Constatations, analyses et recommandations

Sur cette page

Comme il a été mentionné ci-dessus, la Commission croit que les collèges militaire canadien (CMC) offrent une valeur ajoutée par rapport :

  1. aux autres volets d’enrôlement,
  2. aux universités civiles et
  3. aux écoles militaires étrangères.

Cette conclusion est toutefois distincte de la question de la valeur inhérente – réelle et perçue – des collèges militaires pour la population canadienne. En témoigne éloquemment le rôle historique qu’ont joué les CMC dans la défense et la sécurité du Canada et dans le cheminement du pays vers la souveraineté, l’intégrité territoriale, la sécurité économique et la stabilité sociale.

Or, cette valeur a diminué aux yeux d’une grande partie de la population canadienne au cours des dernières décennies, celle-ci ayant pris conscience de l’exclusion et des préjudices qui régnaient parfois dans les collèges militaires et du coût caché associé à certains aspects de leurs modes de fonctionnement traditionnels. Si l’on ajoute à cela l’attention négative du public et le sentiment de complaisance qui s’est installé par suite des dividendes de la paix, certains en sont même venus à se demander pourquoi le pays doit investir dans l’instruction et la formation militaires professionnelles et si les collèges militaires sont les meilleurs endroits pour s’en charger.

Mettant de côté la valeur comparative, la Commission a donc concentré tous ses efforts sur l’examen de l’utilité actuelle des collèges militaires en tant qu’établissements à part, en procédant à une analyse distincte de sept domaines thématiques. Dans le cadre de ce processus, la Commission a relevé une série de leviers clés sur lesquels une pression peut et doit être exercée afin d’obtenir les changements nécessaires pour garantir la valeur exceptionnelle des collèges militaires canadiens pour le pays et les Forces armées canadiennes (FAC).

Haut de page

Structure organisationnelle

Fonction

Dans le contexte des conclusions formulées par Mme Arbour dans le cadre de l’Examen externe indépendant et complet et du mandat confié à la Commission d’examen des collèges militaires du Canada (CECMC), la première question soumise à la Commission, comme nous l’avons mentionné au début, est de savoir si, dans leur état actuel, les CMC sont tellement déphasés par rapport à la société et si brisés qu’ils sont irrécupérables et nécessitent donc des changements structurels majeurs, voire leur fermeture, ou si, malgré toute lacune qui pourrait subsister, les CMC, dans leur forme actuelle, demeurent le « meilleur moyen de former les leaders militaires de demain ».

Selon la Commission, les collèges militaires canadiens demeurent un important moyen de former les leaders de demain de notre pays. Comme nous le verrons plus en détail ci-dessous, les éléments de preuve démontrent que, même si l’on continue d’observer des actes d’inconduite sous toutes ses formes dans les collèges militaires, ceux-ci représentent essentiellement le lieu où ces actes sont commis et non la raison de leur perpétration. De plus, le taux d’incidence des actes d’inconduite dans les CMC n’est pas disproportionné par rapport à celui observé ailleurs dans la société canadienne, en particulier dans les universités civiles résidentielles de taille similaire accueillant un groupe de pairs à peu près du même âge.

Par ailleurs, les CMC sont essentiellement des organisations fonctionnelles qui forment des officiers et officières instruits, qualifiés, bilingues et en bonne condition physique pour les FAC et le Canada. En retirant aux CMC le pouvoir de décerner des diplômes et en confiant aux universités civiles la formation scolaire des aspirants et aspirantes de marine/élèves-officiers et élèves-officières (aspm/élof), on dissoudrait de fait des organisations qui jouent un rôle stratégique et social important au Canada qui ne peut être rempli par aucun autre établissement, et qui complètent avantageusement les volets d’enrôlement associés au Programme d’enrôlement direct en qualité d’officier et au Programme de formation des officiers de la Force régulière – Université civile.

Cela ne signifie pas que les CMC sont aussi efficaces, pertinents, sains ou aptes à exercer leurs fonctions que le pays l’exige. Des éléments importants du programme, de la culture et de l’infrastructure physique et psychosociale des CMC sont problématiques et, entre autres, permettent ou favorisent des comportements néfastes, inappropriés ou inacceptables. Il faut continuer de s’intéresser à ces enjeux. La Commission se sent encouragée par le fait que les deux collèges militaires ont prouvé leur volonté d’agir et leur capacité et leur détermination à le faire.

Par exemple, les efforts tangibles déployés pour faire évoluer positivement la culture des CMC – tels que la création d’un poste de président et « présidente de l’évolution culturelle » au Collège militaire royal de Kingston, en Ontario (CMR) et d’un poste de « spécialiste des ressources et de la formation sur la violence sexuelle et la promotion d’une culture positive » au Collège militaire royal de Saint-Jean-sur-Richelieu, au Québec (CMR Saint-Jean) – ont entraîné des changements observables dans les CMC, conformément aux pratiques exemplaires mondiales. Ces changements ont touché tous les aspects des CMC, allant des politiques et des procédures aux pratiques de gestion. De grandes initiatives ont été élaborées, prennent racine et font l’objet d’un suivi, depuis la création du réseau de soutien Athena (pour les femmes) et du groupe de soutien Agora (pour les personnes LGBTQ2+) jusqu’à la mise sur pied du groupe Apprentissage et connaissances autochtones. Il faut leur donner la chance de donner plus de résultats.

Dans l’ensemble, compte tenu de leur influence globale en tant que lieux de travail, d’études et de vie personnelle, les CMC possèdent une capacité d’influence exceptionnelle sur les aspm/élof. Cela représente certes des défis, mais aussi d’énormes possibilités. Les CMC offrent un moyen efficace d’apporter des changements significatifs aux FAC, grâce à l’instruction et à l’éducation d’une nouvelle génération d’officiers et d’officières qui représenteront de manière exemplaire la profession des armes lorsqu’ils et elles accéderont à des postes de direction au sein de l’organisation. Ainsi, dans la mesure où les FAC sont résolues à apporter des changements positifs, ceux-ci peuvent s’amorcer dans les collèges militaires.

Toutefois, cela signifie également que les FAC et les CMC ont une responsabilité encore plus grande envers ces jeunes adultes vulnérables et impressionnables, en particulier parce qu’en tant que représentants des FAC, les aspm/élof doivent répondre à des attentes élevées en matière de réputation et de conduite et seront ainsi soumis à une surveillance étroite. La Commission est convaincue que les CMC peuvent se montrer à la hauteur, mais le gouvernement du Canada et les dirigeants du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes doivent s’engager véritablement à les appuyer dans ce travail.

La fermeture des CMC à ce stade-ci et la dispersion des aspm/élof dans les universités civiles ne permettraient pas de relever les défis mentionnés précédemment. Au contraire, cela ne ferait que déplacer ces défis vers d’autres établissements peut-être moins outillés pour encourager la force de caractère, le comportement et les attitudes nécessaires au développement d’une culture positive au sein des FAC.

Il convient également de noter qu’en raison de leur conception, de leurs modèles de financement et de leurs ressources humaines associées à l’enseignement, les CMC verraient de facto leurs programmes de recherche et d’études supérieures disparaître si les programmes de premier cycle étaient éliminés. À terme, les CMC cesseraient ainsi d’être des établissements d’enseignement supérieur. Il ne faut pas en sous-estimer les effets, bien qu’ils ne relèvent pas du mandat de la Commission. En complémentarité avec le travail de Recherche et développement pour la défense Canada, les CMC jouent un rôle essentiel dans la réalisation de travaux de recherche opportuns et pertinents sur la défense et la sécurité qui sont très appréciés, tant par le ministère de la Défense nationale (MDN) et les FAC que par les partenaires internationaux et les alliés de l’OTAN. La perte de cette capacité aurait de graves conséquences d’ordre pratique et réputationnel pour le Canada et mettrait en péril la capacité du pays à atteindre ses objectifs en matière de défense et de sécurité.

Haut de page

Forme

Une fois arrivée à la conclusion que les CMC devraient conserver leur fonction de décerner des diplômes universitaires, la Commission a relevé dix facteurs qui jouent un rôle important pour assurer la santé, la qualité, la viabilité, la crédibilité et la pertinence des établissements :

  • Identité;
  • Gouvernance;
  • Coût;
  • Culture;
  • Instruction militaire;
  • Études universitaires;
  • Bilinguisme;
  • Santé, condition physique et bien-être;
  • Recrutement;
  • Diversité et inclusion.

La Commission a ensuite évalué les six modèles organisationnels présentés ci-dessus (et décrits à l’annexe 3) par rapport à chacun de ces facteurs, en utilisant une échelle de cinq points basée sur des questions. Elle a également examiné si un nouveau modèle améliorerait le statu quo ou aurait d’autres conséquences.

Au moyen de ce processus (décrit à l’annexe 5), la Commission a conclu que le modèle intégré, qui s’harmonise le mieux avec la structure actuelle des CMC, demeure le bon choix pour le Canada dans le contexte national et géopolitique actuel. Selon ce modèle, la forme des collèges militaires canadiens devrait ressembler beaucoup à ce qu’elle a été au cours des dernières décennies, particulièrement au CMR. Plus précisément :

  • Les deux collèges devraient continuer d’offrir une formation militaire en plus d’une formation universitaire reconnue, à l’issue desquelles les aspm/élof obtiennent un diplôme.
  • Aucun nouvel organisme ou mécanisme ne serait créé pour offrir la portion universitaire du programme (qu’il s’agisse d’un fournisseur de services externe ou d’un programme de défense et de sécurité offert dans une nouvelle université et dirigé par le MDN ou les FAC).
  • Une gestion financière responsable devrait guider la mise en œuvre des programmes, mais la réduction des coûts et les gains d’efficacité ne devraient pas être les principaux moteurs de changement.

En somme, bien qu’il soit nécessaire de réformer en profondeur la façon dont le programme est régi et mis en œuvre (comme il est indiqué ci-dessous), la fonction et la forme des CMC resteront très similaires.

Recommandation  1

Continuer à confier aux collèges militaires canadiens le rôle d’établissements universitaires pouvant décerner des diplômes de premier cycle. Continuer de former et d’instruire les aspm/élof dans les collèges militaires canadiens au moyen d’un modèle intégré.

Haut de page

Réforme systémique

La recommandation de la Commission de continuer à confier aux collèges militaires canadiens le rôle d’établissements universitaires pouvant décerner des diplômes de premier cycle au moyen d’un modèle intégré suppose que le maintien de la structure organisationnelle existante s’accompagnera de changements importants dans plusieurs domaines. La Commission a mis l’accent sur une approche centrée sur les systèmes pour comprendre et résoudre les problèmes existants, et les réformes systémiques proposées ont pour but de régler les problèmes sous-jacents qui affligent les collèges militaires et non pas simplement d’en traiter les symptômes.

Les conclusions, les analyses et les recommandations présentées dans le présent document visent à cerner les problèmes posés, à expliquer en quoi ils sont préoccupants et à proposer les mesures nécessaires pour y remédier.

Collectivement, ces réformes devraient apporter des changements positifs, durables et radicaux dans les CMC, en les aidant à établir leur valeur ajoutée, à clarifier leur vocation, à intensifier leurs efforts en matière d’évolution de la culture et à les protéger de la nécessité de faire l’objet de cycles de surveillance constants.

Haut de page

Identité

Le problème fondamental auquel les CMC sont aux prises à ce stade-ci est l’absence d’une identité bien définie. Cette incertitude, créée par le manque de consensus quant à leur vocation, entraîne de multiples conséquences à l’origine de bon nombre de défis connexes auxquels font face les collèges militaires.

Pour certains, les CMC sont des unités militaires définies par leur mandat de former des aspm/élof en tant que leaders de la profession des armes qui se préparent à faire carrière dans l’art de la guerre et la gestion des conflits. Ils veulent « rétablir le M(ilitaire) dans le CMR » et estiment que l’importance démesurée accordée au volet universitaire réduit le temps consacré au perfectionnement des compétences militaires, à l’acquisition des connaissances pratiques et au développement de la condition physique nécessaires pour former des officiers et officières remarquables.

Pour d’autres, les CMC sont d’abord et avant tout des établissements d’enseignement supérieur dont le but principal est d’instruire les étudiants et étudiantes qui pourraient éventuellement servir dans les Forces armées canadiennes en qualité d’officiers et d’officières. Ils perçoivent les exigences relatives aux exercices militaires et à la conduite comme un inconvénient et considèrent qu’il est inutile de consacrer du temps à la pratique d’un sport, à la formation par l’aventure ou à l’apprentissage de la gestion des risques pour développer l’esprit critique, le jugement ou la fonction cognitive nécessaires à la formation de citoyens intelligents et réfléchis.

La plupart, cependant, ont une position plus nuancée, qui intègre des éléments des deux extrêmes, considérant que les collèges militaires devraient se voir confier la responsabilité de tout ce qui précède ainsi que le mandat de former des aspm/élof à la fois comme leaders et intellectuels, conformément au modèle actuel des 4 piliers. En principe, cela semble judicieux. En pratique, c’est un échec.

Au fil du temps, pour soutenir cet équilibre, trois identités institutionnelles distinctes, parfois contradictoires, ont émergé. Plus précisément, les CMC sont simultanément devenus des unités militaires, des institutions de la fonction publique fédérale et des universités à charte provinciales. Chaque identité s’accompagne d’une culture et de valeurs qui lui sont propres et qui ne sont pas nécessairement compatibles. En outre, chacune comporte ses propres intervenants, qui ont des intérêts distincts, des attentes divergentes et des objectifs différents. Ce système crée des problèmes chroniques et des tensions permanentes.

Par exemple, les CMC offrent une formation universitaire subventionnée aux aspm/élof qui cherchent à s’enrôler dans les FAC en tant qu’officiers et officières à la fin de leurs études secondaires. Cette voie exige toutefois qu’ils s’engagent à s’enrôler dans les forces armées et à intégrer la profession des armes; en tant que membres des FAC, ils sont assujettis à des conditions et à des exigences d’emploi qui ne s’appliquent pas aux étudiants et étudiantes des universités civiles, et ce, même pendant leurs études. Il est donc préoccupant que de nombreux aspm/élof ne sachent pas s’ils fréquentent une école militaire où ils peuvent s’attendre à acquérir des compétences militaires et en leadership ou s’ils sont des étudiants et étudiantes de niveau postsecondaire qui peuvent s’attendre à recevoir une formation de premier cycle identique à celle dispensée dans une université civile. Cette incertitude a des répercussions à long terme, car les attentes des aspm/élof alors qu’ils fréquentent les CMC influeront de manière considérable sur leur recrutement, leur maintien en poste et leur satisfaction en tant que membres des FACNote de bas de page 21.

Parallèlement, les membres du corps professoral sont des fonctionnaires à temps plein, nommés pour une durée indéterminée dont les conditions d’emploi sont régies par les politiques du Conseil du Trésor du Canada, mais ils s’attendent aussi à des conditions d’emploi et à des pouvoirs qui cadrent avec les établissements universitaires civils. Cela crée des frictions importantes, particulièrement en ce qui concerne la question de l’autonomie institutionnelle, c’est-à-dire la capacité de l’établissement d’administrer ses propres affaires, y compris ses programmes universitaires et l’affectation de ses ressources financières, sans ingérence extérieure. L’autonomie institutionnelle est une caractéristique fondamentale des universités civiles au Canada, et le corps professoral et le personnel des CMC s’attendent donc à en jouir égalementNote de bas de page 22. Cependant, contrairement aux universités civiles, les CMC sont des institutions fédérales créées à titre d’unités militaires habilitées à décerner des grades. Ils sont, de manière inhérente et délibérée, subordonnés aux FAC et au gouvernement du Canada. Par conséquent, le concept entier d’autonomie institutionnelle est inapplicable à dessein.

Contrairement à l’autonomie institutionnelle, la liberté universitaire, telle qu’elle est définie notamment dans les lois provincialesNote de bas de page 23 et les lignes directrices internationalesNote de bas de page 24, est une caractéristique fondamentale des universités civiles et des collèges militaires canadiens. Au fil des ans, le concept de liberté universitaire a cependant été invoqué pour plaider en faveur de l’indépendance décisionnelle des universitaires dans les CMC d’une manière qui a créé des tensions persistantes au sein des établissements, d’autant plus que les dirigeants et dirigeantes militaires ont eu du mal à comprendre l’étendue de leurs propres pouvoirs ou à exercer efficacement leurs droits de gestion.

Dans le contexte des CMC, où la formation universitaire doit servir les Forces armées canadiennes, il incombe sans contredit au MDN et aux FAC de déterminer quels diplômes et programmes devraient être offerts et comment affecter les ressources financières et humaines en conséquence. Ce faisant, il ne s’agit ni d’une atteinte à la liberté universitaire ni d’une incompatibilité avec la nature des CMC et le degré d’autonomie dont ils jouissentNote de bas de page 25.

De plus, certains membres de l’Escadre des études – composée des membres du corps professoral et du personnel qui dispensent le programme d’études – ont eu du mal à comprendre que les études ne sont censées constituer qu’une partie de l’expérience des aspm/élof dans les CMC et ont constamment imposé des exigences croissantes et irréalistes quant à leur emploi du temps. Cette combinaison de facteurs entraîne des tensions persistantes entre de nombreux membres du corps professoral et la direction, ainsi qu’entre les composantes civile et militaire de l’institution, ce qui nuit à l’environnement des CMC et mobilise beaucoup d’énergie et d’attention.

Pour leur part, les militaires semblent souvent mal à l’aise de travailler avec leurs collègues de la fonction publique, préférant donner des directives plutôt que d’engager le dialogue et se montrant inutilement rigides sur des questions qui ne prêtent pas à controverse. Par ailleurs, les FAC ont accordé peu d’attention aux CMC au cours des dernières décennies, l’Armée de terre, la Marine et la Force aérienne ayant largement renoncé à tout rôle actif dans l’évolution ou le développement des collèges militaires de manière soutenue ou systématique. Cela a envoyé des messages contradictoires au corps professoral, à qui on a offert peu de conseils et de garde-fous en termes de vision, d’orientation et de limites, mais qui se sent réprimandé lorsqu’on estime qu’il dévie de sa trajectoire.

Par conséquent, chaque groupe a diagnostiqué des problèmes différents auxquels il a proposé des solutions distinctes, ce qui a amené les CMC à s’embourber dans la mise en place de structures de gouvernance alambiquées, l’attribution de pouvoirs ambigus et l’augmentation rapide des programmes, dont bon nombre produisent des résultats coûteux et inefficaces aux dépens des aspm/élof et des FAC en général. En fin de compte, il n’y a pas de vision commune concernant le rôle et l’objectif fondamentaux des collèges militaires.

Alors, que sont les CMC? La Commission croit que les CMC sont d’abord et avant tout des établissements militaires, dont la raison d’être consiste à former des leaders exceptionnels pour les Forces armées canadiennes. Leurs programmes doivent être ciblés et résolument pertinents et adaptés aux besoins et aux exigences des FAC. La haute direction du MDN et des FAC doit être prête à aligner les ressources financières et humaines allouées sur cette nouvelle orientation.

Un élément essentiel de ce processus de perfectionnement des officiers et officières est l’acquisition d’une formation universitaire riche et réputée, dont la qualité et la crédibilité devraient continuer de transparaître dans l’obtention d’un diplôme de premier cycle reconnu à l’échelle nationale et réglementé par les provinces. Mais malgré leur utilisation du slogan, les CMC ne sont pas des « universités qui se distinguent » ou même des « universités qui font une différence ». Ce sont des écoles militaires.

À cette fin, il faut accorder plus de poids, d’attention et de ressources aux autres éléments qui font également partie intégrante du parcours des aspm/élof dans ces établissements. Cela comprend la formation linguistique, les compétences militaires, le développement du leadership ainsi que la condition physique, la santé et le bien-être en général, comme nous le verrons plus en détail dans les sections suivantes du présent rapport.

Le Canada compte plus d’une centaine d’universités, dont aucune ne peut répondre pleinement aux besoins particuliers associés à la mission et au mandat des FAC. Ce dont le Canada n’a pas besoin, c’est que les CMC représentent l’équivalent d’une université civile à laquelle des exigences en matière de condition physique, de langue et de formation militaire seraient simplement ajoutées à un horaire de cours chargé ayant peu à voir avec les FAC.

Ce dont le Canada a besoin – particulièrement dans l’espace géopolitique hautement contesté et conflictuel dans lequel le pays évolue à l’heure actuelle – et ce que seules les FAC peuvent offrir, ce sont des établissements de calibre mondial axés sur la défense et la sécurité, fondés sur les valeurs, l’éthique et le jugement qui sont favorisés au contact des arts libéraux, et consacrés à l’éducation et à la formation des leaders de la profession des armes. Il n’en existe que deux, et ils doivent être exploités à leur plein potentiel.

L’augmentation du nombre de diplômé·es est une façon d’y parvenir. En plus d’être justifiable sur le plan des coûts et de l’efficacité scolaire, le fait de grossir les cohortes d’aspm/élof aidera à créer chaque année une masse critique de personnes qui obtiendront une formation et une instruction militaires fondamentales et spécialisées, axées sur les besoins du pays en matière de défense et de sécurité.

Une autre voie importante pour maximiser le potentiel des CMC consiste à accroître leur visibilité et à améliorer leur image auprès de la population canadienne et dans le monde entier. Trop peu de Canadiens et Canadiennes connaissent les collèges militaires, et bon nombre de ceux et celles qui savent qu’ils existent en ont entendu parler uniquement par l’intermédiaire d’une couverture médiatique et de reportages négatifs. À l’échelle mondiale, les collèges militaires canadiens sont très respectés, mais ils n’ont pas une image de marque distincte qui les élèverait au rang de certains autres établissements. Les CMC devraient être une source de fierté pour la population canadienne et être mis davantage à contribution comme source de puissance nationale.

Même si, pour ce faire, il faut d’abord consacrer des ressources adéquates à leurs programmes, investir davantage dans leur infrastructure et appuyer de manière continue leurs activités de fonctionnement et d’entretien – ce qui n’est pas facile à justifier en l’absence d’une proposition de valeur solide –, il faut également prévoir une refonte majeure de la stratégie de marque et de marketing des collèges. À l’heure actuelle, les efforts de recrutement sont insuffisants, non ciblés et complètement décalés par rapport au calendrier des universités civiles, ce qui signifie que les aspm/élof reçoivent souvent des offres d’admission d’universités civiles bien avant d’avoir des nouvelles des CMC, ce qui en dissuade beaucoup de choisir les collèges en premier lieu. Les sites Web des CMC sont mal structurés et difficiles à consulter, et chacun a une structure, un contenu et une apparence qui lui sont propres, ce qui les rend inefficaces en tant qu’outils de communication et d’affaires publiques. De plus, le matériel promotionnel ne met plus l’accent sur l’identité militaire et la valeur propre aux collèges, ce qui a une incidence négative sur leur capacité d’inspirer, d’enthousiasmer et d’attirer une nouvelle génération de talents qui pourraient être motivés à s’enrôler dans les FAC.

La stratégie de « marque et de marketing » a un effet tangible sur la quantité et la qualité des candidats et candidates, la crédibilité des établissements et la capacité des FAC et des CMC de montrer à la population canadienne ce qu’ils font et en quoi cela est important. Il est essentiel que tous les Canadiens et Canadiennes puissent se reconnaître dans les FAC et envisager le rôle qu’ils pourraient jouer au sein des CMC.

Certains changements importants s’imposent donc : les FAC devraient élaborer et mettre en œuvre de nouveaux éléments d’une stratégie de recrutement afin d’être mieux à même d’attirer des talents de partout au pays, notamment en tenant compte des dates auxquelles les universités civiles présentent leurs offres d’admission; des exemptions aux normes du gouvernement du Canada sont nécessaires pour créer des sites Web plus conviviaux, harmonisés et structurés pour les collèges militaires, qui servent de principal point d’entrée dans les CMC pour d’éventuels candidats et candidates et les Canadiens et Canadiennes qui ont exprimé de l’intérêt; il faut adapter les activités de rayonnement afin d’établir des liens avec les jeunes et leurs familles qui ne connaissent peut-être pas les CMC ni ce qu’ils offrent; il faut élaborer de nouveaux documents promotionnels qui reflètent mieux l’identité, les programmes et la valeur des CMC.

Parallèlement à ces changements, il est nécessaire, pour améliorer l’image des collèges militaires canadiens, de rehausser le prestige du CMR Saint-Jean au même niveau que celui du CMR. Bien que les deux CMC fassent partie d’une fière tradition militaire au Canada et soient perçus comme des pendants distincts, mais complémentaires, les différences de taille, de budget, d’histoire et de leadership à l’avantage du CMR ont permis à celui-ci de reléguer le CMR Saint-Jean au rôle de « petit frère », qui jouit d’une influence et d’une visibilité moindres au pays. L’uniformisation des noms employés pour désigner les collèges sera un moyen important de témoigner du statut égalitaire du CMR Saint-Jean. À l’heure actuelle, les collèges sont officiellement connus sous le nom de Collège militaire royal du Canada à Kingston, en Ontario, et de Collège militaire royal de Saint-Jean. Ils sont communément appelés Collège militaire royal ou CMR et Saint-Jean ou CMR Saint-Jean, respectivement. Dans les deux cas, cette terminologie perpétue l’idée que le Collège de Kingston est l’école militaire centrale au Canada, alors que le Collège de Saint-Jean n’en est qu’un complément.

La Commission s’est donc penchée sur la pertinence de renommer carrément les établissements, afin de mettre les deux collèges sur un pied d’égalité, de mieux refléter le rôle et l’objectif des CMC et de calquer leur appellation sur celle d’établissements comparables ailleurs dans le monde. Elle a envisagé de laisser tomber les mots « collège », puisque les CMC offrent une formation universitaire, et « royal » des noms, compte tenu du désir de moderniser et de nationaliser les établissements. En fin de compte, la Commission a rejeté ces changements, jugeant qu’ils étaient injustifiés et inutilement polarisants, et qu’ils pourraient créer de la confusion.

Pour souligner le fait que le Canada compte deux collèges militaires uniques dont le pays devrait être fier, qui sont situés à deux endroits distincts et dont les liens historiques les unissent à chacune de nos communautés de langue officielle, la Commission est plutôt d’avis qu’il faudrait modifier le nom des CMC ainsi :

  • Collège militaire royal du Canada, Kingston (CMR Kingston);
  • Royal Military College of Canada, Kingston (RMC Kingston);

et

  • Collège militaire royal du Canada, Saint-Jean-sur-Richelieu (CMR Saint-Jean);
  • Royal Military College of Canada, Saint-Jean-sur-Richelieu (RMC Saint-Jean).

La Commission a également examiné la possibilité de rehausser le grade de commandant ou de commandante du CMR Saint-Jean à celui de brigadier-général ou de brigadière-générale afin d’accroître la visibilité du CMR Saint-Jean au sein des FAC et du Canada, de le mettre davantage en valeur auprès de la population canadienne et d’établir une plus grande égalité entre les deux collèges. La Commission est d’avis que cette proposition pourrait être appropriée, si certaines conditions sont remplies, comme il est expliqué plus en détail ci-dessous.

L’augmentation du nombre de diplômes offerts au CMR Saint-Jean d’un à trois, comme il est discuté et proposé ci-dessous, servira également à rehausser l’image du collège.

Dans l’ensemble, le changement de mentalité et d’approche nécessaire pour réaffirmer l’identité principale et la valeur ajoutée des CMC en tant qu’établissements militaires nécessitera une résolution ferme de la part des dirigeants et dirigeantes militaires des collèges ainsi que le plein appui de la direction universitaire. Il faudra également que le corps professoral et le personnel universitaire reconnaissent que les études – bien qu’elles soient de haut calibre – doivent avoir pour but de répondre aux besoins de l’armée et ne représentent pas une fin en soi. Enfin, les Forces armées canadiennes, qui ont depuis longtemps abdiqué leurs responsabilités dans ce domaine, devront accorder beaucoup plus d’attention aux CMC, y jouer un plus grand rôle et y investir davantage.

Recommandation  2

Revoir les structures de gouvernance, les pouvoirs, les activités, les programmes et la formation de sorte qu’ils reflètent le fait que les collèges militaires canadiens sont d’abord et avant tout des établissements militaires responsables de l’instruction et de l’éducation des officiers et officières en tant que membres de la profession des armes.

Recommandation  3

Modifier les arrêtés ministériels d’organisation afin de changer le nom du Collège militaire royal du Canada pour « Collège militaire royal du Canada, Kingston » (CMR Kingston) et celui du Collège militaire royal de Saint-Jean (CMR Saint-Jean) pour « Collège militaire royal du Canada, Saint-Jean-sur-Richelieu » (CMR Saint-Jean).

Recommandation  4

Mettre à jour l’ensemble de l’image de marque, du matériel promotionnel et des produits de communication et des affaires publiques afin de les harmoniser avec les changements proposés dans le cadre de la recommandation  2 et de la recommandation  3, et d’appuyer une nouvelle stratégie de recrutement.

Haut de page

Gouvernance

La mission des CMC est de fournir aux aspm/élof et aux officiers et officières l’éducation et la formation dont ils ont besoin pour faire carrière dans les Forces armées canadiennes (FAC). En vertu de la Loi sur la défense nationale, les CMC sont régis et administrés de la manière prescrite par le ministre de la Défense nationale, qui a établi les institutions en vertu d’arrêtés ministériels d’organisationNote de bas de page 26 en tant qu’unités des FAC et les a affectées à l’Académie canadienne de la Défense (ACD). Le ministre a également déterminé que les CMC devraient avoir le statut d’universitésNote de bas de page 27.

Comme l’enseignement supérieur au Canada relève de la compétence exclusive des provinces, l’Ontario et le Québec ont dû adopter une loi établissant le CMR et le CMR Saint-Jean en tant qu’universités. La Royal Military College of Canada Degrees Act a été adoptée en 1959 par la province de l’Ontario et la Loi sur le Collège militaire royal de Saint-Jean a été adoptée en 1985 par la province de Québec. Le CMR Saint-Jean a perdu son statut après sa fermeture en 1995, mais l’a retrouvé, ainsi que le droit de décerner des diplômes, en 2021. Bien qu’il offre un programme de cégep, le CMR Saint-Jean n’a pas le pouvoir d’accorder des diplômes de cégep et a conclu un contrat avec le cégep de Saint-Jean-sur-RichelieuNote de bas de page 28 pour décerner le diplôme d’études collégiales.

Ces réalités constitutionnelles ont eu des répercussions importantes et souvent négatives sur les CMC. Plus particulièrement, la façon dont les modèles de gouvernance ont été établis dans les collèges – pour composer avec le fait que les CMC sont des institutions militaires gérées par le gouvernement fédéral dans lesquelles des éléments réglementés par les provinces sont intégrés – entraîne des problèmes importants, systémiques, généralisés et chroniques, et mine le sentiment clair d’identité et d’objectif qui est fondamental à leur valeur ajoutée, comme il est susmentionné dans le présent rapport.

À l’heure actuelle, le cadre de gouvernance, prescrit notamment par les Ordonnances et règlements royaux applicables aux Collèges militaires du Canada (OR ColmilcanNote de bas de page 29), ressemble à ceci :

 
Figure 8 : Modèle de gouvernance de base des collèges militaires canadiens

Version textuelle suit

Figure 8 : Modèle de gouvernance de base des collèges militaires canadiens - Version textuelle

Cette figure représente une structure de gouvernance partielle des Collèges militaires canadiens. Les collèges militaires sont à la fois des unités militaires et des institutions académiques, et ainsi, la figure du modèle de gouvernance illustre ces deux aspects. Chaque numéro (de 1 à 10) fait référence aux différentes parties de la structure de gouvernance.

Unités militaires

  1. Le ministre dispose des pouvoirs concernant l’organisation du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes. Il a créé les collèges militaires canadiens en tant qu’unités militaires en vertu de l’article 17 de la Loi sur la défense nationale. Les collèges militaires canadiens relèvent de l’Académie canadienne de la Défense.
  2. Le poste de chef d’état-major de la défense est le poste militaire le plus élevé. (2) Le chef d’état-major de la défense émet l’ensemble des ordres et instructions aux Forces armées canadiennes, qui doivent donner effet aux décisions et exécuter les directives du gouvernement du Canada ou du ministre. Le chef d’état-major de la défense est directement responsable du commandement, du contrôle et de l’administration des Forces armées canadiennes. Il fixe les critères applicables aux promotions, y compris ceux qui doivent être intégrés à la formation professionnelle des officiers.
  3. La Direction du Conseil des Forces armées est l’organe supérieur de gouvernance des Forces armées canadiennes et est présidée par le chef d’état-major de la défense. Il fournit au chef d’état-major de la défense des conseils sur des questions d’importance stratégique pour l’administration et la gestion globales des Forces armées canadiennes et de la profession des armes au Canada, ainsi que sur la gestion des carrières des officiers supérieurs et la planification de la relève.
  4. Le commandant de l’Académie canadienne de la Défense possède les pouvoirs de commandement et de contrôle pour (5) le Collège militaire royal du Canada, à Kingston, et le Collège militaire royal de Saint-Jean. Des responsabilités lui ont été attribuées en ce qui concerne la gestion du développement professionnel des Forces armées canadiennes, et il dispose des pouvoirs relatifs aux programmes communs des Forces armées canadiennes. Ces fonctions comprennent la supervision du tronc commun et des quatre programmes (études, bilinguisme, condition physique et leadership militaire) du plan de formation des officiers de la Force régulière des collèges militaires canadiens.

Établissements universitaires

  1. Le ministre a également désigné les collèges militaires canadiens en tant qu’établissements d’enseignement en vertu de l’article 47 de la Loi sur la défense nationale. Cette disposition confère au ministre le pouvoir de prescrire la gouvernance et l’administration des établissements d’enseignement créés à des fins de défense. Le ministre a établi les Ordonnances et règlements royaux applicables aux collèges militaires canadiens afin d’en assurer la direction; ces règlements n’ont pas fait l’objet de mises à jour importantes depuis le début des années 2000. Le ministre est désigné chancelier et président des collèges militaires canadiens.
  2. Chaque établissement est habilité à délivrer des diplômes en vertu de lois adoptées par l’assemblée législative de sa province.
  3. Chaque établissement a son propre sénat.
  4. Chaque sénat est chargé de respecter les pratiques exemplaires, les processus et les lignes directrices de l’Ontario Universities Council on Quality Assurance ou du Bureau de coopération interuniversitaire (Québec), ainsi que toute réglementation provinciale applicable, et de se conformer aux normes établies par l’organisme national d’agrément des ingénieurs (Ingénieurs Canada).

Gouvernance

  1. Les résultats d’apprentissage pour les quatre programmes du plan de formation des officiers de la Force régulière, pour les collèges militaires canadiens, sont gérés, en partie, par le commandant de l’Académie canadienne de la Défense, en tant qu’autorité en matière de formation pour les programmes communs des Forces armées canadiennes. Les résultats d’apprentissage pour le tronc commun se fondent sur les besoins militaires et, en tant que tels, relèvent de la compétence du Chef d’état-major de la défense. Les programmes d’aptitude physique et de leadership militaire du plan de formation des officiers de la Force régulière sont dispensés par les deux collèges militaires, et les programmes d’études et de bilinguisme sont dispensés par les deux universités.
  2. Le ministre a créé les conseils d’administration, qui sont chargés d’assister et de guider le commandant de l’Académie canadienne de la Défense et les commandants des collèges militaires et d’approuver le programme d’études au nom du ministre. Chaque établissement dispose de son propre conseil d’administration qui, sans avoir d’autorité par rapport aux universités, lui offre des conseils et de l’orientation. Les conseils d’administration sont notamment chargés d’examiner et d’approuver le tronc commun et les quatre programmes du plan de formation des officiers de la Force régulière pour les collèges militaires canadiens. Les conseils d’administration se réunissent une fois par an avec la direction du Conseil des Forces armées pour discuter de leurs activités, des défis auxquels sont confrontés les collèges militaires canadiens et des besoins des Forces armées canadiennes.
 

Dans ce modèle, le ou la ministre de la Défense nationale est désigné·e comme chancelier ou chancelière et président ou présidente des deux CMC, mais il ou elle n’a pas de mandat précis. Les dirigeants ou dirigeantes des CMC sont les deux commandants ou commandantes, qui sont désignés dans les OR Colmilcan comme vice-chanceliers ou vice-chancelières de leurs institutions respectives et qui président le Sénat en l’absence du chancelier ou de la chancelière. Les deux commandants et commandantes ont le plein contrôle de leurs organisations et sont responsables de leur fonctionnement efficace, notamment de l’atteinte des objectifs de la mission, de la gestion des ressources et de la promotion d’un milieu de travail sain.

Cependant, les commandants ou commandantes ne sont pas totalement autonomes. Ils ou elles relèvent du commandant ou de la commandante de l’Académie canadienne de la Défense, qui relève à son tour du chef ou de la chef du personnel militaire, qui relève du chef ou de la chef d’état-major de la défense. Les commandants et commandantes font donc carrément partie de la chaîne de commandement militaire et sont subordonnés à l’ACD, qui établit les normes de formation, alloue des ressources financières aux CMC et sert d’autorité de formation responsable de l’instruction et de l’éducation communes dans les FAC.

Nonobstant cela, la chaîne de commandement n’a pas l’autorité exclusive sur les collèges militaires; le ou la sous-ministre de la Défense nationale détient des pouvoirs précis qui ont une incidence directe sur les CMC, les plus importants ayant trait à l’affectation des ressources financières, à la gestion de l’infrastructure et à la gestion des ressources humaines civiles.

En théorie, le ou la ministre est appuyé·e par deux conseils des gouverneurs qui présentent des rapports annuels sur les activités des CMC et des conseils eux-mêmes. Dans les faits, cependant, les conseils des gouverneurs – qui ont subi une série de changements au cours de leur vie – fonctionnent uniquement comme des organismes consultatifs auprès des commandants et commandantes ainsi que du commandant ou de la commandante de l’ACD.

Au sein des CMC, le recteur ou la rectrice (directeur ou directrice des études au CMR Saint-Jean) relève du commandant ou de la commandante. Il ou elle a le mandat de gérer l’interface entre la culture militaire des FAC et la culture institutionnelle d’une université civile. Le recteur ou la rectrice agit également à titre de conseiller ou de conseillère pédagogique auprès du commandant ou de la commandante ainsi que du commandant ou de la commandante de l’ACD, et est également considéré·e comme un « officier ou officière supérieur·e » du ministère de la Défense nationale.

Ce cadre pose d’importants problèmes aux CMC. Il est inutilement complexe, mal défini et extrêmement déroutant, même pour les acteurs de son système. Il demeure fondé sur un instrument (OR Colmilcan) qui est désuet depuis des décennies et qui a été étiré dans tous les sens pour entrer dans un moule civil qui ne reflète pas les besoins, les fonctions ou les objectifs particuliers d’une institution militaire.

Ce qui est particulièrement frustrant, c’est que ces observations reflètent les mêmes constatations formulées lors des examens précédents : la Visite d’aide d’état-major spéciale (VAEMSNote de bas de page 30) de 2017 et le rapport du Bureau du vérificateur général de 2017Note de bas de page 31 ont proposé des modifications substantielles au modèle de gouvernance des CMC, mais peu de leurs recommandations pertinentes ont été mises en œuvre.

La Commission se retrouve donc au même endroit, proposant une nouvelle approche en matière de gouvernance et une série de révisions concrètes, notamment en ce qui concerne l’existence, les rôles, les responsabilités et les pouvoirs du chancelier ou de la chancelière, du Conseil des gouverneurs et du recteur ou de la rectrice, mais aussi en ce qui concerne la nomination, la durée des fonctions et l’avancement professionnel du commandant ou de la commandante et du directeur ou de la directrice des élèves-officiers et élèves-officières.

Chancelier ou chancelière/président ou présidente

Outre le fait de décerner des diplômes lors de la collation des grades, les ministres successifs de la Défense nationale, quelle que soit leur allégeance politique, ont eu peu d’interactions significatives avec les CMC dans leur rôle de chancelier ou de chancelière et de président ou de présidente. En l’absence d’un mandat défini, les rôles et les obligations attendus du chancelier ou de la chancelière et du président ou de la présidente ne sont pas clairs, et ce manque de clarté crée une confusion supplémentaire chez les autres acteurs de la structure de gouvernance des CMC quant à la façon et au moment d’interagir de manière appropriée avec le ou la ministre.

Cela entrave également la capacité des CMC à accomplir certaines de leurs activités clés. Par exemple, dans une université civile, le chancelier ou la chancelière agit à titre de chef titulaire de l’établissement et, en vertu de la loi, préside les cérémonies de collation des grades, décerne des diplômes et agit à titre d’ambassadeur ou d’ambassadrice dans la promotion des intérêts de l’établissement. Le président ou la présidente agit habituellement à titre de chef de la direction, assurant le leadership, la gestion et la surveillance. Aucune de ces fonctions, qui font autant partie intégrante du fonctionnement des CMC que des universités civiles, n’est facile à réaliser dans le cadre d’une structure où le ou la ministre de la Défense nationale du Canada agit comme chancelier ou chancelière et de président ou de présidente des collèges militaires du pays. En réalité, des exigences concurrentes quant au temps du ou de la ministre l’empêchent d’assumer ces fonctions de façon efficace et soutenue, tandis que le fait d’occuper le poste empêche d’autres personnes de prendre le relais. Ce défi persistant – commun à tous les échelons politiques depuis la création des conseils des gouverneurs – a été abordé dans le Rapport du comité ministériel sur les collèges militaires canadiens de 1993Note de bas de page 32, qui a recommandé que le ou la ministre de la Défense nationale soit considéré·e comme un « visiteur » ou une « visiteuse » et que chaque collège devrait désigner son propre chancelier ou sa propre chancelière, en fonction des recommandations du Conseil des gouverneurs.

La Commission partage un point de vue semblable : la désignation actuelle du ou de la ministre de la Défense nationale à titre de chancelier ou chancelière et de président ou présidente contribue considérablement à la confusion et à l’inefficacité en ce qui a trait à la gouvernance des CMC et constitue un obstacle à ce qu’une personne mieux placée (du fait de son poste) puisse assumer ces rôles, particulièrement en ce qui a trait à la direction de l’établissement en servant de défenseur ou défenseuse et de champion ou championne pour chaque collège.

Conseil des gouverneurs

L’emprunt, par le MDN et les FAC, du concept d’un conseil des gouverneurs à l’instar des universités civiles a également entraîné une confusion et une incertitude importantes dans les CMC (bien que l’intention sous-jacente de cette approche, qui consiste à essayer d’accroître la responsabilisation dans les collèges militaires, soit louable). Alors que, dans un contexte civil, le Conseil des gouverneurs a le pouvoir d’approuver le plan stratégique et le budget de l’établissement, de choisir le président ou la présidente, d’évaluer le rendement du président ou de la présidente et de superviser la rémunération, le Conseil des gouverneurs des CMC n’a pas ce pouvoir. Il ne joue aucun rôle dans l’embauche de civils, dans l’évaluation du rendement ou la rémunération du commandant ou de la commandante ou du recteur ou de la rectrice, dans les questions financières ou dans l’adoption des plans stratégiques des collèges. En fait, il n’a aucun pouvoir réel. À l’inverse, il joue un rôle consultatif limité, bien qu’important, auprès des commandants et commandantes, commandants et commandantes de l’Académie canadienne de la Défense et du ou de la ministre (en tant que chancelier ou chancelière et président ou présidente). Une comparaison des rôles et des responsabilités des conseils des gouverneurs des CMC par rapport à ceux des universités civiles canadiennes est présentée à l’annexe 6.

Il est donc trompeur d’appeler ces deux groupes de personnes distinguées des « conseils des gouverneurs ». De fait, ces derniers sont des comités consultatifs de facto et devraient être appelés comme tels. Étant donné qu’ils n’ont aucune relation réelle ou significative avec le ou la ministre et que leur rôle est de conseiller et de formuler des recommandations aux commandants et commandantes et commandants et commandantes de l’Académie de la défense, leur mandat devrait refléter davantage ces faits.

Sénat

Le Sénat a pour fonction de décerner des diplômes et des diplômes honorifiques, et les collèges ont habilité un certain nombre de comités sénatoriaux permanents, dans le cadre de la gouvernance universitaire, à veiller à ce que la qualité de ces diplômes soit conforme aux normes les plus élevées. Cependant, au fil du temps, le manque de clarté et les malentendus concernant cette fonction ont provoqué consternation et confusion.

Bien qu’il incombe au Sénat de s’assurer que tous les programmes d’enseignement sont constitués de manière appropriée afin de répondre aux exigences applicables en matière de diplômes universitaires, il incombe aux CMC d’établir et d’examiner ou de modifier périodiquement la liste des programmes offerts dans les collèges compte tenu des priorités institutionnelles, le commandant ou la commandante ayant le pouvoir d’affecter les ressources et d’établir les priorités en ce qui concerne les programmes d’enseignement. En effet, ce sont les CMC sous réglementation et responsabilité fédérale qui ont le pouvoir d’établir et de modifier la liste des programmes d’enseignement des collèges militaires, et non le Sénat – un malentendu qui a été récemment perpétué par les modifications approuvées aux paragraphes 2.50 (2) et 2.56 (2) du chapitre 2 de la partie des OR Colmilcan, conformément à l’échange de correspondance entre le ministre et le commandant du CMR en novembre 2021Note de bas de page 33. Plus précisément, l’affirmation selon laquelle le Sénat est « l’autorité finale pour toutes les questions académiques » devrait être nuancée. À ce titre, la Commission estime qu’une modification supplémentaire aux OR Colmilcan est nécessaire pour clarifier le pouvoir réel du Sénat et réitérer la primauté des CMC dans la prise de décisions concernant les programmes d’enseignement dans les collèges militaires.

Commandant ou commandante

Les commandantes ou commandants des CMC sont les dirigeantes ou dirigeants des collèges militaires. À cet égard, leurs rôles s’apparentent à ceux d’un président ou d’une présidente et d’un vice-chancelier ou d’une vice-chancelière d’une université civile. Conformément aux constatations découlant du rapport du Bureau du vérificateur général de 2017, la Commission considère les commandants et commandantes comme les principaux dirigeants ou les principales dirigeantes institutionnel·les de grandes organisations complexes qui, ultimement, sont responsables de la formation, de l’éducation et du bien-être des aspm/élof. Il convient donc de les identifier comme tels en les désignant comme président ou présidente et vice-chancelier ou vice-chancelière des collèges. Cela aiderait non seulement à clarifier ce qu’ils ou elles font et la position qu’ils ou elles occupent au sein de l’institution, mais aussi à souligner le fait que les CMC sont des institutions militaires, dirigées par des officiers et officières militaires, à des fins militaires. Cette désignation permettra également d’établir fermement le commandant ou la commandante en tant que président ou présidente du Sénat et en tant que chef exécutif ou exécutive et représentant officiel ou représentante officielle de l’établissement. Il est essentiel que le commandant ou la commandante joue ce rôle pour créer une vision commune pour les collèges militaires canadiens.

Une telle désignation doit s’accompagner de modifications à la durée du mandat des commandants et commandantes. À l’heure actuelle, la durée du mandat varie d’un titulaire à l’autre, mais elle n’a pas duré plus de deux ans en moyenne, car les titulaires de charge publique partent régulièrement à la suite d’une promotion ou d’une réaffectation.

Il n’est pas réaliste de s’attendre à ce qu’un leader puisse aider à apporter les changements nécessaires dans les CMC ou fournir le degré de stabilité nécessaire au sommet pour assurer la santé et le succès continus des établissements, si on ne lui donne que deux ans pour le faire. Il faut beaucoup plus de temps pour établir des connaissances de base, bâtir la confiance, favoriser les relations et créer des réseaux, à l’appui du mandat global des collèges. Ces observations ne sont pas nouvelles; le taux de roulement élevé du personnel militaire haut gradé a été souligné à maintes reprises dans les rapports précédents comme un obstacle majeur à une gouvernance efficace des CMC et réitéré plusieurs fois lors des séances d’écoute de la Commission par le personnel militaire et les membres du corps professoral. En réponse, le Rapport au Conseil des gouverneurs du CMR par le groupe d’étude WithersNote de bas de page 34 recommandait une durée de cinq ans, tandis que la VAEMS recommandait une durée minimale de trois ans, mais notait qu’une période de quatre à cinq ans serait optimaleNote de bas de page 35. La Commission recommande que les FAC prolongent la durée des mandats des commandants et des commandantes à un minimum de quatre ans et mettent en place des pratiques novatrices en matière de ressources humaines pour rompre le cycle des nominations de deux ans.

Étant donné que les collèges militaires sont des institutions nationales uniques ayant un profil mondial, responsables d’un sous-ensemble de membres particulièrement vulnérables des FAC, exposés à un examen public régulier et responsables de la formation de base en leadership au sein de la profession des armes, la Commission estime également qu’il est approprié que le commandant ou la commandante soit un officier général ou une officière générale. Bien que d’autres organisations de taille similaire au sein des FAC soient dirigées par des officiers et officières ayant le grade de colonel ou colonelle/capitaine de vaisseau ou un grade inférieur, la Commission estime que cela témoigne davantage du talent de leadership au sein des FAC (où même des officiers et officières subalternes occupent des postes dont l’étendue des responsabilités dépasse de loin celle de tout poste comparable dans un contexte civil) que de l’importance de ces organisationsNote de bas de page 36. De plus, les caractéristiques et les fonctions distinctes des CMC permettent leur traitement distinct.

Néanmoins, la Commission reconnaît que le rôle, les responsabilités, le niveau de risque et le budget que le commandant ou la commandante du CMR Saint-Jean gère actuellement correspondent mieux au grade de colonel ou colonelle/capitaine de vaisseau qu’au grade de brigadier-général ou brigadière-générale. Par conséquent, malgré l’avis de la Commission sur l’importance d’assurer l’égalité entre les deux collèges et de rehausser le statut du CMR Saint-Jean, elle est disposée à accepter qu’une promotion au grade de commandant ou de commandante ne soit accordée qu’en temps opportun et conformément aux propositions formulées ailleurs dans le présent rapport visant à accroître la taille du corps des élof/aspm et à augmenter l’offre de programmes au CMR Saint-Jean.

Lorsque cela se produira, le poste de directeur ou de directrice des élèves-officiers et élèves-officières au CMR Saint-Jean devrait passer de lieutenant-colonel ou lieutenante-colonelle/capitaine de frégate à colonel ou colonelle/capitaine de vaisseau, sur la base du même raisonnement. Cela suit la logique employée dans le rapport sur la Visite d’aide d’état-major spéciale en ce qui a trait à sa recommandation de faire passer le poste de directeur ou directrice des élèves-officiers et élèves-officières au CMR de lieutenant-colonel ou lieutenante-colonelle/capitaine de frégate à colonel ou colonelle/capitaine de vaisseau.

Mis à part la question du grade, tous les officiers ou officières ne sont pas nécessairement aptes à diriger les collèges militaires. Il sera essentiel de choisir des commandants et commandantes possédant les aptitudes, les compétences, le caractère et les connaissances nécessaires pour ce rôle unique afin d’assurer les résultats globaux que la Commission cherche à atteindre. Diriger une unité militaire au sein de laquelle est intégré un établissement d’enseignement présente des défis qui ne sont pas courants dans l’ensemble des FAC, en particulier une unité qui est responsable de l’éducation et de la formation de certains des membres les plus jeunes et les plus à risque de la profession des armes.

Des décennies d’expérience en tant qu’officier ou officière des FAC devraient préparer le commandant ou la commandante à diriger les aspects militaires et de service public des CMC. Une attention particulière devrait également être accordée aux connaissances et aux compétences requises pour diriger un établissement d’enseignement. Comme la plupart des officiers et officières n’ont peut-être pas bénéficié d’une telle expérience avant cette étape de leur carrière, un commandant ou une commandante nouvellement nommé·e devrait être tenu·e de s’inscrire à un programme de bourses de la quatrième période de perfectionnement dans une université civile axé sur la compréhension de la gouvernance et des opérations universitaires. La sélection en temps opportun du commandant ou de la commandante peut également permettre à celui-ci ou à celle-ci de se familiariser avec les programmes de formation du président ou de la présidente d’université qui sont offerts au Canada et aux États-Unis.

La Commission comprend que le processus de sélection actuel ne permet pas d’offrir aux futurs commandants et aux futures commandantes les compétences et les aptitudes nécessaires et considère que l’accès à la formation et à l’expérience appropriées est essentiel à leur réussite. Cela signifie que le processus de sélection doit avoir lieu beaucoup plus tôt, en effectuant une « identification préalable » des commandants et des commandantes bien avant leur nominations respectives.

Au CMR, cela signifierait que le prochain commandant ou la prochaine commandante possèderait le grade de colonel ou colonelle/capitaine de vaisseau et qu’il ou elle suivrait sa formation de la quatrième période de perfectionnement dans le but explicite d’être sélectionné·e pour être le commandant ou la commandante à l’avenir. Il se peut également que le ou la chef d’état-major de la défense et le ou la ministre de la Défense nationale doivent recourir à un processus de promotion de « grade intérimaire pendant la durée de l’affectation » pour harmoniser le calendrier. Au CMR Saint-Jean, jusqu’à ce que des changements soient apportés pour faire passer le grade du poste de commandant ou commandante à celui de brigadier-général ou brigadière-générale, le futur commandant ou la future commandante doit suivre sa formation de la quatrième période de perfectionnement, soit avant d’être promu·e au grade de colonel ou colonelle/capitaine de vaisseau, soit immédiatement après sa promotion, afin de lui donner le temps nécessaire pour passer quatre ans à la tête de l’établissement.

Recteur ou rectrice

Il subsiste une grande confusion quant au rôle de recteur ou rectrice dans les CMC (directeur ou directrice des études au CMR Saint-Jean), en grande partie en raison d’une tendance erronée à essayer d’importer des concepts universitaires civils dans la structure du collège militaire. Cela crée des tensions entre les postes de commandant ou commandante et de recteur ou rectrice, suscite du ressentiment entre le personnel militaire, le personnel enseignant et les employés, et mine l’identité des CMC en tant qu’institutions militaires d’abord et avant tout.

Par exemple, de nombreux membres de la communauté universitaire des CMC ont exprimé l’idée que le recteur ou la rectrice ou le directeur ou la directrice des études devrait être habilité·e à exercer les fonctions associées au président ou à la présidente (également appelé·e recteur ou rectrice) d’une université civile, comme le contrôle des ressources financières, le contrôle des décisions d’embauche et la participation aux processus de règlement des différends au sein du corps professoral. Le fait que le recteur ou la rectrice ou le directeur ou la directrice des études n’exerce pas ces pouvoirs dans les CMC, et que ceux-ci soient plutôt conférés au commandant ou à la commandante, a été une source de consternation et de frustration pour de nombreux universitaires.

Ces sentiments sont compréhensibles, mais déplacés. En réalité, le rôle de recteur ou de rectrice ou de directeur ou de directrice des études dans les collèges militaires s’apparente davantage à celui de Prévost et vice-recteur ou vice-rectrice à l’enseignement dans une université civile, et devrait être renommé en conséquence. Cela permettrait de mieux refléter à la fois ce que le poste implique et ce qu’il n’implique pas, ce qui contribuerait à créer de la clarté et à établir des attentes plus appropriées.

Pour mieux aligner le titre sur la fonction du poste, il faut aussi réfléchir à la façon dont ce poste est pourvu. À l’heure actuelle, le recteur ou la rectrice du CMR est nommé·e dans le cadre d’un processus du gouverneur en conseil (un processus qui est actuellement reproduit au CMR Saint-Jean), ce qui lui confère du sérieux et contribue à assurer le choix d’un candidat ou d’une candidate de haut calibre. Les personnes qui ont occupé ces postes jusqu’à présent ont fait bénéficier les établissements de leur vaste expérience à titre de cadre supérieur, de leur leadership solide, de leur crédibilité universitaire et de leur expérience de haute qualité, ce qui a apporté d’importants avantages aux CMC. En revanche, la nomination du recteur ou de la rectrice ou du directeur ou de la directrice des études au moyen d’un processus de gouverneur en conseil entraîne généralement l’embauche d’une personne qui ne s’attend peut-être pas, à ce stade de sa carrière, à relever d’un autre cadre supérieur ou à être hiérarchiquement subordonnée à un commandant ou à une commandante militaire.

Afin de mieux clarifier les paramètres du poste et les attentes connexes, tant pour le ou la titulaire de la charge que pour les autres intervenants et intervenantes des CMC, le poste de recteur ou de rectrice devrait être redésigné comme celui de Prévost et vice-recteur ou vice-rectrice à l’enseignement et à la recherche. Il devrait également faire l’objet d’une nomination par le gouverneur en conseil afin d’attirer les bons talents et le niveau d’expérience approprié pour ce poste – avec la mise en garde claire que le Prévost et vice-recteur ou vice-rectrice à l’enseignement et à la recherche relèveront du commandant ou de la commandante et travailleront en collaboration avec lui ou elle. Des représentants du MDN et des FAC devraient siéger au comité de nomination, le commandant ou la commandante du collège respectif étant le mieux placé pour servir de représentant des FAC au sein de ce comité.

Directeur ou directrice des élèves-officiers et élèves-officières

Le directeur ou la directrice des élèves-officiers et élèves-officières est un personnage clé dans la vie des aspm/élof et un pilier de la réussite de leur expérience d’instruction militaire. Ce rôle exige donc la bonne personne pour la bonne durée. Un mandat de deux ans, qui est devenu la norme générale, est insuffisant. Conformément aux arguments avancés pour prolonger le mandat du commandant ou de la commandante, la Commission estime que le mandat du directeur ou de la directrice des élèves-officiers et élèves-officières doit également être prolongé. Cela créera une plus grande stabilité institutionnelle, renforcera la confiance des aspm/élof et donnera plus de temps pour mettre en œuvre les changements et mener à bien les initiatives.

Étant donné que l’argument moteur derrière un mandat plus long est à la fois le besoin de stabilité et la capacité de superviser et de mettre en œuvre une gestion du changement efficace, il est également important que le mandat du commandant ou de la commandante, du Prévost et vice-recteur ou vice-rectrice à l’enseignement et à la recherche ainsi que du directeur ou de la directrice des élèves-officiers et élèves-officières soient échelonnés, afin d’éviter une situation dans laquelle les trois arrivent ou partent la même année. Cela permettra d’améliorer les expériences positives des aspm/élof au cours de leur parcours de trois à quatre ans dans les collèges, puisqu’ils seront en mesure d’établir des relations plus durables et de confiance avec les personnes clés qui ont une incidence sur leur vie quotidienne. Bien qu’il existe diverses combinaisons et permutations qui peuvent produire l’effet souhaité, la Commission considère qu’il est essentiel que les trois postes soient gérés ensemble à cet égard.

La prolongation de la durée du mandat du directeur ou de la directrice des élèves-officiers et élèves-officières ne devrait en aucun cas empêcher l’avancement professionnel du titulaire; une affectation dans les collèges devrait être considérée comme un atout et le calendrier des possibilités de promotion devrait être harmonisé en conséquence.

En somme, il faut résister à la tentation de se tourner vers les universités civiles pour s’inspirer de leurs cadres de gouvernance pour les CMC, à moins qu’il ne soit particulièrement logique de le faire. Lorsque les efforts visant à faire en sorte que les collèges militaires s’alignent sur le modèle civil ont un objectif clairement lié à leur identité institutionnelle en tant qu’unité militaire responsable de l’instruction et de l’éducation des membres de la profession des armes, alors ceux-ci devraient se poursuivre. Lorsque de tels efforts confondent ou sapent cette identité et cet objectif, ils doivent être révisés.

Recommandation  5

Retirer le ou la ministre de la Défense nationale du poste de chancelier ou de chancelière et de président ou de présidente des deux collèges militaires canadiens. Modifier les Ordonnances et règlements royaux applicables aux Collèges militaires du Canada en conséquence.

Recommandation  6

Nommer un Canadien ou une Canadienne éminent·e au rôle cérémonial de chancelier ou de chancelière des collèges militaires canadiens. Modifier les Ordonnances et règlements royaux applicables aux Collèges militaires du Canada en conséquence.

Recommandation  7

Redéfinir le rôle du Conseil des gouverneurs de chaque collège militaire afin qu’il agisse en tant que comité consultatif qui offre des conseils et des recommandations au commandant ou à la commandante. Mettre à jour les Ordonnances et règlements royaux applicables aux Collèges militaires du Canada en conséquence.

Recommandation  8

Clarifier les paramètres du pouvoir du Sénat et préciser que la responsabilité d’affecter des ressources et d’établir des priorités en lien avec les programmes d’enseignement des collèges militaires relève du commandant ou de la commandante. Mettre à jour les Ordonnances et règlements royaux applicables aux Collèges militaires du Canada en conséquence.

Recommandation  9

Désigner les commandants ou commandantes comme « présidents et vice-chanceliers » ou « présidentes et vice-chancelières » de leurs collèges militaires respectifs, investis des pouvoirs et des responsabilités appropriés. Modifier les Ordonnances et règlements royaux applicables aux collèges militaires canadiens en conséquence.

Recommandation  10

Fixer la durée minimale du mandat du commandant ou de la commandante de chaque collège militaire à un minimum de quatre ans.

Recommandation  11

Identifier le commandant ou la commandante de chaque collège préalablement à sa nomination et exiger qu’il ou elle participe à un programme de bourses de la quatrième période de perfectionnement ou à un programme de formation à l’intention des présidents et présidentes d’université pour l’exposer à la gouvernance et aux activités d’une université.

Recommandation  12

Redésigner le recteur ou la rectrice de chaque collège militaire comme Prévost et vice-recteur ou vice-rectrice à l’enseignement et à la recherche et les nommer dans le cadre d’un processus du gouverneur en conseil comme les plus hauts officiers ou les plus hautes officières universitaires de leur collège respectif, relevant du commandant ou de la commandante. Modifier les Ordonnances et règlements royaux applicables aux collèges militaires canadiens en conséquence.

Recommandation  13

Fixer la durée minimale du mandat du directeur ou de la directrice des élèves-officiers et élèves-officières à un minimum de trois ans.

Haut de page

Programme : Le pilier des études

Le Programme de formation des officiers de la Force régulière – Collèges militaires canadiens (PFOR CMC) est un programme entièrement résidentiel de quatre ans (ou cinq ans) axé sur les études, l’instruction militaire, la condition physique et le bilinguisme. C’est ce programme des 4-piliers, décrit ci-dessus, qui différencie les collèges militaires des universités civiles, et c’est donc ce programme qui est au cœur de la proposition de valeur des CMC. Sans un programme solide, distinct et rationalisé conçu pour le collège militaire, qui va au-delà de la formation universitaire que tous les autres officiers et officières reçoivent également dans une universitaire civile, les coûts supplémentaires liés à la gestion des CMC ne sont pas justifiables et leur raison d’être est remise en question.

À ce jour, les CMC s’appuient sur le modèle des 4 piliers afin de mettre en relief la valeur ajoutée des collèges. En réalité, le pilier des études sert de pierre angulaire autour de laquelle s’articulent les autres piliers, qui occupent une place moindre. Par conséquent, bien qu’après un examen détaillé de ces 4 piliers, la Commission a conclu que le modèle traite adéquatement des domaines de fond, elle a également constaté que :

  1. le programme dans sa forme actuelle est imparfait et a contribué à un décalage croissant entre les CMC et la profession des armes; et
  2. le pilier des études mérite que l’on y accorde une attention particulière en raison de son incidence sur l’évolution et la réussite globales des collèges militaires canadiens.

À cet égard, les CMC peuvent compter sur un corps professoral et un personnel réputés, de haut calibre et activement engagés, qui contribuent à l’élaboration et à la prestation d’un large éventail de programmes et de cours de qualité supérieure. Leur engagement envers l’excellence, leur enthousiasme pour l’enseignement et la recherche, ainsi que leur investissement sincère dans la réussite des aspm/élof leur valent la grande estime de ces derniers.

Au cours des dernières années, afin de tirer parti des possibilités grandissantes, des idées nouvelles et des tendances en évolution, les membres du corps professoral et du personnel ont créé de nouveaux programmes, ajouté de nouveaux diplômes, exploré de nouveaux domaines d’études et embauché du nouveau personnel. Ces initiatives ont été d’un grand intérêt pour l’établissement et ont reçu un accueil très favorable de la part des aspm/élof. Malheureusement, même si, prises séparément, ces initiatives ont pu être positives, ensemble, elles se sont avérées coûteuses – en argent, en ressources humaines et en temps –, et cette augmentation des coûts entre de plus en plus en conflit avec les objectifs généraux des collèges militaires. Ces coûts sont devenus à ce point importants qu’on ne peut plus les ignorer ou les justifier, et ils sont si profondément établis qu’on ne peut y remédier par des solutions superficielles. Un examen de la taille et de la portée actuelles du programme d’études, de ses liens avec le mandat et la mission des FAC et de son incidence sur les autres piliers du PFOR CMC indique qu’une réforme significative de ce pilier est nécessaire.

Haut de page

Taille et portée

La source de ces problèmes réside dans la taille du programme d’études et la portée des cours offerts, en particulier par rapport à la taille du corps étudiant. À l’heure actuelle, le CMR compte trois facultés (sciences humaines et sociales, génie et sciences), regroupant 14 départements qui offrent 44 programmes de premier cycle (22 en anglais et 22 en français). Le corps professoral est composé de 189 professeurs et professeures d’université (UT) permanents et de 39 postes d’enseignants et enseignantes militaires, et est complété par des instructeurs et instructrices embauchés pour une période déterminée et des chargé·es de cours, sans que ces postes ne soient nécessairement pourvus. Le CMR compte habituellement environ 1 100 aspm/élof, qui font partie du PFOR, et 3 000 autres étudiants et étudiantes, notamment des cycles supérieurs et à temps partiel. Le CMR Saint-Jean compte deux facultés (sciences sociales et sciences) et gère trois départements (langues, sciences et sciences humaines et sociales), en plus de dispenser la formation militaire professionnelle, et offre un programme d’études internationales de niveau universitaire. Le CMR Saint-Jean emploie 40 membres du corps professoral et enseignant pour un corps de 350 étudiants et étudiantes (y compris les cours de niveau universitaire et collégial). Les salaires des membres du corps professoral ne constituent pas le seul facteur de coûts dans les collèges militaires, mais ils sont importants.

Les collèges militaires proposent des programmes dans un éventail de disciplines, et bien que cette diversité d’options soit appréciée des aspm/élof, elle n’est pas indispensable pour répondre aux besoins des FAC. En effet, les FAC sont largement indifférentes au type de diplôme de premier cycle obtenu, et à quelques exceptions près, presque tous les diplômes et programmes sont acceptables pour la plupart des professions. Bien que le Canada ne soit pas le seul pays à offrir une vaste gamme de diplômes et de programmes (le Japon et l’Allemagne adoptent une approche similaire), cela contraste avec de nombreuses écoles militaires étrangères, qui offrent des diplômes plus spécialisés, étroitement liés à la profession des armes et aux exigences de leurs forces armées.

Ce large éventail de programmes et de diplômes offerts dans les collèges militaires entraîne la création d’un grand nombre de cours. Or, ce volume est disproportionné par rapport au nombre d’aspm/élof; ainsi, bon nombre de ces cours et programmes comptent très peu d’inscriptions. Par exemple, pour les cinq dernières années, on compte à peine quinze diplômé·es par année dans les programmes de mathématiques, de culture et communications (anglais), de culture et communications (français) ainsi que d’économie, alors que ces programmes mobilisent invariablement plus d’une quarantaine de membres du corps professoral. De nombreux cours subissent le même sort et la situation est exacerbée par la multiplication des cours offerts pour satisfaire aux exigences du bilinguisme, ce qui fait que certaines classes ne comptent que trois aspm/élof. Malgré la décision récente d’imposer un seuil minimal pour la prestation d’un cours (soit de trois aspm/élof par classe), la taille des classes demeure bien inférieure à celle des universités civiles et le nombre total de cours offerts reste largement décalé par rapport aux moyennes nationales. Un enjeu connexe est la très faible proportion d’aspm/élof par rapport au corps professoral. Dans les deux CMC, ce ratio s’établit à 8:1, ce qui est bien inférieur à la moyenne de 21:1 enregistrée dans les universités civiles canadiennes comparables, comme il est indiqué ci-dessus (voir les figures 6 et 7).

Un autre facteur qui fait augmenter le nombre de cours offerts, tout en ajoutant à l’horaire chargé des aspm/élof, est le tronc commun de seize crédits. Comme il a été mentionné ci-dessus, cette série de cours obligatoires représente la matière minimale que les aspm/élof doivent maîtriser pour obtenir leur diplôme, dans deux domaines thématiques

  1. Mathématiques et sciences, et
  2. Histoire, langue et culture du Canada, sciences politiques, relations internationales et leadership et éthique.

Le tronc commun représente une partie importante des quelque 40 crédits du diplôme des sciences humaines et sociales et transforme le programme de génie en un programme de 48 à 51 crédits qui nécessite une mineure en sciences humaines et sociales. Sa mise en œuvre nécessite également d’importantes ressources humaines. Bien que le tronc commun constitue une excellente formation de base pour les diplômé·es des CMC, si l’on tient compte du fait qu’il ne s’agit que d’une composante du PFOR CMC, il est excessif et exige trop de temps des aspm/élof.

Par ailleurs, le fait que le CMR Saint-Jean offre un programme de collège d’enseignement général et professionnel (cégep) contribue également à la taille et à la portée étendues des CMC. Ce programme de deux ans de niveau collégial (qui équivaut à la 12e année et à la première année universitaire ailleurs au Canada) est une particularité du système d’enseignement supérieur du Québec. Il est normalement offert à peu de frais aux résidents du Québec par le gouvernement du Québec. Étant donné que le gouvernement fédéral n’a pas compétence pour offrir le programme, celui-ci est sous-traité par le CMR Saint-Jean au Cégep Saint-Jean-sur-Richelieu à des fins d’appui et d’agrément. De plus, la gestion d’un deuxième programme d’études, en parallèle avec des programmes de niveau universitaire, implique le financement supplémentaire de nombreux postes de spécialiste en éducation (EDS) de la fonction publique. En outre, étant donné que les aspm/élof entrent au cégep à 16 ou 17 ans, cela entraîne des coûts supplémentaires en aval pour le gouvernement en termes de pension et de salaires, en raison de leur jeune âge lorsqu’ils deviennent des personnes à l’emploi des Forces armées canadiennes.

Un problème moindre, mais dont les répercussions sont considérables, est la divergence entre les calendriers scolaires des deux collèges. Comme le CMR Saint-Jean est tenu de suivre le calendrier des cégeps, lequel est établi par la province, il dispose de peu de souplesse pour planifier les horaires, ce qui complique la coordination de son calendrier avec celui des FAC et du CMR à tous les égards, notamment pour la planification des cours, la participation à des événements spéciaux et les examens. Plus précisément, une séance au cégep compte seize semaines, ce qui comprend les semaines d’examen, tandis qu’une séance dans les universités du Québec et de l’Ontario s’étend sur quinze semaines, examens compris. Bien que cela puisse sembler sans conséquence, ce décalage complique considérablement la mobilité entre les collèges pour les aspm/élof qui voudraient tirer parti des différents cours offerts, des possibilités d’apprentissage linguistique et des programmes d’échange.

Par exemple, pour les aspm/élof qui fréquentent le CMR Saint-Jean, le retour en classe se fait plus tôt qu’au CMR, ce qui signifie pour eux moins de temps pour l’instruction estivale, surtout l’instruction militaire. Ce décalage nuit aussi à l’apprentissage à distance et aux cours virtuels. Beaucoup de cours et une bonne partie du contenu sont ainsi offerts dans les deux collèges, alors qu’ils pourraient être réduits.

Tous ces facteurs font augmenter les coûts. À l’heure actuelle, les collèges militaires canadiens sont respectivement 1,6 fois plus coûteux (CMR) et quatre fois plus coûteux (CMR Saint-Jean) que les universités civiles comparables, après ajustement tenant compte des activités non scolairesNote de bas de page 37. Bien que le calibre, le professionnalisme et la qualité générale du programme d’études offert par les collèges militaires soient incontestables, ce programme dépasse largement les normes de l’industrie en ce qui a trait à la taille des classes, à la proportion du corps étudiant par rapport au corps professoral et au nombre de cours offerts. Cet écart ne peut être justifié par l’objectif de base, qui consiste en l’obtention d’un diplôme universitaire de premier cycle valable.

Haut de page

Force des liens

Un autre problème du programme d’études est son lien ténu avec le mandat en matière de défense et de sécurité des FAC. Le corps professoral et le personnel sont conscients de la mission des CMC, et ils cherchent souvent des façons d’intégrer le perfectionnement des officiers et officières et les compétences en leadership de manière formelle et informelle dans leurs programmes. Cela se manifeste de multiples façons, notamment par l’élaboration de cours qui soutiennent directement les opérations des FAC (p. ex. CCF409 – Génie de la combustion et des explosifs), la compilation de listes de lecture qui favorisent les réflexions et les discussions stimulantes (p. ex. ENE331 – Littérature mondiale : crise et conflit) et l’ajout d’éléments pratiques dans les cours pour renforcer les compétences des officiers et officières. De tels efforts sont louables et pertinents. Ils sont appréciés par les aspm/élof et reflètent le dévouement des membres du corps professoral envers la population étudiante.

Cependant, ces approches sont limitées et ponctuelles. Elles ne sont ni normalisées ni faciles à reproduire, ne sont pas liées à des résultats d’apprentissage précis et ne sont pas systématiquement évaluées. De surcroît, malgré ces efforts, il n’existe aucun lien explicite entre le pilier des études et les objectifs généraux de la formation militaire professionnelle et du perfectionnement des officiers et des officières des CMC, ce qui rend cette relation tout au plus négligeable. Précisons qu’il ne faut pas y voir là une faute de la part de quiconque ni un manque d’intégrité, de capacité ou de professionnalisme. Cela témoigne plutôt d’une faille dans la façon dont le système a été conçu à l’origine et a évolué au fil des décennies.

Le vaste éventail de programmes mentionné ci-dessus dilue l’orientation et la clarté du mandat des CMC, car ceux-ci ne sont ni des établissements d’arts libéraux ou de génie ni des collèges techniques. Même s’il y a des avantages à offrir diverses disciplines, l’absence d’une identité claire en tant qu’école militaire fait qu’il est difficile pour le programme d’études dans son ensemble d’être assorti d’une vision claire et d’un but commun.

Haut de page

Incidence sur les autres piliers

Outre la question des ressources, le temps requis pour satisfaire aux exigences du programme d’études des CMC nuit à d’autres aspects essentiels de l’expérience dans les collèges militaires, ce qui fait considérablement obstacle à la capacité des asm/élof d’investir suffisamment d’énergie dans quoi que ce soit d’autre. Toute tâche « supplémentaire » doit être effectuée tôt le matin ou tard le soir, les activités non liées aux études étant reléguées aux heures avant et après le travail et aux week-ends, ce qui entraîne un stress excessif, nuit au sommeil et laisse clairement entendre que les études sont privilégiées au détriment de la formation linguistique, de l’instruction militaire, de la condition physique, de la santé et du bien-être, et du perfectionnement du leadership.

Haut de page

Une voie à suivre

En résumé, la multiplication des programmes et des cours offerts dans les collèges militaires, combinée au nombre élevé de membres du corps professoral et du personnel actuellement employés – surtout compte tenu du nombre total d’aspm/élof et, en partie, de l’absence de coordination entre les calendriers des collèges – a fait grimper les niveaux de dotation, de même que les coûts de soutien et de fonctionnement connexes, à des niveaux inquiétants. De surcroît, en raison de l’absence d’un lien clair entre le programme d’études et le mandat des FAC en matière de défense et de sécurité, de la priorité accordée aux études au détriment d’autres éléments importants du programme et de l’existence de modèles de rechange efficaces pour former des officiers et officières compétents, le pilier des études, dans sa structure actuelle, est trop vaste et trop coûteux à maintenir.

La Commission reconnaît que les collèges militaires sont des établissements uniques qui exigent un investissement important. La question qui est de savoir si les coûts sont supérieurs ou inférieurs à ceux des établissements civils ne constitue que l’un des facteurs pris en compte par la Commission dans l’évaluation de la proposition de valeur des collèges. Cependant, il est essentiel que les fonds publics soient bien dépensés. À cet égard, les coûts doivent non seulement être raisonnables, mais ils doivent aussi être directement liés à la raison d’être des collèges militaires et appuyer directement les objectifs de l’organisation qu’ils sont censés servir.

Par conséquent, et conformément aux pratiques de gestion courantes au gouvernement et dans l’ensemble des établissements d’enseignement supérieur, il est nécessaire de réaffecter les ressources financières et humaines existantes du programme d’études à des éléments plus prioritaires, de rationaliser les cours offerts et de renforcer les liens avec les exigences de la profession des armes.

Pour ce faire, plusieurs groupes de réformes interconnectées sont nécessaires. En élaborant cette liste, la Commission a examiné diverses approches adoptées dans d’autres écoles militaires ainsi que des innovations dans le contexte des universités civiles.

Premièrement, il n’est pas logique que l’unique diplôme de premier cycle offert dans les collèges militaires qui soit expressément lié à l’identité militaire des établissements, c’est-à-dire le baccalauréat ès arts et sciences militaires, ne soit pas offert aux aspm/élofNote de bas de page 38. À l’avenir, ce programme devrait être ajouté au PFOR CMC afin de porter le total des programmes à quatre :

  • le baccalauréat ès arts;
  • le baccalauréat ès sciences;
  • le baccalauréat ès arts et sciences militaires;
  • le baccalauréat en génie.

Les trois premiers programmes seraient offerts au CMR Saint-Jean et les quatre seraient offerts au CMR.

Deuxièmement, le nombre de programmes et de cours offerts par les collèges militaires canadiens doit être considérablement réduit. Tous les programmes n’ayant pas enregistré plus de quinze aspm/élof inscrits ou diplômés au moins une fois au cours des cinq dernières années devraient être éliminés. Par ailleurs, d’autres mesures de réduction devraient être entreprises en vue de rationaliser considérablement les programmes et cours qui comptent très peu d’inscriptions. Parallèlement, il faut procéder à une réduction proportionnelle du nombre de postes de professeur ou professeure d’université (UT) au CMR. Dans les deux collèges, la proportion des membres du corps étudiant par rapport aux membres du corps professoral devrait être fixée à 15:1. Cette proportion, qui à l’heure actuelle représente un tiers de la moyenne dans les universités civiles comparables, passerait ainsi aux deux tiers de la moyenne comparable; de cette façon, on pourrait maintenir des classes de petite taille et un lien étroit entre les membres du corps professoral et les membres du corps étudiant, tout en tenant compte de la nécessité d’améliorer l’efficacité financière des CMC.

Troisièmement, il faut aussi augmenter le nombre d’aspm/élof dans les deux collèges, afin de réduire les coûts par aspm/élof, de maximiser les ressources et de tirer efficacement parti des CMC au profit des FAC. Au total, le nombre d’aspm/élof devrait être porté à au moins 1 850 (ou augmenté conformément aux limites imposées par les FAC selon la capacité de l’organisation d’absorber et de former de nouveaux officiers et officières). Ce nombre devrait être réparti entre les deux collèges.

La Commission a exploré deux possibilités concernant la répartition appropriée des aspm/élof supplémentaires. La première consisterait à faire passer le nombre d’aspm/élof de 1 000 à 1 500 au CMR et de 100 à 350 au CMR Saint-Jean. Cette option pourrait nécessiter la construction de résidences supplémentaires à Kingston. La seconde consisterait à faire passer le nombre d’aspm/élof de 1 000 à 1 200 au CMR et de 100 à 650 au CMR Saint-Jean. Compte tenu de divers facteurs – notamment l’infrastructure actuelle des deux collèges, le nombre de membres du corps professoral, les domaines d’expertise propres à chaque collège, les possibilités de créer une plus grande égalité entre les collèges, l’importance d’éviter la répartition des sexes qui se produirait si le CMR Saint-Jean se concentrait exclusivement sur les arts libéraux alors que le CMR se spécialisait en sciences et en technologie, et les changements proposés dans les programmes offerts –, la Commission est d’avis que la deuxième option devrait être retenue.

Néanmoins, la Commission est consciente que de tels changements pourraient entraîner des conséquences imprévues, particulièrement en ce qui a trait à la présence de l’Institut Osside au CMR Saint-Jean, et que celles-ci doivent être prises en compte parmi d’autres facteurs comme l’infrastructure, la faisabilité logistique, les considérations relatives à l’exécution des programmes et les exigences contractuelles existantes. Par conséquent, la Commission estime que l’Académie canadienne de la Défense et les CMC sont les mieux placés pour prendre les décisions finales concernant la répartition des aspm/élof entre les deux collèges.

Quatrièmement, le tronc commun devrait être éliminé. Son objectif est valable et important, et il est louable de fournir une éducation équilibrée englobant les arts et les sciences à tous les aspm/élof, quel que soit leur domaine d’études pour qu’ils puissent acquérir des valeurs et une éthique, un bon jugement et une pensée critique, des connaissances générales pertinentes et de bonnes compétences en rédaction. Cependant, le personnel supplémentaire et les coûts importants nécessaires pour le mettre en œuvre rendent le tronc commun difficile à justifier. Cela est d’autant plus vrai que d’autres mécanismes permettent d’obtenir des résultats similaires.

Cinquièmement, le programme de cégep au CMR Saint-Jean devrait être éliminé. Au cours des cinq dernières années, il en a coûté entre 2,2 M$ et 3,5 M$ par annéeNote de bas de page 39 pour payer le Cégep Saint-Jean-sur-Richelieu pour le soutien et l’agrément du programme offert par le CMR Saint-Jean, celui-ci n’ayant pas compétence pour offrir le programme; ce montant comprend environ 500 000 $ pour l’administration et l’agrément des programmes. De plus, environ 1,5 M$ en dépenses salariales sont versés au personnel des services d’éducation du CMR Saint-Jean chargé d’offrir les cours du programme collégial, ce qui signifie qu’au total, il en coûte plus de 5 M$ par année au gouvernement du Canada pour offrir un programme qui relève de la compétence provinciale et qui est déjà offert à peu de frais à tous les résidents du Québec. Il est impossible de justifier ces dépenses, surtout sans une raison convaincante pour maintenir un cégep dans un collège militaire.

Pour en arriver à sa recommandation d’éliminer le programme de cégep, la Commission a tenu compte des préoccupations soulevées lors des consultations concernant les répercussions possibles de cette perte pour le CMR Saint-Jean. On craint notamment que cette mesure nuise aux efforts de recrutement au Québec, réduise l’intérêt de la population québécoise à l’égard des CMC, abaisse le statut du CMR Saint-Jean, compromette les efforts pour maintenir une forte présence francophone dans les FAC et mène ultimement à la fermeture de l’établissement. La plupart de ces arguments sont fondés sur des conjectures, mais certains soulèvent des questions valables. Néanmoins, toutes ces préoccupations peuvent être gérées et atténuées efficacement.

Par exemple, l’argument selon lequel le programme de cégep offert au CMR Saint-Jean est l’un des principaux moteurs de recrutement au Québec n’est pas corroboré par les faits, et l’idée que les FAC doivent maintenir le programme pour atteindre les objectifs de recrutement au Québec est erronée. Quoi qu’il en soit, si les FAC déterminent que l’élimination du programme de cégep a des répercussions sur les bassins de recrutement traditionnels dans cette province, il existe diverses solutions de rechange pour y remédier, notamment au moyen de nouvelles stratégies ciblées. Par exemple, les FAC pourraient inscrire les étudiants et étudiantes du cégep intéressés dans la Première réserve pendant les périodes d’instruction militaire estivales, jusqu’à ce que ces personnes aient terminé une ou deux années de cégep, puis les inscrire comme officiers ou officières de la Force régulière dans le cadre d’un programme d’études rémunéré. Une autre option serait que les étudiants et étudiantes du cégep s’inscrivent au PFOR U Civ; ils fréquenteraient un cégep civil, sans frais pour le gouvernement du Canada, puis entreraient dans un CMC après avoir terminé leur première ou deuxième année d’études collégiales. Dans tous les cas, les efforts de recrutement des FAC seraient probablement plus efficaces s’ils se concentraient sur les 48 cégeps et quelque 60 collèges privés au Québec, au lieu des 521 écoles secondaires de la province. Ce ne sont là que quelques options dans le cadre d’une approche révisée visant à assurer un recrutement adéquat des résidents et résidentes du Québec dans les FAC.

Bien que la crainte que l’élimination du programme de cégep abaisse le statut du CMR Saint-Jean puisse paraître fondée, le fait que la Commission propose de renommer l’établissement, de rehausser le grade de son commandant ou de sa commandante en temps voulu, de tripler le nombre de diplômes offerts et d’augmenter le nombre d’aspm/élof qu’il accueille devrait apaiser ces inquiétudes. En effet, l’élimination du programme de cégep au CMR Saint-Jean permettrait de réaffecter 250 places à des aspm/élof de niveau universitaire, portant ainsi à 350 le nombre d’inscriptions de base dans le PFOR CMC au CMR Saint-Jean, indépendamment de toute hausse supplémentaire. Dans l’ensemble, cette série de changements réaffirmera et renforcera la valeur du CMR Saint-Jean à titre d’établissement national d’importance, de composante essentielle du paysage de l’enseignement supérieur québécois et de canal majeur pour attirer les Canadiens et Canadiennes francophones dans les FAC, et ce, malgré l’élimination du programme de cégep.

Il convient de noter que même si la Commission fonde sa recommandation d’éliminer le programme de cégep principalement sur des raisons financières, elle estime également que la prestation du programme dilue l’objectif du Collège et présente des risques inutiles. Bien que les collèges militaires soient, de par leur nature, principalement destinés aux jeunes, il y a une différence notable entre le niveau de maturité, l’expérience de vie, le jugement et le développement du cerveau d’une jeune personne de 18 ans par rapport à une jeune personne de 16 ans. Bon nombre des problèmes auxquels font face les CMC en ce moment, et qui sont à la base du mandat de la Commission, découlent de la situation particulière dans laquelle se trouvent de jeunes adultes qui cohabitent, étudient et travaillent ensemble. La présence de mineurs dans cette population par ailleurs déjà difficile à gérer en raison d’un programme collégial qui n’apporte aucune valeur ajoutée aux CMC a pour effet d’accroître le niveau de risque et de responsabilité, sans raison discernable.

En résumé, il n’y a aucune raison valable pour que les collèges militaires canadiens offrent un programme de cégep. L’élimination de ce programme permettrait au CMR Saint-Jean de renforcer son identité en tant qu’établissement militaire, de se réorienter vers son objectif réel en soutenant le volet d’études de niveau universitaire du PFOR CMC et de réaffecter les fonds à des activités qui servent mieux sa raison d’être, notamment les nouveaux programmes universitaires proposés.

Enfin, les cours offerts et les calendriers des programmes doivent être entièrement harmonisés entre les deux collèges, ce qui devrait être grandement facilité par les changements apportés aux programmes d’études mêmes. Ces changements, auxquels s’ajoutent l’utilisation accrue de la technologie éducative et les options d’apprentissage à distance, permettront aux collèges de réduire le nombre de cours offerts en double en raison des exigences du bilinguisme et d’offrir aux aspm/élof un meilleur accès aux possibilités d’apprentissage en langue seconde.

Par ailleurs, comme les personnes qui fréquentent les collèges militaires le font pour diverses raisons, y compris le vif désir de servir dans les forces armées le plus rapidement possible, les CMC pourraient envisager d’offrir un diplôme général de trois ans de 30 crédits, en plus d’un diplôme de quatre ans de 40 crédits (ou l’équivalent pour les personnes issues du système québécois). Les CMC ont toujours exclu cette option par le passé, afin de maintenir l’intégrité de la structure des 4 piliers du PFOR. Mais, ce type de programme accéléré est communément offert dans les universités civiles, ainsi qu’au CMR pour les candidats et candidates non inscrits au PFOR CMC, et est accepté pour satisfaire aux exigences d’autres volets d’enrôlement. À condition que toutes les autres exigences en matière d’obtention du diplôme et de la commission soient satisfaites en ce qui a trait à la formation linguistique, aux compétences militaires et au leadership, ainsi qu’à la santé, à la condition physique et au bien-être, ce programme d’études accéléré pourrait être un bon moyen de répondre à la fois aux besoins organisationnels des FAC et aux attentes des étudiants et étudiantes, en proposant un parcours facultatif vers l’immatriculation plus court que le modèle actuel de quatre ans.

Recommandation  14

Rationaliser les programmes d’études des collèges militaires canadiens pour offrir quatre diplômes de premier cycle dans le cadre du Programme de formation des officiers de la Force régulière : un baccalauréat ès arts (au CMR et au CMR Saint-Jean); un baccalauréat ès sciences (au CMR et au CMR Saint-Jean); un baccalauréat ès arts et sciences militaires (au CMR et au CMR Saint-Jean); et un baccalauréat en génie (au CMR).

Recommandation  15

Établir un ratio d’au moins quinze étudiant·es par professeur·e dans les deux collèges militaires canadiens d’ici cinq ans.

Recommandation  16

Augmenter le nombre d’aspirants et d’aspirantes de marine et d’élèves-officiers et d’élèves-officières dans les collèges militaires canadiens à un minimum de 1 850 d’ici cinq ans.

Recommandation  17

Supprimer le tronc commun dans les collèges militaires canadiens.

Recommandation  18

Supprimer le programme du collège d’enseignement général et professionnel du Collège militaire royal de Saint-Jean et tous les postes d’enseignement et d’administration qui s’y rattachent.

Recommandation  19

Harmoniser les calendriers scolaires entre le Collège militaire royal du Canada et le Collège militaire royal de Saint-Jean et les aligner sur le volet reconfiguré des compétences militaires et du leadership proposé à la recommandation  22.

Haut de page

Programme : Les autres piliers

Militaire

Les observations de la Commission (jointes aux constatations des rapports antérieurs, aux renseignements tirés des séances d’écoute organisées auprès des aspm/élof et aux résultats des sondages de 2023 et de 2024 sur l’expérience des étudiants et étudiantes dans les CMC et du sondage de 2024 sur l’expérience des diplômé·es) révèlent une profonde insatisfaction chronique à l’égard de l’instruction militaire dans les CMC. En effet, le pilier militaire est généralement perçu, au mieux, comme un désagrément, et au pire, comme une perte de temps. Ces résultats sont très inquiétants étant donné que le pilier militaire est le principal différenciateur entre les CMC et les universités civiles. Il est clair que des changements majeurs doivent être apportés à l’instruction militaire dans les CMC pour soutenir leur proposition de valeur.

Les objectifs et les activités du pilier militaire dans les CMC ne sont toujours pas clairement définis et bien que la Commission reconnaisse que le CMR Saint-Jean offre un programme plus élaboré que le CMR (y compris le programme militaire enrichi offert de la deuxième à la quatrième année, qui comprend des ateliers et deux activités de perfectionnement en leadership sur le terrain), il ne répond tout de même pas aux attentes. De façon générale, le pilier militaire n’a pas de normes définies, de critères de mesure et de structure claire, et il est loin de correspondre à l’étendue et à la qualité de l’instruction et du perfectionnement offerts par nos partenaires et nos alliés du monde entier. À cet égard, l’une des principales préoccupations de la Commission est le temps minimum consacré aux activités connexes, en particulier au CMR. Une séance de deux heures par semaine et une fin de semaine par mois ne suffisent pas pour répondre aux attentes relatives à la quantité et à la qualité de l’instruction militaire et du perfectionnement en leadership des aspm/élof dans un établissement national consacré à leur formation.

La Période d’orientation des élèves-officiers de première année (POPA) reflète bon nombre de ces problèmes. La POPA, qui se veut une période d’introduction pour les nouveaux aspm/élof, vise manifestement, mais implicitement, à aider les aspm/élof à passer de la vie civile à un nouveau rôle à titre de membres de la profession des armes. Profondément ancrée dans la culture des CMC, la POPA est une pierre angulaire du régime d’instruction militaire. Elle se termine par un parcours d’obstacles et des cérémonies de remise des insignes, qui sont d’importantes et de vieilles traditions dans les CMC et qui sont essentiels pour créer un sentiment d’appartenance et d’identité chez les nouveaux aspm/élof.

Afin de favoriser le perfectionnement des compétences de travail d’équipe, de l’esprit de corps et des compétences en leadership, la POPA prévoit un mélange d’activités d’orientation et d’instruction militaire qui ont lieu sur le campus tous les jours, 24 heures sur 24, et qui durent entre 20 jours au CMR Saint-Jean et 29 jours au CMR. Ces activités comprennent le nettoyage de casernes, la préparation aux inspections, l’entraînement physique, le perfectionnement en leadership en petits groupes et les exercices de renforcement de l’esprit d’équipe. La privation de sommeil est également un aspect de la POPA au CMR. Les aspm/élof sont limités à 6,5 heures de sommeil par nuit afin de créer délibérément des conditions difficiles dans lesquelles ils devront entreprendre leurs diverses activités. Au CMR Saint-Jean, les aspm/élof ont droit à 7,5 heures de sommeil par nuit, une différence exponentielle sur plus de trois semaines.

Chaque ensemble d’activités a une certaine valeur inhérente, mais il n’existe pas de norme pour la POPA, ce qui signifie qu’il n’y a pas d’objectif précis ou de résultat escompté, ni de clarté quant à la raison d’être de la structure et de l’approche, ni de directive en matière de mise en œuvre, ce qui peut se traduire par des abus de pouvoir. Les incohérences fondamentales entre les deux CMC font en sorte que les expériences des aspm/élof peuvent être très différentes. En fin de compte, l’absence d’une raison d’être claire fait en sorte qu’il est difficile de justifier les lourds effets physiques, le stress émotionnel et le fardeau psychologique que la POPA impose à ces plus jeunes membres des FAC.

Haut de page

Bilinguisme

À l’heure actuelle, tous les aspm/élof des CMC doivent atteindre le niveau de compétence en langue seconde BBB établi par le gouvernement fédéral pour obtenir une commission dans les FAC. Il faut en moyenne 1 680 heuresNote de bas de page 40 pour passer du profil linguistique XXX à la norme BBB du gouvernement du CanadaNote de bas de page 41 et, actuellement, les CMC ne peuvent offrir qu’un total d’environ 650 heures de formation. Les cours quotidiens de formation en langue seconde totalisent environ (jusqu’à) six heures par semaine pendant les sessions d’études, et environ huit semaines pendant les cours d’été intensifs d’Éducation et formation en seconde langue officielle (EFSLO). Une seconde EFSLO est offerte à certaines personnes qui en ont besoin, mais le nombre de places disponibles limite le nombre d’inscriptions (principalement à l’École de langues des Forces canadiennes [Asticou] et à la Base des Forces canadiennes Valcartier); il y a concurrence avec d’autres organismes des FAC. Le CMR exige un niveau de compétence en langue seconde BBB pour l’obtention d’un diplôme, mais ce n’est pas le cas au CMR Saint-Jean; cette divergence est attribuable aux décisions prises par les sénats respectifs de chaque établissement. Il s’agit d’une question qui mérite d’être examinée de plus près dans le cadre de l’harmonisation des deux collèges.

La formation en langue seconde est offerte par des instructeurs et des instructrices motivés dans les deux langues officielles. Ils et elles adoptent une approche holistique à l’égard de la formation linguistique et offrent diverses occasions d’apprentissage par l’expérience aux aspm/élof (p. ex. bénévolat dans la collectivité et activités connexes). Avec ses petites classes d’environ dix aspm/élof, particulièrement avantageuses dans le contexte de l’acquisition de la langue seconde, la formation en langue seconde dans les CMC a donné des résultats probants pour les CMC et les FAC. Des aspm/élof qui avaient suivi l’ensemble du PFOR CMC sur quatre ans avant la COVID-19, près de 95 % ont atteint le niveau BBB au CMR. Au CMR Saint-Jean, ce chiffre frôle les 99 %. Bien que ces pourcentages aient diminué en raison de la COVID-19 et du nombre plus limité d’heures de formation en personne, en général, les chiffres se stabilisent et la formation en langue seconde peut être considérée comme un succès continu.

Haut de page

Condition physique

Dans le cadre du pilier de la condition physique, les CMC offrent des cours d’éducation physique bien élaborés qui sont dispensés de façon professionnelle par un personnel spécialisé et compétent composé de fonctionnaires et de membres du Programme de soutien du personnel des Services de bien-être et moral des Forces canadiennes. Les cours d’éducation physique permettent de s’entraîner dans le cadre d’activités de conditionnement physique individuel, de groupe et militaire, et une formation sur les fondements de la santé et de la condition physique est offerte. D’autres programmes axés sur la nutrition, la gestion du sommeil, la gestion du stress, la prévention et le contrôle de la toxicomanie, la gestion de la colère, et divers autres thèmes liés à la santé sont également offerts de façon facultative. Ces programmes sont tous utiles au perfectionnement des aspm/élof. Les cours de conditionnement physique sont des cours obligatoires non crédités.

Cela dit, les avantages de ce pilier ont été minés par la façon dont il a été utilisé. En réduisant le concept de la condition physique à un test d’aptitude physique (TAP) propre aux CMC, qui exige que les aspm/élof réussissent un TAP au cours de leur première ou deuxième année et un autre au cours de leur troisième ou quatrième année pour respecter les exigences préalables à l’obtention d’une commission et même, au CMR, pour l’obtention d’un diplôme, les CMC ont raté l’occasion d’aborder la santé et le bien-être de façon plus globale. En outre, ils ont créé une norme qui n’existe nulle part ailleurs dans les FAC, qui utilisent le test de la Forme opérationnelle requise dans le cadre de l’emploi [FORCE] comme référence.

Le TAP est controversé depuis son introduction dans les CMC, et la Commission partage les préoccupations qui y sont associées. Les arguments selon lesquels le TAP est nécessaire pour motiver les aspm/élof à se mettre en forme ne sont pas fondés, et les préoccupations selon lesquelles il peut mener à une humiliation fondée sur le sexe et à une hypercompétitivité sont convaincantes. Le TAP est utilisé comme s’il était un test de masculinité, et il mène à une détermination de la hiérarchie sociale. Les aspm/élof ne sont plus dénigrés parce qu’ils ne sont pas assez masculins (parce que socialement, ce n’est plus acceptable), mais parce qu’ils ne sont pas suffisamment en forme (ce qui est socialement passable); les résultats sont donc les mêmes en matière d’exclusion et de pouvoir. De cette façon, le TAP a contribué aux problèmes généraux d’inconduite et a miné de nombreux autres efforts déployés pour améliorer la culture dans les CMC.

Le TAP n’est plus une exigence préalable à l’obtention d’une commission depuis le 11 août 2024, date à laquelle il a été remplacé par le test FORCE, une décision qu’applaudit la Commission, mais il demeure une activité obligatoire dans les CMC.

Haut de page

Nouveau modèle de prestation de services

En raison de l’importance excessive accordée aux études au détriment des autres piliers, et de l’absence d’une vision quant à la raison d’être et aux objectifs de l’instruction militaire et du perfectionnement en leadership (en plus des autres problèmes décrits plus haut), il est clair qu’un tout nouveau modèle de prestation est nécessaire dans les CMC.

En se fondant sur les réformes proposées au pilier des études, la Commission estime que le modèle à 4 piliers du PFOR CMC en soi doit être restructuré en faveur d’un nouveau programme intégré de perfectionnement en leadership pour les officiers et les officières. Ce programme reposera sur les mêmes éléments fondamentaux, mais il les concevra, les organisera et les mettra en œuvre de manière à mieux répondre aux exigences de la profession des armes et aux besoins des FAC. Les 4 piliers deviendront le Programme de perfectionnement intégré des officiers (PPIO), qui sera composé de quatre volets complémentaires et interreliés : études; leadership et compétences militaires; formation en langue seconde; et condition physique, santé et bien-être. Ces volets seront tous des éléments crédités du PFOR CMC qui seront pris en compte pour l’obtention d’un diplôme.

Haut de page

Études

Le volet des études doit être offert conformément aux paramètres décrits ci-dessus. Cette nouvelle structure libérera du temps dans le PFOR CMC, réduira le fardeau imposé aux aspm/élof et permettra d’allouer du temps à la formation linguistique, au perfectionnement des compétences militaires et aux activités de leadership et de bien-être décrites ci-dessous, qui sont les principaux éléments différenciateurs des collèges militaires.

Ces activités devraient également être créditées pour reconnaître et valider leur incidence sur la proposition de valeur des CMC. Ainsi, les aspm/élof obtiendront seize crédits comptabilisés en vue de l’obtention de leur diplôme pour des cours non reliés à leurs études; cette approche est déjà adoptée par un certain nombre d’universités civiles qui offrent des crédits pour l’instruction militaireNote de bas de page 42.

Haut de page

Leadership et compétences militaires

Des efforts préliminaires sont déployés à l’Académie canadienne de la Défense et dans les deux CMC en vue d’effectuer un examen du PFOR CMC, de mieux définir la norme du programme et d’élaborer un plan d’instruction et une norme de qualification connexes. L’ébauche du plan d’instruction pour le pilier militaire du CMR préparée en septembre 2024 reflète les progrès réalisés en faveur d’un programme d’instruction militaire pluriannuel exhaustif conçu pour fournir une instruction militaire pertinente, opportune et professionnelle dans le cadre du PFOR CMC. Cependant, le fait que chaque CMC élabore son propre plan d’instruction est préoccupant et risque de se traduire par deux approches distinctes. L’ACD doit jouer un rôle plus important dans la définition de la norme du programme et l’harmonisation de la plupart des aspects du plan d’instruction militaire.

De plus, l’instruction militaire doit davantage être axée sur le perfectionnement en leadership en ce qui a trait à la profession des armes, aux opérations des FAC et au rendement humain, et tenir compte des pratiques exemplaires de nos alliés et de nos partenaires, qui accordent de la valeur à des méthodes comme l’instruction par l’aventure, l’apprentissage par l’expérience et les exercices sur le terrain pour parfaire le jugement, perfectionner les compétences, améliorer les relations avec soi-même et les autres, comprendre les peurs et gérer les risques.

Cette instruction doit être offerte sous la forme du volet des compétences militaires et du leadership, un nouveau volet de trois ans visant à offrir une instruction militaire normalisée, échelonnée et substantielle dans les deux CMC. Ce volet doit : refléter l’approche à plus grande échelle des FAC en matière d’évolution de la culture; être crédité; être harmonisé avec le cadre du caractère et des compétences dans les FACNote de bas de page 43; reposer sur les politiques, les procédures et les outils communs des FAC; et être composé d’un mélange de théorie, de pratique et d’apprentissage par l’expérience.

Comme l’indique la figure 9, du temps sera alloué au volet des compétences militaires et du leadership (CML) chaque semaine pendant les sessions d’études de la deuxième à la quatrième année, et le volet comprendra trois périodes intensives de ressourcement qui auront lieu au début, au milieu et à la fin de cette période. Plus précisément, le volet débutera en deuxième année par une période d’un mois (intitulée Fondements) dont l’objectif sera de présenter aux aspm/élof les fondements du leadership; ces notions leur seront utiles tout au long de leur cheminement dans les CMC et de leur carrière. Ils devront effectuer un parcours d’obstacles au cours de cette période. Ensuite, une période de deux semaines (intitulée Consolidation) se déroulera avant le début des cours de troisième année. Cette période sera axée sur la préparation des aspm/élof au rôle d’aspm/élof chef de section au sein d’une nouvelle chaîne de responsabilité des élèves-officiers (dont il est question plus loin). Enfin, après une session d’études d’hiver comprimée en quatrième année, l’expérience des aspm/élof dans les CMC prendra fin avec une période d’un mois (intitulée Doctrine-cadre), à la suite de laquelle auront lieu les activités de remise des diplômes et d’attribution des commissions.

Figure 9 : Trois périodes de ressourcement du volet des compétences militaires et du leadership
  Trimestres d’été Trimestres d’automne Trimestres d’hiver
1re année Qualification militaire de base des officiers 1 Accent sur la formation universitaire Accent sur la formation universitaire
2e année Qualification militaire de base des officiers 2 Programme intégré comprimé avec 4 semaines d’instruction sur les compétences militaires et le leadership Programme intégré
3e année Formation en langue seconde avec 2 semaines de consolidation des compétences militaires et du leadership Programme intégré Programme intégré
4e année Instruction militaire et expérience en milieu de travail Programme intégré Programme intégré comprimé avec 4 semaines de synthèse sur les compétences militaires et le leadership

Pour tenir compte des écarts provinciaux entre les exigences des cégeps au Québec et dans le reste du Canada, le PPIO proposé est délibérément structuré de manière à ce que la première année dans les CMC soit entièrement consacrée aux études, à l’acquisition de la langue seconde, à la condition physique, à la santé et au bien-être, et à faciliter la transition de la vie civile à la vie militaire, sans porter sur le leadership et les compétences militaires. Par conséquent, les diplômé·es des cégeps qui se joindront à un CMC ne seront pas désavantagés de quelque façon que ce soit par rapport aux autres participants quant au volet des CML.

Bien qu’il s’agisse d’une solution possible, le CMR Saint-Jean doit néanmoins envisager la possibilité de demander une exemption ministérielle de l’exigence provinciale applicable au Québec selon laquelle seuls les titulaires d’un diplôme de cégep peuvent être admis à un programme de premier cycle (sauf si la personne qui présente une demande d’inscription est âgée d’au moins 21 ans et possède une expérience et un potentiel scolaire acceptables). Le cas échéant, les étudiants et les étudiantes des cégeps du Québec pourraient commencer leurs études universitaires au CMR Saint-Jean après leur première année de cégep, ce qui permettrait d’harmoniser leur parcours avec celui des diplômé·es de la 12e année qui arrivent aux CMC d’ailleurs au Canada.

Les exemples abondent quant au type de compétences militaires et de formation en leadership qui devraient constituer le corps du volet des CML (de ses trois périodes de ressourcement à ses composantes hebdomadaires), et les CMC peuvent s’inspirer de multiples organisations, de Sandhurst au Royaume-Uni à Karlberg en Suède, jusqu’à son propre Institut Osside des FAC, qui offre des programmes de perfectionnement professionnel aux militaires du rang supérieurs des FAC. En effet, le cours de Qualification intermédiaire en leadership de l’Institut Osside, qui a récemment fait l’objet d’un examen et d’une révision, sera très utile à l’ACD et aux CMC dans le cadre de l’élaboration du volet des CML. Ils doivent largement s’appuyer sur son matériel didactique, conforme aux pratiques exemplaires plus générales concernant l’évolution de la culture des FAC et particulièrement adapté à un public d’aspm/élof, pour concevoir, élaborer et mettre en œuvre un nouveau volet des CML dans les CMC.

Des employés devront être affectés à la prestation du programme, et à mesure que les 4 piliers actuels évolueront vers un PPIO, le profil de ces employés se transformera inévitablement. À l’instar de l’approche adoptée à l’Institut Osside, il conviendrait de recourir à une combinaison d’instructeurs et d’instructrices militaires et civils pour offrir aux aspm/élof un riche amalgame d’expertise et d’expériences théoriques et pratiques. Plus particulièrement, le volet des CML devra être soutenu par la création d’environ quinze postes d’instructeurs civils et d’instructrices civiles au CMR et d’environ cinq postes au CMR Saint-Jean. Du côté militaire, le personnel peut être recruté en convertissant des postes militaires du corps professoral en postes d’instructeurs et d’instructrices militaires, y compris les membres de la direction, comme le propose la figure 10.

Figure 10 : Liste suggérée des postes militaires du corps professoral et des effectifs en formation avancée connexes à convertir en postes pour l’équipe du volet des compétences militaires et du leadership
Poste nombre Titre actuel Grade actuel Nouveau titre Nouveau grade
34993 FACULTÉ MILITAIRE – ARTS (HISTOIRE) LCol Responsable de programme CMPL CMC LCol
EFA alimentant le poste 34993 LCol Responsable de programme CMPL CMR Maj
6702 FACULTÉ MILITAIRE – ARTS (SCIENCES POLITIQUES ET ÉCONOMIQUES) Maj Responsable de programme CMPL CMRSJ Maj
EFA alimentant le poste 6702 Maj Officier d’état-major CMPL CMC Maj
695 FACULTÉ MILITAIRE – GÉNIE (ÉLECTRONIQUE ET INFORMATIQUE) Capt Instructeur CMPL CMR Capt
EFA alimentant le poste 695 Capt Instructeur CMPL CMR Capt
699 FACULTÉ MILITAIRE – SCIENCES (PHYSIQUE) Capt Instructeur CMPL CMR Capt
EFA alimentant le poste 699 Capt Instructeur CMPL CMRSJ Capt
6464 FACULTÉ MILITAIRE – ARTS (ADMINISTRATION DES AFFAIRES) LCol Instructeur CMPL CMR Maj
EFA alimentant le poste 6464 LCol Instructeur CMPL CMRSJ Maj

Légende :

  • LCol = Lieutenant-colonel
  • Maj = Major
  • Capt = Capitaine
  • EFA = Effectifs en formation avancée
  • CMC = Collège militaire canadien
  • CMR = Collège militaire royal
  • CMRSJ = Collège militaire royal de Saint-Jean
  • CMPL = Compétences militaires et perfectionnement du leadership

Malheureusement, les dirigeants et dirigeantes clés qui seront responsables du volet des CML devront probablement composer avec un lourd fardeau administratif, ce qui compromettra sérieusement la capacité des officiers et des officières et des sous-officiers et des sous-officières supérieur·es qui exercent ces fonctions à guider et à conseiller les aspm/élof.

Les chefs d’escadron, y compris les commandants et les commandantes et les adjudants et les adjudantes d’escadron, jouent un rôle particulièrement important dans ce processus de perfectionnement en leadership, mais ils et elles sont surchargé·es par des tâches administratives. En raison de l’importance de leur rôle dans la vie des aspm/élof, cette surcharge a une incidence négative disproportionnellement importante sur ces jeunes dans les CMC. À l’avenir, les militaires qui occupent ces postes de leadership devront se concentrer sur la direction, le soutien, le mentorat et l’encadrement des aspm/élof plutôt que sur les tâches administratives. Pour ce faire, un soutien administratif supplémentaire sous la forme d’environ seize nouveaux postes permanents de soutien administratif CR-04 à l’échelle des escadrons est nécessaire (c.-à-d., un CR-04 par escadron).

La Commission souligne que cette recommandation faisait également partie du rapport de la VAEMS de 2017 et que des postes de soutien administratif avaient été ajoutés aux CMC en réponse à celle-ci. Bien que l’adoption de cette recommandation ait eu une incidence positive et ait aidé à résoudre le problème, l’enveloppe des traitements et salaires ne faisait pas partie du financement de base des CMC et l’affectation financière en cours d’exercice a été restreinte au cours des exercices subséquents. Par conséquent, les choses sont revenues comme elles étaient.

Une nouvelle approche en matière d’orientation est également nécessaire pour le volet des CML. Plus précisément, la POPA devrait être remplacée par une semaine d’orientation annuelle entièrement reconfigurée qui aurait lieu en première et en deuxième année et qui serait spécialement conçue pour aider les nouveaux aspm/élof à s’adapter à la profession des armes et pour favoriser l’atteinte des objectifs et des résultats attendus du PPIO. Le parcours d’obstacles et la cérémonie de remise des insignes sont des éléments importants de l’expérience des aspm/élof pour des raisons claires et doivent être maintenus, mais le reste de la POPA dans son format actuel doit être démantelé.

Plus précisément, toutes les pratiques de privation du sommeil doivent être abandonnées. La privation du sommeil crée un stress injustifié, nuit au bien-être, entraîne des blessures et exacerbe des problèmes préexistants, notamment en raison des exigences physiques et mentales rigoureuses qui sont déjà imposées aux nouveaux aspm/élof dans le cadre du processus d’orientation. Il en résulte également que les aspm/élof s’endorment régulièrement durant leurs cours, une réalité qui a été soulevée à maintes reprises pendant les séances d’écoute, qui est largement reconnue par les membres du corps professoral et du personnel et qui est presque considérée comme un rite de passage par de nombreux membres de la communauté des CMC.

Bien que la privation du sommeil puisse être utile pour préparer les militaires au combat, elle n’a par ailleurs aucune valeur, sans des paramètres précis, temporels et clairs, elle est contre-productive et va à l’encontre des messages et des comportements clés que les CMC tentent d’inculquer en matière de condition physique, de santé et de bien-être. De plus, les CMC n’ont pas fourni de raison claire permettant de justifier la décision de priver les aspm/élof d’une saine quantité de sommeil pendant la POPA, ce qui fait en sorte qu’il est difficile de comprendre ce que la pratique permet d’accomplir au-delà d’un sentiment général d’adversité.

Haut de page

Formation en langue seconde

La Commission reconnaît pleinement la valeur du bilinguisme comme pierre angulaire du PFOR CMC et de l’identité nationale du Canada. La formation d’aspm/élof bilingues capables de travailler dans les deux langues officielles, ancrés dans les traditions des deux communautés linguistiques officielles du Canada et capables de tisser des liens entre les cultures apporte un certain nombre d’avantages concrets. L’acquisition de la langue seconde favorise non seulement la communication, elle renforce également la confiance entre les collègues, améliore la crédibilité des leaders, qui peuvent plus facilement établir des liens avec leurs troupes, et mène à une amélioration des capacités cognitives. Il est beaucoup moins coûteux d’offrir une formation en langue seconde aux aspm/élof à cette étape de leur carrière que de les retirer pendant plusieurs mois de leurs postes au sein du personnel ou de la direction plusieurs années plus tard le temps qu’ils suivent une formation spécialisée en vue d’être admissibles à une promotion une fois qu’ils sont majors et majores, lieutenants-colonels et lieutenantes-colonelles, et qu’ils reçoivent un salaire beaucoup plus élevé. Les avantages d’une force militaire bilingue ont été soulignés lors des séances de la Commission, tant en ce qui a trait à la sensibilité culturelle qu’aux avantages opérationnels. Il est donc impératif que les CMC, qui desservent une armée entièrement bilingue, inculquent les fondements du bilinguisme aux officiers et officières du Canada.

Malgré l’importance du bilinguisme et le fait que pour obtenir une commission et mener une carrière au sein des FAC, les aspm/élof doivent atteindre le profil linguistique BBB, l’approche actuelle en matière de formation en langue seconde dans le cadre du PFOR (où elle se trouve reléguée en second plan par rapport aux études) ne reflète pas son importance. Bien qu’elle n’ait pas empêché une grande proportion d’aspm/élof d’atteindre l’exigence BBB, elle a eu des conséquences fâcheuses. La Commission a entendu de nombreux témoignages d’aspm/élof sur le stress important qu’engendre le fait qu’on ne tient pas compte de la formation en langue seconde lors de l’établissement du calendrier scolaire, que cette formation est intégrée à un horaire déjà bien rempli et qu’aucun crédit ne lui est accordé.

Bien que la formation en langue seconde soit bien établie dans les deux CMC et qu’elle soit offerte par un groupe d’instructeurs et d’instructrices qualifiés et spécialisés, le temps consacré à l’apprentissage d’une langue seconde n’est pas suffisamment valorisé par le système. Pour remédier à cette situation, les heures consacrées à la formation en langue seconde doivent être créditées et prises en compte aux fins de l’obtention d’un diplôme dans le cadre du PFOR CMC. De plus, des occasions de perfectionnement des compétences doivent être offertes pendant l’été aux personnes qui en ont besoin, et ces heures doivent également être créditées. Il est plus facile de passer de XXX à BBB en moins de 1 680 heures lorsque la formation linguistique est répartie sur une plus longue période (il s’agit généralement d’une meilleure méthode d’acquisition de la langue seconde pour la plupart des étudiants et des étudiantesNote de bas de page 44). Encourager les étudiants et les étudiantes à participer à des activités dans leur langue seconde en leur offrant une gamme d’occasions d’apprentissage par l’expérience intéressantes facilite également ce processus.

Avec l’entrée en vigueur de la Loi visant l’égalité réelle entre les langues officielles du Canada (projet de loi C-13) en 2025, la valeur d’un corps d’officiers et d’officières bilingues augmentera. Les exigences minimales en matière de compétences en langue seconde pour les postes bilingues dont les titulaires supervisent des employés dans les régions bilingues passeront de BBB à CBC, ce qui signifie que les majors et les majores chargés de la prestation de services devront avoir un profil CBC et que les membres des FAC qui supervisent des fonctionnaires dans les régions bilingues devront être bilingues plus tôt dans leur carrière. Des efforts supplémentaires devront donc être déployés par les CMC pour aider les aspm/élof qui veulent améliorer leurs compétences en langue seconde au-delà de l’exigence minimale BBB. Le PFOR CMC doit offrir une formation linguistique continue de façon facultative.

Haut de page

Condition physique, santé et bien-être

Des normes élevées en matière de condition physique sont et doivent demeurer importantes pour tous les membres des FAC. La question à se poser est celle de savoir quelle est la meilleure façon de favoriser l’atteinte de cet objectif et de le mesurer.

En premier lieu, plutôt que d’utiliser le TAP comme référence comme avant, le pilier de la condition physique doit être élargi et devenir le volet de la condition physique, de la santé et du bien-être, auquel un crédit sera accordé par bloc d’entraînement de trois heures par semaine en vue de l’obtention d’un diplôme. Principalement géré par le personnel des Programmes de soutien du personnel, il doit tirer parti de certains aspects du pilier de la condition physique actuel (p. ex. continuer à encourager les activités sportives intramuros, mais éliminer l’obligation d’y participer). D’autres services d’une plus grande portée doivent être offerts en vue d’aborder des thèmes comme les attitudes et les comportements sains en matière de nutrition et de sommeil, le stress, et la consommation de substances, y compris la sensibilisation à la toxicomanie et la gestion de la colère. De façon plus générale, il doit être axé sur la croissance et l’amélioration personnelles et sur l’acquisition de compétences pour les leaders qui devront comprendre ces problèmes pour bien gérer leurs subordonné·es. Il doit également continuer à répondre aux besoins particuliers des membres de la profession des armes, comme les combats et l’instruction nautique.

En second lieu, la norme minimale en matière de condition physique établie par les FAC est le test FORCE; la Commission croit que si cette norme est suffisante pour le reste des FAC, elle est suffisante pour les CMC. Cependant, les FAC ont récemment retiré toute considération relative à la réalisation du test FORCE ou aux résultats de ce test du processus d’examen des promotions du Comité de sélection. De plus, dans le cadre de la transition du Système d’évaluation du personnel des Forces canadiennes (SEPFC) au système d’Évaluation de la performance et des compétences (EPC), les FAC ont retiré l’exigence de vérifier la réalisation annuelle du test FORCE du système d’évaluation du rendement. Par conséquent, bien qu’il soit nécessaire d’effectuer le test FORCE pour obtenir une promotion effective au grade supérieur, son retrait de l’EPC indique que les FAC n’utilisent pas les tests de condition physique pour mesurer le rendement ou le potentiel de ses membres.

Les CMC devraient adopter cette approche. Comme le TAP était initialement justifié par l’exigence prévue par les Ordonnances et règlements royaux applicables aux Collèges militaires du Canada (OR Colmilcan) selon laquelle les CMC devaient préparer les aspm/élof au service dans les FAC en établissant une norme élevée en matière de condition physique, il est peut-être temps pour les FAC de modifier les OR Colmilcan et de retirer cette exigence tout en clarifiant les attentes relatives à la norme qui doit être respectée en matière de condition physique.

Dans un même ordre d’idées, et malgré l’élimination du TAP comme exigence préalable à l’obtention d’une commission, la Commission estime que de nombreuses opinions désuètes persisteront si le TAP est maintenu dans les CMC, même en tant qu’activité obligatoire. Ces opinions incluent la notion selon laquelle les normes du TAP sont plus difficiles pour les hommes que pour les femmes (surtout pour entrer dans le « club des 400 » et le « club des 450 ») et que les femmes sont moins en forme (en raison de leurs taux d’échec nettement plus élevés). De tels stéréotypes perpétuent des préjudices et vont à l’encontre des objectifs d’évolution de la culture que les CMC se sont fixés. Par conséquent, le TAP devrait être éliminé en tant qu’activité obligatoire dans les CMC.

En somme, un nouveau modèle intégrant les études, les compétences militaires et le leadership, la formation en langue seconde ainsi que la condition physique, la santé et le bien-être pourrait être structuré de diverses façons, de manière à présenter les caractéristiques et à donner les résultats souhaités. La Commission a consacré beaucoup de temps à définir une option particulière en ce sens. Cette option (présentée à l’annexe 7) est conçue pour corriger les lacunes de l’approche actuelle, atteindre l’objectif de bâtir un programme d’études et de formation militaires professionnelles de calibre mondial, et obtenir les résultats connexes dont les FAC ont besoin en ce qui concerne la force de caractère, les capacités, les compétences et les connaissances de leurs officiers et officières. Appliquer ce nouveau modèle intégré, ainsi que les autres recommandations qui suivent, devrait favoriser la création d’un programme de perfectionnement des officiers et officières solide, qui puisse cristalliser la proposition de valeur des CMC; fournir des éclaircissements importants au corps professoral, au personnel et aux aspm/élof, et renforcer la pertinence et l’utilité des CMC pour les FAC.

Recommandation  20

Établir et publier la norme du Programme de formation des officiers de la Force régulière pour les collèges militaires canadiens.

Recommandation  21

Concevoir, élaborer et mettre en œuvre le Programme de perfectionnement intégré des officiers et officières.

Recommandation  22

Concevoir, élaborer, mettre en œuvre et agréer le volet des compétences militaires et du leadership.

Recommandation  23

Créer de nouveaux postes d’instructeurs et d’instructrices civiles au Collège militaire royal du Canada et au Collège militaire royal de Saint-Jean pour appuyer le volet des compétences militaires et du leadership.

Recommandation  24

Réduire les postes de professeurs et professeures militaires dans les deux collèges militaires ainsi que les postes en formation avancée connexes, puis réaffecter ces postes au volet des compétences militaires et du leadership.

Recommandation  25

Augmenter les enveloppes salariales de base affectées aux collèges militaires canadiens pour créer et financer des postes permanents de personnel de soutien administratif pour soutenir les équipes de direction d’escadrons. Attribuer un poste de personnel de soutien administratif à chaque escadron.

Recommandation  26

Concevoir, élaborer, mettre en œuvre et agréer un volet révisé de formation en langue seconde.

Recommandation  27

Offrir une formation continue facultative en langue seconde aux aspm/élof qui ont atteint le niveau BBB nécessaire pour l’obtention d’une commission.

Recommandation  28

Concevoir, élaborer, mettre en œuvre et agréer un volet révisé pour la condition physique, la santé et le bien-être.

Recommandation  29

Éliminer le test d’aptitude physique en tant qu’activité obligatoire dans les collèges militaires canadiens.

Recommandation  30

Faire du test Forme opérationnelle requise dans le cadre de l’emploi (FORCE) dans les Forces armées canadiennes la norme de condition physique à satisfaire pour le Programme de formation des officiers de la Force régulière offert dans les collèges militaires canadiens.

Haut de page

Chaîne de responsabilité des élèves-officiers et élèves-officières

Dans son Examen externe indépendant et complet (EEIC), Mme Arbour recommande d’éliminer la structure de commandement d’autorité et de responsabilité de l’Escadre des élèves-officiers et élèves-officières en raison d’un ensemble de problèmes systémiques interdépendants, qui vont de la mixité des dortoirs dans les collèges jusqu’à une dissonance entre les idéaux de leadership professés d’une part et les attitudes et exigences institutionnelles réelles d’autre part. La Commission a examiné ces éléments en profondeur au moment de déterminer si la chaîne de responsabilité des élèves-officiers et élèves-officières (C de R Élof) pouvait être suffisamment corrigée pour offrir un avantage aux aspm/élof sans perpétuer de préjudices ou si, au contraire, on devait l’éliminer, même en adoptant les autres changements proposés dans le présent rapport.

En théorie, la C de R Élof offre aux aspm/élof une excellente occasion de faire l’expérience du rôle de leader, peut-être pour la première fois, mais dans la pratique, elle est largement devenue pour les CMC un moyen de fonctionner avec les ressources disponibles en faisant faire les tâches administratives par des aspm/élof sous le couvert d’une formation en leadership. Et ce qui est plus problématique encore, comme l’a souligné Mme Arbour, c’est que cette pratique donne à certains aspm/élof un pouvoir indu sur leurs pairs.

Dans son état actuel et conformément à sa structure (comme il est décrit à l’annexe 8), la C de R Élof est lourde, ne bénéficie pas d’une supervision et d’un soutien suffisants, a des objectifs d’apprentissage mal définis et est très variable en termes d’expérience. Pour que les CMC en tirent profit tout en atténuant les risques connexes, les collèges doivent rester axés sur son objectif principal, qui consiste à offrir des occasions de leadership expérientiel aux aspm/élof. Bien que la Commission considère qu’il est utile de préserver certains éléments de la C de R Élof, celle-ci doit être révisée en profondeur pour pouvoir remplir cet objectif.

Plus précisément, il faut réaffirmer que la C de R Élof existe pour offrir aux aspm/élof une expérience directe du rôle de leader, où ils et elles puissent exercer leur leadership sans causer de préjudice à autrui, ce qui culmine dans une expérience pratique dans laquelle ils et elles dirigeront et administreront cinq à huit autres aspm/élof en tant qu’élof chefs de section. La Commission admet que des formalités administratives et des tâches de communication ou de gestion d’événements puissent faire partie de cette formation en leadership, mais non qu’elles en soient le but principal. Les CMC ne doivent pas utiliser la C de R Élof principalement pour accomplir des tâches administratives qui ne le seraient pas autrement par manque de ressources. Il est tout à fait acceptable que les aspm/élof exercent des fonctions de service secondaire, une pratique courante dans l’ensemble des FAC, mais pas dans le cadre de la C de R Élof. Par ailleurs, si les postes de « gestion étudiante » sont utiles pour la bonne marche de la fanfare et des équipes sportives ou la confection de l’album des finissants, ils ne remplacent pas les activités d’apprentissage intentionnelles consistant à diriger directement des subalternes et ne doivent pas être considérés comme des postes de la C de R Élof.

Pour mettre en œuvre cette nouvelle approche, la Commission envisage d’apporter trois changements clés à la C de R Élof : éliminer les postes d’état-major de l’Escadre des élèves-officiers et élèves-officières et ceux de la C de R Élof au niveau divisionnaire au CMR (figure 11); ajouter aux exigences d’obtention d’une commission celle d’avoir occupé un poste d’élof chef de section; et offrir des occasions de leadership supplémentaires à titre facultatif au niveau des escadrilles et des escadrons pour les aspm/élof qui ont le désir et la capacité d’assumer ces responsabilités.

 
Figure 11 : Structure envisagée pour la C de R Élof au CMR et au CMR Saint-Jean

Version textuelle suit

Figure 11 : Structure envisagée pour la C de R Élof au CMR et au CMR Saint-Jean - Version textuelle
Escadre des élèves-officiers (ere élof)
  • Directrice (ou directeur) des élèves-officiers (D élof)
  • Directeur adjoint (ou directrice adjointe) des Élèves-officiers (DA élof)
  • Sergent-major (ou sergente-majore) instructeur·rice de l’escadre
  • Directeur des opérations (ou directrice des opérations)
  • Dirigeant principal (ou dirigeante principale)
  • Instructeur en chef (ou instructrice en chef)
  • CMR – pas d’escadre de cadets
  • CMRSJ – pas d’escadre de cadets
Division
300 gens
  • Sergent-major (ou sergente-majore) de division
  • CMR – 5x divisions
  • CMRSJ – 0x divisions
Escadron
100 gens
  • Chef d’escadron
  • Élof chef d’escadron
  • Chef d’escadron
  • Élof chef d’escadron
  • Chef d’escadron
  • Élof chef d’escadron
  • Adjudant d’escadron
  • CMR – 12 x escadrons
  • CMRSJ – 4 x escadrons
  • Élof chef d’escadron :
    • Cadets de 4e année sélectionnés
    • Postuler et concourir pour un poste
    • Encadré par commandant·e d’escadron
Escadrille
30 gens
  • Chef adjoint·e d’escadrille
  • Chef adjoint·e d’escadrille
  • Chef adjoint·e d’escadrille
  • CMR – 36x escadrille
  • CMRSJ – 12x escadrille
  • Élof chef de section :
    • Cadets de 4e année sélectionnés
    • Postuler et concourir pour un poste
    • Encadré par commandant·e d’escadron
Section
10 gens
  • Élof chef de section
  • Élof chef de section
  • Élof chef de section
  • RMC – 108x sections
  • RMCSJ – 36x sections
  • Élof chef de section :
    • Tous les cadets de 3e année
    • Exigence de mise en service
    • Encadré par un adjudant d’escadron
Le nombre d’élèves-officiers de marine peut fluctuer à tout moment au cours de l’année scolaire.
 

En instaurant cette nouvelle structure, il faudra définir un processus rigoureux pour sélectionner les aspm/élof qui seront élof chefs de section pour les élèves-officiers et élèves-officières de première année, puisque diriger cette cohorte plus jeune présente des défis supplémentaires. Ces élof chefs de section devraient recevoir une formation supplémentaire sur la manière d’offrir un environnement favorable, sain et respectueux, alors que les personnes entament leur carrière en uniforme, s’adaptent au service dans les FAC, vivent loin de chez elles pour la première fois et se préparent à devenir des adultes.

La C de R Élof restructurée bénéficierait aussi d’un programme de mentorat renforcé dans les CMC. Tous les élof chefs de section doivent être encadrés par leur adjudant ou adjudante d’escadron, et tous les élof chefs d’escadrille et d’escadron, par leur commandant ou commandante d’escadron. Ce mentorat doit comprendre une supervision quotidienne du rendement, un encadrement continu et une rétroaction régulière.

À cette fin, il convient de se pencher sur la question du leadership militaire dans les CMC. Au fil des ans, des rapports successifs ont appelé à maintes reprises à l’amélioration de la qualité d’un tel leadership dans les CMC, en particulier pour les postes de commandants et de commandantes et d’adjudants et d’adjudantes d’escadron.

La Commission observe une importante variation dans les capacités, styles et approches de leadership des personnes affectées à ces postes dans les CMC, ce qui donne lieu à des expériences très variées, peu uniformes, pour les aspm/élof. Elle note également que ces postes sont de plus en plus difficiles à combler, surtout en cette période de pénurie de personnel, en grande partie en raison d’une idée répandue voulant que les FAC (plus précisément les responsables des groupes professionnels et les gestionnaires de carrières) ne valorisent pas l’expérience liée aux postes d’état-major dans les CMC. Le chef du personnel militaire a certes accordé des points supplémentaires pour une affectation aux Escadres de l’entraînement aux CMC dans les critères annuels des comités de sélection, aucune autre mesure incitative ne semble avoir été mise en place pour encourager les personnes les plus talentueuses à occuper des postes de leadership direct dans les collèges militaires canadiens.

La Commission approuve la recommandation  23 de l’EEIC, selon laquelle les FAC devraient fournir le meilleur personnel et les meilleurs instructeurs et instructrices possibles à leurs écoles et comprend que les CMC seront inclus dans les efforts des FAC pour appliquer cette recommandation. Elle considère avec optimisme la possibilité d’établir des mesures incitatives pour encourager les affectations dans le système de formation et d’instruction. Toutefois, d’autres initiatives particulières devraient être mises en place dans les CMC.

Une des solutions pour encourager les affectations aux CMC, surtout pour les officiers et officières subalternes et les sous-officiers et sous-officières supérieurs qui jouent des rôles de leadership direct, serait de fournir une formation spécialisée avant l’entrée en fonction comme commandant et commandante ou adjudant et adjudante d’escadron. Plus précisément, les CMC devraient se doter d’un programme avancé de perfectionnement des leaders (PAPL) pour former les leaders au niveau des escadrons et développer chez les membres des FAC un intérêt pour cette possibilité d’emploi. Le PAPL serait un programme d’études supérieures spécialement conçu pour former les commandants et commandantes ou les adjudants et adjudantes d’escadron, en combinant les cours magistraux, l’instruction militaire, la formation linguistique et l’expérience pratique. Il comprendrait notamment une formation particulière sur la manière de soutenir les aspm/élof durant leur cheminement dans le volet des compétences militaires et du leadership. Le PAPL serait proposé dans le cadre du processus de sélection concurrentiel applicable aux programmes d’études supérieures et comprendrait une année d’études et deux années de service obligatoire aux CMC, afin d’assurer la stabilité pour toutes les parties.

Au bout du compte, l’apprentissage des compétences nécessaires pour diriger des aspm/élof et enseigner le volet des CML renforcerait globalement le développement du leadership dans les CMC. L’octroi d’une maîtrise professionnelle en perfectionnement du leadership aux personnes qui ont déjà un diplôme de premier cycle, ou l’octroi de crédits pour l’obtention d’un tel diplôme aux personnes qui n’en ont pas, serait en outre plus bénéfique à court et à long terme pour la carrière des participants et participantes, et aiderait à attirer du personnel de qualité dans les CMC. De même, faire de la formation en langue seconde une composante essentielle du programme augmenterait le bilinguisme chez le personnel des CMC, ce qui offrirait aux participants et participantes des avantages supplémentaires sur le plan de l’avancement professionnel.

La priorité initiale du Programme avancé de perfectionnement des leaders devrait être de former les équipes de direction des escadrons. Cela signifie qu’il faudrait établir un programme pour huit capitaines et huit adjudants et adjudantes, afin de pourvoir les seize postes de capitaines et les seize postes d’adjudants et d’adjudantes envisagés pour les deux CMC. Pour faciliter la mise en œuvre rapide de ce programme et démontrer l’importance de ces postes de leadership, il faudrait pourvoir les seize postes militaires dans les deux CMC qui sont requis pour sa création en puisant dans les effectifs du corps professoral existant des CMC et des postes connexes en formation avancée (figure 12). Les FAC pourraient ensuite déterminer si la valeur des seize postes ainsi libérés (postes de professeurs et professeures, et postes en formation avancée connexes) justifie qu’on investisse pour les pourvoir à nouveau. Ultérieurement, le PAPL pourrait être étendu à tous les postes de direction au niveau divisionnaire, voire à toute l’Escadre de l’entraînement, laquelle est responsable de l’instruction militaire des aspm/élof, y compris le métier d’officier et d’officière, la condition physique, l’exercice militaire, etc. Cela nécessiterait davantage de compensations pour générer les crédits de formation avancée, à moins d’ajouter d’autres postes.

Figure 12 : Proposition de compensation des postes du corps professoral militaire pour mettre sur pied le programme avancé de perfectionnement des leaders
Poste nombre Titre actuel Grade actuel Nouveau titre Nouveau grade
709 FACULTÉ MILITAIRE – ARTS (PSYCHOLOGIE MILITAIRE ET LEADERSHIP) Capt EFA – Formation avancée en leadership Capt
EFA alimentant le poste 709 Capt EFA – Formation avancée en leadership ADJ
690 FACULTÉ MILITAIRE – GÉNIE (GÉNIE CIVIL) Capt EFA – Formation avancée en leadership Capt
EFA alimentant le poste 690 Capt EFA – Formation avancée en leadership ADJ
681 FACULTÉ MILITAIRE – SCIENCES (MATHÉMATIQUES ET INFORMATIQUE) Capt EFA – Formation avancée en leadership Capt
EFA alimentant le poste 681 Capt EFA – Formation avancée en leadership ADJ
685 FACULTÉ MILITAIRE – GÉNIE (CHIMIE) Capt EFA – Formation avancée en leadership Capt
EFA alimentant le poste 685 Capt EFA – Formation avancée en leadership ADJ
6622 FACULTÉ MILITAIRE – ARTS (ANGLAIS) LCol EFA – Formation avancée en leadership Capt
EFA alimentant le poste 6622 LCol EFA – Formation avancée en leadership ADJ
6868 FACULTÉ MILITAIRE – ARTS (FRANÇAIS) Lt/Capt EFA – Formation avancée en leadership Capt
EFA alimentant le poste 6868 Lt/Capt EFA – Formation avancée en leadership ADJ
694 FACULTÉ MILITAIRE – GÉNIE (ÉLECTRONIQUE ET INFORMATIQUE) Capt EFA – Formation avancée en leadership Capt
EFA alimentant le poste 694 Capt EFA – Formation avancée en leadership ADJ
687 FACULTÉ MILITAIRE – GÉNIE (MÉCANIQUE) Capt EFA – Formation avancée en leadership Capt
EFA alimentant le poste 687 Capt EFA – Formation avancée en leadership ADJ

Légende :

  • LCol = Lieutenant-colonel
  • ADJ = Adjudant
  • Capt = Capitaine
  • Lt = Lieutenant
  • EFA = Effectifs en formation avancée

Un dernier objet de préoccupation soulevé par Mme Arbour au sujet de la C de R Élof, comme il a été mentionné dans la recommandation  28 de l’EEIC et dans le mandat de la Commission, est le risque d’abus de pouvoir que comporte ce modèle de leadership par les pairs. La Commission partage cette inquiétude. Peu importe leur intelligence, leurs aptitudes ou leur niveau de développement personnel, les aspm/élof n’ont pas encore l’expérience ni la maturité pour qu’on les place en position de pouvoir les uns par rapport aux autres. Par ailleurs, non seulement l’expérience du leadership peut s’acquérir de plusieurs façons qui n’exigent pas d’exercer du pouvoir sur autrui, mais la vraie manifestation du leadership est la force de caractère et non pas l’accumulation de pouvoir. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, conférer une autorité aux aspm/élof peut limiter indûment leur croissance et le développement de leur leadership, et les apprentissages positifs qu’ils pourraient en tirer pèsent bien moins lourd que les risques d’un usage inadéquat (voire nuisible) de cette autorité sur les autres aspm/élof.

Par conséquent, la Commission estime que jamais un aspm/élof ne devrait avoir de pouvoir disciplinaire sur un autre aspm/élof. Cette approche est conforme aux pratiques exemplaires adoptées par les nombreuses écoles militaires étrangères que la Commission a examinées, qui emploient régulièrement le leadership par les pairs, mais sans accorder de pouvoir disciplinaire à leurs élèves-officiers et élèves-officières. Dans les situations où des mesures correctives s’imposent ou que des privilèges doivent être révoqués, c’est le commandant ou la commandante d’escadron qui doit s’en charger avec l’adjudant ou l’adjudante d’escadron, selon les processus établis.

Si l’objectif de la C de R Élof est repensé et que sa structure est revue en conséquence, la Commission estime qu’elle peut devenir un mécanisme efficace pour soutenir le perfectionnement du leadership des aspm/élof. De plus, les changements importants recommandés ci-dessous devraient servir à atténuer le potentiel de préjudice mentionné dans l’EEIC, et ainsi aider à justifier l’utilisation continue de la C de R Élof (dans sa forme révisée) en tant qu’outil important pour le PFOR CMC.

Recommandation  31

Dans les deux collèges militaires canadiens, réduire la chaîne de responsabilité des élèves-officiers et élèves-officières à trois types de postes : élof chef d’escadron, élof chef d’escadrille et élof chef de section.

Recommandation  32

Établir comme exigence préalable à l’obtention d’une commission que tous les aspm/élof de troisième année effectuent une session en tant qu’élof chefs de section.

Recommandation  33

Créer et promouvoir des occasions de leadership facultatives pour les aspm/élof de quatrième année afin de pourvoir les postes d’élof chef d’escadrille et d’élof chef d’escadron.

Recommandation  34

Éliminer les postes d’état-major de l’Escadre des élof et les postes au niveau divisionnaire au Collège militaire royal du Canada. Conserver les postes administratifs et de capitaines d’équipes sportives, mais les retirer de la chaîne de responsabilité des élèves-officiers et élèves-officières et faire en sorte qu’ils ne soient plus obligatoires pour l’obtention du diplôme.

Recommandation  35

Concevoir, élaborer et mettre en œuvre le programme avancé de perfectionnement des leaders afin de mieux préparer le personnel de l’Escadre de l’entraînement à soutenir la chaîne de responsabilité des élèves-officiers et élèves-officières et à encourager les affectations dans les collèges militaires canadiens pour les capitaines et les adjudants et adjudantes.

Recommandation  36

Réduire le nombre de postes du corps professoral militaire et des effectifs en formation avancée connexes, et réaffecter ces postes au programme avancé de perfectionnement des leaders, pour contribuer au perfectionnement du leadership des aspm/élof et offrir un meilleur mentorat à la chaîne de responsabilité des élèves-officiers et élèves-officières.

Recommandation  37

Veiller à ce que le volet des compétences militaires et du leadership permette aux aspm/élof de réussir en tant qu’élof chefs de section.

Recommandation  38

Retirer à la chaîne de responsabilité des élèves-officiers et élèves-officières tout pouvoir – et toute apparence de pouvoir – d’imposer des mesures correctives ou la perte de privilèges afin qu’aucun aspm/élof n’ait de pouvoir disciplinaire réel ou perçu sur un autre aspm/élof.

Haut de page

Conduite, santé et bien-être

L’expérience vécue par les aspm/élof dans les CMC ressemble moins à celle des étudiants et étudiantes dans les universités civiles qu’à celle des membres des FAC, et les aspm/élof sont donc directement concernés par la capacité des FAC à suivre l’évolution de la société. Les FAC ont toujours été réfractaires au changement, n’entreprenant souvent les réformes nécessaires qu’en réponse à une pression extérieure importante. Cette dynamique a joué dans des domaines allant de la pleine intégration des femmes dans les forces armées jusqu’aux préjudices causés par l’affaire somalienne, en passant par les difficultés des FAC à offrir un milieu de travail exempt de toutes formes d’inconduite, surtout sexuelle.

Plus récemment, l’EEIC a servi de catalyseur pour le changement au sein des FAC. En réponse à ses conclusions et recommandations, les FAC prennent des mesures significatives, comme le montrent les rapports d’étape de la contrôleuse externe. La Commission a observé une volonté et des preuves de changement au sein des FAC et des CMC, qui s’étendent non seulement aux questions de conduite et de culture, mais plus largement à la diversité, à l’équité, à l’inclusion, à la décolonisation et à la réconciliation. Voilà qui a de quoi rendre optimiste. C’est aussi une mise en contexte importante pour le travail de la Commission, cette dernière ayant délibérément choisi de limiter ses recommandations sur la conduite, la santé et le bien-être aux problèmes qui concernent exclusivement les CMC et ne sont pas couverts par d’autres mécanismes et démarches en cours au sein des FAC.

Malgré les progrès réalisés, l’inconduite et les comportements nuisibles perdurent dans les collèges militaires sous plusieurs formes, telles que des attitudes et des actions discriminatoires fondées sur la race, le genre, l’orientation sexuelle, la religion ou la capacité physique. Selon des données de sondages, le harcèlement, la discrimination, le racisme, les abus de pouvoir, les brimades et l’intimidation auraient toujours cours dans les deux collèges, en plus des cas d’inconduite sexuelle.

D’autres sources de données permettent d’attester ce qui précède. La Commission a entendu les témoignages de plusieurs personnes qui ont partagé des expériences profondément personnelles, souvent dans l’espoir d’éviter d’autres préjudices. Grâce à ces témoignages, qu’elle a recueillis avec reconnaissance et sollicitude, la Commission a pu acquérir une connaissance plus complète des répercussions importantes qu’ont eues sur les gens les expériences préjudiciables, traumatisantes et négatives qu’ils ont vécues dans les collèges militaires canadiens. Ces consultations directes ont également permis à la Commission de mieux comprendre les structures de pouvoir au sein des FAC et des CMC, de même que leur incidence sur les comportements et les attitudes, et de proposer des moyens de créer un véritable changement systémique.

Dans ce contexte, il est important de noter que le nombre de cas d’inconduite sexuelle dans les CMC est sensiblement le même que dans les universités civilesNote de bas de page 45. Cela témoigne du fait qu’il continue d’exister, au sein de la société canadienne dans son ensemble, des attitudes et des comportements qui donnent lieu à des préjudices, se manifestant sous diverses formes et à divers endroits. En effet, les collèges militaires représentent la société canadienne; ils reflètent les points de vue, les expériences, les idées et le comportement des personnes qui en font partie à un moment précis.

Dans les universités civiles et les CMC, la plupart des cas d’agression sexuelle et de comportement sexualisé non désiré se produisent sur le campus, le nombre de cas signalés dans les résidences universitaires étant supérieur à celui des établissements-dortoirs ou des établissements offrant des logements hors campus. Par exemple, les étudiantes canadiennes habitant hors campus avec des colocataires étaient aussi susceptibles de déclarer qu’elles avaient subi une agression sexuelle (17,4 %) que celles vivant en résidence universitaireNote de bas de page 46. Cela nous renseigne sur les conditions dans lesquelles les inconduites se produisent, ce qui est particulièrement intéressant dans le contexte des CMC, puisque ceux-ci exigent que l’ensemble des étudiants et étudiantes du PFOR vivent sur le campus tout au long du programme.

De façon plus générale, on peut s’attendre à ce que les changements dans les attitudes et les comportements des aspm/élof des collèges militaires canadiens évoluent parallèlement à ces changements dans l’ensemble de la société, puisque les aspm/élof en sont issus. À l’heure actuelle, le corps étudiant dans les CMC est plus diversifié qu’à tout autre moment de l’histoire et reflète mieux que jamais la composition démographique du Canada. Ces aspm/élof ont forgé leurs opinions dans un contexte de grands changements sociétaux, et non seulement ils ne tolèrent pas l’inconduite, mais ils sont aussi de plus en plus enclins à la dénoncer. Ainsi, les aspm/élof sont eux-mêmes à l’origine du changement le plus radical opéré dans les CMC. Les progrès positifs sont toutefois fragiles et suscitent des contrecoups. Par ailleurs, il faut reconnaître que les cas d’inconduite continuent de se produire, et certains sont si graves qu’ils ont contraint des aspm/élof à quitter les rangs. Cela témoigne de la nécessité de poursuivre les efforts en matière de prévention et d’intervention.

Afin de déterminer les mesures à prendre pour mettre fin à l’inconduite, changer les attitudes négatives, favoriser un environnement sain et atténuer les préjudices, la Commission a tout d’abord cherché à établir quels outils de prévention et d’intervention existent déjà et quelles lacunes persistent encore. À cette fin, elle a entrepris une analyse comparative et une analyse distincte des cadres stratégiques en matière de prévention et d’intervention des CMC.

Haut de page

Analyse comparative

La sous-ministre adjointe (Services d’examen) [SMA(Svcs Ex)] a effectué un examen d’évaluer le cadre stratégique actuel des CMC en matière de prévention des agressions sexuelles et d’intervention en cas d’agression sexuelle – par rapport aux exigences stratégiques et juridiques pertinentes du Québec, de l’Ontario et du gouvernement fédéral, ainsi qu’aux normes d’excellence établies par l’Université Queen’s, l’Université Nipissing, l’Université Bishop, l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT) et l’Académie navale des États-Unis – afin de déterminer s’il existait des écarts entre les outils stratégiques et juridiques utilisés par les gouvernements provinciaux et fédéral et d’autres institutions comparables et ceux employés par les CMC.

L’examen de la SMA(Svcs Ex) a révélé l’existence et l’application d’un large éventail de politiques, de directives et de programmes du MDN et des FAC. En plus des concepts pertinents tirés de lois fédérales (la Loi sur l’équité en matière d’emploi, la Loi canadienne sur les droits de la personne et le Code canadien du travail), ces politiques, directives et programmes sont intégrés à des documents propres au MDN et aux FAC au moyen d’une série de Directives et ordonnances administratives de la défense (DOAD) et d’ordres d’unité. Ils sont également mis en œuvre grâce à divers programmes conçus pour prévenir les inconduites et pour réagir efficacement lorsqu’elles se produisent. À cet égard, le cadre des CMC s’harmonise en grande partie avec celui des autres organisations provinciales et fédérales de comparaison.

Cependant, des lacunes importantes ont été observées. En particulier, les domaines thématiques suivants ne sont pas entièrement ou convenablement abordés dans le cadre stratégique existant de l’un des CMC, ou des deux :

  • Définition des droits des personnes concernées à une représentation juridique ou autre;
  • Description du processus d’appel à l’égard des décisions rendues à la suite d’une enquête;
  • Interdiction de poser des questions non pertinentes au cours d’une enquête;
  • Obligation de recueillir des données sur le nombre de fois où les aspm/élof utilisent des services de soutien et des services liés à la violence sexuelle;
  • Définition des mesures de sécurité mises en place pour lutter contre la violence sexuelle, y compris l’adaptation des infrastructures pour sécuriser les locaux;
  • Obligation pour les collèges militaires de présenter des rapports annuels à l’Académie canadienne de la Défense sur le nombre et le type de plaintes;
  • Mise en place de mesures visant à protéger les renseignements personnels des personnes concernées et à en préserver la confidentialité;
  • Amélioration de l’accessibilité en ligne à la documentation pertinente;
  • Réflexion sur la façon d’organiser et de superviser les activités sociales.

Haut de page

Analyse distincte

Prévention

Bien qu’une grande variété de politiques soient en place pour prévenir l’inconduite dans les forces armées, la Commission a concentré son attention sur les outils particuliers qui aident à initier de nouveaux membres à la profession des armes et à les informer des exigences et des attentes en matière de conduite personnelle et professionnelle dès leur enrôlement.

Ce processus commence lors de la première semaine de service dans les FAC, dans le cadre du cours Qualification militaire de base des officiers à l’École de leadership et de recrues des Forces canadiennes, qui comprend des séances d’information sur la philosophie des FAC et sur la conduite professionnelle. Ces séances, ainsi que l’accent continu mis sur la conduite personnelle et professionnelle pendant le cours QMB(O), visent à informer les nouvelles recrues de leurs droits et obligations en tant que membres des FAC.

En outre, les aspm/élof sont exposés à des concepts clés dans le cadre du programme de formation des CMC intitulé Construire notre avenir. Conçu par le Centre de soutien et de ressources sur l’inconduite sexuelle (CSRIS) et le Chef – Conduite professionnelle et culture (CCPC), ce programme de quatre ans est centré sur les thèmes essentiels du consentement, des obstacles au consentement, des relations saines, de la divulgation des cas d’inconduite sexuelle, de la gestion du stress, de la formation en matière d’intervention auprès des témoins et de la façon de réagir aux situations en tant que leader efficace. Bien que la formation Construire notre avenir continue d’être peaufinée et qu’elle bénéficierait d’un cadre d’instructeurs mieux informé et plus crédible, la Commission reconnaît la valeur de ce programme dans la trousse d’outils de prévention destinée aux aspm/élof des CMC.

Les CMC offrent également une série de séances de formation sur les comportements attendus et les ressources offertes aux personnes victimes d’une inconduite. De plus, les CMC ont récemment créé deux nouveaux postes pour soutenir le travail de prévention sur les campus des collèges : un poste de chef de l’évolution culturelle (CMR Kingston) et un poste de spécialiste des ressources et de la formation sur la violence sexuelle et la promotion d’une culture positive (CMR Saint-Jean). Ils appuient directement les aspm/élof et conseillent les équipes de direction des CMC sur les questions systémiques.

Les FAC dirigent aussi des groupes de soutien et de défense des droits pour les communautés qui ont été marginalisées au sein des FAC et des CMC dans le passé, y compris des groupes consultatifs de la Défense pour les groupes visés par l’équité en matière d’emploi ou en quête d’équité et des organismes de soutien locaux, comme le réseau AthenaNote de bas de page 47 pour les femmes et le réseau AgoraNote de bas de page 48 pour les membres de la communauté LGBTQ2+.

En somme, il existe une gamme robuste d’outils en place pour aider à prévenir l’inconduite au sein des CMC. Malgré cela, les aspm/élof ont indiqué à maintes reprises que bon nombre des enseignements sont répétitifs, semblent inutiles et sont inadaptés aux particularités de l’environnement des collèges militaires. En particulier, de nombreux aspm/élof estiment que la formation actuelle ne tient pas compte de leurs besoins et de leurs spécificités en tant que jeunes adultes modernes. Bien que les CMC s’efforcent de mieux adapter à ce segment de population, les nouveaux programmes comme Construire notre avenir, un degré de cynisme, d’indifférence et de désengagement persiste, ce qui donne des résultats contraires aux objectifs escomptés d’une telle formation. Ces problèmes ont, au fil du temps, nui à l’efficacité des outils d’éducation et de formation pour éliminer complètement les comportements néfastes.

Intervention

Tant que tous les comportements préjudiciables n’auront pas été prévenus et éradiqués, des mécanismes d’intervention seront encore nécessaires, non seulement pour soutenir les personnes affectées et tenir les auteurs responsables, mais aussi pour empêcher les inconduites futures.

De nombreux mécanismes de ce type existent déjà au sein des CMC. En effet, un vaste réseau de services de soutien a été mis en place dans cet environnement composé principalement de jeunes, qui pourraient être loin de chez eux pour la première fois, qui s’adaptent à la vie militaire et qui apprennent à se comporter en tant que membres de la profession des armes. La chaîne de commandement sert de principale source d’intervention pour soutenir les personnes affectées (de manière semblable au reste des FAC). Elle est appuyée par un personnel de service qui assure en alternance une présence en tout temps sur les campus et elle est accessible à tous les aspm/élof. Les aspm/élof ont également accès à du soutien par les pairs par l’intermédiaire du Programme Sentinelle et de conseillers en conduite professionnelle (aspm/élof formés dans ces rôles), ainsi qu’à un soutien confessionnel par l’entremise de l’aumônerie des CMC, ce qui comprend l’accès à des services d’intervention en personne en cas de crise offerts 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.

Reconnaissant la possibilité que des victimes ne demandent pas l’aide de la chaîne de commandement pour des problèmes éminemment personnels, les CMC offrent également des services de soutien anonymes en santé mentale aux aspm/élof par l’intermédiaire du Programme d’aide aux membres, accessible 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, et des services locaux de soutien en santé mentale des FAC, offerts en personne. Les aspm/élof ont en outre accès en tout temps au service d’écoute téléphonique du Centre de soutien et de ressources sur l’inconduite sexuelle, et des ententes locales ont été conclues pour offrir aux aspm/élof des services de soutien communautaires en cas d’agression sexuelle, y compris une ligne d’assistance téléphonique accessible en tout temps et des soins médicaux civils d’urgence. De multiples affiches, installées sur les campus dans les dortoirs, les salles de toilettes et près des salles à manger, permettent également aux aspm/élof de repérer rapidement les ressources offertes.

En ce qui concerne les ressources de soutien technologiques, tous les membres des FAC ont accès à l’application mobile Le respect dans les FAC, conçue par le Centre de soutien et de ressources sur l’inconduite sexuelle. Il s’agit d’un répertoire de ressources, de guides et de coordonnées, qui facilite l’accès aux services de soutien, aide les membres des FAC à soutenir les victimes d’inconduite sexuelle et permet de s’assurer que les membres des FAC connaissent les politiques et procédures de l’organisation. Le CMR Saint-Jean dispose également d’une application mobile dédiée qui comprend les coordonnées des services de soutien en matière de harcèlement sexuel, de discrimination et de violence.

Dans les cas où une personne victime d’une inconduite sexuelle signale un incident, les CMC ont établi des mesures immédiates (les « mesures provisoires ») que la chaîne de commandement, le superviseur ou la superviseure ou le ou la gestionnaire peuvent prendre pour fournir un soutien avant l’ouverture ou la fin d’une enquête. Ces mesures provisoires visent à assurer la sécurité des personnes affectées et à leur offrir des options de soutien pendant que les processus judiciaires ou administratifs suivent leur cours, dont on peut attendre l’issue, dans certains cas, pendant plus d’un an, période où l’agresseur présumé et la victime peuvent tous deux vivre sur le campus. Toutefois, la Commission est tout aussi consciente que la présomption d’innocence doit être respectée, ce qui signifie qu’un agresseur présumé ne peut pas être traité comme coupable en l’absence d’une condamnation ou d’une décision prononcée à l’issue du processus approprié. La Commission appuie donc les mesures provisoires prises par les CMC pour gérer cette situation délicate, mais elle encourage les collèges à explorer les possibilités d’accroître la transparence en communiquant davantage avec les personnes affectées, le cas échéant.

Dans le cadre de ces processus, la police militaire ou les services de police civile peuvent traiter les cas d’inconduite qui atteignent le seuil d’action en justice, aux fins d’une décision rendue dans le cadre du système juridique militaire ou civil. À la lumière des recommandations de l’EEIC, les FAC se sont engagées à transférer au système de justice criminelle civil la compétence d’enquêter sur les infractions sexuelles visées par le Code criminel et d’intenter des poursuites. D’autres infractions au Code de discipline militaire peuvent être traitées par le système de justice militaire, y compris la cour martiale. Les questions qui contreviennent au Code de discipline militaire, mais qui sont considérées comme mineures, peuvent également être réglées par procédure sommaire, un mécanisme unique au système de justice militaire.

Les FAC peuvent en outre appliquer des mesures correctives en milieu de travail pour relever et corriger les manquements à la conduite et au rendement qui ne satisfont pas aux critères pour faire l’objet de poursuites judiciaires. Mis en œuvre par la chaîne de commandement, le programme de mesures correctives vise à remédier à une conduite ou à un rendement qui ne satisfait pas aux normes professionnelles requises, mais qui ne constitue pas une infraction d’ordre militaire. Il est par ailleurs possible d’entreprendre simultanément des mesures correctives et des procédures judiciaires.

Certains cas de manquement à la conduite et au rendement peuvent nécessiter une évaluation de la capacité de la personne à demeurer membre de la profession des armes. Dans des cas extrêmes, ou en cas de récidives sans amélioration, la chaîne de commandement peut recommander ou décider qu’une personne devrait être libérée des FAC.

À l’heure actuelle, les commandants et commandantes ont le pouvoir de libérer des aspm/élof qui ne satisfont pas aux exigences de rendement du PFOR CMC, mais ils n’ont pas le pouvoir de libérer des aspm/élof ayant des problèmes de conduite, peu importe leur gravité. Ainsi, un commandant ou une commandante peut libérer un ou une aspm/élof qui ne satisfait pas aux exigences des CMC en matière d’études, de condition physique, d’instruction militaire ou de langue seconde, mais pas une personne qui a commis une infraction, y compris une inconduite sexuelle, car ce pouvoir a été conféré au Directeur – Administration (Carrières militaires) par le Chef d’état-major de la défense.

En somme, la Commission estime que la gamme des services de soutien offerts dans les CMC constitue une base solide pour un cadre d’intervention robuste et efficace. Cependant, il est aussi complexe et peut être difficile à naviguer pour les membres subalternes des FAC. De plus, la Commission a été mise au fait du piètre niveau de confiance accordé à la chaîne de commandement pour répondre adéquatement à l’inconduite et traiter les plaintes de manière rapide, respectueuse ou efficaceNote de bas de page 49. En effet, l’inconvénient du voile juridique de confidentialité qui doit entourer certains processus pour assurer l’équité peut paradoxalement donner lieu à une perception erronée selon laquelle « rien n’est fait », ce qui engendre le cynisme, la colère et la frustration. Le fait d’augmenter les occasions de suivi auprès des personnes affectées, le cas échéant, permet de faire preuve de compassion et peut aider à corriger cette perception.

Il est clair que la justice doit non seulement être rendue, mais qu’elle doit aussi être perçue comme telle. Cet impératif a joué un rôle important dans le point de vue de la Commission sur la meilleure façon d’établir la confiance, de faire évoluer la culture, d’améliorer la communication et de mettre en place un environnement sain dans les collèges militaires canadiens.

Haut de page

La voie à suivre

En se fondant sur l’état actuel du cadre de prévention et d’intervention des CMC, on a élaboré les trois grandes lignes d’efforts suivantes pour aider les collèges à continuer à bâtir une communauté inclusive et diversifiée, caractérisée par un environnement sain, exempt de harcèlement, de discrimination, d’inconduite sexuelle et de violence : renforcer les mécanismes existants, accroître la confiance et l’engagement à l’égard de ces mécanismes et combler les lacunes lorsqu’il n’y a pas de mécanismes où il devrait en avoir.

Pour orienter sa réflexion sur la meilleure façon de relever ces défis, la Commission a entrepris un examen détaillé des pratiques exemplaires au Canada et à l’étranger au moyen de visites dans des collèges militaires étrangers et des milieux universitaires civils canadiens, ainsi que par une analyse documentaire.

Renforcer les mécanismes existants

L’examen effectué par le sous-ministre adjoint (Services d’examen) a permis d’évaluer le cadre de prévention et d’intervention existant et de déterminer qu’il est relativement solide. L’efficacité du cadre n’a toutefois pas été évaluée. Il faut procéder à une analyse plus approfondie pour déterminer si les politiques et les procédures en place permettent de prévenir les cas d’inconduite et d’intervenir à cet égard. Conformément aux pratiques exemplaires, et comme le montre l’approche adoptée dans plusieurs milieux universitaires civils et organismes gouvernementaux, cette analyse devrait être effectuée par des experts en la matière. À titre d’exemple, citons le Canadian Centre for Legal Innovation in Sexual Assault Response, qui a mené des évaluations comme l’examen indépendant des pratiques et politiques relatives à la violence sexuelle de l’Université Bishop et le Cadre de prévention et d’intervention de la violence sexuelle de l’Université Queen’s.

Une autre façon de renforcer les mécanismes de prévention et d’intervention existants consiste à les harmoniser. Plus particulièrement, toutes les politiques, procédures et pratiques et tous les programmes pertinents doivent être les mêmes dans les deux collèges et ne différer que lorsqu’il faut les harmoniser avec les différentes exigences législatives provinciales. Cela permettra d’assurer une plus grande clarté et de normaliser les attentes, de favoriser une communication plus claire entre les dirigeants et les aspm/élof, d’améliorer la compréhension des aspm/élof sur le plan des ressources disponibles et des mécanismes de production de rapports et de faciliter le mouvement des aspm/élof entre les collèges, étant donné qu’ils seront bien informés de ce qu’on attend d’eux, quel que soit le lieu où ils étudient. L’harmonisation doit s’étendre aux ressources de soutien disponibles dans les deux collèges (comme il est indiqué plus loin), de la formation au personnel en passant par les événements, afin de favoriser l’égalité, l’efficacité et l’efficience.

De plus, malgré la présence des membres du personnel de service en rotation 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, certains aspm/élof ont affirmé être incapables d’accéder à ces personnes lorsque le besoin se présentait. Il est essentiel de s’assurer que tous les aspm/élof savent quand et comment avoir accès au personnel de service, et à cette fin, une communication plus efficace et transparente entre les collèges et les élèves-officiers et élèves-officières serait bénéfique. De plus, il est impératif que le personnel de service jouisse d’un haut niveau de crédibilité et de confiance auprès des aspm/élof, de sorte que les personnes qui pourraient avoir besoin de soutien se sentent à l’aise d’en faire la demande.

Enfin, les politiques, les procédures, les pratiques et les programmes nouveaux et existants des CMC devraient faire l’objet d’une Analyse comparative entre les sexes Plus (ACS Plus) afin de s’assurer qu’ils sont examinés en détail, réactifs, inclusifs, adaptés et sensibles à tous les aspm/élof, qu’ils contribuent, et sont perçus comme contribuant, à une vision commune des collèges comme des endroits exempts de préjudice et où tous les membres se sentent en sécurité en tout temps.

Accroître la confiance et l’engagement à l’égard des mécanismes existants

Comme il a été mentionné ci-dessus, ce n’est pas simplement l’absence de mécanismes d’intervention qui est préoccupante, mais le manque de confiance et d’engagement envers les mécanismes existants. Pour résoudre ce problème, il faut que les aspm/élof voient et croient que les figures d’autorité sur lesquelles ils comptent possèdent les outils et les pouvoirs appropriés pour régler les problèmes auxquels ils sont confrontés. À l’heure actuelle, l’incapacité des commandants et commandantes de libérer des aspm/élof des CMC pour des problèmes de conduite remet en question cette croyance.

Selon les règles actuelles, c’est le Directeur – Administration (Carrières militaires) qui détient ce pouvoir – une personne qui n’est pas présente sur le campus et que les aspm/élof ne connaissent pas. Cette approche crée un système raisonnable de freins et de contrepoids, qui sert en partie à empêcher les commandants et commandantes de prendre une décision importante unilatéralement et d’être indûment influencés, ou perçus comme tels, par la proximité du problème ou influencés par les préjugés personnels contre la personne en question. Cependant, elle favorise le sentiment que les commandants et commandantes ne sont pas suffisamment habilités à faire appliquer les règles de déontologie et mine la crédibilité du système aux yeux des aspm/élof.

En dehors de ce contexte, il est justifié que le Directeur – Administration (Carrières miliaires) soit investi de ce pouvoir. Le fait qu’il détienne ce pouvoir contribue à assurer une application équitable des pouvoirs de libération pour inconduite dans l’ensemble des FAC, mais cela prend du temps. Le processus est fastidieux et entrave la capacité de la chaîne de commandement d’intervenir de façon rapide et transparente dans les cas d’inconduite graves dans les CMC.

Pour équilibrer ces deux impératifs, la Commission estime que le commandant ou la commandante de l’Académie canadienne de la Défense (ACD) doit détenir le niveau de pouvoir de libération approprié pour les cas d’inconduite dans les CMC. Ce changement relatif à la délégation du pouvoir de libération devrait permettre d’assurer un point de vue plus large et de faire preuve d’objectivité dans la prise de décisions, tout en renforçant la capacité réelle à intervenir de manière indépendante, juste et rapide en cas d’inconduite.

Combler les écarts

De nouveaux mécanismes et de nouvelles approches sont également nécessaires pour développer une culture axée sur le respect et le soutien, et caractérisée par des comportements positifs et des espaces sains sur le campus.

Cela commence par l’instruction. Bien que les CMC aient déjà mis en place de nombreuses initiatives de ce genre, la plupart d’entre elles sont perçues par les aspm/élof comme redondantes, superficielles et inefficaces. Le fait que l’instruction soit offerte en grande partie par des membres de la chaîne de commandement ou d’autres aspm/élof, qui n’ont habituellement pas d’expertise en la matière, aggrave ce problème. Ainsi, l’instruction offerte aux CMC – y compris l’intervention des témoins, les discussions sur le rôle de l’alcool et des drogues dans les agressions sexuelles, et les consignes sur les mécanismes de production de rapports et d’intervention – devrait être entièrement modernisée et pleinement intégrée dans le volet des compétences militaires et du leadership et le volet de la condition physique, de la santé et du bien-être (s’il y a lieu), dans le nouveau Programme de perfectionnement intégré des officiers et officières proposé. En outre, étant donné la nature délicate et nuancée des questions telles que le racisme, l’homophobie, la sexualité saine, la masculinité toxique et la relation avec soi, l’instruction doit être dispensée par des experts en la matière qui sont reconnus et considérés comme étant crédibles par les aspm/élof.

Des efforts doivent également être déployés pour assurer un environnement sécuritaire, particulièrement pour les femmes et les membres des groupes vulnérables, y compris dans les lieux d’hébergement. Bien que les aspm/élof et les dirigeants aient des opinions contradictoires sur le caractère adéquat des ressources de soutien disponibles (particulièrement après les heures de travail et les fins de semaine), et bien que de nombreux partenaires et alliés étrangers divergent sur ce point (ayant adopté une approche non interventionniste dans la vie des élèves-officiers et des élèves-officières en dehors des heures consacrées aux études et à l’instruction), il faut accorder une plus grande importance aux facteurs institutionnels, structurels et culturels qui peuvent mettre davantage à risque les femmes et les membres des groupes vulnérables lorsqu’ils vivent sur le campus des CMC.

À l’appui des impératifs susmentionnés, il est nécessaire d’offrir un soutien spécialisé sur le campus sous la forme de nouveaux centres de ressources sur la santé, la sécurité et le bien-être qui seront mis sur pied dans chaque collège. Cette initiative doit être dirigée par des directeurs ou directrices civils et viser à prévenir les comportements nuisibles et à y réagir au moyen d’une éducation et d’interventions ciblées, d’une réponse globale et d’un plaidoyer compatissant afin de promouvoir le professionnalisme, le respect et la confiance. Plus précisément, les centres de ressources sur la santé, la sécurité et le bien-être doivent :

  • Appuyer la prestation du volet des compétences militaires et du leadership et du volet de la condition physique, de la santé et du bien-être du Programme de perfectionnement intégré des officiers et officières en :
    • offrant de l’instruction aux aspm/élof, notamment le programme Bâtir notre avenir et l’intervention des témoins, conformément aux résultats d’apprentissage du Programme de perfectionnement intégré des officiers et officières;
    • en soutenant la professionnalisation du cadre des instructeurs et d’autres membres du personnel de soutien (comme les officiers et officières de service), notamment en offrant des programmes de formation des formateurs; et
    • en élaborant du matériel pédagogique pertinent.
  • Faciliter l’accès des aspm/élof aux services de soutien des FAC liés aux cas d’inconduite sexuelle, à la santé mentale, à la lutte contre le racisme, à la toxicomanie, à la gestion des conflits, entre autres, notamment en intégrant et en coordonnant les ressources offertes par le Centre de soutien et de ressources sur l’inconduite sexuelle, le Programme de gestion intégrée des conflits et des plaintes, le Chef – Conduite professionnelle et culture et les Services de santé des FAC.
  • Former, gérer, encadrer et accompagner un groupe d’aspm/élof choisis par les pairs qui fournit un soutien direct aux aspm/élof dans le besoin.
  • Faire des observations et formuler des conseils et des recommandations pour éclairer la prise de décisions des dirigeants des CMC en ce qui a trait au mandat des centres de ressources sur la santé, la sécurité et le bien-être.
  • Mener des activités de sensibilisation et de prévention des méfaits sur le campus.
  • Collaborer avec les intervenants et intervenantes pour mettre en œuvre et appliquer des mesures de sécurité adéquates.

Il faudra disposer des ressources humaines et financières appropriées pour mettre sur pied et gérer des centres de ressources sur la santé, la sécurité et le bien-être de manière efficace et durable. En tenant compte des ressources existantes qui sont actuellement réparties au sein des différentes équipes des deux collèges et qui devraient être regroupées, la Commission s’attend à ce que les nouveaux centres soient dotés d’environ dix employés à temps plein acrépartis entre les deux collèges ayant des postes et des titres comparables. Ces employés.es doivent posséder une expertise fonctionnelle dans les domaines donnés pour remplir le mandat des centres de ressources sur la santé, la sécurité et le bien-être.

On ferait davantage progresser ces objectifs en abolissant les postes de conseillers et conseillères en conduite professionnelle et en mettant sur pied un groupe de défenseurs et défenseures des intérêts des aspm/élof, élus par leurs pairs qui agiront à titre d’ambassadeurs et d’ambassadrices d’une culture positive et respectueuse et qui offriront du soutien sur le terrain aux aspm/élof lorsqu’ils interagiront avec la chaîne de responsabilité des élèves-officiers et élèves-officières de même qu’avec la direction des CMC, y compris pour les questions qui nécessitent une attention immédiate.

Conformément aux principes directeurs de l’élaboration centralisée des politiques et des programmes et du soutien décentralisé, les centres de ressources en santé, en sécurité et en bien-être doivent avoir une présence physique dans les deux collèges et être facilement et discrètement accessibles aux aspm/élof, notamment en dehors des heures de travail (les soirs et les week-ends).

Une autre façon de compenser le préjudice qui découle du sexisme, de la masculinité toxique et de la misogynie, et de tous leurs éléments inhérents, est de régler la question connexe de la prépondérance des hommes dans le milieu des collèges militaires. À cette fin, la Commission salue l’objectif des FAC d’augmenter le pourcentage de femmes dans la profession des armes à 25 % d’ici 2026 et reconnaît que les CMC jouent déjà un rôle de premier plan dans l’augmentation du nombre de femmes qui s’enrôlent dans les FAC, comme il a été souligné dans une section précédente du présent rapport. Bien qu’il existe plusieurs façons d’atténuer les répercussions négatives de ce déséquilibre, ces initiatives ne visent pas à traiter la question sous-jacente du nombre disproportionné d’hommes dans les CMC.

Un changement durable nécessitera un point de bascule en ce qui concerne la parité entre les sexes. Les efforts récemment déployés par les FAC pour remédier à ce problème ont porté leurs fruits, et en 2024, les CMC ont attiré 25 % de femmes dans leurs rangs. En poursuivant sur cette lancée, la Commission croit que l’établissement de l’objectif réaliste, mais intermédiaire, de 33 % d’aspirantes de marine et d’élèves-officières sur dix ans, qui vise à assurer une plus grande parité hommes-femmes dans les collèges militaires contribuera à créer un environnement plus sain, plus sûr et plus accueillant qui reflète mieux la société canadienne. La Commission reconnaît que la pleine parité hommes-femmes est peu probable et que les efforts visant à égaler le pourcentage de femmes dans les universités civiles ne tiennent pas compte des réalités actuelles dans les FAC ou de la situation des forces militaires dans le monde. Au fil du temps, et en réponse à une combinaison d’efforts de recrutement concertés, à l’évolution de la culture institutionnelle générale et continue et aux changements particuliers proposés dans le présent rapport, l’objectif consiste à aider à établir des conditions incitant davantage de femmes à s’enrôler dans les FAC et à s’inscrire dans des CMC, où règle un climat propice à leur épanouissement.

Dans l’ensemble, la Commission est convaincue des possibilités de progrès et de changements positifs dans les CMC. Cependant, certains obstacles préoccupants les empêchent de réaliser leur plein potentiel. Les femmes continuent d’être considérablement plus susceptibles d’avoir vécu des expériences négatives que les hommes dans les CMC. Elles sont plus enclines à percevoir l’inconduite comme étant plus présente et problématique que les hommes et elles ont des perceptions plus négatives de la manière dont les collèges traitent les cas d’inconduite, soulignant que le manque d’intervention rapide et transparente est souvent plus traumatisant que l’incident en soi. Dans l’ensemble, les expériences vécues par les femmes continuent de différer considérablement de celles des hommes dans les CMC. Il faut que cela change.

Dans le même ordre d’idée, tous les aspm/élof des CMC doivent reconnaître et valider les expériences de leurs collègues, contribuer activement à une culture positive et assumer leurs responsabilités à l’appui de ces efforts. L’action doit correspondre au discours dans les faits et dans les perceptions. Les recommandations proposées ci-dessous représentent des mesures importantes à cette fin.

Recommandation  39

Modifier le cadre stratégique des CMC afin de combler les lacunes relevées par la sous-ministre adjointe (Services d’examen) dans son avis sur la prévention de la violence sexuelle dans les collèges militaires canadiens.

Recommandation  40

Confier à des experts du domaine de la prévention et de l’intervention en matière d’inconduite sexuelle le mandat d’évaluer l’efficacité et l’incidence des politiques et des procédures des collèges militaires canadiens.

Recommandation  41

Attribuer au commandant ou à la commandante de l’Académie canadienne de la Défense le pouvoir de libérer les aspm/élof des collèges militaires canadiens pour les motifs de libération suivants :

  • 5d — Ne peut être employé avantageusement — écart de conduite
  • 5f — Inapte à continuer son service militaire — écart de conduite

Recommandation  42

Mettre sur pied un centre de ressources sur la santé, la sécurité et le bien-être dans chaque collège militaire, doté de professionnels possédant un large éventail d’expertise pertinente et disposant de ressources suffisantes pour s’acquitter du mandat qui consiste à fournir un soutien en matière de prévention et d’intervention aux collèges militaires canadiens sept jours sur sept.

Recommandation  43

Augmenter le pourcentage des d’aspirantes de marine et d’élèves-officières des collèges militaires canadiens à 33 % d’ici 2035.

Haut de page

Infrastructure, opérations et soutien

Les CMC sont des symboles de fierté nationale, de puissance et de prestige et projettent une image positive à la population canadienne et au monde entier. Il est donc important de maintenir l’état de l’infrastructure et d’en assurer la maintenance. Grâce à son partenariat unique et fructueux avec la Corporation du Fort Saint-Jean (CORPO St-Jean), un organisme sans but lucratif communautaire de Saint-Jean-sur-Richelieu qui est chargé de gérer les activités et d’effectuer les travaux de maintenance sur le campus, le CMR Saint-Jean incarne les normes les plus élevées de ce que devrait être un établissement d’enseignement et de formation professionnels au Canada. Malgré les défis liés au financement de ses grands projets d’immobilisations (comme l’aréna et la piscine), les bâtiments attrayants, les terrains bien entretenus, les installations modernes et les sites sécurisés contribuent tous à souligner la valeur historique du campus et à démontrer des normes de diligence élevées à l’égard des aspm/élof, et mettent en évidence les meilleures pratiques mondiales en matière d’infrastructure psychosociale.

Plus précisément, en raison de la nature du contrat entre CORPO St-Jean et le CMR Saint-Jean – qui est considérable sur le plan financier, mais qui apporte une grande valeur – le Collège bénéficie d’un soutien rapide et de grande qualité de la part d’une entreprise locale dévouée qui s’investit profondément dans la réussite et le bien-être de l’établissement. Le CMR Saint-Jean n’a pas à faire concurrence à d’autres unités de service de la garnison de St-Jean pour effectuer les travaux de maintenance ou de réparation de ses 33 biens immobiliers parce qu’il a un accès privilégié à ce gestionnaire d’installations tiers du secteur privé.

À l’inverse, l’état des infrastructures physiques à CMR laisse beaucoup à désirer, ce qui crée un environnement psychosocial néfaste pour les aspm/élof et nuit à l’image et à la réputation du Canada. Si le sous-investissement chronique en temps, en argent et en attention a nui aux deux collèges, l’incidence est particulièrement remarquable et perceptible au CMR, créant une divergence inacceptable sur le plan des normes entre les deux collèges. Cela est dû en grande partie au modèle d’opérations et de soutien différent qui dessert le CMR. Contrairement au CMR Saint-Jean, le CMR est appuyé par le Groupe des opérations immobilières (Ops Imm) de la BFC Kingston, qui fournit tout le soutien de l’infrastructure aux deux collèges militaires et à toutes les autres unités de la BFC Kingston. Cela signifie que les ordres de travail pour l’entretien des installations et les travaux de réparation mineurs au cours de l’année – de la coupe du gazon, du déneigement et du nettoyage des fenêtres à la réparation des toilettes défectueuses et des systèmes de chauffage et de climatisation – sont triés par les Ops Imm en fonction de toutes les autres demandes à la BFC Kingston.

Par conséquent, les 55 biens immobiliers du CMR, dont bon nombre ont une désignation patrimoniale, ont fait l’objet d’importants travaux d’entretien différé, ce qui a créé toutes sortes de problèmes, allant de l’augmentation des pannes et des coûts à une responsabilité future accrue et à des défis chroniques pour les utilisateurs.

Le CMR doit également faire face aux conséquences des déficits de financement importants auxquels les Ops Imm sont confrontés pour l’exercice 2024-2025, ce qui a entraîné une réduction de 50 % du financement pour les travaux de maintenance et de réparation à la BFC Kingston. Par exemple, au moment de rédiger le présent rapport, le CMR avait été informé que seules les réparations d’urgence des installations, notamment l’absence de chauffage en hiver, les pannes de courant, l’absence d’eau courante, les inondations, les refoulements d’égouts ou les prises électriques fumantes, seraient effectuées. Par conséquent, les réparations comme la restauration des buanderies, la réparation des éviers, la réparation des trous dans les murs et le retrait des excréments des oiseaux des balcons ne seront même pas envisagées avant avril 2025 au plus tôt.

En plus d’un manque continu de ressources, ce problème est également lié à la source aux questions de responsabilités, de pouvoirs et d’obligations de rendre compte. Le sous-ministre de la Défense nationale est responsable de l’entretien et de la construction des infrastructures du MDN et des FAC. Depuis 2016, cette responsabilité a été consolidée et exercée par le sous-ministre délégué (Infrastructure et environnement) et les unités et détachements subordonnés partout au Canada, qui sont constitués de fonctionnaires civils et de membres des FAC. Dans cette structure, ni le ou la chef d’état-major de la défense, ni les commandants ou commandantes de service, ni l’Académie canadienne de la Défense, ni les collèges militaires canadiens n’ont de pouvoirs en matière de gestion de biens immobiliers, de construction ou de dépenses connexes.

Les grands projets d’immobilisations et les projets de nouvelles constructions mineures dans les CMC sont assujettis au processus standard du ministère de la Défense nationale et font concurrence à toutes les autres demandes de construction du MDN et des FAC pour obtenir du financement, l’approbation de projets et du soutien dans le cadre de projets. En conséquence, les demandes relatives aux dortoirs, aux bibliothèques ou aux arénas du CMC doivent rivaliser avec celles liées aux hangars d’aéronefs, aux jetées et aux casernes pour les soldats partout au pays. Il n’est pas surprenant que, dans ce contexte, les investissements dans les CMC rivalisent mal avec les demandes de soutien aux exigences opérationnelles, surtout en raison des contraintes de sous-financement systémique des besoins d’infrastructure de défense dans son ensemble.

Le ministère de la Défense nationale a reconnu certains des problèmes susmentionnés. Il a notamment fait état du sous-financement systémique des biens immobiliers dans le Rapport sur les résultats ministériels 2022-2023. Toutefois, il ne s’agit que d’une première étape. Dans un contexte où des déficits de financement importants persistent, un cercle vicieux s’est installé, dans lequel l’incidence de l’investissement du MDN dans les travaux de maintenance et de réparation diminue continuellement, tandis que les coûts et les demandes augmentent sans cesse. Cela crée à son tour une situation dans laquelle le portefeuille d’infrastructures actuel ne peut pas être maintenu, ce qui entraîne une accélération de la détérioration des biens. Des mesures d’urgence doivent être prises maintenant.

Les CMC sont un point de départ approprié. Dans une structure où l’investissement dans les collèges militaires rivalise avec les demandes opérationnelles, les CMC n’en sortiront jamais gagnants. Mais si les CMC sont conçus à des fins de défense et de sécurité, servent les Canadiens et font directement avancer les intérêts des FAC, les investissements dans les collèges militaires appuieront non seulement ces établissements d’instruction et d’études militaires professionnelles, mais ils contribueront également à la réalisation du contrat social entre le pays et les aspm/élof qui ont comme mandat de le servir.

Pour cela, il faut investir davantage dans les CMC, ce qui permettrait d’augmenter les dépenses de défense en vue d’atteindre 2 % du PIB et aurait une incidence positive directe sur la qualité de vie des membres des FAC. Un nouveau paradigme de financement s’impose également pour répondre aux besoins des CMC en particulier. Enfin, il faut un modèle d’opérations et d’entretien différent pour les CMC, comme celui qui existe au CMR Saint-Jean, afin de s’assurer que le soutien est imparti et que les besoins des CMC sont priorisés. Cela mènerait à la privatisation de certains emplois de la fonction publique, mais améliorerait considérablement la qualité de vie dans les CMC et, surtout, la rendrait comparable à celle observée dans le CMR Saint-Jean en termes d’infrastructure, de fonctionnement et d’entretien, et de sécurité du site.

De façon générale, il faut revoir les attitudes et les attentes en ce qui concerne la valeur du patrimoine bâti du Canada et l’importance de l’excellence architecturale et de la conception de la qualité dans les CMC. Un tel changement permettrait au Canada de s’aligner sur des pays comme la Suède, les États-Unis et le Royaume-Uni, qui accordent une grande importance à la qualité et à l’attrait de leurs campus.

Le gouvernement du Canada et le MDN et les FAC acceptent la médiocrité depuis trop longtemps. Cela a mené à des ajouts d’infrastructures sur les campus au cours des dernières décennies qui sont incompatibles avec l’aspect historique plus général des CMC, à des rénovations qui sont effectuées de manière fragmentaire plutôt qu’holistique et à une acceptation des normes de fonctionnement et d’entretien qui donne l’impression que les collèges sont défraîchis et malpropres, en particulier au CMR. Cette situation a donc miné la santé et le bien-être des aspm/élof, nuit à la capacité du Canada de tirer parti des CMC pour projeter la puissance nationale et érodé la fierté de la population canadienne envers ces établissements.

À l’avenir, tous les nouveaux bâtiments, ajouts d’infrastructures et travaux de rénovation ou d’amélioration doivent respecter les normes les plus élevées, et la valeur à long terme de bâtir et d’entretenir des campus magnifiques et inspirants, dans leur style historique, doit devenir une considération centrale.

En général, une approche recalibrée sera déterminante pour reconnaître les CMC comme des établissements prestigieux de renommée nationale dignes d’un pays du G7 et accorder de l’importance à l’expérience des personnes qui les fréquentent.

Recommandation  44

Établir un cadre de financement dédié aux grands projets d’immobilisation, aux travaux de construction mineurs ainsi qu’aux travaux de maintenance et de réparation pour soutenir les établissements d’instruction et d’éducation des FAC, y compris les collèges militaires canadiens.

Recommandation  45

Accroître le financement de base pour les grands projets d’immobilisations, les travaux de construction mineurs et les travaux de maintenance et de réparation dans les collèges militaires canadiens.

Recommandation  46

Conclure un contrat de gestion des installations au Collège militaire royal du Canada, semblable à celui du Collège militaire royal de Saint-Jean.

Haut de page

Haut de page

Détails de la page

2025-07-17