Chapitre trois : Instances judiciaires militaires : bilan de l’année

Les renseignements et les analyses fournis ci‑après rendent compte des activités du SCPM au cours de la période de référence relativement à l’ensemble des dossiers des cours martiales, les renvois, les révisions postérieures à l’accusation, les demandes de vérifications préalables à l’accusation, les appels et les audiences de révision du maintien sous garde.

Cours martiales

La présente section donne un aperçu et une analyse des affaires entendues en cour martiale au cours de la période visée par le présent rapport. Pour une ventilation complète de toutes les données sur les cours martiales pour la période de référence, veuillez consulter l’annexe A.

Nombre de procès en cour martiale

Au cours de la période visée par ce rapport, il y a eu en tout 51 procès en cour martialeNote de bas de page 15 . De ce nombre, 45 procès ont eu lieu devant une cour martiale permanente et six devant une cour martiale générale. Ces chiffres sont légèrement inférieurs au nombre moyen de causes entendues par les cours martiales au cours des cinq dernières années, soit 57. Ceci n’est pas étonnant, considérant que seulement trois juges militaires sur quatre ont siégé au cours de la période de référence. De plus, 40 causes ont été touchées par la décision rendue par la CACM dans l’affaire R. c. Beaudry,Note de bas de page 16  de sorte que la justice militaire n’a pas pu être saisie de ces causes. La figure 3 –1 illustre de façon détaillée le nombre de procès en cour martiale par type de cour martiale depuis 2014/2015.


Figure 3-1 : Nombre de cours martiales, par type

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Figure 3-1 : Répartition du graphique
  2014/15 2015/16 2016/17 2017/18 2018/19
Cour martiale générale 10 7 4 5 6
Cour martiale permanente 61 40 52 57 45
Total 71 47 56 62 51

Cours martiales : Résultats

À l’issue des 51 audiences tenues par les cours martiales, les accusés ont été déclarés coupables d’une ou de plusieurs infractions dans 43 cas, ont été acquittés de toutes les accusations portées contre eux dans six cas, ont vu toutes les accusations retirées dans un cas et ont fait l’objet d’une cessation des poursuites dans un cas. La figure 3‑2 présente une ventilation de tous les résultats des audiences tenues par les cours martiales depuis 2014‑2015.


Figure 3-2 : Cours martiales : Résultats

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Figure 3-2 : Répartition du graphique
  2014/15 2015/16 2016/17 2017/18 2018/19
Accusations retirées/cessation des procédures/suspension de l'instance 4 0 2 0 2
Non coupable de toutes les accusations 12 6 9 11 6
Coupable d'une ou de plus d'une accusations 55 41 45 51 43
Total 71 47 56 62 51

Peines imposées par une cour martiale

Une cour martiale impose une sentence unique à l’issue d’un verdict de culpabilité. Cette sentence peut être assortie de plusieurs peines. Au cours de la période de référence, 43 sentences ont été prononcées par des cours martiales, pour un total de 57 peines. La peine la plus fréquente fut l’amende, avec un total de 35 amendes infligées, ce qui représente 61 % de toutes les peines, prononcées dans 81 % de toutes les sentences. La deuxième peine la plus courante fut le blâme, infligé dans dix cas et représentant plus de 17 % de toutes les peines.

Au total quatre peines d’emprisonnement ont été infligées, ce qui représente près de 9 % de toutes les peines infligées. Le tableau 3‑3 présente une ventilation complète de toutes les peines infligées en cour martiale depuis 2014‑2015.


Tableau 3-3 : Peines infligées par la cour martiale

Peine 2014/15 2015/16 2016/17 2017/18 2018/19
Destitution 1 2 1 3 2
Emprisonnement 6 3 4 7 3
Détention 4 4 4* 4** 1***
Rétrogradation 1 3 9 9 2
Blâme 18 10 6 11 10
Réprimande 13 13 17 20 4
Amende 39 32 39 38 35
Peines mineures 0 0 0 0 0
Total 82 67 80 95 57

* Une de ces peines a été suspendue par le juge militaire.
** Trois de ces peines ont été suspendues par le juge militaire.
*** Cette peine a été suspendue par le juge militaire.

Délais en cour martiale

Au cours de la période de référence, le nombre moyen de jours écoulés entre le moment où le DPM a été saisi d’un dossier et celui où il a pris une décision au sujet de la mise en accusation était d’environ 88 jours. Ceci représente une diminution de 7 % par rapport à la période précédente. La figure 3‑4 illustre le nombre moyen de jours écoulés entre le renvoi et la décision relative à la mise en accusation pour les cinq dernières périodes.


Figure 3-4 : Nombre moyen de jours écoulés entre le renvoi et la décision relative à la mise en accusation

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Figure 3-4 : Répartition du graphique
  2014/15 2015/16 2016/17 2017/18 2018/19
Jours 54 69 89 95 88

Au cours de la période de référence, le délai moyen entre la mise en accusation et l’ouverture du procès était de 244 jours, une hausse de 33 jours par rapport à la période de référence précédente et de 16 jours par rapport à la moyenne des cinq années précédentes. La figure 3‑5 illustre le délai moyen entre la mise en accusation et l’ouverture des procès en cour martiale depuis 2014/2015.


Figure 3-5 : Nombre moyen de jours écoulés entre la mise en accusation et l’ouverture du procès en cour martiale

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Figure 3-5 : Répartition du graphique
  2014/15 2015/16 2016/17 2017/18 2018/19
Jours 255 179 250 211 244

Gestion des cas

Nombre de dossiers renvoyés

Au cours de la période visée par le présent rapport, 102 dossiers ont été renvoyés au DPM. Ce nombre est comparable à la quantité de dossiers renvoyés au DPM au cours des cinq dernières années, en l’occurrence environ 109. Lorsqu’on tient compte des 70 dossiers reportés de la période de référence précédente, un total de 172 dossiers ont été traités au cours de la présente période. Les 172 cas traités au cours de la présente période de référence constituent le deuxième nombre le plus faible de renvois traités au cours des cinq dernières années, mais il correspond généralement à la moyenne de 179 renvois par année, au cours des cinq dernières années.

Sur les 172 dossiers renvoyés, 154 ont été traités, en ce sens que le procureur a pris une décision au sujet de la mise en accusation, de sorte que 18 dossiers ont été reportés à la prochaine période de référence. Le nombre de dossiers reportés est bien inférieur au nombre de dossiers reportés au cours des cinq dernières années, soit environ 58 dossiers. La figure 3‑6 illustre le nombre total de dossiers renvoyés qui ont été traités au cours des cinq dernières périodes de référence.


Figure 3-6 : Nombre total de dossiers renvoyés traités

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Figure 3-6 : Répartition du graphique
  2014/15 2015/16 2016/17 2017/18 2018/19
Causes reportées de l'année précédente 76 60 64 81 70
Nombre de renvois reçus 101 98 126 118 102
Total 177 158 190 199 172

Au cours de la période de référence, 107 dossiers ont fait l’objet d’une mise en accusation, tandis qu’aucune mise en accusation n’a été prononcée dans 47 dossiers, de sorte que le pourcentage de mise en accusation est d’environ 69 %. Même s’il s’agit du taux de mise en accusation le plus élevé des cinq dernières périodes de référence, ce pourcentage n’est que légèrement plus élevé que le taux moyen de mise en accusation de 63 % pour les cinq dernières périodes de référence. Toutefois, comme on le démontre la figure 3-8, le nombre total de décisions provenant du bureau du DPM relatives à la mise en accusation est considérablement plus élevé qu’au cours des cinq dernières périodes de référence. Cela s’explique par le fait que, même s’il n’y a pas eu autant de renvois qu’au cours des années précédentes, beaucoup moins de dossiers ont été reportés à la période suivante, ce qui signifie que le taux de dossiers traités (90 %) était beaucoup plus élevé pendant la présente période de référence. La figure 3-7 montre le nombre total de mises en accusation prononcées et de décisions de ne pas donner suite à une accusation pour les cinq périodes de référence précédentes.


Figure 3-7 : Nombre de mises en accusation prononcées et de décisions de ne pas donner suite à une accusation

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Figure 3-7 : Répartition du graphique
  2014/15 2015/16 2016/17 2017/18 2018/19
Aucune suite 38 36 44 41 47
Mises en accusation 63 62 82 55 107
Total 101 98 126 96 154

Taux de mise en accusation par organisme d’enquête

Bien que tous les dossiers renvoyés au DPM sont reçus par l’entremise d’une autorité de renvoi, l’enquête peut provenir soit du SNEFC, d’un enquêteur de la police militaire qui ne fait pas partie du SNEFC ou d’un enquêteur de l’unité. Le taux de mise en accusation varie sensiblement d’un organisme d’enquête à l’autre. Ainsi, au cours de la présente période de référence, le taux de mise en accusation dans le cas des dossiers ayant fait l’objet d’une enquête de la part du SNEFC était de 94 %.Note de bas de page 17  Ce taux de mise en accusation est beaucoup plus élevé par rapport à ceux de la police militaire régulière et des enquêteurs d’unité, qui s’établissaient respectivement à 75 % et à 53 %. 

Cet écart entre les taux de mise en accusation est une constante depuis plusieurs années : les enquêtes menées par le SNEFC se soldant par une mise en accusation beaucoup plus souvent que celles menées par la police militaire régulière ou les enquêteurs d’unité. Pour un survol complet des taux de mise en accusation des agences d’enquête au cours des cinq dernières années, veuillez consulter la figure 3‑8.


Figure 3-8 : Taux de mise en accusation par organisme d’enquête

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Figure 3-8 : Répartition du graphique
  2014/15 2015/16 2016/17 2017/18 2018/19
SNEFC 64 94 90 100 94
Police militaire
60 63 66 53 75
Unité 63 54 54 37 53

 

Le DPM estime qu’il s’agit d’un problème et il a pris un certain nombre de mesures pour améliorer les taux de mise en accusation de tous les organismes d’enquête. Par exemple, au cours de la présente période de référence, il a modifié un certain nombre de ses directives stratégiques afin d’exiger de ses procureurs qu’ils fournissent une rétroaction à l’enquêteur chaque fois que la décision est prise de ne pas donner suite à une accusation et à la fin d’une cause devant une cour martiale dans le but d’améliorer la qualité des enquêtes à venir.

Vérifications préalables à l’accusation

Nombre de demandes de vérifications préalables à l’accusation

Les procureurs du SCPM sont chargés de procéder à des vérifications préalables à l’accusation tant pour le SNEFCNote de bas de page 18  que pour les conseillers juridiques des unitésNote de bas de page 19 . Au cours de la période de référence, 118 demandes de vérification préalable à l’accusation ont été soumises au SCPM. De plus, 16 demandes de vérifications préalables à l’accusation ont été reportées de la période précédente, pour un total de 134 dossiers de vérifications préalables à l’accusation traités au cours de la période de référence. Sur les 134 demandes de vérifications préalables à l’accusation, trois dossiers étaient toujours en instance à la fin de la période de référence.

Le nombre de dossiers de vérifications préalables à l’accusation par un procureur militaire est demeuré relativement stable au cours de la présente période de référence par rapport à la période précédente, où 129 demandes de vérifications préalables à l’accusation avaient été présentées. La figure 3‑9 illustre le nombre total de dossiers de vérifications préalables à l’accusation traités pour chacune des trois périodes de référence précédentes. 


Figure 3-9 : Nombre total de demandes de vérifications préalables traitées

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Figure 3-9 : Répartition du graphique
  2016/17 2017/18 2018/19
Demandes de vérification en instance 0 3 3
Demandes de vérification complétées 93 126 131
Total 93 129 134

Provenance des demandes de vérification préalable à l’accusation

Comme lors des périodes de référence pré-cédentes la plupart des demandes de véri-fication préalable à l’accusation provenaient du SNEFC. Au cours de la présente période, 91 demandes de vérifications préalables à l’accusation ont été soumises par le SNEFC en comparaison de seulement 43 demandes soumises par les conseillers juridiques des unités. La figure 3-10 illustre le nombre de demandes de vérifications préalables à l’accusation ventilé selon la provenance de la demande.


Figure 3-10 : Provenance des demandes de vérifications préalables à l’accusation

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Figure 3-10 : Répartition du graphique
  2016/17 2017/18 2018/19
Conseiller juridique d'unité 28 53 43
SNEFC 62 76 91
Total 90 129 134

Résultats des demandes de vérifications préalables à l’accusation

Au cours de la période de référence, la décision de porter des accusations a été recommandée dans 62 dossiers et celle de ne pas donner suite a été recommandée dans 67 autresNote de bas de page 20 . Par conséquent, des accusations ont été recommandées dans 48 % de toutes les demandes de vérifications préalables à l’accusation. La figure 3‑11 donne un aperçu du nombre de dossiers dans lesquels une mise en accusation a été ou non recommandée pour les trois dernières périodes de référence.


Figure 3-11 : Résultat des demandes de vérification préalable à l’accusation

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Figure 3-11 : Répartition du graphique
  2016/17 2017/18 2018/19
Dossiers transférés aux autorités civiles 0 0 2
Aucune accusation recommandée 40 66 67
Accusations recommandées 50 57 62
Total 90 123 131

Délais

La directive du DPM 002/00 (vérification préalable à l’accusation) prévoit que, lorsqu’on leur demande de fournir un avis préalable à l’accusation, les procureurs doivent fournir leur avis dans un délai de 14 jours à compter de la réception du dossier lorsque toutes les accusations proposées, y compris les infractions donnant ouverture à un choix, peuvent être jugées par procès sommaire, et dans un délai de 30 jours, dans les cas où une accusation mènerait automatiquement à un procès devant la cour martiale pour l’accusé. Au cours de la présente période de référence, le nombre moyen de jours écoulés avant que les procureurs fournissent un avis préalable à l’accusation après avoir reçu un dossier s’établissait à environ 48 jours. 

Catégories d’infractions

Tous les dossiers pour lesquels le DPM engage des poursuites se classent en quatre grandes catégories d’infractions : infractions liées à une inconduite sexuelle, infractions liées aux stupéfiants, infractions militaires liées au comportement, infractions relatives à la fraude et autres infractions contre les biens. Les sections suivantes illustrent le nombre de causes entendues par une cour martiale pour chaque infraction, le résultat pour chaque type de catégorie d’infractions, ainsi qu’un résumé de certaines causes notables au cours de la période de référence.

Infractions liées à une inconduite sexuelle

Des 51 causes jugées en cour martiale pendant la période de référence, 20 portaient sur une inconduite sexuelle et l’accusé a été déclaré coupable d’au moins une accusation dans 14 de ces 20 causes.

R. c. Reyes, 2018 CM 4015

L’adjudant-maître Reyes, réserviste, a plaidé coupable à une accusation de conduite déshonorante pour avoir produit subrepticement des enregistrements visuels d’une femme dans une salle de bain du manège militaire Denison, situé à Toronto. Il a été condamné à une peine de cinq mois d’emprisonnement et à une rétrogradation au rang de sergent.

Dans le cadre de l’examen de la recommendation conjointe des avocats de la poursuite et de la défense au sujet de la détermination de la peine, le juge militaire a souligné la gravité de l’abus de confiance reproché, eu égard au rang supérieur de l’adjudant-maître Reyes et à la nature envahissante de l’infraction. À la lumière de ces faits, des précédents jurisprudentiels et des principes de détermination de la peine, le juge a conclu que la peine proposée était raisonnable.

R. c. Paul, 2018 CM 4013

Le caporal-chef Paul a plaidé coupable à une accusation de conduite déshonorante de nature sexuelle. Au cours d’une réception tenue au mess des caporaux et soldats, durant la période des fêtes, l’accusé a touché la poitrine de l’épouse d’un subalterne.

Dans leur recommendation conjointe, les avocats ont recommandé une peine de rétrogradation au rang de soldat. Dans le cadre de la détermination de la peine, le juge militaire a examiné les facteurs aggravants, notamment le fait que le caporal-chef Paul avait assisté à un breffage officiel, à peine quelques heures avant l’incident, au sujet de l’Opération HONOUR, que le geste était très envahissant, qu’il constituait un abus de confiance à l’endroit des familles de militaires et qu’il démontrait une inaptitude à diriger de la part de l’accusé. Le juge a également examiné les facteurs atténuants, comme le fait que le caporal-chef a quitté volontairement les FAC après l’incident et qu’il a constamment déployé des efforts de réadaptation. Après avoir soupesé tous les facteurs, le juge a conclu que, même si elle est plutôt symbolique dans le cas d’un membre qui quitte de lui-même les FAC, la rétrogradation atteint les objectifs de la dissuasion et de la dénonciation mentionnés au para. 203.1(1) de la LDN sans compromettre les efforts de réadaptation de l’accusé.

Infractions liées au comportement

Des 51 causes jugées en cour martiale pendant la période de référence, 21 portaient sur une infraction liée au comportement et l’accusé a été déclaré coupable d’au moins une accusation dans 20 de ces 21 affaires.

R. c. McEwan, 2018 CM 4012 et 2018 CM 4019

Le caporal (à la retraite) McEwan a plaidé coupable à une accusation de défaut de comparaître devant un tribunal militaire, soit une infraction prévue à l’art. 118.1 de la LDN.

Alors qu’il avait entrepris des procédures de libération volontaire, le caporal McEwan a été accusé par son unité de s’être absenté sans permission. À deux occasions, le caporal McEwan a fait défaut de comparaître à son procès sommaire. Il a ensuite été accusé d’avoir fait défaut de comparaître devant le tribunal militaire et l’affaire a été renvoyée au DPM. À nouveau, le caporal McEwan a fait défaut de comparaître devant la cour martiale et, par conséquent, le juge militaire a délivré un mandat d’arrestation judiciaire contre lui.

Après son arrestation, le caporal McEwan a subi son procès devant la cour martiale, même s’il avait déjà été libéré de la force régulière, parce qu’il a commis l’infraction dont il était accusé alors qu’il était encore membre de la force régulière et assujetti au Code de discipline militaire. Le juge militaire a souligné que, même si l’accusé ne faisait plus partie de l’armée, « l’administration de la justice à l’endroit de M. McEwan a des répercussions sur les personnes qui y servent aujourd’hui ». Le juge a ajouté les remarques suivantes : « la LDN oblige les membres des FAC à y servir et à y rester en service actif jusqu’à ce qu’ils en soient légalement libérés. S’abstenir d’exiger qu’une personne se conforme à cette obligation simplement parce qu’elle est sur le point de quitter les FAC aurait pour effet d’envoyer un message d’impunité qui risque de porter préjudice au bon ordre et à la discipline dans le cas des personnes qui servent au sein des FAC ».

À l’audience relative à la détermination de la peine, le caporal McEwan a admis être l’auteur d’infractions d’ordre militaire de nature semblable à celle qui lui avait été reprochée devant la cour martiale, mais dont il n’avait pas été accusé officiellement. Ainsi que le permet l’art. 194 de la LDN, le juge militaire a accepté de tenir compte de ces infractions aux fins de la détermination de la peine comme si le caporal McEwan en avait été accusé, jugé et déclaré coupable. Le juge a condamné l’accusé à une peine de cinq jours d’emprisonnement.

R. c. Worthman, 2018 CM 2024

La caporale Wortham a plaidé coupable à une accusation de voies de fait portée en vertu de l’art. 130 de la LDN (art. 266 du Code criminel), ainsi qu’à une accusation d’ivresse fondée sur l’art. 97 de la LDN. Elle a été condamnée à une peine de détention de dix jours avec sursis.

La police militaire a constaté que la caporale Wortham était fortement intoxiquée et suscitait du désordre. Après avoir refusé d’être ramenée sous escorte chez elle, elle s’est opposée à ce qu’on la conduise au poste de la PM, allant jusqu’à frapper et à injurier un agent de la police militaire au cours de l’altercation qui a suivi.

Dans leur recommendation conjointe, les deux avocats ont recommandé une peine de dix jours de détention, mais ont proposé qu’un sursis soit accordé, eu égard aux conséquences indirectes de la peine. Le juge militaire a conclu que « la peine proposée [n’était pas] susceptiable de considérer l’administration de la justice et [n’était pas] contraire à l’intérêt public. » Le juge a consenti à un sursis à l’exécution de la peine afin d’encourager l’accusée à poursuivre ses efforts de réadaptation.

R. c. Haire, 2018 CM 2015

Le lieutenant-colonel Haire, commandant de l’unité du 1 Royal Canadian Horse Artillery, a plaidé coupable à une accusation de négligence préjudiciable au bon ordre et à la discipline portée en application de l’art. 129 de la LDN, après qu’il eut omis de s’assurer, pendant qu’il effectuait l’exercice de déchargement de son fusil C7A2, que la chambre de l’arme était vide, ce qui a entraîné la décharge d’une balle à blanc.

Au cours de la présentation du plaidoyer, la Cour a expliqué que la norme de diligence applicable à la conduite du lieutenant-colonel Haire est évaluée au regard de celle qui est exigée d’un officier d’infanterie. Il n’était pas tenu de satisfaire à une norme élevée parce qu’il était le commandant d’une unité.

En se fondant sur de nombreux facteurs atténuants, notamment l’admission par le lieutenant‑colonel Haire de sa culpabilité à la première occasion et le leadership exceptionnel dont il a démontré lors de l’incident, le juge militaire a accepté recommandation conjointe de condamnation à une amende de 500 $.

Infractions liées aux stupéfiants

Des 51 causes jugées en cour martiale pendant la période de référence, cinq portaient sur des infractions liées aux stupéfiants ou à l’alcool et l’accusé a été déclaré coupable d’au moins une accusation dans quatre de ces cinq affaires.

R. c. Stow, 2018 CM 3014

Le matelot de 1re classe Stow a plaidé coupable à une accusation de trafic de substances portée en vertu du para. 5(1) de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, soit une infraction prévue à l’art. 130 de la LDN.

Il appert de la preuve présentée à la Cour que le matelot de 1re classe Stow a fait du trafic de cocaïne dans la région de Halifax, tant sur la base qu’à l’extérieur de celle-ci, et tant avec des civils qu’avec des militaires. En collaboration avec un autre membre, le matelot de 1re classe Stow a fait du trafic de cocaïne pour une valeur d’environ 10 000 $.

Le juge militaire a souligné que « la présence de drogues dans le milieu militaire doit être considérée comme un problème très grave ». Se fondant sur une recommendation conjointe des avocats, le juge a condamné l’accusé à une peine de dix mois d’emprisonnement à purger dans un établissement civil.

Fraudes et autres infractions relatives aux biens

Des 51 causes jugées en cour martiale pendant la période de référence, cinq portaient sur la fraude et d’autres infractions relatives aux biens. L’accusé a été déclaré coupable d’au moins une accusation dans chacune de ces cinq affaires.

R. c. MacDonald, 2018 CM 3011

Le soldat MacDonald a plaidé coupable à une accusation de vol portée en vertu de l’art. 114 de la LDN, ainsi qu’à une accusation d’avoir volontairement endommagé un bien public.

L’accusé s’est introduit de force dans des remises fermées à clé et a causé des dommages importants. Il a ensuite volé une souffleuse à neige (soit un bien des Forces armées canadiennes évalué à 900 $). Lorsqu’il a appris que la police militaire avait ouvert une enquête, le soldat MacDonald s’est défait de la souffleuse, qui n’a jamais été retrouvée.

Pour déterminer la peine, le juge militaire a tenu compte de différents facteurs aggravants, comme l’abus de confiance, la préméditation, le fait que le bien volé n’avait pas été retrouvé ainsi que la conduite de l’accusé après l’infraction. Ces facteurs étaient atténués par le plaidoyer de culpabilité, l’absence de condamnation antérieure et le fait que l’accusé avait été libéré des FAC depuis l’infraction. Après avoir soupesé tous les facteurs, le juge a condamné le soldat MacDonald à un blâme et à une amende de 2 000 $.

Appels

La présente section donne un aperçu des affaires qui ont été portées en appel devant la CACM et devant la CSC. Pour connaître l’issue des appels portés devant la CACM, veuillez vous référér à l’annexe B et pour les appels portés devant la CSC, veuillez vous référér à l’annexe C.

Cour d’appel de la cour martiale

Décisions rendues

R. c. Edmunds, 2018 CACM 2

Le caporal-chef Edmunds a usé d’un stratagème frauduleux pour conclure un contrat au nom des FAC avec une entreprise dont il était le seul propriétaire. Après avoir plaidé coupable à une accusation de fraude pour deux transactions frauduleuses de plus de 5 000 $, il a été accusé de fraudes additionnelles qui ont donné lieu à un deuxième procès. Il a été condamné à trente jours d’emprisonnement à l’issue du premier procès. Lors du deuxième procès, le caporal-chef Edmunds a soutenu que la conduite des enquêteurs et de la poursuite était abusive, surtout parce que la poursuite avait scindé la preuve. Les questions en litige dans l’appel résultent du deuxième procès.

La personne autorisée à porter des accusations a témoigné dans le cadre d’une requête en abus de procédure entendue à l’étape de la divulgation préalable. Il a expliqué qu’aucune dénonciation n’avait été déposée au sujet des accusations. On lui avait présenté une ébauche d’un procès-verbal de procédure disciplinaire  sur laquelle étaient inscrites un certain nombre d’infractions et il avait simplement signé le document. Le juge militaire a conclu que la personne autorisée à porter des accusations n’avait pas une croyance raisonnable qu’une infraction avait été commise, et il a intégré cette conclusion dans sa décision sur la requête en abus de procédure.

Dans sa décision concernant l’abus de procédure, le juge militaire a conclu que la poursuite n’avait pas agi de mauvaise foi ou par malveillance, mais que le fait d’astreindre le caporal‑chef Edmunds à subir deux procès était un abus de procédure. Le juge militaire est parvenu à la conclusion que le préjudice causé par cet abus était la possibilité que deux peines d’emprisonnement distinctes soient imposées au caporal‑chef Edmunds. Le juge a conclu qu’une atténuation de la peine serait une réparation convenable de ce préjudice.

Le caporal‑chef Edmunds a interjeté appel du refus par le juge militaire d’accorder un sursis d’instance. Après avoir passé en revue le dossier d’appel, l’avocat de l’appelant a souligné que l’erreur susmentionnée à l’étape du dépôt des accusations portait un coup fatal à celles-ci, parce qu’elle démontrait que la personne autorisée à porter des accusations n’avait pas la croyance raisonnable nécessaire à cette fin. Par conséquent, la cour martiale n’avait pas compétence pour instruire l’affaire. Ceci avait pour effet de vicier l’instance, de sorte que la CACM devait annuler la déclaration de culpabilité. Souscrivant à ces arguments, la CACM a déclaré que l’instance était frappée de nullité et annulé la déclaration de culpabilité. Elle a rappelé que l’exigence selon laquelle la personne qui porte des accusations doit avoir des motifs raisonnables de croire que l’accusé a commis l’infraction reprochée constitue une protection contre le dépôt irresponsable d’accusations. Le défaut de respecter cette exigence est fatale et entraîne une perte de compétence. Lorsqu’une perte de compétence survient, la mise en accusation subséquente par le DPM ne rémédierait pas le défault.

R. c. Cadieux, 2018 CACM 3

À la fin de l’exercice Tropical Dagger en Jamaïque, lors des festivités ayant eu lieu dans la soirée du 27-28 novembre 2015 où la consommation d’alcool a été autorisée, le caporal Cadieux est entré dans la tente réservée aux femmes afin d’inviter la plaignante de le raccompagner à la fête. Le caporal Cadieux s’est agenouillé à côté du lit de camp de la plaignante, où elle dormait, et a prononcé son nom doucement afin de la réveiller. Selon le caporal Cadieux, la plaignante lui a alors pris la tête, l’a tiré vers elle et a commencé à l’embrasser passionnément. Il lui a rendu son baiser et lui a touché le bassin. Le caporal Cadieux a affirmé au cours de son témoignage qu’il lui avait touché le bassin soit accidentellement, ou soit pour trouver son équilibre alors qu’il se penchait au‑dessus de la plaignante pour tenter de la réveiller. Le juge militaire a accepté cette explication. En conséquence, aux fins de l’analyse de la CACM, la nature sexuelle du toucher se limite au baiser. Pendant le baiser, la plaignante a marmonné le prénom « Steve » et le caporal Cadieux a alors répondu « C’est pas Steve, c’est Simon ».  La plaignante l’a alors repoussé, en lui disant « arrête » ou « arrête ça ».

Le lendemain matin, le caporal Cadieux, qui était toujours sous l’influence de l’alcool, a eu une conduite répréhensible à plusieurs égards. Ainsi (1) il est entré dans la tente réservée aux femmes et a refusé de partir lorsqu’un supérieur lui a ordonné de le faire (2) il s’est assis à la place du conducteur de l’autobus fourni par la force de défense de la Jamaïque et a donné un coup de klaxon (3) il a apporté de l’alcool à bord de l’autobus sans autorisation et (4) il a tenté de conduire une voiture de location alors qu’il n’était pas en état de le faire, en raison de sa consommation d’alcool. Le caporal Cadieux a été accusé d’un chef d’agression sexuelle et d’un chef d’accusation d’ivresse.

Au procès, le juge militaire a conclu que le caporal Cadieux n’avait pas la mens rea requise pour commettre l’infraction d’agression sexuelle. Il a donc décidé qu’il était inutile d’examiner le moyen de défense soulevé par le caporal Cadieux, soit celui de la croyance sincère mais erronée quant au consentement. En ce qui concerne l’accusation d’ivresse, le juge militaire a souligné qu’il était difficile de déterminer si la conduite du caporal Cadieux le matin du 28 novembre était imputable à la consommation d’alcool ou à la gueule de bois. Il a également conclu que, même si le comportement du caporal Cadieux était préoccupant, rien n’indiquait que ce comportement était répréhensible ou avait jeté le discrédit sur le service de Sa Majesté. Le caporal Cadieux a subséquemment été acquitté des accusations d’agression sexuelle et d’ivresse.

Le DPM a interjeté appel des acquittements au motif que le juge militaire avait commis une erreur (1) lors de son évaluation de la mens rea et du moyen de défense de la croyance sincère mais erronée quant au consentement, (2) lors de son évaluation de la crédibilité des témoins et (3) lors de son interprétation de l’infraction d’ivresse prévue à l’art. 97 de la LDN. Le 8 juin 2017, le DPM a déposé un avis d’appel devant la CACM. L’affaire a été entendue le 12 mars 2018. Dans une décision unanime rendue le 10 septembre 2018, la CACM a annulé les acquittements et ordonné la tenue d’un nouveau procès.

La Cour a conclu que le juge militaire avait commis une erreur du fait qu’il n’avait pas appliqué le critère juridique exigé pour analyser le moyen de défense de la croyance sincère mais erronée quant au consentement, car lorsqu’un accusé invoque ce moyen de défense, « il affirme essentiellement qu’il n’avait pas la mens rea requise pour commettre l’agression sexuelle présumée ». La Cour a révisé le critère à la lumière des faits et en est venue à la conclusion que « la plaignante n’avait aucune raison d’embrasser le cpl Cadieux, il n’avait aucune raison de croire qu’elle voulait l’embrasser, et, fait important, juste avant que le baiser ait effectivement lieu, il n’avait aucune raison de croire qu’elle voulait qu’il l’embrasse ».

En ce qui concerne l’accusation d’ivresse, la Cour a conclu que le lien entre l’ivresse et la gueule de bois est tellement direct qu’il n’y a pas lieu d’établir une distinction entre les deux états au moment d’analyser cette infraction.

R. c. Beaudry, 2018 CACM 4

Le caporal Beaudry aurait agressé une soldate sur une base militaire. Il a été déclaré coupable d’avoir commis une infraction punissable en application de l’alinéa 130(1)a) de la LDN, soit une agression sexuelle causant des lésions corporelles, infraction prévue à l’art. 272 du Code criminel. Il a été condamné à une peine de 42 mois d’emprisonnement, ainsi qu’à la destitution du service de Sa Majesté. Il a également fait l’objet d’un certain nombre d’ordonnances accessoires. Le caporal Beaudry a interjeté appel de la déclaration de culpabilité prononcée contre lui, soutenant que l’alinéa 130(1)a) de la LDN était inconstitutionnel.

Le 19 septembre 2018, la CACM a rendu son jugement. Dans une décision partagée, la Cour a conclu, à la majorité, que l’alinéa 130(1)a) de la LDN violait le droit à un procès devant jury reconnu à l’alinéa 11f) de la Charte. Elle a accueilli l’appel, infirmé le verdict de culpabilité et déclaré que l’alinéa 130(1)a) de la LDN était inopérant dans son application à « toute infraction civile » dont la peine maximale est de cinq ans ou plus. Le DPM a porté cette décision en appel devant la CSC au nom du ministre. Pour obtenir des renseignements plus détaillés sur cette affaire, veuillez vous référer au chapitre quatre.

Audiences

R. c. Bannister, CACM-592

Le capitaine Bannister était officier du Cadre des instructeurs de cadets (CIC) et commandant du corps de cadets royaux de l’Armée canadienne 148 à Charlottetown, à l’Île-du-Prince-Édouard. Il a été acquitté de six chefs d’accusation (trois chefs de conduite déshonorante et trois chefs subsidiaires de conduite préjudiciable au bon ordre et à la discipline) devant une cour martiale permanente le 27 février 2018. Au nom du ministre, le DPM a interjeté appel de cette décision devant la CACM. Les plaidoiries ont été entendues à Halifax le 21 novembre 2018.

Les accusations faisaient suite à des propos tenus par le capitaine Bannister à diverses occasionsNote de bas de page 21 . Par deux fois, le capitaine Bannister a fait des commentaires déplacés d’ordre sexuel à la victime, d’abord lorsqu’elle était cadette, puis lorsqu’elle était officière subordonnée au CIC.

En cour martiale, le juge militaire a conclu que le comportement du capitaine Bannister n’avait pas été déshonorant, puisqu’aucune preuve ne permettait d’établir que sa conduite avait présenté un risque appréciable que soit causé un préjudice à la victime, d’une manière qui aurait pu porter atteinte à sa dignité. Le juge a également conclu qu’aucune preuve ne permettait d’établir que le comportement du capitaine Bannister aurait pu être préjudiciable au bon ordre et à la discipline. D’une manière plus précise, le juge a conclu que, même si le comportement du capitaine Bannister avait eu un effet préjudiciable sur la victime, rien n’indiquait que ce comportement avait eu un tel effet sur l’unité ou sur les autres membres de l’unité.

Au nom du ministre, le DPM a affirmé (1) que pour évaluer le caractère déshonorant de la conduite de l’accusé le juge militaire avait utilisé un critère trop restrictif, qui ne rendait pas bien compte de l’objectif visé par l’infraction, (2) que le juge avait refusé de se fonder sur son expérience et ses connaissances générales pour déterminer si la conduite de l’accusé avait été préjudiciable ou non au bon ordre et à la discipline et (3) qu’il avait commis une erreur en affirmant que rien ne lui permettait de conclure que la conduite de l’accusé aurait pu être préjudiciable au bon ordre et à la discipline.

Une décision concernant cette affaire devrait être rendue par la CACM au cours de la prochaine la période.

R. c. MacIntyre, CACM-594

Le 27 juin 2018, le sergent K.J. MacIntyre a été déclaré non coupable d’une accusation d’agression sexuelle par une cour martiale générale. Au nom du ministre, le DPM a interjeté appel de la décision devant la CACM. La Cour a entendu les plaidoiries le 27 mars 2019.

L’agression sexuelle présumée aurait eu lieu au cours de la première nuit d’un déploiement à Glasgow, en Écosse, en 2015. La plaignante et l’accusé faisaient tous deux partie d’une équipe de soutien logistique de la flotte. Le sergent MacIntyre était le policier miliraire chargé de la liaison en matière de sécurité dans les ports étrangers. La plaignante (qui était à l’époque enseigne de vaisseau de 1re classe) était officière de la logistique.

Au procès, la plaignante a affirmé qu’après un vol de nuit, une journée de travail et une soirée passée à boire et à danser, l’accusé et une autre femme officière de la marine l’avaient raccompagnée jusqu’à son hôtel. La plaignante a dit qu’elle s’était endormie, qu’elle s’était réveillée pendant la nuit et avait trouvé l’accusé nu dans son lit. Celui-ci l’avait ensuite agressée sexuellement, malgré ses refus répétés et ses tentatives de résistance.

Le sergent MacIntyre a nié les allégations d’agression sexuelle et a affirmé qu’il avait eu une relation sexuelle consensuelle avec la plaignante.

Au nom du ministre, le DPM a invoqué deux motifs d’appel, tous deux relatifs aux dernières directives données par le juge militaire au comité de la cour martiale générale. Le premier a trait à des directives incorrectes sur la mens rea, le second à une directive injustifiée intitulée « enquête policière inadéquate ».

Une décision concernant cette affaire devrait être rendue par la CACM au cours de la prochaine la période de référence.

Appels interjetés devant la CACM

R. c. Edwards, CACM-595

Le 16 novembre 2018, à Halifax, en Nouvelle-Écosse, une cour martiale permanente a déclaré le matelot de 1re classe Edwards non coupable d’une accusation de conduite préjudiciable au bon ordre et à la discipline pour usage de cocaïne. L’infraction reprochée aurait été commise entre le 25 septembre 2015 et le 23 juillet 2016, à Halifax, en Nouvelle-Écosse, ou aux environs de cette ville, où l’accusé aurait consommé de la cocaïne, contrairement à l’art. 20.04 des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes.

Une déclaration volontaire faite par le matelot de 1re classe Edwards à un enquêteur du SNEFC a été produite en preuve, dans laquelle il y admettait avoir acheté et consommé de la cocaïne.

Le juge militaire a acquitté l’accusé au motif que la poursuite n’avait pas permis d’établir que la consommation avait eu lieu à Halifax ou près de cette ville, comme le précisait l’accusation. Le juge militaire s’est également dit préoccupé par les aveux volontaires de l’accusé et a choisi de ne pas tenir compte d’une partie de ces aveux, même si aucun principe de droit ne lui permettait de le faire.

Au nom du ministre, le DPM a interjeté appel de cette décision devant la CACM. L’affaire sera entendue au cours de la prochaine période.

R. c. Spriggs, CACM-597

Le 17 octobre 2017, le SNEFC a déposé une accusation d’agression sexuelle contre le caporal Spriggs pour des faits qui se seraient produits le 25 juillet 2016. Le 4 avril 2018, le procureur a déposé un chef d’accusation en vertu de l’alinéa 130(1)a) de la LDN, pour agression sexuelle au sens de l’art. 271 du Code criminel.

Le 27 novembre 2018, le procureur a retiré cette accusation et l’a remplacée par celle de conduite déshonorante au sens de l’art. 93. La poursuite a abandonné l’accusation initiale d’agression sexuelle parce qu’elle était incapable de faire juger par une cour martiale des personnes accusées en vertu de l’alinéa 130(1)a) de la LDN, en raison de la décision rendue dans l’arrêt Beaudry.

À l’ouverture du procès du caporal Spriggs, la défense a présenté une demande relative à l’abus de procédure dont aurait été victime le caporal Spriggs. La défense a fait valoir que le retrait de l’accusation d’agression sexuelle et son remplacement par une accusation de conduite déshonorante constituaient un abus de procédure, en ce que l’accusé ne pouvait plus bénéficier d’un procès devant jury dans le cadre du système civil de justice pénale. La défense a demandé une suspension de l’instance à titre de réparation en vertu du par. 24(1) de la Charte.

Le juge militaire a conclu que le caporal Spriggs avait été victime d’un abus de procédure parce que le changement d’accusation l’avait privé de « son droit nouvellement acquis en vertu de la Charte d’être jugé pour agression sexuelle par un juge et un jury dans un tribunal civil de juridiction criminelle ». Le juge militaire a donc mis fin au procès.

Au nom du ministre, le DPM a interjeté appel, devant la CACM, de la décision rendue dans l’affaire Spriggs. En prévision de l’appel, l’avocat chargé du dossier d’appel a procédé à un examen détaillé de l’affaire, et en est venu à se demander s’il y avait ou non une perspective raisonnable de condamnation dans l’hypothèse où la CACM ordonnerait un nouveau procès. Il a été déterminé que dans l’éventualité où la CACM ordonait un nouveau procès, le DPM n’y donnerait pas suite. Par conséquent, le DPM a abandonné l’appel, au nom du ministre, puisqu’il aurait été inopportun de donner suite à cet appel sans perspective raisonnable de condamnation.

Un aperçu de tous les appels interjetés devant la CACM au cours de la période de référence est joint à l’annexe B.

Cour suprême du Canada

Audiences tenues

R. c. Gagnon, 2018 CSC 41

L’agression sexuelle reprochée aurait eu lieu le 15 décembre 2011 ou vers cette date, alors que l’adjudant Gagnon et la plaignante, une caporale, étaient tous deux membres du Régiment de la Chaudière, une unité de réserve de l’armée. Après le dîner annuel de Noël, l’adjudant Gagnon et la plaignante s’étaient rendus au manège militaire. L’adjudant Gagnon a commis quatre actes sexuels distincts sur la plaignante. Lors de son témoignage au procès, l’adjudant Gagnon a confirmé qu’il n’avait pris aucune mesure raisonnable pour s’assurer du consentement de la plaignante avant de passer d’un acte à l’autre. La plaignante a affirmé qu’en plus d’avoir été passive, elle a exprimé son malaise et opposé une résistance physique à quelques reprises durant l’aggression. L’adjudant Gagnon a affirmé que la plaignante avait donné son consentement ou qu’il avait cru sincèrement, mais erronément, à ce consentement, même si le tribunal concluait qu’elle n’avait pas donné ce consentement.

Le 22 août 2014, une cour martiale générale a déclaré l’adjudant Gagnon non coupable d’agression sexuelle, après que le juge militaire eut invoqué la défense de la croyance sincère mais erronée au consentement. Le 17 septembre 2014, le DPM a, au nom du ministre, interjeté appel de cette décision devant la CACM, au motif que le juge militaire n’aurait pas dû soumettre au comité la défense de la croyance sincère mais erronée au consentement.

Une majorité de juges de la CACM ont conclu que le juge militaire avait commis une erreur en présentant au comité de la cour martiale une défense de croyance sincère mais erronée au consentement sans vérifier si les conditions préalables prévues à l’art. 273.2 du Code criminel avaient été remplies. Conformément à l’art. 273.2, l’adjudant Gagnon aurait dû prendre des mesures raisonnables, dans les circonstances qu’il connaissait à l’époque, pour s’assurer du consentement de la plaignante aux activités sexuelles en question. Deux des trois juges ont conclu qu’un juge qui appliquerait le cadre approprié estimerait probablement qu’aucune mesure raisonnable n’avait été prise et, donc, n’aurait pas soumis au comité le moyen de défense fondé sur une croyance sincère mais erronée au consentement. Pour ces motifs, la CACM a infirmé l’acquittement et ordonné la tenue d’un nouveau procès.

La CACM, dissident, a conclu que la preuve démontrait que des mesures raisonnables avaient été prises et que la défense de la croyance erronée mais sincère au consentement était suffisamment vraisemblable, selon les faits de l’espèce, pour soumettre ce moyen de défense au comité et, donc, que le juge militaire n’avait commis aucune erreur de droit.

L’adjudant Gagnon a formé un pourvoi à l’encontre de cette décision devant la CSC et l’audience a eu lieu le 16 octobre 2018.

Dans une décision unanime rendue à l’audience, la CSC a déclaré que la défense de la croyance sincère mais erronée au consentement n’était pas vraisemblable et que le juge de première instance avait commis une erreur de droit en la soumettant au comité de la Cour martiale générale. La CSC a ajouté qu’aucune preuve ne permettait de conclure que l’adjudant Gagnon avait pris des mesures raisonnables pour s’assurer du consentement de la plaignante, de sorte qu’il était irrecevable à invoquer ce moyen de défense en application de l’alinéa 273.2b) du Code criminel. La CSC a confirmé la décision majoritaire de la CACM et ordonné la tenue d’un nouveau procès.

R. c. Stillman/Beaudry, CSC 37701 et CSC 38308

Ces pourvois formés devant la CSC ont été regroupés puisqu’ils portaient tous deux sur la constitutionnalité de l’alinéa 130(1)a) de la LDN. Ils faisaient suite à trois décisions distinctes rendues par la CACM.

La CACM a d’abord examiné la question cruciale soulevée en l’espèce également posée dans l’arrêt R. c. Royes.Note de bas de page 22  Dans cet arrêt, un comité a conclu à l’unanimité que les actes ou les omissions mentionnés à l’alinéa 130(1)a) sont des infractions d’ordre militaire et que de telles infractions relèvent de la justice militaire. L’alinéa 130(1)a) est donc visé par l’exception au droit à un procès avec jury prévue à l’alinéa 11f) de la Charte. La CACM a également conclu que l’arrêt R. c. MoriarityNote de bas de page 23 de la CSC avait eu pour effet de rectifier le raisonnement antérieur de la CACM concernant l’alinéa 130(1)a) et le lien de connexité avec le service militaire. La CACM a conclu que sa jurisprudence antérieure concernant ce lien n’était plus valide et par conséquent que, en l’absence de l’application du critère fondé sur l’existence d’un lien de connexité avec le service militaire, l’alinéa 130(1)a) ne violait pas l’alinéa 11f) de la Charte.

La CACM a statué sur la même question constitutionnelle une deuxième fois dans l’affaire R. c. DéryNote de bas de page 24 . Dans cette décision, le juge en chef a fait sienne l’analyse faite par la CACM dans la décision Royes. Cependant, la majorité a conclu que « seule l’inclusion du critère du lien de connexité avec le service militaire permet[tait] à l’alinéa 130(1)a) de la LDN de résister à un examen constitutionnel ». Néanmoins, la CACM a conclu à l’unanimité qu’elle était liée par la décision rendue dans l’affaire Royes, décision qui lui semble découler « d’un examen entièrement motivé par une formation unanime de la question en litige ». La contestation constitutionnelle a été rejetée.

À la suite de la décision rendue par la CACM dans l’affaire R. c. Déry, un certain nombre d’appelants ont obtenu l’autorisation de former un pourvoi devant la CSC sous l’intitulé Stillman, pourvoi qui regroupait sept appelants. Saisie d’une requête en jonction d’instances, la CSC a ordonné que le pourvoi Beaudry soit entendu en même temps que le pourvoi Stillman. Ces pourvois ont tous été entendus le 26 mars 2019. Le chapitre quatre fournit davantage de renseignements sur ce pourvoi.

Un aperçu de tous les pourvois formés devant la CSC au cours de la période de référence est joint à l’annexe C.

Audiences de révision du maintien sous garde

Les juges militaires sont tenus, dans certaines situations, de réviser les ordonnances de maintien sous garde militaire d’un membre des FAC détenu. Le DPM représente les FAC à ces audiences. Au cours de la période de référence, des procureurs militaires ont été présents à quatre audiences de révision du maintien sous garde, qui se sont toutes soldées par une mise en liberté sous conditions de l’accusé. Un résumé complet de toutes les audiences de révision de maintien sous garde se trouve à l’annexe D.

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