Archivée – Guide de la détermination de l'admissibilité Chapitre 8 - Section 11
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8.11.0 Fin de l'arrêt de travail
La fin de l'arrêt de travail n'est pas un événement fortuit et isolé, qui survient de façon soudaine. Elle s'inscrit plutôt dans un ensemble et met de fait le point final à l'arrêt de travail qui durait jusqu'alors Note de bas de page 1 .
Bien que la Commission ait le pouvoir de prendre des règlements prévoyant les circonstances qui marquent le début et la fin de l'arrêt de travail Note de bas de page 2 , il ne lui est apparu nécessaire de déterminer par règlement que les seules circonstances relatives à la fin de l'arrêt de travail. Voici un extrait de ces dispositions réglementaires Note de bas de page 3 :
. . . l'arrêt de travail à une usine, à un atelier ou en tout autre local prend fin lorsque :
- d'une part, le nombre d'employés présents au travail représente au moins 85 pour cent du niveau normal;
- d'autre part, les activités qui y sont exercées pour la production de biens ou de services représentent au moins 85 pour cent du niveau normal.
La fin de l'arrêt de travail est déterminée en fonction de deux indicateurs, soit le nombre d'employés au travail et le niveau des activités reliées à la production de biens ou de services. Il semble logique, dans ce contexte, que l'on se serve également de ces deux indicateurs pour déterminer s'il y a arrêt de travail Note de bas de page 4 .
Ce minimum de 85 % constitue la ligne rigoureuse de démarcation entre l'arrêt de travail qui se poursuit et la fin de l'arrêt de travail qui survient au moment où ce minimum est atteint. Le minimum de 85 % doit être obtenu pour chacun des deux indicateurs en cause, sans quoi l'on ne saurait conclure que l'arrêt de travail a pris fin. Ce qui revient à dire que si, par exemple, le nombre d'employés au travail atteint ou dépasse 85 % de son niveau normal sans qu'il en aille de même du niveau des activités reliées à la production de biens ou de services, l'arrêt de travail existe toujours Note de bas de page 5 .
Il faut également prendre en considération les activités reliées à la production de biens ou de services. Le volume et la qualité des activités doivent correspondre à 85 % du niveau qu'ils avaient atteint avant le conflit.
La détermination de la fin de l'arrêt de travail n'est pas faite sans raison. L'arrêt de travail représente l'une des deux éventualités prévues dans la Loi, qui permettent de lever l'inadmissibilité Note de bas de page 6 . Tout comme on l'a fait auparavant pour l'arrêt de travail, on vérifiera si l'arrêt de travail est terminé dans l'ensemble de l'entreprise ou, si le conflit n'a eu qu'une incidence limitée, dans les activités ou le groupe des travailleurs touchés par le conflit Note de bas de page 7 .
La fin d'un arrêt de travail ne signifie pour autant que le conflit collectif est terminé, pas plus que le fait que soit intervenu un règlement du conflit ne marque la fin immédiate de l'arrêt de travail. Il serait certes fort inusité que ces événements se produisent en même temps Note de bas de page 8 .
Bien qu'un seul et même conflit puisse paralyser les activités de plusieurs lieux de travail, il n'en demeure pas moins que la détermination de la fin de l'arrêt de travail doit être faite distinctement eu égard à chacun de ces lieux. La fin de l'arrêt de travail peut donc survenir à des dates différentes selon la situation qui existe à chacun des emplacements.
Il faut se rappeler finalement que le minimum de 85 % doit être calculé par rapport au nombre normal d'employés au travail et au niveau normal des activités reliées à la production de biens ou de services. Il n'est pas facile dans plusieurs cas de déterminer le niveau qui correspond à la situation normale pour chacun de ces deux indicateurs.
8.11.1 Situation normale
Le Règlement porte que l'arrêt de travail prend fin lorsque le nombre d'employés au travail et les activités reliées à la production de biens ou de services représentent au moins 85 % de leur niveau normal Note de bas de page 9 .
Ce qui constitue la situation normale pour ces deux indicateurs correspond à la situation qui aurait normalement existé s'il n'y avait pas eu d'arrêt de travail. Avec certaines réserves, on peut affirmer de façon générale que le nombre d'employés et le niveau d'activités prévalant au cours de la période antérieure à l'arrêt de travail donnent une idée relativement juste de ce qu'aurait été la situation normale. Le niveau de production obtenu en fonction d'un régime établi d'heures supplémentaires peut aussi être qualifié de normal. Il n'en va pas ainsi du nombre d'employés et du niveau d'activités atteints du fait de mesures exceptionnelles ou temporaires prises par l'employeur pour remédier à la situation. La situation normale doit être déterminée en faisant abstraction de ces mesures Note de bas de page 10 .
La situation normale évolue d'un moment à l'autre et peut se traduire par un nombre d'employés et un niveau d'activités différents. Il faut tenir compte des fluctuations de production, si celles-ci surviennent normalement au cours de l'année, ou des contrats que l'entreprise aurait normalement obtenus ou exécutés sans l'arrêt de travail et le conflit.
La situation qui régnait avant l'arrêt de travail peut ou non être attribuable à des facteurs reliés au conflit collectif et à l'imminence de l'arrêt de travail. Un nombre d'employés et un niveau d'activités, réduits ou élevés, qui s'expliqueraient par des facteurs étrangers au conflit, que ce soit par la conjoncture économique, la concurrence restreinte ou accrue de compétiteurs, la saison morte ou active, représentent ce que serait la situation normale.
Toutefois, lorsque ce facteur est relié au conflit et à l'arrêt de travail pressenti et qu'il est à l'origine d'une réduction ou d'une augmentation du nombre d'employés ou du niveau d'activités, la situation normale à retenir correspond à celle qui aurait normalement existé en l'absence de ce facteur.
Des circonstances peuvent par ailleurs se produire au cours d'un arrêt de travail ou à la reprise des activités et avoir une incidence sur la situation normale Note de bas de page 11 . Certaines d'entre elles sont liées au conflit et à l'arrêt de travail et d'autres ne le sont absolument pas. Certaines modifient la situation normale de façon permanente et d'autres ne sont que passagères.
8.11.2 Règlement du conflit, reprise des activités
Le règlement du conflit n'est pas une condition absolue à la reprise des activités. Les parties peuvent s'entendre pour reprendre les activités, même s'il ne semble n'y avoir aucune solution immédiate, ou être contraintes de reprendre sans qu'il y ait eu règlement. Cela ne signifie pas qu'instantanément le nombre d'employés au travail et les activités de production de biens ou de services atteindront des niveaux équivalant à la situation normale Note de bas de page 12 .
Dans la grande majorité des cas, la reprise des activités ne va se faire que graduellement, d'après les modalités d'un protocole de retour au travail et en fonction des besoins de l'entreprise. Il est fort possible que ne soient rappelés dans un premier temps que les seuls employés jugés utiles à l'exécution de tâches préliminaires en vue de la reprise éventuelle des activités normales de l'entreprise, que ce soit pour la remise en marche des machines ou pour la réparation de pièces d'équipement. Cette situation peut aussi être vécue par un petit groupe d'employés qui reprennent le travail souvent une, deux ou quelques semaines avant qu'il y ait un retour au travail de la majorité des employés touchés par le conflit. Quoi qu'il en soit, ce contexte ne permet pas pour autant de lever l'inadmissibilité à moins qu'en reprenant le travail, le prestataire ait effectivement réintégré le poste qu'il occupait avant que survienne l'arrêt de travail Note de bas de page 13 .
Le règlement du conflit en tant que tel n'a guère d'incidence sur l'inadmissibilité. C'est plutôt la fin de l'arrêt de travail qui permet la levée de l'inadmissibilité Note de bas de page 14 . Il ne s'agit pas de savoir si le prestataire est encore en conflit, mais bien de vérifier s'il continue à subir un arrêt de travail dû au conflit.
Même réglé, le conflit n'en a pas moins laissé des traces tangibles, qui se répercutent encore pendant un certain temps sur le cours normal des activités d'une entreprise, sans compter l'incidence d'autres éléments étrangers au conflit qui peuvent eux aussi retarder la reprise des activités. Le rapport entre un conflit qui a fait l'objet d'un règlement et l'arrêt de travail qui se poursuit ne doit pas s'appuyer sur des hypothèses. Il faut que l'intervalle entre le règlement du conflit et la fin de l'arrêt de travail soit une conséquence naturelle du conflit; s'il ne semble pas que ce soit le cas, il faudra obtenir des faits précis avant de conclure qu'il y a un rapport de cause à effet entre le conflit qui n'existe plus et l'arrêt de travail qui se prolonge.
Il peut également arriver qu'une fois le conflit terminé, une autre cause qui ne lui est pas reliée, lui succède et prolonge à elle seule la durée de l'arrêt de travail. Il faut alors déterminer à quel moment l'arrêt de travail a cessé d'être directement causé par le conflit pour être plutôt le fait d'une autre cause.
On comprend bien que, dans ce contexte, prestataires et syndicats puissent avoir intérêt à minimiser l'incidence du conflit pour expliquer le retard à reprendre le cours normal des activités ou à invoquer d'autres motifs qui ne sont que peu ou pas reliés au conflit Note de bas de page 15 . Il faut laisser à chacun des intervenants la possibilité de se faire entendre et faire preuve d'objectivité pour évaluer à leur juste mesure les allégations des parties, dans le but de déterminer si la reprise a été retardée ou empêchée d'une façon ou d'une autre en raison du conflit.
Après le règlement du conflit, il est souvent difficile, selon le secteur d'activité, de reprendre le cours normal des activités comme si rien ne s'était passé, d'obtenir de nouvelles commandes, de se constituer à nouveau une clientèle. De telles considérations peuvent suffire à démontrer une relative continuité du rapport entre le conflit et l'arrêt de travail ou bien être trop incertaines.
L'arrêt de travail est, de toute évidence, attribuable au conflit s'il se poursuit à cause de dommages matériels résultant du conflit ou de la fermeture des locaux, à moins que l'employeur considère avantageux de ne pas faire immédiatement le nécessaire pour remettre les machines en état de fonctionnement. Le retard à reprendre les activités n'est pas dû au conflit s'il résulte d'une décision de l'employeur de restructurer ses effectifs ou de procéder à des rénovations. D'autres circonstances peuvent aussi faire en sorte que le minimum de 85 % ne puisse être atteint. Une disposition du Règlement prévoit à quel moment prend fin l'arrêt de travail dans ces circonstances Note de bas de page 16 .
8.11.3 Circonstances empêchant d'atteindre le minimum de 85 %
Une entreprise où il y a un arrêt de travail dû à un conflit collectif est plus exposée à de multiples circonstances qui surviennent à ce moment et qui sont pour la plupart reliées au conflit et à l'arrêt de travail. D'autres circonstances, propres à l'entreprise ou généralisées à un secteur de l'économie, peuvent aussi se produire; sans être liées au conflit et à l'arrêt de travail, elles ont quand même une incidence sur l'effectif, les activités et même l'existence de l'entreprise.
Les répercussions de telles circonstances sur le nombre d'employés au travail et le niveau des activités peuvent être minimes ou importantes, temporaires ou de longue durée et, dans ce dernier cas, se faire sentir bien au-delà du règlement du conflit et de la reprise ultérieure des activités Note de bas de page 17 .
Quoi qu'il en soit, on peut dire de façon générale que le fait que se présentent, au cours d'un arrêt de travail, des circonstances qui ont une incidence sur la situation normale d'une entreprise ne modifie pas le rapport de cause à effet rattachant l'arrêt de travail initial au conflit Note de bas de page 18 .
Parmi ces circonstances, il y en a six dont il est toujours tenu compte aux termes des dispositions du Règlement qui portent précisément sur la fin de l'arrêt de travail. Voici un extrait de ces dispositions Note de bas de page 19 :
Lorsque, par suite d'un arrêt de travail, il survient des circonstances qui font en sorte que le nombre d'employés présents au travail et les activités liées à la production de biens ou de services à une usine, à un atelier ou en tout autre local ne représentent pas au moins 85 pour cent du niveau normal, l'arrêt de travail prend fin :
- dans le cas d'une cessation des affaires ou d'une restructuration permanente des activités ou dans un cas de force majeure, au moment où ce nombre et ces activités représentent au moins 85 pour cent du niveau normal rajusté en fonction des nouvelles circonstances;
- dans le cas où les conditions économiques ou du marché changent ou dans le cas où surviennent des changements technologiques, au moment où :
- d'une part, il y a une reprise des activités à l'usine, à l'atelier ou en tout autre local,
- d'autre part, ce nombre et ces activités représentent au moins 85 pour cent du niveau normal rajusté en fonction des nouvelles circonstances.
Les six circonstances prévues ont en commun le fait qu'elles surviennent au cours de l'arrêt de travail et empêchent que le minimum de 85 % des niveaux normaux soit atteint. Il faut voir aussi que ces circonstances sont de nature à modifier, sinon en permanence, du moins pour une période indéfinie, la situation normale de l'entreprise ou de l'activité touchée par l'arrêt de travail. Il est donc logique dans ce contexte qu'on rajuste ce qui constituerait les niveaux normaux pour les deux indicateurs retenus et que ce soit par rapport à ces niveaux rajustés qu'on détermine si le minimum de 85 % est atteint.
Ces circonstances n'ont nul besoin d'avoir une grande incidence sur les deux indicateurs; il suffit en fait qu'elles empêchent que le minimum de 85 % soit atteint. Qu'importe si elles n'amènent par exemple qu'une baisse de 10 % du nombre d'employés ou des activités, il se peut que ce soit justement ce qui manque pour atteindre au moins 85 % de la situation normale.
Le Règlement Note de bas de page 20 groupe les six circonstances en deux paragraphes. Le premier renferme trois circonstances qui sont propres à l'entreprise Note de bas de page 21 et le second, trois autres qui sont plus générales Note de bas de page 22 . Les unes comme les autres peuvent avoir une incidence sur la situation normale. Sauf en ce qui a trait à la cessation des affaires, c'est au moment où il y a reprise des activités Note de bas de page 23 que ces circonstances peuvent vraiment s'appliquer.
Il faut se rappeler finalement qu'on ne doit pas tenir compte des mesures exceptionnelles ou temporaires prises par l'employeur pendant l'arrêt de travail dans le but d'en atténuer les effets Note de bas de page 24 .
8.11.4 Cessation des affaires, restructuration permanente, cas de force majeure
Un arrêt de travail qui s'éternise peut constituer dans bien des cas un élément déclencheur qui incite un employeur à prendre ou à devancer certaines décisions concernant l'avenir de son entreprise ou d'une activité particulière paralysée par cet arrêt. Quels qu'en soient les motifs, il se peut qu'en cours d'arrêt de travail, un employeur déclare faillite, procède à la vente de son entreprise, transfère ailleurs ses activités, les réorganise ou abandonne tout simplement la partie.
Une entreprise n'est, par ailleurs, pas à l'abri des désastres : on pense à des cas de force majeure comme un incendie, une explosion ou une catastrophe naturelle telle qu'un tremblement de terre, un glissement de terrain, une tornade ou une inondation, qui vont modifier irrémédiablement ce qui aurait représenté la situation normale de l'entreprise sans l'arrêt de travail.
Le Règlement accorde un traitement particulier aux cas de cessation des affaires, de restructuration permanente des activités ou de force majeure dans la mesure où, par suite d'un arrêt de travail, de telles circonstances empêchent d'atteindre le minimum requis de 85 % des niveaux normaux des deux indicateurs Note de bas de page 25 . Ces circonstances ne sauraient être retenues si elles n'ont manifestement aucune incidence sur ces deux indicateurs ou si évidemment elles n'ont d'effet que sur des activités qui ne sont pas touchées par l'arrêt de travail dû au conflit. Sauf en ce qui concerne la cessation des affaires, c'est à la reprise des activités que ces circonstances peuvent vraiment s'appliquer au contexte. À quoi cela servirait-il de considérer l'incidence d'une restructuration permanente ou d'un cas de force majeure en saison morte ou au moment où l'arrêt de travail a presque interrompu toute activité?
Il importe, par ailleurs, que ces circonstances se matérialisent et aient un caractère de permanence qui modifie sur une longue période la situation normale Note de bas de page 26 de l'entreprise ou de l'activité touchée par l'arrêt de travail. Il ne faut pas qu'elles prennent la forme de prévisions ou de probabilités ou qu'elles soient un élément de déclarations d'intention ou de stratégies visant à forcer les négociations.
Il importe d'analyser les faits pertinents bien au-delà des simples intentions ou déclarations ou de toute action de l'employeur à cet effet Note de bas de page 27 . Il faudra examiner, par exemple, s'il y a rupture des négociations, fin des pourparlers, transfert réel des activités, liquidation d'actifs, avis pertinents de fermeture au ministère du Travail, versement des sommes dues lors d'une fermeture définitive, etc., afin de voir s'il ne s'agit pas plutôt d'une manœuvre d'intimidation ou d'une façon de contrer un syndicat intraitable.
Il peut arriver que les travailleurs reçoivent une lettre les informant que leur emploi prendra fin à telle date s'ils ne reprennent pas le travail ou que l'entreprise fermera ses portes si les offres sont rejetées. De tels avis ne signifient pas nécessairement qu'un employeur a fermé son entreprise, même lorsqu'il a payé les congés accumulés et remboursé les cotisations au régime de pension. Il peut très bien s'agir d'une ruse pour inciter les salariés à reprendre le travail.
La vente ou la fermeture de secteurs d'une entreprise ne met pas nécessairement fin à un conflit ou à un arrêt de travail Note de bas de page 28 . Ces événements peuvent se poursuivre même s'il y a un nouvel acquéreur. De façon générale, ce dernier n'a souvent d'autres choix que de reconnaître le syndicat en place et de respecter les ententes et contrats de travail signés précédemment. Il se peut par ailleurs que cela donne lieu à une restructuration permanente des activités.
Un employeur peut procéder à une restructuration des activités pour maintenir certains services essentiels, le temps que soit trouvée une solution au conflit. Ce n'est évidemment pas là ce qu'on appelle une restructuration permanente. De telles mesures exceptionnelles ou temporaires ne doivent pas être prises en considération pour rajuster la situation en fonction de ce que devrait être le niveau normal Note de bas de page 29 . Elles ne doivent pas non plus servir aux fins du calcul du minimum de 85 % Note de bas de page 30 .
Il doit s'agir d'une restructuration véritable et durable du groupe de travailleurs ou des activités touchées par l'arrêt de travail Note de bas de page 31 et non d'un quelconque déplacement de bureaux ou d'un petit changement de fonctions. Cela n'a aussi rien à voir avec une restructuration ponctuelle qui résulte du passage de la saison d'activité à la saison morte Note de bas de page 32 .
Pour tenir compte des effets d'une restructuration permanente des activités qui découlerait du fait que les conditions économiques ou du marché ont changé ou que sont survenus des changements technologiques, il faut qu'il y ait eu reprise des activités Note de bas de page 33 .
Pour conclure, disons que lorsque l'une des trois circonstances prévues empêchent que soit atteint le minimum de 85 % par rapport à la situation normale, on fera un nouveau calcul. Le but est de voir si le nombre d'employés au travail et les activités de production atteignent le minimum de 85 %, mais cette fois-ci par rapport à la situation normale ajustée en fonction de ces nouvelles circonstances, c'est-à-dire en soustrayant toute baisse du nombre d'employés et des activités qui est attribuable à ces circonstances.
8.11.5 Changements des conditions économiques ou du marché ou changements technologiques
Lorsque les activités reprennent et que des changements des conditions économiques ou du marché ou des changements technologiques surviennent, ceux-ci peuvent empêcher que soit atteint le minimum de 85 % des niveaux normaux des deux indicateurs dont il est fait mention dans le Règlement Note de bas de page 34 . Il est prévu dans ce cas de faire un nouveau calcul pour vérifier si le minimum de 85 % est atteint, mais par rapport cette fois aux niveaux normaux rajustés en fonction de ces changements. Cet élément est essentiel puisqu'il détermine le moment auquel l'arrêt de travail prend fin Note de bas de page 35 .
Ces changements, faut-il préciser, ne sont pas, de façon générale, propres à la seule entreprise où a lieu l'arrêt de travail, mais n'en ont pas moins une incidence déterminée sur la situation qu'elle connaîtrait normalement. La plupart du temps, leur incidence se fait sentir sur tout un secteur d'activité dont fait partie l'entreprise ou même sur l'ensemble de l'économie dans un contexte par exemple d'informatisation, de robotisation, de libre-échange, de réduction de quotas, de hausse des taux d'intérêt, de fluctuation du cours du dollar, de diminution de la demande de produits ou de services sur le marché, etc.
De tels changements s'inscrivent dans un cycle de transformations, de progrès technologiques, de rationalisation des activités, d'internationalisation des échanges, de croissance ou de récession économique et d'évolution des marchés; ils ont une incidence déterminante sur les activités d'un ensemble d'entreprises et transforment la situation normale pour une période indéterminée ou même de façon permanente.
C'est au moment de la reprise des activités Note de bas de page 36 paralysées par l'arrêt de travail qu'on doit déterminer si ces changements empêchent que soit atteint le minimum de 85 % des niveaux normaux de chaque indicateur. Il ne serait d'aucune utilité de le faire avant si de toute évidence aucune activité n'est exercée du fait de l'arrêt de travail attribuable au conflit.
Les conditions économiques ou du marché qui sont à l'origine de la saison morte dans un secteur d'activité dont fait partie l'entreprise ne modifient pas à proprement parler sa situation normale. Ces changements des conditions se produisent ponctuellement d'année en année, et les niveaux révélant la situation normale à ce moment-là tiennent déjà compte des conditions économiques ou du marché qui sont propres à la saison morte. Il n'y a donc pas lieu de rajuster ces niveaux si jamais les parties en viennent à une entente au cours de la saison morte Note de bas de page 37 .
Des changements des conditions économiques ou du marché et des changements technologiques peuvent avoir pour conséquence la restructuration permanente des activités d'une entreprise. Ces circonstances sont prévues à un autre alinéa du Règlement Note de bas de page 38 . Que le cas soit considéré en vertu de l'un ou l'autre alinéa n'a guère d'importance, puisque c'est à la reprise des activités que ces circonstances peuvent véritablement avoir une incidence sur le moment où prend fin l'arrêt de travail.
Supposons qu'à la reprise des activités, des changements des conditions économiques ou du marché ou des changements technologiques entraînent une réduction de 10 % des employés au travail et des activités de l'entreprise, de sorte que le minimum de 85 % des 100 employés normalement au travail et des 1000 unités normalement produites chaque jour ne peut être atteint. Le Règlement Note de bas de page 39 prévoit que le minimum de 85 % déterminant le moment où l'arrêt de travail prend fin doit être calculé à nouveau, mais cette fois par rapport à 90 employés et à 900 unités de production qui constituent les niveaux normaux rajustés en fonction de l'incidence des changements sur l'entreprise.
8.11.6 Mesures exceptionnelles ou temporaires
La situation normale d'une entreprise, a-t-on vu Note de bas de page 40 , correspond aux niveaux normaux des employés au travail et des activités qui existeraient en l'absence du conflit collectif et de l'arrêt de travail. Ces niveaux n'ont rien à voir avec ceux qui ont pu être obtenus grâce à des mesures exceptionnelles ou temporaires prises par l'employeur pour augmenter par exemple la capacité de production ou la quantité de produits entreposés ou pour devancer l'exécution de certains contrats en prévision d'un arrêt de travail ou pour atténuer les effets de cet arrêt.
Un employeur peut accorder temporairement la priorité à certaines tâches, quitte à en délaisser d'autres jugées moins utiles, ou conjuguer les efforts d'autres employés pour maintenir des services essentiels ou même retenir les services de briseurs de grève.
Le fait que l'employeur ait pris certaines dispositions pour maintenir à son niveau normal la production de l'entreprise ou celle d'un groupe plus petit de travailleurs ne signifie pas nécessairement qu'il n'y a pas eu d'arrêt de travail. En règle générale, on peut dire qu'il y a arrêt de travail lorsque l'employeur maintient son niveau d'activités grâce à des mesures exceptionnelles ou temporaires Note de bas de page 41 , quel que soit le succès que remportent ces mesures.
Il n'est pas rare que ces mesures aient un effet négatif sur le travail, qui doit être exécuté ailleurs, de sorte que l'activité de l'entreprise dans son ensemble s'en trouve perturbée. L'abandon temporaire du travail de bureau et d'entretien au seul profit de la production par exemple constitue un arrêt de travail dans des secteurs autres que la production Note de bas de page 42 ; quel que soit le niveau de production, on doit conclure qu'il y a arrêt de travail si les activités interrompues dans les autres secteurs sont relativement importantes.
Il faut savoir si les moyens auxquels l'employeur a recours vont devenir permanents, si les grévistes vont retourner au travail une fois le conflit réglé et si, de fait, ils ont repris leur poste.
Pour décider du caractère permanent ou provisoire des mesures prises par l'employeur, il faut examiner :
- le volume des activités touchées;
- le nombre de salariés en grève;
- le nombre et le genre des travailleurs qui les remplacent;
- si le remplacement est permanent ou provisoire Note de bas de page 43 ;
- si les heures de travail effectuées sont normales, si les activités sont réalisées aux dépens d'une autre activité tel que l'entretien ou les réparations;
- si l'activité négligée est importante;
- si le lien entre l'employeur et les employés est définitivement rompu Note de bas de page 44 .
Ce serait aller à l'encontre de l'objet même des dispositions de la Loi touchant les conflits collectifs et créer une injustice grave que d'autoriser le paiement de prestations à des grévistes au seul motif que l'employeur a réussi à reprendre ou à maintenir ses activités normales grâce à des mesures exceptionnelles.
Cela est particulièrement vrai lorsque le conflit ne met en cause qu'un petit nombre de travailleurs et que l'employeur réussit à prendre des mesures qui empêchent l'arrêt de travail de se produire. On peut difficilement prétendre qu'un arrêt de travail s'est produit lorsqu'une grève de quelques travailleurs n'a aucun effet important sur les activités courantes.
Il se peut également que ce soit à la reprise des activités que l'employeur prenne des mesures exceptionnelles ou temporaires dans le but d'atténuer les effets de l'arrêt de travail. De telles mesures ne doivent pas entrer en ligne de compte aux fins du calcul du minimum de 85 % Note de bas de page 45 .
8.11.7 Embauchage de nouveaux travailleurs permanents
Il faut se rappeler Note de bas de page 46 que le fait qu'un employeur ait réussi, en prévision ou à la suite d'un arrêt de travail dû à un conflit collectif, à reprendre ou à maintenir pour une grande part les activités par des mesures exceptionnelles ou temporaires, hors du cours normal des opérations, ne permet pas de conclure qu'il n'y a pas eu d'arrêt de travail ou que cet arrêt a pris fin Note de bas de page 47 .
Un arrêt de travail peut toutefois prendre fin s'il y a retour à la normale des activités grâce au recours à des moyens réguliers et permanents Note de bas de page 48 , ce qui n'exclut pas la possibilité que des moyens jugés temporaires puissent devenir permanents après un certain temps.
La fin de l'arrêt de travail ne signifie pas nécessairement dans ce contexte que les employés habituels sont de retour à leur poste; l'employeur peut, par exemple, les avoir remplacés par de nouveaux venus, ce qui a amené une reprise des activités Note de bas de page 49 . On s'interrogera alors sur le caractère permanent ou provisoire des mesures prises par l'employeur.
Des positions radicales peuvent parfois être prises à l'occasion de conflits particulièrement virulents. C'est ainsi par exemple que l'employeur peut renvoyer définitivement des employés en grève et embaucher, à leur place, du personnel qu'il qualifie de permanent. Plus souvent qu'autrement, il faut considérer que cette mesure s'inscrit dans le cadre d'une stratégie globale de réaction, d'usure, de dénigrement et d'intimidation pour forcer la solution du conflit à son avantage et se débarrasser d'éléments radicaux. On ne devrait, de façon générale, y voir là qu'une mesure exceptionnelle ou temporaire dont il n'est pas tenu compte aux fins du calcul du minimum de 85 % Note de bas de page 50 .
8.11.8 Fermeture pendant la morte-saison
Précisons tout de suite qu'il ne s'agit pas ici de la cessation d'emploi saisonnière d'une seule personne Note de bas de page 51 , mais plutôt de celle de l'ensemble des travailleurs d'une entreprise ou d'un secteur particulier de l'économie occasionnée par l'arrêt d'exploitation au cours de la morte-saison; on peut penser, par exemple, au transport maritime sur les voies navigables au cours de l'hiver, à l'agriculture ou à certains types de loisirs ou d'activités propres à certaines saisons.
La morte-saison est définie comme étant l'époque de l'année où l'activité est réduite dans un secteur de l'économie; on s'attend en principe à ce qu'elle s'étende sur une période suffisamment longue, une saison sinon plus, et qu'elle survienne à nouveau, bon an mal an, à période relativement fixe chaque année, ce qui exclut à toutes fins pratiques tout ralentissement des activités qui ne serait qu'épisodique, occasionnel ou de courte durée.
Il est alors à propos de se demander si tous les travailleurs qui ont perdu leur emploi avant le début de la morte-saison, à cause d'un arrêt de travail attribuable à un conflit collectif, vont demeurer inadmissibles au bénéfice des prestations pendant toute la morte-saison, d'autant plus si celle-ci couvre, selon le secteur d'activité, une période de trois à six mois.
Bien que l'on ait cru à une certaine époque que l'inadmissibilité pouvait être levée le jour où le prestataire pouvait prouver que, même en l'absence du conflit collectif, il n'aurait pu travailler, ce qui est assurément le cas lors d'une fermeture saisonnière, cette ligne de pensée n'en paraît pas moins inconciliable avec la disposition de la Loi qui porte que l'inadmissibilité ne peut prendre fin que dans l'une ou l'autre des éventualités prévues aux alinéas a) et b) qu'elle renferme. Il n'est pas possible d'interpréter l'un ou l'autre de ces deux alinéas comme signifiant que l'inadmissibilité prend fin lorsque le conflit collectif cesse d'être la cause réelle du chômage Note de bas de page 52 .
Il faut retenir en définitive la cause de la perte d'emploi du prestataire au moment précis où il est devenu chômeur plutôt que celle de son état de chômage subséquent et ce, peu importe qu'il s'agisse d'une fermeture saisonnière ou d'une période de congé telle celle des Fêtes ou des vacances estivales Note de bas de page 53 . On abordera la question de façon différente si, dans un cas donné, il y a rupture complète et définitive de la relation employeur-employé Note de bas de page 54 , de sorte que les conditions de non-application énoncées dans la Loi soient désormais remplies.
Enfin, on peut considérer que l'arrêt de travail a pris fin lorsque le règlement du conflit survient au cours de la saison morte, même si effectivement ce n'est que plusieurs mois après que la reprise des activités a lieu Note de bas de page 55 . Le minimum de 85 % calculé en fonction d'une situation normale représentant un niveau très réduit, sinon nul, d'employés et d'activités peut facilement être atteint.
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