Folio de l’impôt sur le revenu S6-F4-C1, Fiducies testamentaires au profit de l’époux ou du conjoint de fait

Série 6 : Fiducies

Folio 4 : Fiducies testamentaires

Chapitre 1 : Fiducies testamentaires au profit de l’époux ou du conjoint de fait

Sommaire

Lorsqu’un contribuable décède, il est réputé avoir disposé des immobilisations dont il était propriétaire à ce moment. Cette disposition réputée entraîne des conséquences fiscales. Cependant, il est possible de différer ces conséquences au moyen d’un roulement si les conditions du paragraphe 70(6) sont remplies. Selon l’une des conditions du paragraphe 70(6), l’immobilisation doit être transférée ou distribuée à son époux, à son conjoint de fait ou à une fiducie testamentaire créée au profit de l’époux ou du conjoint de fait.

Le présent chapitre traite des conditions à remplir afin qu’une fiducie se qualifie comme fiducie testamentaire au profit de l’époux ou du conjoint de fait visée au paragraphe 70(6). Il traite également de situations où une fiducie devient contaminée. Le chapitre aborde les conséquences fiscales d’une fiducie contaminée et la façon, le cas échéant, de régulariser une telle fiducie.

Le chapitre traite également d’un report similaire, selon le paragraphe 70(6.1), des conséquences fiscales découlant du paiement réputé de montants en provenance d’un second fonds du compte de stabilisation du revenu net (CSRN) par suite du décès du titulaire du compte.

Enfin, le chapitre souligne quelques conséquences fiscales découlant du décès ultérieur de l’époux ou du conjoint de fait du contribuable.

L’Agence du revenu du Canada (ARC) publie les folios de l’impôt sur le revenu afin de faire connaître ses interprétations et ses positions techniques concernant certaines dispositions législatives en matière d’impôt. En raison de leur caractère technique, les folios sont utilisés principalement par des fiscalistes et d’autres personnes qui s’intéressent à la fiscalité. Bien que les paragraphes d’un chapitre de folio se rapportent à des dispositions législatives en vigueur au moment où ils ont été rédigés (reportez-vous à la section Application), l’information qu’ils contiennent ne saurait remplacer la loi. Le lecteur doit donc considérer les renseignements contenus dans un chapitre à la lumière des dispositions pertinentes de la loi en vigueur pour une année d’imposition donnée.

L’ARC a peut-être publié des directives complémentaires ou des instructions précises en matière de renseignements à produire liées aux sujets abordés dans le présent chapitre. Pour connaître cette information et d’autres sujets qui pourraient vous intéresser, consultez la page Web Formulaires et publications de l’ARC.

Table des matières

Discussion et interprétation

Contexte du paragraphe 70(6)

1.1 Le paragraphe 70(5) prévoit qu’un contribuable est réputé avoir disposé de chacune de ses immobilisations immédiatement avant son décès. Il peut en découler des gains en capital imposables, des pertes en capital déductibles, une récupération des déductions pour amortissement ou des pertes finales. Selon le paragraphe 70(6), ces conséquences fiscales peuvent généralement être différées au moyen d’un roulement dans le cas où, par suite du décès d’un contribuable, les immobilisations sont transférées ou distribuées à son époux, à son conjoint de fait ou à une fiducie créée au profit de l’époux ou du conjoint de fait (fiducie au profit du conjoint).

1.2 Pour que le paragraphe 70(6) s’applique, l’immobilisation transférée ou distribuée à l’époux, au conjoint de fait ou à la fiducie au profit du conjoint doit avoir été dévolue irrévocablement à l’époux, au conjoint de fait ou à la fiducie dans un délai se terminant 36 mois après le décès du contribuable ou, si une demande écrite est présentée au ministre dans ce délai, dans un délai plus long que le ministre considère comme raisonnable dans les circonstances. De plus, selon le paragraphe 248(9.2), l’immobilisation doit être dévolue irrévocablement à l’époux, au conjoint de fait ou à la fiducie au profit du conjoint avant le décès de l’époux ou du conjoint de fait.

1.3 La Loi ne prévoit pas de définition pour l’expression dévolue irrévocablement. En conséquence, il faut interpréter l’expression selon le contexte des dispositions où elle est utilisée. Dans les dispositions législatives auxquelles fait référence le présent chapitre, « dévolue irrévocablement » se rapporte au droit incontestable de propriété d’un bien qui, par suite du décès de son propriétaire, a été transféré à la fiducie au profit du conjoint du contribuable décédé. La question de savoir si un bien a été dévolu irrévocablement à une fiducie au profit du conjoint en est une mixte de fait et de droit.

1.4 Lorsque le paragraphe 70(6) s’applique, l’époux, le conjoint de fait ou la fiducie au profit du conjoint faisant l’acquisition d’une immobilisation, par suite du décès d’un contribuable, l’acquiert généralement au coût du bien pour le contribuable aux fins de l’impôt. Ce montant est également le produit de disposition du bien pour le contribuable décédé, sous réserve de l’alinéa 70(6)d.1). Étant donné que le produit de disposition réputé du bien pour le contribuable décédé est égal à son coût aux fins de l’impôt, il ne devrait en résulter aucun gain en capital imposable, aucune perte en capital déductible, aucune récupération de l’amortissement, ni aucune perte finale au moment du décès. C’est la façon dont s’accomplit le roulement à imposition différée d’une immobilisation selon le paragraphe 70(6).

1.5 Le représentant légal du contribuable décédé peut toutefois choisir, selon le paragraphe 70(6.2), d’appliquer le paragraphe 70(5) plutôt que le paragraphe 70(6) à toute immobilisation du contribuable. En pareil cas, le produit de disposition du bien pour le contribuable décédé et son coût pour l’époux, le conjoint de fait ou la fiducie au profit du conjoint correspondent les deux à la juste valeur marchande (JVM) du bien immédiatement avant le décès. Le choix prévu au paragraphe 70(6.2) doit être fait dans la déclaration de revenus régulière du contribuable décédé pour l’année du décès. Le choix est fait bien par bien et ne peut pas être fait à l’égard de la partie d’un bien seulement.

1.6 Le paragraphe 70(6) peut aussi s’appliquer à la participation dans une société de personnes d’un contribuable décédé qui est transférée ou distribuée à son époux, à son conjoint de fait ou à la fiducie au profit du conjoint. Cependant, si le prix de base rajusté (PBR) de cette participation pour le contribuable est négatif immédiatement avant le décès, l’application du paragraphe 70(6) pourrait n’entraîner qu’un roulement partiel. Pour en savoir plus, consultez les paragraphes 6 et 8 du Bulletin d’interprétation IT-278R2, Décès d’un associé ou d’un associé qui s’est retiré de la société de personnes (archivé).

1.7 Une fiducie au profit du conjoint ne peut pas être une succession assujettie à l’imposition à taux progressifs. Selon la définition que prévoit le paragraphe 248(1), seule une succession peut être une succession assujettie à l’imposition à taux progressifs. Fait à noter, il est précisé dans la version en anglais de la Loi que le terme estate comprend les successions issues du droit civil (paragraphe 248(1)).

1.8 L’époux d’un contribuable désigne la personne à qui le contribuable est marié légalement. De plus, selon le paragraphe 252(3), est assimilé à l’époux d’un contribuable pour l’application du paragraphe 70(6), entre autres dispositions, un autre particulier qui est partie, avec lui, à un mariage nul ou annulable.

1.9 Selon la définition que prévoit le paragraphe 248(1), l’expression conjoint de fait comprend, en ce qui concerne un contribuable à un moment donné, une personne qui à ce moment :

1.10 Selon la définition de conjoint de fait, deux personnes qui commencent à vivre ensemble dans une relation conjugale sont réputées continuer à vivre ainsi jusqu’au moment où, en raison de l’échec de leur relation, elles vivent séparées pendant une période d’au moins 90 jours consécutifs. Une fois cette période de 90 jours passée, la date d’effet du changement de la situation familiale est celle où les deux personnes ont commencé à vivre séparées.

Établissement d’une fiducie testamentaire au profit du conjoint

1.11 Une fiducie au profit du conjoint visée au paragraphe 70(6) est une fiducie créée par le testament d’un contribuable. En vertu de la fiducie, l’époux ou le conjoint de fait doit avoir droit, sa vie durant, à tous les revenus de la fiducie. D’autre part, nulle autre personne que l’époux ou le conjoint de fait ne peut, avant son décès, recevoir ou obtenir de toute autre façon l’usage de toute partie du revenu ou du capital de la fiducie (se reporter aux numéros 1.19 à 1.34).

1.12 Pour qu’une fiducie testamentaire se qualifie comme fiducie au profit du conjoint aux fins du paragraphe 70(6), le contribuable décédé devait résider au Canada immédiatement avant le décès. D’autre part, la fiducie créée par le testament du contribuable décédé doit résider au Canada immédiatement après le moment où le bien a été, par dévolution, irrévocablement acquis par la fiducie. Pour de l’information sur la détermination du statut de résidence d’une fiducie, consultez le Folio de l’impôt sur le revenu S6-F1-C1, Résidence d’une fiducie ou succession.

1.13 Si un testament ne précisait que la valeur totale des biens ou la partie de la succession à transférer à la fiducie au profit du conjoint, le représentant légal pourrait par pouvoir discrétionnaire choisir les biens à transférer. Le testament pourrait également prévoir l’établissement de plus d’une fiducie (par exemple une fiducie au profit du conjoint et une fiducie familiale) et préciser la valeur totale des biens à transférer à chacune, en laissant le représentant légal choisir à sa discrétion les biens à transférer. Dans d’autres cas, le testament pourrait ordonner l’établissement d’une fiducie au profit du conjoint et en fixer les conditions, mais laisser le représentant légal choisir à son entière discrétion la valeur totale et les biens à transférer à la fiducie. En l’absence de toute directive expresse dans le testament, le représentant légal doit répartir les biens de la succession entre les différents bénéficiaires et différentes fiducies selon les lois de l’administration concernée. Les arrangements de ce type n’empêchent pas une fiducie de se qualifier par ailleurs comme fiducie au profit du conjoint. Cependant, il faut s’assurer que l’inclusion de telles directives dans le testament soit valable selon la loi provinciale applicable et que la fiducie au profit du conjoint ait été correctement constituée.

1.14 En ce qui concerne la province de Québec, le paragraphe 248(3) prévoit qu’un usufruit, un droit d’usage ou d’habitation ou une substitution régi par le droit de la province de Québec est réputé être une fiducie aux fins de la Loi. De plus, l’usufruit, le droit d’usage ou d’habitation ou la substitution qui est créé par testament est réputé être une fiducie créée par testament.

1.15 Le paragraphe 248(9.1) s’applique à une fiducie établie par l’ordonnance d’un tribunal rendue relativement à la succession du contribuable en application d’une loi provinciale prévoyant une aide alimentaire aux personnes à charge. Une telle fiducie sera réputée créée par le testament du contribuable et, par conséquent, pourra se qualifier comme fiducie au profit du conjoint si les autres conditions sont remplies. Tel ne serait pas le cas pour une fiducie dont les modalités sont modifiées d’un commun accord entre les bénéficiaires, même si elles le sont en vertu d’une loi portant sur la modification des fiducies. Une fiducie doit se qualifier comme fiducie au profit du conjoint en vertu des modalités initiales du testament et tout changement apporté à celles-ci en vertu d’une telle loi ne rendra pas la fiducie admissible aux dispositions du paragraphe 70(6).

Transfert ou distribution par suite d’un décès

1.16 Selon le paragraphe 248(8), un bien est considéré avoir été transféré ou distribué à un époux, à un conjoint de fait ou à une fiducie en faveur du conjoint, ou avoir été acquis par lui ou la fiducie, par suite du décès d’un contribuable, si le transfert, la distribution ou l’acquisition a été effectué, selon le cas :

1.17 Le paragraphe 248(9) définit les termes abandon et renonciation aux fins du paragraphe 248(8). Pour en savoir plus, consultez les numéros 1.10 à 1.15 du Folio de l’impôt sur le revenu S6-F2-C1, Disposition d’une participation au revenu d’une fiducie.

1.18 Le paragraphe 70(6) s’applique bien par bien. L’époux ou le conjoint de fait d’un contribuable ou la fiducie au profit du conjoint doit recevoir le même bien qui, si le paragraphe 70(5) s’appliquait, serait réputé avoir été disposé par le contribuable immédiatement avant son décès, sous réserve de l’alinéa 70(6)d.1). Un bien substitué transféré à l’époux, au conjoint de fait ou à la fiducie au profit du conjoint ne se qualifierait pas à un tel traitement. Par exemple, si un représentant légal procédait à la disposition des biens de la succession d’une personne décédée afin de transférer le produit de disposition (ou le bien substitué au produit) à une fiducie au profit du conjoint créée par le testament du contribuable décédé, le paragraphe 70(6) ne s’appliquerait pas.

Exigences concernant le revenu et le capital d’une fiducie au profit du conjoint

1.19 Tel que l’indique le numéro 1.11, afin qu’une fiducie se qualifie comme fiducie au profit du conjoint, l’époux ou le conjoint de fait doit avoir droit, sa vie durant, à tous les revenus de la fiducie. D’autre part, nulle autre personne que l’époux ou le conjoint de fait ne peut, avant son décès, recevoir ou obtenir de toute autre façon l’usage de toute partie du revenu ou du capital de la fiducie.

1.20 À cette fin, le paragraphe 108(3) prévoit que le revenu d’une fiducie correspond à son revenu calculé selon les règles de droit applicables aux fiducies, plutôt que selon les dispositions de la Loi, moins certains dividendes. Les dividendes à déduire du revenu de la fiducie sont :

1.21 Par conséquent, une fiducie peut se qualifier comme fiducie au profit du conjoint même si, selon les modalités de la fiducie, ces dividendes ne sont pas payés ou payables à l’époux ou au conjoint de fait.

1.22 Par ailleurs, les montants comme ceux au titre d’un gain en capital imposable (lequel n’a pas la nature d’un revenu selon les règles applicables aux fiducies) qui ne sont pas payés ni payables à l’époux ou au conjoint de fait selon les modalités de la fiducie, ni inclus dans le revenu de l’époux ou du conjoint de fait en vertu d’un choix par un bénéficiaire privilégié, sont forcément imposables pour la fiducie. Ils le sont puisque seul l’époux ou le conjoint de fait peut, sa vie durant, recevoir quelque chose d’une fiducie au profit du conjoint ou faire un choix en tant que bénéficiaire privilégié relativement au revenu de la fiducie.

1.23 Un pouvoir discrétionnaire accordé au fiduciaire lui permettant d’indiquer ce qui constitue du capital ou du revenu ne lui permet pas de convertir du revenu ou une dépense déductible en du capital ou une dépense en capital, et vice-versa. L’ARC n’accepte pas qu’un fiduciaire détermine, à sa discrétion, ce qui constitue du revenu ou du capital.

1.24 Selon le paragraphe 108(4), une fiducie peut se qualifier comme fiducie au profit du conjoint même si elle doit assumer le paiement des montants suivants :

1.25 Pour les années d’imposition débutant après 2016, une fiducie peut aussi se qualifier comme fiducie au profit du conjoint même si un enfant, l’époux ou le conjoint de fait, ou l’ex-époux ou ex-conjoint de fait du contribuable décédé habite un logement qui est un bien appartenant à la fiducie à ce moment, ou qui est relatif à ce bien. Cette règle est applicable pourvu que le logement soit, à l’égard de la fiducie, une résidence principale au sens visé par l’article 54. Pour en savoir plus sur ce que constitue un logement, consultez le numéro 2.7 du Folio de l’impôt sur le revenu S1-F3-C2.

1.26 La seule possibilité de pouvoir entamer le capital ou le revenu d’une fiducie pour favoriser d’autres personnes que l’époux ou le conjoint de fait, avant le décès de ce dernier, suffit à disqualifier une fiducie comme fiducie au profit du conjoint. Une fiducie serait également disqualifiée si son revenu ou son capital pouvait être attribué, à la discrétion du fiduciaire, aux membres de la famille du contribuable décédé du vivant de son époux ou conjoint de fait.

1.27 L’ARC est d’avis que l’expression « a droit à tous les revenus de la fiducie » au sous-alinéa 70(6)b)(i) signifie avoir légalement le droit d’exiger le paiement de ces revenus. Pour qu’un époux ou conjoint de fait ait légalement le droit d’exiger le paiement du revenu d’une fiducie, il doit avoir le pouvoir exclusif de distribuer à son gré le revenu de la fiducie, en tout ou en partie.

1.28 Même si les modalités d’une fiducie précisent que l’époux ou le conjoint de fait est celui qui recevra tout le revenu de la fiducie, il pourrait arriver que ce dernier indique au fiduciaire, par écrit, qu’il ne souhaite pas recevoir ce revenu pour une année en particulier. Le fait que, selon les instructions de l’époux ou du conjoint de fait, la fiducie conserve ce revenu lequel est ensuite ajouté à son capital, ne la disqualifiera pas en soi comme fiducie au profit du conjoint.

1.29 Par ailleurs, malgré toute instruction par l’époux ou le conjoint de fait de conserver le revenu dans la fiducie pour une année d’imposition, le revenu de la fiducie pour l’année serait toujours devenu payable à celui-ci au sens visé au paragraphe 104(24). Par conséquent, un tel revenu serait inclus dans le calcul du revenu de l’époux ou du conjoint de fait pour l’année même si le revenu ne lui était pas payé, sauf si la fiducie a fait un choix selon le paragraphe 104(13.1) pour l’année en cause (sous réserve de la limite prévue au paragraphe 104(13.3)).

1.30 Selon les modalités de la fiducie, le fiduciaire pourrait avoir le droit de restreindre toute partie du revenu de la fiducie pouvant être payée à l’époux ou au conjoint de fait. En pareil cas, l’ARC est d’avis que l’époux ou le conjoint de fait n’aurait pas le droit de recevoir tous les revenus de la fiducie. Cela signifie que la fiducie ne pourrait pas se qualifier comme fiducie au profit du conjoint.

1.31 Une fiducie dont le droit du bénéficiaire au revenu serait limité à un certain pourcentage de la valeur des biens de la fiducie ne pourrait pas se qualifier comme fiducie au profit du conjoint, puisque le bénéficiaire du revenu n’aurait pas le droit de recevoir tous les revenus de la fiducie.

1.32 L’exigence selon laquelle l’époux ou le conjoint de fait doit avoir le droit de recevoir, sa vie durant, tous les revenus de la fiducie doit être interprétée en appliquant le principe de la recette réputée. C’est le cas, entre autres, d’une fiducie dont le revenu est versé selon le testament (ou une disposition du testament visant le versement) à une personne autre que l’époux ou le conjoint de fait, à condition que la somme versée ne serve qu’au profit de ce dernier. Selon le principe de la recette réputée, cela n’empêcherait pas une fiducie de se qualifier comme fiducie au profit du conjoint.

1.33 Selon les modalités d’une fiducie au profit du conjoint, un fiduciaire pourrait avoir le droit d’utiliser le revenu ou le capital de la fiducie afin de financer une police d’assurance-vie que celle-ci détient sur la vie de l’époux ou du conjoint de fait. En pareil cas, une personne autre que l’époux ou le conjoint de fait pourrait obtenir l’usage du capital ou du revenu de la fiducie, ce qui ne respecterait pas le sous-alinéa 70(6)b)(ii). En effet, le paiement de la prime pour la période couverte garantit au bénéficiaire de la police la conservation de son droit de recevoir le produit de l’assurance. Puisque le bénéficiaire de la police ne sera jamais l’époux ou le conjoint de fait, l’ARC est d’avis que la fiducie ne respecterait pas les conditions du sous-alinéa 70(6)b)(ii).

1.34 Le sous-alinéa 70(6)b)(ii) précise que nulle autre personne que l’époux ou le conjoint de fait ne peut, avant le décès de ce dernier, recevoir ou obtenir de toute autre façon l’usage de toute partie du revenu ou du capital de la fiducie au profit du conjoint. La location d’un immeuble à la valeur marchande ou le prêt d’argent aux conditions du marché (y compris un taux d’intérêt du marché, des garanties appropriées et un calendrier de remboursement raisonnable) ne signifie pas, de façon générale, que la personne louant l’immeuble ou empruntant l’argent a reçu ou obtenu l’usage de ce bien au sens visé par cette condition.

Fiducie au profit du conjoint contaminée

1.35 Une fiducie créée par le testament d’un contribuable en faveur de l’époux ou du conjoint de fait, qui ne remplit pas les conditions d’une fiducie au profit du conjoint prévues au paragraphe 70(6), est communément appelée une fiducie au profit du conjoint contaminée. La « contamination » d’une fiducie au profit du conjoint est souvent causée par un testament qui prévoit le règlement, à même l’actif de la fiducie, de dettes, d’obligations ou de droits successoraux, autres que ceux visés par le paragraphe 108(4), qui sont énumérés au numéro 1.24. Une fiducie au profit du conjoint contaminée n’aurait pas droit au roulement à imposition différée.

1.36 Le paragraphe 70(7) prévoit des règles selon lesquelles certaines fiducies contaminées peuvent être considérées comme des fiducies au profit du conjoint, permettant ainsi le roulement prévu au paragraphe 70(6). Cela est possible lorsque les dettes, obligations et droits successoraux dont fait mention le numéro 1.35 sont des dettes testamentaires et que la fiducie se qualifie par ailleurs comme fiducie au profit du conjoint.

1.37 L’expression dette testamentaire, selon ce que prévoit l’alinéa 70(8)c), s’entend :

Les montants visés ci-dessus comprennent tout impôt sur le revenu ou les bénéfices payable par le contribuable ou à son égard pour l’année d’imposition au cours de laquelle il est décédé ou pour toute année d’imposition antérieure. Ils comprennent aussi tout droit sur les biens transmis par décès et payable par suite du décès.

1.38 Les dettes testamentaires comprennent également les frais funéraires. Elle peuvent aussi comprendre des frais testamentaires tels que la rétribution des représentants pour l’exercice des fonctions qui incombent habituellement à un exécuteur ou à un administrateur de la succession. Ces frais sont généralement admissibles tant que les biens de la succession ne sont pas transférés ou distribués aux bénéficiaires, au fiduciaire de la fiducie au profit du conjoint contaminée ou à toute autre fiducie découlant du décès.

1.39 Les fiducies au profit du conjoint contaminées ne peuvent pas toutes bénéficier des règles prévues au paragraphe 70(7). Par exemple, une fiducie au profit du conjoint ne peut pas être régularisée si sa contamination découle du fait que certaines obligations doivent être acquittées à même son actif avant le décès de l’époux ou du conjoint de fait. Voici par exemple certaines de ces obligations :

1.40 Cependant, il faut souligner qu’une fiducie n’est pas contaminée de la façon indiquée au numéro 1.39 si l’obligation à remplir est l’une des suivantes :

Comment régulariser une fiducie au profit du conjoint contaminée

1.41 De façon générale, si une fiducie au profit du conjoint contaminée en est une pouvant être régularisée, le paragraphe 70(7) prévoit des règles pour y parvenir. Le paragraphe 70(7) permet à une fiducie au profit du conjoint contaminée de se qualifier comme fiducie au profit du conjoint et de se prévaloir du roulement selon le paragraphe 70(6). Le processus prévu peut se décrire par la série d’étapes suivante.

1.42 La première étape consiste pour le représentant légal à établir le total des dettes testamentaires de la fiducie.

1.43 La deuxième étape consiste à déduire du total des dettes testamentaires les montants suivants :

Les autres dettes sont appelées, selon l’alinéa 70(8)b), les dettes non admissibles.

1.44 Comme troisième étape, le représentant légal doit faire un choix, dans la déclaration de revenus régulière du contribuable décédé pour l’année du décès, pour que la fiducie soit traitée comme une fiducie au profit du conjoint. Une déclaration de revenus régulière pour l’année du décès désigne une déclaration produite autrement qu’en application des paragraphes 70(2), 104(23) ou 150(4), ou de l’alinéa 128(2)e).

1.45 Comme quatrième étape, dans la déclaration de revenus régulière du contribuable décédé pour l’année du décès, le représentant légal doit énumérer un ou plusieurs biens de la fiducie (autre qu’un compte CSRN) dont la JVM totale immédiatement après ce décès est au moins égale au total des dettes non admissibles. Ces biens seront désignés les biens énumérés. Les biens énumérés peuvent comprendre un montant d’argent et si ce montant suffit à égaler les dettes non admissibles, il n’est pas nécessaire d’énumérer d’autres biens.

1.46 Aux fins des règles du paragraphe 70(7), l’alinéa 70(8)a) définit la JVM d’un bien à un moment donné comme étant l’excédent éventuel de la JVM du bien à ce moment, déterminée par ailleurs, sur le montant dû de toute dette garantie par une hypothèque sur le bien.

1.47 Une fois que le représentant légal aura produit la déclaration de revenus, y compris le choix et une confirmation des biens énumérés, la fiducie est alors régularisée et réputée être une fiducie au profit du conjoint. Conformément aux paragraphes 70(5) et 70(7), les biens énumérés sont réputés avoir été disposés à la JVM immédiatement avant le décès du contribuable. Les biens énumérés (à l’exception du bien indiqué dont traite le numéro 1.48) sont réputés avoir été acquis par la fiducie au profit du conjoint à cette JVM. Tout gain, revenu ou perte découlant de la disposition réputée est compris dans le calcul du revenu du contribuable décédé. Les autres immobilisations transférées à la fiducie au profit du conjoint sont admissibles au roulement prévu au paragraphe 70(6).

1.48 L’excédent éventuel de la JVM de tous les biens énumérés sur le total des dettes non admissibles est désigné l’excédent de valeur. Dans le cas où un tel excédent est constaté, la cinquième étape consiste à ce que le représentant légal du contribuable indique dans la déclaration de revenus du contribuable un des biens énumérés (autre que de l’argent) qui est une immobilisation autre qu’un bien amortissable comme étant le bien indiqué. La sixième étape consiste à déterminer le gain ou la perte en capital à l’égard de tous les biens énumérés, y compris le bien indiqué. Le gain ou la perte en capital du contribuable décédé découlant de la disposition réputée du bien indiqué en application du paragraphe 70(5) sera réduit du montant calculé selon le sous-alinéa 70(7)b)(iii). La septième étape consiste à établir le coût pour la fiducie de tous les biens énumérés , y compris le bien indiqué. Le coût du bien indiqué pour la fiducie est égal au total du PBR du bien pour le contribuable immédiatement avant son décès et du gain en capital (ou dont est soustraite la perte en capital) déterminé selon le sous-alinéa 70(7)b)(iii).

1.49 Selon le sous-alinéa 70(7)b)(iii), le gain ou la perte en capital du contribuable décédé qui découle de la disposition réputée du bien indiqué est calculé comme suit :

A x (B - C) ÷ B

 :

A est le gain ou la perte en capital déterminé par ailleurs;

B est la JVM de ce bien indiqué immédiatement après le décès;

C est l’excédent de valeur.

Exemple 1

Le présent exemple a pour but d’illustrer la façon de régulariser une fiducie au profit du conjoint contaminée au moyen des règles du paragraphe 70(7). L’exemple sert à répondre aux questions suivantes :

  • Que doit faire le représentant légal afin de régulariser la fiducie?
  • Quelles sont les conséquences fiscales pour le contribuable décédé?
  • Quelles sont les conséquences fiscales pour la fiducie au profit du conjoint?

Prenons le cas d’une fiducie testamentaire au profit du conjoint contaminée d’un contribuable décédé. Le contribuable décédé était propriétaire de plusieurs biens, dont une action, un fonds de terre et un immeuble d’habitation. Les faits, immédiatement avant le décès, sont les suivants :

Faits de l’exemple 1
Description Montant
JVM de l’action 90 000 $
PBR de l’action 60 000 $
JVM du fonds de terre 410 000 $
PBR du fonds de terre 300 000 $
Hypothèque sur le fonds de terre 100 000 $
JVM de l’immeuble d’habitation 4 000 000 $
PBR de l’immeuble 3 000 000 $
FNACC de l’immeuble 2 000 000 $
Hypothèque sur l’immeuble 800 000 $
Dettes d’affaires du contribuable décédé 250 000 $
Impôt à payer par le contribuable décédé 100 000 $
Frais testamentaires et funéraires 10 000 $

Étape 1 : Déterminer le total des dettes testamentaires

Données pour l’étape 1
Description
Montant
Hypothèque sur le fonds de terre 100 000 $
Hypothèque sur l’immeuble d’habitation 800 000 $
Dettes d’affaires du contribuable décédé 250 000 $
Impôt à payer par le contribuable décédé 100 000 $
Frais testamentaires et funéraires 10 000 $
Total des dettes testamentaires 1 260 000 $

Étape 2 : Déterminer les dettes non admissibles

Le montant des dettes non admissibles correspond au total des dettes testamentaires de la fiducie moins tout montant visé au numéro 1.43.

Dans l’exemple, les hypothèques sur l’immeuble et sur le fonds de terre sont des montants visés au numéro 1.43.

Dettes non admissibles = total des dettes testamentaires - montants visés au numéro 1.43

= 1 260 000 $ - (800 000 $ + 100 000 $)

= 360 000 $

Étape 3 : Déterminer les biens énumérés

Dans la déclaration de revenus régulière du contribuable décédé, pour l’année du décès, le représentant légal fait alors le choix (visé au numéro 1.44) que la fiducie soit traitée comme une fiducie au profit du conjoint. Le représentant énumère aussi les biens de la fiducie au profit du conjoint contaminée qui ont, immédiatement après le décès, une JVM totale au moins égale au montant des dettes non admissibles déterminées à l’étape 2. Cela signifie que le représentant légal doit énumérer les biens dont la JVM totale est au moins égale à 360 000 $. Le représentant légal choisit les biens suivants :

Données pour l’étape 3
Description JVM
Action 90 000 $
Fonds de terre (JVM de 410 000 $ moins l’hypothèque de 100 000 $) 310 000 $
JVM totale nette des biens énumérés 400 000 $

Étape 4 : Déterminer le gain ou la perte en capital découlant de la disposition réputée des biens énumérés

Les règles de disposition réputée selon le paragraphe 70(5) s’appliquent aux biens énumérés.

La détermination du gain ou de la perte en capital s’effectue avant toute réduction selon le sous-alinéa 70(7)b)(iii).

Données pour l’étape 4
Description JVM moins PBR Gain ou perte en capital
Action 90 000 $ - 60 000 $ 30 000 $
Fonds de terre 410 000 $ - 300 000 $ 110 000 $

Le gain en capital total sur la disposition réputée des biens énumérés avant toute réduction selon le sous-alinéa 70(7)b)(iii) est donc de 140 000 $.

Étape 5 : Déterminer l’excédent de valeur (le cas échéant) et indiquer un bien énuméré

L’excédent de valeur se calcule comme suit :

JVM des biens énumérés – total des dettes non admissibles

= JVM de l’action de 90 000 $ + JVM du fonds de terre de 310 000 $ – 360 000 $

= 400 000 $ - 360 000 $

= 40 000 $

Car il y a un excédent de valeur, le représentant légal peut indiquer un des biens énumérés. Le représentant légal désigne l’action.

Étape 6 : Déterminer le gain ou la perte en capital sur les biens énumérés

Action (le bien indiqué)

Le gain en capital découlant de la disposition réputée de l’action selon le paragraphe 70(5) est réduit en raison du calcul prévu au sous-alinéa 70(7)b)(iii) (se reporter au numéro 1.49) puisqu’il s’agit du bien indiqué.

Selon le sous-alinéa 70(7)b)(iii), le gain en capital sur l’action se calcule comme suit :

A x (B - C) ÷ B

où :

A est le gain ou la perte en capital déterminé par ailleurs;

B est la JVM du bien indiqué immédiatement après le décès;

C est l’excédent de valeur.

Gain en capital sur l’action  = 30 000 $ x (90 000 $ - 40 000 $) ÷ 90 000 $

= 16 667 $

Fonds de terre

Le gain en capital découlant de la disposition réputée du fonds de terre selon le paragraphe 70(5) est calculé comme suit :

Gain en capital = JVM moins PBR

= 410 000 $ - 300 000 $

= 110 000 $

Par conséquent, le gain en capital total à inclure dans le revenu du contribuable décédé est égal à 126 667 $ (16 667 $ + 110 000 $).

Étape 7 : Déterminer le coût des biens énumérés pour la fiducie

Les coûts des biens énumérés de la fiducie au profit du conjoint sont les suivants :

Données pour l’étape 7
Description Coût
Fonds de terre 410 000 $
Action 76 667 $

Conformément à l’alinéa 70(5)b), le coût du fonds de terre pour la fiducie est égal à sa JVM immédiatement avant le décès du contribuable.

Le coût de l’action pour la fiducie est calculé comme suit :

Si la disposition réputée du bien indiqué entraîne un gain en capital pour le contribuable, le total de A + B

où :

A est le PBR du bien indiqué;

B est le montant déterminé selon le sous-alinéa 70(7)b)(iii) comme étant le gain en capital du contribuable décédé tiré de la disposition du bien indiqué.

Coût de l’action pour la fiducie  = 60 000 $ + 16 667 $

= 76 667 $

Conclusion

En raison des règles prévues au paragraphe 70(7) pour régulariser une fiducie au profit du conjoint :

  • Les biens énumérés (lesquels contrebalancent les dettes non admissibles), à l’exception du bien indiqué, sont réputés avoir été disposés par le contribuable décédé à leur JVM et avoir été acquis par la fiducie à cette même valeur.
  • Tout gain ou perte en capital qui en découle est constaté dans la déclaration de revenus du contribuable décédé pour l’année du décès.
  • La JVM des biens énumérés excède le total des dettes non admissibles (c.-à-d. il y a un excédent de valeur). Le représentant légal a indiqué que l’action était le bien indiqué. En conséquence, selon le calcul prévu au sous-alinéa 70(7)b)(iii), le contribuable décédé est réputé avoir réalisé seulement une partie du gain en capital accumulé sur l’action.
  • Le coût du bien indiqué pour la fiducie correspond à son PBR pour le contribuable immédiatement avant son décès plus le gain en capital (ou moins la perte en capital), tel que déterminé selon le sous-alinéa 70(7)b)(iii).
  • Tous les autres biens transférés à la fiducie seraient admissibles au roulement.

Exemple 2

Prenons les mêmes faits que ceux dans l’exemple 1. Cependant, supposons un PBR de l’action de 160 000 $ et, par suite de sa disposition réputée, une perte en capital de 70 000 $ pour le contribuable décédé avant toute réduction selon le sous-alinéa 70(7)b)(iii).

Les étapes 1 à 4 demeurent les mêmes, les seules différences entre les deux exemples étant le PBR de l’action et la perte en capital pour le contribuable décédé sur la disposition réputée de l’action avant toute réduction selon le sous-alinéa 70(7)b)(iii).

Étape 5 : Déterminer l’excédent de valeur (le cas échéant) et indiquer un bien énuméré

L’excédent de valeur se calcule comme suit :

JVM des biens énumérés – total des dettes non admissibles

= JVM de l’action de 90 000 $ + JVM du fonds de terre de 310 000 $ – 360 000 $

= 400 000 $ - 360 000 $

= 40 000 $

Car il y a un excédent de valeur, le représentant légal peut indiquer un des biens énumérés. Le représentant légal désigne l’action.

Étape 6 : Déterminer le gain ou la perte en capital sur les biens énumérés

Action (le bien indiqué)

La perte en capital sur l’action est réduite par le montant calculé selon le sous-alinéa 70(7)b)(iii) (se reporter au numéro 1.49) puisque l’action est le bien indiqué.

Selon le sous-alinéa 70(7)b)(iii), la perte en capital sur l’action se calcule comme suit :

A x (B - C) ÷ B

où :

A est le gain ou la perte en capital déterminé par ailleurs;

B est la JVM du bien indiqué immédiatement après le décès;

C est l’excédent de valeur.

Perte en capital sur l’action   = 70 000 $ x (90 000 $ - 40 000 $) ÷ 90 000 $

= 38 889 $

Fonds de terre

Le gain en capital découlant de la disposition réputée du fonds de terre selon le paragraphe 70(5) est calculé comme suit :

Gain en capital = JVM moins PBR

= 410 000 $ - 300 000 $

= 110 000 $

Par conséquent, le gain en capital total à inclure dans le revenu du contribuable décédé est égal à 71 111 $ (110 000 $ - 38 889 $).

Étape 7 : Déterminer le coût des biens énumérés pour la fiducie

Les coûts des biens énumérés de la fiducie au profit du conjoint sont les suivants :

Données pour l’étape 7 de l’exemple 2
Description Coût
Fonds de terre 410 000 $
Action 121 111 $

Le coût du fonds de terre pour la fiducie est égal à sa JVM immédiatement avant le décès, conformément à l’alinéa 70(5)b).

En cas de perte en capital pour le contribuable lors de la disposition réputée du bien indiqué, le coût de l’action pour la fiducie se calcule comme suit :

A - B

où :

A est le PBR du bien indiqué;

B est le montant déterminé selon le sous-alinéa 70(7)b)(iii) comme étant la perte en capital du contribuable décédé résultant de la disposition du bien indiqué.

Coût de l’action pour la fiducie  = 160 000 $ - 38 889 $

= 121 111 $

1.50 Si les dettes non admissibles comprennent l’impôt payable par la succession du contribuable décédé à l’égard de la déclaration de revenus pour l’année du décès, ce montant payable est calculé après avoir appliqué les dispositions de l’alinéa 70(7)b). Il faut donc tenir compte de l’incidence de l’énumération d’un bien en particulier sur le montant de l’impôt payable. Le rajustement d’un gain ou d’une perte en capital sur un bien indiqué, conformément au sous-alinéa 70(7)b)(iii), peut également avoir des conséquences importantes dans certains cas. Lorsque le montant de la dette fiscale constitue un facteur important dans le choix des biens à énumérer (ou du bien à indiquer), il peut être prudent d’effectuer plusieurs calculs théoriques de l’impôt.

1.51 Le représentant légal n’est pas obligé de disposer des biens énumérés en faveur de la fiducie pour obtenir les fonds lui permettant de rembourser les dettes non admissibles. Elles peuvent être remboursées à l’aide de toute source de fonds disponible.

1.52 Le représentant légal est chargé de calculer les dettes non admissibles et la JVM des biens énumérés de façon aussi exacte que possible à partir des faits connus. Malgré les efforts raisonnables du représentant légal, ces calculs pourraient ultérieurement s’avérer inexacts. Si la valeur des biens énumérés est en réalité inférieure au total des dettes non admissibles, l’ARC permettra généralement que d’autres biens soient plus tard énumérés afin que les dispositions de roulement du paragraphe 70(6) puissent encore s’appliquer aux biens de la fiducie qui ne sont pas énumérés.

1.53 On peut faire valoir qu’une fiducie au profit de l’époux ou du conjoint de fait créée par testament d’un contribuable à même le reliquat de sa succession soit contaminée par les distributions et les paiements servant à établir le corpus de la fiducie. Selon cette interprétation, il est nécessaire de suivre les procédures prévues au paragraphe 70(7) s’il est attendu que la fiducie se qualifie comme fiducie au profit du conjoint selon le paragraphe 70(6). Selon un autre point de vue, le paragraphe 70(6) s’applique aux biens originaux de la succession qui sont conservés pour constituer une partie du corpus de la fiducie, sans avoir à suivre les procédures prévues au paragraphe 70(7).

1.54 Les deux interprétations présentées au numéro 1.53 sont acceptables. Par conséquent, un fiduciaire a les options suivantes lorsqu’une fiducie au profit du conjoint par ailleurs admissible est créée à même le reliquat d’une succession :

  1. Le fiduciaire peut choisir d’appliquer les dispositions du paragraphe 70(5) à toutes les immobilisations de la succession.
  2. En suivant les procédures prévues au paragraphe 70(7), les règles du paragraphe 70(6) s’appliqueront aux immobilisations de la fiducie au profit du conjoint qui ne sont pas énumérées, et les règles du paragraphe 70(5) s’appliqueront aux biens énumérés de la succession, sous réserve d’un rajustement pour tout excédent de valeur (se reporter au numéro 1.49).
  3. Le fiduciaire peut choisir d’appliquer le paragraphe 70(5) à toutes les immobilisations de la succession qui sont distribuées ou dont il est disposé autrement avant l’établissement du corpus de la fiducie au profit du conjoint. Le paragraphe 70(6) s’appliquerait alors aux immobilisations originales de la succession qui sont conservées comme biens de la fiducie. Le fait qu’avant la dévolution irrévocable des biens à la fiducie la succession s’est servie du revenu tiré de ces biens pour effectuer des legs particuliers ou acquitter des dettes testamentaires n’empêche généralement pas la fiducie de se qualifier comme fiducie au profit du conjoint.

Le droit de faire un choix selon le paragraphe 70(6.2) pour que le paragraphe 70(5) s’applique n’est pas touché par la sélection de l’une des options décrites aux points 1.54b) et 1.54c).

1.55 Le traitement fiscal applicable aux biens énumérés est différent de celui applicable aux autres biens acquis par la fiducie au profit du conjoint. Néanmoins, les biens énumérés étant des biens de la fiducie, ils sont soumis aux règles spéciales sur les fiducies au profit du conjoint qui sont prévues ailleurs dans la Loi. Par exemple, la disposition réputée de chacun des biens de la fiducie au profit du conjoint en application de l’alinéa 104(4)a) au moment du décès de l’époux ou du conjoint de fait s’applique également aux biens énumérés.

Date limite de production pour une fiducie au profit du conjoint

1.56 Dans le cas d’une fiducie au profit du conjoint contaminée susceptible d’être régularisée au moyen du paragraphe 70(7), le représentant légal a 18 mois à partir de la date du décès pour produire la déclaration de revenus finale du contribuable décédé. Cette règle s’applique peu importe si une telle fiducie est régularisée par application de l’alinéa 70(7)b) ou si d’autres fiducies ont été créées simultanément par le testament et à l’égard desquelles le paragraphe 70(7) ne s’applique pas. Ce délai de production prolongé s’applique aussi aux déclarations spéciales produites selon le paragraphe 150(4) et l’alinéa 104(23)d).

1.57 Lorsqu’une fiducie est susceptible d’être régularisée par l’application du paragraphe 70(7), même si la déclaration de revenus du contribuable pour l’année de son décès peut être produite dans les 18 mois suivant le décès, tout solde d’impôt impayé s’y rapportant est assujetti à des intérêts au taux prescrit à compter du moment qui est six mois après le décès ou, s’il est postérieur, le 30 avril de l’année suivant l’année du décès.

1.58 La date limite pour faire un choix selon le paragraphe 70(2) à l’égard de droits ou biens est indirectement reportée si le délai de production prolongé visé au numéro 1.56 retarde l’envoi par la poste d’un avis de cotisation pour l’année du décès. Cependant, la règle prévoyant le délai pour produire un tel choix demeure inchangée. Le choix doit être produit au plus tard le jour qui suit d’un an le jour du décès ou, s’il est postérieur, le 90e jour suivant l’envoi d’un avis de cotisation pour l’année du décès.

1.59 Si un contribuable décède au plus tard le 30 avril d’une année d’imposition, son représentant légal doit produire la déclaration de revenus du contribuable décédé pour l’année d’imposition précédente dans les six mois suivant la date du décès. Il n’y a pas d’autre prolongation du délai de production des déclarations de revenus pour les années d’imposition avant l’année d’un décès. Pour en savoir plus sur la date limite pour produire la déclaration de revenus d’une personne décédée, consultez le Guide T4011, Déclarations de revenus de personnes décédées.

Transfert ou distribution du compte de stabilisation du revenu net (CSRN) à la fiducie au profit du conjoint

1.60 Le revenu qui découlerait, par suite du décès du contribuable, du paiement réputé des montants détenus dans son second fonds du CSRN en application du paragraphe 70(5.4) peut être reportée. Ce report est possible si, au moment du décès ou après et par suite de ce décès, le CSRN du contribuable est transféré ou distribué à son époux, à son conjoint de fait ou à une fiducie au profit du conjoint et que les exigences du paragraphe 70(6.1) sont remplies. Les exigences applicables à une fiducie au profit du conjoint selon le paragraphe 70(6.1) sont les mêmes que celles qui s’appliquent à une fiducie au profit du conjoint selon le paragraphe 70(6), sauf que le paragraphe 70(6.1) ne renferme aucune exigence liée à la résidence, comme celles dont fait mention le numéro 1.12.

1.61 Le représentant légal du contribuable décédé pourrait aussi faire un choix selon le paragraphe 70(6.2) pour que le paragraphe 70(5.4) s’applique au second fonds du CSRN de ce dernier. Si le paragraphe 70(5.4) s’applique, tous les montants détenus dans ce second fonds sont réputés avoir été payés au contribuable immédiatement avant son décès. Selon le paragraphe 12(10.2), ces montants devront généralement être inclus dans le calcul du revenu du contribuable pour l’année de son décès. Le choix prévu au paragraphe 70(6.2) doit être fait dans la déclaration de revenus régulière pour l’année du décès.

1.62 Lorsqu’une fiducie, se qualifiant par ailleurs comme fiducie au profit du conjoint selon le paragraphe 70(6.1), est contaminée par suite du paiement d’une dette testamentaire (ou des dispositions prises pour son paiement), le paragraphe 70(7) peut s’appliquer pour régulariser la fiducie. Cela rendrait possible le roulement que prévoit le paragraphe 70(6.1). Cependant, tel qu’en fait mention le numéro 1.45, un CSRN ne peut pas être un bien énuméré aux fins de régulariser la fiducie.

Convention fiscale Canada-États-Unis

1.63 Tel que l’indique le numéro 1.12, pour que les dispositions de roulement du paragraphe 70(6) s’appliquent à un bien transféré ou distribué à la fiducie au profit du conjoint, le contribuable doit résider au Canada immédiatement avant le décès. Par ailleurs, la fiducie doit résider au Canada immédiatement après le moment où les biens lui ont été dévolus. Le paragraphe 70(6) peut également s’appliquer par suite du décès d’un contribuable qui réside aux États-Unis car, en raison du paragraphe 5 de l’article XXIX B de la Convention fiscale Canada-États-Unis (la Convention), le contribuable est réputé résider au Canada immédiatement avant son décès. Cela est pertinent dans le cas où la personne décédée détenait des biens canadiens imposables qui, au moment du décès, n’étaient pas exemptés par ailleurs en vertu de la Convention.

1.64 Selon le paragraphe 5 de l’article XXIX B de la Convention, une fiducie qui ne remplit pas les conditions du paragraphe 70(6), car elle ne réside pas au Canada, peut présenter une demande à l’autorité compétente canadienne. Sur réception de la demande, l’autorité compétente canadienne pourra s’entendre avec la fiducie afin que cette dernière soit traitée comme un résident du Canada aux fins de la Loi pendant une période donnée et relativement à certains biens. Pour en savoir plus à ce sujet, communiquez avec les Services de l’autorité compétente.

Décès de l’époux ou du conjoint de fait du contribuable

1.65 Pour 2016 et les années d’imposition suivantes, si le particulier dont le décès est le décès relativement à une fiducie visée aux sous-alinéas 104(4)a), a.1) ou a.4), l’alinéa 104(13.4)a) prévoit que l’année d’imposition de la fiducie est réputée se terminer à la fin du jour du décès. La fiducie est réputée commencer une nouvelle année d’imposition immédiatement après ce jour.

1.66 À la fin du jour durant lequel l’époux ou le conjoint de fait est décédé, la fiducie au profit du conjoint est réputée avoir disposé de chacun de ses biens (sauf les biens exonérés) qui constituaient une immobilisation (sauf un bien amortissable) ou un fonds de terre compris dans les biens à porter à l’inventaire d’une de ses entreprises. Le produit de disposition est réputé être égal à la JVM du bien à la fin de ce jour (déterminée par rapport au paragraphe 70(5.3)). La fiducie au profit du conjoint est réputée avoir acquis le bien de nouveau immédiatement après ce jour pour un montant égal à cette JVM. Les paragraphes 104(5) et (5.2) s’appliquent de façon similaire aux biens amortissables et aux avoirs miniers (sauf les biens exonérés).

1.67 Bien exonéré désigne un bien dont la disposition effectuée par le contribuable donne naissance à un revenu ou à un gain qui est exempté d’impôt au Canada du fait que le contribuable ne réside pas au Canada ou en raison d’un traité fiscal.

1.68 L’application du paragraphe 104(4) dépend des modalités d’une fiducie lors de sa création, même si ces modalités sont ensuite modifiées par suite d’une entente ou d’une poursuite judiciaire, ou en cas de violation de ces modalités. Par exemple, le libellé du sous-alinéa 104(4)a)(i) prévoit explicitement une date de disposition réputée qui est fondée sur les modalités de la fiducie au moment où elle a été établie.

1.69 L’alinéa 104(13.4)b.1) prévoit que la fiducie et le représentant légal qui gère la succession assujettie à l’imposition à taux progressifs du bénéficiaire décédé peuvent produire un choix conjoint de déclarer tous les revenus de la fiducie qui découlent de l’application des paragraphes 104(4) à (5.2) ou du paragraphe 12(10.2) dans la déclaration T1 finale du bénéficiaire décédé. Il est possible de faire le choix conjoint si toutes les conditions suivantes sont remplies :

Si un choix est fait, la fiducie peut déduire le montant correspondant de son revenu. Pour se renseigner sur la production de la déclaration de revenus d’une personne décédée, consultez le Guide T4011.

Application

Le présent chapitre mis à jour, portant le numéro de référence S6-F4-C1, est entré en vigueur le 17 mars 2023.

Lorsqu’il a été publié pour la première fois le 3 février 2022, le chapitre a remplacé et annulé le Bulletin d’interprétation IT-305R4, Fiducies testamentaires au profit du conjoint.

Vous pouvez consulter la liste des modifications techniques qui ont été apportées depuis le dernier bulletin d’interprétation maintenant annulé en visitant la page Historique du chapitre.

Sauf indication contraire, tous les renvois à une loi se rapportent à la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, ch. 1 (5e suppl.), telle que modifiée, tous les renvois à un règlement se rapportent au Règlement de l’impôt sur le revenu, C.R.C., ch. 945, tel que modifié, et tous les renvois à la Convention fiscale Canada-É.-U. se rapportent à la Convention fiscale Canada-États-Unis (1980).

Les liens à la jurisprudence renvoient au site de l’Institut canadien d’information juridique (CanLII).

Les folios de l’impôt sur le revenu sont disponibles en version électronique seulement.

Renvois

Les articles 54 et 83, les paragraphes 12(10.2), 70(2), 70(5), 70(5.3), 70(5.4), 70(6), 70(6.1), 70(6.2), 70(7), 104(4), 104(5), 104(5.2), 104(13.1), 104(13.3), 104(13.4), 104(23), 104(24), 108(1), 108(3), 108(4), 130(2), 131(1), 150(4), 248(3), 248(8), 248(9), 248(9.1), 248(9.2) et 252(3), les alinéas 70(6)d.1), 70(8)a), 70(8)c) et 128(2)e), les définitions de conjoint de fait et de succession assujettie à l’imposition à taux progressifs du paragraphe 248(1), et le paragraphe 5 de l’article XXIX B de la Convention fiscale entre le Canada et les États-Unis d’Amérique en matière d’impôts sur le revenu et la fortune.

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