires des criminels impliqués dans le recyclage des produits de la criminalité.
Dans le cadre du projet OExplorer, la GRC, en collaboration avec le service de police de London et l'ASFC, a arrêté deux suspects de sexe masculin en juin 2023 pour des accusations de traite de personnes, de recyclage des produits de la criminalité et de possession de produits de la criminalité, et elle a bloqué le compte bancaire de leur entreprise et saisi des appareils électroniques et des véhicules reliés à des infractions. Les enquêteurs ont secouru 31 victimes qui étaient exploitées criminellement par les accusésNote de bas de page 159.
En 2022, dans le cadre du projet Monterey de la GRC, huit personnes au Yukon ont été accusées de recyclage des produits de la criminalité et d'infractions liées au trafic de drogues. Environ 150 000 $ ont été saisis dans les comptes bancaires de l'un des suspects à l'aide de renseignements transmis par CANAFE. De plus, plusieurs armes à feu, environ 528 grammes de cocaïne, 168 grammes de fentanyl, 388 comprimés d'hydromorphone et 1043 comprimés de benzodiazépine ont été saisis, d'une valeur marchande combinée de plus de 175 000 $Note de bas de page 160.
Des enquêtes menées par des organismes d'application de la loi ont révélé des cas de sociétés canadiennes de financement et de crédit-bail exploitées frauduleusement et utilisées pour recycler des produits de la criminalité. En 2020, une enquête menée par des organismes d'application de la loi canadiens permis de découvrir une société de financement utilisée pour commettre des fraudes et recycler des produits de la criminalité à l'échelle internationale. Dans cette affaire, les coupables ont utilisé plusieurs prête-noms en tant qu'acheteurs et associés dans le but de financer frauduleusement des véhicules et les exporter à l'international pour les revendreNote de bas de page 161.
Secteur des valeurs mobilières
Vulnérabilités au RPC/FAT du secteur des valeurs mobilières (élevées) : Le secteur des valeurs mobilières du Canada demeure important en termes de valeur et de volume des transactions, ainsi que d'actifs sous gestion. Le secteur conserve une structure complexe qui est bien intégrée aux secteurs bancaire, juridique et des cryptoactifs. Il est composé d'entreprises intégrées du secteur bancaire, d'entreprises institutionnelles et de détaillants. Selon les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM), parmi les dix plus grands courtiers en valeurs mobilières, 94 % des revenus et près de 90 % des actifs sous gestion sont attribuables à des courtiers relevant des BISN canadiennes.
Le secteur des valeurs mobilières offre une gamme de produits et de services qui peuvent être vulnérables aux utilisations abusives aux fins de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes, y compris les actifs financiers négociables, les certificats de placement et les fonds communs de placement. Bien que certains courtiers en valeurs mobilières acceptent les paiements en espèces, la plupart des transactions se font sous forme de virements télégraphiques à partir de comptes bancaires qui sont assujettis à des mesures de contrôle strictes en matière de LRPC/FAT au sein des banques.
Les courtiers en valeurs mobilièresNote de bas de page 162 servent un large éventail de clients, y compris des entités et des particuliers canadiens et étrangers. La plupart des clients conservent un compte et une relation d'affaires continue avec le courtier en valeurs mobilières. Une petite partie peut être considérée comme des clients à risque élevé, y compris les non-résidents du Canada, les clients fortunés, les PPV ainsi que les personnes exerçant des professions exposées à des vulnérabilités accrues au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes. Les clients peuvent également être des fiducies ou des sociétés pouvant disposer de structures de propriété complexes dans le but de masquer la propriété effective. Le secteur des valeurs mobilières exerce ses activités au-delà des frontières nationales et peut exercer des activités dans des administrations à risque élevé.
En plus des emplacements physiques qui favorisent les interactions en personne, des courtiers de valeurs mobilières sont également disponibles par l'intermédiaire de maisons de courtage en ligne pour les actifs financiers négociables et les cryptoactifs assujettis à la réglementation sur les valeurs mobilières. Traditionnellement, l'intégration des clients dans le secteur des valeurs mobilières exige une vérification de l'identité en personne. Cependant, la numérisation du secteur financier dans son ensemble a entraîné une augmentation de l'utilisation de l'identification à distance, permettant à certains processus de vérification de l'identité du client de se dérouler en ligne grâce à l'utilisation d'outils logiciels reconnus. La technologie a également permis aux sociétés offrant des services d'exécution d'ordres sans conseils et aux plateformes de conseil financier automatisé (robot-conseillers) de servir les clients par l'intermédiaire d'applications mobiles ou en ligne à moindres frais et avec peu ou pas d'interactions humaines. Les sociétés de courtage en ligne utilisent des méthodes d'identification qui ne se déroulent pas en personne, tout comme les courtiers traditionnels pour certains clients, mais dans tous les cas, les courtiers inscrits sont tenus de vérifier l'identité de chaque client.
Mesures prises en matière de réglementation, de surveillance et d'application de la loi
Les courtiers en valeurs mobilières sont assujettis à des mesures de contrôle réglementaire en matière de LRPC/FAT en vertu de la LRPCFAT et sous la supervision de CANAFE. Toutes les catégories de courtiers en valeurs mobilières inscrits sont tenues de respecter les mêmes exigences en matière de vérification de l'identité des clients, de vigilance à leur égard et de surveillance réglementaire.
Le secteur est également assujetti à un cadre réglementaire solide aux niveaux provincial et territorial, éclairé par des lois adoptées dans chaque province et territoire et appliquées par les organismes provinciaux et territoriaux de réglementation des valeurs mobilières, ainsi que par un organisme d'autoréglementation à l'échelle nationale. Ces cadres réglementaires ajoutent un niveau de surveillance supplémentaire au secteur, protégeant les investisseurs, renforçant la confiance de ces derniers, en maîtrisant les risques et favorisant l'existence de marchés financiers équitables, efficaces et concurrentiels. Les sociétés ou les personnes qui gèrent des placements ou proposent des conseils à ce sujet, vendent des valeurs mobilières ou négocient des dérivés au Canada doivent être inscrites auprès de l'organisme de réglementation provincial ou territorial compétent ou de son délégué, l'Organisme canadien de réglementation des investissements.
Tous les organismes de réglementation des valeurs mobilières du Canada échangent entre eux des renseignements sur les menaces liées aux valeurs mobilières aux fins d'application de la loi. Les organismes de réglementation des valeurs mobilières de la Colombie-Britannique, de l'Alberta, de l'Ontario et du Québec, ainsi que d'autres organismes de réglementation des valeurs mobilières du monde entier, sont signataires de protocoles d'entente avec l'Organisation internationale des commissions de valeurs, l'entité qui facilite la collaboration transfrontalière aux fins d'application de la réglementation sur les marchés de valeurs mobilières. Les organismes canadiens de réglementation des valeurs mobilières communiquent des renseignements sur la conformité et l'inscription à CANAFE, notamment par l'intermédiaire de protocoles d'entente. CANAFE est également tenu de communiquer des renseignements aux organismes provinciaux de réglementation des valeurs mobilières lorsqu'il a des motifs raisonnables de soupçonner que lesdits renseignements sont pertinents pour enquêter sur une infraction à la législation sur les valeurs mobilières de la province concernée ou pour poursuivre les auteurs d'une telle infraction.
Tous les organismes de réglementation des valeurs mobilières du Canada sont membres des Autorités canadiennes en valeurs mobilières, l'organisation-cadre des organismes provinciaux et territoriaux de réglementation des valeurs mobilières qui se consacre à l'amélioration, à la coordination et à l'harmonisation de la réglementation des marchés financiers canadiens. Les groupes de travail des Autorités canadiennes en valeurs mobilières se concentrent sur la lutte contre les activités frauduleuses émergentes en matière d'investissement, la sensibilisation du public à propos des auteurs de menaces à risque élevé et l'exploration de nouvelles possibilités de coopération avec les organismes fédéraux afin d'améliorer la détection, la poursuite et la dissuasion des crimes en col blanc et des infractions aux lois sur les valeurs mobilières.
Les organismes d'application de la loi, CANAFE et les organismes de réglementation des valeurs mobilières collaborent aux enquêtes criminelles et quasi criminelles. Des mesures d'application de la loi ont été prises contre des personnes qui exercent dans ce secteur.
En 2023, l'Alberta Securities Commission et l'Équipe intégrée de la police des marchés financiers de la GRC en Alberta ont souligné la contribution de CANAFE à une enquête sur un stratagème de placement frauduleux qui a entraîné une condamnation par la cour d'un résident de l'Alberta pour un chef d'accusation de fraude de plus de 5 000 $ et un chef d'accusation de recyclage des produits de la criminalité. L'individu a été reconnu coupable d'avoir escroqué des investisseurs de plus de 500 000 $ et a été condamné à 4,5 ans d'emprisonnement et à payer plus de 200 000 $ en dédommagement à sept investisseursNote de bas de page 163.
Entreprises de services monétaires
Vulnérabilités au RPC/FAT du secteur des entreprises de services monétaires (moyennes à très élevées) : Le secteur canadien des ESM est vaste et diversifié, représentant en date d'avril 2025 près de 3 000 entreprises qui offrent des services dans divers segments de marché. Il comprend des ESM multiservices de détail, les ESM à service unique de détail, les exploitants de vente en gros ou corporatifs et les SITV. D'autres sous-segments du marché des ESM, comme les entreprises d'encaissement de chèques, les services de véhicules blindés, les opérateurs de monnaie virtuelle, les fournisseurs de services de paiement et les plateformes de financement participatif, sont abordés dans d'autres sections du présent chapitre.
Bien que le secteur des ESM soit globalement vulnérable, le niveau de vulnérabilité n'est pas uniforme en raison des variations de taille et de modèles d'affaires. Deux types d'ESM sont particulièrement vulnérables. Les premières, à savoir les ESM multiservices de détail, sont les plus présentes au Canada. Ces ESM multiservices de détail proposent une gamme de produits et de services transactionnels (c.-à-d. virements télégraphiques, opérations de change et instruments monétaires) qui sont vulnérables au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes. Ces produits et services sont largement accessibles, et le profil de la clientèle comprend d'acteurs à risque élevé, y compris les PPV, la clientèle d'entreprises ou de professions vulnérables ainsi que des clients dont les activités sont exercées dans des administrations à risque élevé.
Le deuxième type d'ESM très vulnérable est celui qui utilise d'autres services de transferts de fonds, y compris les SITV, comme le hawala, le hundi et le fei'chien. Les SITV se caractérisent par le transfert de valeur (c.-à-d. l'envoi de fonds) entre des parties se trouvant dans des juridictions étrangères, sans nécessairement transférer de l'argent au-delà des frontières. Le règlement peut se faire au fil du temps en espèces, en échange ou par d'autres moyens. Les ESM s'appuyant sur les SITV ont souvent des liens géographiques ou culturels avec les banquiers correspondants et leurs clients. Les SITV desservent généralement les diasporas à l'étranger et peuvent offrir un meilleur accès à des administrations mal desservies, inaccessibles ou difficiles d'accès par les canaux bancaires officiels, fournir une transmission plus rapide des fonds, ou encore et coûter moins cher pour transmettre des fonds. Compte tenu des liens avec le secteur bancaire informel international, ces entreprises peuvent s'avérer quelque peu complexes.
L'activité des SITV est généralement parallèle au système bancaire officiel et ne dépend pas de ce dernier; cependant, les SITV utilisent souvent le système financier officiel pour absorber des fonds et régler les transactions. Bien que les SITV puissent être utilisés à des fins légitimes, comme le versement de fonds aux familles, ils peuvent également être utilisés à mauvais escient par des groupes criminels et terroristes pour le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristesNote de bas de page 164. Les modèles d'affaires des SITV peuvent être très opaques et difficiles à suivre, car le règlement des transactions se fait par l'intermédiaire de courtiers ou de contacts personnels dont les registres peuvent être inaccessibles à la consultation au Canada.
Vulnérabilités au RPC/FAT des entreprises d'encaissement de chèques (moyennes) : Les entreprises d'encaissement de chèques utilisent généralement un modèle opérationnel simple qui offre aux clients la possibilité immédiate et gratuite d'encaisser un chèque moyennant des frais. On compte environ 600 entreprises d'encaissement de chèques en activité au Canada. Bien qu'il existe des entreprises proposant uniquement l'encaissement de chèques, la plupart des entreprises du secteur proposent l'encaissement de chèques en plus d'autres services liés aux espèces, comme les prêts sur salaire et les remises d'impôt. Ce secteur n'est pas très intégré aux autres secteurs.
Les relations entre les entreprises d'encaissement de chèques et leurs clients peuvent être très transactionnelles et sans relation d'affaires continue. L'encaissement d'un chèque est habituellement effectué en personne, ce qui exige des clients qu'ils fournissent des renseignements de base pour faciliter le service. Les entreprises d'encaissement de chèques sont généralement accessibles partout au Canada, en particulier dans les régions urbaines où la demande pour de tels services est plus élevée.
Les entreprises d'encaissement de chèques ne servent généralement pas les clients exerçant des professions à haut risque. Les clients qui font appel à ces entreprises ont tendance à être sous-bancarisés et à appartenir à des populations vulnérables (c.-à-d. les nouveaux Canadiens, les travailleurs temporaires étrangers, les Canadiens à faible revenu et les personnes dont le dossier de crédit est peu solide). Ces clients peuvent présenter un profil de risque légèrement plus élevé s'ils n'ont pas accès à des pièces d'identité délivrées au Canada.
L'encaissement de chèques peut être utilisé pour soutenir la phase de dispersion du recyclage des produits de la criminalité, en particulier lorsqu'il est combiné à des activités financières entreprises avec d'autres types d'entreprises. Une fois les fonds placés, par exemple dans une banque ou un casino, un chèque peut être tiré et encaissé dans une entreprise d'encaissement de chèques. Cela permet d'accroître la distance entre les produits illicites et leur source criminelle. Divers aspects du modèle d'affaires des entreprises d'encaissement de chèques les rendent vulnérables à la fraude. Ces aspects comprennent l'accès immédiat aux fonds (ce qui rend difficile l'annulation d'une opération frauduleuse après coup), la difficulté potentielle de détecter les chèques frauduleux ou volés, la vulnérabilité à la fraude d'identité et la complexité associée à la mise en œuvre de processus de vérification des clients de haute qualité.
Vulnérabilités au RPC/FAT des plateformes de financement participatif (élevées) : Le financement participatif est une solution de collecte de fonds innovante, utilisée par des personnes du monde entier pour collecter des fonds afin de réaliser des projets, des investissements ou d'autres entreprises. Habituellement, ces campagnes sont menées conjointement avec une plateforme de financement participatif en ligne dédiée ou en lançant des appels informels par l'intermédiaire des médias sociaux. Contrairement aux méthodes traditionnelles de collecte de fonds (p. ex., prêts auprès d'institutions financières), les plateformes de financement participatif permettent aux particuliers ou aux groupes de demander des fonds directement à de membres du public connectés en ligne qui peuvent être dispersés géographiquement. En date du 1er avril 2025, plus de 120 plateformes de financement participatif sont inscrites pour exercer leurs activités au Canada en tant qu'ESM ou à titre d'ESM étrangères en vertu de la LRPCFAT.
En tant que service principalement en ligne, les services de financement participatif peuvent rapidement permettre aux utilisateurs de recueillir des fonds auprès d'un grand nombre de donateurs et souvent au-delà des frontières. Les plateformes de financement participatif ont une portée géographique étendue, y compris dans les administrations préoccupantes au titre du recyclage des produits de la criminalité ou du financement des activités terroristes, et les transactions impliquent potentiellement un niveau élevé d'anonymat. Les services de financement participatif peuvent être intégrés au secteur financier, car les banques peuvent offrir ces services directement ou détenir des fonds recueillis par le biais du financement participatif. Ce secteur est également étroitement intégré aux fournisseurs de services de paiement afin de permettre l'exécution des paiements nécessaires à un projet de financement participatif.
Le rapport de 2023 du GAFI, intitulé Financement participatif pour le financement du terrorisme, note quatre typologies principales dans l'utilisation des plateformes de financement participatif à des fins de financement du terrorismeNote de bas de page 165. Ces typologies sont l'exploitation abusive des causes humanitaires, des organismes de bienfaisance ou des organismes à but non lucratif, l'utilisation de plateformes ou de sites Web dédiés au financement participatif qui s'adressent à des personnes qui ont été bannies des plateformes grand public, l'utilisation de médias sociaux et d'applications de messagerie pour amplifier et générer un élan pour les causes, et l'interaction du financement participatif avec les options de financement en cryptomonnaie qui peuvent renforcer l'anonymat. Le GAFI désigne le financement participatif fondé sur des dons comme étant le plus susceptible d'être exploité à des fins de financement du terrorisme ou de l'extrémisme violent.
Vulnérabilités au RPC/FAT des fournisseurs de services de paiement (élevées) : Le terme « fournisseur de services de paiement » désigne un groupe diversifié de personnes ou d'entités qui exécutent diverses fonctions de paiement à titre de service ou d'activité commerciale. Les fonctions de paiement comprennent la fourniture et la tenue d'un compte de paiement, la détention de fonds, l'amorce de paiements, l'autorisation et la transmission de paiements, et la compensation et le règlement. En date du 1er avril 2025, environ 1 000 fournisseurs de services de paiement sont autorisés à exercer leurs activités au Canada en tant qu'ESM ou à titre d'ESM étrangères en vertu de la LRPCFAT.
Les fournisseurs de services de paiement peuvent aider les commerçants à accepter les paiements des clients en les connectant à des réseaux de paiement afin d'autoriser, de compenser et de régler les transactions. Ils peuvent également fournir la technologie, le matériel et les services permettant à un commerçant d'accepter divers modes de paiement, notamment les cartes de crédit, les cartes de débit, les portefeuilles électroniques numériques et les virements de banque à banque. Les fournisseurs de services de paiement comprennent également les entreprises qui fournissent des services de paiement de factures lorsqu'ils agissent à titre d'intermédiaire entre un payeur et un bénéficiaire pour effectuer des paiements liés à des factures, comme celles relatives aux services publics, à la paie, aux commissions, aux prêts hypothécaires, aux loyers et aux frais de scolarité.
Les typologies de recyclage des produits de la criminalité associées aux fournisseurs de services de paiement comprennent le mélange de fonds, le schtroumpfage, la fraude sur facture et l'utilisation de comptes à l'étranger pour cacher les bénéficiaires effectifs. L'utilisation abusive des fournisseurs de services de paiement est similaire à d'autres méthodes de dispersion et peut inclure le recours à des sociétés-écrans, qui utilisent des entreprises légitimes pour couvrir des activités criminelles, et des sociétés intermédiaires, qui fournissent aux criminels l'accès aux comptes de traitement des paiements d'une entreprise légitime pour traiter les paiements par carte de crédit. Les fournisseurs de services de paiement sont également connus pour être vulnérables à l'utilisation de comptes canalisateurs, qui acceptent des frais de carte de crédit de plusieurs entreprises qui ne possèdent pas leur propre compte de paiement de commerçant. Selon cette typologie, la société canalisatrice saisit les paiements comme des transactions légitimes dans le système de traitement des paiements par carte.
Les fournisseurs de services de paiement peuvent être utilisés pour effectuer des paiements et transférer des fonds au pays et à l'étranger, et à ce titre, ils ont le potentiel d'atteindre des administrations à risque élevé.
Vulnérabilités au RPC/FAT des guichets automatiques privés à étiquette blanche (moyennes) : Les guichets automatiques privés à étiquette blanche (GAPEB) sont des guichets automatiques qui ne sont pas la propriété d'une banque ou d'une coopérative de crédit et se connectent aux réseaux de paiement par l'intermédiaire de sociétés intermédiaires appelées « acquéreurs ». Sur les quelque 70 000 guichets automatiques au Canada, environ 50 000 sont des GAPEB. Ces guichets sont souvent situés dans des endroits très achalandés, comme des bars, des dépanneurs et des restaurants. À l'exception de ceux exploités dans la province de Québec, il n'y a aucune restriction quant aux personnes qui peuvent posséder ou exploiter un GAPEB. Le modèle d'affaires du secteur est relativement complexe, et comprend des intermédiaires de réseaux de paiement, des vendeurs de guichets automatiques, des propriétaires/exploitants de GAPEB et des utilisateurs finaux. Il est intégré au secteur financier, aux fournisseurs de réseaux de paiement et aux services de véhicules blindés.
Bien que les GAPEB ne puissent être utilisés que pour des retraits d'argent, la vulnérabilité critique que représente ce secteur tient dans leur capacité à être possédés, exploités ou contrôlés par des criminels, qui peuvent charger les GAPEB avec de grandes quantités de produits illicites. Au fur et à mesure que les utilisateurs du GAPEB en retirent des produits criminels, le propriétaire de celui-ci reçoit de l'argent « propre » des institutions financières par l'intermédiaire de transactions réglées électroniquement. De plus, étant donné que les GAPEB sont situés dans des endroits moins surveillés, les criminels peuvent être enclins à les utiliser pour retirer des fonds à l'aide de cartes de paiement volées.
Vulnérabilités au RPC/FAT des entreprises de véhicules blindés (élevées) : Les services des entreprises de véhicules blindés sont principalement utilisés par les institutions financières et les entreprises pour transporter en toute sécurité des espèces, des instruments monétaires et des marchandises de valeur. En avril 2025, il y avait environ 20 entreprises de véhicules blindés actives au Canada, les plus grands joueurs ayant une présence mondiale. Le secteur est fortement intégré à d'autres secteurs vulnérables au blanchiment d'argent et au financement du terrorisme, notamment les institutions financières, les négociants en métaux précieux et pierres précieuses (NMPPP), les ESM et les entreprises à forte intensité de liquidités. De plus, l'empreinte géographique de quelques entreprises de véhicules blindés est vaste.
L'ampleur des opérations du secteur des véhicules blindés et le fort volume de transactions en espèce effectuées par leurs entreprises clientes leur permettent de jouer un rôle, sciemment ou non, pour obscurcir l'origine des fonds. Par exemple, les services de logistique et de gestion de trésorerie proposés par les entreprises de véhicules blindés peuvent comprendre la collecte de fonds qui sont ensuite regroupés dans un compte de société centralisé, puis transférés vers les comptes des clients. Les entreprises de véhicules blindés peuvent également être utilisées comme solution d'entreposage sécurisé pour l'argent liquide et d'autres objets de valeur en dehors du secteur bancaire officiel. Cela peut rendre difficile le rapprochement des fonds gérés par ces entreprises et la détermination de leur source. Ces caractéristiques rendent également les entreprises de véhicules blindés particulièrement attrayantes pour les GCO et les criminels qui contrôlent des entreprises à forte intensité de liquidités ou souhaitent y avoir recours comme moyen de recyclage des produits de la criminalité.
Bien que les mouvements d'argent entre les institutions financières soient moins préoccupants, une partie importante du profil de la clientèle des entreprises de véhicules blindés comprend une combinaison de relations d'affaires transactionnelles et tierces. Les entreprises de ce secteur transportent les fonds d'entreprises à fort volume de transactions en espèces, remplissent et réapprovisionnent les GAPEB, transportent des devises et des instruments monétaires pour le compte de négociants en métaux précieux et pierres précieuses (NMPPP) et d'ESM et effectuent d'autres opérations avec un éventail de donneurs d'ordre et de destinataires, comme des comptes d'institutions financières, ou des entreprises privées.
Mesures prises en matière de réglementation, de surveillance et d'application de la loi
Les ESM sont assujetties à des mesures de contrôle réglementaire en matière de LRPC/FAT en vertu de la LRPCFAT et sous la supervision de CANAFE. La portée des activités des ESM en vertu de la LRPCFAT s'est élargie au cours des dernières années. Cet élargissement comprend l'ajout au régime des opérateurs de monnaie virtuelle et des ESM étrangères en 2020, des plateformes de financement participatif et des fournisseurs de services de paiement en 2022, du secteur des véhicules blindés en 2024 et des entreprises d'encaissement de chèques en avril 2025. Les acquéreurs de GAPEB seront également réglementés en tant qu'ESM à compter du 1er octobre 2025.
Toutes les ESM doivent s'inscrire auprès de CANAFE. Environ 3 000 ESM étaient inscrites au 1er avril 2025. Les personnes reconnues coupables de certaines infractions à la LRPCFAT, à la Loi réglementant certaines drogues et autres substances ou au Code criminel ne sont pas admissibles à une telle inscription. Au cours des dernières années, le gouvernement a mis en place diverses mesures supplémentaires pour prévenir l'utilisation des ESM à des fins criminelles. Une nouvelle infraction criminelle pour l'exploitation d'une ESM non enregistrée est entrée en vigueur en 2024. Les ESM canadiennes et leurs agents seront également assujettis aux exigences de vérification du casier judiciaire à compter d'octobre 2025.
Certaines ESM au Canada sont également assujetties à la Loi sur les activités associées aux paiements de détail (LAAPD) qui établit un cadre fédéral de surveillance pour les fournisseurs de services de paiement dont l'application est assurée par la Banque du Canada. La LAAPD s'applique à toute entreprise au Canada qui exécute une ou plusieurs des cinq fonctions de paiement définies dans la Loi comme un service qui n'est pas accessoire à un autre service ou à une autre activité commerciale liés au paiement. Note de bas de page 166 Le régime de la LAAPD a été lancé en novembre 2024. Les fournisseurs de services de paiement ont alors dû présenter leur demande d'inscription à la Banque du Canada. Le régime sera entièrement mis en œuvre lorsque les exigences de fond concernant la protection des fonds et la gestion des risques opérationnels entreront en vigueur en septembre 2025.
Le secteur des ESM est couvert par des lois provinciales du Québec et de la Colombie-Britannique, bien que l'étendue de la couverture des services monétaires diffère d'une administration à l'autre. Au Québec, la Loi sur les entreprises de services monétaires s'applique aux GAPEB et à l'encaissement de chèques. Note de bas de page 167 La responsabilité de l'administration de la Loi sur les entreprises de services monétaires a été transférée de l'Autorité des marchés financiers à Revenu Québec en 2021Note de bas de page 168.
Le gouvernement de la Colombie-Britannique a annoncé en mars 2023 que les ESM actives dans la province seraient soumises à la surveillance de la Financial Services Authority de la Colombie-Britannique. Pour ce travail, le cadre réglementaire est décrit dans la Money Services Business Act, qui a reçu la sanction royale en 2023Note de bas de page 169. Des règlements sont en cours d'élaboration pour mettre en œuvre la nouvelle loi.
Les services de base des ESM (c.-à-d. les opérations de change, les remises ou les transferts de fonds, l'émission d'instruments négociables) sont réglementés en vertu de la LRPCFAT depuis 2008. Ces sous-secteurs des ESM sont donc assujettis à un cadre réglementaire « mature » de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, et les participants de l'industrie sont censés parfaitement comprendre leurs obligations réglementaires. Cependant, cette même attente pourrait ne pas s'appliquer aux sous-secteurs « plus récents » des ESM, y compris les opérateurs de monnaie virtuelle, les plateformes de financement participatif, les fournisseurs de services de paiement, le secteur des véhicules blindés et les entreprises d'encaissement de chèques.
Les membres du secteur des ESM affichent des niveaux variables de conformité avec la LRPCFAT lorsqu'ils sont évalués par CANAFE. Les principales lacunes en matière de conformité sont celles que l'on retrouve dans les politiques et les procédures du programme de conformité, les défauts de mise à jour ou de fourniture de renseignements exacts sur l'inscription et, chez les petites ESM, la non-déclaration. Lorsque les déclarations des ESM sont évaluées, des lacunes sont souvent relevées en matière de qualité et de calendrier.
Les renseignements relatifs aux niveaux de conformité en matière de LRPC/FAT des secteurs du financement participatif et des véhicules blindés en tant que sous-secteurs des ESM sont limités, car le règlement n'est entré en vigueur que récemment. Les activités de surveillance actuelles de CANAFE associées à ces secteurs nouvellement réglementés sont axées sur la sensibilisation et la promotion d'une conformité rigoureuse.
Le secteur des ESM participe à divers forums de collaboration et est représenté par l'Association canadienne des entreprises de services monétaires au Comité consultatif sur le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes, dirigé par Finances Canada. Ce comité offre au gouvernement et au secteur privé une tribune pour échanger des renseignements sur les nouveaux risques, les tendances et les mesures d'atténuation en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. La collaboration régulière entre CANAFE et le secteur des ESM a favorisé une compréhension mutuelle des risques émergents et des attentes en matière de conformité. Grâce à des webinaires, des conférences et des documents pédagogiques, les efforts de mobilisation de CANAFE et de l'industrie ont permis de renforcer l'approche du secteur en matière de gestion des risques, fournissant aux entreprises les connaissances et les outils nécessaires pour renforcer leurs capacités en matière de conformité et soulignant l'importance d'un régime de conformité efficace.
Les organismes responsables de l'application de la loi ont pris diverses mesures pour contrer les risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes posés par le secteur des ESM. En 2023, les organismes canadiens d'application de la loi ont souligné la contribution de CANAFE à une enquête ayant mené à des accusations prévues par la LRPCFAT contre deux personnes pour avoir exploité une entreprise de services monétaires non inscrite. Les deux personnes ont effectué des opérations monétaires illégales pour un montant total de plus de 20 millions de dollars en utilisant un stratagème de collecte et de transfert clandestin de fonds du Canada vers l'étrangerNote de bas de page 170.
De plus, le secteur des ESM a été désigné comme un sous-groupe prioritaire de la criminalité financière dans le plan stratégique 2021-22 de l'Alliance de lutte contre le financement illicite de la Colombie-Britannique (ACFI-BC) de la GRC. Le sous-groupe de la criminalité financière liée aux ESM s'adresse aux entités non bancaires qui proposent des services au public, notamment des opérations de change, des transferts d'argent, l'émission ou le rachat de mandats, des chèques de voyage (ou d'autres instruments négociables similaires) et des opérations en cryptoactifsNote de bas de page 171.
Cryptoactifs
Vulnérabilités au RPC/FAT des cryptoactifs (très élevées) : Le secteur des cryptoactifs est important, connaît un grand volume de transactions et représentait une capitalisation boursière mondiale de 3,26 billions de dollars américains au 31 décembre 2024Note de bas de page 172. Il existe une large gamme de cryptoactifs, dont beaucoup utilisent des modèles d'affaires complexes impliquant un éventail de participants, notamment les plateformes d'échange de monnaies virtuelles, les plateformes d'échange de cryptoactifs par permutation, les plateformes d'échanges de FiDé et les fournisseurs de portefeuilles.
Les entreprises qui fournissent des services d'échange ou de transfert de monnaies virtuelles sont réglementées à titre d'opérateurs de monnaie virtuelle, un sous-secteur des ESM, en vertu de la LRPCFAT. Environ 1 300 opérateurs de monnaies virtuelles sont actuellement inscrits auprès de CANAFE. Les services, modèles d'affaires et mode de prestation de ce secteur continuent d'évoluer rapidement, et il est intégré aux secteurs financiers canadien et international.
Certains fournisseurs de services de cryptoactifs ont une relation transactionnelle avec leurs clients qui peuvent bénéficier d'un niveau d'anonymat relativement élevé, les transactions étant principalement effectuées dans sans aucune interaction en personne. Les cryptoactifs ont une portée et une accessibilité mondiales, ce qui permet des transferts transfrontaliers rapides et une exposition à des clients nationaux et étrangers à haut risque, ainsi qu'à des administrations à haut risque.
Le secteur propose plusieurs produits et services vulnérables, notamment des cryptoactifs, des plateformes de FiDé, des premières émissions de jetons, des transferts de pair à pair et des mélangeurs ou mixeurs, à savoir des services en ligne qui augmentent l'anonymat et la confidentialité des utilisateurs de cryptoactifs. Les cryptoactifs convertibles restent les plus vulnérables, en grande partie parce qu'elles sont généralement axées sur des pseudonymes, en plus d'être très accessibles et transférables.
Les cryptoactifs sont achetés et vendus par l'intermédiaire de plateformes d'échange en ligne, de guichets automatiques de cryptomonnaies ou de plateformes de pair à pair. Dans son avis sectoriel de 2024, Le rôle des guichets automatiques de monnaie virtuelle dans le blanchiment des produits de la criminalité, CANAFE a évalué que les guichets automatiques de cryptomonnaies deviennent un outil clé du recyclage des produits de la criminalité, à l'étape du placement, car ils peuvent convertir de la monnaie fiduciaire en cryptomonnaie, ou vice versa. La facilité, l'accessibilité et le caractère quasi anonyme des guichets automatiques de cryptomonnaies rendent ceux-ci susceptibles d'être utilisés de manière malveillante par des criminels.
La compréhension et l'utilisation des cryptomonnaies comme outil pour les groupes terroristes et extrémistes violents en vue de recueillir et de transférer des fonds se sont accrues au cours des cinq dernières années. On a observé que des terroristes et des criminels utilisaient des cryptomonnaies pour obtenir des produits de la criminalité (p. ex., en exigeant que les paiements liés à des fraudes ou à des attaques par rançongiciel soient effectués en cryptomonnaies) ou pour éloigner les produits de leur source criminelle.
Alors que le Bitcoin a toujours figuré en bonne place dans les déclarations d'opérations douteuses, Tether (USDT) dépasse désormais le Bitcoin en tant que cryptomonnaie de choix, en particulier pour Daech et ses affiliés. Dans l'ensemble, cependant, les preuves continuent d'indiquer que les cryptomonnaies n'ont pas remplacé la préférence des groupes terroristes pour l'utilisation de produits et services financiers traditionnels comme les ESM et les SITV ni leur dépendance à l'égard des passeurs de fonds. Cette préférence est probablement due en partie à la volatilité des prix de nombreuses cryptomonnaies, à la capacité limitée d'acheter des biens et des services avec ces cryptomonnaies et au manque d'infrastructure nécessaire pour échanger des cryptomonnaies contre de la monnaie fiduciaire dans certaines des administrations où opèrent les groupes terroristesNote de bas de page 173.
Mesures prises en matière de réglementation, de surveillance et d'application de la loi
Les entreprises qui proposent des services d'échange ou de transfert de monnaie virtuelle aux Canadiens sont assujetties à des contrôles réglementaires en vertu de la LRPCFAT, y compris l'obligation de s'inscrire à titre d'ESM auprès de CANAFE. Cela s'applique aux entreprises qui exercent leurs activités au Canada et à l'étranger, dans la mesure où elles fournissent des services aux Canadiens. En avril 2025, environ 1 300 ESM de cryptomonnaies étaient inscrites auprès de CANAFE.
De plus, toutes les entreprises et professions réglementées en vertu de la LRPCFAT doivent soumettre une déclaration d'opérations importantes en cryptomonnaie à CANAFE lorsqu'elles reçoivent des fonds en cryptomonnaie d'un montant équivalent à 10 000 $ ou plus dans le cadre d'une seule opération ou de plusieurs opérations effectuées dans une période de 24 heures par la même personne ou entité.
CANAFE comprend bien les cryptomonnaies et les cryptoactifs et surveille activement les risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes dans ce secteur afin de mieux comprendre ce paysage en évolution rapide. En 2021, CANAFE a publié des lignes directrices sur les indicateurs de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes liés aux opérations en cryptomonnaies afin de mieux sensibiliser les entités déclarantesNote de bas de page 174. CANAFE a également publié des renseignements stratégiques pour aider les entreprises, les institutions financières et le public à comprendre et à reconnaître les caractéristiques des activités illégales impliquant des guichets automatiques de cryptomonnaies ainsi que les types de personnes et d'entités pouvant être impliquésNote de bas de page 175.
CANAFE a pris des mesures d'application de la loi contre un opérateur de cryptomonnaies étranger non inscrit qui avait contrevenu à ses obligations réglementaires au titre de la LRPCFAT en tant qu'ESM étrangère. En mai 2024, CANAFE a imposé sa plus lourde sanction administrative pécuniaire jamais infligée à une ESM (6 millions de dollars) à un opérateur de cryptomonnaies pour défaut d'inscription auprès de CANAFE à titre d'ESM étrangère et pour avoir omis de soumettre des déclarations d'opérations importantes en cryptomonnaies. L'opérateur a interjeté appel de la décision devant la Cour fédéraleNote de bas de page 176. Cette dernière infraction a été découverte par CANAFE à l'aide d'analyses de la chaîne de blocs, ce qui met en évidence la sophistication technologique croissante à laquelle fait appel CANAFE pour surveiller les opérateurs de cryptomonnaies.
Certaines plateformes de négociation de cryptoactifs, inscrites à titre d'opérateurs, sont également assujetties aux lois provinciales sur les valeurs mobilières si elles facilitent la négociation de cryptoactifs qui sont des valeurs mobilières ou des dérivés. Ces entreprises sont tenues de se conformer aux lois sur les valeurs mobilières des provinces et des territoires dans lesquels elles offrent des services et sont assujetties à la surveillance de l'organisme de réglementation des valeurs mobilières provincial ou territorial compétent. Bien que de nombreuses plateformes de négociation de cryptoactifs soient toujours inscrites à titre de courtiers restreints, ces acteurs sont censés devenir des courtiers en valeurs mobilières et des membres de l'Organisme canadien de réglementation des investissements, un organisme d'autoréglementation qui exerce des responsabilités réglementaires en vertu d'ordonnances de reconnaissance délivrées par les commissions provinciales des valeurs mobilières.
Les organismes responsables de l'application de la loi ont pris diverses mesures pour lutter contre les risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes posés par les cryptoactifs, notamment en donnant la priorité aux enquêtes sur les crimes liés aux cryptoactifs et à la confiscation des avoirs en cryptoactifs. Par exemple, entre le 1er janvier et le 31 juillet 2024, la GRC de la Saskatchewan a enquêté sur 116 dossiers impliquant une fraude par cryptomonnaie et, au total, les victimes ont signalé plus de 3,4 millions de dollars en pertes liées à la fraude par cryptomonnaieNote de bas de page 177.
En juin 2023, la Division D de la GRC a achevé un démantèlement dans le cadre du projet Decrypt, une enquête sur le trafic de drogues et le recyclage des produits de la criminalité. L'enquête a été ouverte sur la base d'une déclaration de renseignements transmis volontairement de CANAFE provenant d'un opérateur de cryptomonnaies et a donné lieu à la mise en accusation de cinq personnes et à des saisies d'actifs pour une valeur de plus de 3 millions de dollars, comprenant la saisie de cryptomonnaiesNote de bas de page 178.
Sociétés et autres personnes morales et constructions juridiques
Cette section traite des vulnérabilités en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes posées par les personnes morales et les constructions juridiques, y compris les sociétés, les sociétés de personnes et les fiducies expresses, ainsi que le secteur des services aux entreprises qui joue un rôle dans les services de constitution et de gestion pour les sociétés.
Vulnérabilités au RPC/FAT des sociétés (très élevées) : Le secteur canadien des sociétés est vaste et complexe. Selon Corporations Canada, on compte environ 4 millions de sociétés canadiennes en activité au pays. Sur ce nombre, environ 15 % sont constituées en vertu d'une loi fédérale, les autres étant constituées en vertu d'une loi provinciale ou territoriale. Bien que la grande majorité des entreprises contribuent positivement à la société, certaines caractéristiques des entreprises peuvent les rendre vulnérables aux abus pour perpétrer des activités criminelles, comme le recyclage des produits de la criminalité et l'évasion fiscale.
Au Canada, les sociétés peuvent être constituées rapidement, à moindre coût et à distance, avec ou sans l'aide d'intermédiaires professionnels. Bien qu'elles soient tenues d'avoir un bureau enregistré dans une province ou un territoire canadien, les sociétés canadiennes peuvent être constituées à partir de n'importe où dans le monde et faire des affaires à l'échelle mondiale, y compris avec des personnes et des entités exerçant leurs activités dans des juridictions présentant des risques élevés de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes ou encore des juridictions réputées pour leur opacité financière.
Il existe des restrictions limitées pour les Canadiens non-résidents qui détiennent des actions de sociétés canadiennes ou qui dirigent des sociétés canadiennes à titre d'administrateurs, sous réserve de certaines exceptions, comme les exigences de résidence au Canada applicables aux administrateurs de sociétés fédérales, les exigences de propriété et de contrôle canadiens pour exercer des activités dans des secteurs d'activité particuliers au Canada, et toute restriction à l'investissement étranger administrée en vertu des dispositions de la Loi sur Investissement Canada.
Tant au Canada qu'à l'étranger, les sociétés sont très vulnérables à la criminalité financière, car elles peuvent être structurées de manière à masquer leur propriété effective et servir au transfert, à la dissimulation ou à la conversion de produits illicites. Leur vulnérabilité au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes varie selon la structure de l'entreprise.
Les sociétés privées sont le type de personne morale le plus courant au Canada. Leurs actions sont généralement détenues par un seul ou un nombre limité d'investisseurs non publics (p. ex., initiés, membres de la famille, amis proches et associés) et sont assujetties à des restrictions en matière de transfert. Les sociétés privées sont tenues de déposer des rapports annuels auprès des autorités régissant les sociétés et sont assujetties à certaines exigences en matière de divulgation de renseignements financiers et à d'autres mesures de contrôle en vertu des lois canadiennes sur les sociétés.
Néanmoins, elles ne sont pas soumises au même niveau d'examen réglementaire que les sociétés publiques. Par conséquent, parmi toutes les structures de sociétés existant au Canada, ce sont les sociétés privées qui sont considérées comme celles présentant les risques les plus élevés en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes.
Les sociétés fictives n'ont pas d'activités importantes, d'actifs ou de bureau physique. Bien qu'elles puissent servir à des fins légitimes, leur utilisation à mauvais escient peut s'avérer attrayante pour les criminels financiers, car elles peuvent servir à dissimuler leur propriété effective, en particulier quand les propriétaires étrangers sont répartis entre différentes administrations.
Les sociétés en veilleuse n'ont aucune activité, et présentent des actionnaires, des administrateurs et des secrétaires inactifs. Elles peuvent rester inactives pendant un certain temps, puis être vendues à d'autres pour servir d'instruments pour canaliser des fonds, exploiter des affaires ou conclure certaines transactions. Elles peuvent servir à des fins légitimes, mais elles peuvent aussi être utilisées à mauvais escient par des criminels financiers qui cherchent à donner l'impression que la société est réputée et qu'elle a une histoire d'entreprise établie.
Pour faire des affaires au Canada, les sociétés étrangères constituées à l'étranger doivent enregistrer un bureau ou une succursale dans une province canadienne ou un territoire canadien. Elles sont en outre assujetties, entre autres, aux lois canadiennes sur la fiscalité et l'emploi. Toutefois, à moins d'être inscrites et cotées à une bourse désignée, au sens de la Loi de l'impôt sur le revenu fédérale et sous réserve des exigences réglementaires en matière de divulgation, les sociétés étrangères qui exercent des activités au Canada peuvent présenter des vulnérabilités uniques en raison de l'opacité et de la complexité des structures transfrontalières. Si elles sont constituées dans un pays où la surveillance réglementaire est faible ou qui présentent des lois permissives en matière de secret des entreprises, cela peut masquer les renseignements sur la propriété effective. Les sociétés étrangères offrent également aux acteurs étrangers un accès au système financier canadien et peuvent effectuer des transactions internationales fréquentes et de grande valeur. Ces facteurs les rendent très vulnérables à la criminalité financière.
Qu'elles soient constituées au Canada ou à l'étranger, les sociétés fictives et les sociétés en veilleuse sont des formes de sociétés privées qui présentent des risques très élevés de recyclage des produits de la criminalité. Elles peuvent être utilisées pour dissimuler la propriété effective, la nature des transactions illicites et rendre les enquêtes plus difficiles, ce qui en fait des outils courants pour le recyclage des produits de la criminalité et d'autres crimes financiers. Les vulnérabilités au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes sont accrues si ces sociétés sont constituées dans des paradis fiscaux ou des juridictions favorisant l'opacité financière.
En revanche, les sociétés publiques sont moins vulnérables au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes, car elles sont soumises à des contraintes juridiques strictes en vertu des lois des provinces et des territoires sur les valeurs mobilières et des règles boursières, lesquelles sont conçues pour assurer la transparence, la reddition de comptes et la protection des investisseurs et du public.
Les vulnérabilités des coopératives et des chambres de commerce en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes sont faibles en raison de leur structure de propriété, de leur gouvernance et de leurs objectifs. Les vulnérabilités au recyclage des produits de la criminalité d'autres types de sociétés à but non lucratifNote de bas de page 179 varient selon qu'elles sont organisées et exploitées exclusivement à des fins autres lucratives, ou si elles peuvent générer des profits, sous réserve des restrictions quant à leur distribution, et se livrer à certaines activités commerciales limitées à l'appui de leur objet. Cependant, certaines sociétés à but non lucratif peuvent être particulièrement vulnérables au financement des activités terroristes, comme l'explique la section « Secteur à but non lucratif » du présent chapitre.
Vulnérabilités au RPC/FAT des sociétés de personnes (moyennes) : Avec environ 40 000 sociétés de personnes en activité, ces entreprises sont beaucoup moins répandues que les sociétés au Canada. Cela s'explique principalement par le fait que les associés peuvent être exposés au passif d'une société de personnes, selon son type. Les sociétés de personnes sont généralement formées par la conclusion d'un contrat de société de personnes entre les associés. Ces sociétés de personnes sont flexibles et faciles à intégrer dans plusieurs secteurs de l'économie, y compris les secteurs financier et juridique.
Au Canada, tant en common law qu'en droit civil, les sociétés de personnes ne constituent généralement pas des personnes morales distinctes. Il existe trois principaux types de sociétés de personnes au pays : les sociétés en nom collectif (où les associés conviennent de partager les profits ou les pertes de la société de personnes et sont généralement solidairement responsables de ses dettes); les sociétés en commandite (où les commandités sont généralement solidairement responsables des dettes de la société, et que la responsabilité des commanditaires ou des associés commanditaires se limite à leurs apports en capital ou en actions ordinaires de la société de personnes); et les sociétés à responsabilité limitée (où les associés ne sont généralement pas responsables des dettes, du passif ou des obligations de la société de personnes). Selon l'ARC, les sociétés en commandite sont le type de société de personnes le plus courant au Canada. Pour exercer une activité au Canada, les sociétés de personnes doivent généralement s'enregistrer auprès du registraire provincial ou territorial concerné.
Les vulnérabilités des sociétés de personnes en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes varient selon leurs caractéristiques. Les sociétés en nom collectif peuvent s'avérer moins attrayantes pour les criminels financiers en raison de la responsabilité solidaire et individuelle des associés. Cela dit, quel que soit son type, la vulnérabilité d'une société de personnes est accrue si elle est structurée de manière à dissimuler sa propriété effective, surtout lorsqu'un ou plusieurs des associés sont des personnes morales ou d'autres constructions juridiques, que les criminels peuvent exploiter pour masquer leur identité et leurs produits de la criminalité. Des contrats de société de personnes plus complexes peuvent impliquer le recours à des intermédiaires professionnels pour des services consultatifs, ce qui ouvre la possibilité que ces professionnels soient utilisés, volontairement ou non, pour participer à la création d'une structure opaque à des fins illicites. Il existe une exposition potentielle à des juridictions à risque élevé, car les sociétés de personnes canadiennes peuvent exercer leurs activités à l'étranger et les associés de telles sociétés peuvent être étrangers. Les sociétés de personnes étrangères provenant de pays réputés pour leur opacité financière et qui s'inscrivent pour exercer leurs activités au Canada peuvent présenter un risque élevé.
Toutefois, les sociétés de personnes publiques ainsi que les sociétés en commandite dont le commandité est un courtier en valeurs mobilières assujetti à des obligations particulières en matière de LRPC/FAT au titre de la LRPCFAT ou une filiale d'une société publique présentent de faibles vulnérabilités en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes, car la société de personnes, le commandité ou la société mère (selon le cas) sont assujettis à une surveillance réglementaire.
De plus, les vulnérabilités au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes des sociétés à responsabilité limitée constituées au Canada, qui sont généralement permises pour certaines catégories de professionnels réglementés, sont relativement plus faibles, bien qu'elles puissent varier selon l'industrie (p. ex., compte tenu des considérations abordées dans la section « Secteur juridique » ci-dessous, les cabinets d'avocats qui exercent leurs activités en tant que sociétés à responsabilité limitée sont exposés à des risques de recyclage des produits de la criminalité plus élevés que les sociétés à responsabilité limitée composées d'autres professionnels réglementés, en raison des types d'activités auxquelles participent les professionnels du droit).
Il existe également moins de preuves empiriques que les sociétés de personnes sont utilisées pour le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes par rapport aux sociétés.
Vulnérabilités au RPC/FAT des fiducies expresses (très élevées) : Une fiducie est un arrangement juridique dans le cadre duquel une personne – le constituant ou le testateur – transfère des biens à un fiduciaire pour qu'ils soient détenus en fiducie au profit d'un ou de plusieurs bénéficiaires. Le terme « fiducie expresse » désigne une fiducie où le constituant ou le testateur a intentionnellement créé la fiducie (p. ex., par contrat ou testament), par opposition aux fiducies découlant de l'effet de la loi ou, dans certains cas, d'un jugement. La fiducie expresse est un arrangement juridique fréquemment utilisé au Canada à diverses fins. On comptait plus de 1,5 million de fiducies enregistrées auprès de l'ARC en 2022.
Constituant désigne une personne qui a créé une fiducie de son vivant (c.-à-d. une fiducie entre vifs).
Testateur désigne une personne qui a créé une fiducie par testament.
Les fiducies express sont fréquemment utilisées dans le domaine de la fiscalité, de la planification successorale et de l'investissement et sont donc fortement intégrées au secteur des services financiers. Elles sont principalement établies par l'intermédiaire de sociétés de fiducie, d'avocats et de comptables ou avec l'aide de ces acteurs.
La vulnérabilité critique de la fiducie expresse est qu'elle sépare le contrôle des actifs détenus dans la fiducie de la propriété effective. Le niveau de complexité de l'arrangement, qui peut inclure des personnes morales ou d'autres arrangements juridiques à titre de fiduciaires ou de bénéficiaires, peut rendre difficile l'identification des parties à la construction juridique et de leurs intérêts de propriété ou de contrôle dans les actifs de la fiducie. Les fiducies peuvent également être structurées de manière à ce que les actifs détenus en fiducie soient situés à l'extérieur du Canada, ce qui peut rendre difficile, pour les autorités, la saisie ou le gel des actifs de la fiducie selon les lois de l'administration où se trouvent les actifs. La complexité des divers accords de fiducie a des conséquences sur leur vulnérabilité au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes. Les fiducies express ont une portée mondiale, ce qui peut les exposer à des juridictions à risque élevé. Les Canadiens peuvent constituer des fiducies en vertu de la loi canadienne au Canada ou à l'étranger, en utilisant des fiduciaires établis au Canada ou à l'étranger, et les non-résidents peuvent faire de même au Canada.
Les fiducies canadiennes et les fiducies étrangères ayant un bénéficiaire, un constituant, un fiduciaire ou des biens canadiens peuvent être vulnérables au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes, selon leur type, leur objet, leur structure et d'autres caractéristiques. Vous trouverez ci-dessous un aperçu des risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes des divers types de fiducies au Canada.
Les fiduciesdiscrétionnaires sont des fiducies en vertu desquelles le fiduciaire a le pouvoir de décider comment distribuer le revenu de la fiducie, le capital de la fiducie ou les deux à une catégorie de bénéficiaires. Les fiducies discrétionnaires présentent un risque élevé d'utilisation abusive à des fins de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes, comparativement aux fiducies où la participation de chaque bénéficiaire est établie. Les fiducies de protection d'actifs, qui utilisent un mécanisme pour protéger les actifs des fiducies contre les créanciers, sont très vulnérables. Ces vulnérabilités sont accrues dans le cas des fiducies de protection d'actifs à l'étranger, constituées dans des juridictions qui ont adopté des lois permettant l'opacité, des délais de prescription courts ou des clauses de « fuite » ou de « transfert » autorisant la modification des fiduciaires, des lois applicables à la fiducie ou encore le retrait des actifs ou leur transfert vers une nouvelle juridiction.
En revanche, les fiducies d'intérêt public sont peu vulnérables au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes, car elles sont assujetties à la réglementation des valeurs mobilières ou aux règles boursières. Au Canada, les opérations relatives aux fiducies d'intérêt public sont généralement effectuées par des intermédiaires tels que les courtiers en valeurs mobilières, qui sont indépendamment assujettis à des obligations particulières en matière de LRPC/FAT en vertu de la LRPCFAT.
Les vulnérabilités inhérentes aux fiducies de droit civil québécoises établies par contrat ou par testament en matière de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme sont similaires à celles des fiducies expresses de common law. Cependant, elles sont soumises à davantage de formalités et de restrictions que les fiducies expresses de common law, ce qui peut les rendre moins flexibles comme instruments potentiels de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme.
Vulnérabilités au RPC/FAT des fournisseurs de services aux entreprises (moyennes) : Les fournisseurs de services aux entreprises autres que les professionnels comme les avocats et les comptables constituent un secteur relativement petit au Canada, avec de nombreuses entités offrant des services en ligne payants. Au Canada, les fournisseurs de services aux entreprises proposent des services de constitution et de gestion aux entreprises constituées au Canada et à l'étranger. Les clients des fournisseurs de services d'entreprise, qu'ils soient étrangers ou canadiens, peuvent facilement accéder à ces services intermédiaires en ligne de n'importe où dans le monde. Compte tenu de la nature en ligne et de l'accès mondial à ces services, la portée géographique des fournisseurs de services aux entreprises est considérable et peut englober des pays à risque élevé.
Les transactions entre les fournisseurs de services aux entreprises et leurs clients comportent généralement de petits montants, car ces transactions consistent principalement en des frais de service et des frais gouvernementaux liés à la constitution ou au dépôt de documents. La majorité des fournisseurs de services aux entreprises au Canada offrent des services légitimes. Cependant, la capacité de ces fournisseurs de services à créer des structures d'entreprise complexes peut être mise à profit à des fins illicites. Les services fournis par les fournisseurs de services aux entreprises, et en particulier ceux qui se spécialisent dans la création de sociétés fictives et les accords de prête-nom, peuvent être utilisés, sciemment ou non, pour dissimuler des actifs et la propriété effective. Les criminels peuvent exploiter les fournisseurs de services aux entreprises comme administrateurs ou actionnaires désignés et mettre en place des structures d'entreprise complexes qui masquent la propriété effective, facilitant ainsi le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes.
Les fournisseurs de services aux entreprises peuvent être utilisés pour modifier les structures organisationnelles afin de masquer la véritable propriété effective, ce qui facilite le contournement des directives ministérielles émises par le ministre des Finances du Canada. Cette manipulation consiste à ajuster le pourcentage d'actions détenues par une personne ou une entité assujettie à des règles particulières en matière de sanctions et pour les réattribuer à un nouveau « propriétaire », qui peut être un membre de la famille ou un mandataire non sanctionné, afin de contourner les seuils de propriété. Les institutions financières peuvent avoir du mal à vérifier l'identité des clients, à surveiller les opérations et à détecter et à déclarer les opérations douteuses si les fournisseurs de services aux entreprises utilisent des techniques complexes pour aider les clients à dissimuler la véritable propriété effective.
La plupart des interactions entre les fournisseurs de services aux entreprises et les clients se limitent à des événements précis comme la constitution, les dépôts annuels ou les services de mandataire. Bien que certaines de ces missions aillent au-delà du point initial de constitution, leur nature intermittente peut réduire la probabilité d'une surveillance continue des clients.
La clientèle comprend un large éventail de particuliers et d'entreprises, dont certains peuvent avoir des activités à l'étranger dans des industries ou des administrations à haut risque. Des PPV étrangères ou canadiennes peuvent utiliser les fournisseurs de services aux entreprises pour établir des structures d'entreprise complexes afin de masquer l'origine des fonds illicites.
Mesures prises en matière de réglementation, de surveillance et d'application de la loi
Sociétés
Au Canada, le droit des sociétés est une responsabilité partagée avec les provinces et les territoires. Au fédéral, les sociétés à but lucratif sont constituées en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions, qui contient des dispositions relatives à la gouvernance d'entreprise et aux droits des actionnaires, et interdit l'émission d'actions au porteur. Des lois similaires couvrant les sociétés à but lucratif existent aux niveaux provincial et territorial. En vertu des lois prises aux échelles fédérale, provinciale et territoriale régissant les sociétés à but lucratif, les administrateurs et les dirigeants ont généralement un devoir de diligence et une obligation fiduciaire d'agir honnêtement, de bonne foi et dans l'intérêt supérieur de la société. Lorsqu'ils agissent dans l'intérêt supérieur d'une société, les administrateurs et les dirigeants de la société peuvent tenir compte des intérêts des autres parties prenantes. La conformité à ces lois est surveillée par Corporations Canada, ou son équivalent provincial ou territorial.
En 2017, les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux des Finances ont convenu en principe d'apporter des modifications législatives à leurs lois sur les sociétés afin d'obliger les sociétés à détenir des renseignements exacts et à jour sur les propriétaires véritables et d'éliminer l'utilisation d'actions au porteur. En 2019, d'autres modifications ont été apportées à la Loi canadienne sur les sociétés par actions afin de permettre aux organismes d'enquête de demander à ces sociétés de fournir des renseignements provenant de leurs registres lorsque les autorités estiment qu'ils seraient pertinents pour une enquête. Depuis 2019, la plupart des provinces et des territoires ont depuis modifié leur législation pour permettre la même chose.
En 2024, Corporations Canada a lancé un registre public de la propriété effective (appelés dans la Loi canadienne sur les sociétés par actions des « particuliers ayant un contrôle important ») des sociétés fédérales. Corporations Canada supervise le registre fédéral des particuliers ayant un contrôle important et a le pouvoir d'inspecter les dossiers d'une société. Les sociétés qui contreviennent à leurs obligations à l'égard du registre de particuliers ayant un contrôle important peuvent être passibles d'amendes voire dissoutes. CANAFE, l'ARC, la GRC et d'autres services de police, ainsi que les administrateurs provinciaux et territoriaux du droit des sociétés peuvent avoir accès à des renseignements non publics sur les particuliers ayant un contrôle important.
Des mesures similaires sont mises en œuvre à l'échelle provinciale. En 2023, le Québec a lancé son propre registre public de la propriété effective, supervisé par le Registraire des entreprises du Québec. Ce registre couvre les entreprises qui exercent des activités commerciales dans la province, y compris les sociétés, les sociétés de personnes, les fiducies qui exploitent une entreprise commerciale, les entreprises individuelles et certaines coopératives. En 2023, la Colombie-Britannique a adopté une loi visant à créer un registre public des bénéficiaires effectifs. Dans les Perspectives économiques et revue financière de l'Ontario 2024, la province de l'Ontario a annoncé qu'elle étudiait également les options pour un registre de la propriété effective. Dans le Budget de l'Ontario 2025 : Un plan pour protéger l'Ontario, l'Ontario a annoncé son intention de lancer des consultations publiques sur la création d'un registre de propriété effective et d'autres mesures potentielles pour lutter contre le blanchiment d'argent et le financement du crime organisé.
Les entités déclarantes en vertu de la LRPCFAT qui fournissent des services financiers à des sociétés, à des fiducies et à des sociétés de personnes sont tenues de faire preuve de vigilance afin de s'assurer qu'elles connaissent leurs clients et leur propriété effective et qu'elles déclarent leurs opérations, selon les besoins. Entre autres efforts de vigilance, les entités déclarantes seront tenues, à compter d'octobre 2025, de signaler toute divergence entre les renseignements figurant dans le registre fédéral de la propriété effective et les renseignements qu'elles reçoivent au titre de leurs obligations relatives au principe d'identification des clients.
Sociétés de personnes
Au Canada, les sociétés de personnes sont établies et réglementées à l'échelle provinciale et territoriale. Certaines provinces et certains territoires ont des lois distinctes pour les sociétés en nom collectif et les sociétés en commandite. La plupart des lois provinciales et territoriales sur les sociétés de personnes exigent les noms et adresses de certains associés et, dans le cas des sociétés en commandite, certaines de ces lois exigent que les renseignements concernant les contributions des commanditaires ou des associés commanditaires figurent dans l'enregistrement ou qu'ils soient disponibles aux fins de consultation au siège social de la société de personnes.
D'autres renseignements peuvent être exigés à l'égard des sociétés en commandite extraprovinciales ou des sociétés à responsabilité limitée. Par exemple, dans certaines provinces, le registraire ne peut enregistrer une société en commandite extraprovinciale que s'il a reçu une copie de la convention d'un contrat de société attesté par un notaire public ou l'équivalent. Les sociétés de personnes nationales et étrangères sont également assujetties à des exigences de divulgation de la propriété effective dans certaines provinces, notamment le Québec. Dans certaines provinces et certains territoires, les sociétés à responsabilité limitée composées de professionnels réglementés, comme les avocats et les comptables, sont assujetties à la surveillance de l'ordre professionnel qui réglemente et supervise la profession. Ces ordres peuvent établir des règles ou publier des directives et des pratiques exemplaires en matière de LRPC/FAT pour leurs membres.
Fiducies
Les fiduciaires de toutes les fiducies constituées au Canada, qu'il s'agisse de fiducies en common law ou de fiducies en droit civil, sont assujettis à un devoir de diligence et à une obligation fiduciaire d'honnêteté, de bonne foi et de loyauté. En vertu du Règlement sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, les entités déclarantes qui fournissent des services à une fiducie sont tenues de mener diverses activités de vigilance à l'égard de la clientèle. Une société de fiducie est tenue de conserver des renseignements sur les bénéficiaires d'une fiducie entre vifs dont elle est fiduciaire, y compris des renseignements sur la nature de leur entreprise ou leur profession principale.
Les sociétés de fiducie, qu'elles soient sous réglementation fédérale ou provinciale, sont assujetties à la LRPCFAT et surveillées par CANAFE. Les sociétés de fiducie titulaires d'un permis fédéral sont assujetties au contrôle prudentiel du BSIF et de l'ACFC pour la protection des consommateurs. Elles sont assujetties aux dispositions relatives aux sanctions prévues par la Loi sur les sociétés de fiducie et de prêt. Les sociétés de fiducie titulaires d'un permis provincial doivent être titulaires d'un permis délivré par une autorité provinciale et sont assujetties à la surveillance de celle-ci.
Le gouvernement du Canada a récemment introduit de nouvelles exigences en matière de déclaration touchant les fiducies pour les années d'imposition se terminant après le 30 décembre 2023. En vertu de ces exigences de déclaration améliorées, toutes les fiducies, sous réserve de la satisfaction de certaines conditions, sont généralement tenues de déclarer des renseignements sur la propriété effective à l'ARC dans une déclaration annuelle de revenus et la Déclaration de renseignements annuelle des fiducies. Des renseignements doivent être fournis concernant tous les fiduciaires, constituants et bénéficiaires de la fiducie, ainsi que chaque personne qui a la capacité (au moyen des conditions de la fiducie ou d'un accord connexe) d'exercer un contrôle ou d'annuler les décisions du fiduciaire concernant la désignation du revenu ou du capital de la fiducie (comme un protecteur). Le non-respect des nouvelles règles de déclaration des fiducies peut entraîner des pénalités.
Le gouvernement du Québec a instauré des règles de déclaration des fiducies améliorées, harmonisées avec celles du gouvernement fédéral. Depuis le 31 mars 2023, les fiducies exploitant une entreprise commerciale, comme les fiducies d'entreprise, les fiducies de placement ou les fiducies de placement immobilier, sont également tenues de déclarer au Registraire des entreprises du Québec les renseignements concernant leurs bénéficiaires ultimes.
Fournisseurs de services aux entreprises
Compte tenu du rôle des fournisseurs de services aux entreprises dans la création d'entreprises, bon nombre des mesures réglementaires qui corrigent les vulnérabilités touchant les sociétés, les sociétés de personnes et les fiducies atténuent également les vulnérabilités touchant les fournisseurs de services aux entreprises. La création récente de registres de propriété effective pour les sociétés fédérales, de même que les sociétés et autres entités juridiques au Québec ainsi que la nouvelle législation en Colombie-Britannique pour créer un registre des bénéficiaires effectifs, aidera à atténuer les risques associés aux fournisseurs de services aux entreprises et aux entreprises auxquelles ces derniers proposent leurs services. Le gouvernement du Canada reconnaît les vulnérabilités particulières touchant le secteur et a annoncé son intention, dans l'Énoncé économique de l'automne 2024, d'élargir l'application du cadre canadien de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes pour y inclure les fournisseurs de services aux entreprises.
Secteur juridique
Le secteur juridique au Canada est vaste, complexe et composé d'une diversité de professionnels, y compris des avocats, des notaires et des parajuristes. La présente évaluation porte particulièrement sur les avocats et les notaires québécois, car ces professionnels peuvent fournir des services liés aux transactions financières, aux biens immobiliers et à la constitution de sociétés ou à d'autres arrangements juridiques qui les rendent vulnérables à l'utilisation abusive à des fins de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Dans la plupart des régions du Canada, les parajuristes et les notaires ne sont pas autorisés à fournir ces services et ne sont donc pas jugés vulnérables. Les notaires de la Colombie-Britannique présentent certaines vulnérabilités, mais en raison de leur nature unique, ils sont évalués séparément.
Vulnérabilités au RPC/FAT des avocats et des notaires du Québec (élevées) : Environ 136 000 avocats et 4 200 notaires québécois exercent au Canada. Note de bas de page 180 Les services proposés par ces professionnels peuvent être sophistiqués et complexes et ils peuvent être consultés partout au pays par des clients canadiens et étrangers.
Les avocats et les notaires du Québec possèdent des connaissances et des compétences qui peuvent être utiles aux criminels qui cherchent à recycler des produits de la criminalité. Ils peuvent fournir toute une gamme de services liés aux activités financières et notamment exploiter des comptes en fiducie, créer des entités ou des constructions juridiques, faciliter les transactions immobilières et agir à titre d'actionnaires ou d'administrateurs. Les avocats peuvent également accepter de l'argent comptant pour effectuer des transactions financières au nom d'un client. Les services fournis par les professionnels du droit leur donnent un aperçu unique de la structure, des dispositions et des pratiques commerciales de leurs clientsNote de bas de page 181.
Trois types d'activités que les professionnels du droit peuvent exercer sont jugés particulièrement vulnérables à l'exploitation à des fins de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Cela comprend l'utilisation de comptes en fiducie, les transactions immobilières et la création, l'exploitation et la gestion de sociétés, de fiducies et d'autres personnes morales ou constructions juridiques.
Un compte en fiducie est un compte détenu par un avocat ou un cabinet d'avocats qui contient des fonds remis par un ou plusieurs clients pour être utilisés dans des opérations directement liées à des services juridiques. Lorsque des comptes en fiducie sont créés, l'institution qui accepte les dépôts peut avoir de la difficulté à comprendre la nature, l'utilisation et la propriété prévues des fonds parce que les comptes sont gérés par un professionnel du droit. Par conséquent, ces comptes sont vulnérables à l'utilisation abusive ou à l'abus, en particulier par des acteurs malveillants qui cherchent à placer des produits de la criminalité dans le système financier officiel ou à disperser ces fonds en retenant les services de professionnels du droit.
Dans la plupart des provinces et des territoires du Canada, on fait appel à des avocats pour effectuer le transfert de biens immobiliersNote de bas de page 182, un processus qui peut être utilisé comme méthode de recyclage des produits de la criminalité. Grâce au recours à des professionnels du droit, les fonds peuvent sembler légitimés lorsqu'ils transitent par le compte en fiducie d'un cabinet d'avocats et lorsqu'ils sont échangés contre la propriété d'un bien.
Les criminels peuvent demander des services juridiques pour créer des sociétés, des fiducies ou d'autres personnes morales ou arrangements, ou s'engager dans des opérations ou des structures transfrontalières complexes afin de conserver le contrôle des produits de la criminalité tout en nuisant à la capacité des organismes responsables de l'application de la loi de retracer l'origine et la propriété des biens. Ces vulnérabilités peuvent être exacerbées dans les cas où les avocats peuvent agir à titre d'administrateurs, de dirigeants, de fiduciaires ou même d'actionnaires d'une société ou d'une fiducie au nom d'un client.
Bien que de nombreux clients des professionnels du droit soient à faible risque, le profil du client peut également inclure une combinaison de sociétés, de PPV, de clients d'entreprises et de professions vulnérables et de clients dont les activités sont exercées dans des administrations désignées comme à risque élevé par le GAFI et d'autres lieux préoccupants.
Les communications entre un avocat et son client sont protégées par le secret professionnel de l'avocat dans les systèmes de common law et le secret professionnel dans le droit civil québécois. Les organismes d'application de la loi ont vu des criminels retenir les services d'un avocat pour abuser de ce privilège et du secret professionnel dans le but de cacher leurs activités et d'autres renseignements aux autorités compétentes, comme les organismes responsables de l'application de la loi et les institutions financières qui traitent les transactions financières à partir de comptes en fiducie. L'abus de ces privilèges pour dissimuler des activités criminelles est particulièrement préoccupant pour les organismes d'application de la loi, car il dresse des obstacles dans les enquêtes, notamment des couches supplémentaires de complexité juridique et des contraintes de temps.
Vulnérabilités au RPC/FAT des notaires de la Colombie-Britannique (moyennes) : Le secteur des notaires de la Colombie-Britannique, tel qu'il est réglementé par la LRPCFAT compte quelque 300 entités déclarantes. Ce secteur propose une gamme restreinte de services juridiques, principalement aux résidents de la province. Cela comprend la prestation de certains services vulnérables, y compris les transactions immobilières, la création de comptes en fiducie et l'exécution d'opérations financières. Bien que ces services constituent une part importante des activités commerciales du secteur, le profil de vulnérabilité global du secteur est évalué comme inférieur à celui des avocats et des notaires du Québec, compte tenu de sa structure relativement simple, de sa petite taille relative, de sa faible portée géographique et de l'absence de protection liée au secret professionnel conférée au secteur.
Les notaires de la Colombie-Britannique entretiennent des relations d'affaires continues ainsi que certaines transactions ponctuelles. Leurs services sont axés sur les particuliers plutôt que sur les entreprises. Le profil de la clientèle du secteur comprend également la présence de clients à risque élevé, y compris des PPV étrangères et canadiennes, ainsi que des clients exerçant des professions à risque élevé.
Par rapport aux autres professionnels du droit au Canada, comme les avocats et les notaires du Québec, les notaires de la Colombie-Britannique ne confèrent pas un niveau élevé d'anonymat à leur clientèle, notamment parce que les services qu'ils offrent aux clients ne sont pas protégés par le secret professionnel de l'avocat. De plus, la plupart des interactions ont lieu lorsque le client est physiquement présent. Cependant, des interactions qui ne se déroulent pas en personne sont possibles, tout comme les consultations avec des tiers, en particulier avec l'émergence des services de notariat en ligne.
Mesures prises en matière de réglementation, de surveillance et d'application de la loi
Les notaires publics et les sociétés notariales de la Colombie-Britannique (collectivement désignés les notaires de la Colombie-Britannique) sont tenus au respect d'exigences en matière de LRPC/FAT énoncées dans la LRPCFAT lorsqu'ils fournissent les services prescritsNote de bas de page 183 pour le compte d'une personne ou d'une entité et sont assujettis à la surveillance de CANAFE. Les notaires de la Colombie-Britannique ont généralement de bons résultats en matière de conformité lorsque CANAFE les soumet à des évaluations de conformité.
Les notaires de la Colombie-Britannique sont également régis par la Notaries Act de cette province et sont assujettis aux mesures disciplinaires de leur ordre professionnel. The Society of Notaries Public of British Columbia est l'organisme responsable d'établir des normes de formation et de conduite professionnelles, d'enquêter sur les questions de conduite de ses membres, de mener des procédures disciplinaires et de veiller à ce que le secteur soit réglementé dans l'intérêt public.
À l'inverse, les avocats canadiens et les notaires québécois ne sont pas assujettis à la LRPCFAT et à son règlement. En 2015, la Cour suprême du Canada a rendu une décision dans l'affaire Canada (Procureur général) c. Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada, déclarant que certaines dispositions de la LRPCFAT, telles qu'elles s'appliquaient alors à la profession juridique, contrevenaient à certains articles de la Charte canadienne des droits et libertés. La Cour suprême a reconnu l'objectif public important du régime de LRPC/FAT du Canada et a affirmé que le Parlement pouvait imposer à la profession juridique des obligations qui s'inscrivent dans les limites constitutionnelles.
En vertu de la Constitution canadienne, les provinces ont la compétence législative pour délivrer des permis et réglementer diverses professions, y compris la profession juridique. Les lois provinciales et territoriales ont créé des ordres professionnels de juristes (barreaux) pour autoréglementer la profession juridique dans l'intérêt public. Ces lois établissent les pouvoirs des ordres professionnels qui régissent la profession juridique, y compris les règles de pratique et les normes de conduite et de compétence, supervisent la délivrance de permis aux avocats et mènent l'enquête et sanctionnent les membres en cas de faute professionnelle.
Ces normes s'appliquent aux activités de LRPC/FAT, car il est interdit aux professionnels du droit de se livrer à des activités qui constitueraient une faute professionnelle. Ils ont le devoir de ne pas aider ni de faciliter la conduite d'un client dont l'avocat sait ou devrait savoir qu'elle est malhonnête, frauduleuse, contraire à la loi ou illégale.
Tous les avocats au Canada et tous les notaires au Québec sont tenus par la loi d'être membres de l'un des barreaux provinciaux ou territoriaux du Canada. Les barreaux examinent et instruisent activement les plaintes reçues contre des membres de la profession juridique, et détectent de manière proactive les fautes professionnelles par le biais de leurs programmes de vérification. Leurs statuts leur permettent d'enquêter sur leurs membres pour des violations des règles ou des normes du barreau, ce qui peut mener à des audiences disciplinaires et entraîner des réprimandes, des amendes, des conditions ou des restrictions d'exercice, des suspensions d'exercice ou la radiation. Dans certaines provinces et certains territoires, les barreaux peuvent, dans certaines circonstances, renvoyer des cas d'activités criminelles possibles aux organismes responsables de l'application de la loi pour enquêter.
La FOPJC, l'association nationale représentant tous les barreaux provinciaux et territoriaux, élabore des règlements types et fournit des conseils et de l'aide aux barreaux pour lutter contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristesNote de bas de page 184. Cela comprend des directives détaillées sur les responsabilités à l'égard des règlements types sur les transactions en espèces, les exigences d'identification et de vérification de l'identité des clients et la comptabilité de fiducie qui ont été adoptées par tous les barreaux du Canada. Notamment, le règlement type sur la comptabilité de fiducie interdit l'utilisation des comptes en fiducie des professionnels du droit à des fins autres que celles directement liées à la prestation de services juridiques, et le règlement type sur les transactions en espèces interdit à un avocat d'accepter ou de recevoir des montants de plus de 7 500 $ en espèces pour toute affaire concernant un client, sous réserve de certaines conditionsNote de bas de page 185.
En plus de ces règles, dans chaque province et territoire, la profession juridique est régie par un code de déontologie qui, entre autres, exige qu'un professionnel du droit signale au barreau toute circonstance dans laquelle un autre professionnel du droit est soupçonné de commettre une inconduite grave ou une activité criminelle, à moins que ce signalement ne soit illégal, n'entraîne la violation du secret professionnel de l'avocat ou ne porte atteinte à la confidentialitéNote de bas de page 186. Dans toutes les provinces et tous les territoires, les avocats et les notaires du Québec sont également tenus d'aviser leur barreau respectif s'ils ont été accusés ou reconnus coupables d'infractions au Code criminel ou d'autres infractions qui sont incompatibles avec les normes de conduite élevées attendues des membres du barreau.
Depuis juin 2019, la FOPJC travaille en étroite collaboration avec le gouvernement du Canada dans le cadre d'un groupe de travail conjoint afin d'explorer les questions relatives au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes dans la profession juridique et de renforcer l'échange de renseignements entre les ordres professionnels de juristes et le gouvernement. Ce groupe de travail, qui se compose de représentants de Finances Canada et de Justice Canada, avec la participation régulière de CANAFE et de la GRC, permet également d'échanger des renseignements sur les risques, les tendances et les mesures d'atténuation en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. La GRC a tiré parti de ce forum pour formaliser certains mécanismes d'échange de renseignements avec les barreaux au titre de protocoles d'entente.
En 2023, le barreau de la Colombie-Britannique a radié un avocat de Vancouver accusé de facilitation du recyclage des produits de la criminalité, après qu'il a transféré plus de 30 millions de dollars à des clients qu'il savait faire l'objet d'une enquête des forces de l'ordre pour fraude en valeurs mobilières. L'avocat a reçu près de 900 000 $ en honoraires de ces clients, même s'il ne leur avait fourni aucun service juridique de fond. L'avocat a également utilisé 20 téléphones jetables pendant 18 mois pour dissimuler ses traces lors du transfert des fonds des clientsNote de bas de page 187.
Secteur des services comptables
Vulnérabilités au RPC/FAT du secteur des services comptablesNote de bas de page 188 (moyennes) : Environ un millier de comptables et de cabinets comptables au Canada exercent des activités vulnérables au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes et ont des obligations en vertu de la LRPCFAT. Les professionnels qui composent ce secteur possèdent des connaissances et une expertise spécialisées qui peuvent être exploitées sciemment ou non à des fins illicites. Cette expertise comprend principalement les conseils financiers et fiscaux et peut comprendre l'assistance et les conseils sur la création d'entreprises et de fiducies.
La profession offre des services vulnérables à un large éventail de personnes et d'entreprises et peut agir à titre de tiers dans les transactions. La profession est bien intégrée dans d'autres secteurs complexes et vulnérables de l'économie, comme les secteurs bancaire, des valeurs mobilières et de l'immobilier. Cette caractéristique, combinée à l'expertise unique du secteur en matière de fiscalité, de politiques fiscales et de finances, permet aux membres de la profession d'agir comme intermédiaire ou « gardiens » pour d'autres secteurs du système financier, qui peuvent présenter une vulnérabilité accrue aux abus à des fins illicites.
Le profil de la clientèle des comptables comprend des clients fortunés, des PPV et des entreprises à forte intensité de liquidités. Les comptables peuvent exercer des activités associées à des administrations à risque élevé, en particulier ceux qui sont employés par de grands cabinets comptables qui ont des activités ou des liens internationaux. Les membres de la profession ont tendance à entretenir des relations continues et directes avec leurs clients, les interactions se déroulant principalement en personne, ce qui minimise l'anonymat.
Mesures prises en matière de réglementation, de surveillance et d'application de la loi
Les comptables et les cabinets comptables sont assujettis à des mesures de contrôle réglementaire en matière de LRPC/FAT en vertu de la LRPCFAT et sous la supervision de CANAFE. Les comptables professionnels agréés (CPA) et les cabinets comptables doivent se conformer aux exigences de la LRPCFAT lorsqu'ils exercent des activités prescrites pour le compte d'une personne ou d'une entité. Les activités prescrites comprennent la perception ou le versement de fonds ou de monnaies virtuelles; l'achat ou la vente de valeurs mobilières, de biens immobiliers ou d'immeubles, ou encore d'actifs ou d'entités d'entreprise; ou le transfert de fonds, de monnaies virtuelles ou de titres par quelque moyen que ce soit, ainsi que donner des instructions en lien avec n'importe laquelle de ces activités.
Ces activités ne comprennent pas celles qui sont effectuées dans le cadre d'une vérification, d'un examen ou d'une mission de compilation au sens du Manuel de CPA Canada préparé et publié par les Comptables professionnels agréés du Canada. Les comptables qui ne sont pas des CPA ne sont pas assujettis à la LRPCFAT ni aux normes professionnelles.
Les comptables obtiennent d'excellents résultats en matière de conformité lorsque CANAFE les soumet à des évaluations de conformité. Le secteur des services comptables est actif sur divers forums de consultation gouvernementale à l'échelle fédérale, dont le Comité consultatif sur le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes, dirigé par Finances Canada. Ce comité offre au gouvernement et au secteur privé une tribune pour échanger des renseignements sur les nouveaux risques, les tendances et les mesures d'atténuation en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes.
Ces professionnels sont également régis par les lois, les règlements administratifs et les règlements de leur province ou territoire respectifs, qui imposent plusieurs obligations aux comptables, dont le respect de codes de déontologie et d'exigences en matière de perfectionnement professionnel continu, des inspections des pratiques, le maintien du titre professionnel la satisfaction de conditions pour la délivrance d'un permis.
En 2019, dans le cadre du projet Hobart, la PPO a découvert qu'un comptable professionnel agréé avait participé au recyclage des produits de la criminalité pour un GCO qui exploitait un site de paris sportifs en ligne illégal. Le comptable a utilisé le compte bancaire d'un mandataire pour effectuer des transactions financières au nom de son client. De plus, ce membre du GCO a utilisé le compte fiduciaire d'un avocat pour effectuer des transactions financières évaluées à plusieurs millions de dollars. Environ 40 millions de dollars d'actifs ont été bloqués ou saisis à titre de produits de la criminalité auprès de six personnes accusées de divers crimesNote de bas de page 189.
En 2019, l'ARC a annoncé qu'une personne de Kingston, en Ontario, a été condamnée par la Cour de justice de l'Ontario à Ottawa à une peine d'emprisonnement avec sursis de 18 mois, dont les 6 premiers mois à purger en résidence surveillée, avec 240 heures de travaux communautaires, une amende de 34 432 $ et une période de probation de 3 ans. L'individu, un comptable, a été condamné pour avoir aidé son client dans un stratagème de contestation fiscale et a plaidé coupable le même jour à l'accusation d'avoir aidé son client à obtenir des paiements du crédit pour la taxe sur les produits et services et de l'Allocation canadienne pour enfants auxquels il n'avait pas droit. Pour les années 2008 à 2012, l'individu a aidé son client à déclarer un revenu de son cabinet dentaire totalisant 2 045 572 $, mais a ensuite déduit à tort la totalité du montant à titre de dépense d'entreprise, au titre de « contrats privés ». Le client a également été condamné pour évasion fiscale et recyclage des produits de la criminalité.Note de bas de page 190
Secteur de l'immobilier
Vulnérabilités au RPC/FAT des agents, courtiers et promoteurs immobiliers (élevées) : Les courtiers, agents et promoteurs immobiliers participent à l'aménagement de terrains, à la construction de nouveaux bâtiments et à leur vente ou revente subséquente. Les transactions immobilières sont intégrées dans une gamme d'autres secteurs, et l'achat et la vente de biens immobiliers font appel à divers intermédiaires, notamment des professionnels du droit, des fournisseurs de prêts hypothécaires, des assureurs d'hypothèques et de titres ainsi que des évaluateurs de biens immobiliers. Ces secteurs et professions disposent chacun de leur propre expertise et accèdent aux renseignements à différents stades de la transaction immobilière.
La plupart des transactions immobilières sont effectuées en personne et ne sont pas complexes. Cependant, dans certains marchés, les transactions deviennent de plus en plus complexes en raison de l'utilisation de l'identification et des signatures numériques, ainsi que de l'utilisation de tiers et de structures de propriété complexes pour effectuer des transactions. Les transactions immobilières complexes peuvent comprendre le recours à des sociétés fictives pour les biens achetés à titre de placement, ainsi que l'utilisation de clauses de cession dans les contrats d'achat et de vente. Ces clauses permettent à un autre acheteur (le « cessionnaire ») de prendre en charge les droits et obligations de l'acheteur avant que l'acheteur initial prenne possession de la propriété.
Les courtiers, les agents et les promoteurs immobiliers peuvent être exposés à des clients à risque élevé, y compris aux PPV, aux investisseurs étrangers (qui se trouvent notamment dans des administrations à risque élevé ou considérées comme préoccupantes) et à des particuliers dans des professions ou des entreprises vulnérables. Cette caractéristique rend le secteur particulièrement vulnérable au recyclage des produits de la corruption étrangère.
Vulnérabilités au RPC/FAT des courtiers en hypothèques (moyennes) : Les courtiers en hypothèques sont des intermédiaires professionnels qui proposent une série d'options de financement hypothécaire à leurs clients (demandeurs) et traitent les demandes auprès d'un prêteur choisi. Le financement hypothécaire est le principal secteur d'activité du secteur, ce qui implique d'entretenir des relations avec divers prêteurs, notamment des banques, des coopératives de crédit et des prêteurs privés. Les courtiers en hypothèques proposent également d'autres produits de financement basés sur la valeur nette du logement, comme des marges de crédit hypothécaires, des prêts sur la valeur nette du logement et des hypothèques inversées. Ce secteur n'est pas complexe et, dans la plupart des cas, les courtiers ne gèrent pas les fonds directement auprès des emprunteurs.
Les courtiers en hypothèques effectuent habituellement des activités en matière de vigilances à l'égard de la clientèle, recueillent des renseignements sur la solvabilité des demandeurs et travaillent avec les prêteurs hypothécaires pour obtenir des taux de prêt. L'obligation de valider la solvabilité d'un client pour les fournisseurs de prêts hypothécaires peut faciliter la vigilance à l'égard de la clientèle, mais la portée d'une évaluation de crédit peut s'avérer limitée et ne pas s'étendre à d'autres activités de diligence raisonnable pertinentes aux mesures de contrôle en matière de LRPC/FAT, comme la détermination des PPV.
Bien que les courtiers en hypothèques présentent un niveau moyen de vulnérabilité au RPC/FAT, leur visibilité sur le financement des transactions immobilières peut être mise à profit dans la LRPC/FAT (p. ex., détection des emprunteurs suspects).
Vulnérabilités au RPC/FAT des prêteurs hypothécaires (élevées) : Alors que les entités financières qui acceptent des dépôts, comme les banques et les coopératives de crédit, détiennent une part importante des prêts hypothécaires en cours, d'autres types de prêteurs ont connu une croissance rapide au cours de la dernière décennie et détiennent dorénavant plus de 100 milliards de dollars d'avoirs hypothécairesNote de bas de page 191. Ces entités comprennent les sociétés de financement hypothécaireNote de bas de page 192, les sociétés de placement hypothécaire, les hypothèques consortiales et d'autres prêteurs privés comme les sociétés privées, les particuliers et les fiducies de fonds communs de placement.
Ces prêteurs proposent généralement un type de produit vulnérable, à savoir les prêts hypothécaires (résidentiels et commerciaux) et d'autres produits de prêt basés sur la valeur nette du bien. Certains de ces prêteurs (p. ex., les sociétés de placement hypothécaire et les hypothèques consortiales) offrent également des possibilités de placement direct aux particuliers ou aux entreprises qui souhaitent investir des fonds pour financer les prêts.
Le secteur des prêts hypothécaires peut être complexe en matière de contrats de financement et d'activités commerciales. Les structures de propriété de certains types de prêteurs privés ou des entités qui leur fournissent des capitaux peuvent également s'avérer très complexes et opaques. Ce secteur est intégré dans un certain nombre d'autres secteurs, notamment le secteur immobilier, le secteur juridique, le secteur financier et le secteur des investisseurs privés ou institutionnels.
Il est exposé à des clients à risque élevé, y compris aux PPV, aux investisseurs étrangers (qui se trouvent notamment dans des administrations à risque élevé ou considérées comme préoccupantes) et à des particuliers dans des professions ou des entreprises vulnérables. Certains prêteurs privés font la promotion de leurs services auprès de personnes plus susceptibles de travailler dans des entreprises vulnérables, et notamment celles qui sont à forte intensité de liquidités. De plus, certains segments de ce secteur, comme les sociétés de placement hypothécaire privées, les hypothèques consortiales et d'autres prêteurs privés, sont plus susceptibles de faire des affaires avec des sociétés en tant que clients emprunteurs et des particuliers fortunés en tant que fournisseurs de capitaux que les prêteurs hypothécaires traditionnels. Bien que les transactions puissent être effectuées en personne, les transactions non en personne sont de plus en plus la norme dans l'ensemble du secteur.
Mesures prises en matière de réglementation, de surveillance et d'application de la loi
Les courtiers, les agents et les promoteurs immobiliers sont assujettis à des mesures de contrôle réglementaire en matière de LRPC/FAT en vertu de la LRPCFAT et sous la supervision de CANAFE. Depuis le 11 octobre 2024, les administrateurs hypothécaires, les courtiers en hypothèques et les prêteurs hypothécaires sont également soumis à des contrôles réglementaires en matière de LRPC/FAT en vertu de la LRPCFAT et sous la supervision de CANAFE.
Le gouvernement continue de prendre des mesures pour atténuer les vulnérabilités auxquelles se heurte ce secteur. Notamment, l'Énoncé économique de l'automne 2023 a annoncé l'intention du gouvernement d'étendre les exigences de la LRPCFAT aux assureurs de titres et d'exiger des agents immobiliers qu'ils identifient les parties non représentées et les tiers dans les transactions immobilières. Ces exigences entreront en vigueur le 1er octobre 2025.
Ces secteurs sont également assujettis à des règlements provinciaux et territoriaux dans plusieurs administrationsNote de bas de page 193. Plusieurs provinces et territoires ont mis en place des programmes d'inscription ou de délivrance de permis pour les agents immobiliers, les courtiers immobiliers et les courtiers en hypothèques. Les systèmes de délivrance de permis, en particulier, nécessitent souvent une vérification du casier judiciaire pour permettre la lutte contre toute infiltration criminelle dans l'ensemble du secteur.
Par exemple, au Québec, les courtiers en hypothèques sont assujettis à la Loi sur le courtage immobilierNote de bas de page 194 et aux règlements de l'Organisme d'autoréglementation du courtage immobilier du Québec. Depuis le 1er mai 2020, le courtage hypothécaire est visé par la Loi sur la distribution de produits et services financiersNote de bas de page 195 et assujetti aux règlements de l'Autorité des marchés financiers.
Le Nouveau-Brunswick supervise son secteur immobilier au moyen d'un modèle de coréglementationNote de bas de page 196. Le Bureau du registraire de l'Association des agents immobiliers du Nouveau-Brunswick partage les fonctions de réglementation avec la Commission des services financiers et des services aux consommateurs, la société d'État de la province qui réglemente et applique les lois provinciales sur l'immobilier, les courtiers en hypothèques et divers autres secteurs axés sur les consommateursNote de bas de page 197.
Tout agent immobilier exerçant ses activités à l'Île-du-Prince-Édouard doit être titulaire d'un permis délivré par le Registrar of Real Estate conformément à la Real Estate Trading Act.
La Colombie-Britannique a établi le Land Owner Transparency Registry (registre concernant la transparence des propriétaires fonciers), qui comprend des renseignements sur les personnes qui sont réputées avoir un intérêt indirect dans des terrains (p. ex., par l'intermédiaire de sociétés, de fiducies et de sociétés de personnes) dans une base de données publique interrogeable.
Les secteurs de l'immobilier et des prêts hypothécaires participent à divers forums de consultation du gouvernement au niveau fédéral, y compris le Comité consultatif sur le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes, dirigé par Finances Canada. Souvent, CANAFE communique directement avec l'industrie pour fournir des renseignements sur les obligations sectorielles. CANAFE a en outre publié des orientations et des bulletins spéciaux sur les risques propres au secteur à l'appui des programmes de conformité et des exigences en matière de déclarationNote de bas de page 198.
Il reste encore des défis à relever pour parvenir à une compréhension uniforme des indicateurs de recyclage des produits de la criminalité dans l'ensemble du secteur immobilier. Les niveaux de déclaration des opérations douteuses à CANAFE dans le secteur demeurent faibles. Les lacunes courantes dans les programmes de LRPC/FAT de ce secteur sont souvent liées aux exigences de conformité, à la surveillance continue, à la vigilance accrue, à la tenue de dossiers et aux obligations de vigilance à l'égard de la clientèle. Les taux de conformité du secteur hypothécaire en matière de LRPC/FAT sont limités, car la réglementation n'est entrée en vigueur que récemment. Les activités de surveillance actuelles de CANAFE associées à ce secteur nouvellement réglementé sont axées sur la sensibilisation et la promotion d'une conformité rigoureuse.
CANAFE a mené de vastes activités de sensibilisation auprès du secteur immobilier pour renforcer la conformité. Ces activités comprennent l'organisation de plusieurs réunions au cours de l'exercice 2023-2024 avec de grands courtiers immobiliers afin d'améliorer l'efficacité des déclarations d'opérations douteuses et de promouvoir les meilleures pratiques. CANAFE a également travaillé directement avec L'Association canadienne de l'immobilier (ACI), l'association de l'industrie qui représente les courtiers, les agents et les vendeurs immobiliers de tout le pays, pour diffuser les mises à jour aux documents de CANAFE mis à la disposition des membres de l'ACI. Ces documents comprennent les formulaires de renseignements sur les clients, les registres de réception des fonds et le modèle d'évaluation des risques de l'ACI, tous mis à jour pour tenir compte des derniers conseils et des dernières orientations de CANAFE. Ces documents mis à jour améliorent la capacité des courtiers à collecter des renseignements sur les risques, ce qui leur permet de recenser plus efficacement les opérations à déclarer.
En 2022, une équipe intégrée d'enquête sur le recyclage des produits de la criminalité de la GRC a découvert une série de fraudes hypothécaires complexes présumées. Le stratagème a permis de subtiliser des millions de dollars à plusieurs institutions financières sur une période de cinq ansNote de bas de page 199.
En 2024, l'ARC a annoncé qu'un individu de Richmond, en Colombie-Britannique, a été condamnéNote de bas de page 200 à une peine d'emprisonnement avec sursis de deux ans moins un jour et a reçu une amende totale de 2 153 394 $ pour avoir omis de déclarer 7 485 246 $ de revenu imposable dans ses déclarations de revenus des particuliers pour les années 2011, 2012 et 2014. Le particulier a omis de déclarer le revenu provenant des frais de cession gagnés en revendant 14 propriétés entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2014, évitant ainsi 2 153 394$ en impôt fédéral sur le revenu. Depuis, un nouveau registre pour la taxe sur la revente précipitée de logement est entré en vigueur, afin de décourager les acheteurs spéculatifs et d'accroître la transparence des transactions de vente, réduisant ainsi les risques d'évasion fiscale et de recyclage des produits de la criminalité associés aux transactions immobilières.
Secteur du jeu
Vulnérabilités au RPC/FAT des casinos physiques et en ligne (élevées) : Le secteur du jeu au Canada se compose principalement de casinos physiques et en ligne. En avril 2025, 19 casinos sous réglementation provinciale étaient autorisés à exercer leurs activités au Canada. Du nombre, 10 casinos physiques proposent également des jeux en ligne, contre 8 qui n'en proposent pas. Chacun de ces casinos compte plusieurs exploitants et divers emplacements. L'autre casino sous réglementation provinciale, iGaming Ontario, offre uniquement des jeux en ligne par l'intermédiaire de l'inscription d'exploitants privés sous contrat et tient à jour une liste des exploitants et des sites réglementés : Marché réglementé | Jeux en ligne Ontario.
Bien que les casinos proposent un nombre limité de produits et de services vulnérables, ils exercent un grand volume d'activité partout au Canada, dont la plupart sont très transactionnelles et largement fondées sur des liquidités. Les étages dédiés aux personnalités très importantes (VIP) des casinos peuvent représenter une vulnérabilité particulière, car cette clientèle a généralement des fonds importants et peut comprendre des personnes à risque élevé. La clientèle des casinos comprend des PPV, des non-résidents et une clientèle d'entreprises et de professions vulnérables. Certains casinos proposent aux clients la possibilité de transférer des fonds par voie électronique, y compris à l'international. Les clients peuvent mener des activités de jeu dans les casinos physiques de manière relativement anonyme, bien que les casinos soient surveillés et que les organismes de réglementation exigent une interaction en personne avec le personnel des casinos pour certaines activités. Les relations d'affaires des casinos avec leur clientèle sont de plus en plus basées sur les comptes en raison de la sensibilisation du secteur aux risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes posés par les clients anonymes et sa compréhension de ces risques.
Les casinos en ligne ont des relations transactionnelles et continues avec leurs clients, y compris les clients exerçant des professions vulnérables et travaillant dans des entreprises vulnérables. Toutes les transactions sont effectuées en ligne par l'intermédiaire d'interactions qui ne se déroulent pas en personne et qui peuvent impliquer des intermédiaires. Les utilisateurs non en personne doivent s'inscrire pour utiliser le site et doivent indiquer un mode de paiement (p. ex., carte de crédit ou de débit). Bien que cela réduise l'anonymat du titulaire du compte, il demeure difficile de déterminer qui contrôle le compte en question. Le niveau de complexité varie selon les systèmes de gestion de l'information hébergés par chaque casino en ligne, notamment l'utilisation de la technologie pour déterminer l'emplacement de l'adresse IP d'un utilisateur et authentifier les documents d'identification pour vérifier l'identité du client. La fraude et le recyclage subséquent des produits de ces infractions sont les plus grands risques pour le secteur réglementé des jeux en ligne.
La prévalence des jeux en ligne a augmenté ces dernières années, l'International Center for Gaming Regulation prévoyant que cette industrie mondiale atteindra 100 milliards de dollars américains d'ici 2026. La croissance de l'industrie s'est accélérée pendant la pandémie de COVID-19, la fermeture des casinos physiques poussant de nombreux joueurs à se tourner vers les plateformes en ligne. Au Canada, la croissance de l'industrie a coïncidé avec de nouvelles modifications réglementaires, comme la légalisation des paris sur une seule épreuve sportive, entrée en vigueur en août 2021, et l'arrivée de nouveaux exploitants de sites de jeuNote de bas de page 201. Notamment, en avril 2022, au moment de l'entrée en service de Jeux en ligne Ontario, le marché des jeux en ligne de l'Ontario s'est ouvert aux exploitants privés, y compris à des sociétés internationales de jeux.
L'expansion rapide des jeux en ligne a créé de nouveaux produits de paris. Les paris sportifs de pair à pair, dans lesquels les joueurs peuvent parier directement les uns contre les autres, plutôt que contre un site de paris sportifs, comportent des risques de collusion qui peuvent faciliter le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes. De même, dans les jeux de casino en ligne traditionnels comme le poker, certains blanchisseurs d'argent peuvent tenter de contourner les restrictions sur les transferts entre pairs en perdant délibérément au profit d'un autre joueur au début d'une partie afin de transférer des fonds sur le compte de ce joueur.
Les jeux d'argent non autorisés, illégaux ou à l'étranger représentent posent des défis réglementaires à tous les gouvernements. Malgré la disponibilité des jeux de hasard en ligne réglementés au Canada, certains Canadiens continuent d'utiliser des sites Web de jeux non autorisés, en violation du Code Criminel. Les publicités diffusées à l'échelle nationale pour des opérateurs de paris autorisés dans certaines administrations seulement peuvent créer de la confusion parmi les joueurs quant aux produits et services qu'ils peuvent utiliser légalement. Les tentatives d'accès à des applications provinciales non autorisées redirigent parfois les utilisateurs vers des sites internationaux exploités par les mêmes entreprises, les exposant à des jeux non réglementés, en violation du Code criminel.
Les transactions avec des sites étrangers non autorisés, en particulier ceux qui se trouvent dans des administrations où le secret financier ou les régimes de LRPC/FAT sont faibles, présentent des risques accrus de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Même sans comptes canadiens, des fonds peuvent être envoyés à des institutions financières nationales. On a pu voir des personnes impliquées dans des activités criminelles jouer pour le compte d'autres personnes sur des sites de jeu autorisés et non autorisés, recevant des transferts d'argent par courriel de tiers non liés et faisant référence à des termes liés au jeu.
D'autres activités de jeu au Canada, y compris les courses de chevaux et les paris mutuels et les casinos flottants, sont jugées moins vulnérables au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes que les casinos.
Les hippodromes sont autorisés au niveau provincial et il en existe dans la plupart des provinces canadiennes. Ils sont soit indépendants, soit associés à des casinos physiques. Les paris mutuels sur les courses de chevaux sont autorisés et réglementés par l'Agence canadienne du pari mutuel, qui a pour mandat de maintenir l'intégrité des paris mutuels au Canada, mais n'a pas de mandat lié à la LRPC/FTA. Ce secteur est de faible importance et en déclinNote de bas de page 202. Les paris sur les courses de chevaux peuvent se faire en espèces (en personne), sur un compte de paris (en personne ou en ligne) ou par d'autres moyens, et les relations d'affaires sont généralement à court terme et transactionnelles.
Les paris sur les navires de croisière internationaux sont limités aux eaux internationales. Il n'y a pas de croisiéristes connus qui offrent des jeux de hasard dans les limites territoriales du Canada. En outre, contrairement à ce qui se passe dans d'autres pays, les voyages organisés pour joueurs VIP qui acceptent les mises élevées pour les clients étrangers ne représentent pas un risque notable de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes au Canada.
Mesures prises en matière de réglementation, de surveillance et d'application de la loi
Tous les casinos physiques et les casinos en ligne réglementés à l'échelle provinciale au Canada sont assujettis à des mesures de contrôle réglementaire en matière de LRPC/FAT en vertu de la LRPCFAT et sous la supervision de CANAFE. Ces casinos doivent également être autorisés et réglementés en vertu des lois provinciales.
CANAFE communique régulièrement avec chaque groupe ou casino provincial et diffuse des renseignements sur les risques touchant le secteur. Les casinos sont représentés par une présidence tournante des organismes de réglementation provinciaux au sein du Comité consultatif sur le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes et des partenariats public-privé ont été noués avec le secteur, comme le projet Athena et le projet Dolus (jeu en ligne).
Les résultats de l'examen de surveillance de CANAFE indiquent que la majorité des casinos traditionnels ont mis en œuvre des programmes de formation continue et que les employés comprennent leurs obligations en vertu de la LRPCFAT, et notamment lorsqu'il s'agit de s'assurer de connaître la source des fonds et de signaler toute activité suspecte à CANAFE. Cependant, des lacunes ont été relevées en ce qui concerne les exigences relatives à la connaissance du client et à la qualité et à la rapidité des profils des clients. La conformité à la LRPCFAT s'est renforcée grâce au coup de projecteur mis sur le secteur par la Commission Cullen. La Colombie-Britannique a renforcé l'autorité de son organisme de réglementation des jeux et a mis en place des mesures préventives pour renforcer la vigilance à l'égard des clients, la surveiller les transactions et réduire les activités à haut risqueNote de bas de page 203.
La surveillance des casinos en ligne par CANAFE n'en est qu'à ses débuts, et les premières observations indiquent que la qualité des profils d'identification des clients, en particulier concernant la profession des clients, peut être améliorée. Ces renseignements sont essentiels pour évaluer les risques et détecter les activités de jeu suspectes.
Les paris mutuels et les hippodromes ne sont pas assujettis aux obligations de la LRPCFAT. Cependant, les hippodromes imposent des limites aux paris en espèces aux terminaux (1 000 $), la tenue de registres pour les paris de grande valeur et des exigences d'enregistrement de compte pour les paris en ligne sur les courses de chevaux, ce qui atténue les vulnérabilités au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes.
L'Alliance de lutte contre le financement illicite de la Colombie-Britannique (ACFI-C.-B.) est un partenariat d'échange de renseignements financiers de la GRC composé de 36 organismes publics et privés. Sa mission est d'échanger légalement des renseignements pour protéger l'intégrité économique de la Colombie-Britannique par la prévention, la détection et la perturbation des activités financières illicites. L'ACFI-C.-B. est née du projet Athena, un partenariat public-privé lancé par la GRC en 2019 pour mieux lutter contre le recyclage des produits de la criminalité par l'intermédiaire des casinos et des banques clandestines.
L'Alerte opérationnelle de 2019 sur le recyclage des produits de la criminalité au moyen de stratagèmes bancaires clandestins liés aux casinos et les Indicateurs actualisés de 2023 : Le recyclage des produits de la criminalité au moyen de stratagèmes bancaires clandestins de CANAFE aide les entreprises à repérer les opérations douteuses qui pourraient être liées à des blanchisseurs d'argent professionnels et à des organisations de recyclage des produits de la criminalité.
CANAFE a transmis 42 communications de renseignements financiers exploitables sur 88 sujets en 2023-2024, venant ainsi soutenir des enquêtes sur le recyclage des produits de la criminalité menées par les services de police et les organismes responsables de l'application de la loi du Canada associés à l'ACFI-C.-B.
Négociants en métaux précieux et pierres précieuses
Vulnérabilités au RPC/FAT des négociants en métaux précieux et pierres précieuses (élevées) : Le Canada compte un grand nombre de négociants en métaux précieux et pierres précieuses (NMPPP) situés dans tout le pays, allant de très petites entreprises unipersonnelles à de grandes multinationales. Les activités de marché de ce secteur sont larges et comprennent notamment l'extraction et l'exploitation minière, la fabrication, le raffinage, la vente en gros et au détail, les marchés des métaux précieux ainsi que les prêteurs sur gages. La diversité des modèles d'affaires, des produits et des modes de prestation entraîne des niveaux différents de complexité des transactions et une vulnérabilité inhérente au recyclage des produits de la criminalité dans le secteur. Les modèles d'affaires liés à la vente en gros et aux investissements, comme les marchés des métaux précieux, sont généralement les aspects les plus complexes et les plus vulnérables du secteur.
Les métaux précieux comprennent l'or, l'argent, le palladium et le platine. Il peut s'agir de pièces de monnaie, de barres, de lingots, de granules ou d'autres formes similaires.
Les pierres précieuses comprennent les diamants, les saphirs, les émeraudes, les tanzanites, les rubis et les alexandrites.
Les bijoux s'entendent des objets faits de métaux précieux, de pierres précieuses ou de perles destinés aux parures personnelles.
Les NMPPP sont facilement accessibles aux clients canadiens par l'intermédiaire de détaillants traditionnels dans les quartiers commerciaux, ainsi que par l'intermédiaire de sites Web de vente au détail et de marchés en ligne pour les achats personnels. Dans certains cas, les NMPPP canadiens sont accessibles aux clients internationaux, en particulier par l'intermédiaire de ventes personnelles en ligne ou de modèles d'affaires d'importation et d'exportation en gros. Bon nombre de NMPPP mènent un volume élevé d'opérations en lien avec des produits de grande valeur, dont certains sont des produits de base qui sont vulnérables au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes. La vulnérabilité la plus élevée est accordée aux métaux précieux comme l'or, sous des formes qui dérivent en grande partie leur valeur du métal sous-jacent, comme des barres ou des lingots, et les diamants, qui sont davantage marchandisés que d'autres pierres précieuses. Les vulnérabilités de ces produits découlent de leur valeur élevée, de leur liquidité potentiellement élevée, de leur traçabilité limitée et de leur facilité de transport. Ces produits sont également négociables dans le monde entier et peuvent être échangés contre de l'argent, des biens ou des services, ou encore utilisés comme monnaie de rechange.
Les bijoux finis de grande valeur présentent également certaines vulnérabilités, notamment du fait qu'ils sont achetés en tant que produits de luxe dans le cadre d'un mode de vie criminel. Cependant, leur niveau de vulnérabilité est en général inférieur à celui des métaux et des pierres marchandisés. En effet, la revente des bijoux finis entraîne une perte de leur valeur, ce qui en fait une option peu attrayante pour la conservation et le transfert de valeur. À l'extrémité inférieure du spectre de vulnérabilité se trouvent les bijoux finis de faible valeur vendus au détail, qui sont généralement achetés pour un usage personnel et ne constituent pas des mécanismes efficaces de transfert de valeur.
Les NMPPP entretiennent des relations principalement transactionnelles avec leurs clients, et il existe des occasions pour les clients d'effectuer des opérations au comptant avec un niveau d'anonymat élevé. On croit aussi que le profil de clients comprend toujours des clients à risque élevé, notamment ceux qui sont dans des entreprises ou des professions vulnérables. Il s'agit d'un secteur facilement accessible, autant au pays qu'à l'étranger, où des clients à risque élevé peuvent acheter des produits de grande valeur au comptant de manière relativement anonyme. Un risque supplémentaire lié aux administrations concernées se pose pour les NMPPP qui importent des métaux et des pierres précieuses bruts ou non raffinés pour la vente, comme les raffineurs, les fabricants et les grossistes.
Mesures prises en matière de réglementation, de surveillance et d'application de la loi
Les NMPPP sont assujettis à des mesures de contrôle réglementaire en matière de LRPC/FAT en vertu de la LRPCFAT et sous la supervision de CANAFE. Aux fins de la LRPCFAT, un NMPPP est une personne ou une entité qui achète ou vend des métaux précieux, des pierres précieuses ou des bijoux dans le cadre de ses activités commerciales. Des obligations réglementaires sont déclenchées lorsque le NMPPP effectue l'achat ou la vente de métaux précieux, de pierres précieuses ou de bijoux pour un montant de 10 000 $ ou plus.
Le secteur des NMPPP participe à divers forums de consultation au niveau fédéral, y compris le Comité consultatif sur le blanchiment d'argent et le financement des activités terroristes, où des renseignements sont échangés sur les risques, les tendances et les mesures d'atténuation en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. CANAFE a également publié des orientations et des bulletins spéciaux sur les risques propres au secteur afin de faciliter l'atténuation des risques et la déclaration, et a pris diverses mesures d'application de la loi contre des entités actives dans le secteur au cours des dernières annéesNote de bas de page 204.
En 2022, dans le cadre du projet Prospecteur, le Service de police de la Ville de Montréal a démantelé un réseau organisé impliqué dans la production de cannabis et le recyclage des produits de la criminalité derrière un stratagème de transformation et de commerce de l'or. Le stratagème de commerce de l'or à lui seul a généré plus de 31 millions de dollars, qui ont été réinvestis dans d'autres stratagèmes frauduleux. L'enquête a également mis au jour un réseau de production et de vente de cannabis illégal. Dans la foulée du projet Prospecteur, des accusations ont été portées contre 28 personnes pour fraude, recyclage des produits de la criminalité et production et distribution de cannabis, et il y a eu d'importantes saisies de produits de la criminalité, notamment de l'or (valeur estimée à 225 000 $), des montres et des bijoux (valeur estimée de 1 866 459 $) et de l'argent comptant (865 465 $)Note de bas de page 205.
Entreprises d'importation et d'exportation
Vulnérabilités au RPC/FAT des entreprises d'importation et d'exportation (élevées) : On compte environ 215 000Note de bas de page 206 entreprises d'importation et d'exportation de diverses tailles en activité au Canada, dont les activités sont d'une complexité et d'une envergure diverses. Les sociétés d'importation et d'exportation facilitent le commerce de biens et de services au-delà des frontières géographiques. Il existe plusieurs modèles d'affaires dans ce domaine : par exemple, certaines jouent le rôle d'intermédiaire entre deux entités et d'autres achètent directement des biens vendus à l'étranger. Les entreprises d'importation et d'exportation se distinguent des entreprises de courtage en douane en ce sens qu'elles sont généralement certifiées par un organisme frontalier ou un autre organisme gouvernemental, comme l'ASFC au Canada, et facilitent le processus d'expédition et de livraison plutôt que de s'occuper simplement du processus douanier.
Les entreprises d'importation et d'exportation opèrent selon divers niveaux de complexité pour faciliter les transactions internationales, en tenant compte des règles du commerce international pour le type de produit donné, des accords de libre-échange, des règlements sur les licences et les douanes, des modes de transport, de l'assurance transport et du risque de défaut de la contrepartie.
Les sociétés d'importation et d'exportation peuvent être créées et maintenues avec une relative facilité par les résidents et les non-résidents du Canada. Contrairement au cadre réglementaire régissant l'enregistrement d'autres entités frontalières, comme les courtiers en douane, les transporteurs et les transitaires, le processus d'enregistrement des sociétés d'importation et d'exportation est relativement simple et peut être facilement exploité. Comme pour d'autres secteurs, les vulnérabilités que représente ce secteur sont accrues dans les cas où des complices criminels peuvent prendre le contrôle de l'entreprise pour faciliter la fraude commerciale ou le recyclage des produits de la criminalité de nature commerciale.
Le rôle de ces entreprises en tant que moteur du commerce international crée des occasions d'abuser des chaînes commerciales mondiales et des institutions financières par le recyclage des produits de la criminalité de nature commerciale, et de dissimuler ces activités en masquant les véritables parties aux opérations commerciales, ainsi que la source des fonds. Leur participation potentielle en tant qu'intermédiaires à la chaîne commerciale crée des couches de complexité et d'anonymat qui peuvent être exploitées pour masquer l'identité du véritable importateur ou exportateur sous-jacent. Par exemple, les sociétés d'importation et d'exportation peuvent dissimuler les véritables parties à un régime de recyclage des produits de la criminalité de nature commerciale à l'aide de l'opacité de la propriété effective. Une autre méthode clé consiste à échelonner les paiements pour les marchandises par l'intermédiaire de tiers non liés, souvent basés dans d'autres pays sans lien apparent avec l'opération.
Les marchandises peuvent également être expédiées par des itinéraires alambiqués, y compris via les quelque 7 000 zones économiques spéciales (ZES) qui existent aujourd'huiNote de bas de page 207, pour dissimuler à la fois l'origine et la destination des marchandises, ainsi que les contreparties au commerce. L'absence de règlements stricts et de transparence des ZES qui sont bénéfiques pour les entreprises légitimes les rend également très attrayantes pour les acteurs illicites, qui profitent de cette surveillance allégée pour recycler les produits de la criminalité et financer les activités terroristes. Les pays où les taux de recyclage des produits de la criminalité de nature commerciale sont élevés sont souvent situés dans des plaques tournantes situées le long des corridors commerciaux internationaux et présentant une forte concentration d'entreprises d'importation et d'exportation (p. ex., Chine, Hong Kong, Émirats arabes unis).
Vulnérabilités au RPC/FAT des courtiers en douane et des transitaires (moyennes) : Au total, 3 172 transitaires et 356 courtiers en douane exercent leurs activités au Canada. Les transitaires ne transportent pas directement les marchandises; ils offrent une expertise dans la navigation de la composante logistique et la passation de marchés avec les transporteurs en vue d'expédier des marchandises de l'autre côté de la frontière par divers modes de transport (p. ex., transport maritime, ferroviaire, aérien). Les courtiers en douane sont des fournisseurs de services autorisés qui obtiennent, préparent et soumettent des renseignements et des documents sur l'importation et l'exportation de marchandises commerciales à des services douaniers comme l'ASFC afin d'accélérer le processus de dédouanement.
La portée des services et des activités offerts par les transitaires est beaucoup plus étendue que ce que les courtiers en douane offrent. En effet, les transitaires facilitent la circulation des marchandises des deux côtés de la frontière.
Dans l'ensemble, les deux entités peuvent agir comme facilitateurs du recyclage des produits de la criminalité de nature commerciale, car elles peuvent tirer parti de leurs connaissances de la logistique commerciale pour contrôler et diriger des opérations de recyclage des produits de la criminalité de nature commerciale, tout en dissimulant leur rôle aux organismes responsables de l'application de la loi en étant des intermédiaires plutôt que des parties à l'origine des opérations commerciales suspectes.
Mesures prises en matière de réglementation, de surveillance et d'application de la loi
L'ASFC est chargée de fournir des services frontaliers intégrés qui appuient les priorités en matière de sécurité nationale et de sécurité publique et facilitent la libre circulation des personnes et des marchandises. L'ASFC est notamment responsable de l'administration de la partie 2 de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, qui exige la déclaration des mouvements transfrontaliers d'espèces ou d'instruments monétaires d'une valeur de 10 000 $ ou plus et de toute saisie connexe. Le transport d'espèces en vrac est l'un des principaux moyens de recyclage des produits de la criminalité.
Le rôle de l'ASFC dans l'atténuation des vulnérabilités du Canada en matière de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes a été élargi en avril 2025 lorsque la partie 2.1 (Déclaration des marchandises) de la LRPCFAT et son règlement connexe sont entrés en vigueur. La partie 2.1 de la LRPCFAT oblige les importateurs et les exportateurs (ou leurs représentants) à attester de la véracité, de l'exactitude et de l'exhaustivité de leurs documents douaniers aux fins de LRPC/FAT. Par conséquent, le mandat de l'ASFC concernant la conformité en matière de LRPC/FAT s'est élargi au-delà de la simple déclaration des espèces et des instruments monétaires pour intégrer le commerce transfrontalier de marchandises. Les nouveaux pouvoirs de l'ASFC comprennent la capacité de saisir et de confisquer des marchandises, ou d'appliquer des sanctions pécuniaires équivalentes, lorsqu'elle estime que ces envois sont utilisés comme prétexte pour transférer des flux financiers illicites. L'ASFC, dans la division du Centre de lutte contre la criminalité financière frontalière mettra sur pied un nouveau groupe d'enquêteurs sur responsable de la conformité avec la LRPCFAT ainsi qu'une unité de transparence commerciale axée sur l'analyse des données pour appuyer son nouveau mandat en la matière.
En 2023, la GRC, avec l'aide de l'ASFC, du Service de police d'Ottawa et des autorités colombiennes, a démantelé un GCO basé à Ottawa responsable de l'importation d'importantes cargaisons de cocaïne au Canada. On a déterminé qu'une entreprise canadienne utilisait des conteneurs maritimes pour faire passer de la drogue de la Colombie au Canada. Cette opération a permis d'éviter l'entrée au Canada de 52 kilogrammes de cocaïne, d'une valeur marchande comprise entre 1,4 et 1,7 million de dollars, ainsi que des armes à feu. Quatre personnes qui cherchaient à tirer profit de la vente de drogues illicites ont été accusées d'infractions au Code criminel et à la Loi réglementant certaines drogues et autres substancesNote de bas de page 208.
En 2020, à la suite d'une enquête de 11 mois, la GRC a identifié un GCO impliqué dans le trafic de grandes quantités de drogues illégales au Canada et lié à des activités illégales d'importation et d'exportation. Au total, 14 personnes ont été arrêtées pour une centaine d'accusations combinées. Des centaines de kilogrammes de drogues illégales, 369 000 $ en espèces et 10 armes à feu ont été saisis. Cinq propriétés et cinq véhicules ont également été confisquésNote de bas de page 209.
Secteur des organismes à but non lucratif
Vulnérabilités au FAT des organismes à but non lucratif (moyennes) : Les OBNL jouent un rôle essentiel dans la prestation de services essentiels, l'aide humanitaire et le soutien vital aux personnes dans le besoin, qui comprennent souvent des personnes vivant dans des communautés marginalisées ou excluesNote de bas de page 210. Le secteur des OBNL est très divers et les risques de vulnérabilité aux abus terroristes varient d'une entité à l'autre.
Le secteur des OBNL au Canada compte environ 246 000 organismes. Cependant, la partie du secteur canadien sans but lucratif qui collecte et qui verse des fonds, et qui pourrait donc être vulnérable face au financement des activités terroristes, compte moins d'organismes. Ces organismes représentent la majorité des 85 518 organismes de bienfaisance enregistrés au Canada, et seulement un petit sous-ensemble des quelque 160 000 OBNL exonérés d'impôt.
Les organismes qui exercent leurs activités dans le secteur des OBNL au Canada ont des structures d'entreprise relativement simples avec de faibles transactions transfrontalières. Le profil de la clientèle du secteur est principalement composé des bénéficiaires des services fournis, ce qui présente de faibles risques en matière de financement des activités terroristes. Le profil de la clientèle ne compte que peu très peu de clients à risque élevé, voire aucun et, si tel était le cas, les clients ou les bénéficiaires des activités des OBNL n'auraient qu'une capacité limitée à influencer l'utilisation des ressources de l'organisme. De plus, la plupart des acteurs du secteur se livrent à des activités nationales et sont assujettis à une surveillance exigeant la tenue de documents et la transparence publique, ce qui limite la capacité du secteur à effectuer des transactions anonymes par des voies non traditionnelles.
Le secteur des OBNL joue un rôle clé dans la société canadienne. Cependant, certaines caractéristiques et certains services du secteur des OBNL qui jouent un rôle déterminant dans le bien-être de la société peuvent également être exploités par des acteurs malveillants à des fins illégitimes. Plus précisément, les organismes qui entreprennent les activités suivantes sont les plus vulnérables aux abus :
Au Canada, le terme « organisme à but non lucratif » (OBNL) comprend, aux fins de l'impôt sur le revenu, les OBNL exonérés d'impôt et les organismes de bienfaisance enregistrés.
Les OBNL exonérés d'impôt comprennent les clubs, les sociétés ou les associations qui ne sont pas des organismes de bienfaisance et qui sont exploités exclusivement à des fins de bien-être social, d'amélioration civique, de plaisir ou de loisirs, ou à toute fin autre que le profit.
Un organisme de bienfaisance enregistré désigne un organisme qui est constitué et exploité exclusivement à des fins de bienfaisance et qui consacre ses ressources à ses propres activités de bienfaisance ou qui effectue des versements admissibles et qui agit dans un intérêt public.
- Les organismes qui exercent leurs activités dans des administrations à risque élevé, comme celles où l'on sait que des groupes terroristes sont actifs, où des fonds pour des groupes terroristes sont générés de façon constante ou qui ont été désignées par le GAFI comme présentant des lacunes stratégiques dans leurs cadres de LRPC/FAT. Les organismes dont les activités peuvent répondre aux besoins opérationnels des auteurs de menace sont particulièrement vulnérables à l'exploitation fonctionnelle, notamment par l'usage abusif des programmes et le détournement de fonds.
- Les organismes qui entreprennent des activités à l'échelle nationale qui, quelle que soit la nature réelle de leurs activités, sont vulnérables aux abus en raison de leur capacité à atteindre certaines communautés ou groupes de communautés que les acteurs de la menace ciblent pour obtenir sympathie et soutien, notamment les communautés ayant des liens avec des régions de conflit où opèrent des groupes terroristes.
Les typologies associées à l'exploitation abusive des OBNL comprennent : le détournement (ou « écrémage ») des fonds recueillis à des fins humanitaires légitimes afin de les réorienter vers des activités terroristes (à l'insu ou non de l'OBNL ou des donateurs); l'exploitation de programmes financés par des OBNL afin de créer (sciemment ou non) un environnement de soutien aux efforts de recrutement terroriste; une représentation fausse, par laquelle des organismes ou des individus exploitent des causes caritatives pour recueillir faussement des fonds pour ces causes, mais utilisent plutôt les sommes collectées pour soutenir le terrorisme; l'utilisation d'OBNL légitimes comme source de revenus par l'intermédiaire de taxes imposées par une entité terroriste active dans la région où l'OBNL exerce ses activités.
Bien que les caractéristiques communes des OBNL puissent les exposer davantage aux risques de financement des activités terroristes, ces éléments doivent être traités avec prudence. L'utilisation de caractéristiques larges pour généraliser les conclusions sur le risque dans divers sous-groupes d'OBNL peut ne pas refléter le risque réel. Ces caractéristiques devraient fournir un point de départ pour l'élaboration de profils de risque plus nuancés pour les sous-groupes d'OBNL.
Bien que certaines activités des OBNL puissent présenter des risques potentiels d'abus pour le financement des activités terroristes, des politiques trop restrictives visant à protéger les systèmes financiers du Canada contre de tels abus peuvent avoir des conséquences imprévues. Certains OBNL ont fait part de difficultés d'accès aux services financiers pour soutenir leurs activités. L'exclusion financière, ou atténuation des risques, se produit lorsque les institutions financières interrompent ou limitent leurs relations d'affaires avec des clients ou des catégories de clients pour éviter les risques, plutôt que de les analyser ou de les gérer.
L'atténuation des risques peut avoir des effets négatifs importants. Elle peut notamment entraver la prestation d'une aide humanitaire réelle et pousser les clients à utiliser des systèmes informels de transfert de valeur à haut risque et non supervisés, ou encore à recourir à des passeurs de fonds, ce qui peut engendrer des lacunes dans la visibilité de ces fonds et les rendre plus vulnérables aux abus terroristes. Les institutions financières sont responsables de la gestion de leur exposition au risque et de leur tolérance au risque et peuvent déterminer que certains clients présentent des risques inacceptables. Cependant, l'évaluation du risque au cas par cas peut faciliter la détermination d'un équilibre entre la possibilité pour les clients d'utiliser les systèmes financiers réglementés et la mise en place de mesures d'atténuation efficaces pour se protéger contre le financement des activités terroristes.
Mesures prises en matière de réglementation, de surveillance et d'application de la loi
Au Canada, les OBNL, y compris les organismes de bienfaisance enregistrés et les organismes sans but lucratif exonérés d'impôt, sont assujettis à une surveillance administrative générale, en particulier en ce qui concerne la constitution en société ou le statut fiscal, ce qui contribue à atténuer le risque de financement des activités terroristes auxquels font face les OBNL vulnérables.
Le petit sous-ensemble du secteur qui est exposé aux risques de financement des activités terroristes fait l'objet d'une surveillance administrative et de mesures ciblées d'application de la loi par la Division de la revue et de l'analyse de l'ARC, laquelle insiste sur les risques d'exploitation à des fins terroristes auxquelles se heurtent les organismes de bienfaisance enregistrés.
Les organismes de bienfaisance enregistrés et les OBNL exonérés d'impôt qui travaillent dans des administrations à risque élevé peuvent également être assujettis à des mesures supplémentaires de lutte contre le FAT prises par Affaires mondiales Canada lorsque, par exemple, ils demandent des subventions gouvernementales pour soutenir l'aide humanitaire ou appuyer des travaux de développement international. De plus, en vertu du nouveau régime d'autorisation du CanadaNote de bas de page 211, les organismes de bienfaisance enregistrés et les organismes sans but lucratif exonérés d'impôt qui reçoivent des autorisations pour se soustraire à la responsabilité pénale de certaines activités qui entraîneraient un avantage inévitable pour un groupe terroriste peuvent être tenus de respecter les exigences de déclaration ou d'autres conditions imposées par Sécurité publique Canada.
Les risques auxquels se heurtent d'autres OBNL exonérés d'impôt sont gérés en tirant parti de l'éventail des activités entreprises par les organismes chargés de la sécurité nationale et d'autres partenaires qui appuient plus largement les efforts de lutte contre le FAT. Ces activités comprennent les approches administratives, comme la réglementation fédérale et provinciale de la constitution en sociétés des OBNL, les efforts généraux de surveillance et de mise en conformité déployés par l'ARC en matière de réglementation fiscale, ainsi que les enquêtes criminelles et les activités de collecte de renseignements menées par les organismes responsables de l'application de la loi.
Ensemble, ces mécanismes de surveillance aident le Canada à appliquer des mesures d'atténuation ciblées et proportionnées aux organismes des secteurs les plus vulnérables aux abus liés au financement des activités terroristes, conformément à l'approche fondée sur le risque.
Le gouvernement collabore avec le secteur des OBNL sur les risques d'abus par l'intermédiaire du Comité consultatif sur le secteur de la bienfaisance de l'ARC et sur une base ponctuelle par l'intermédiaire des ministères susmentionnés. De plus, en 2024, le gouvernement a lancé de nouveaux dialogues interministériels avec le secteur des OBNL afin d'approfondir la sensibilisation, d'améliorer la communication et d'aider à réduire les risques de recyclage des produits de la criminalité, de financement des activités terroristes et de contournement des sanctions. L'ARC tient à jour des pages Web pour sensibiliser le secteur des OBNL (et le public) à propos des risques d'abus terroristes. Ces pages Web peuvent s'avérer utiles pour mieux comprendre comment les terroristes exploitent abusivement les OBNL, pour cerner les risques liés aux OBNL et pour comprendre les mesures que les OBNL peuvent prendre pour réduire les risques auxquels ils peuvent se heurter. Voir Sensibiliser les organismes de bienfaisance à l'abus à des fins terroristes.
Annexe A : Méthodologie
Cadre et portée de l'évaluation de 2025
Le rapport de 2025 a été coordonné par le ministère des Finances Canada, avec l'appui d'un groupe de travail spécialisé composé d'experts en renseignement, en surveillance et en application de la loi, coprésidé par CANAFE.
Les conclusions du rapport de 2025 ont été éclairées et validées par des consultations menées auprès d'acteurs gouvernementaux et d'intervenants externes, y compris les ministères et les organismes fédéraux exerçant leurs activités en dehors du régime de LRPC/FAT du Canada, les gouvernements provinciaux et territoriaux, le secteur privé et les organismes à but non lucratif.
Le modèle d'évaluation de base visant à cerner et à comprendre les risques inhérents de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes ainsi que leurs répercussions relatives au Canada a été élaboré en 2015 et appliqué dans les rapports de 2015 et de 2023. Le modèle d'évaluation des risques repose sur le fait que le risque est une fonction de trois composantes : les menaces, les vulnérabilités inhérentes et les conséquences. Le risque est considéré comme une fonction de la probabilité que les menaces exploitent des vulnérabilités inhérentes afin de recycler des produits illicites ou de financer le terrorisme, ainsi que des conséquences associées à une telle éventualité.
L'évaluation de 2025 s'appuie sur ce modèle d'évaluation de base en introduisant diverses améliorations méthodologiques, y compris une perspective axée sur le risque résiduel, afin de suivre les pratiques exemplaires internationales et de fournir une compréhension plus nuancée du risque dans le contexte canadien.
Menace : Personne ou groupe ayant l'intention de recycler des produits de la criminalité ou de financer le terrorisme, ou pouvant servir de facilitateur à cette fin.
Vulnérabilités inhérentes : Propriétés d'un secteur, d'un produit ou d'un service, d'une voie de distribution, d'une clientèle, d'une institution, d'un système, d'une structure ou d'une administration que des auteurs de menace peuvent exploiter dans le but de recycler des produits de la criminalité ou de financer le terrorisme.
Perspective axée sur le risque résiduel : Analyse des mesures d'atténuation déployées par les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, les organismes de surveillance, les organismes responsables de l'application de la loi et le secteur privé pour réduire les vulnérabilités inhérentes au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes d'un secteur d'activité, d'une profession ou d'un produit financier.
Probabilité : Probabilité que des menaces de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes exploitent des vulnérabilités inhérentes.
Conséquences : Préjudice causé à une société, à une économie et à un gouvernement par le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, y compris la facilitation d'activités criminelles et terroristes.
Évaluation des menaces de RPC/FAT et des vulnérabilités inhérentes au RPC/FAT
Le modèle national d'évaluation des risques du Canada évalue séparément les menaces de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes. Bien qu'elles se chevauchent parfois, ces activités criminelles sont fondamentalement différentes. En revanche, l'évaluation des vulnérabilités n'est pas différenciée, car les menaces de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes tendent à exploiter le même ensemble de caractéristiques vulnérables des secteurs d'activité et des professions, notamment dans les produits et services qu'ils offrent, pour recycler les produits de la criminalité ou financer le terrorisme.
L'évaluation des menaces et des vulnérabilités comprend une analyse rigoureuse et systématique de données qualitatives et quantitatives provenant de diverses sources, y compris des observations des organismes responsables de l'application de la loi, des autorités fiscales et frontalières, des renseignements financiers et criminels, des données des secteurs public et privé ainsi que des connaissances tirées de collaborations internationales sur les risques, les méthodes et les tendances en matière de recyclage des produits de la criminalité par l'intermédiaire de réseaux tels que le GAFI, le G-7, le-20, le J5, les unités de renseignement financier du Groupe Egmont et l'Organisation mondiale des douanes.
Les renseignements sur les menaces et les vulnérabilités sont analysés par des experts en la matière ayant des perspectives diverses et issus de l'ensemble du régime de LRPC/FAT du Canada, y compris des professionnels des politiques, du renseignement stratégique et tactique, de l'application de la loi, de la sécurité nationale, du recouvrement d'actifs et des poursuites. Ces experts travaillent ensemble pour cerner les tendances, les évolutions et les typologies émergentes et éclairer les évaluations s'agissant de la pertinence, de la nature et de l'étendue des menaces et des vulnérabilités liées au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes dans le contexte canadien.
Compte tenu de la nature clandestine des activités criminelles, il est difficile de trouver des données quantitatives pour certaines évaluations des menaces et des vulnérabilités. Pour tenir compte de ces limites, les experts en la matière attribuent également des niveaux de confiance aux constatations de chaque évaluation.
Principaux changements au rapport de 2025
Le rapport de 2025 conserve les principes de base du modèle d'évaluation de 2015 tout en apportant les améliorations méthodologiques suivantes aux critères d'évaluation des menaces et des vulnérabilités afin d'obtenir une image plus complète et nuancée du risque :
Évaluation des menaces liées au recyclage des produits de la criminalité :
- Par rapport à l'évaluation des risques de 2015 et de 2023, le rapport de 2025 attribue des cotes de risque à des ensembles plus consolidés de catégories distinctes de menaces liées au recyclage des produits de la criminalité. Il améliore en outre la clarté de l'évaluation en faisant la distinction entre les menaces et leurs auteurs ou facilitateurs. Cette évolution donne un portrait plus précis et plus complet de l'environnement des menaces de recyclage des produits de la criminalité au Canada.
- Le modèle d'évaluation des menaces de 2025 a été recalibré afin de réduire le chevauchement entre les critères d'évaluation des menaces liées au recyclage des produits de la criminalité et d'accorder une plus grande importance au critère lié à l'estimation des produits de la criminalité générés. Cette amélioration permet une répartition plus large des cotes de menace, allant d'élevée à faible, fournit une représentation plus précise et réaliste du paysage de la menace et permet une hiérarchisation plus efficace pour les intervenants du domaine politique, du domaine de l'application de la loi et du secteur privé.
Évaluation des menaces liées au financement des activités terroristes :
- L'évaluation des menaces liées au financement des activités terroristes de 2025 met l'accent sur un plus petit nombre d'acteurs du financement des activités terroristes ayant un lien direct avec le Canada. Elle met ainsi en évidence ceux qui sont les plus actifs dans la collecte et le transfert de fonds au Canada et dans le système financier canadien.
- L'analyse du financement des activités terroristes s'articule autour de catégories de menaces à caractère idéologique, politique ou religieux, par opposition aux auteurs de menace individuels, comme dans les évaluations précédentes. Cette approche permet de mieux comprendre les différences et les similitudes qui existent dans les méthodes de financement des activités terroristes entre les différents auteurs de menaces.
Évaluation des vulnérabilités au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes :
- L'évaluation des vulnérabilités de 2025 reste fondée sur les caractéristiques propres à chaque secteur, à chaque profession ou à chaque produit financier que les auteurs de menace peuvent exploiter pour recycler les produits de la criminalité ou financer les activités terroristes. Cette approche souligne la nécessité d'efforts continus en matière d'atténuation des risques.
- Le rapport de 2025 applique une perspective supplémentaire axée sur le risque résiduel afin de mettre en évidence les mesures prises par les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux en matière de politique, de surveillance et d'application de la loi, ainsi que les mesures prises par le secteur privé pour atténuer les vulnérabilités. Cela permettra ainsi de mieux soutenir la hiérarchisation des priorités et de mieux cerner les lacunes résiduelles qui pourraient nécessiter une plus grande attention ou d'autres mesures d'atténuation.
Annexe B : Énoncé sur l'ACS+ et l'inclusion financière
Les crimes financiers ont des répercussions profondes sur la vie et les moyens de subsistance de la population canadienne; ils touchent souvent particulièrement les plus vulnérables de notre société et de l'étranger. Les crimes motivés par l'économie, comme la fraude et le vol, victimisent de manière disproportionnée les femmes, les jeunes, les communautés autochtones, les personnes racisées, les aînés et les nouveaux arrivants. Le gouvernement reconnaît que les mesures de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes peuvent avoir des répercussions variées sur différents groupes de la population canadienne et secteurs d'activité.
Au moment de la rédaction de l'évaluation nationale des risques de 2025, on a soigneusement tenu compte de ces différences afin d'éviter toute conséquence imprévue, en particulier en ce qui concerne les populations et les collectivités vulnérables du Canada, le secteur des organismes de bienfaisance et à but non lucratif et l'inclusion financière. Pour ce faire, des modifications ont été apportées à la méthodologie, comme l'application d'une perspective axée sur le risque résiduel pour obtenir une image plus nuancée du risque dans l'ensemble de l'économie canadienne et le ciblage des évaluations sectorielles sur les secteurs à risque élevé pour veiller à ce que les activités à faible risque ne soient pas indûment touchées. Les contributeurs au rapport ont également suivi une formation sur les préjugés inconscients et se sont servis de renseignements provenant d'un large éventail de sources et d'intervenants pour s'assurer que l'évaluation demeure impartiale et parfaitement documentée. Des détails supplémentaires sur ces efforts sont présentés ci-dessous.
Utilisation d'une perspective axée sur le risque résiduel
Le rapport de 2025 applique une perspective axée sur le risque résiduel afin de mettre en évidence les mesures prises par les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux en matière de politique, de surveillance et d'application de la loi, ainsi que les mesures prises par le secteur privé pour atténuer les vulnérabilités. Cet aspect supplémentaire a pour but de mieux guider les décideurs, les organismes responsables de l'application de la loi, les organismes de surveillance et les entités déclarantes afin qu'ils optimisent leur approche fondée sur les risques en tenant compte des mesures d'atténuation existantes et en mettant l'accent sur les domaines où le risque résiduel de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes est le plus important. L'utilisation d'une telle perspective axée sur le risque résiduel permet de mieux comprendre la vulnérabilité du secteur évalué face au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes.
Une compréhension nuancée du risque résiduel dans un secteur particulier permet d'éviter l'utilisation de pratiques d'atténuation des risques trop larges touchant de manière disproportionnée certains groupes ou certaines communautés au Canada. Pour les institutions financières, l'atténuation des risques fait référence à la pratique qui consiste à interrompre ou à limiter leurs relations d'affaires avec certains clients, ou certaines catégories de clients, afin d'éviter les risques plutôt que de chercher à gérer ces risques. Cette approche peut perturber les entreprises, les organismes à but non lucratif et les groupes d'aide humanitaire, pousser les transactions financières vers la clandestinité et réduire la transparence, augmentant ainsi les risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes.
Évaluations ciblées sur les domaines à risque élevé
Une compréhension plus précise des risques permet aux gouvernements, aux organismes de surveillance, aux organismes responsables de l'application de la loi et au secteur privé de concentrer leurs efforts d'atténuation sur les activités et les organismes qui présentent des risques plus élevés dans un secteur économique donné. En ciblant plus particulièrement ces domaines, les ressources peuvent être affectées de manière appropriée et proportionnée, en évitant une approche unique pour toutes les entités. De ce point de vue, cette approche devrait minimiser les conséquences imprévues et prévenir les répercussions négatives sur les personnes et les communautés qui dépendent des activités légitimes des entités du secteur évalué.
L'engagement du Canada à adopter une approche efficace fondée sur les risques pour lutter contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes est conforme aux pratiques exemplaires internationales. Par exemple, une évaluation plus précise des risques dans le secteur des organismes de bienfaisance et des OBNL du Canada permet de mettre en œuvre des mesures plus ciblées, proportionnées et fondées sur les risques sans perturber ou décourager indûment les activités légitimes des OBNL.
Formation destinée au groupe de travail chargé de l'élaboration de l'évaluation nationale des risques
L'évaluation nationale des risques de 2025 a été coordonnée par Finances Canada en étroite collaboration avec des experts issus des 13 ministères et organismes fédéraux intégrés dans le régime de LRPC/FAT du Canada. Un groupe de travail interministériel spécialisé, coprésidé par Finances Canada et CANAFE, a mené les évaluations des menaces et des vulnérabilités pour le rapport de 2025. Les membres de ce groupe de travail ont suivi des séances de formation obligatoires et facultatives sur l'équité, la diversité et l'inclusion proposées par leurs ministères et organismes respectifs, ainsi que par l'École de la fonction publique du Canada. Ils ont également suivi une formation sur la détection et l'atténuation des préjugés inconscients qui pourraient avoir des conséquences négatives sur leur travail.
Sources de renseignements et statistiques
Les renseignements sur les menaces et les vulnérabilités utilisés dans les évaluations des risques liés au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes proviennent de diverses sources vérifiées et réputées, tant à l'intérieur du gouvernement du Canada qu'à l'extérieur de celui-ci. Le rapport de 2025 intègre des statistiques et des évaluations qualitatives recueillies auprès de partenaires du régime de LRPC/FAT du Canada, d'autorités provinciales et territoriales, du secteur privé, de partenaires internationaux et d'établissements d'enseignement. Finances Canada, le principal partenaire du régime responsable du processus d'évaluation des risques liés au recyclage des produits de la criminalité et au financement des activités terroristes au Canada, continue de travailler avec ses partenaires du renseignement et de la sécurité pour réaffirmer que les évaluations du rapport sont obtenues à l'aide des meilleurs renseignements objectifs dont dispose le gouvernement du Canada en s'appuyant sur diverses sources.
Les nombreux renseignements utilisés pour rédiger ce rapport ont été analysés par un éventail d'experts en la matière spécialisés dans les politiques, le renseignement stratégique et tactique, l'application de la loi, la sécurité nationale, le recouvrement d'actifs et les poursuites.
Consultation auprès des intervenants
Finances Canada a mené de vastes consultations dans le cadre de la rédaction du rapport de 2025, notamment auprès d'organismes fédéraux, de gouvernements provinciaux et territoriaux, d'associations industrielles, d'entreprises, d'universitaires et de représentants du secteur à but non lucratif. L'évaluation nationale des risques de 2025 tient compte des rétroactions et des recommandations recueillies dans le cadre de divers forums de consultation publique, ainsi que des conseils sur les pratiques exemplaires internationales.
Finances Canada demeure déterminé à écouter divers intervenants afin d'améliorer continuellement la méthodologie et le processus d'évaluation et de compréhension des risques de recyclage des produits de la criminalité et de financement des activités terroristes au Canada, ainsi que l'efficacité de l'évaluation nationale des risques du Canada pour appuyer la mise en œuvre de politiques, d'actions et de mesures d'atténuation des risques bien ciblées, proportionnées et efficaces.
Annexe C : Suppléments des partenaires du régime canadien de LRPC/FAT
Centre antifraude du Canada : Rapport annuel 2022
Centre antifraude du Canada : Extorsion
Bulletin du Centre antifraude du Canada : Nouvelles technologies
Bulletin du Centre antifraude du Canada : Méthodes de sollicitation
Centre canadien pour la cybersécurité : Évaluation des cybermenaces nationales 2025-2026.
Service canadien de renseignements criminels : Rapport public sur le crime organisé 2023
Service de police d'Edmonton : Mass Market (mass-marketing fraud) [en anglais seulement]
Agence de la consommation en matière financière du Canada : Fraude par carte de crédit
Agence de la consommation en matière financière du Canada : Fraude par carte de débit
Rapport annuel 2022-2023 de CANAFE : Canadiens en sécurité, économie sûre
Rapport annuel 2023-2024 de CANAFE : Canadiens en sécurité, économie sûre
Alerte opérationnelle de CANAFE : Blanchiment des produits résultant d'arnaques amoureuses
Alerte opérationnelle de CANAFE : Financement d'activités terroristes
Bulletin spécial sur l'activité financière associée au contournement soupçonné des sanctions
Pêches et Océans Canada : Pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN)
Sécurité publique Canada : Entités terroristes inscrites
Gendarmerie royale du Canada : Statistiques relatives à la fausse monnaie canadienne
Statistique Canada : Bulletin Juristat – En bref : La traite des personnes au Canada, 2022
Statistique Canada : Crimes déclarés par la police, certaines infractions, Canada, 2022 et 2023
Annexe D : Liste des principaux acronymes/sigles et abréviations
Acronymes/sigles | Abréviations |
---|---|
CCBAFT | Comité consultatif sur le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme |
PGC | Procureur général du Canada |
IA | Intelligence artificielle |
LRPC | Lutte contre le recyclage des produits de la criminalité |
LRPC/FAT | Lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes |
FAT | Financement des activités terroristes |
GAB | Guichet automatique bancaire |
C.-B. | Colombie-Britannique |
CAD | Dollar canadien |
CAFC | Centre antifraude du Canada |
ACSF | Agence des services frontaliers du Canada |
ACFI-C.-B. | Alliance de lutte contre le financement illicite de la Colombie-Britannique |
RICCO | Réponse intégrée canadienne au crime organisé |
SCRC | Service canadien de renseignements criminels |
COVID-19 | Maladie à coronavirus 2019 |
CPG | Comptable professionnel agréé |
ARC | Agence du revenu du Canada |
ACI | Association canadienne de l'immeuble |
ACVM | Autorités canadiennes en valeurs mobilières |
SCRS | Service canadien du renseignement de sécurité |
FSE | Fournisseur de services aux entreprises |
SCDAS | Stratégie canadienne sur les drogues et autres substances |
FiDé | Finance décentralisée |
NMPPP | Négociants en métaux précieux et pierres précieuses |
RPDC | République populaire démocratique de Corée |
BISN | Banque d'importance systémique nationale |
GAFI | Groupe d'action financière |
ACFC | Agence de la consommation en matière financière du Canada |
IDE | Investissement direct étrangers |
FinCEN | Financial Crimes Enforcement Network |
CANAFE | Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada |
FOPJC | Fédération des ordres professionnels de juristes du Canada |
G7 | Groupe des Sept (Canada, France, Allemagne, Italie, Japon, Royaume-Uni et États-Unis) |
Affaires mondiales Canada (AMC) | Affaires mondiales Canada |
ACS Plus | Analyse comparative entre les sexes plus |
PIB | Produit intérieur brut |
DOI | Dirigeant d'organisation internationale |
PIRBA | Partenariat intégré du renseignement sur le blanchiment d'argent |
FMI | Fonds monétaire international |
EVMI | Extrémisme violent à caractère idéologique |
IRCC | Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada |
PCI | Particulier ayant un contrôle important |
ISDE | Innovation, Sciences et Développement économique Canada |
SITV | Système informel de transfert de valeur |
J5 | Joint Chiefs of Global Tax Enforcement |
SPH | Société de placement hypothécaire |
RPC | Recyclage des produits de la criminalité |
PE | Protocole d'entente |
ESM | Entreprise de services monétaires |
OBNL | Organisation à but non lucratif |
GCO | Groupe criminel organisé |
PPO | Police provinciale de l'Ontario |
BSIF | Bureau du surintendant des institutions financières |
LRPCFAT | Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement d'activités terroristes |
PPV | Personne politiquement vulnérable |
EVCP | Extrémisme violent à caractère politique |
SPPC | Service des poursuites pénales du Canada |
SPAC | Services publics et Approvisionnement Canada |
GCR | Gestion de la conformité réglementaire |
GRC | Gendarmerie royale du Canada |
EVMR | Extrémisme violent à caractère religieux |
LAAPD | Loi sur les activités associées aux paiements de détail |
SWIFT | Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunication |
RPCC | Recyclage des produits de la criminalité de nature commerciale |
FAT | Financement des activités terroristes |
É.-U. | États-Unis |
GABEB | Guichet automatique privé à étiquette blanche |