Guide de la détermination de l'admissibilité Chapitre 8 - Section 6

8.6.0 Participation

Les dispositions prévoyant l’inadmissibilité en cas de conflits collectifs ne s’appliquent pas si le prestataire prouve, entre autres, qu’il ne participe pas au conflit collectif qui a causé l’arrêt de travail (section 8.1.4 du Guide).

Le fait que d’autres travailleurs du même groupe ou de la même catégorie que le prestataire y participent n’a pas d’incidence sur l’admissibilité du prestataire aux prestations.

8.6.1 Définition de participation

Pour un travailleur, il existe de multiples façons de participer à un conflit collectif. Ce qu’il faut examiner, c’est la participation au conflit proprement dit, ce qui n’est pas nécessairement la même chose que la participation à l’arrêt de travail (CUB 55320).

Il est évident qu’une personne participe à un conflit lorsqu’elle est partie en cause, c’est-à-dire dès qu’elle négocie avec l’employeur, habituellement par l’entremise d’un représentant. Il importe donc de déterminer qui est partie au conflit et qui y a un intérêt direct, pour établir quels sont ceux qui par le fait même participent au conflit. Le principe ne change pas, même si une personne est en désaccord avec les revendications présentées par les personnes qui sont parties au conflit ou qui y ont un intérêt direct, ou avec les revendications du syndicat qui la représente.

La participation peut revêtir d’autres formes telles que rejeter les offres de l’employeur, faire du recrutement syndical, signer une pétition, assister aux assemblées, adopter une résolution d’appui aux grévistes, exercer son droit de vote, diminuer le rendement, présenter un avis de démission conditionnelle, refuser de travailler, d’obéir aux ordres ou de manipuler des matériaux frappés d’interdiction, ne pas se présenter au travail, retirer ses services, débrayer ou quitter son poste, prendre part au piquet de grève ou refuser de le franchir.

Ces formes traditionnelles de participation sont l’expression d’un mouvement d’appui aux revendications de travailleurs en conflit avec leur employeur, qui sont habituellement syndiqués. Elles caractérisent généralement les gestes et attitudes des travailleurs qui sont parties prenantes au conflit et qui y ont un intérêt direct. Il se peut aussi que ce soit par solidarité pour ces travailleurs que d’autres personnes prennent activement position à l’égard du conflit (section 8.2.3 du Guide).

Ce n’est pas parce qu’une personne exprime un sentiment de soutien envers des travailleurs engagés dans un conflit qu’elle y participe. Ce qu’il faut examiner, ce sont les faits et gestes de chaque personne. On ne considère pas qu’une personne participe au conflit si elle continue d’accomplir ses activités propres pendant le conflit, voire celles qui sont habituellement accomplies par les travailleurs en conflit.

8.6.2 Représentation syndicale ou autre

Lorsqu’un syndicat ou une autre association représente l’une des parties en cause dans un conflit, ce sont en principe tous ceux au nom desquels cet organisme négocie qui sont considérés comme des participants. C’est ainsi qu’une résolution adoptée par des dirigeants syndicaux en vue d’appuyer une grève déclenchée par un autre syndicat va engager tous les membres qu’ils représentent, de sorte que ceux-ci en deviennent tous participants (CUB 67605 et CUB 39832A).

Le fait qu’un travailleur fasse partie d’un syndicat ou d’une autre association ne signifie pas pour autant que le syndicat a l’autorisation d’agir en son nom concernant toutes les questions. Ce sont les gestes posés et la position prise par le prestataire relativement au conflit qui déterminent sa participation au conflit.

C’est ainsi que l’on jugera qu’un travailleur, membre d’un syndicat impliqué dans un conflit, y est participant dans l’une ou l’autre des situations suivantes. S’il :

  • suit la ligne de conduite établie par son syndicat;
  • assiste à une réunion syndicale où l’on décide de faire la grève ou d’adopter tout autre moyen de pression;
  • s’abstient ou refuse de se rendre au travail, respecte la ligne de piquetage;
  • ou se joint à une ligne de piquetage pour obéir aux directives de son syndicat.

On pourrait ajouter de nombreux exemples où un travailleur donne ainsi volontairement son appui au syndicat. Cette manifestation n’a nul besoin d’être d’envergure; le seul fait de ne pas exprimer son désaccord ou de ne pas se dissocier des revendications de son syndicat peut équivaloir à une participation au conflit (section 8.6.6 du Guide et section 8.6.7 du Guide). Le fait qu'une personne soit partie au conflit est suffisant pour conclure à sa participation (CUB 76451 et section 8.6.1 du Guide).

Si un syndicat ou une autre association est dûment accrédité, la position d’une personne par rapport au conflit importe peu. Que celle-ci soit en désaccord avec son syndicat ou son association et le manifeste ouvertement ne change rien, à moins que ce ne soit le groupe dans son ensemble qui exprime son désaccord.

La participation des employés est évidente lorsqu’une personne autorisée les représente à la table des négociations. Même si un membre est en congé au moment où survient le conflit, il n’en est pas moins participant (CUB 21571 et CUB 20347). Le fait qu’une personne soit membre d’un autre syndicat ou ne soit pas syndiquée peut révéler qu’elle ne participe pas personnellement au conflit, à moins qu’elle ne soit tout de même partie au conflit (section 8.6.1 du Guide).

8.6.3 Respect de la ligne de piquetage

L’établissement d’une ligne de piquetage est certes l’un des gestes les plus probants de l’existence d’un conflit de travail. Bien que cette ligne soit en principe érigée lorsqu’il y a une grève, on peut la retrouver tout autant quand c’est l’employeur qui a décidé de réduire ses activités à cause du conflit ou de fermer son établissement jusqu’à ce que le conflit soit réglé. Il va sans dire que le respect de la ligne de piquetage n’est plus pertinent lorsqu’il y a un lock-out complet, puisque de toute évidence, aucune tâche ne peut être confiée aux personnes qui se présentent au travail. Toutefois, pour celles qui participent au conflit, il constitue une preuve évidente de participation (CAF A-270-91, CUB 19037).

Les travailleurs syndiqués ont l’habitude de respecter les lignes de piquetage en guise de solidarité syndicale (CUB 63282 et CUB 48786). Le respect d’une ligne de piquetage, que ce soit par solidarité ou pour se conformer aux directives syndicales, ou tout refus de franchir une ligne de piquetage pacifique est considéré comme une participation. Le fait qu'il peut exister une clause de la convention collective prévoyant que les employés qui refusent de franchir une ligne de piquetage n’enfreignent pas la convention ou qu’il y ait une autre clause prévoyant qu’en cas de formation d’une telle ligne, la convention collective est jugée échue, n’y change rien.

Les travailleurs qui refusent de franchir une ligne de piquetage et qui s’abstiennent ainsi de travailler sont considérés comme étant rangés du côté des grévistes et soutenant leurs revendications (CAF A-269-91, CUB 19033). Ce serait aller à l’encontre de l’objet de la Loi que de décider qu’ils ont quand même droit aux prestations. À l’inverse, le fait que des travailleurs non impliqués dans le conflit franchissent la ligne de piquetage ne signifie pas qu’ils participent au conflit en appuyant leur employeur; ils ne font en fait que respecter le contrat de travail conclu avec leur employeur (section 8.6.1 du Guide).

La question à savoir si le respect de la ligne de piquetage découle de convictions personnelles ou de conseils reçus d’un tiers, plutôt que de la volonté de se conformer aux directives syndicales, n’est pas pertinente. Pour déterminer s’il y a ici une forme de participation au conflit, il faut se demander si le travailleur a de fait respecté la ligne de piquetage et non pas s’il avait de bonnes raisons pour le faire. En réalité, la question à se poser est la suivante : est-ce que le refus ou l’omission de franchir la ligne de piquetage correspond à un retrait volontaire des services (section 8.6.6 du Guide et section 8.6.7 du Guide)?

8.6.4 Mise à pied ou aucun travail disponible

Dans certaines situations, il se peut qu’un travailleur mis à pied soit informé que son rappel au travail est annulé ou, qu’il soit autrement avisé de ne pas se présenter au travail. Le simple fait que cet employé n’aurait pas été disposé à franchir la ligne de piquetage ne suffit pas pour conclure qu’il participe au conflit (CAF A-595-00, CUB 45670A). Évidemment, cela n’est valable que si c’est une personne autorisée qui a informé le travailleur de la mise à pied, annulé le rappel ou donné des directives équivalentes.

De même, on ne saurait dire qu’un groupe de travailleurs participe au conflit s’il est établi que l’employeur n’a pas de travail à lui offrir du fait que les grévistes ne sont pas à leur poste (CUB 76451 et CUB 56343). Cependant, lorsque l’employeur a quand même du travail à offrir au groupe, il importe peu de savoir combien de temps durerait ce travail, pour autant qu’il y en ait. Les déclarations de l’employeur de nature vague et générale doivent être scrupuleusement clarifiées.

Il arrive parfois que l’employeur suspende la totalité de ses activités parce que le syndicat lui a fait part de son intention de respecter la ligne de piquetage, ou qu’il mette à pied certains travailleurs parce que ceux-ci se sont abstenus de se présenter à leur poste. Il s’agit là d’une forme de participation des employés. Si des doutes existent quant à savoir qui a pris l’initiative d’interrompre toute activité de travail, l’omission des travailleurs de faire part à l’employeur de leur désir sincère de poursuivre leur travail jouera contre eux.

Une affirmation non confirmée selon laquelle il n’y aurait pas eu de travail pour les plâtriers puisque les manœuvres étaient en grève n’a pas été acceptée. Toutefois, lorsque la majorité des manœuvres ont franchi la ligne de piquetage composée de menuisiers et ont constaté qu’il n’y avait pas de travail pour eux, l’omission de certains d’en faire autant, sachant qu’il n’y avait pas de travail disponible, n’a pas joué contre eux.

À certains endroits, comme là où les débardeurs sont employés, on a recours à un système spécial pour faire connaître le moment et l’endroit où il y a du travail à offrir. Si du travail est disponible et que les employés ont un réel désir de travailler, ils ne peuvent pas simplement alléguer qu’ils n’ont pas été convoqués de façon réglementaire.

8.6.5 Droit de franchir le piquet de grève

Le Code criminel autorise les travailleurs à former des lignes de piquetage à la condition que ce soit fait de façon pacifique et que l’ordre ne soit pas troublé (CUB 63282 et CUB 48786). La ligne de piquetage a pour objet de faire savoir qu’une grève est en cours et de persuader verbalement les travailleurs du bien-fondé de la cause. Aucun gréviste n’a le droit d’empêcher quiconque de se rendre à son travail, car chaque travailleur a un droit légitime et indéniable de franchir une ligne de piquetage. Il existe des recours légaux en cas de non-respect de ce droit.

Il ne suffit pas de supposer que la présence d’une ligne de piquetage comporte en soi un risque de violence. Même s’il y a souvent une possibilité que des actes de violence en résultent, il ne faut pas présumer que toute tentative pour franchir la ligne de piquetage conduira à la violence.

8.6.6 Retrait volontaire des services

Le refus ou l’omission de franchir la ligne de piquetage est synonyme de participation pourvu qu’il s’agisse d’un retrait volontaire des services (CUB 63282 et CUB 48786). La décision reposera souvent sur une question de faits. Il incombe aux travailleurs de montrer qu’ils ne se sont pas abstenus volontairement de travailler (section 8.6.7 du Guide).

L’abstention de se présenter à son poste, par suite du refus ou de l’omission de franchir la ligne de piquetage, est présumée volontaire et est interprétée comme étant un geste de soutien envers les grévistes; on dira donc qu’il y a là une forme de participation. Cette présomption de faits est fondée sur le principe suivant : c’est volontairement que les travailleurs, le syndicat ou l’association agissant explicitement ou implicitement en leur nom décident qu’ils n’auront pas recours aux moyens que leur fournit la loi afin de faire valoir leur droit de franchir la ligne de piquetage.

Même si le syndicat ou l’association dont font partie les travailleurs préconise le respect des lignes de piquetage, un travailleur n’est pas moins libre d’agir selon son propre jugement et de décider s’il préfère suivre ou transgresser la ligne de conduite établie par le syndicat ou l’association. Ce choix, un que les travailleurs sont souvent appelés à faire, est purement volontaire.

C’est souvent sous peine d’amende ou d’expulsion que les membres doivent se conformer aux exigences syndicales; pour d’autres, c’est la crainte du déshonneur, d’être réputés briseurs de grève, ou de ne plus pouvoir obtenir de travail dans leur métier (CAF A-373-82, CUB 7065 et CAF A-838-91, CUB 20202). Ces raisons ne changent rien à la nature volontaire du retrait des services.

8.6.7 Réfutation du retrait volontaire des services

Lorsqu’un prestataire s’abstient de franchir une ligne de piquetage, il existe une forte présomption qu’il le fait en réponse à l’invitation des membres du syndicat en grève de se rallier à leur cause et de faire pression sur l’employeur pour l’inciter à accepter les revendications des grévistes. Cette présomption peut être réfutée par la preuve que le prestataire n’a pas franchi la ligne de piquetage par crainte légitime et raisonnable de représailles de nature violente (CAF A-373-82, CUB 7065, CAF A-269-91, CUB 19033, CAF A-879-82, CUB 79649 et CAF A-1036-92, CUB 21236).

Le non-gréviste qui désire vraiment continuer à travailler devrait, de son propre chef ou par l’entremise de son syndicat ou association, prendre toutes les mesures qui paraissent raisonnables pour parvenir à ses fins. Les mesures raisonnables dépendent de la situation.

Il n’est pas de preuve plus concluante en faveur du non-gréviste quant à son désir de continuer à travailler que de montrer qu’il a réellement essayé de convaincre les grévistes de le laisser franchir la ligne de piquetage. En cas de refus ou de menace, il peut demander la protection de la police pour exercer son droit de franchir la ligne de piquetage. L’affirmation selon laquelle la présence des agents de police incite souvent à la violence ne peut être acceptée.

Lorsque les grévistes sont présents en grand nombre ou qu’il y a des signes de violence, le non-gréviste peut être justifié d’attendre quelques jours avant d’essayer de franchir la ligne de piquetage. Les agissements des grévistes doivent faire l’objet d’un examen continu; ceux-ci peuvent être pacifiques une journée et recourir à la violence le lendemain.

Cependant, là où la situation est telle que des blessures ou des dommages matériels pourraient raisonnablement en résulter, on ne s’attend pas à ce que le travailleur aille jusqu’à utiliser la force pour franchir la ligne de piquetage.

Parmi les nombreux facteurs dont il faut tenir compte, on se demandera :

  • si la ligne de piquetage était composée d’un petit nombre de grévistes;
  • si le prestataire a effectivement essayé de franchir la ligne de piquetage;
  • si les efforts faits en ce sens étaient sincères et ont été tentés par quelques-uns ou par tout un groupe de travailleurs;
  • si les non-grévistes étaient plus nombreux que les grévistes;
  • si les deux groupes appartenaient à des syndicats affiliés;
  • si un effort a été fait ou aurait dû être fait pour obtenir le consentement des grévistes;
  • s’il n’avait d’autre choix que de s’abstenir de se présenter au travail;
  • s’il était pratique de demander la protection de la police;
  • si les grévistes ont eu recours à la violence ou proféré des menaces en ce sens (section 8.6.8 du Guide).

Quelle que soit la situation, le travailleur doit démontrer, à l’aide de témoignages suffisamment crédibles, qu’il éprouvait une crainte légitime de violence, et que c’est à cause de cette crainte qu’il s’est abstenu de franchir la ligne de piquetage. Si la crainte était légitime, on n’attachera pas beaucoup d’importance à l’omission de demander la protection de la police, toute protection pouvant difficilement être assurée 24 heures par jour.

8.6.8 Crainte légitime de violence

Le sentiment de crainte est essentiellement un état d’esprit qui diffère grandement d’une personne à l’autre. Il découle de la perception des événements, conjuguée à plusieurs autres facteurs. C’est ainsi que, placée devant l’obligation de franchir une ligne de piquetage pour rentrer au travail, une personne peut appréhender des gestes immédiats de violence à son égard ou des représailles éventuelles de la part des gens impliqués dans le conflit.

Il n’y a pas de commune mesure ou de règle absolue pour déterminer si quelqu’un a vraiment raison de craindre la violence. Dans ce contexte, la crainte seule n’est pas le facteur déterminant; elle ne devient légitime que si elle prend appui sur des éléments tangibles, des faits démontrant qu’existent de telles contraintes. Des hypothèses sans fondement ou de simples présomptions ne sont pas suffisantes. On dira que la crainte était injustifiée lorsqu’aucun acte de violence n’a été commis et que rien ne laissait croire que les grévistes avaient l’intention arrêtée de recourir à la force ou à la violence. Par contre, la crainte est considérée légitime là où toute tentative de franchir la ligne de piquetage aurait fort probablement amené des actes de violence ou des représailles (CUB 63282 et CUB 48786).

Ce qui peut justifier la crainte légitime d’actes immédiats de violence, ce sont évidemment des menaces sérieuses en ce sens. Le fait que les grévistes soient beaucoup plus nombreux que les non-grévistes, qu’ils appartiennent à un syndicat rival ou qu’il y ait déploiement de force de leur part, peut également servir d’indice de violence potentielle. On ne saurait dire que la crainte est légitime en se fondant uniquement sur des actes de violence survenus ailleurs ou plusieurs années auparavant.

La crainte de représailles à l’endroit de sa propre personne, de ses proches ou encore de dommages à ses biens peut aussi équivaloir à une crainte légitime de violence. Par représailles, on entend la violence physique; il n’est pas question de harcèlement moral comme d’être l’objet de mépris ou d’être qualifié de briseur de grève. Le fait que les lieux de travail puissent se prêter à des représailles n’est pas suffisant.

Une des seules façons possibles pour un travailleur de montrer que son refus ou son omission de franchir la ligne de piquetage n’équivaut pas à un retrait volontaire des services, est de démontrer que ses craintes étaient légitimes (CAF A-373-82, CUB 7065 et CAF A-269-91, CUB 19033). C’est pourquoi toute déclaration non étayée faite au nom d’une personne ou d’un groupe organisé de travailleurs, alléguant la crainte de la violence en vue d’établir leur admissibilité aux prestations, doit être soigneusement étudiée. En principe, une personne ne peut témoigner qu’à l’égard de ses propres craintes; quant à celle qui parle au nom d’autrui, elle devrait être priée d’indiquer sa source de renseignements.

Une étude des faits est essentielle pour examiner les positions des deux parties et déterminer si la menace de violence est légitime. La situation peut aussi varier d’une journée à l'autre. Il faut examiner le comportement des grévistes à la ligne de piquetage pour voir si ceux-ci montrent des signes d’hostilité à l’endroit des personnes qui désirent rentrer au travail, et déterminer dans quelle mesure cette animosité a pu se traduire par des menaces ou des gestes d’agressivité et de violence. On peut dire que ce climat de violence est d’autant plus présent dans le contexte où un conflit s’éternise, est déclenché illégalement, fait suite à la suspension de représentants syndicaux ou touche à la reconnaissance syndicale. Il en va de même lorsque l’employeur a recours à des briseurs de grève. Certains corps de métier ou unités syndicales peuvent aussi être reconnus comme faisant habituellement usage de tactiques d’intimidation.

Les communiqués de presse et articles de journaux peuvent être d’une certaine utilité dans cette recherche et évaluation des faits entourant le comportement des grévistes (section 8.1.10 du Guide). Un rapport de police n’est pas nécessairement concluant lorsqu’il mentionne qu’aucun incident n’a été signalé puisque, même les actes de violence et les menaces qui n’ont pas été signalés doivent entrer en ligne de compte.

Enfin, il n’est pas nécessaire que tous les travailleurs du même groupe ou de la même catégorie partagent cette crainte légitime de violence. Cependant, il appartient au travailleur lui-même de prouver qu’il ressent cette crainte et que c’est pour cette raison qu’il n’a pas essayé de franchir la ligne de piquetage.

8.6.9 Durée de la participation

La participation, on l’a vu, peut revêtir diverses formes et peut même exister que pendant une période donnée de l’arrêt de travail. Cela peut être le cas, par exemple, d’un travailleur qui n’est pas partie au conflit, n’y a pas d’intérêt direct et respecte la ligne de piquetage pendant une courte période ou une journée par semaine. Une telle participation, bien qu’épisodique, n’en fait pas moins du travailleur un participant au conflit collectif et ce, tant qu’il continue de donner son appui aux grévistes (CUB 15334).

Tant qu’il y a participation de la part du prestataire, les conditions de non-application ne sont pas remplies (section 8.6.1 du Guide). Pour ce qui est de la période où il n’y a pas de participation, l’inadmissibilité n’aura pas cours si les autres conditions de non-application sont également remplies (section 8.7.5 du Guide et section 8.8.11 du Guide). La participation d’autres travailleurs du même groupe ou de la même catégorie n’est pas un élément pertinent à considérer.

Ce raisonnement ne s’applique toutefois pas à une personne qui est mise à pied et qui n’a aucun intérêt direct au conflit collectif et ce, même si ce travailleur est prêt à se présenter au travail, à une date ultérieure, malgré la présence de la ligne de piquetage (section 8.6.4 du Guide).

[Avril 2019]

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