Guide de la détermination de l'admissibilité Chapitre 8 - Section 10

8.10.0 Suspension de l'inadmissibilité

Sous certaines conditions, une inadmissibilité peut être suspendue pendant toute période pour laquelle le prestataire prouve avoir autrement droit à d’autres genres de prestations (section 8.10.1 du Guide).

8.10.1 Avoir autrement droit aux prestations

La suspension de l’inadmissibilité n’est possible que pendant la période pour laquelle le prestataire établit avoir autrement droit à des prestations pour l’une des raisons suivantes :

  • la grossesse;
  • les soins à donner à un enfant nouveau-né ou placé en vue de son adoption;
  • les soins ou le soutien à prodiguer à un membre de la famille gravement malade ou blessé;
  • une maladie, une blessure ou une mise en quarantaine;
  • une participation à une activité d’emploi ou un cours de formation auquel le prestataire a été dirigé par une autorité désignée de la Commission (LAE 12(3) et LAE 25).

Il est important de connaître les raisons pour lesquelles un prestataire demande des prestations pendant une période d’inadmissibilité imposée en raison d’un conflit collectif. La suspension de l’inadmissibilité n’est pas envisagée si la raison n’est pas l’une des raisons mentionnées ci-dessus.

La première étape consiste à déterminer si le prestataire a autrement droit aux prestations pour la raison invoquée, malgré l’arrêt de travail. Le prestataire doit d’abord remplir les conditions d’admissibilité liées au genre de prestations qu’il demande, comme le fait d’avoir accumulé le nombre d’heures d’emploi assurable requis et d’avoir des documents à l’appui de ses déclarations et de la période pour laquelle les prestations sont demandées. Par exemple, un prestataire de la deuxième catégorie (qui a accumulé moins de 600 heures au cours de sa période de référence) ne peut pas recevoir des prestations de maternité (LAE 22(1)), parentales (LAE 23(1)), de compassion (LAE 23.1(1)) ou pour proches aidants (d’enfants ou d’adultes) (LAE 23.2(1) et (LAE 23.3(1)). Il en va de même dans le cas d’un prestataire qui a déjà reçu le maximum des prestations de maladie payables (LAE 12(3)) et qui demande ultérieurement d'autres semaines de ce genre de prestations au cours de l’arrêt de travail.

L’inadmissibilité imposée en raison d’un conflit collectif ne sera pas suspendue dans le cas d’une personne qui, pendant l’arrêt de travail, est en droit de recevoir des prestations du Régime québécois d’assurance parentale. En règle générale, cette personne ne peut prouver avoir autrement droit aux prestations de maternité ou parentales d’assurance-emploi (RAE 76.09).

Au cours d’une période de prestations, un prestataire peut fournir plusieurs raisons pour demander des prestations et certaines pourraient permettre la suspension de l'inadmissibilité. Par exemple des prestations de maladie peuvent être suivies de prestations maternité et ensuite suivies de prestations parentales. Chacun de ces genres de prestations doit être examiné séparément eu égard aux conditions d’admissibilité qui lui sont propres.

Le fait d’avoir autrement droit aux prestations pour l’une des raisons mentionnées ne garantit pas que l’inadmissibilité sera suspendue. La Loi prévoit une condition supplémentaire à remplir. C’est ce que nous allons voir dans la prochaine section.

8.10.2 Condition supplémentaire

Une période d’inadmissibilité ne peut pas être suspendue pour la simple raison qu’il existe une période pour laquelle le prestataire aurait autrement droit à d’autres genres de prestations (section 8.10.1 du Guide). Conformément au LAE 36(3), le prestataire doit également remplir une condition supplémentaire.

Il doit prouver qu’avant l’arrêt de travail :

  1. l’absence de son emploi était prévue pour la raison pour laquelle il demande des prestations, et;
  2. des démarches en lien avec cette absence avaient été effectuées.

La condition supplémentaire n’entre pas en jeu lorsqu’il n’existe pas de période pour laquelle le prestataire aurait autrement droit à des prestations.

Cette condition supplémentaire permet essentiellement de faire abstraction de l’arrêt de travail et d’accorder au prestataire d’autres genres de prestations lorsque, l’absence était prévue et que des démarches à cet effet avaient été effectuées avant l’arrêt de travail. Cela empêche l’accès aux prestations à ceux qui chercheraient, au cours de l’arrêt de travail, à se soustraire à l’inadmissibilité.

Il est nécessaire d’établir à quel moment s’est produit l’arrêt de travail pour pouvoir déterminer avec exactitude si l’absence était prévue et si des démarches à cet effet ont bien été faites avant l’arrêt de travail. Tout cela se complique s’il est survenu au lieu de travail du prestataire plusieurs arrêts de travail de plus ou moins longue durée attribuables à un même conflit collectif. Dans ce cas, on retiendra l’arrêt de travail qui est lié à l’inadmissibilité dont le prestataire demande la suspension.

Cette condition supplémentaire impose deux obligations distinctes au prestataire. Il doit non seulement prouver que l’absence de son emploi pour l’une des raisons mentionnées dans la Loi était prévue avant l’arrêt de travail mais aussi, qu’il a effectué des démarches en prévision de cette absence avant que se produise l’arrêt de travail. Il n’est pas nécessaire que la période d’absence exacte ait été fixée ou connue avant le début de l’arrêt de travail. Une absence prévue pour une raison autre que celles qui sont mentionnées dans la Loi ou qui n’a pas été accompagnée de démarches concrètes à cet effet n’est pas conforme à cette condition. Il en va de même des démarches qui n’étaient pas reliées à l’absence prévue ou qui n’ont débuté qu’une fois l’arrêt de travail en cours.

Une déclaration du prestataire à l’effet que des démarches avaient débutées n’est pas suffisante pour éviter une inadmissibilité. Le prestataire doit corroborer ses allégations grâce à des documents, à des attestations ou à d’autres renseignements à l’appui. Par exemple, il peut montrer qu’il a avisé l’employeur avant l’arrêt de travail de l’éventualité d’une absence, ou qu’il lui a demandé à ce moment une autorisation de s’absenter. De telles démarches ne prouvent toutefois pas toujours que le prestataire remplit parfaitement la condition supplémentaire.

De fait, ces démarches auprès de l’employeur sont la plupart du temps les dernières que fait une personne qui prévoit s’absenter de son emploi. Selon la raison de l’absence, le prestataire doit effectuer d’autres démarches, et ce sont ces démarches qu’il doit fournir à la Commission comme preuve qu’elles ont débuté avant l’arrêt de travail. Il n’est pas nécessaire que ces démarches aient été terminées avant l’arrêt de travail. Il faut aussi savoir qu’une personne peut avoir effectué des démarches sans en avoir parlé à son employeur. Le fait que le prestataire se soit absenté de son emploi avec ou sans l’autorisation de l’employeur ou encore ait fait des démarches à l’insu de son employeur ne change rien au fait que les démarches avaient débuté.

Il appartient la Commission de déterminer ce qui constitue une preuve acceptable du fait que le prestataire remplit la condition supplémentaire.

8.10.3 Preuve acceptable

Il faut plus qu’une simple allégation du prestataire, selon laquelle son absence était prévue et que des démarches à cet effet avaient été effectuées avant l’arrêt de travail. Il est essentiel que le prestataire fournisse les renseignements, les explications et lorsque requis, les documents pertinents à l’appui d’une telle allégation, de sorte que l’on puisse raisonnablement conclure qu’il remplit la condition supplémentaire.

Ainsi, on acceptera comme preuve, dans le cas d’une grossesse, une attestation indiquant la date prévue ou réelle de la naissance de l’enfant qui a été fournie avec la demande de prestations, car elle établit que la prestataire était enceinte avant le début de l’arrêt de travail.

En ce qui concerne les soins à donner à un nouveau-né, une preuve acceptable pourrait être une confirmation par l’employeur de la présentation d’une demande de congé pour une telle absence avant l’arrêt de travail. Une personne pourrait aussi démontrer par ses antécédents de travail que son absence était prévue et planifiée pour prendre soin du nouveau-né, si cela avait été le cas pour une naissance précédente. En outre, on pourrait accepter une déclaration si elle démontre que des démarches avaient été prises avant l’arrêt de travail, pour que la prestataire prenne un congé pendant un certain temps afin de prendre soin de son enfant nouveau-né.

Une attestation d’un médecin ou d’un infirmier praticien pourrait aussi établir qu’il était connu avant le début de l’arrêt de travail que l’état de santé de l’enfant nouveau-né devait nécessiter que l’un des parents ait à s’absenter de son emploi ultérieurement.

En ce qui concerne les congés de compassion, il sera demandé au prestataire de soumettre un certificat médical pour prestations de compassion attestant que l’état de santé du membre de la famille gravement malade dont le risque de décès à l’intérieur d’une période de 26 semaines est élevé requiert des soins ou du soutien d’un ou plusieurs membres de la famille. Une preuve acceptable pourrait être la confirmation de l’employeur indiquant que les démarches pour une absence du travail en ce sens avaient été effectuées avant l’arrêt de travail.

Les prestataires qui demandent des prestations pour proches aidants doivent présenter un certificat médical signé par un professionnel de la santé. Une attestation d’un professionnel de la santé indiquant que le membre de la famille est gravement malade ou blessé et requiert des soins ou du soutien d’un membre de la famille est requise. Ce certificat médical doit également préciser la période au cours de laquelle le patient devrait recevoir des soins ou du soutien.

En ce qui a trait aux congés de maladie ou pour blessure ou mise en quarantaine, on demandera au prestataire de présenter un certificat médical attestant que l’absence était prévue avant le début de l’arrêt de travail, et que des démarches en ce sens avaient été effectuées avant le début de l’arrêt. Cela concerne strictement les cas de maladie ou de blessure pour lesquels une absence était prévue et à propos desquels des démarches avaient été effectuées avant le début de l’arrêt de travail, que ce soit pour fins de traitement, d’intervention chirurgicale ou de séjour dans un centre de désintoxication.

N’entrent pas dans cette catégorie les cas de maladie ou de blessure diagnostiqués avant l’arrêt de travail, mais pour lesquels il n’était pas prévu, avant le début de l’arrêt de travail, qu’il y aurait éventuellement absence de l’emploi. Il en va de même dans les cas de maladie ou de blessure survenus avant le début de l’arrêt de travail et pour lesquels le prestataire n’a entrepris des démarches en vue de s’absenter de son emploi qu’après le début de l’arrêt.

On pourrait toutefois accepter les cas de maladie liés à une condition chronique ou dégénérative, entraînant épisodiquement une absence du travail, lorsque leur existence était connue avant le début de l’arrêt de travail.

Pour les participants à un cours ou à une activité d’emploi, il suffit que l’autorité désignée confirme qu’il y a eu recommandation de suivre un cours de formation ou une activité d’emploi et que les démarches pour la participation avaient débutées avant l’arrêt de travail.

Mentionnons finalement qu’une vague possibilité d’absence, sans plus de précisions, n’est pas suffisante pour en arriver à la conclusion que l’absence était prévue. Il est nécessaire de constater que les éléments de prévision, de planification ou d’organisation existaient avant le début de l’arrêt de travail pour qu’une absence soit considérée comme ayant été « prévue » avant l'arrêt. La situation dont nous traitons ici est celle d’un prestataire qui a effectué des démarches avant le début de l’arrêt de travail et dont l’absence de son emploi était l’un des résultats prévus.

8.10.4 Période de suspension

La suspension de l’inadmissibilité permet de verser les prestations du genre auquel un prestataire prouve qu’il a droit, indépendamment du conflit collectif en cours. Le fait que le prestataire participe au conflit, le finance ou y soit directement intéressé n’a aucune incidence pendant la période où il remplit les exigences de la Loi relativement à la suspension de l'inadmissibilité (LAE 36(3); section 8.10.1 du Guide et section 8.10.2 du Guide).

Il y a suspension de l’inadmissibilité tant que ces conditions sont remplies. Une fois que le prestataire n’est plus admissible à un autre genre de prestations au cours de la période de prestations, l’inadmissibilité due au conflit collectif est automatiquement rétablie. En outre, dans la mesure où les exigences de la Loi sont remplies, il est possible qu’il y ait plus d’une période de suspension de l’inadmissibilité au cours d’un même arrêt de travail ou d’une même période de prestations.

Le fait qu’il y ait suspension de l’inadmissibilité n’empêche aucunement que le conflit collectif et l’arrêt de travail suivent leurs cours, qu’un règlement intervienne entre les parties ou même, que le prestataire remplisse à un moment donné toutes les conditions de non-application (LAE 36(4) et section 8.1.4 du Guide). Lorsque la situation permet de mettre fin à l'inadmissibilité, la question de la suspension devient non pertinente.

La suspension de l’inadmissibilité ne signifie pas que le prestataire recevra immédiatement les prestations demandées. Un prestataire peut être tenu d’observer, au cours de la période de suspension, un délai de carence, une autre période d’inadmissibilité, une période sur laquelle sa rémunération est répartie ou même une exclusion du bénéfice de prestations qui seraient autrement payables. Aucune prestation ne peut être versée tant que toutes ces conditions n’ont pas été remplies.

[Avril 2019]

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