Chapitre 5 - Maintien en incarcération
Titre officiel: Manuel des politiques décisionnelles à l'intention des commissaires,
Chapitre 5. Maintien en incarcération
Politique 5.1 Maintien en incarcération
Entrée en vigueur
2024-01-02
Cadre législatif
Charte canadienne des droits des victimes, article 15.
Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, articles 99(1), 100, 100.1, 101, 107(1), 129, 130, 131 et 132, annexes I et II.
Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, articles 153 et 160.
Loi sur la défense nationale, article 130.
Renvois en vue d'un examen de maintien en incarcération
- Pour qu’il y ait un examen en vue d’un éventuel maintien en incarcération en vertu du paragraphe 130(1) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (LSCMLC), il faut qu’un cas soit renvoyé à la Commission par le Service correctionnel du Canada (SCC) ou par les autorités correctionnelles d’une province ou d’un territoire, conformément à l’article 129 de la LSCMLC.
- Lorsqu’elle reçoit le renvoi, la Commission évalue si elle a le pouvoir d’effectuer un examen de maintien en incarcération en déterminant :
- Dans les cas où la Commission détermine que le renvoi est conforme aux critères énoncés au paragraphe 129(2) ou 129(3) de la LSCMLC, elle informe le délinquant par écrit du renvoi et de la date de l’examen de maintien en incarcération, conformément aux délais prévus au paragraphe 160(1) du Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (RSCMLC).
- Un cas est considéré comme ayant été renvoyé le jour où le renvoi est reçu par la Commission.
Retrait d’un renvoi
- Toute demande de retrait d’un renvoi aux fins d’un maintien en incarcération doit être faite par écrit et provenir de l’autorité ayant effectué le renvoi et elle doit inclure les motifs du retrait.
- Les motifs d’un retrait peuvent comprendre, sans toutefois s’y limiter, les situations suivantes :
- de nouveaux renseignements indiquent que les critères en vigueur au moment du renvoi n’étaient pas remplis;
- la date prévue pour la libération d’office du délinquant a changé.
- La Commission a le pouvoir discrétionnaire d’accepter ou de rejeter une demande de retrait d’un renvoi.
Examen provisoire
- Lorsque, conformément aux alinéas 129(5)b) et 129(5)c) de la LSCMLC, le commissaire du SCC renvoie le dossier d’un délinquant au président en vertu du paragraphe 129(3) de la LSCMLC et qu’il n’est pas possible d’effectuer un examen de maintien en incarcération avant la date prévue pour la libération d’office du délinquant, la Commission effectue un examen provisoire afin d’éviter de perdre sa compétence.
- Les examens provisoires sont effectués dans le délai applicable énoncé au paragraphe 129(5) de la LSCMLC.
- Conformément au paragraphe 129(7) de la LSCMLC, la Commission détermine si, d’après les renseignements fournis, il y a matière à procéder à un examen de maintien en incarcération.
- La Commission peut effectuer un examen de maintien en incarcération immédiatement après l’examen provisoire si elle est convaincue :
- qu’elle a à sa disposition tous les renseignements pertinents et que ceux‑ci ont été communiqués au délinquant conformément à la politique 1.4 (Communication de renseignements aux délinquants);
- que les garanties procédurales ont été respectées;
- que le délinquant est d’accord pour procéder à l’examen.
- Dans les cas où l’examen de maintien en incarcération n’est pas effectué immédiatement après l’examen provisoire, il doit se faire le plus tôt possible et au plus tard quatre semaines après le renvoi du cas à la Commission, sauf si le délinquant demande un report.
- Des indications concernant les reports d’examen sont fournies dans la politique 10.4 (Reports).
Critères et processus décisionnels
- Les commissaires évaluent tous les renseignements pertinents disponibles conformément à la politique 2.1 (Processus décisionnel en matière de mise en liberté sous condition) afin de déterminer si les critères législatifs relatifs à la décision en question sont remplis.
- Conformément au paragraphe 130(3) de la LSCMLC, la Commission peut ordonner un maintien en incarcération si elle est convaincue :
- dans le cas où le délinquant purge une peine d’emprisonnement pour une infraction visée à l’annexe I de la LSCMLC, ou qui y est mentionnée et qui est punissable en vertu de l’article 130 de la Loi sur la défense nationale, que le délinquant commettra, s’il est mis en liberté avant l’expiration légale de sa peine :
- soit une infraction causant la mort ou un dommage grave à une autre personne;
- soit une infraction d’ordre sexuel à l’égard d’un enfant;
- dans le cas où le délinquant purge une peine d’emprisonnement pour une infraction visée à l’annexe II de la LSCMLC, ou qui y est mentionnée et qui est punissable en vertu de l’article 130 de la Loi sur la défense nationale, que le délinquant commettra, s’il est mis en liberté avant l’expiration légale de sa peine, une infraction grave en matière de drogue;
- dans le cas où le dossier a été renvoyé au président par le commissaire du SCC en vertu du paragraphe 129(3) ou 129(3.1) de la LSCMLC, que le délinquant commettra, s’il est mis en liberté avant l’expiration légale de sa peine :
- soit une infraction causant la mort ou un dommage grave à une autre personne;
- soit une infraction d’ordre sexuel à l’égard d’un enfant;
- soit une infraction grave en matière de drogue.
- dans le cas où le délinquant purge une peine d’emprisonnement pour une infraction visée à l’annexe I de la LSCMLC, ou qui y est mentionnée et qui est punissable en vertu de l’article 130 de la Loi sur la défense nationale, que le délinquant commettra, s’il est mis en liberté avant l’expiration légale de sa peine :
- Lorsqu’ils déterminent si le délinquant est susceptible de commettre une infraction de nature à causer la mort ou un dommage grave à une autre personne, une infraction d’ordre sexuel à l’égard d’un enfant ou une infraction grave en matière de drogue, les commissaires prennent en considération tous les facteurs pertinents, y compris ceux énumérés à l’article 132 de la LSCMLC.
- Les renseignements fiables concernant les tendances sexuelles du délinquant au sens de l’alinéa 132(1.1)b) de la LSCMLC peuvent comprendre, sans toutefois s’y limiter, les renseignements des antécédents criminels du délinquant et des rapports psychologiques du délinquant et ceux provenant des victimes qui démontrent les infractions sexuelles récurrentes à l’égard de jeunes de moins de 18 ans.
- Les examens de maintien en incarcération sont effectués dans le délai applicable énoncé au paragraphe 160(2) du RSCMLC, sauf si le délinquant demande un report.
Détermination du dommage grave
- Lors d’un examen de maintien en incarcération, les commissaires déterminent si le délinquant a causé un dommage grave à une autre personne en considérant tous les facteurs pertinents, y compris, sans toutefois s’y limiter :
- si l’infraction a entraîné une invalidité, une incapacité, un défigurement ou une diminution de longue durée de la qualité de la vie;
- la gravité des blessures subies par la victime, comme indiqué par les soins médicaux demandés ou nécessaires;
- la nature de l’infraction et les circonstances de celle-ci, et en particulier la présence de gestes de brutalité, de force excessive, de violence gratuite ou d’un comportement sexuel déviant;
- l’utilisation d’une arme pour blesser ou menacer la victime;
- si la victime a été soumise à des mauvais traitements ou à des comportements terrorisants prolongés ou répétés;
- toute caractéristique de la victime qui la rendait vulnérable.
Libération d’office
- Dans les cas où la Commission détermine que les critères pour le maintien en incarcération énoncés au paragraphe 130(3) de la LSCMLC ne sont pas remplis, le délinquant bénéficiera d’une libération d’office.
- Des indications concernant l’imposition, la modification et l’annulation de conditions spéciales, ainsi que la modification de conditions automatiques et la soustraction du délinquant à leur application, sont fournies dans les politiques 6.1 (Conditions de la mise en liberté) et 6.2 (Libération d’office – Assignation à résidence).
Libération d’office à octroi unique
- Conformément au paragraphe 130(4) de la LSCMLC, dans les cas où la Commission n’ordonne pas un maintien en incarcération, elle peut ordonner une libération d’office à octroi unique si elle est convaincue, à la fois :
- qu’au moment du renvoi, le délinquant purge une peine infligée pour une infraction visée à l’annexe I ou II de la LSCMLC, ou mentionnée à l’une ou l’autre de celles-ci et qui est punissable en vertu de l’article 130 de la Loi sur la défense nationale;
- dans le cas d’une infraction visée à l’annexe I de la LSCMLC, ou y est mentionnée et est punissable en vertu de l’article 130 de la Loi sur la défense nationale, que l’infraction a causé la mort ou un dommage grave à une autre personne ou est une infraction d’ordre sexuel à l’égard d’un enfant.
- Lorsqu’ils déterminent s’il convient d’ordonner une libération d’office à octroi unique, les commissaires prennent en considération tous les facteurs pertinents, y compris, sans toutefois s’y limiter :
- l’historique des nouvelles infractions du délinquant et des suspensions ou des révocations de la liberté du délinquant pendant les périodes de liberté sous condition;
- des données indiquant que le délinquant a été condamné à maintes reprises pour des infractions analogues;
- la réceptivité du délinquant aux programmes et aux interventions;
- la mesure dans laquelle le plan de libération et les stratégies de surveillance dans la collectivité qui ont été établis pour le délinquant réduisent au minimum le risque de perpétration d’une infraction avec violence, d’une infraction d’ordre sexuel à l’égard d’un enfant ou d’une infraction grave en matière de drogue.
Examen après l’imposition d’une peine supplémentaire
- Conformément au paragraphe 130(3.2) de la LSCMLC, dans les cas où la Commission a ordonné un maintien en incarcération et que le délinquant est condamné à une peine supplémentaire qui entraîne une nouvelle date d’expiration du mandat, laquelle est postérieure à la date d'expiration du mandat en vigueur lorsque le maintien en incarcération a été ordonné :
- soit la Commission effectue un examen de l’ordonnance de maintien en incarcération dans le mois qui suit la date à laquelle elle a été avisée de la peine supplémentaire si la date de la libération d’office est déjà passée ou tombe dans la période de neuf mois qui suit;
- soit l’ordonnance est annulée, si la date de la libération d’office est postérieure d’au moins neuf mois à celle de la condamnation.
- Dans les cas où la Commission effectue un examen de l’ordonnance de maintien en incarcération en vertu de l’alinéa 130(3.2)a) de la LSCMLC, elle :
- soit confirme l’ordonnance et interdit la mise en liberté du délinquant avant l’expiration de la peine visée par l’ordonnance;
- soit modifie l’ordonnance et interdit la mise en liberté du délinquant avant la nouvelle date d’expiration du mandat.
- La Commission n’est pas tenue d’examiner le cas en entier étant donné que l’ordonnance est toujours en vigueur et que, en vertu des paragraphes 131(1) et 131(1.1) de la LSCMLC, un réexamen complet est effectué, selon le cas, dans l’année ou les deux ans suivant la date à laquelle le maintien en incarcération a été ordonné ou l’ordonnance a été confirmée.
Réexamens annuels et bisannuels d’une ordonnance de maintien en incarcération
- La Commission peut à tout moment réexaminer une ordonnance de maintien en incarcération, et elle est expressément tenue de le faire :
- soit dans l’année suivant la prise de l’ordonnance et tous les ans par la suite, en vertu du paragraphe 131(1) de la LSCMLC;
- soit dans les deux ans suivant la prise de l’ordonnance, et tous les deux ans par la suite, dans les cas où l’ordonnance est prise à l’égard d’un délinquant purgeant une peine infligée pour une infraction mentionnée à l’annexe I de la LSCMLC ayant causé la mort ou un dommage grave, en vertu du paragraphe 131(1.1) de la LSCMLC.
- Les commissaires déterminent si de nouvelles informations au sujet du délinquant permettent de modifier l’ordonnance ou d’en prendre une autre.
- Dans les cas où la Commission a ordonné le maintien en incarcération tout en convenant d’effectuer un réexamen de cette ordonnance lorsque le délinquant aurait participé avec succès à un programme ou à une intervention, les commissaires devraient évaluer les progrès accomplis par le délinquant relativement à ses facteurs de risque et ses besoins identifiés.
- En vertu du paragraphe 131(3) de la LSCMLC, au terme du réexamen d’une ordonnance de maintien en incarcération, la Commission, selon le cas :
- confirme l’ordonnance de maintien en incarcération;
- ordonne la libération d’office en l’assortissant d’une assignation à résidence dans un établissement résidentiel communautaire (ERC), un établissement psychiatrique ou, aux termes du paragraphe 131(4) de la LSCMLC, un pénitencier, si elle est convaincue qu’une telle condition est raisonnable et nécessaire pour protéger la société et faciliter la réinsertion sociale du délinquant après son incarcération au cours de la période prévue pour la libération d’office;
- ordonne la libération d’office sans l’assortir d’une assignation à résidence.
- En vertu du paragraphe 130(6) de la LSCMLC, dans les cas où la Commission ordonne la libération d’office, il s’agit d’une libération d’office à octroi unique.
Ordonnance de libération d’office assortie d’une assignation à résidence à la suite d’une période de maintien en incarcération
- Lorsqu’ils déterminent s’il y a lieu d’ordonner la libération d’office du délinquant en l’assortissant d’une assignation à résidence, les commissaires prennent en considération tous les facteurs pertinents, y compris, sans toutefois s’y limiter :
- si le délinquant a besoin d’une réinsertion graduelle dans la société;
- si l’hébergement est considéré comme un besoin lié au risque et si une assignation à résidence répondrait à ce besoin.
Assignation à résidence dans un établissement psychiatrique ou un pénitencier
- Lorsqu’ils examinent s’il y a lieu d’ordonner que le délinquant réside dans un établissement psychiatrique ou un pénitencier, les commissaires devraient considérer qu’un établissement psychiatrique ou un pénitencier peut offrir un accès limité à la collectivité et :
- qu’on ne devrait y avoir recours que si le délinquant bénéficiera de programmes de traitement qui faciliteront la gestion du risque et favoriseront sa réinsertion sociale;
- que ce type de placement devrait s’inscrire dans un plan en plusieurs étapes prévoyant en fin de compte une assignation à résidence dans un ERC ou la libération d’office non assortie d’une assignation à résidence.
Réexamens annuels et bisannuels d’une ordonnance de libération d’office assortie d’une assignation à résidence
- La Commission peut à tout moment réexaminer une ordonnance de libération d’office assortie d’une assignation à résidence, et elle est expressément tenue de le faire :
- soit dans l’année suivant l’ordonnance et tous les ans par la suite;
- soit dans les deux ans suivant l’ordonnance et tous les deux ans par la suite, si l’ordonnance est prise à l’égard d’un délinquant purgeant une peine infligée pour une infraction mentionnée à l’annexe I de la LSCMLC ayant causé la mort ou un dommage grave.
- En vertu de l’alinéa 131(3)b) de la LSCMLC, au terme du réexamen d’une ordonnance d’assignation à résidence, la Commission, selon le cas :
- confirme ou modifie l’ordonnance d’assignation à résidence;
- ordonne la libération d’office sans l’assortir d’une assignation à résidence.
Décision et motifs
- Des indications concernant les motifs de la décision sont fournies dans la politique 2.1 (Processus décisionnel en matière de mise en liberté sous condition).
- Les motifs de la décision comprennent également :
- de l’information sur l’existence de programmes de surveillance de nature à protéger le public et à aider à contrôler le risque que pourrait présenter le délinquant sinon, le cas échéant;
- une analyse de tous les facteurs énumérés aux paragraphes 132(1), 132(1.1) et/ou 132(2) de la LSCMLC qui sont pertinents au cas.
Renvois
- Manuel des politiques décisionnelles
1.3 Évaluations psychologiques et psychiatriques
1.4 Communication de renseignements aux délinquants
2.1 Processus décisionnel en matière de mise en liberté sous condition
6.1 Conditions de la mise en liberté
6.2 Libération d’office – Assignation à résidence
6.3 Privilèges de sortie
9.1 Audiences
9.1.1 Audiences adaptées à la culture
10.3 Ajournements
10.4 Reports
- Directives du commissaire (DC) du Service correctionnel du Canada
DC 705-8 Évaluation de l’existence d’un dommage grave
DC 712-2 Maintien en incarcération